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Chroniques de Fouesnant - hzzu0b
1. Bénodet
La lutte BRETONNE à BÉNODET
La lutte semble avoir été depuis des siècles le sport préféré des bretons. Un exercice
pour hommes forts et agiles, demandant beaucoup de concentration et de volonté.
Tout le canton de Fouesnant était réputé pour ses champions de lutte bretonne. Chaque
commune avait les siens, et ils défendaient chèrement l'honneur de leur clocher. Lorsqu'ils se
déplaçaient en force, à Scaër, à Scrignac ou ailleurs, jusque dans le Morbihan et les Côtes du
nord, il leur arrivait de rafler toutes les mises, et de ramener le " maout ".
Bénodet a connu de fameux lutteurs, champions de Bretagne, champions inter
celtiques. Nous avons rencontré deux de ces athlètes, qui ont raccroché leur " roched " depuis
35 ou 40 ans, et qui vous livrent quelques souvenirs.
Yvon MORVAN, 69 ans, demeurant à Ty-Coat :
" Je suis né à Ty Coat ; j'ai été initié à la lutte à l'âge de 7 ans par Jean-Louis YVONNOU
qui demeurait au Moulin de Keraven, à deux pas. Après un bref séjour à Paris, je suis revenu
au pays et j'ai été gagé comme vacher à Kermaout. J'ai fait mon premier combat à la fête de
la Tréminou à l'âge de treize ans, contre Mathieu CLOAREC. Jean-Louis YVONNOU, adjoint
au maire, continuait de m'encourager, et il m'avait fait confectionner une tenue: Culotte
rouge, chemise blanche, ceinture bleue.
A partir de dix-sept ans, et jusqu'à la déclaration de guerre, je luttais tous les
dimanches de l'été dans les fêtes et les pardons; je gagnais trois fois sur quatre. Le plus grand
tournoi du canton avait lieu à Saint Cadou.
Après la libération, les tournois de lutte bretonne ont repris. En 1947, je suis devenu
champion du Finistère en battant Alain PETILLON à Scrignac, au mois de juillet. Quelques
semaines plus tard, à Carantec, j'étais champion de Bretagne après avoir battu
LAURENGUER des Côtes du nord et BRIAND du Morbihan.
J'ai lutté jusqu'à l'âge de 34 ans, et j'ai perdu mon dernier combat contre Joseph
QUINIOU, de Clohars-Fouesnant, sur abandon pour blessure.
Benodet avait alors plusieurs lutteurs de renom, dont le plus connu est sans conteste
Laurent CADIOU, de 6 ans mon aîné. Il a été champion inter celtique des moins de 18 ans,
puis champion de Bretagne. , catégorie lourds. Il avait deux frères, François et Alexandre, qui
n’avaient pas son talent, mais étaient de bons lutteurs. . .
2. CALLAC, le 15 août 1952. La remise des trophées aux champions.
(de froite à gauche : CHAPMAN, VAUCHER, LE ROY, LE BROD,
Mathurin PERON, FOULER.
Il y avait aussi mon frère André, les frères François et André Le BRETON, Jean et
André HERVE ; Vincent BERROU, qui est devenu champion inter celtique, et son frère
Mathias. D'autres, que J'oublie.
Dans ma jeunesse, il n'y avait pas de fête sans un tournoi de lutte bretonne; à Bénodet, il
avait lieu en septembre, le lundi du pardon, dans un champ du quartier du "Croissant" ; il
yen avait aussi à Pont-Henvez pour le pardon du Perguet. Je me souviens d'avoir lutté nupieds sur du chaume de blé.
J'ai lutté dans tout le département, dans le Morbihan, les Côtes du nord; à Rennes, en
nocturne, à Quimper en exhibition. J'ai rencontré des lutteurs célèbres comme Jean
MERRIEN, "l'homme électrique" ou "Paotr rouz», Yves VAUCHER, dit "le taureau". J'ai
même lutté contre un Allemand à Trégourez pendant l'occupation.
Quel est ton meilleur souvenir ?
C'est le taureau de Scrignac ! Un grand tournoi était organisé dans cette commune, avec la
participation des meilleurs lutteurs du moment. Premier prix: Un taureau de 600 Kgs !
Je m'y suis rendu avec Laurent CADI0U, et les frères PET1LLON de la Forêt-Fouesnant, et
nous avons décidé à l'avance de partager nos gains. J'ai eu le premier prix en catégorie
Légers; Michel PET1LLON a eu le 1er prix des Moyens, et Laurent CADIOU, vainqueur
toutes catégories, remportait le taureau, qui a été vendu sur place à un boucher pour 12.000
Frs ! Nous sommes revenus à la maison avec 8000 Frs en poche chacun, c'était presque la
richesse
Et ton plus mauvais souvenir ?
Tous les "lamm" m'ont laissé. Je n’aimais pas perdre! Et il y a eu le tournoi de Névez, qui a
été à l'opposé de celui de Scrignac.
Nous étions cinq dans le taxi de Pierre BERTHOLOM : Laurent et Alexandre CADI0U, André
BRETON, mon frère André et moi-même, partis avec l'intention de rafler une bonne moisson
de prix. Mais il n'y a pas eu de spectateurs, et les organisateurs qui avaient décidé de répartir
tout le produit des entrées, n'ont pu que payer notre taxi !
3. Mathurin PERON, 64 ans ,
rue de Cornouaille
" MATO " a fait toute sa carrière de lutteur à
Bannalec où il exploitait la ferme paternelle
jusqu'à son mariage avec Antoinette LE
NOACH. Mais il habite Bénodet depuis 38
ans et y a remporté de beaux tournois. Il a
lutté dès son jeune âge, tout comme ses frères
Raymond
et Lili. Il eut son premier succès dans un
tournoi à Kernével, en battant QUINTRIC,
de Rosporden. Il nous raconte: " J'ai pratiqué
la lutte "mod kozh", où le concurrent
promenait son mouchoir à bout de bras dans
l'assistance, jusqu'à rencontrer un adversaire
qui accepte le combat.
Plus tard, est venu le docteur COTONNEC, qui a défini les catégories : Moins de 18
ans, légers, moyens et lourds. "
En quelques années, MATO a aligné les victoires qui lui constituent un riche
palmarès. Et c'est en 1952 qu'il bat tous les records, après, avoir été quatre fois finaliste des
championnats de Finistère et de Bretagne.
" Je suis devenu champion du Finistère à Fouesnant en battant GUILLEMOT, de
Querrien ; SALAUN, de Plonévez-du-Faou ; et LE PAPE, de Benodet.
Le 10 août à Scrignac, je bats les deux frères SYLVESTRE de Guiscriff, et j'ai droit à
l'écharpe de champion de Bretagne.
A Callac, le 15 août, est organisé le grand tournoi inter celtique, et je remporte le titre
en battant l'Anglais Thomas FORD, en deux manches de huit minutes. "
En pleine gloire, il abandonne la lutte, et se fait boulanger à Bénodet.
Et maintenant, en feuilletant les coupures de presse qui exaltent les qualités du lutteur,
il vous dit, avec un gentil sourire :
" Tout çà c'est du passé! "
4. La lutte bretonne « Ar Gouren » ce très ancien sport
celtique et rural, est encore fort en honneur en Bretagne, où
elle compte près d'un millier de pratiquants, ainsi que dans les
pays de tradition celtique: Galles, Irlande, Ecosse.
L'efficacité de ce sport est basée sur une technique
précise du déséquilibrage, l'utilisation maximum des réflexes,
de la force et de l'intelligence.
Le fait que la lutte bretonne se pratique debout, et que
le combat ne se continue jamais au sol, lui confère une
noblesse certaine.
Les lutteurs sont pieds nus et en chemise de toile.
Avant de combattre, ils font le serment de loyauté, ils se
donnent l'accolade, et se serrent la main avant chaque
empoignade. Le but recherché est le " lamm ", qui consiste à
mettre l'adversaire sur le dos, les deux omoplates touchant le
sol.
Le lutteur ne doit pas refuser le combat; ses principales
attaques sont le" kliked " (le pied verrouille la jambe de
l’adversaire); le" taol biztroad " (le coup du gros orteil,) le "
taol korn raer ", la ceinture et ses variantes.
Le " gouren mod koz " (à l'ancienne mode) se faisait au défi,
sans distinction d'âge et de poids. A l'annonce d'un prix, le plus
intrépide se levait et faisait le tour de l’assistance ; si aucun
adversaire ne se déclarait, le prix lui était acquis. Si un autre
concurrent lui mettait la main sur l'épaule et lui disait" chomet
n'ho sao " (restes debout), le combat pouvait commencer».