Logement : une réforme à construire avec les professionnels
1. DE FRANÇOIS DAVY
Logement : une réforme à construire avec les professionnels
N° 21415
jeudi 11 avril 2013
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675 mots
IDÉES & DÉBATS—LE POINT DE VUE
P
résentée prochainement en
Conseil des ministres, la grande
réforme du logement et de
l'urbanisme est ambitieuse et néces-
saire. Ambitieuse, car elle s'attaque
de manière globale aux difficultés
persistantes dans un domaine au
coeur des préoccupations des Fran-
çais : les rapports entre bailleurs et
locataires, la copropriété et les
conditions d'exercice des manda-
taires sociaux.
Nécessaire aussi, car il est impératif
de fluidifier les mécanismes régis-
sant le marché de l'immobilier, pour
faire face aux difficultés à se loger
que rencontrent les plus modestes,
les plus jeunes, mais aussi, désor-
mais, les ménages a priori solvables.
Représentant plus de la moitié des
transactions immobilières, des
contrats de location et de gestion lo-
cative, ainsi que 95 % de la gestion
des copropriétés, les professionnels
de l'immobilier souhaitent apporter
une expertise et un savoir-faire utiles
à la réflexion des pouvoirs publics. Or
certaines mesures annoncées pour-
raient avoir des effets contre-produc-
tifs, alors même que les objectifs
poursuivis sont très légitimes.
Dans l'avant-projet de loi proposant
la création d'une garantie universelle
des risques locatifs, un prélèvement
mensuel de 3 % environ du loyer per-
çu financerait une « Sécurité sociale
du logement ». La sécurité du bailleur
est évidemment un argument impor-
tant pour inciter un propriétaire à
louer son bien, néanmoins, il existe
déjà des systèmes de garantie effi-
caces. Depuis trente ans, nous pro-
posons une telle protection. Pour un
coût égal, voire inférieur au dispositif
prévu par l'Etat, notre garantie prend
en charge les impayés dès le premier
mois sans limitation de montant et
de durée. Ce système, auquel sous-
crivent près de 60 % de nos bailleurs,
est équilibré et ne pèse pas sur les fi-
nances publiques.
Concernant la gestion des coproprié-
tés, le gouvernement souhaite plus
de concurrence entre les syndics.
L'objectif est louable, mais
l'expérience nous montre qu'un man-
dat d'une durée générale d'un an ne
permet pas d'aborder les questions de
fond avec les copropriétaires dans les
meilleures conditions. Une durée
ferme de cinq ans au minimum ou un
mandat d'une durée indéterminée ré-
vocable chaque année à l'assemblée
générale répondrait à cet objectif.
L'expertise que les professionnels de
l'immobilier peuvent apporter sur ces
sujets sera encore plus profitable si
elle est portée par une organisation
professionnelle unique, à l'image de
l'instance de régulation que souhaite
la ministre du Logement. C'est une
excellente première étape, mais il
convient d'aller plus loin. Un conseil
supérieur des professions immobi-
lières, complété par une commission
nationale de discipline dotée de pou-
voirs de sanction et représentant
professionnels et consommateurs
marquerait un changement significa-
tif. Ces instances s'appliqueraient à
tous les acteurs de l'immobilier et
non plus seulement à ceux faisant
partie de syndicats professionnels,
comme c'est le cas actuellement. En-
fin, ce conseil, véritable garant des
bonnes pratiques, devrait être prési-
dé par un professionnel dont
l'indépendance et l'autorité sont re-
connues.
C'est dans un esprit constructif mais
néanmoins vigilant que nous abor-
dons ce projet de réforme. Nous favo-
risons le travail de concertation me-
né par les pouvoirs publics et aidons
à l'élaboration d'une nouvelle légis-
lation ambitieuse et efficace, qui
fasse véritablement progresser le
marché de l'immobilier. Mais nous
restons vigilants, car de nombreux
écueils et effets pervers guettent ce
secteur complexe, à l'équilibre fra-
gile. Enfin, nous espérons que le re-
cours à l'ordonnance ne soit qu'une
rumeur. Cette réforme a droit au
grand débat qu'elle mérite, avec les
acteurs du secteur puis avec le Parle-
ment.■
par François Davy
François Davy est président de
Foncia