1. RECHERCHE : Le récit de pratique, Maryse Gagné, CSDM
L’image à nu, Luc St-Hilaire, Université Laval
CultURE DE : La place des femmes, Réseau In-Terre-Actif
LA PAIX La paix intérieure, Linda Pichette, Collège Jésus-Marie
association québécoise des éducatrices
et éducateurs spécialisés en arts plastiques
Numéro 67 Août 2009
2. Nommée en l’honneur d’une pionnière de l’éducation artistique
au Québec, cette bourse d’une valeur de 500$, vise à reconnaître
l’engagement pédagogique des finissants au baccalauréat en
enseignement des arts des universités québécoises.
Étape 1 : Formulaire de participation
Téléchargez le formulaire de participation disponible
sur le site de l’AQÉSAP (http://aqesap.org).
Renseignements : 819-424-3624.
Étape 2 : Présentation du projet
Le formulaire sert de guide pour la présentation des projets.
Assurez-vous de suivre toutes les étapes.
Étape 3 : Sélection des dossiers
Un comité de sélection se réunit en juin pour déterminer le lauréat.
La bourse est remise lors du congrès de l’AQÉSAP, en novembre.
Étape 4 : Publication
Avec l’autorisation des participants, les projets présentés pourront faire
l’objet d’une publication sur le site internet de l’AQÉSAP.
Information complémentaire
Pour toute information complémentaire, contacter Vivian Langelier,
membre du conseil d’administration de l’AQÉSAP, à l’adresse suivante :
vivianlangelier@videotron.ca
BOURSE
MONIQUE-BRIÈRE
Photo : Eddy Tardif, 2007
RECHERCHE : LE RÉCIT DE PRATIQUE, MARYSE GAGNÉ, CSDM
L’IMAGE À NU, LUC ST-HILAIRE, UNIVERSITÉ LAVAL
CULTURE DE : LA PLACE DES FEMMES, RÉSEAU IN-TERRE-ACTIF
LA PAIX LA PAIX INTÉRIEURE, LINDA PICHETTE, COLLÈGE JÉSUS-MARIE
Association québécoise des éducatrices
et éducateurs spécialisés en arts plastiques
Numéro 67 Août 2009
Éditeur
AQÉSAP (Association québécoise des
éducatrices et éducateurs spécialisés en
arts plastiques)
Consultez notre site:
http://aqesap.org/
Rédactrice en chef
France Joyal, UQTR
France.Joyal@uqtr.ca
Recherchistes
Francine Auger
Collaborateurs
Maryse Gagné, Danut Zbarcea,
Luc St-Hilaire, Javier A. Escamilla,
Richard Grenier, Lise Robichaud,
Linda Pichette, Catherine Barlow,
Patrick Poirier, Brigitte Besnard,
Francine Auger
Comité de lecture
Alain Savoie, Francine Auger, France Joyal
Conception, montage
ADN communication
Impression
Imprimerie ArtGraphique,
entreprise certifiée FSC
(Forest Stewardship Council).
En achetant des produits avec une
étiquette de FSC vous soutenez la
gestion de la croissance responsable
de la forêt dans le monde entier.
Source : Greenpeace
(http://www.greenpeace.org/canada
ou http://www.greenpeace.org)
ISSN : 978-2-920710-20-7
Faire part
(détail de l’œuvre)
Lise Robichaud
Enveloppes, pétales
de roses et bâtonnets
Œuvre présentée
dans le cadre de
l’exposition «Corres-
pondance pour la paix»
(Barhami et Robichaud)
à la Galerie d’art
de l’Université de
Moncton,
du 30 janvier
au 3 mars 2002
3. Numéro67Août2009
3
MOTDUPRÉSIDENT
Nous sommes maintenant 536 membres, ensei-
gnants, éducateurs, collaborateurs et partenaires
à partager la même mission: promouvoir un ensei-
gnement des arts plastiques de qualité à tous les
ordres d’enseignement au Québec. Toujours sou-
cieux de rassembler et de soutenir nos membres,
nous avons inclus à notre plan d’action de cette
année, les objectifs d’accroître notre visibilité et
nos partenariats, de sensibiliser les instances dé-
cisionnelles, d’organiser des activités régionales,
des sorties culturelles et des voyages de formation
et, surtout, de mobiliser les acteurs du domaine
de l’enseignement des arts. Depuis le congrès de
novembre 2008, les membres du CA ont accom-
pli un travail remarquable. Grâce à cette équipe
expérimentée, à notre adjointe administrative et
à notre agente de développement, il m’est permis
de vous annoncer quelques bonnes nouvelles en
ce mi-mandat:
• un comité travaille actuellement à modifier
certains statuts et règlements pour les adapter
à la nouvelle réalité de notre association. Nos
Sages seront consultés avant de vous propo-
ser ces changements lors de notre prochaine
assemblée générale annuelle (AGA);
• une deuxième exposition des membres artis-
tes de l’AQÉSAP aura lieu à la Galerie du Ma-
noir de Tonnancour de Trois-Rivières en mai
2010;
• la nouvelle Galerie Virtuelle AQÉSAP vous
permettra de devenir l’un de nos exposants
annuels;
• un voyage en Toscane est prévu pour l’été
2010. Tous les détails sur votre site: aqesap.
org
• un comité syndicat-spécialistes a été mis sur
pied par votre association afin de se préparer
à la prochaine ronde de négociations
• Brault et Bouthillier, Omer De Serres, Voyages
Tours Étudiants ont renouvelé leur entente
avec l’AQÉSAP. Les Éditions Image de l’Art
deviennent notre nouveau partenaire web.
Le Congrès AQÉSAP 2009, Créer la différence
pour mieux l’apprécier, aura lieu les 12, 13 et 14
novembre à l’hôtel Hilton de Québec. Nous vous
offrirons une activité d’accueil époustouflante, un
pré-congrès axé sur la différenciation en arts plas-
tiques et un congrès bien relevé. Comme vous le
constatez, votre association est toujours en effer-
vescence!
Merci à France Joyal, pour ce retour au Vision esti-
val. Bonne lecture à tous et bonne rentrée!
Daniel Charest
Président AQÉSAP
Franchi
le caP
des 500
4. Numéro67Août2009
4
Dans le dernier éditorial, j’annonçais brièvement l’orien-
tation que l’AQÉSAP souhaite donner à sa revue, notre
revue. En parlant de recherche et de pratique, j’évo-
quais la mise en place d’un principe d’alternance pour
que chercheurs et praticiens trouvent dans VISION des
textes qui les interpellent. D’emblée, cette image d’al-
ternance suppose une distinction très nette entre re-
cherche et pratique. On voit parfois s’établir ce genre
de distinction dans les universités, dans les départe-
ments d’éducation, par exemple, où chaque créneau est
clairement établi et franchement séparé des autres. La
didactique, la pédagogie, l’apprentissage (surtout ses
théories) ou l’évaluation constituent des territoires bien
distincts d’où il peut s’avérer difficile de sortir. Souvent,
dans ces créneaux, des chercheurs mènent leurs recher-
ches en procédant à des enquêtes « sur le terrain » à
l’aide de questionnaires assez détaillés. Or, de l’avis de
Kaufmann (1996)1
, ce type de recueil de données «admi-
nistré d’en haut» tend à instaurer une hiérarchie entre
l’enquêteur et l’enquêté, ce qui n’est rien pour amenui-
ser «le fossé entre l’univers de la recherche scientifique
et celui de la pratique» (Huberman, 1990, p. 2)2
. Mais
qu’en est-il en arts? Cette distinction entre recherche et
pratique est-elle aussi marquée?
Le domaine des arts a cette formidable chance d’être
encore jeune dans l’histoire de la recherche scientifi-
que. L’entrée, en 1998, d’un programme doctoral en arts
en sol québécois est un bon indice de cette fraîcheur.
Les dix premières années de vie du programme permet-
tent à Bruneau et Villeneuve (2007)3
d’observer que «la
confrontation du théorique et de la pratique encourage
une polémique qui repose le plus souvent sur des re-
présentations fausses ou incomplètes de ce qu’est une
pratique de recherche». Une pratique de recherche.
Remarquez la formulation qui rallie d’un seul coup les
deux univers. Et cela n’est pas si étonnant en arts quand
on sait que, bien souvent, le chercheur pratique et que
le praticien cherche. C’est dire que la distinction entre
recherche et pratique n’est pas si tranchante en arts, ce
qui est tout à fait heureux.
Mais dans tout ceci, où se situe l’enseignant en arts, lui
qui se trouve à la jonction de la pratique artistique et
de la pratique enseignante, lui dont les élèves sont le
prolongement et qui leur sert de «locomotive», comme
le dit si bien Maryse Gagné dans ce numéro (p. 7)? Nous
allons le découvrir en texte et en images, à travers les
contributions de chercheurs, de praticiens, de cher-
cheurs-praticiens, d’artistes-chercheurs, d’enseignants,
d’artistes ou d’artistes-enseignants, enfin de toutes ces
personnes qui se
consacrent à la
transmission de leur
passion pour la créa-
tion. Pour ce numéro
à tendance «recherche», nous avons opté pour la pu-
blication de plusieurs contributions afin de stimuler le
lectorat en lui présentant la plus grande panoplie de
textes possible dans l’espace restreint dont nous dispo-
sions (40 pages). Pour ce faire, nous avons fait face au
problème de la multitude. Ceci est en fait un très «beau
problème», comme le dit l’expression populaire, car il
signifie que le réseau de l’enseignement des arts foi-
sonne de collaborateurs et que VISION prendra l’envol
que nous lui souhaitons. Il nous est permis de penser
que graduellement, nous pourrons produire une revue
plus étoffée qui trouvera sa place sur les rayons des bi-
bliothèques.
En arts, la coupure entre recherche et pratique n’est pas
si franche, nous avons intégré des contenus qui allient
les deux, soit parce qu’il sont appuyés sur une prati-
que pédagogique, comme la contribution du réseau In-
Terre-Actif (p. 19), soit parce qu’ils peuvent inspirer
une démarche pédagogique, comme le texte de Danut
Zbarcea (p. 11) ou celui de Lise Robichaud (p. 24) ou
qu’ils proposent une approche méthodologique, comme
l’apport de Maryse Gagné (p. 7). Nous avons également
tenu à proposer des références en matière d’image et de
pédagogie avec les contributions de St-Hilaire (p. 15)
et de l’organisme Carrefour-Éducation (p. 34) tout en
gardant le cap sur le deuxième objectif que nous avions
fixé il y a quelques mois, soit celui de présenter des
dossiers thématiques. Dans ce numéro, la «Culture de la
paix» se trouve dans la mire. Quelques-unes des contri-
butions ci-haut mentionnées ainsi que celle de Linda
Pichette (p. 28) nous indiquent que la paix se trouve
autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Enfin, comme dans
le numéro précédent, une place est réservée à la relève;
elle est occupée cette fois par Catherine Barlow qui dia-
logue avec ses élèves au sujet de l’art (p. 23). Avec ces
contenus nous espérons pouvoir contribuer un tant soit
peu, à la définition de la recherche en éducation artisti-
que. Au lecteur, maintenant, d’y prendre part.
France Joyal,
Université du Québec à Trois-Rivières
Rédactrice en chef
ÉDITORIAL
1 Jean-Claude Kaufmann est sociologue. Il s’intéresse aux problématiques de l’identité, de la socialisation et de la subjectivité.
2 Michael Huberman est professeur de pédagogie à l’Université de Genève.
3 Monik Bruneau (danse) et André Villeneuve (musique) enseignent tous deux au doctorat en Étude et pratique des arts à l’UQAM.
5. Numéro67Août2009
5
3 MOT DU PRÉSIDENT
4 ÉDITORIAL
6 IN MEMORIAM
7 LE RÉCIT DE PRATIQUE
COMME OUTIL DE RECHECHE :
UNE ILLUSTRATION
par Maryse Gagné, Commission scolaire de Montréal
11 ARCH CONOLOGIE
par Danut Zbarcea, Université Concordia
15 DES IMAGES ET
DES HUMAINS
par Luc St-Hilaire, Université Laval
19 RECHERCHE PÉDAGOGIQUE :
CULTIVER LA PAIX PAR UNE
APPROCHE ARTISTIQUE
par Richard Grenier et Javier Escamilla,
au RÉSEAU IN-TERRE-ACTIF
24 UN DUO
POUR LA PAIX
par Lise Robichaud, Université de Moncton
28 CULTIVER LA PAIX
INTÉRIEURE
par Linda Pichette, Collège Jésus-Marie de Sillery
33 RÉFLEXION PARTAGÉE SUR L’ART,
LE LANGAGE DE L’HOMME
par Catherine Barlow, UQTR
34 LE MEILLEUR DES RESSOURCES
ÉDUCATIVES EN QUELQUES
CLICS
Carrefour-éducation
SOMMAIRE
I
6. Numéro67Août2009
6
Nous souhaitons, par ce court témoignage, ren-
dre hommage à monsieur Paul Bourget qui nous a
quittés prématurément le 20 février 2009.
Époux de madame Francine Gagnon-Bourget, ré-
dactrice en chef de Vision de 1988 à 2008, Paul
Bourget a contribué au développement de l’AQÉ-
SAP grâce à sa grande ouverture, son calme, sa
bonne humeur, sa gentillesse et son implication
indéfectible auprès de son épouse.
À LA
DOUCE
MÉMOIRE
DE PAUL
BOURGETMerci Paul, on ne t’oublie pas!
Les membres de l’AQÉSAP
IN MEMORIAM
7. Numéro67Août2009
7
LE RÉCIT
DE PRATIQUE
COMME OUTIL
DE RECHERCHE :
UNE ILLUSTATION
MARYSE GAGNÉ, COMMISSION SCOLAIRE DE MONTRÉAL
ÉTUDIANTE AU DOCTORAT EN ÉTUDES DES ARTS, UQÀM
EXTRAITS DU BLOGUE : WWW.MARYSEGAGNE.COM
Après la lecture d’un texte d’Alain Montesse
(2002), j’ai été interpellée par le thème des arts de
la mémoire. J’y ai vu intuitivement un lien pos-
sible avec le récit de pratique. En préparant les
documents relatifs à un projet réalisé avec mes
élèves et que je comptais relater dans ce récit de
pratique, j’ai pu voir dans le projet lui-même un
autre lien avec les arts de la mémoirei. C’est donc
dans sa dimension gigogne que j’aborde ce thème
dans mon blogue; j’en présente ici quelques ex-
traits.
Émergences
Le 22 décembre 2006, l’école où j’enseigne depuis
8 ans était la proie des flammes. Une collègue
amie qui était sur place m’informait des événe-
ments, par téléphone cellulaire. Je pouvais donc
«voir», avec ses descriptions, la toiture de l’école
qui flambait. Je pouvais présumer, grâce à ma mé-
moire des lieux, de quelle classe, quel bureau et
quels documents étaient en train de disparaître.
Ma mémoire était sollicitée à maints égards. Lors-
que tout s’écroule, qu’il ne reste plus rien, il nous
reste à associer des lieux avec des images, dans
notre mémoire, pour se rappeler de ce qu’on a per-
du. Il nous faut construire un édifice en pensée,
un palais de mémoire. «Aussi, pour exercer cette
faculté du cerveau, doit-on, sur les conseils de
Simonide, choisir en pensée des lieux distincts,
se former des images des choses qu’on veut rete-
nir, puis ranger ces images dans les divers lieux»
(Montesse, 2002). Je pensais donc à tout ce que
je perdrais dans l’incendie. Des ordinateurs, des
caméras vidéo, des livres. Il y avait aussi mon pré-
cieux disque dur externe, ma mémoire profession-
nelle. Je réalisais que j’avais déposé sur ce disque
des années de projets, de réflexions, de recher-
ches et qu’il y avait bien longtemps que je n’avais
pas sauvegardé ces documents ailleurs. Montesse
(2002) soutient que notre mémoire interne se vide
dans les ordinateurs… Je risquais un «trou de mé-
moire». Je savais déjà qu’un gouffre séparerait do-
rénavant l’avant et l’après. Je sentais que ma vie
professionnelle venait de basculer.
La proposition
Nous avons dû déménager vers une autre école.
Le mot d’ordre de la direction était d’apporter le
minimum de matériel, ce que j’ai fait. J’avais mon
cher disque dur externe, ma mémoire artificielle,
et ma mémoire naturelle.
Je savais que je pouvais enseigner
les mains vides, convaincue que
l’essentiel est en moi et dans ma
relation avec mes élèves.
Je me suis installée dans un nouveau local, dans
un nouvel établissement. Avec mon groupe de
quatrième et cinquième secondaire, il était prévu
qu’au retour du congé des fêtes, nous débuterions
un projet de vidéo d’art. Ma priorité était de trou-
8. Numéro67Août2009
8
RECHERCHE
ver un sujet qui les interpelle. J’avais beau cher-
cher, mes pensées revenaient toujours aux événe-
ments du 22 décembre. J’avais perdu mes repères.
Je m’ennuyais de mes deux armoires de bois rem-
plies de trésors pour les élèves. Je m’ennuyais du
nain de jardin sur le rebord de mon bureau. J’avais
encore mes élèves, mais notre sentiment d’appar-
tenance et notre enthousiasme semblaient bien
émoussés.
Si j’avais été seule dans un atelier,
mon travail aurait certainement
porté, d’une façon ou d’une
autre, l’empreinte de ce boulever-
sement.
Tout naturellement j’ai décidé de me servir de
cet épisode pour le projet de vidéo d’art avec mes
élèves. J’ai choisi de travailler sur ce thème car je
sentais que je n’avais pas le choix. J’ai, sans le sa-
voir, fait appel à mon théâtre de mémoire. Giulio
Camillo (Yates, 1975) donne beaucoup de noms à
son Théâtre; il dit tantôt que c’est un esprit ou une
âme construite, tantôt que c’est une âme pourvue
de fenêtresii. Il prétend que tout ce que l’esprit hu-
main peut concevoir et que nous ne pouvons pas
voir de nos yeux corporels, peut s’exprimer par
certains signes matériels de telle sorte que le spec-
tateur peut percevoir d’un seul coup d’œil tout ce
qui, autrement, reste caché dans les profondeurs
de l’esprit humain.
Ma tâche était de transférer à mes élèves une sorte
de sentiment d’urgence, un besoin de «faire». Il
fallait que je les conduise à s’approprier ma pro-
position pour qu’elle les habite à leur tour. Il fal-
lait que je conduise chacun à son théâtre de mé-
moire.
Je prépare mes cours avec la visée
de réduire l’écart entre les poSsibi-
lités actuelles des élèves et mes aspira-
tions, pour que la matérialisation du
projet soit, le plus possible, en adé-
quation avec mes attentes.
Même si ultérieurement je vais lâcher prise pour
laisser une grande place à la créativité des élèves,
je leur présente le projet pour me faire plaisir, à
moi. Je pense à ce que je veux qu’ils fassent en
terme de poésie, de questionnement, de créativité
et de dépassement. Je les encadre donc beaucoup.
J’apporte des livres, je prépare des exercices, des
visionnements, je leur fais faire des recherches, je
les questionne, etc.
Si je suis directive, ce n’est pas pour imposer
mes idées mais pour amener mes élèves dans la
direction que je souhaite qu’ils prennent. Je suis
la grande locomotive, je choisis avec soin cha-
que escale. Je les amène pas à pas vers le début
de leur réalisation. Bien sûr, je ne fais pas moi-
même le projet que je propose, mais je prends
plaisir à créer du matériel didactique; je demeu-
re en contact avec la matière. Pour ce projet, j’ai
proposé à ma stagiaireiii de faire avec moi une
banque d’effets spéciaux à la prise de vue. Nous
avons fait des prises de vues avec divers objets
comme des contenants de verre givré, miroirs dé-
formants, tissus, eau colorée, etc. pour montrer la
diversité des effets possibles avec peu de moyens.
Nous avons ensuite montré ces images aux élèves
en leur demandant de deviner avec quels objets
elles avaient été faites. Ces épisodes où je prépare
du matériel didactique sont très importants pour
moi, car il m’est possible ainsi de «faire».
Le projet
La proposition était la suivante: réalisation d’un
court-métrage artistique inspiré des émotions re-
liées à l’événement du 22 décembre 2006iv. J’ai
invité mes élèves à se remémorer, en silence et in-
dividuellement, l’émotion ou le sentiment le plus
fort qu’ils pouvaient relier à cette expériencev. Je
sentais qu’il y avait là des bases intéressantes pour
construire un scénario, mais je n’étais pas prête à
les laisser aller; je ne voulais pas de récits linéaires.
Je voulais les amener à se détacher de l’événement
en lui-même et à se centrer sur l’émotion générée
par celui-ci. Je voulais les amener à «faire tomber
la barrière qui sépare le présent du passé, [à] jeter
un pont entre le monde des vivants et cet au-delà
auquel retourne tout ce qui a quitté la lumière du
soleil» (Vernant, 1991). Je les ai invités à élaborer
une carte d’organisation d’idées dans leurs cahiers
de traces en plaçant l’émotion choisie au centre,
et en lui associant les mots qui leur passaient par
la tête, sans censure. Par la suite, par équipes, ils
9. Numéro67Août2009
9
RECHERCHE
ont mis leurs réflexions en commun. Il s’agissait
d’expliquer leurs idées aux autres membres de
l’équipe pour finalement choisir l’émotion qui les
rejoindrait tous. Une fois ce choix arrêté, je leur ai
demandé d’associer l’émotion choisie à une méta-
phore et cette métaphore, à un lieu. C’est à pos-
teriori que j’ai réalisé que le concept était étran-
gement relié aux artes memoriae, anciens arts de
la mémoire. D’après Cicéron «Les lieux sont les
tablettes de cire sur lesquelles on écrit; les images
sont les lettres qu’on y trace» (Yates, 1975). Dans
son livre sur Anselm Kiefer, Daniel Arasse (2001)
souligne la relation ancienne que ce type d’art
de la mémoire a entretenue avec les arts visuels.
Elle permet de percevoir la logique qui sous-tend
l’association des lieux et des images qui y sont
placées. Dans leur réalisation, les élèves ont as-
socié des images fixes et des images mouvantes
à des lieux. Les associations semblent une sorte
«d’allégorie privée» (Arasse, 2001). Selon Arasse,
l’ars memoriae est un art intérieur, à usage per-
sonnel; ses lieux comme ses images, fruits d’une
fabrication intime, ont une fonction avant tout
individuelle et ne sont destinées qu’à rappeler à
leur inventeur des arguments et des notions spé-
cifiques. Comme le montrent certains traités, les
notions incorporées dans une image de mémoire
ne le sont qu’au terme d’un bricolage personnel
où l’incongruité des objets mis en relation contri-
bue efficacement à la mémorisation. De ce fait, le
fonctionnement d’une image de mémoire ne peut
être explicite que pour son auteur-utilisateur. Il
me semble, avec le recul, que l’expérience nous a
tous marqués. La proposition, dans son contexte,
se prêtait remarquablement aux arts de la mémoi-
re. Selon Franc Schuerewegen, au départ, il y a un
constat: de la mémoire, nous ne pouvons parler
que sur un mode métaphorique; il nous manque
un langage propre; l’image est notre unique moyen
d’accès. Personne ne dit jamais: « la mémoire est
X». On nous dit toujours: «la mémoire est comme
X, Y, Z...» (Schuerewegen)vi. Sans les avoir enten-
dus auparavant, les mots de Saint-Augustin nous
ont rejoints; j’arrive aux domaines et aux vastes
palais de la mémoire (campos et lata praetoria me-
moriae) où se trouvent les trésors d’innombrables
images, qu’on y a apportées en les tirant de tou-
tes les choses perçues par les sens: y sont déposés
tous les produits de notre pensée, obtenus en am-
plifiant ou en réduisant les perception des sens ou
en les transformant d’une façon ou d’une autre; j’y
trouve aussi tout ce qui y a été mis en dépôt et en
réserve et qui n’a pas été encore englouti et enterré
par l’oubli (Yates 1975).
Élaboration
Les traités de mémoire, les ars memorativa nous
permettent de comprendre un peu mieux les tech-
niques utilisées pour la formation des lieux de mé-
moire. Pour Gesualdo donc, les lieux sont de trois
types: a) les lieux imaginaires qui sont des lieux
inventés de toutes pièces, ils n’existent que dans la
mémoire de leur créateur et, par conséquent, sont
sujets à l’oubli. Ils seraient, en raison de leur faible
fiabilité, peu propices à la mnémotechnie; b) les
lieux naturels, une forêt, une plage, des collines,
ils sont soumis aux changements; c) les lieux ar-
tificiels, constructions de l’homme, lieux solides,
«en dur», ce sont les plus recommandés pour l’art
mnémonique. Le mnémoniste peut en effet les re-
visiter à loisir, ils n’auront pas évolué entre deux
visites (Montesse 2002, p.119). Il semble que nous
puissions ajouter à cette classification des lieux
hybrides, entre nature et artifice: les jardins. Pour
les tournages, les élèves ont opté pour des lieux
artificiels; la piscine Père-Marquette, l’intérieur
et l’extérieur de l’école sinistrée ainsi que l’inté-
rieur et l’extérieur de l’école d’accueil. Dans ces
lieux, des mises en scène diverses, des symboles,
des images et même des imagines agentes (Yates,
1975) ont donné corps à ce travail de mémoire.
À ce stade, toutes les équipes travaillaient encore
dans leurs cahiers de traces. Mon rôle était de ré-
pondre aux questions et de circuler d’une équipe à
une autre pour m’assurer de la bonne progression
de leur réflexion. Je commençais tranquillement à
lâcher prise, sentant que les élèves étaient en train
de s’approprier le projet.
Mon rôle se modifie; je souhaite
avoir donné le bon élan et la
bonne direction aux élèves, mais
je leur laisse le volant; c’est à eux
de jouer.
Toutes les petites locomotives descendent de la
grande locomotive. Les élèves peuvent choisir
leur propre direction. Ils sont prêts. Quand com-
10. Numéro67Août2009
10
RECHERCHE
mence la réalisation proprement dite, ce sont les
élèves qui sont sous les projecteurs. Je sais que je
dois leur faire confiance, car leur projet les habite.
Je suis là à titre de guide, d’experte, de soutien. Je
trouve agréable de les regarder aller. Je peux sug-
gérer des choses et je le fais, mais je respecte leur
travail. Je n’hésite pas à prendre la caméra pour
leur montrer un mouvement ou un angle auquel
ils n’auraient pas pensé. Cette proposition, je la
vois prendre plusieurs formes, souvent insoup-
çonnées. Mon projet vit sa vie, il est sorti de moi,
a transité par mes élèves et il se matérialise enfin.
Au retour des tournages, commence le montage.
Mon rôle est toujours très actif à ce moment, car
mon expérience me dit que les élèves risquent de
se contenter de mettre bout à bout les scènes tour-
nées. Je dois les sensibiliser à l’aspect créatif du
montage vidéo.
Je m’intéresse à leurs productions
comme si c’était les miennes.
Je tiens à ce que les élèves donnent le meilleur
d’eux-mêmes. Je prépare des fiches d’observation
et de suggestions. C’est comme si je devais main-
tenant monter dans chacune des petites locomo-
tives, me mettre à la place du conducteur et faire
des propositions qui vont dans leur direction.
C’est un aller et retour entre ma proposition et
leur réponse. Certains travaux m’impressionnent;
je peux voir l’énorme progression des élèves à
travers leurs réalisations. Ces moments sont pré-
cieux.
J’ai la conviction que les choses es-
sentielles pour moi, celles que j’en-
seigne aux élèves, ont trouvé à vi-
vre et à prendre sens en quelqu’un
d’autre et à le faire progresser.
La fin
À la fin du projet, j’organise un visionnement de
toutes les réalisations. L’année scolaire tire à sa fin
et la projection a lieu au dernier cours de l’année.
La majorité des élèves sont présents malgré une
chaleur suffocante dans la classe, une journée ra-
dieuse à l’extérieur, la fin du secondaire pour plu-
sieurs et l’appel de la nature. Plusieurs ont invité
des amis; ma stagiaire est aussi présente. C’est ma
récompense, la preuve qu’ils se sont investis dans
le projet. Notre projet.
Quand tout est terminé pour les
élèves, moi j’y réfléchis encore.
Quand je me retrouve toute seule, je revois, en
pensée, les moments de la réalisation. Je crois que
si je vois bien les lieux, j’entends encore mieux
des bribes de discussions, je revois les visages,
j’entends des commentaires. «Alors l’ordre des
lieux conserve l’ordre des choses; les images rap-
pellent les choses elles-mêmes. Les lieux sont les
tablettes de cire sur lesquelles on écrit, les ima-
ges sont les lettres qu’on y trace » (Yates 1975). Je
dispose d’une sorte de film de mémoire qui me
conduit à intégrer l’expérience, à m’interroger sur
de grandes et de petites questions, à douter parfois
mais toujours à tenter de m’améliorer. Ces bouts
de films de mémoire peuvent se coller les uns aux
autres car je crois que les projets que je réalise
avec mes élèves me conduisent à d’autres projets
et à d’autres encore. C’est comme une construc-
tion et à mesure que je la construis, je crois bien
que je me construis moi-même (Valéry, dans Gin-
gras-Audet, 1983). Pour Alain Montesse (2002), la
façon dont la cité (à travers le cinéma) se montre
à ses citoyens est un des moyens de maintenir la
mémoire collective. Je crois que, pour les élèves
qui ont réalisé les vidéos et peut-être même pour
ceux qui les ont visionnés, la mémoire des pro-
jets sera dorénavant indissociable de l’événement
réel.
> Notes et références
Gingras-Audet, J.-M. (1983). Paul Valéry et l’activité créatrice. Congrès 1983 Ima-
ginaire et créativité, textes et documents. Congrès 1983 de l’A.Q.P.F. (Association
québécoise des professeurs de français).
Montesse, A. (dir.pub). (2002). Nouvelles technologies et art de la mémoire, Paris,
Éditions 00h00 Zéro heure.
Schuerewegen, F. (?). Université d’Anvers/Université de Nimègue. En ligne: http://
www.texte.ca/int25.pdf Page consultée le 24 novembre 2007
Vernant, J.-P. (1991). Aspects mythiques de la mémoire. dans Arasse, D. (2001),
p.110.
Yates, F. (1975). L’art de la mémoire . Paris : Gallimard.
i L’histoire de Simonide est citée, tel un mythe fondateur, dans de nombreux textes sur
la mémoire.
ii La renommée de Giulio Camillo (né vers 1480) repose sur son occulte théâtre de
la mémoire (voir YATES, F.A., The art of Memory, 1966). D’un simple coup d’œil, le
théâtre de la mémoire pouvait révéler l’entièreté du monde et les secrets de l’univers.
iii J’accueillais, à ce moment, une stagiaire. Je veux souligner sa présence qui a été
d’une grande importance dans ce projet et ce, dans ces circonstances difficiles. Merci
encore Gamine pour ta présence ensoleillée!
iv Contraintes : Thème : émotion/événement du 22 décembre 2006/pendant, après,
maintenant Suggestions : passage, déplacement, voyage, migration et lieux. Durée :
5 minutes. Personnages : 2 personnages principaux, personnages secondaires au
choix. Sans dialogue ou avec dialogues réduits. Écriture synopsis, scénario et décou-
page technique.
* Ce document a été préparé par Gamine Gagnon, stagiaire.
v Saint Augustin, quant à lui, compare la mémoire à un magnifique et somptueux
« palais ». (voir YATES, F.A., The art of Memory, 1966)
vi Schuerewegen, F. (?). Université d’Anvers/Université de Nimègue. En ligne:
http://www.texte.ca/int25.pdf Page consultée le 24 novembre 2007.
11. Numéro67Août2009
11
Arch conologie:
interrogation visuelle sur l’attitude
humaine comme stratégie d’explora-
tion artistique et d’analyse visuelle
éducationnelle
«The environment is yourself
and your action.»
Jidu Khrishnamurti
Considérations préliminaires
ArchIconologie, c’est une recherche qualitative réa-
lisée à partir d’un projet de photographie développé
en 2008. L’objectif principal de cette recherche était
d’explorer des procédés de production artistique pou-
vant faire partie d’une stratégie d’enseignement au
secondaire et au postsecondaire. Cette stratégie vise
le développement d’un esprit interrogatif et critique,
capable de générer un comportement averti à l’égard
de l’exploitation de la connaissance construite dans le
cyberespace, devenu une des composantes essentiel-
les de la réalité de tous les jours. La facilité d’accès des
étudiants aux moyens de représentation (ordinateurs,
téléphones portables branchés à Internet, caméras vi-
déo, etc.) exige la mise sur pied d’une stratégie éduca-
tionnelle proactive. Le projet de photographie, comme
exploration éducationnelle subjective ouverte, a eu
comme base deux catégories d’images: a) des images
produites à partir d’images publiées en hypermédia,
dans les journaux en ligne et sur le site à contribution
collective Flickr et b) des images prises lors de randon-
nées à travers Montréal. La production artistique et la
recherche se sont organisées principalement autour de
deux concepts: 1. la stéréo-icône (juxtaposition) et 2.
la méta-photo-icône (superposition).
Danut Zbarcea, Université Concordia
I
12. Numéro67Août2009
12
RECHERCHE
Pourquoi ArchIconologie?
Dans les années 1970, l’écrivain américain J.G.
Ballard nommait la culture visuelle «un grand ro-
man» (Ballard, par.8)1. «Le roman médiatique» de
Ballard était déjà en pleine évolution vers l’époque
du cyberespace. Aujourd’hui, en paraphrasant Ar-
thur Asa Berger (2007), on peut affirmer qu’Inter-
net est devenu une rivière visuelle qui nous séduit
et qui nous emporte à travers son monde des icô-
nes virtuelles (p. 90). Tout ce qu’on vit est filtré,
fragmenté, résumé en stéréotypes à travers cette
«rivière». Nos interactions avec l’environnement
social sont négociées de façon aléatoire à travers
un nouveau et virulent «état virtuel iconologique»
(Mitchell, 2006). Les routes de communication du
monde actuel se transforment rapidement et s’uni-
fient en une seule piste de construction et d’ex-
ploitation de la connaissance, l’Hypermédia. Tou-
tes nos journées sont rythmées par le pouvoir de
cette «mégaroute» en ligne (Wheeler, 2002). Alors,
pour concevoir un mécanisme d’observation cri-
tique de l’hypermédia et de notre comportement
dans cette réalité trompeuse, il faut commencer
par une exploration de type archéologique, qui se
traduit par: Archéologie + Icône = ArchIconolo-
gie.
L’hypermédia représente aujourd’hui un des plus
importants «sites pédagogiques» qui reste encore
insuffisamment exploré du point de vue pédagogi-
que (Giroux par. 33). Dans ce contexte, l’ArchIco-
nologie de l’hypermédia se veut une analyse et en
même temps qu’une interrogation sur la formule
conceptuelle et visuelle suivante: l’icône de la réa-
lité + l’icône de l’Hypermédia = StéréoIcône =
métaphotoIcône.
Les idées génératrices
du processus de questionnement
1. Le concept de «souvenir synchrone» ou d’état
d’icône vivante intégrée dans une autre icône
vivante ad infinitum peut être exemplifié par
la transmission fragmentée et répétée des ima-
ges des tours jumelles du World Trade Cen-
ter en flammes. Le 11 septembre 2001, nous
sommes entrés dans deux réalités synchrones
(stéréo-réalité) à l’aide d’un simple écran de
téléviseur ou d’ordinateur placé dans le bruit
quotidien. Ceci renforçait l’une de nos habitu-
des: faire courir notre regard sur un petit es-
pace qui s’appelle écran. Cette habitude étant
inoculée, on se demande comment apprendre
à arrêter son regard, comment apprendre à
évaluer les vérités de ce stéréo-monde et com-
ment devenir plus averti face à ce monde fa-
briqué et stéréotypé virtuellement?
2. Le concept «d’attitude qui devient forme».
Notre attitude devient une forme qui influen-
ce notre propre environnement, disait l’artiste
italien Mario Merz. En conséquence, l’envi-
ronnement social ne représente que la forme
négociée socialement de nos désirs annoncés
virtuellement.
Projet de création photographique
Le projet de photographie peut être vu comme un
travail de recherche visuelle et conceptuelle axé
sur:
- l’utilisation des procédés visuels inspirés de
l’art, de la littérature, du journalisme ou du
photojournalisme (allégorie, sériation, juxta-
position, stéréotypie, synchronicité, métalan-
gage, anachronisme, ironie, métonymie, inco-
hérence, plagiarisme, etc.);
- un questionnement à travers des idées-clés
concernant l’attitude humaine, l’environne-
ment social, les valeurs fondamentales de la
vie et la viabilité de la connaissance humaine.
Les étapes de l’interrogation visuelle ont suivi
l’idée de déroulement quotidien des cycles de
vie (jour et nuit, rituel ou jeu, vie et mort, ici
et ailleurs, nous-mêmes et les autres, homme
et femme, paix et guerre).
1
NDR: La plupart des références données dans ce texte proviennent de site
web dont la liste est dressée en fin de texte. Les inscriptions entre parenthèses
concernent les paragraphes.
ArchI
cono
logie?
13. Numéro67Août2009
13
RECHERCHE
La stéréo-icône
L’urbaniste et enseignant français Paul Virilio, sou-
tient que la réalité d’aujourd’hui est devenue une
«stéréo-réalité» (Kroker, par. 16)2. Les nouvelles
technologies ont substitué à la réalité une réalité
virtuelle. «La stéréo-icône» propose alors un ques-
tionnement sur l’idée de «stéréo-réalité» par le
biais de la déconstruction et de la reconstruction
du visuel. La recherche et la sélection des images
a été faite en fonction de leur capacité de signifier
et d’agir sur ceux qui les regardent (Hill, 2004).
Les réalités photographiées ont été retouchées
sommairement à l’aide d’un logiciel de traitement
d’image. Les séries d’images fonctionnent sur le
principe de la «logique interrompue», dont le but
est de provoquer un certain degré «d’inattention
visuelle consciente» (Watzlawick, 1976, 27). Le
manque d’information de chaque image et l’ac-
cumulation de ces «manques» donne naissance à
l’image comme désir. L’image veut toujours quel-
que chose et le mot «vouloir» implique toujours
l’idée de «désir» et de «manque» (Mitchell, 2004,
par.2)3 . Nos séries de chaînes de significations
fonctionnent d’une manière semblable à l’hyper-
média. La différence est donnée par «l’arrêt du re-
gard» (Mitchell, 2004, par. 2) et par son évolution
qui a un caractère subversif, erratique et ambigu
déclaré.
La juxtaposition photographique de deux
réalités synchrones comme procédé subver-
sif d’interrogation sur le visuel.
Face au monde hypermédiatique, dominé par la
vitesse, on propose l’arrêt du regard par des jux-
tapositions statiques qui facilitent la réflexion.
Une analyse au premier degré des images pré-
sentées ci-dessus démontre que chaque «réalité
synchrone» nous dit que l’on voit des choses qui
représentent des images d’autres choses (Calvino,
1994). Un deuxième degré d’analyse nous permet
de constater que la simple juxtaposition de deux
réalités semblables nous donne la chance de poser
un regard éducationnel critique sur l’intentionna-
lité et sur les conséquences de l’attitude humaine.
L’arrêt du regard photographique met en évidence
cet état «d’immédiateté amnésique» des images
provenues d’hypermédia. On est bombardé par un
monde visuel virtuel qui a comme effet «l’entre-
tien et le hypnotique» (Meadow, 2006). Dans cha-
2
Voir: www.ctheory.net/articles.aspx?id=62
3
humanities.uchicago.edu/faculty/mitchell/interview_pictures_kissed.pdf
14. Numéro67Août2009
14
RECHERCHE
que chaîne de photographies, on a essayé d’am-
plifier le questionnement sur l’attitude humaine.
Aucune attitude ne reste sans conséquences. Les
deux réalités synchrones miroitées dans ce projet
sont arrivées au stade de mémoires. Dès qu’on dé-
sire quelque chose, on peut déjà parler de souve-
nir (Calvino, 1974). L’instantanéité porte en elle le
sceau de l’éphémère. Comme toute autre chose, le
corps humain ne devient qu’un «phénomène hy-
permédiatique visuel de mémoire» (Virilio, 2003,
p. 65).
La métaphotoicône
Celle-ci fait allusion à l’hypermédia comme espa-
ce électrique, motorisé, hypnotique et dominé par
la vitesse (Virilio, 2003), Cette réalité nous semble
beaucoup plus convaincante que l’événement réel
(Baudrillard, 1983). Pour remettre en question
cette vérité hypermédiatique on a privilégié la
superposition des réalités. On a considéré l’écran
de l’ordinateur comme étant la toile de fond de
l’histoire des objets placés en avant. On a photo-
graphié les deux réalités superposées ensemble.
On a obtenu une «collection visuelle» de gestes
humains (Sontag, 1977, p. 3-8). De cette façon, on
a ouvert une discussion sur la finalité prévisible
de l’attitude humaine, par le biais d’un proces-
sus qui interroge les connexions des choses. La
transformation de l’image en «site théorique actif»
(Mitchell, 2006, par. 2) doit représenter la plus
large implication de la métaphotoicône.
Superposition de plusieurs réalités virtuelles
synchrones
À travers l’hypermédia, n’importe quel conflit du
monde impose sa violence comme composante
de notre vie privée. Tout est déterritorialisé et
relocalisé n’importe où dans ce processus «exta-
tique». L’invasion de l’hypermédia est basée sur
[SUITE P.32]
15. DES IMAGES
ET DES
HUMAINS
Numéro67Août2009
15
Luc St-Hilaire, créateur publicitaire,
écrivain et chargé cours à l’Université Laval
Extraits du livre L’image à nu, à paraître (2009) aux Éditions AQÉSAP
L’évolution de l’image
Les humains utilisent l’image depuis des milliers d’années. Mais à quoi
peut bien servir ce langage? Déjà l’oral permettait de communiquer des
renseignements vitaux, de faire connaître des sentiments, d’avertir de la
présence d’un danger. Puis l’écrit permit de conserver les pensées des phi-
losophes ou les ordonnances des autorités, de diffuser les connaissances,
d’étudier les croyances d’autres peuples, de communiquer à distance. Or,
l’image précède l’écrit. En effet, l’apparition de l’écriture date d’environ 5
400 ans, quelque part dans le sud de la Mésopotamie. Pour leur part, les
magnifiques fresques de la grotte Chauvet-Pont-d’Arc sont estimées à envi-
ron 31 000 ans. La même image peut jouer simultanément plusieurs rôles,
mais il y en a toujours un qui domine, qui devient sa fonction principale.
Un rôle plastique
Avant le XIXe siècle, la fonction plastique de l’image demeure secondaire,
subordonnée à la fonction religieuse ou politique. Des artisans de l’image
effectueront des recherches plastiques, mais cela n’est pas leur préoccupa-
tion première. La voûte de la chapelle Sixtine au Vatican est une commande
religieuse et Michel-Ange s’y est efforcé de communiquer de son mieux le
sacré. Ce but importait beaucoup plus que d’essayer de produire une belle
image, c’est-à-dire une œuvre n’ayant de valeur que par sa seule fonction
esthétique. Les Impressionnistes vont donner à la fonction plastique de
l’image l’essor qui lui revenait. Après l’évolution insufflée par la Renaissan-
ce, l’image devient lentement sclérosée et les artistes en viennent à ne pro-
duire que des images-spectacles d’un académisme desséché. Au cours du
dix-neuvième siècle, le Romantisme, le Réalisme et enfin l’Impressionnis-
RECHERCHE
16. RECHERCHENuméro67Août2009
16
me conduiront les artistes à une recherche plasti-
que réalisée pour elle-même. Suite à l’Impression-
nisme, divers courants se succéderont pour faire
éclater toutes les limites de l’image. Des artistes,
plus préoccupés par la philosophie qui sous-tend
la production de leur œuvre que du produit fini
lui-même, amèneront l’image de fonction plasti-
que à se replier sur elle-même au point de devenir
incompréhensible pour le commun des mortels.
L’artisan de l’image, devenu Artiste, ne sert plus
que son Art. La fonction plastique subira son dé-
clin – en termes de rôle dominant – à l’époque de
la Première guerre mondiale. Toutefois, ce bloc
d’une quarantaine d’année aura modifié radicale-
ment notre manière de voir les images.
Du point de vue sémiologique, nous n’analysons
pas les tendances esthétiques des divers mouve-
ments artistiques. Ce que nous retenons surtout,
c’est que l’image redevient un objet autonome,
comme l’image magique, détachée d’un sujet
qu’elle devrait s’efforcer de représenter fidèlement.
Cependant, si l’image magique était importante
parce qu’elle possédait des pouvoirs surnaturels,
l’image artistique est estimée parce qu’elle est
belle. On la regarde et on l’apprécie parce qu’elle
atteint notre sensibilité.
L’art-provocation
Les mouvements impressionnistes et ceux qui
les suivirent créèrent de très forts remous dans
le monde de l’image. Les débats étaient passion-
nés... et passionnants! L’Armory Show de 1913
aux États-Unis présentait des œuvres des Ingres,
Delacroix, Renoir, Monet, Van Gogh, Matisse,
Lautrec, Braque, Degas, Gauguin, pour ne nom-
mer que ceux-là. L’exposition s’attira des critiques
furieuses et une foule de visiteurs. On cria à la
démence et à l’immoralité comme en témoignent
les réactions du New York Times, dans son édition
du 16 mars 1913.
Le critique Kenyon Cox écrivit : « Leur œuvre mar-
que-t-elle une étape importante dans la marche en
avant de l’art? Ou bien est-elle bonne à jeter au
panier? » La suite de l’article soutenait cette der-
nière thèse. À Chicago, le Record-Herald publia
des titres tels que « Exposition cubiste peut-être
interdite aux jeunes. Un éducateur déclare qu’elle
est dégoûtante, immorale et indécente ». La Com-
mission sénatoriale de répression du vice inscrivit
cette exposition dans son enquête annuelle sur le
vice. L’enquêteur avait vu des jeunes filles regar-
der des nus cubistes. À sa grande horreur, il avait
découvert qu’un des nus de Matisse n’avait que
E s p a c e b l a n c
Œuvre d’art ou supercherie intellectuelle? Peut-on considérer l’absence d’image comme... une image? Les artistes contemporains
posent sérieusement la question.
17. Numéro67Août2009
17
RECHERCHE
quatre orteils. Ces artistes firent parler de l’image
comme jamais auparavant. Ils en modifièrent to-
talement notre perception. Parallèlement, ils éta-
blirent une norme pratiquement insoutenable. En
effet, jusqu’aux Impressionnistes, les artistes ten-
taient de se conformer aux règles d’une «bonne»
vision de l’art. Par exemple, lorsque Nicolas Pous-
sin met en forme le Classicisme sous Louis XIV,
il trace la voie à des normes à respecter pour être
reconnu. Lorsque Picasso démolit les repères vi-
suels et réinvente l’image d’art, il gagne le respect
par son audace. Au fil des mouvements artistiques
qui se cherchent une place dans une monde où
l’image se démocratise, le «dépassement des nor-
mes» devient LA norme pour l’artiste qui désire
être considéré, tant par ses pairs qu’à ses propres
yeux.
La préoccupation de l’artiste n’est plus comment
créer l’exceptionnel à l’intérieur de canons établis,
mais plutôt comment repousser plus loin les li-
mites acceptables. Mieux encore, comment attirer
l’attention sur soi en réalisant ce que les autres
n’ont pas encore pensé à faire. Lorsqu’un artiste
expose un montage où une tête réelle de fœtus
humain remplace celle d’un oiseau sur son cada-
vre, doit-on parler d’un geste artistique ou d’une
démarche sociale de provocation? Est-ce la mar-
ginalité érigée en système? Est-ce le signe évident
que l’image artistique ne fut historiquement que
l’apanage d’une élite de la maîtrise de l’écriture
iconique qui est brutalement démunie devant le
fait que l’image appartient désormais à tous? L’ar-
tiste s’accroche à l’art tel qu’il fut défini durant
des siècles alors que ce rôle de l’image doit main-
tenant se redéfinir totalement.
Une réalité nouvelle
et sans cesse renouvelée
Comment naissent les images? De la préhistoire à
aujourd’hui, nous avons produit des images avec
tous les moyens que nous avons pu imaginer,
depuis les pigments naturels sur les parois des
cavernes jusqu’aux points lumineux des écrans
cathodiques, en passant par les projections ho-
lographiques aériennes, les réverbérations d’on-
des ou la suggestion mentale. L’univers imagique
est sans limite. Surtout, au cours des dernières
années, la réalité de l’image s’est radicalement
transformée sur deux aspects majeurs. D’une part,
comme nous l’avons expliqué, l’image s’est démo-
cratisée. Sa production est désormais accessible à
tous. Il n’est plus nécessaire de posséder un talent
particulier et d’avoir suivi une formation spécia-
18. RECHERCHENuméro67Août2009
18
lisée pour réaliser une image d’un niveau de qua-
lité acceptable, voire excellent. Grâce aux techno-
logies contemporaines, je peux être plombier ou
chirurgien et faire des images dont le rendu est
supérieur aux œuvres de bon nombre d’artistes
professionnels des siècles passés. Des enfants qui
savent encore à peine lire et écrire manipulent
adroitement des appareils photos numériques.
D’autre part, l’image n’est plus un objet exception-
nel et précieux qui trône à une place d’honneur
dans notre environnement quotidien. L’image
est devenue une réalité omniprésente et banale.
Quotidiennement, notre regard se pose sur des
milliers d’images. La grande majorité est conçue
pour vivre un bref instant. La création d’images
devient un jeu éphémère. On se photographie des
dizaines de fois et on supprime les fichiers numé-
riques après avoir bien rigolé de se voir l’allure
sur l’écran intégré à l’appareil photo. L’image n’est
même plus imprimée, ni conservée sous une for-
me quelconque!
La réalité actuelle de l’image est inédite dans l’his-
toire de l’humanité. Et elle ne cesse d’être bous-
culée. Les règles enseignées depuis des siècles ne
tiennent plus. La conception de l’image encore
valable il y a vingt-cinq ans est obsolète. Les tradi-
tionnels cours d’arts plastiques au primaire ou au
secondaire sont totalement déphasés de la réalité
de l’image telle que vécue par des jeunes qui sont
littéralement nés avec une souris d’ordinateur
dans les mains!
Une nécessaire remise en question
La civilisation de l’image, c’est la civilisation du
furtif, de l’impulsif, du non-logique. Nous parti-
cipons d’une culture qui frôle l’inculture. On re-
tourne au monde instinctuel, occulte, magique. Un
monde qu’on pourrait qualifier de... imagique! S’il
est nécessaire de se questionner sur notre rapport
à l’image aux plans social, culturel, moral, éthique
et même spirituel, nous devons aussi modifier ra-
dicalement l’enseignement de l’image. Il n’est plus
réaliste de se contenter de faire dessiner les en-
fants à l’école comme autrefois et de commenter
leurs œuvres du seul point vue de l’esthétisme ou
de l’originalité. «C’est beau! C’est laid! C’est gau-
che! Ce n’est pas créatif!» Que de commentaires
subjectifs, incomplets et trop souvent stériles,
voire dévastateurs. Le jeune en apprentissage se
dit qu’il est «poche», maladroit, sans talent avec
l’image. Puis il quitte l’école et rendu à la maison,
il crée sans retenu avec ses outils numériques ou
informatiques. Quel paradoxe!
Tant que l’enseignement de l’image relèvera uni-
quement de la vision artistique, le cours d’arts
plastiques, le fossé entre l’école et la réalité ira en
s’élargissant. Le véritable apprentissage sera celui
que chacun fait « sur le tas ». Pourtant, il serait
possible et facile de créer un enseignement fruc-
tueux de l’image. Il suffit de comprendre le code
iconique et les possibilités qu’il offre pour s’expri-
mer ou pour communiquer. De la même manière
qu’on le fait depuis longtemps pour le code lin-
guiste. Les cours de français ne sont pas réduits à
des cours d’art linguistique! On y apprend à maî-
triser la langue et comment l’utiliser tout autant
pour écrire un poème que pour rédiger un contrat
légal. Surtout, on ne songe pas à évaluer le texte
technique avec les mêmes critères que pour une
œuvre poétique. La distinction est acquise. Il y a
un code et il y a différentes utilisations. Il en va
de même pour l’image. Il faut enseigner le code et
ensuite apprendre à l’utiliser dans ses mille et une
facettes. C’est le propos de ce livre.
Références
Pour en savoir plus, lisez St-Hilaire, L. (2009) L’Image à nu. St-Donat: Pu-
blications de l’AQÉSAP
19. Le Réseau In-Terre-Actif (www.in-terre-actif.com) se définit comme une ressource pédagogi-
que au service d’une citoyenneté mondiale. Depuis 1997, il suscite un vif intérêt dans tout
le monde de l’éducation francophone. Destiné aux élèves et aux enseignants de niveaux
primaires et secondaires, le Réseau In-Terre-Actif sensibilise les jeunes aux enjeux mondiaux
actuels et aux gestes citoyens à poser dans leur milieu. À sa façon, le projet «Compréhension
du monde 101», qui a permis l’élaboration et la diffusion d’affiches pédagogiques, contri-
bue à «cultiver la paix».
Numéro67Août2009
19
CULTIVER
LA PAIX PAR UNE
APPROCHE
ARTISTIQUE
Richard Grenier, éducateur et
coordonnateur du Réseau
In-Terre-Actif
Javier Escamilla, éducateur,
artiste et collaborateur au Réseau
In-Terre-Actif.
RECHERCHE PÉDAGOGIQUE
20. Numéro67Août2009
20
RECHERCHE VOIR
Nous observons, encore aujourd’hui, que la pau-
vreté, la violence, l’exclusion et les autres pro-
blématiques touchent davantage les femmes que
les hommes. Retrouvez, dans la partie gauche du
dessin, les icônes qui représentent des probléma-
tiques liées au non-respect des droits des femmes
dans le monde.
VOIR
ANALYSER
AGIR
1 Le cycle de la pauvreté
et la possession des ressources
La majorité des 1,5 milliard de person-
nes vivant avec moins de 1 $ par jour
est composée de femmes. Ce cycle de la
pauvreté se poursuit du fait que les fem-
mes ont souvent l’accès plus limité aux
ressources et services leur permettant
de s’en sortir. Dans bien des pays du
monde, la femme ne peut posséder la
terre ou les troupeaux de bétail. L’accès
au crédit et aux héritages, par exemple,
est parfois impossible pour elle.
9 Accès limité
à l’éducation
Les deux tiers des enfants
qui ne vont pas à l’école
sont des filles. Ce sont
souvent des motifs éco-
nomiques qui justifient
leur accès limité à l’édu-
cation. Dans certains
pays, la violence qu’elles
subissent sur le chemin
de l’école entraîne la
baisse de leur fréquenta-
tion scolaire.
10 Les stéréotypes
sexuels
Les médias véhiculent
encore trop souvent une
image stéréotypée de la
femme. Les épouses à la
fois dévouées, femmes
fatales et carriéristes font
toujours partie du pay-
sage médiatique. L’im-
pact de ces stéréotypes
est majeur, car ceux-ci
constituent souvent les
rares images que les
femmes et les filles ont
d’elles-mêmes à travers
les médias.
3 La violence conjugale et le viol
comme arme de guerre
Les victimes de violence conjugale sont
le plus souvent des femmes. Ces vio-
lences portent atteinte à l’autonomie
personnelle et financière des femmes.
Elles affectent aussi leur santé physique
et psychologique. D’autre part, le viol
des femmes lors de conflits est une tac-
tique servant à dominer, à soutirer des
informations, à punir, à humilier. C’est
une arme de destruction de la dignité
humaine des femmes.
2 Traite des femmes
Les femmes sont les premières
victimes de la traite des hu-
mains, notamment pour l’ex-
ploitation sexuelle. Si certaines
femmes sont enlevées sans leur
consentement, un grand nom-
bre quitte leur pays de plein
gré, croyant que le travail qui
leur est offert leur permettra
d’échapper à la pauvreté, à la
violence ou aux abus qu’elles
subissent.
4 Les maladies du
paraître en Occident
Les femmes sont les plus tou-
chées par l’anorexie et la bou-
limie, maladies provenant de
cette pression du paraître pour
exister et être valorisées socia-
lement. Le modèle occidental
de la beauté féminine fait pres-
que exclusivement référence
aux mannequins des magazi-
nes de mode et aux actrices de
cinéma.
11 La famille
monoparentale
Dans le monde, la majorité
des adultes qui assument seuls
les responsabilités parentales
est composée de femmes. Ces
mères, et en particulier les
plus jeunes d’entre elles, sont
les plus vulnérables, exposées
à la pauvreté et à l’isolement.
12 L’inéquité salariale et
dans les emplois haut
placés
Dans le monde, les femmes gagnent,
en moyenne, à peine plus de 50 % de
ce que gagnent les hommes. En outre,
le travail de la femme est souvent déva-
lorisé en comparaison à celui de l’hom-
me. Enfin, l’accès pour la femme à des
postes haut placés dans la hiérarchie
du travail, tels que des sièges dans les
parlements nationaux, est souvent limité
ou impossible.
13 Les femmes juridiquement
mineures
Dans plusieurs pays, particulièrement
en Afrique, il existe des traditions qui
font fi des systèmes juridiques modernes
et qui placent les femmes sous l’autorité
du père, du mari, du fils ou d’un autre
tuteur. Quels que soient les régimes po-
litiques, les femmes sont souvent exclues
des processus décisionnels.
14 La femme
et le VIH-SIDA
Les trois quarts des Africains sé-
ropositifs âgés de 15 à 24 ans
sont des femmes. L’accès limité
à l’éducation, aux services de
santé ainsi qu’aux médicaments
perpétue le cercle vicieux de la
transmission du VIH. De plus,
dans bien des pays, les femmes
ne sont pas en mesure d’exiger
aux hommes l’abstinence ou le
port du préservatif.
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21. Numéro67Août2009
21
RECHERCHE
ANALYSER
Pourquoi les femmes subissent-elle encore autant
d’injustices? Avez-vous déjà été témoins ou vic-
times de telles situations? N’est-il pas urgent que
les choses s’améliorent pour des millions de fem-
mes sur la Terre? Comment pouvons-nous contri-
buer à changer cette situation? Prenez le temps de
réfléchir à ces questions.
AGIR
Participons à la grande marche mondiale des fem-
mes pour plus de respect, d’égalité et de justice en
posant des gestes en faveur de la promotion des
droits des femmes. Chaque petit geste compte. As-
sociez les icônes de la partie droite du dessin aux
images illustrant des alternatives qui existent et
qui favorisent l’atteinte des droits des femmes.
19 Le droit de vote
Depuis un siècle, plusieurs
pays ont donné le droit de
vote aux femmes, démon-
trant ainsi une considération
des capacités citoyennes des
femmes au même titre que
les hommes. Le mouvement
féministe a grandement
contribué à ce gain social.
20 Des mesures pour
l’égalité des sexes
La Convention pour l’élimi-
nation de toutes formes de
discrimination à l’égard des
femmes, mise en place par
l’Organisation des Nations
Unies (ONU), a contribué à
la modification des législa-
tions de plus des deux tiers
des pays du monde pour per-
mettre un meilleur accès aux
ressources pour les femmes.
5 Favoriser les regroupements
de femmes et les campagnes
de sensibilisation
En se regroupant, les femmes peuvent
partager leur réalité ainsi que leur vi-
sion de changement et devenir une
force pour militer. Les campagnes de
sensibilisation attirent l’attention du
monde sur leurs conditions de vie. C’est
un moyen puissant pour faire pression
sur les gouvernements irrespectueux en
matière de droits fondamentaux.
8 Être des promoteurs
de changement
Chacun et chacune d’entre
nous pouvons promouvoir et
respecter les droits des fem-
mes et dans le monde. Par nos
paroles et nos comportements,
affirmons autour de nous nos
valeurs d’égalité. Nous de-
vons être le changement que
nous voulons voir se réaliser
(Gandhi).
6 Soutenir les femmes
et victimes de violence
Les ressources d’hébergement
offrent des lieux de protection
pour les femmes et leurs enfants
victimes de violence. Ces lieux
leur permettent de quitter un
contexte conjugal destructeur et
de refaire leur vie. Il importe de
dénoncer tout geste de violence
à leur égard dont nous sommes
témoins.
7 Défaire les préjugés
et stéréotypes
Développer son jugement cri-
tique permet de remettre en
question les modèles féminins
proposés dans les différentes
sociétés. Mettre sur la place pu-
blique les conceptions erronées
contribue à défaire les préjugés
et stéréotypes entretenus par les
membres d’une culture.
15L’éducation
populaire
La sensibilisation sur la condition
de la femme et de la fillette est un
premier pas vers la mise en place
d’un système égalitaire. De nom-
breuses organisations non gou-
vernementales travaillent à lutter
contre les inégalités et à promou-
voir les droits des femmes.
16 L’éducation scolaire
des femmes
L’éducation de la femme est la
base de l’égalité des sexes et de la
promotion des droits des femmes.
L’éducation lui donne du pouvoir,
tout en permettant son indépen-
dance intellectuelle. L’Agence cana-
dienne de développement interna-
tional (ACDI) finance de nombreux
projets en ce sens un peu partout
dans le monde.
18 Le micro-crédit
Avec l’aide financière provenant
du micro-crédit, des femmes se
regroupent et se lancent dans
des activités commerciales pour
sortir du cycle de la pauvreté.
Les prêts faits dans ce contexte
sont rapidement remboursés.
Ces alternatives de travail favo-
risent donc leur indépendance
économique.
17 L’accès à la terre
L’accès à la terre est indispensa-
ble pour produire la nourriture
et créer des revenus afin de fa-
voriser la sécurité alimentaire.
C’est aussi un atout social et
économique donnant accès aux
femmes à l’identité culturelle, à
la prise de décisions et au pou-
voir politique.
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1715
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22. Numéro67Août2009
22
RECHERCHE
Dans un monde caractérisé par l’interdé-
pendance des relations, l’ouverture d’es-
prit des jeunes sur le monde et la compré-
hension des enjeux du développement se
doivent de constituer des priorités éduca-
tives.
L’éducation citoyenne des jeunes,
une nécessité pour notre monde
Les jeunes représentent les acteurs et les décideurs
de demain. Dans un contexte d’interdépendance
mondiale sans cesse grandissante, ceux-ci ont
besoin de comprendre les différentes facettes du
monde actuel.
C’est pourquoi
la promotion,
chez les jeunes,
de valeurs telles
que la solidarité,
la démocratie, la
justice sociale
et le respect de
l’environnement
contribue à l’édi-
fication d’une
réelle culture
d’ouverture, de
tolérance et de
paix. Cultiver la paix figure d’ailleurs parmi les
axes de développement du Programme de for-
mation de l’école québécoise (Gouvernement du
Québec, 2001, p.50). En ce sens, le Réseau In-Ter-
re-Actif représente une boîte à outils tout à fait
appropriée pour les enseignants. Attentif aux pré-
occupations éducatives et aux intérêts des inter-
venants scolaires, il offre des idées, des outils et
des activités portant sur diverses questions socia-
les, environnementales et internationales.
«Nous devons incarner le changement que
nous souhaitons voir dans le monde.»
Gandhi
Les affiches éducatives « Compréhension
du monde 101»
Lancé au cours de l’année scolaire 2008-2009, le
projet d’animation et d’élaboration d’affiches édu-
catives, intitulé «Compréhension du monde 101»,
a permis au Réseau In-Terre-Actif de réaliser tout
un travail de sensibilisation dans le milieu scolai-
re. Jusqu’à présent, le Réseau a réalisé des affiches
relatives aux problématiques de la faim dans le
monde, des changements climatiques et des droits
des femmes. Le choix des thématiques repose sur
les avis d’intervenants scolaires et de l’Agence ca-
nadienne de développement international (ACDI),
principal bailleur de fonds dans la réalisation de
ce projet. Présenter l’importance de construire un
monde où moins de gens ont faim, où des alter-
natives environnementales permettent de réduire
les incidences des changements climatiques et où
davantage de femmes voient leurs droits respectés
favorise, à terme, le développement d’une culture
de la paix chez les jeunes.
Les statistiques de la Banque mondiale
montrent qu’au moins 20% des femmes
dans le monde sont victimes de violences
physiques ou d’agressions sexuelles.
La démarche pédagogique
La démarche pédagogique élaborée dans le ca-
dre de ce projet s’articule autour de trois pôles:
voir, analyser et agir, actions qui trouvent égale-
ment écho dans la démarche artistique (inspira-
tion, élaboration, distanciation). Cette démarche
permet à l’élève de s’ouvrir à des réalités, d’ana-
lyser celles-ci et de nommer des pistes de solu-
tions pour transformer positivement ces réalités.
Dans le traitement graphique, plusieurs éléments
contenus dans l’image centrale ont été repris sous
forme d’icônes de chaque côté des affiches, soit
pour représenter des causes ou des conséquences
de la problématique abordée (voir p. 19), soit pour
faire état des différentes alternatives ou solutions
pouvant être apportées à la situation (voir p. 21).
Près d’un milliard d’êtres humains ne man-
gent pas à leur faim dans le monde, selon
le rapporteur spécial des Nations unies sur
le droit à l’alimentation, Olivier De Schut-
ter.
Démarche artistique
La conception de l’affiche est intimement liée à
la démarche artistique de Javier Escamilla, pé-
dagogue colombien et étudiant en arts à l’UQTR.
Son inspiration prend sa source dans la nécessité
de laisser parler l’art, d’être plus proactif avec sa
mission sociale. L’objectif est d’aider les jeunes à
construire une pensée critique à partir d’une lec-
ture visuelle, capable de séduire pour éduquer.
23. Numéro67Août2009
23
RECHERCHE
Les affiches sont un point de départ à l’apprentis-
sage. Les dessins sont colorés pour séduire, dans
un premier temps, et ensuite pour provoquer la
lecture des séquences graphiques; les détails et le
langage satirique des images peuvent induire une
meilleure compréhension du message. Les esquis-
ses s’inspirent d’expériences vécues et de lectures
thématiques. Chaque étape a été discutée et vali-
dée par des groupes de lecteurs différents.
L’affiche présentés dans ce numéro a été reforma-
tée pour être insérée à la revue. Elle peut être dé-
tachée et utilisée en classe. L’enseignant qui désire
se procurer les affiches en format réel (12 X 28
pouces) peut le faire, pour un montant de 5$, en
écrivant à rita@in-terre-actif.com ou en commu-
niquant avec l’équipe du Réseau In-Terre-Actif au
819-373-2598 poste 312.
En conclusion
Les qualités de son approche pédagogique ont
valu au Réseau In-Terre-Actif plusieurs prix.
Mentionnons, entres autres, «Le prix du rappro-
chement interculturel» du ministère des Affaires
internationales, de l’Immigration et des Commu-
nautés culturelles (1995 et 2003) ainsi que des
prix provenant du Conseil Canadien de Coopéra-
tion Internationale et de l’Agence Canadienne de
Développement International. Rappelons enfin
que les intervenants scolaires peuvent s’inscrire
gratuitement et directement en ligne au Réseau In-
Terre-Actif (www.in-terre-actif.com).
Selon le Groupe International d’Expert sur
le Climat (GIEC), il est certain, à 90 %, que
l’homme est à l’origine de la transforma-
tion du climat qui menace les grands équi-
libres planétaires.
Références
Gouvernement du Québec. (2001). Programme de formation de l'école québécoise. Éducation préscolaire. Enseignement primaire. Québec: Ministère de
l'Éducation.
Note: nous vous encourageons fortement à détacher l'affiche afin de l'utiliser en classe.
Cette fiche vous est offerte à titre d’exemple. Nous proposons ici de réaliser des affiches, comme si
les élèves étaient membres du Réseau In-Terre-Actif et qu’ils souhaitaient agir dans leur école, par
exemple. Nous avons ici transposé en SAÉ l’affiche sur légalité des femmes présentée en pages
20 et 21. Nous encourageons le lecteur à adapter cette fiche à toute autre proposition de création
propice à « éduquer » les élèves à la Culture de la paix.
Situation éducative
Comment faire pour cultiver la paix dans le monde?
Domaine de formation
Vivre-ensemble et citoyenneté
Intention éducative
Permettre à l’élève de développer des attitudes d’ouverture sur le monde et de respect de la
diversité
• Axe de développement: Culture de la paix (sensibilisation aux situations d’agression, à
l’interdépendance des personnes, à l’égalité des droits, au droit à la différence des individus
et des groupes, aux conséquences négatives des stéréotypes et autres formes de discrimina-
tion et d’exclusion)
Proposition de création
Réalisation d’une affiche médiatique (œuvre collective)
Savoirs essentiels
Organisation de l’espace: énumération, juxtaposition, superposition
FICHE PÉDAGOGIQUE
Compétence transversale
Coopérer. Contribuer au travail collectif; participer à l’activité dans un esprit de collaboration
Compétences disciplinaires
• Réaliser une création médiatique: organiser les éléments en fonction du message et du destina-
taire
• Apprécier ses réalisations et celles de ses camarades: partager son expérience de création
Repères culturels
Affiches «Compréhension du monde» du Réseau In-Terre-Actif1
Exercice exploratoire
Exercices de dessin d’observation du corps en mouvement (postures, proportions, articulations)
Démarche de création
Inspiration
Présentation des affiches Compréhension du monde 101 (Réseau In-Terre-Actif)
Inventaire de situations de violence (cahier de traces)
Élaboration
Exploration en équipe de l’organisation de l’espace
Distanciation
Discussion, ajustements, mise en place des éléments
Dans le prochain numéro, nous vous présenterons une autre affiche du Réseau In-Terre-Actif, Pour
une planète vivante, qui pourra aisément servir de déclencheur pour d’autres propositions de
création.
1
Les affiches sont disponibles au coût de 5$. Réseau In-Terre-Actif: 819-373-2598 # 312
rita@in-terre-actif.com ou www.in-terre-actif.com
24. Numéro67Août2009
24
UN DUO
POUR LA PAIXLise Robichaud, Faculté des sciences de l’Éducation,
Université de Moncton
La thématique de ce dossier spécial
«Culture de la paix» m’incite à pré-
senter Correspondance pour la paix,
un projet d’installation en duo ayant
eu lieu à Moncton, en 2002, suite aux
événements tragiques du 11 septem-
bre 2001.
L’écriture compte parmi les créations les plus
spectaculaires de l’être humain. Clairborne (1975)
rappelle que l’écriture fut inventée simultanément
dans des lieux aussi distants l’un de l’autre que la
Chine et l’Amérique centrale. Dans le projet pré-
senté ici, l’écriture s’inscrit à la fois dans l’amorce
du processus de création et dans l’œuvre même.
Le projet s’est amorcé par une correspondance
électronique entretenue en français entre Shahla
Bahrami, d’origine iranienne et vivant à Ottawa, et
moi, d’origine acadienne et vivant à Moncton.
Détaildel’œuvreFaire-part,LiseRobichaud
LISE ROBICHAUD ET SHAHLA BAHRAMI
25. Numéro67Août2009
25
Shahla Bahrami est la Directrice générale du Centre d’artiste Voix
Visuelle, à Ottawa. Ses œuvres sont souvent de grand format et à
caractère politique. Elles mettent en scène des personnages réali-
sés de manière figurative et expressive dans un style contempo-
rain. L’artiste introduit l’écriture persane dans ses images et c’est
par un rendu doux et poétique qu’elle réussit à conscientiser le
public à des problématiques sociales parfois dérangeantes.
Shahla Bahrami a développé une techni-
que de travail pictural fondée sur les lois
de la composition (Ragans, 2004). Pour
chaque exposition, elle récupère des
images qu’elle repositionne en fonction
du nouveau site. Elle y ajoute d’autres
séries d’œuvres dont les photographies
numériques imprimées sur des envelop-
pes que l’on voit dans l’Oiseau de paix.
De mon côté, j’explore, de manière poé-
tique et autobiographique, les thémati-
ques de l’identité, de la nature et de la culture. De l’art pictural à
l’installation, j’exprime mes idées par la peinture, la sculpture et
la photographie numérique. La couleur, les matières éphémères
et la symbolique du nombre sont présentes dans mes œuvres
qui sont souvent réalisées avec du bois, de la pierre, de la toile
ou du papier. Parfois, j’invite le public à participer à l’œuvre.
Relevant de la reconstruction sociale, cet aspect est présent dans
des projets de création à caractère communautaire et féministe
(Robichaud et Amyot, 2000), à caractère environnemental (Ro-
bichaud, 2008) ou à caractère politique, comme celui dont il est
Par des inscriptions calligraphiques, cursives et métaphori-
ques, par le blanc, le noir et les matières éphémères, Shahla et
moi avons transposé notre correspondance virtuelle eN une
correspondance matérielle. Elle a pu découvrir la culture aca-
dienne et partager ses origines culturelles iraniennes avec moi
et avec la communauté du sud-est du Nouveau-Brunswick. Elle
a su, par sa présence et son travail créateur, contribuer à com-
bler un besoin de découvrir l’autre et d’œuvrer ensemble à la
culture de la paix.
Femmesentchador,ShahlaBahrami
26. Numéro67Août2009
26
UN DUO POUR LA PAIX
question ici ici. Souvent, je cède mon
temps de parole à des intervenants de
la communauté qui s’adressent au pu-
blic lors des vernissages. Lors de l’évé-
nement Correspondance pour la paix,
la parole fut donnée à une représen-
tante de culture arménienne, active au
sein d’organismes multiculturels de la
région de Moncton.
L’œuvre Faire part (voir p. 24) est réa-
lisé avec 11 enveloppes sur lesquelles
fut collé du ruban noir, le tout installé
à la verticale sur le mur au dessus de
11 tiges de roses et 11 pétales de roses
retenues par de petits clous. Étant pla-
cée au dessus d’une bouche d’aération,
les pétales de roses vibrent et donnent
l’illusion d’un feu, en référence à des
certains rites funéraires.
Les endeuillées fait référence aux fem-
mes accablées de la perte d’un fils ou
d’un conjoint à cause des guerres. Elle
est constituée de onze planches et onze
foulards de crêpe noir.
Détail de l’œuvre L’oiseau de la paix, Shahla Bahrami
L’idée d’exposer avec une autre
artiste a pris naissance suite
à l’évènement du 11 septembre
2001. Éduquée dans un contex-
te catholique, je cherchais
une partenaire qui serait d’ori-
gine musulmane afin qu’en-
semble on puisse échanger et
communiquer nos idées per-
sonnelles sur les difficultés
reliées à la culture de la paix
dans le monde.
27. Numéro67Août2009
27
Bien que nos praxis en arts vi-
suels étaient complémentaires
nous avions des perceptions
différentes et personnelles de
la notion de paix. Pour Bahrami
c’était «peu probable». Pour moi
c’était «pourquoi pas?». On a
donc choisi de faire cohabi-
ter nos créations artistiques
dans une même galerie d’art en
occupant chacune des espa-
ces intimes mais en cohabitant
sans divisions pour conserver
cette ouverture à la différence.
Lesendeuillées,LiseRobichaud
> Références
Claiborne, R. (1975). Le Miracle de l’Écriture. Netherland: Time-Life
International.
Ragans, R. (2004). Les arts visuels. Théorie, création et analyse.
Montréal: Chenelière /McGraw-Hill.
Robichaud, L. et Amyot, E. commissaires d’exposition et artistes parti-
cipantes (7 juin au 10 septembre 2000). PRESENCE 27. Exposition
regroupant 27 femmes artistes du sud-est du Nouveau-Brunswick.
Galerie d’art de l’Université de Moncton : Moncton.
Robichaud, L. 11 janvier au 26 février (2008). CLIMAT. Moncton:
Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen de l’Université de Moncton.
http://www0.umoncton.ca/gaum/
28. Numéro67Août2009
28
Cultiver la paix intérieure
LINDA
PICHETTE
ENSEIGNANTE
Collège Jésus-Marie de Sillery
Parce qu’elle apporte la paix inté-
rieure, la lutte contre la toxicoma-
nie prend tout son sens dans le dé-
veloppement d’une culture de la paix.
Le dossier Culture de la paix, présenté
dans ce numéro, me sert ici de tribune
pour mieux faire connaître l’orga-
nisme communautaire Fonds Toxiaide
avec lequel j’ai le bonheur de colla-
borer depuis quatre ans.
Des chiffres qui parlent
Les résultats d’une enquête nationale menée par Santé
Canada en 2007, indiquent que l’alcool est la subs-
tance psychoactive la plus communément consommée
par les jeunes Canadiens. 90,8 % d’entre eux ont déjà
consommé de l’alcool et 82,9 % en ont consommé au
cours des douze derniers mois alors qu’ils avaient en
moyenne 15 ans. Pour ce qui est du cannabis, 61,4
% des jeunes ont consommé du cannabis au cours
de leur vie, et 37,0 % en ont consommé au moins
une fois au cours des douze derniers mois. Encore
une fois, la moyenne d’âge est de 15 ans. Plus in-
quiétant encore, parmi les consommateurs actuels,
plus de 22,3 % déclarent en avoir consommé tous les
jours, au cours des trois derniers mois. D’autres dro-
gues sont également consommées: les hallucinogènes
(16,4 %), la cocaïne (12,5 %), l’ecstasy (11,9 %), les
J’ai été touchée par le discours de M. Landry; il m’a appris que si
on a de l’ambition, on peut réaliser de grandes choses. Élise
29. Numéro67Août2009
29
J’ai vraiment apprécié cette expérien-
ce, car c’était la première fois que
j’assistais à un vernissage et j’étais
fière que pour une première fois,
c’était nos œuvres qui étaient affi-
chées. Annabelle
amphétamines (9,8 %) et diverses substances inhalées
(1,8 %). Selon le Centre de toxicomanie et de santé
mentale de Toronto, les causes de la toxicomanie sont
multiples. La consommation abusive d’alcool et de
drogues dans la famille ou chez les amis, les mauvais
résultats scolaires, les conflits familiaux, l’exclusion so-
ciale comptent parmi les causes possibles. Selon le
centre L’étape de Louiseville les jeunes consomment
des drogues pour satisfaire leur curiosité, pour re-
chercher l’évasion, l’euphorie et le bien-être; ils disent
consommer pour répondre aux pressions du groupe,
augmenter leur confiance en eux ou faire face à cer-
tains problèmes. Certains affirment que ces substan-
ces font augmenter leur créativité et leur performance
artistique, qu’elles favorisent l’expérience spirituelle,
réduisent l’angoisse, permettent d’oublier un échec ou
font augmenter l’appétit sexuel. Heureusement, il y a
des facteurs de protection tels que l’encadrement pa-
rental, la fréquentation d’un adulte au comportement
positif, l’établissement d’objectifs de vie ou la fréquen-
tation de centre spécialisés comme Toxiaide.
Au cours de l’hiver 2004, ma rencontre avec Jean-Ma-
rie Landry, président de l’organisme Fonds Toxiaide, à
Sillery, allait changer ma vie professionnelle. J’étais
devant un homme d’expérience que j’aurais écouté
pendant des heures, tellement son histoire était capti-
vante et inspirante. En 2002, en fondant l’organisme
sans but lucratif, Monsieur Landry se donne, avec ses
collaborateurs, la mission d’aider les personnes souf-
frant de dépendance à l’alcool, aux drogues ou au jeu
à se réinsérer dans la communauté.
Entre autres activités de financement, l’équipe propose
la réalisation de masques à partir des vieux disques de
Jean-Marie Landry,
fondateur de Toxiaide
Moulage des masques
par Sévryna Lupien, étudiante de
l’Université Laval
30. Numéro67Août2009
30
Cultiver la paix intérieure
vinyle qui occupent une bonne partie de l’entrepôt de
l’organisme. Sous la responsabilité de Sévryna Lupien,
étudiante en arts visuels de l’Université Laval, les mas-
ques sont réalisés en trois étapes. D’abord, on chauffe
le disque de vinyle; puis, on le modèle rapidement sur
un moule de plâtre et enfin, on le décore.
C’est en vendant ces masques, que l’organisme
amasse une partie de ses fonds. Voilà une belle fa-
çon de redonner vie aux vieux sillons qui ont bercé
notre adolescence. En 2005, je me suis associée à
Toxiaide pour produire ces masques. Cette nouvelle
collaboration avec le Collège Jésus-Marie de Sillery
allait permettre à Fonds Toxiaide de demeurer sur le
territoire de la ville de Sillery pour soutenir la commu-
nauté. Pour démarrer ce projet, nous avons reçu de
l’entrepôt Toxiaide des caisses de masques préalable-
ment moulés. Le sol de notre atelier fut, pour un court
instant, couvert de «coquillages de vinyle». Partant de
ces coquilles, j’ai présenté à mes élèves des interpré-
tations du masque à travers le temps et les cultures.
Pendant le vernissage, j’ai pu com-
prendre le bienfait que nos masques
pourraient faire aux personnes toxi-
comanes. Quoique nous savions
depuis le début que ces masques
étaient destinés à Toxidaide, cela
n’a jamais été si réel et les discours
m’ont permis de savoir réellement
ce que nous avons réalisé à l’école.
Xiao He
Moi, ce que j’ai le plus apprécié, au
vernissage, c’est quand monsieur
Landry, de Toxiaide, nous a raconté
son expérience d’ex-alcoolique; ça
a été très touchant et ça m’a fait
comprendre QUE le projet était plus
important que ce que j’avais pensé.
Monica (élève du Mexique)
31. Numéro67Août2009
31
Un projet aux multiples forces
Ce projet nous permet d’aborder le registre symboli-
que entre le masque objet et le masque attitude, ce-
lui qui est, hélas, trop souvent porté. Les matériaux
étant souvent source de créativité, j’invite mes élèves
à apporter des objets récupérés pour personnaliser
leur création. Chacune réalise deux masques dont
l’un sera remis à l’organisme Toxiaide. Elles vivent
alors la séparation de leur création. Elles en sont fiè-
res mais, bien sûr, déchirées; elles comprennent alors
la démarche des artistes. C’est également l’occasion
de développer leur conscience sociale, de rappeler
l’importance de l’entraide dans une communauté.
Par sa nature multidisciplinaire, ce projet est en totale
harmonie avec le Renouveau pédagogique et le PÉI
(Programme d’éducation Internationale).
Enfin, comme toute activité artistique aspire à être vue,
les élèves ont eu l’occasion de participer à des défi-
lés. J’ai aussi présenté plusieurs expositions dont une
en décembre 2008 à la Bibliothèque Charles-H.-Blais
de Sillery. Environ cent cinquante personnes ont as-
sisté au vernissage, en présence des représentants des
médias. C’est, de loin, le moment le plus révélateur
de ce projet. Les élèves étaient vraiment fières de voir
leur travail admiré de toute la population. Pour leur
part, les membres de la direction m’ont confié avoir
été témoins d’un très beau moment: la recontre de la
jeunesse et de la sagesse. En terminant, je suis fière
d’accompagner mes élèves dans leur adolescence,
cette période où l’on cherche un sens à la vie qui se
dessine sous nos yeux.
Je crois que ça vaut la peine puisque
c’est instructif et que c’est pour
une bonne cause. On jumelle dans
ce vernissage le plaisir de l’art et
l’entraide pour la société. Rosalie
> Notes et références
Martiny, C. (2006). Entre la toxicomanie, la prison et l’amour. L’art
thérapie avec cinq détenus toxicomanes (http://cat.inist.fr/?aMod
ele=afficheN&cpsidt=18085500)
Le centre L’étwape de Louiseville: http://www.etape.qc.ca/
Centre de toxicomanie et de santé mentale (Toronto, Ontario):
http://www.camh.net/fr/
Centre de toxicomanie et de santé mentale: http://www.etape.
qc.ca/
Centre Jeunesse j’écoute. Le site par excellence pour les jeunes du
Québec: http://www.jeunessejecoute.ca/
Le site Santé Canada http://www.hc-sc.gc.ca
Service Drogue: aide et référence (Santé et des Services sociaux du
Québec): http://www.drogue-aidereference.qc.ca/
> Pour en savoir plus
Alcooliques anonymes du Québec; Centre de réadaptation alcoo-
lisme et toxicomanie Chaudières-Apalaches (CRATCA); Fédération
des organismes bénévoles d’aide et de soutien aux toxicomanes du
Québec (FOBAST); Fondation Jean-Lapointe; Fonds Toxiaide Inc.;
L’Étape; Portage.
32. Numéro67Août2009
32
RECHERCHE
DANUT
ZBARCEA [SUITE]
coup plus visible que le visible). L’état visuel des
non-réconciliations du monde contemporain est
«construit métaphoriquement» (Sontag, 1977, p.
153-180). Contrairement à l’hypnotisme du cy-
berspace, «la métaphotoicône» fonctionne comme
une figure interrogatrice capable de transcender
le relativisme culturel, qui propose une attitude
de reconnaissance et de réconciliation du monde
dans son essence profonde.
Conclusions
Aujourd’hui on n’a besoin que d’un simple appa-
reil-photo numérique, d’un ordinateur et d’un lo-
giciel approprié pour prouver la facilité de la créa-
tion d’une image virtuelle (Media-Défense, 17).
L’ArchIconologie est une plaidoirie interrogative
en faveur de l’acte d’arrêter son propre regard et
de faire un pas en arrière pour regarder à nouveau
les connexions qui produisent les significations.
«Understanding depends on stepping back from
any situation for enough to get the connections
that ensure understanding» (McLuhan, 2003, p.
429). Par ce projet, on incite à réapprendre à voir,
ce qui signifie réinventer l’outil de réflexion qui
nous permet d’échapper à l’emprisonnement de la
fiction trompeuse créée chaque jour. Réapprendre
à voir signifie aussi repenser le médium qui à son
tour contrôle et donne dimension et forme aux ac-
tions de l’être humain (McLuhan, 2003, p. 430).
Il faut tout d’abord décortiquer le mécanisme de
l’erreur pour mieux le comprendre. Aussi, l’ArchI-
conologie comme processus de questionnement
visuel (dans sa totalité) représente une tentative
de discussion ouverte transdisciplinaire (ensei-
gnement de l’art, culture visuelle, psychologie,
philosophie) et multiculturelle.
> Bibliographie
Barrie, Gunter, Media Research Methods, Measuring Audiences,
Reactions and Impact, Sage Publications, London, 2000
Ballard, J.G., Inner Landscape, Interview with J.G. Ballard By Ro-
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and Practice, Toronto: University of Toronto Press, 2007
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formatisée, http://atilf.atilf.fr/academie9.htm, consulté le 28 mai
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Technology, Hampton Press, Inc., Cresskill, N. J., 2006
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33. Numéro67Août2009
33
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Pennac, D. (2007). Chagrin d’école. Mayenne: Éditions Gallimard
RÉFLEXION PARTAGÉE
SUR L’ART, LE LANGAGE DE L’HOMME
Catherine Barlow, diplômée en enseignement des arts, UQTR
Dès qu’il vient au monde, l’être humain part à la quête du bonheur. Le philosophe André Comte-Sponville
(2001) affirme que le bonheur est une chose imaginaire, dans la mesure où il doit naître de l’appréciation
du quotidien et non de la résultante de ses actions. Si le bonheur est imaginaire, l’imagination pourrait-elle
permettre d’amplifier le potentiel de bonheur d’un individu? Je crois que l’art est un langage fondamental
permettant le développement sain de l’individu qui s’y adonne régulièrement et j’ai voulu savoir ce qu’en
pensaient les jeunes.
Conception de l’art chez les adolescents
J’ai observé que beaucoup de jeunes, même s’ils
n’en semblent pas convaincus, affirment que l’art
est inutile. Je les ai donc invités à en parler avec
moi. Je leur ai demandé: quelle est la fonction du
langage? L’art est-il une forme de langage? Les arts
plastiques peuvent-ils exprimer des sentiments?
Pensez-vous que l’art est une pratique mal com-
prise de nos jours? Pourquoi? L’art peut-il guérir?
Quand vous faites de l’art, avez-vous l’impression
de rentrer dans un univers intérieur? Est-ce que
l’art doit obligatoirement être «beau»? J’ai regrou-
pé les réponses pour en tirer quelques statistiques
éclairant les opinions et croyances de ces adoles-
centes relativement à l’art. Il faut savoir que 85%
des répondants sont des garçons et 15% sont des
filles. Parmi eux, 5 % seulement croient que l’art
doit être beau; 70 % disent ne pas entrer dans un
univers intérieur en créant; 40 % croient que l’art
peut guérir dans une certaine mesure; 60 % croient
que l’art est mal compris de nos jours; 90 % pen-
sent que l’art peut exprimer des sentiments; 10 %
pensent que l’art n’est pas une forme de langage.
De façon plus qualitative, les jeunes estiment que
l’art peut calmer des tensions, qu’il est une façon
de montrer au gens qui nous sommes, qu’il redon-
ne de l’espoir, qu’il est un monde intérieur où on
peut laisser à l’esprit et à la créativité leur pleine
liberté. Ils disent dessiner ce qui leur passe par
la tête, avoir l’impression d’exprimer un talent et
déclarent que «nous avons tous besoin d’imagina-
tion». Ils déclarent aussi qu’en dehors des heures
de classe, ils n’ont pas beaucoup de temps pour
créer et ne sont pas vraiment sollicités à le faire.
Ils attribuent au langage une fonction de transmis-
sion d’émotions, d’expression. Dans le fait de s’ex-
primer, on ex-prime (imprimer à l’extérieur) qui
nous sommes. Les mots «exprimer» et «communi-
quer» reviennent souvent, sans compter les autres
synonymes: partager une vision, démontrer nos
pensées, etc. Les jeunes semblent avoir un besoin
crucial d’extirper d’eux-mêmes leurs peurs, leur
rancœur, leur joie et leur espoir, comme le dit si
bien Daniel Pennac (2007):
Nos « mauvais élèves » (élèves réputés sans avenir) ne
viennent jamais seuls à l’école. C’est un oignon qui
entre dans la classe: quelques couches de chagrin, de
peur, d’inquiétudes, de rancœur, de colère, d’envies
inassouvies, de renoncement furieux, accumulées sur
fond de passé honteux, de présent menaçant, de futur
condamné. Regardez, les voilà qui arrivent, leur corps
en devenir et leur famille dans leur sac à dos. Le cours
ne peut vraiment commencer qu’une fois le fardeau
posé à terre et l’oignon épluché. (p.70)
À mon avis, l’art sert à retirer ces pelures indésira-
bles autour de la beauté de l’individu. Et si le Beau
n’est plus important chez les jeunes de nos jours,
c’est peut-être parce qu’il n’est plus nécessaire de
le chercher en dehors…
Conclusion
En tant qu’héritière de culture, je crois que la
pratique régulière des arts peut favoriser le dé-
veloppement équilibré d’un être humain. Cette
pratique peut très bien s’intégrer à l’apprentissage
du français, de l’anglais, des mathématiques et de
l’histoire, car le jeu s’accompagne du plaisir d’ap-
prendre. Dans ma vie professionnelle, j’ai le goût
d’entreprendre des démarches pour mettre en pla-
ce une Maison des 4 arts pour les jeunes. Chanter,
danser, jouer et créer des œuvres est ce qui, selon
mes conclusions personnelles, pourra le mieux
accompagner les enfants et les adolescents dans
leur cheminement vers le bonheur et la réalisation
de soi, pour construire un monde meilleur.
34. Numéro67Août2009
34
N’avez-vous pas cherché des ressources internet pour votre enseigne-
ment sans jamais les trouver? Avez-vous parcouru le web à la recherche
d’images libres de droit pour illustrer vos cours? Avez-vous investi un
temps fou pour intégrer les TIC en classe? Si oui, Carrefour éducation
peut vous aider. Notre mission est d’épauler les enseignants dans leur
recherche de ressources éducatives sur Internet et de leur proposer des
solutions d’intégration des technologies en classe.
Construire des activités éducatives
à l’aide de Carrefour éducation
Carrefour éducation offre plusieurs ressources qui aident les enseignants
dans la planification des situations d’apprentissage et d’évaluation (SAÉ).
Les ressources présentées sont facilement accessibles et la plupart sont
gratuites et libres d’accès. Elles sont toutes vérifiées et validées par une
équipe d’enseignants de différents niveaux scolaires et de différentes
disciplines. En arts plastiques, l’enseignant a accès à une banque d’une
centaine de scénarios pédagogiques, cyberquêtes et SAÉ. Ces activités
pédagogiques sont produites et expérimentées par divers intervenants
du réseau scolaire, que ce soit les commissions scolaires, les RÉCIT ou
encore des enseignants.
La banque de sites Internet de Carrefour éducation contient plus de deux
cents sites reliés à l’enseignement des arts plastiques destinés aux ensei-
gnants et aux élèves. Tous les sites inclus dans la banque de Carrefour
éducation ont été analysés et répertoriés par des spécialistes de l’édu-
cation qui les ont jugés pertinents pour le Programme de formation de
l’école québécoise.
Les utilisateurs de Carrefour éducation peuvent également interroger la
Collection de vidéos éducatives qui contient une cinquantaine de titres
LE MEILLEUR
DES RESSOURCES
ÉDUCATIVES
EN QUELQUES CLICS
Patrick Poirier et Brigitte Besnard, Carrefour éducation
35. reliés à l’enseignement des arts pour les élèves de tous âges. Les vidéos
de cette collection, disponibles en format DVD ou en téléchargement sur
abonnement, traitent de divers sujets artistiques et apporteront une autre
dimension à votre enseignement. En outre, Carrefour éducation peut
aider les enseignants à interroger la banque de données de Logiciels édu-
catifs, un organisme qui répertorie des logiciels qui peuvent être utilisés
en classe. Cette banque de près de mille logiciels, dont une cinquantaine
touche directement les arts plastiques, offre une fiche technique détaillée
et une critique pour chaque logiciel. En partenariat avec Forvir, Carre-
four éducation offre l’accès à une banque de documents de formation et
de tutoriels touchant divers logiciels. Au besoin, l’enseignant y trouvera
une formation qui lui permettra d’utiliser efficacement les logiciels ciblés
avant de les utiliser en classe.
Par ailleurs, il peut être intéressant et motivant pour l’élève de pouvoir
intégrer des images pour illustrer son propos. Carrefour éducation offre
la possibilité de trouver des images et des photos, toutes gratuites et li-
bres de droits, pour un usage pédagogique et non commercial. L’utilisa-
tion de cette banque est l’occasion idéale de montrer aux élèves qu’il est
possible d’utiliser des images en toute légalité. Parmi nos partenaires,
la Société des Musées québécois (SMQ) et le Musée virtuel du Canada
offrent des ressources qui sont d’une grande utilité pour l’enseignement
des arts plastiques.
Finalement, un enseignant pourrait décider de piloter une SAÉ en colla-
boration avec un collègue d’une autre école. Les élèves des deux classes
peuvent échanger tout au long de l’activité par exemple et se rencontrer
en visioconférence à la fin du processus. Pour réaliser un tel projet, le re-
gistre Classe@classe, tenu par notre partenaire Prof-Inet, est d’une gran-
de aide. Ce registre annonce des projets de télécollaboration mis sur pied
partout à travers la Francophonie. Par exemple, une classe du Québec
peut se joindre à une classe de Belgique pour mener un projet semblable.
Il est également possible d’annoncer un nouveau projet dans le but de
recueillir des participants.
Un outil incontournable pour les enseignants
Carrefour éducation regroupe un grand nombre de ressources pour les
enseignants. Il permet à ces derniers de chercher efficacement des res-
sources éducatives sur Internet sans avoir à dépouiller les milliers de
résultats que proposent les moteurs de recherche généralistes. Surtout,
Carrefour éducation est la porte d’entrée d’un réseau d’organismes qui
œuvrent dans le réseau scolaire québécois et qui produisent des ressour-
ces à l’intention des enseignants. Venez nous visiter au www.carrefour-
education.qc.ca
RESSOURCE
Pour avoir plus d’information ou pour
des présentations dans votre école :
Patrick Poirier: poirierp@grics.qc.ca
Brigitte Besnard: besnardb@grics.qc.ca
Numéro66Novembre2008
35
36. Numéro67Août2009
36
Des voyages
culturels sur
mesure pour
vos étudiants!
Dessin d’observation à Paris, ateliers de théâtre à New York ou cours de flamenco en Espa-
gne… Saviez-vous qu’une palette de destinations s’offre à vous et à vos étudiants en complé-
ment à votre programme scolaire? D’année en année, les enseignants en arts visuels, en théâ-
tre et en danse voyagent à travers le monde avec leurs élèves pour découvrir d’autres cultures,
pour échanger avec des professionnels de tous les domaines et pour découvrir les plus belles
collections d’œuvres d’arts.
Voici les destinations les plus populaires pour les enseignants spécialisés :
New York: Ateliers au Museum of Modern Art (MOMA), ateliers au Metropolitan Museum of Art,
visite du Guggenheim, ateliers sur Broadway, visite du Metropolitan Opera House, tour de ville
axé sur la culture hip hop, messes gospels dans Harlem, etc.
Boston: Visite du Museum of Fine Arts, visite de l’Institute of Contemporary Art, balade sur
Newbury Street, tour de ville axé sur l’architecture, visite du Griffin Museum of Photography,
visite de l’Isabella Stewart Gardner Museum, etc.
Philadelphie: Visite du Musée Rodin, visite du Philadelphia Museum of Art, etc.
Paris: Visite du Musée du Louvre, du Musée d’Orsay, de l’Opéra de Paris, du Centre Georges
Pompidou, etc.
Londres: Visite du British Museum, du Tate Modern, de la National Gallery, de White Chapel,
du White Cube, du Tate Britain, etc.
Madrid: Visite du Musée Reina Sofia, du Musée du Prado, du Musée Thyssen-Bornemisza, etc.
Pour plus d’informations, informez-vous auprès d’un conseiller ou d’une conseillère de chez
Voyages Tour Étudiant 1 800 463-2265 ou demandez une soumission en ligne au www.vte.
qc.ca