La Tunisie est un pays Nord Africain marqué par des invasions de différents groupes ethniques. En plus des facteurs historiques et économiques, la consanguinité et l’endogamie ont façonné le paysage génétique de la population Tunisienne. Ceci peut être illustré par le spectre des maladies génétiques et leurs propriétés particulières les rendant un vrai problème de santé publique. Par une recherche textuelle bibliographique nous avons collecté les données génétiques, moléculaires et épidémiologiques sur ces maladies en Tunisie. Ces données ont été intégrées dans une base de données. Des données non publiées de notre laboratoire collectées depuis 10 ans alimentent aussi notre base de données. L’interrogation de cet outil a retourné plus de 400 maladies génétiques dont plus de 60 % sont autosomiques récessives. Soixante-quinze comorbidités individuelles et/ou familiales ont été détectées. La consanguinité est notée parmi 39 associations comorbides. Vingt-et-une mutations fondatrices et 11 mutations privées sont la cause des 34 maladies primaires et de 13 maladies associées. Les outils post-génomiques récents semblent être la meilleure approche pour identifier l’étiologie moléculaire dans le cas de comorbidité individuelle et pour confirmer une nouvelle expression phénotypique. Certes, les résultats génomiques générés doivent être interprétés avec précaution dans le cas des découvertes fortuites dans le contexte de populations consanguines. Il est donc important de centraliser ces informations sur la comorbidité afin d’attirer l’attention des cliniciens et des chercheurs sur leurs occurrences dans les populations consanguines puisqu’elles représentent un défi pour établir un conseil génétique et un diagnostic prénatal même si les mutations sont connues.
Le rôle central de la médecine interne dans l’évolution des systèmes de santé...
Comorbidité dans les familles tunisiennes
1. Références :
[1] Romdhane L, Abdelhak S. Genetic diseases in the Tunisian population. 2011. Am J Med Genet A: 155A(1):238-67.
[2] Romdhane L, Kefi-Ben Atig R, Azaiez H et al. Founder mutations in Tunisia: Implications for diagnosis in North Africa and Middle East. Orphanet J Rare Dis. 2012; 7: 52.
[3] http://cags.org.ae/ctga/
[4] Romdhane L, Messaoud O, Bouyacoub Y et al. Comorbidity in the Tunisian population. Clin Genet. 2015 May 22. doi: 10.1111/cge.12616.
[5] Messaoud O, Ben Rekaya M, Kefi R et al. Identification of a primarily neurological phenotypic expression of the xeroderma pigmentosum complementation group A in a Tunisian family. Br J Dermatol 2010: 162 (4): 883–886.
Introduction:
La Tunisie est un pays Nord Africain de 11 millions d’habitants marqué par des invasions de différents groupes ethniques tout le long de son histoire. Ces évènements historiques, en plus
des facteurs économiques et socio-culturels, essentiellement la consanguinité et l’endogamie, ont façonné le payasage génétique de la population Tunisienne [1,2]. Ceci peut être illustré par
le spéctre des maladies génétiques dans la population Tunisienne ainsi que leurs propriétés particulières les rendant un sérieux problème de santé publique dans le pays [1,2]. Actuellement,
pas moins de 400 désordres d’origine génétique ont été décrits dans la population Tunisienne dont plus de 60 % sont autosomiques récessifs (Figure 1).
Sources de données et curation:
Les données relatives à la comorbidité ont été récupérées à partir de notre base de données locale sur
les maladies génétiques dans la population Tunisienne qui intègre des données génétiques, moléculaires
et épidémiologiques sur plus de 400 pathologies héréditaires [Unpublished]. Cette base de données inclut
des données déjà publiées dans les bases de données bibliographiques et la litérature grise de même
que les données générées dans notre unité de recherches ces 10 dernières années. Cette étude sur la
comorbidité a été élargie aux populations Arabes. Ainsi, la base de données CTGA a été aussi interrogée
[3].
Classifications des comorbidités :
Soixante-quinze associations comorbides ont été décrites parmi les patients Tunisiens [4]. Elles ont été
classées en 4 groupes majeurs selon leurs étiologies: comorbidités de maladie génétique-maladie
génétique, de maladie génétique-maladie congénitale, de maladie congénitale-maladie congénitale et
d’aneuploidies. La quatrième classe de comorbidité d’aneuploidies est en plus subdivisée en 3 autres
sous-groupes (Figure 2). Les associations comorbides peut concerner les maladies du même mode de
transmission, essentiellement le mode autosomique récessive (AR) (34 %) ou pas. Dans le second plus
important groupe, les maladies primaires à gènes AR comptent pour 20 % de l’ensemble des données
(Figure 2).
Propriétés et fréquences des comorbidités en Tunisie:
La comorbidité individuelle est observée chez au moins 50 personnes atteintes. Les comorbidité
individuelle et familiale ont été rapportées au sein de la même famille. Dans environ 50 % des
associations comorbides, la consanguinité a été notée. La comorbidité a été aussi rapportée dans
d’autres populations consanguines avec des différences par rapport à celles décrites dans la population
Tunisienne (Figure 3). Quelques cas de comorbidité ont été rapportés pour la première fois dans la
population Tunisienne. Leurs apparitions peuvent être fortuites ou au contraire liées au fond génétique de
la population Tunisienne puisque quelques uns sont dus à des mutations fondatrices spécifiques à la
population Tunisienne, partagées avec d’autres populations et privées. De plus amples investigations
moléculaires des nouvelles associations comorbides d’étiologie inconnue doivent être éffectuées pour
confirmer leurs spécificités à la population Tunisienne.
Défis pour le diagnostic et pour le phénotypage dans les populations consanguines:
Bien que le diagnostic des maladies rares a été nettement amélioré avec le développement des
capacités locales pour l’investigation moléculaire en Tunisie, la liste des nouveaux phénotypes de
même que les associations comorbides inhabituelles sont en augmentation comme peut l’illustrer la
famille consanguine Tunisienne de la figure 4. Le patient IV-3, atteint de Xeroderma pigmentosum A
(XP-A) et d’ichthyose, a développé un mélanome à 26 ans (Figure 4). L’investigation moléculaire a
révélé la présence de la mutation fondatrice p.R228X [5]. Certes, l’étiologie moléculaire de l’ichthyose
et du mélanome devrait être élucidée avec d’autres outils récents post-génomiques dans le but de
déterminer si cette nouvelle expression phénotypique constitue un continuum du spéctre phénotypique
ou non.
Figure 3: Fréquence des comorbidités dans les populations Arabes
Figure 2: Classification des comorbidités
$ Romdhane L: lilia.romdhane@gmail.com
Comorbidité dans les familles Tunisiennes
Romdhane Lilia1,2$, Messaoud Olfa1, Romdhane Safa1 , Bouyacoub Yosra1, Kerkeni Emna3, Naouali Chokri1, Cherif Ben
Abdallah Lamia1, Tiar Afaf1, Charfeddine Cherine1, Monastiri Kamel4, Chabchoub Imen5,
Hachicha Mongia5, Abdelhak Sonia1.
•1 Biomedical Genomics and Oncogenetics Laboratory, Institut Pasteur de Tunis, Université Tunis El Manar, Tunis, Tunisia.
•2 Département des Sciences de la Vie, Faculté des Sciences de Bizerte, Université Tunis Carthage, Zarzouna, Tunisia.
•3 Laboratoire de Pharmacologie, Faculté de Médecine de Monastir, Université de Monastir, Monastir, Tunisia.
•4 EPS Fattouma Bourguiba, Centre de Maternité & de Néonatologie de Monastir, Service de Réanimation et de Médecine Néonatale, Monastir, Tunisia.
•5 Service de Pédiatrie, CHU Hédi Chaker, Sfax, Tunisia.
Figure 4: Association inhabituelle de XP-A, ichthyose et mélanome
dans une famille Tunisienne consanguine
Figure 1: Classification des maladies génétiques dans la population
Tunisienne selon le mode de transmission
AR: Autosomique récessive
AD: Autosomique dominant