6. TA.BLE DES MÂTInES
Avant-Propos.
1ntroduction.
CHAPI'l'RE 1. Le Règne de Dieu comme danale'
Ciel aussi sur la Terre •. de 1 à 12
Il. La Pratique des enseignements
reiigieU'r...."."." .•.•.•.••..•• 13- 20
11l. La loi du progrès . 2i- 30
IV. La "Parole-ré'l"élée . 31- 40
v. L'âme vivante et îmmortellê ..••
41- 50
VI. La Trinité ... , .. , ..... , ••..•..
51- 56
Vil. La Liberté......•...••••••....
58- 66
VIII. L'Autorité " ~
67- 72
IX. Les demeures dan. 1eR Cieux. '"
73- 82
x. Le selltiment du beau . 83- 91
XI. L·Homme..•... , . 92- 98
XII. Le grand monde . 99-107
A:III. Le lans..age des nombres ......• 108-118-_
XIV. Le langage des couleurs. , ..... 119-126
xv. La loi du mariage....•........
i27-133
XVI. Le Décalogue .. ~ . 131-140
XVII. Les fJces de Jéhovah et la T<ible
de Dieu . 141-144
XVJll. L'Amour du prochain et la Table
de l'Homme.•........••.•..• 145-150
XIX. La Prière•..••.•." , ....• 151-157
xx. L'Oraison Dominicale .•••••...• 158-167
XXI. La statue de Nabuchodnetzar ..• 168-176
xxu. De la Mort, du Jugement dernier
et de la Résurrection .•....•• 177-185
XXlll. De l'Esprit-Saint •............ , 186-191
XXIV. Les Préadamites ••....•••.•..• 192-203
xxv. Le Jardin de la Sagesse..•••.• , 204-24J
7. TABLE DES MATlÈal':S
XXVI. Le déclin d'un beau Jour.... .•. 215-224
XXVIJ. La 'chute de l'homme et la Ré-
demption. . . • • . . • . • • •• • . . . .• 225-23 2
UVllI. Le Délug e....... .... .. ..... .• 2:i3-23
8
XXIX. L'Arche de Noé.. ........ ...... 239-24 5
xxx. Le Signe de l'Alliance enlre Dieu
et l'Hom me.... ......... .... 246-25 4
XXXI. L'Ivresse de Noé.. ......... .... 255-26 0
XUIl. La Tour de Babel ......... .. ..• 261-26
9
XXXIl1. Les Hébreux et le Culte des Sa-
crifices• •. '.' •.•.•.•• .••.•• " 270 - 278
XXXIV. L'Eglise Chrétienne et le Royau-
me du ~~igneur............. 279-'<:87
xxxv. Î./Eglise chrétienne etles miracles 288-29 3
UVI. La Bible écrite et la Bible de la
nature ........ ........ ...... 294-~99
XXXVII. L'Eglise de l'Avenir , 300-30 5
XXXVllI. La Question sociale ...... 360-31 0
8. AVANT-PROPOS.
Nous sommes à Pépoque de l'ouverture de
l'Exposition universelle de Chicago dans l'an
née 1.893. Le Congrès universel des Représen
hints de toutes les religions doit s'y réunir
durant le mois de septembre. Ce Congrès a
été qualifié dans les journaux anglais et amé
ricains de Parlement des religions; il l'a été
aussi et à plus juste titre, de premier Concile
réellement œcuménique.
:1 Mais ce Congrès ne peut produire des ré~
'1
1 sultats assez utiles pour mériter ce dernier
1
titre, qu'à ta condition de proclamer au monde,
les principes communs à· toutes les religions
sous une forme assez frappante pour les popu
lariser, et pour mettre l'opinion publique en
demeure de poser les premières assises de
PEglise de l'Avenir.
Il faudrait que ces premières assises de l'E
glise, soient présentées par le Congrès des
religions comme susceptibles d'établir la
fraternité daus les sociétés humaines. Cette
proclamation de n()s principes religieux uni
versels se présenterait comme une manifes
tation solennelle de la possibilité de la vic
toire de l'humanité sur l'esprit sectaire des
Eglises du passé; peut·être, serait·elle capable
9. Il AVANT-PROPOS
de renverser les obstades qui s'opposent, dans
le monde des nations, à la solution de toutes
les questions sociales.
Celte vICtoire d~ l'humanité sur l'antago
nisme des classes, ne peut être attendue que
par ceux qui pensent qu'il existe def:! traits
d'union sérieux dans les tendances de l'es
prit nouveau, tendances qui auront pQur oL
jet de motiver une fédération de toutes les
Eglises dans le sens d'un adoucissement d~s
mœurs publiques et internationales. Mais
comme il est généralement reconnu depuis le
dix-huitième siècle que tous les hommes peu
vent obtenir le salut de leurs âmes, dans quel
que religion qu'ils soient nés, on peut en con
clure qu'il existe des principes communs à
toutes les Eglises. Leur proclamation contri
buerait donc à rallier les hommes dans l'ac
complissement d'une union humanitaire com
mune, malgré leurs différences de cultes.
Alors les Eglises rivaliseraient PQur mettre en
avant ces principes com~uns, tandis qu'eiles
laisseraient à l'arrière-plan tout ce qui ne
peut être considéré comme susceptible d'uue
application universelle.
A cette occasion, il nous a paru utile de pu
blier sous le titre d'Evangile social, un livre
qui présentera l'ensemble des principes reli
gieux que nous croyons les mieux adaptables
au progrès des idées modernes dans leurs
tendances humanitaires.
Les tendances humanitaires nous paraissent
seules susceptibles d'inspirer le corps du droit
divin de l'Eglise de l'avenir et par suite, p~r
10. AVANT-PROPOS III
voie de conséquence, le corps du droit positif
humain de la civilisation de l'avenir.
Nous ne pouvons pas ici rechercher et déga
ger un par un, ·chaque principè commun à
toutes les religions; d'ailleurs c'est à chaque
Eglise qu'il appartient dE'! juger pour elle·
môme. Dès lors, en effet, qu'il est reconnu que
le criterium de chaque Eglise est d'aspirer
à r6alisHr dans tous les rapports sociaux,
les applicalions de l'amour de Dieu et de
l'ameur du prochain, en d'autres termes, les
applications de la justice et de la fraternité,
toute fausse doctrine:se trouvera en con tradic
tion avec ce principe fondamental et univer
sel; elle se corrigera donc d'elle·même dans
les applications sinon dans ses conséquences
logiques.
Nous nous sommes efforcé de présenter dans
..Jlotre Evangile social, un enchaînement
logique et en même temps biblique de ce prin
cipe fondamental et universel de toutes les
religions. De plus, nous avons voulu montrer
les applications de ce principe religieux uni
versel dans une étude également biblique
d'une petite philosophie de l'histoire; nous 1
avons, par conséquent, voulu encorê montrer,
quelle a été l'évolution de l'idée religieuse
dans le passé et quelle elle doit être dans
l'avenir.
C'est aux diflérentes communions qui se
partagent le monde religieux, à proclamer ce
qu'elles peuvent accepter et ce qu'elles en
tendent rejeter de l'ensemble de ces doc
trines qui sont comme les prin_cipes èo,l'!.S
(1 titutifs de l'Eglise de l'Avenir.
11. IV ATANT-PROPOS
Les femmes, en même temps que les
hommes, devant être convoquées au Congrès
universel des religions,il y a lieu d'espérer que
cela produira de bons rësultts. En effet, ll'.ls
Eglises du passé ont eu le tort, selon nous, de
ne pas appeler les femmes à coopérer à l'œuvre
missionnaire commune : la fraternité existe
en théorie ou en principe dans nos aspirations
sociales et politiques modernes, beaucoup plus
que dans nos mœurs et dans nos institutions.
L'œuvre de la femme est toute de cœur; elle
doit s'inspirer de l'amour divin, de même quo
l'homme doit s'inspirer de la sagesse divine:
tous deux, l'hômme et la femme, coopèrent
ainsi à l'établissemtJnt de la justice et de la
fraternité dans les mœurs et dans les institu
tions.
Lorsque l'union sera réellement établie sur
le fondement de la charité et de la solidarité
sociales, les ditl'érentes communions pourront
sans inconvénient accuser des ditl'érences de
doctrines et de cultes, mais elles n'en seront
pas moins unies et liées par l'unité du but qui
est de régénérer les âmes et les mœurs par des
moyens aussi variés que les individualités
elle-mêmes. Par le choc et le frottement de
toutes ces différences, les angles trop aigus
s'useront d~ux-mêmes et t1ntront par coïnci
der exactement; les ressemblances prendront
alors un développement de plus en plus ac
centué par les applications des principes de
justice et de fraternité dans le monde des
affaires et dans les rapports sociaux.
Notre travail n'a pas d'autre objet que de
montrer àquel point l'enseignement de la Bible
12. AVANT-PROPOS V
peut apparaître comme la source originaire de
toutes les autres littératures sacrées; de mon
trer à quel point aussi, cet enseignement de la
sagesse divine, peut trouver ses applica
tions dans toutes les bl'anches des sciences
sociales, et ainsi devenir susceptible de rallier
Jes hommes dans un même sentiment clejus
tice et de fraternité, bien que cet ensei~nement
sacré ne soit pas encore compris ni goüté par
le plus grand nombre et qu'il ne soit pas
même reconnu généralement, comme renfer
mant une telle etl'icacité.
Puisse le Congrès de toutes les religions
aboutir à un résultat utile et réussir à hâter la
victoire de l'1IUmanité sur l'esprit sectaire des
Eglises du passé. Puisse-t-il inaugurer offi
ciellement la nouvelle ère de l'Eglise de
l'Avenir.
13.
14. INTRODUCTIO~
Sommaire
1. L'Evangile l;ocial. - 11 Le socialisme. - III Le spiritisme.
- IV. L'Eglise de l'Avenir. - V. Emmanuel Swedenborg.
- VI. De l'autol'ité en matière religieuee.-VIl, Le lit de
Procuste.
l
Depuis dix· huit siècles, l'3s différentes Egli
ses chrétiennes ont proclamé que la Bible était
un livre divin; mais en faisan t cela, elles n'on t
rempli que la moitié de leur lâche; elles n'ont
pas su pénétrer suftiisamment l'esprit de ses
textes à travers le voile de leur leUre, et elles
n'ont pas réussi jusqu'à présent à la popula
riser comme un livre humain autant que divin,
ou comme un Evangile social·
L'insuffisance de nos Eglises actuelles pour
l'achèvement de leur mission daus le monùe,
ticnt aux abus du pouvoir sacerdotal; celui
ci s'cst mon'ré sectaire et intolérant, parce
qu'il a beaucoup plus songé à llominer sur les
15. VIIi INTRODUCTION
consciences par ses dogmes qui, cependant.
s'écartent trop souvent de l'cnseignem.cnt de
la Bible, qu'à resserrer les liens fraternels qui
doivent unir Jes hommes entre eux.
Les Eglises ge sont mises en dehor~ de l'hu
manité en prêchant 'la charité sous la seule
forme de l'aumône du riche à l'égard du
pauvre, au lieu de la présenter sous la formo
d'une affection réelle et fraternelle pour le
1 semblable, que tous, riches comme pauvres,
doivent éprouver les uns pour les autres. C'est
cette affection qui doi t nous porter à remplir
toutes nos fonctions avec un esprit de justico
et d'amour qui constitue la vraie charité.
De cette méprise vient. que la mendicité est
devenue un métier don t on fait parade à la
porte des églises, et elle s'est pour ainsi dire
élevée à la hauteur d'une institution ou d'un
mal nécessaire. De là aussi est née la rivalité
des classes, les riches n'étant plus considérés
autrement que comme des oppresseurs par les
., pauvres et les pauvres comme des importuns
'' erdes fainéants par les riches. De là enfin, est
, né l'antigonisme du capital et du travail.
II
Il en est résulté que les principaux chefs des
écoles socialistes se sont éloignés de toute
1doctrine religieuse, parce qu'ils ont vu que la
plupart des chrétiens étaient satisfaits de l'état
actuel de la société. La religion, voilà donc
16. INrRODUCTI0N IX
l'écueil devant lequel se heurtent même ceux
qui professent dans leur écrits, que le socia-
Hsme exige pour devenir pratique, une éthi- 1
que bien supérieure à celle qui distingue nos
mœurs actuelles.
Ces derniers prétendent pouvoir créer une
morale, indépendante de tout lien religieux;
ils nient que les liens fraternels des hommes
doivent dériver, par voie de conséquence, de
leurs liens religieux. Ils admettent que tous
les hommes sont frères, mais ils méconnais
sent que cette fraternité dérive de ce fait,
.qu'il sont enfants d'un même Dieu.
On peut donc accuser le socialisme anti
religieux, d'être l'expression d'une humanité
vieillie, et qui menace de tomber en décrépi
tude, parce qu'il s'abandonne trop à l'amour
du côté externe des choses, à l'exclusion des
vérités intérieures qui f(}nt l'âme et la vie des
vérités purement externes.
Nous pensons que le socialisme ne pourra
réussir, qu"à la condition de renaître à la vie
de l'âme, en se rattachant à l'amour des vérités
intérieures,-sans pour cela exclure son zè1eet
ses progrès dans la connaissance des vérités
externes et scientifiques.
Le socialisme vise à substituer au règne de
la bourgeoisie le règne du quatrième Etat celui
de prolétariat. Mais la paix sociale ne pourra
s'obtenir que par le règne d'un Etat, qui admet
tra dans son sein et sur le pied de l'égalité,
les quatre états ou les quatre classes qui cons
tituent le corps social tout entier, sans exclu
sion aucune: ce sera la victoire de l'humanit6
17. x . INTRODUCTION
sur l'esprit étroit d'exclusivisme, la victoire dé
la démocratie libérale sur la démagogie.
Cette victoire de l'humanité ne pout se
réaliser qu'en évitant de tomber daIis le travers
de chacun des quatre Etats, que l'histoiro nous
montre tous comme ayant été tour à tour des
potiques, fanatiques et sectaires, tontes les
fois qu'il$ ont eu en main la puissance politique.
La victoire de l'humanité sur les' tendancos
exclusives, suppose donc l'existence d'ua ciIi~
quième Etat social, qui n'opprimera ni Je
clergé, ni la noblesse, ni la bourgeoisie, ni le
prolétariat; en effet, lorsque ces classes se
trouveront relevées de leur déchéance mo
rale, par le progrès des mœl1rs publiques,
elles vivront toutes ensemble, sur le pied
d'une é6'alité fraternelle, en considération
des services qu'elles sont aptes à se ~endre
mutuellement.
C'est dans l'établissement de cette harmonie
sociale, que doit consister le progrès de notre
civilisation moderne, et par suite la mission
ùe l'enseignement des préceptes de l'Evan
gi le social.
lU
Le spiritiûme a été adopté par quelques so
cialistes et par la plupart de ceux qui, par
suite du milieu sceptique dans lequol ils vi·
vaient, étaient resté3 étrangers à la Blble et à
ses enseignements. en ce qui concerne parti·
18. Il"TRODUOnON XI
cutièrement la croyance à l'immortalité de
l'âme et à la continuation de notre existence
dans le monde spirituel.
Il n'est pas douteux pour celui qui a ap
profondi l'esprit de la Bible, ou même pour
eelui qui a seulement vécu dans un milieu re
ligie_llx, sans avoir poussé très loin l'étude de
la Pal'ob révélée, que l'homme est en con
soeiation avec de bons et de mauvais esprits.
Il est eR rapports constants avec les soci~tés
~géliques et les ~ociétés -internalës, --de-ma·
niere à pouvoir rester libre, durant sa vie ter
restre, de s'attacher soit aux unes soit aux au
tres.
Les semblables attirent leurs semblables,
particulièrement dans ce monde du sentiment,
qui. est celui des sympathies ou des antipa
thies et qui constitue aussi le monde spirituel.
Ce n'est certes pas par la vue de notre corps
physique que nous correspondons avec ce
monde spirituel, mais c'est par la vue inté
rieure de nos pensées et la chaleur de nos
affections. Selon le cours que nous donnons à
nos pensées et à nos afl'ections particulières,
nous caractérisons les diff"érences d'humeur
de chacnn de nous. Mais ce monde du senti
ment et de la pensée, est le monde de l'infini;
il est en dehors des espaces et des temps, par
ce qu'il est en dehors et au-dessus de la nature
à laquelle seule, les espaces et les temps sont
inhérents. C'est ce qui ülÏt aussi qu'on l'ap
pelle le monde surnaturel.
Croire au surnaturel, c'est se sentir vivre
de la vie de l'esprit. Tous vivent de la vie de
t'esprit, bien qu'ils n'aient pas eu durant la vie
19. :IU INTRODUCTION
terrestre t leur vue spirituelle ouverle t et ainsi
la faculté de voir ce qui se passe dans le
monde spirituel. Cela est ari'ivé cependant aux
prophètes tels que Daniel, Ezéchiel, Zacharie t
Jean t etc. dont il est dit dans la Bible t qu'ils
ont été « en esprit» ou en vision.
Le spiritisme prétend obtenir pour ses
adeptes des communications édifiantes avec
le monde des esprits sans même avoir l'aide
4e cette ouverture de la vue spirituelle.
De tels hommes qui sont le plus souvent
dénués de toute connaissance des vérités ré.
vélées t n'ont d'autre ressource pour satis
faire aux besoins spirituels de leurs âmes,
qu'un retour à l'amour du merveilleux, des
miracles et des pratiques magiques du moyen
âge. Ils ont donc protité du spiritisme t parce
que celui·ci leur a inspiré certaines terreurs, ou
quelquefois certaines réflexions salutaires,
qui leur ont fait acquérir la foi à l'existence du
monde spirituel et par suite la crainte de
Dieu..
La crainte de Dieu est le premier pas vers
la sagesse. Pour faire ce premier pas t le spiri
tisme a ainsi pu remplir l'office de la religion
juive, dont c'était le principe dominant. Mais
làs'arrête son utilité t car il est facile de mon
trer que le spiritisme ne peut nous aider à
nous élever plus haut, et que même très souvent
il devient nuisible.
Le second pas vers la sagesse est de trans
former dans le cœur des hommes, cette
crainte de Dieu en un sentiment d'amour de
Dieu. On sait que la supériorité de la religion
chrétienne sur l'Eglise juive, consiste surtou
20. INTRODUCTION :xin
en cette transformation opérée par elle, dans
l'esprit des hommes, de l'idée d'un Dieu ter
rible et vengeur, en un Dieu d'amour et de
miséricorde.
Le troisième pas vers la sagesse, sera l'œu
vre de l'Eglise de l'avenir; celle-ci doit changer
la face du monde, en transportant de la sphère
allstraite dos idées doctrinales, dans la sphère
pratique des idées sociales, les principes de
l'union fraternelle des hommes. Mais pour y
arriver, cette religion universelle du bien qui
remue déjà les cœurs de notre monde moderne,
doit s'éclairer de connaissances n0 11velles sur
Dieu et sur l'homme.
Ce n'est pas dans le spiritisme qu'on trouvera
ces connaissances nouvelles adaptables aux
idées modernes, car le spiritisme s'abandonne
aux pratiques magiques du moyen-âge, au
lieu de rechercher la sagflsse où elle se trouve,
c'est-à-dire, dans les enseignements de la
Parole révélée de Dieu. Ses principaux doc
teurs, acceptent à la lettre, la doctrine de
la métempsycose, ou des réincarnations suc
cessives ; ne serait-il pas plus intelligent,
de chercher à expliquer cette doctrine re
nouvelée de Pythagore et de la religion des
Hindous 1 Elle a un sens significatif qui est
caché sous le voile du langage symbolique
familier aux anciens. L'idée ùe métamorphose
qui enveloppe la doctrine de la métempsycose
n'a pu prendre naissance que dans la doctrine
de la repon tance. Celle-ci suppose. en eU'et,
une conversion,et suivant le sens exact du mot
grec, META li: 01 A employé dans le texte des évan
40
21. XIV INTRonUCTION
gUes, une véritable métamorphose de l'esprit,
un retour à la lumière de la vérite. La repen
tance a pour objet de transformer les différen
tes phases de la régénération del'âme humaine,
en autan t d'atI'ections nouvelles et successives,
qui ont été représentées symboliquement
dans les religions antiques par différentes
sortes d'animaux; les instincts di1:téreuts. do
ceux-ci, snivant leur espèces, sont le dévelop
pement de ces affections particulières dans les·
quelles ils uaissent. Comme il y a de bons et
de mauvais instincts, il y a aussi de-bons et
de mauvais animaux; ces derniers symboli
saient pour les anciens les mauvaises affections
qui s'emparent du cœur de l'homme méchant,
et qui peuvent le conduire d'abîme en abîme
jusqu'à la folie.
Les phases diverses de l'existence ùe l'âme.
humaine dans un corps terrestre, - se trou
vant représentées par autant de transforma
tions successives, soit vers des éJ.évations
dans le bien, soit vers des abaissements dans
le mal, - figurent aussi des voyages spirituels
de l'âme humaine, et constituent, conformé·
ment à la croyance des anciens peuples à la
métempsycose, de véritables métamorphoses
ou transformations de nous·mêmes,
Lors de la décadence de la sagesse antique
on vénérait encore les traditions de cette
ancienne symbolique, mais on ne les enten
dait plus que dans leur sens littéral; de là
toutes les fables des anciennes mythologies.
·Platon reconnaissait cependant, que la doc
trine de Pythagore était plutôt un mythe
qU'une opinion philosophique.
22. INTRODUCTION xv
Dans la sagesse antique. ces voyages spIn
tuels de la transmigration des âmes, avaient
leur itinéraire tout tracé. comme on en trouve
aes preuves dans le déchiffrement des textes
hiéroglyphiques. Ii y avai t dondà un véri table
programme d'éducation pour la jeunesse, d'une
profondeur bien autrement grande que celui
de notre éducation moderne.
En réalité, il n'y a pas d'autre métempsy
cose, que celle qui consiste dans la méta
morphost' de nous-mêmes. Nous transfor
mons successivement nos croyances, à mesure
que nous nous élevons dans l'amour du bien
et du vrai, par la repentance de nos péchés
contre Dieu et contre le prochain. Or, cfltte
métamorphose de nous-mômes, regarrle l'âme
et non le corps; pour celui·ci il y a seulement
la métamorphose de la matière qui passe fata
lement et indéfiniment par un circulus de
formes nouvelles; celles-ci servent d'enve
loppes successives aux créations si intIlllment
variées des trois règnes de la nature.
Le spiritisme menace de nous égarer dans
des erreurs dignes des croyances supersti
tieuses du moyen-âge, dans des erreurs tout
aussi graves que sa doctrine des réincarna
tions successives; il peut même nous mener à
l'aliénation men tale, ainsi qu'on en a vu déjà
trop d'exemples. Ce dernier danger du spiri
tismo peut s'expliquer par le caractère de nos
rapports avec le monde spirituel,
Les hommes naissent dans le naturalisme
et par suite dans l'amour exclusif des choses
externes; mais ils doivent naître à nouveau
dans le spiritualisme pour pouvoir se préparer
23. XVi iNTRODUCTION
à la vie dans le monde spirituel et aboutir à la
régénération de leurs âmes qui constituent
leurs corps spirituels. Ils n' y arrivent qu'en
appropriant à ceux-ci le bien et le vrai; mais
ils meurent spirituellement lorsqu'ils s'appro
prient le mal et le faux.
Pour se régénérer, les hommes doivent
donc, après s'être instruits par les vérités
externes et scientifiques, s'élever à l'amour
des vérités intérieures et supérieures ;' mais
l'amour des vérités externes à l'exclusion des
vérités spirituelles, caractérise l'esprit du tuai
et associe les hommes aux sociétés mauvaises
de l'enfer. S'ils persistent dans cet amour ex
cessif du côté externe des choses, les mauvais
esprits qui sont dans ce même amour, s'asso
cient à eux, parce que les semblables attirent
leu( 8 semblables; ils pénètrent dans lem' vo
lonté, s'en emparent, et les conduisent gra
duellement à l'aliénation mentale, c'est-'à·di:'
re, à la perte de leur libre arbitre, par suite de
la rupture de tous les liens de conscience avec
le bien et le vrai, Ils deviennent alors ce que
l'Evangile appelle des possédés, et ainsi des
instruments aveugles et inconscients des
esprits infernaux.
Les pratiques dn spiritisme ne peuvent que
hâter cet asservissement de nos âmes aux
espri:s infernaux, car tant que nous ne som
mes pas entièrement régénérés, nous ne pou
vons attirer à nous, en vertu de la loi des
semblables, que des âmes non régénérées, et
par suite, de mauvais esprits.
Swédenborg avait été préparé par la Provi
dence pendant toute sa vie à cette ouverture
24. INTRODUCTION XVlI
de la vie spirituelle. C'est pourquoi sa raison
n'en souffrit pas et fut au contraire perfec
tionnée; mais il écrivait lui-même à son ami
Robsahm qui lui demandait si d'autres que lui
ne pouvaient pas jouir du commerce avec les
esprits: « Prenez garde, c'est le chemin qui
mène à l'hôpital des fous ».
IV
Les Eglises ont perdu leur popularité en
méconnaissant les principes qui découlent de
la sagesse enseignée dans la Bible. Il en est
résulté qu'il a surgi en dehors d'elles, une
religion de la pi tié pour les malheureux, qui
est destinée, avec les progès des temps, à nous
débarrasser de toutes nos misères ~ociales.
Cette religion da monde moderne est tout ce
qui 3 survécu au dlX-huitième siècle de la
décadence des religions du passé: elle est la
religion universelie du bien. C'est grâce à elle
que le sentiment de fraternité appartient de
puis un siècle à la devise républicaine, et
qu'elle fait place dans le langag~ économique
à la notion plus concrète de la loi de solida
rité.
Nous sommes maintenant appelés à for
muler cette religion nouvelle dans ses lois:
celles-ci doivent toutes se déduire rationnel·
lement de l'amour de Dieu et l'amour du pro·
chain.
Cette religion qui vient de a'afftrmer danSl
25. XV111 INTRODUCTION
le monde depuis le dix-huitième siècle est
encore toute de $entiment; elle ost dans l'igno
rance de la vérité qui peut la rendre vIable et
adaptable à nos idées modernes; elle n'est pas
même connue de la généralité des hommes
sons sa forme rationnBll0, la seul~ fOI'me qui
convienne aux idées de notre siècle; celles-ci
aspirent principalement à se montrer pra
tiques.
CJ.Iégeba écrit que Lout ce qui est rationu~l
est réel, et que tout ee qui est réel est
rationnel. Cela est vrai. Il faut au monde mo
derne la v.erité réelle, la seule qui soit prati
que, parce qu'elle se présente sous une forme
rationnelle.
Cette religion du bien ne peut s'édifier d'une
m::1l1ièro durable que sur les textes de la Bible;
mais il est nécessaire qu'on en ait une intel
ligence plus élevée que celle que possédaient
les Eglises du p:Jssé. Le génie du monde mo
derne sera, en effet, aussi diŒérent du génie
du monde ancien, que le règne du Ohrist en
esprit est différent du règne du Christ cn
chair, c'est·à-dire, de son règne dans 10 sens
de la lettre de la Bible.
C'est à cause de cette différence de génie
entre l'esprit ancien et l'esprit nouveau quo
le Seignenr a dit: « Moi, je vous ai envoyé
« moissonner ce à quoi vous n'aviez point
« travaillé, et vous dans leur travail vous ôtes
« entrés ». (Jean IV. 38).
L'Eglise chrétienne du passé travaille à son
insu depuis dix-huit siècles à l'enfantement
de celte Eglise chl'étienne do l'avenir, et ne
réussira à la produire dans tous ses dévelop.
26. INTRODtlCTION XIX
pements, qu'au prix de sa propre ruine, tan
elle s'est écartée par son organisation ecclé
siastique et cléricale de l'espl'Ït évangélique.
De même, le grain de froment tombant en
t'3rre, meurt. pour porter beaucoup de fruit.
(Jean, XII. 24).
L'esprit nouveau est le ferment qui fait
tomber en dissolution les Eglises du passé:
cet esprit nouveau a réussi à percer les té
nèbres du moyen-âge, à triompher des bû·
chers de l'inquisition et de toutes les supers
titions sorties du sein de J'Eglise chrétienne
du passé: c'est ainsi qu'il a produit, en dehors
de celle-ci, cet adoucissement des mœurs et
cet esprit de tolérance dont s'honore le monde
moderne.
v
1 L'Eglise de l'avenir s'écartera donc du mys·
ticisme de l'Eglise du passé, en recherchant
une conception rationnelle de la doctrine chré·
tiénne, et une clef pour ouvrir Je sens spi!'Ï
tuel de Ja symbolique sacrée.
Or, il y a peu de personnes encore qui
savent, que cette conceQtion r~tionnel1e de la
doctrine c1}.r~tienne et que cette clefdtrsens
spirituel existent déjà, toutes préparées, dans
les nombrenx ouvrages écrits en latin, au
XVIIIO siècle, pal" le savant philosophe suédois
Emmanuel Swedenborg.
C'est également dans la langue latine qu'a
été formulée la fraternité chrétienne, telle
27. xx INTRODUCTION
que la comprenait l'Eglise primitive, et elle
est devenue la langue universelle commune
à tous les peuples.
Les livres d'Emmanuel Swedenborg se
trouvent déjà traduits dans presque toutes
les langues et il8 font l'objet spécial des
études de petits centres 'tl:hommes religieux
et lettrés; qui sont dissémi~dans les cinq
parties du monde. Nous avons résumé ·l'his
toire des progrès de l'Eglise cie l'avenir,
depuis un siècle qu'elle existe, dans un tra
vail spéci al (1),
Les livres de Swedenborg sont, il est
vrai, encore très peu connus en France;
mais ils sont déja très répandus en Angle
terre et aux Etats-Unis d'Amérique,
Les explications lumineuses que nous y
trouvons des textes bibliques, s'adaptent
parfaitement à cette religion universelle du
bien, qui n'est ni l'"Eglise juive, ni l'Eglise
grecque, ni l'Egliso romaine, ni aucune des
Eglises protestantes du passé, mais l'Eglise
de l'avenir. Elle est amplement développée
dans une théologie facile à comprendre, parce
qu'elle est logiquement déduite du sentimen t
d'amour de Dieu et du prochain; elle est
puisée dans le sens littéral des textes de la
Bible, et elledevi611t ainsi une religion par
(1) LA NOUVELLE JÉRUSALEM, d'uprès les en.seigne
ments d'E. Swedenborg. Se>' progrès dans le !monde,
Ses principes de droit di'vin et leurs applications so
ciales. Paris, 1889, Librairie du Temple de la rue
Th n llh.1'.',
28. iNTRODUCTioN XXi
faitement adaptable aux progrès des idées
modernes; celles-ci sont trop souvent en
rayées par les tendances mystiques et auto
ritaires, lorsqu'elles ne le sont pas par les
tendances opposées du scepticisme.
Cette religion du bon sens, si bien dégagée
des textes bibliques par E. Swedenborg,
enseigne l'amour et la sagesse indépendam
ment .des formes de leurs applications; celles
91 peuven t varier indéfiniment suivan t les
temps et les lieux.
Enseigner ainsi la vérité pour l'amour d'elle·
même, n'est pas plus une œuvre sectaire, que
d'enseigner les lettres dans les universités.
Cette religion nouvelle est présentée au
monde avec la prétention parfaitement justi
fiée, pour tous ceux qui l'ont étudiée à fond,
d'inaugurer la Jérusalem nouvelle, telle qu'elle
est annoncée dans Daniel, (chap. II,44.VII. 13
14.) et dans l'Apocalypse. Elle ouvre aux
érudits un vaste champ d'études, non pas seu
lement au point de vue d'une théologie puisée
directement dans les textes de la Bible, mais
eu;ore au [oint de vue de la symbolique sacrée:
celle·ci a été qualifiée avec raison par Swe
denborg, de « Science des corresDondances. »
En etl'et, toutes les vérités de faits, sont des
vérités qui peuvent être traitées de scienti
fiques; elles sont destinées à servir d'enve
IOPP,es, de formules, de représentatifs et de
signes éloquents des vérités intérieures et
supérieures; celles-ci sont des vérités spiri
tuelles cachées sous l'écorce du sens littéral,
ce qui fai t que Ip, sens in terne, qui est la chose
véritablement signifiée, est la correspondance
29. xxii INTRODUCTIO:-l
du sens externe et littéral; ce dernier est le
représentatif et le premier est le significatif.
Ces véri tés spirituelles doiven t former le
corps du droit divin nouveau, qui est destiné
au dève1oJ)pement du progrès de la eivilisation
modetne: on deSCel}dant dans los applications,
lIes se transforment en principes de ùroit
positif humain, parfaitement adaptables à
toute.:' les branches des sciences sociales.
Ces doctrines de la philosophie et de la
science chrétiennes, bien loin d'être des rêve
l'ios, bien loin de mettre leurs adlOirateurs en
dehors ùe l'humanité, ainsi que l'ont prélendu
ceux qui nlen avaient qu'uno notion slpE'rti
cielle, SOtlt destinées à devenir l'expression ]a
plu!-1 élevée de ln.civilisation de l'avenir.
Tous ceux qUlles éluùieut consciencieuse
ment, acquièrent la conviction qu'elles ont
pour objet de réaliser,sous leurs formes phllo·
saphiques et scientifiques, le programme de
toutes les amëliorations sociales, devant
lesquelles ont échoué les Eglises et les insti
tutions du passé, parce qu'en se rendant sec
'aires et intolérantes, elles &0 sont elles
mêmes rejelées en dehors de l'h~manit6, en
dehors de la science el en dehors de la civili
sation moderne,
VI
Des écrivains, appartenant à di11'érenlcs
communions chrétiennes i ont discuté sur l'ori·
30. IN1'RODUOTION XXlll
gine ct la nature de l'autodté religieuse.
Tous font remonter l'origine de l'autorité reli-
gieuse à l'Ecn ture sainte; celie-ci a été pré-
servée dans son intégrité par le soin dé la
nation juive pour 06 qui concerne l'Ancien
Testament, et, pour ce qui concerne le Nou-
veau Testament, par l'Egliso chrétienne.
La ùifficuité est de savoir à qui appartient
l'interpr6talion des saintes Ecritures. L'Eglise
l'omaine pretend avoir le monopole dp, celte
intorprétation par ses conciles et son sacer-
doce, tandis que les Eglises protestantes sou-
tiennent que cette interprétation appartient à
la conscience de Cl1aCUl1. •
L'Eglise de la Nouvelle Jérusalem, qui est
l'Eglise de l'aveu il', considère la question
comme résolue pour elle, depuis le dix-hui-
tième siècle, par le dévoilement du sens spi-
rituel des saintes Ecritures. Elle ajoute lIUO
cette révélation cIe la Vérité chrétienne est}
dans la Bible, à la portée de tous ceux qui la
cherchent, avec la volonté de la trouver. Los
légères variantes que relève la saine critique
dans les Ecritures saintes ne touchan t pas au
Bens intcrne.Il a été pourvu à cela par laDivine
Providence; de même que certaines lois phy-
siques, ont assuré la durée de la lumière phy-
tique du soleil, de même certaines lois spiri-
Buellas ont assuré la durée ùes ùiverses révé-
lations qui ont constitué la lumière-. ~DTiluelle
destinée à éclairer tout 11.omme vonant au
monde. (Jean, 1. 9.)
La Nouvelle Eg;li:"'(l cllrélil)nne écrit sur 10
frontispiQ~.i.e ses temples: Nunc licet, pour
annoOCer au monde qU'lI est permis mainte-
31. xxIV INTRODUCTtON
nant de pénétrer par l'entendement dans tous
secrets de la Parole, et cela parce que les doc
trines chrétiennes forment une chaîne de
vérités que le Seigneur a eu soin de révéler
dans certains passages de la lettre même de
la Bible. En d'autres termes, dans la Nouvelle
Eglise chrétienne, l'entendement ne doit plus
être mis sous l'obéissance de la foi, comme
dans les Eglises du passé; de plus, les parties
doctrinales de la Parole doivent être puisées
directement dans le sens littéral, car dans
ce sens, nne partie est pleinement compréhen
sible, et une autre partie est voilée; Swe
denborg exprime ainsi cette différence:« la
Parole, dit-il, es t comme un homme vêtu
dont la face est nue et les mains sont nues;
toutes les choses qui appartiennent à la foi
et à la vie de l'homme, ainsi que celles qui ap
partiennent à son salut sont nues, mais toutes
les autres y sont vt"tues; elles sont vues à tra
vers leur vêtement comme on voit une femme à
travers une gaze lég ère placée devant sa face. "
l V. Vraie Religion chrétienne, n' 229).
Le même auteur écrit encore: c Qu'est-ce
que croire et ne pas voir si la. chose est vraIe?
Et si quelqu'un dit néanmoins qu'il faut croire
aveuglément sans comprendre pour avoir la
foi, il s'attire cette réponse: T'imagines-tu être
Ull Dieu en qui je croirai, ou me prends-tu
pour un' iIl.s~nsé, en demandant une assertion
dans laquelle je ne vois pas le vrai? Fais que
je voie.:; (Doctrine de la. Nouvelle~Jérusalem sur
la Foi, no 4. )
On sait, en effet, que la sagesse consiste
U'
32. lNTRODUCTlON xxv
uniquement à voir et à comprendre les choses
qu'on pense.
Ainsi, bien qu'il y ait des vérités au-dessus
de la raison humaine, qui, par conséquent, ne
peuvent être connues des hommes que par une
révélation divine, ces vérités ne sont nulle-
ment contraires à la raison, car on peut en dé-
dui!'e to"ut un enchaînement de conséquences,
et même tout le corps du droit divin, c'est·à·dire
une religion démontrée.
Ainsi, par exemple, comment saurions-nous
que Dieu est l'Amour même et la sagesse
même, si cela ne nous avait pas été révélé?
L'homme sait bien, en effet, comme l'observe
encore Swpdenborg, que l'amour existe,
mais il ignore ce que c'est que l'amour, car 11
iguore que c'est la vie même.
«. Si tu éloignes l'affection qui appartient à
l'amour, peux-tu penser quelque chose, et
peux-tu faire quelque chose? La pensée, la
parole et l'action ne se refroidissent-elles pas
selon que se refroidit l'aff'ection qui appartient
à l'amour, et ne s'échauff'ent-elles pas selon
que cette affection s'échauffe? Mais le sage le
perçoit, non d'après la connjlÏssance que l'a-
mour est la vie de l'homme, mais d'après l'es-
pérance que cela arrive ainsi.» (La Sagesse
angélique SUI' le Divin Amour, n' 1).
Ce qui précède nous montre qu'il n'y a plus
d'autorité humaine qui puisse nous imposer
une loi commune en matière de foi religieuse;
et par suite qui puisse nous imposer cette foi.
C'est seulement la lumière de la vérité que
chacun de nous peut acquénr dans la Bible,
.Ii
j
33. XXVI iNTRODUCTION
par les efforts individuels de notre peusée, qui
nous donne une foi salvifique.
C'est la lumière de cette vérité, dont Jean
nous dit, qu'elle« éclaire tout h')mme venan t
au monde. l> (Jean I. 9.)
La Vérité porte donc en elle son propre té·
moignage; elle n'a besoin d'aucune autorité
humaine pour faire toute seule son chemin
dans le monde avec le progrès des mœurs pu
bliques.
Il y a un pouvoir qui n'est pas en nous·
mêmes et qui fait tôt ou tard prévaloir la Vé
rité et·la Justice aux yeux de tous. Les idées
humaines passent et changent, mais cette
Vérlté et cette Justice divines sont contenues
et enveloppées dans la Parole de Dieu qui ne
passe jamais.
Swedenborg nous donne les moyens de les
mettre à nu par la rccherclte du sens spiri
tuel de l'Ecriture Sainte. Cette mise à nu de
la sage,:,se de l'enseignement divin, lors
qu'elle apparaît sous son caractère rationnel,
nous fournit en même temps, la véritable
preuve de l'inspIration divine des Saintes
Ecritures et nous montre aussi combien celles
ci sont différentes des écrits des hommes.
Il ne faut pas croire quo ce dévoilement de
la réalité de l'inspiration des Ecritures Sain
tes, nous empêche de reconnaître, avec la
critique moderne, qu'une large portion de ces
textes sacrés contient des contradiciions quant
à leur sens littéral. Nous accordons égale
ment que certains passages paraîssent être,
dans leur sens llttéral, en opposition avec la
morale.
34. INTRODUCTION XXVII
Malgré cela, Swedenborg et ses disci
ples maintiennent que les livres inspirés
l'ont été dans chaque phrase, dans chaque
mot et dans chaque syllabe, toujours en mon
trant qu'ils contiennent un sens interne. De
plus, ils professont que ces contradictions
n'existent que dans les apparences, et que, de
plus, elles existent précisément parce qlle
tout en étant divinement inspirés, ces écrils
devaient s'adapter au génie barbare des
hommes auxquels ils ont été directement
adressés; ces hommes étaient, en effet, par
leurs principes et leurs actes, en contradlc
tion avec eux-mêmes; il leur fallait donc un
langage approprié à l'état de leurs àmes; au
trement, ils ne l'auraient pas accepté.
Il était nécessaire que, par la Divine Pro
vidEHlce du Seigneur, le texte des livres ins
pirés de la Bible fut consorvé intact ·substan
tiellement à travers les âges, tel que l'Egliso
ra eu en tout temps; car la Parole divine
contient un sens interne qui doit révéler aux
l10rnmes les vérités spirituelles à mesure qu'ils
arrivent à être en état de les comprendre.
La Divine Parole est donc une parabole, de
puis son cOl:nmencement jusqu'à sa fjn, ainsi,
chaque image naturelle est une expression
qui correspond à une vérité spirituelle qui
en est l'âme.
Ce qui satisfait l'esprit dans ]a doctrine de
la Nouvelle Jérus3lem sur l'Ecriture sainte,
en le mettant au-dessus des agitations et des
discussions de la critique biblique, est donc
précisément la confiance que la sainteté de la
Parole et son immense supériorité sur tous
1
35. XXVIII lN1RODUonON
les écrits des hommes, consiste dans l'exis
tence du sens interne. Les incOrrections de la
lettre du texte, incorrrections qui, en réalité,
ne sont que dans les apparences, perdent ainsi
leur importance parce qu'il a été pourvu par la
divine Providence à ce qu'elles n'altérâssent
pas ce sens interne.
Nous avons, pour mieux expliquer notre
doctrine, cité quelques passages des écrits de
Swedenborg et de l'enseignement de cet auteur
à l'appui de la vraie solution de cette ques
tion de l'autorité en matière religieuse; mais
ce n'est pas que nous considérions Swedenborg
comme une autorité qui s'impose à tous, car,
en réalité, il n'a et ne prétend [nullement
imposer son autorité en matière de foi.
En effet, ses écrits ne sont destinés qu'à nous
montrerla possibilité d'une conceplion ration
nelle de toute la doctrine chrétienne, puisée
directement dans la Bible, et à nous donner la
clef du style des correspondances dans lequel
la Parole révélée a été écrite. Il en résulte
que, croire que les écrits de Swedenborg cons
ti tuent une autorité qui doit nous être i~posée
forcément, parce qu'il reçût la mission de les
écrire par divine autorité, ce n'est pas y crOlre,
mais c'est les pervertir; Sweclcnbor-g' s'adresse
constamment à la raison de chacun de nous;
il nous guide comme par la main, pour nous
aider à dégager nous-même la doctrine chré
tienne de certains passages épars ça et là dans
la Bible, et qui peuvent être acceptés dans
leur sens littéral.
Une fois en possession de cette doctrine,
qui se trouve entièrement écrite dans les
36. lNTRODtiCTlON XXIX
textes de la Bible, nous sommes en posses
sion d'une clef qui peut nous servir à p{,né
trer le sens spirituel caché derrIère lè voile
de la lettre. Gette doctrine nons montre aussi,
en somme, que les contradictions de la lettre
des textes, ne sont qu'apparentes et que,
toute la Parole qui est réellement d'inspira
tion divine, n'est, dans son sens spirituel,
qu'un chant d'amour de Dieu et du prochain,
destiné à mettre à notre portée tous les élé
ments nécessaires, pour que nous puissions
introduire graduellement, dans tous nos rap
ports sociaux, la fraternité et la justice.
Mais sans la doctrine, la Parole ne peut être
comprise dans son sens interne, car, avant de
devenir spirituel, l'homme doit commencer
par être rationnel et avoir une conception
rationnelle de l'enseignement divin. Or, une
conception rationnelle de tout le corps du droit
divin, sera un don supérieur à ce don des mi
racles que possédaient les chrétiens de la pri
mitive Eglise du Christ. Ce don des miracles
a été aussi nécessaire à la fondation de la pre
mière Eglise chrétienne qu'à la fondation de
l'Eglise Juive.
Mais, en ce qui concerne l'Eglise de l'avenir,
l'autorité en matière religieuse ne sera plus
fondée sur le souvenir du don des miracles,
ni sur la foi mystique on aveugle, parce que
personne ne croira plus ce qu'il ne compren
dra pas rationnellement. La seule autorité en
en matière religieuse sera donc la vérité,
telle qu'elle se manifeste dans l'entendement
de tous cèux qui la cherchent avec la volonté
de la trouver.Lp. règne du Ohrist en esprit,suc·
37. ,
xxx INTRODUCTION
cède maintenant au règne du Christ en chair;
celui-ci a été le règne du sens de la lettre
qu'on acceptait mystiquement et par esprit
d'obéissance, lors même qu'on ne la compre
nait pas.
Ce nouveau règne du Christ nous est annoncé
par l'Evangile dans les termes suivants:
Cl On verra le Fils de l'homme venant« dans
les nuées du Ciel avec puissance et Cl gloire. 1>
(Mathieu, XXIV. 30).
Par « les nuées du Ciel» il est entendu la
Parole dans le sens de la lettre, parce que la
lettre cache souvent la vérité nue qui est ainsi
voilée comme la nuée voile la splendeur de la
lumière du Ciel. Par", la puissance et la gloire.
dans laquelle le Seigneur doit venir, il faut
entendre le sens spirituel de la Parole.
Le second Avènement du Christ qui doit
inaugurer l'ère de la seconde Eglise chré
tenne, dite Nouvelle Jérusalem, est donc un
Avènement qui a lieu, non pas en personne,
mais en esprit et dans la Parole qui procède
de Lui. Cette Parole sera comprise alors dans
son sens spiri tueI, et la généralité des homme s
pourra s'approprier la vraie doctrine chré
tienne, puisée dans le sens naturel des textes
de la Bible.
VII
Il est écrit dans Esaïe, XXVIII. 20 :
. « Le lit sera trop court pour s'y étendre et
38. INTRODUCTION XXXI
« la couverture trop étroite pour qu'on s'y
« ctlveloppe.))
Le lit dans le sens spiritnel signifie la doc
trine: la raison en est, qlle le corps so repo se
sur un lit, de mêm~ que l'esprit sc repose sur
uue doctrine qui lui paraît satisfaisante. La
couverture siguille les vér'ilés rationnelles qUi
sont comme une couverture pour les vérités
spirituelles, (Voir« Arcanes célestes )l,de Swe~
denborg, no 2570).
Cette signification du lit se con.firme surtout
par l'étude du sens spirituel des ditlérents
passages de la Bible dans lesquels lé lit est
nommé,
tious savons que la mythologie(~;que' )
renferme des symbolos et des enseignements
qui avaient été puises en~le; là, re langage
dos correspondances, transmis par les sages
rÉthi.opiens qui faisaient partie de 1'TI:gUse des
temps deJ'âg-8 d'ar@nt, et qui possèaaient
une Parole révéLée, avait été soigneusemen. t
et longtemps conservé par la caste sacerdotale
qui en avait fait une science cachée. Cette
science fut peu à peu perdue, Mais il ne faut
pas nous étonner de retrouver quelquefois
dans les mythologies anciennes des symboles
et vôrités qui concorden t avec ceux- de la Bible.
L'esprit fanatique et sectaire qui divIse --=--
encore de nos jours les différentes :Eglises qui
se partagent le monde religieux, a eu ses ex
Q.ressions symboliques dans l'histoire deQ?ro
cus~~, brigand fameux üe l'Attique. On raconte
que ee:ui-ci avait l'habitude d'attacher les
voyageurs sur son propl'e lit, et de les adapter
à sa longueur; s'ils étaient trop. petits, ils
39. XXXH INTRODUCTION
étaient allongés et torturés pour être amenés
à la grandeur vonlue; s'i ls étaient trop grands,
ils étaient raccourcis par la section des pieds
et de la partie des jambes qui dépassaient la
longueur du lit. Les voyageurs, qui étaient
ainSi torturés, représentent les hommes qui
voudraient se régénérer, mais qui eu sont
empêchés et détournés par le fanatisme du
pouvoir sacerdotal. Celui-ci est ~mffisamment
caractérisé par une Eglise qui s'impose en
disant: « Hors de moi ou en dehors de mes
dogmes, pas de salut ».
( Thésé~ qui passe pour avoir délivré la terre
ete-Pr-6cu !'l te, personnifie un des héros de l'âge
d'airain, dit âge héroïque. Dans ce dernier
âge, ceux qu'on qualifie de hér'os, sont des
personnages mythiques; il est probable qu'ils
représentent des associations humaines de la
fin de l'âge d'argent, qui eurent la réputation
de relever l'humanité da la décaience où elle
tombait, en inaugurant une nouvelle ère de
justice et de fraternité sur la terre.
Cette nouvelle ère de paix et de prospérité
dura jusqu'à ce que les crimes des hommes,
tombés dans l'âge de fer, chassèrent de la
terr(Astréj}, la déesse de la justice, qui re
monta au Ciel.
On voit que cette histoire mythologique de
--- ( Procusfe, renferme un grand enseignement,
car"etfe nous dépeint, sous de vives couleurs,
Ies excès de toute nature auxquels peuvent
l
être entraînés les hommes qui recherchent la
justice dans une égalité superficielle; en
d'autres termes, -elle dépeint ceux qui recher
ohent l'unité dans une uniformité purement ,
40. INTRODUCTioN XXXIll
extérieure, au lieu de la rechercher dans la
variété des différentes parties d'un ensemble
harmonieux et bien proportionné.
Dans le passage d'Esaïe que nous avons cité,
le lit est trop court et la couverture trop étroite,
pour nous enseigner que toute doctrine reli
gieuse est nécessairement en concordance
exacte avec l'état et la condition de celui qui
la professe. Si l'esprit est étroit, la doctrine
qui s'adapte à cet .esprit, sera ègalement
étroite.
Il est donc à désirer que l'esprit s'élargisse
par l'amour mutuel; en effet, la doctrine qui
est destinée à se présenter comme le dévelop
pement rationnel de l'amour de Dieu et de
l'amour du prochain, trouve ses déductions
logiques et ses applications dans tous nos
rapports sociaux, et non pas seulement dans
les rapports nécessairement restreints et
limités des membres d'une Eglise particulière.
Les hommes, en général, autant ceux des
temps de l'Eglise Israélite que ceux de nos
jours, sont captivés par leurs doctrines parti
culières, lors mêma que celles-ci n'ont pas été
ép-rouvées dans leurs dérivations autant que
leurs applications sociales, comme étant réel
lement les expressions pratiques du sentiment
de fraternité ou d'amour mutuel, qui doit faire
le fondement essentiel de la vraie religion,
Chacun s'efforce donc de faire accepter sa
propre doctrine, pa,rce que celie-ci est un lit
qui est à sa mesure ou à sa taille; mais on ne
s'inquiète guère de la question de savoir si
elle est réellement adaptable à l'état et' à la
condition d'esprit de la généralité des hommes.
41. XXXIV INTRODUCTION
Nous devons soigneusement disting uer
les vérités fondamentales qui son t de l'es
sence même de toutes les religions et qui
sont destinées à leur servir de lien commun,
des vérités particulières qui découlent·des
premi ères; ces vérités particu lières sont au
tant d'applications va.riées suivant les temps
et les lieux, de ce fonds commun destiné à
leur servir de lien fédéral.
Les rites et les liturgies particu lières de
chaque Eglise, ne sont, en définitive, que
des formes variées du culte universel de
l'amour de Dieu et d~ l'amou r du prochain.
de méme que les langtH'S qui son t si varia
bles, bien qu'elles soient destinées à expri
mer les mêmes idées et les mêmes senti
ments.
Mais ceux qui ne veulent voir la religion
que dans le cercle étroit des rapports de
sacrist ie de l'Eglise particulière à laquelle
ils se rattachent, contrib uent à mainte nir
J'ignorance sur la portée réelle du christi a
nisme, et ainsi à éloigner les hommes du
désir de s'instr uire eux-mêmes des beauté s
de la littéra ture sacrée. Ils s'en rappor tent,
pour le saint de leurs âmes, à de préten dus
directe urs de conscience ou à des formules
toutes faites de prière s et de confessions de
foi, dont on répète machinalement les vai
nes redites , sans pouvoir les reconn aître de
cœur et encore moins se les assimiler.
La révolution religieuse, qui est en train
ae se réalise r dans le monde depuis le dix
hnitiém e siècle, tend à faire prédominer le
cllristianisme de la cllarité sur celui de la
42. INTRODUCTION xxxv
foi. Ce dernier christianisme ne pourra plus
être accepté qu'autant qu'il apparaîtra
comme une dérivation du premier.
La théologie de la charité, qui est le déve
loppement de l'amour mutuel des hommes,
doit produire l'affranchissement des masses
de la tuteUe sacerdotale j par cela même que
cet amour mutuel rétablira l'égalité, la paix,
la justice et la liberté dans tous nos rapports
sociaux, il doit réaliser jusque dans les œU 4
vres d'utilité sociale, cette belle unité de l'es
prit humain entièrement brisée depuis la
décadence de la sagesse antique.
La théologie de la charité, bien loiD d'être
sectaire et intolérant.e, comme celle de la foi
seule, doit régénérer celle-ci, la rendre
vivante, de morte qu'elle était; elle est des
tinée, non-seulement à vivifier nos sciences
sociales, mais elle peut encore rendre les
sciences exactes plus attrayantes; celles-ci
ont été jusqu'à présent montrées sous une
forme aride et abstraite des plus incompati
b les avec les choses de sentiment qu'elles
renferment, sous le voile tout symbolique des
créat.ions de la nature. 1
Les lois naturélles et scientifiques, ne son t,
en effet, comme vérités de fait, ou comme
vérités particulières, que des expressions
externes, matérielles et symboliques des lois
spirituelles qui sont les vérités universelles.
En d'autres termes, la connaissance du sens
spirituel de notre Bible écrite, doit nous
dévoiler la connaissance du sens spirituel de
la Bible de la nature.
La théologie de là charité, est la perception
43. XXXVI INTRODUCTlON
des choses de sentiment, la clef des mystères
du symbolisme de la littérature sacrée; elle
est donc bien différente de la théologie abs
traite et stérile de la foi seule. Celle-ci ne
peut que nous faire goûter aux fruits de l'aère
de la science, tandis que celle··là nous fera
goûter aux fruits de l'arbre de vie placé au
milieu dujardin de la sagesse divine. En effet,
cette théologie de la charité est destlOée à
transformer la vérité scientifique en utilité
morale et en sagesse pratique parce qu'elle doit
nous rendre compte des lois du monde des fins
qui est le monde spIrituel; or, les influences
de celui·ci se font sentir matériellement dans
notre mondd terrestre; elle substituera par
tout le spiritualisme au naturalisme de la
science moderne, celle·ci est destinée â servir
de vêtement à la religion.
La théologie de la chari té nous inspirera
une théologie vivante de la foi qui doit refléter
la première comme dans un miroir, et éclairer
celle-ci eu la représentant sous une forme ra
tionnelle compréhensible à tous.
Les deux théologies, par leur union étroite,
s'aùressent au cœur, tout en éclairant la rai
son. et plus leur union sera étroite, mieux
elles nous afl'ranchiront du danger .d'être bru
talement étendus sur le lit de Procuste, qui est
resté fatal aux progrès des mœurs publiques
jusque dans les temps de notre monde mo
derne.
C'est surtout dans la lecture des œuvres
théologiques d'Emmanuel Swedenborg. qu'on
se pénétrera mieux de la nécessité d'élargir
nos cœurs et nos esprits, pour aboutir à l'écra
44. 1NTRODUCTION XXXVII
sement de toute tendance sectaire, et à la pré
dominance du principe de liberté sur le prin
cipe d'autorité.
Ce n'est pas à dire que ceux qui ne connais
sent pas les écrits de Swedenborg, ou qui ne
se plaisent pas dans leur étude, ne puissent
pas néanmoins travailler aussi au déveIOppe-)
~.~octrill~~L~~ I~Eglise deJ~~r, "
qUi est la Nouvelle Jérusalem annoncée dans
Daniel et dans l'Apocalypse.
Mais ceux qui sauront tirer parti des tra
vaux de nos devanciers, surtout lorsque ces
travaux, comme ceux de Swedenborg, sont
inspirés par la Révélation, en même temp s
qu'ils le sont par la raison, ceux-là avanceront
plus loin dans la vérité et feront des progrès
plus rapides que ceux qui chercheront à con
naître la vérité sans autre secours que leur
propre génie.
Aidons-nous donc les uns les autres, élar
gissons nos cœurs et nos esprits en buvant
aux sources mêmes de la vérité telle qu'elle
nous a été directement révélée dans la Bible,
pour fonder l'J~glise de l'avenir. Celltci res
tera ouverte à tous, pour que, suivant les pa
roles d'Esaïe;«nos lits ne soient pas trop courts
et nos couvertures trop étroites pour que nous
nous en enveloppions. ))
42
45.
46. L'ÉVANGILE SOCIAL
CHAPITRE PREMIER
Le règne de Dieu, comme dans le ciel, aussi sur
la terre (Matth. VI, 9, 10).
SO~lMAIRF.
1. Le règne de Dieu sur la terl'e et l'Evangile social.
2. La liberté de ne croire que ce qui peut être compris
rationnellement dans les mystères de la foi, amène à
une liberté anillogue dans le domaine de l'ordre politique,
de même que dans la pratique sociale. - 3. Le gouver
nement par la raison d'Etat et le gouvernement par la
justice. - 4. L'Eglise de l'avenir devra devenir une fédé
ration de tous les cultes pour l'organisation des sociétés
humaines dans le sens de la coopération de tous au bien
être de chacun, - 5, La Jéru~alem céleste doit, d'après
l'Apocalypse, descendre du Ciel pOUl' se réaliser aussi
sur la terre. - 6. Le nouveau règne de Dieu, parmi les
hommes, suppose le~ mœurs de la fraternité, l'~e
.de toutesrit sectaire et une vue synthétique de toùtes
les branc es des connaissances humaines. - 7. L'union
étroite de la science, de la philosophie et de la religion,
doit exister également entre les représentants de ces
différentes branches du savoir humain, - 8, Les vérités
révélées sont surnaturelles: la philosophie et la sciencd
peuvent 'servir à les confirmer, mais Don à les découvrir.
- 9. L<I, Bible écrite et la Bible de la nature nous révè
lent la Symbolique sacrée; celle·ci nous montre les cor
re"pondances entre les vérités spirituelles et les véritélllla
turelles. - 10. La philosophie est destinée à tenir lieu de
trait-d'union entre la religion et la science; celle-ci doit
servir de manteau à la religion. - 11. Les différents
points de vue suivant lesquels la vérité de fait peut être
envisagée. - 12. Les liens des différentes branches du
savoir humain sont aussi étroits que les liens fraternels
qui doivent unir les hommes entre eux. C'est la mécon
nais sance de cette vérité qui éloigne de nous le règne
de la fraternité et la solution de la question sociale.
1. Le règne de Dieu sur la terre suppose le rè
gne de la liberté, de la justice et de la frater
nité existant ehez les hommes, n.on pas seule
1
47. 2 LE RÈGNE DE DIEU
ment dans leur enseignement religieux, mais
bien aussi dans tous leurs rapports sociaux.
La religion, en effet, n'est pas tant dans la
doctrine que dans la vie suivant la doctri Ile.
Cela nous est ainsi enseigné dans les versets
2 et 3 du chapt XXII de Matthieu, où il est dit :
4: Sur la chaire de Moïse sont assemblés les
scribes et les pharisiens; faites toutes les
choses qu'ils vous disent d'observer, observez
les et faites-les, mais selon leurs œuvres ne
faites poinl, car ils disent et ne font point! »
Il résulte de ce texte et de bien d'autres, que Ja
pratique des enseignements de Jésus-Christ,
peut d'autant mieux étre qualifiée d'Evangile
social, que le Maître nous recommande l'appli
cation dans nos rapports sociaux, des principes
de la sagesse divine.
2. Avant le dix-huitième siècle, on ne pouvait
obtenir une intelligence rationnelle des mys
tères de la foi, à cause de l'obstacle opposé par
le pouvoir sacerdotal,qui était intéressé à main
tenir une croyance aveugle dans des dogmes,
qu'il ne pouvait plus comprendre lui-même,
sinon par suite de leur falsification intéressée,
t'out au moins par la perte de leur signHlcàtion
originaire.
Cette permission ou celte liberté nouvelle à
laquelle aspire le monùe moderne, de ne plus
croire que ce qu'il lui est possible de com
prendre rationnellement, nous amène insensi
blement à la conquête d'une liberté analogue,
dans le domaine de l'ordre politique, de me!ne
que dans le monde des affaires.
En effet, l'accroissement des lumières do la
généralité des hommes dans la connaissance
des affaires religieuses, politiques et sociales,
devient un progrès qui équivaut, pour les gou
verna nts et pour tous les diri gean ts, à la néces
sité de ne plus pouvoir se conduire autrement
48. SUR LÀ TERRE 3
qu'en qualité de mandataires des gouvernés, et
par suite, qui équivaut à l'obligation de rendre
compte de leurs actes; ainsi, ce nouveau Urait de
contrôle que le public exerce wr eux, les rend
moralement responsables devant l'opinion pu-
blique, qui représente la masse des gouvernés.
3. Le gouvernement despotique par la raison
d'Etat, doit, en conséquence, faire place progres-
sivement an gouvernement par lajustice, le seul
légitime et le seul durable. La même émanci-
pation doit s'opérer dans le gouvernement
ecclésiastique. Les progrès de la liberté de
conscience sultiront pour émanciper et laïciser'
insensiblement les cultes de toutes les Eglises,
car on ne s'en rapportera plus au prêtre seu-
lement, pour l'orthodoxie de l'enseignement des
doctrines religieuses, mais aux lumières puisées
directement par le bon sens public dans la
connaissance de la littérature sacrée.
Il en résultera, dès 101'S, une impossibilité de
plus en plus grande, pour le monda officiel, de
continuer à se retrancher derrière una pré-
tenùue infaillibilité du principe d'autorité gou-
vel'nementale.
La reconnaissance franche et ouverte de l'é-
tatde faillibilité des institutions humaines, vau-
tll'a centfois mieux que cette prételltion outre-
cuidante à l'infaillibilité, dontse pare le. vieux
monde officiel, bien qu'elle ne soit plus décem-
ment de mi~e devant le progrès de l'esprit mo-
d erne.
Ce progrès exige que tout acte officiel, soit
de l'autorité religieuse, soit de l'autorité politi.
que, puisse être compris et reconnu être con·
forme à l'esprit de vérité et de justice; qu'ainsi
rien ne puisse plus être accepté aveuglément,
soit au nom de la l'aison d'Etat, soit au nom du
sacerdoce, soit au nom des autorités humaines.
C'est seulement ainsj, qu'on verra poindre à
49. 4 LE RÈGNE DE DiEU
l'horizon de nos progrès futurs, la lumière d'une
nouvelle ère, qui percera les ténèbres de l'igno
rance des âges passés.
Cette lumièl'tl nouvelle fera disparaître iu
sensiblement le caractère mystique des ancien
nes croyances.
4. L'Eglise de l'avenir dèvra donc devenir
une fédération de tous les cultes qui se parta
geront le monde religieux, pour l'organisation
des sociétés humaines dans le sens de la coopé
ration de tous au développement du bien-être
de chacun. Or, cette fédération de tous les cul
les, reste impossible, aussi longtemps que cha
que Eglise se renferme exclusivement dans la
sphère restreinte de l'enseignement de ses doc·
trines théo 1ogiquts particulières, et aussi long·
temps qu'elle les présente comme l'unique mo
yen de salut, au lieu d'émanciper ces mêmes
doctrines, en les présentant au contraire, sous
la forme toute nouvelle, d'instruments de réali
sation de la fraternité et de la justice parmi les
hommes. On aboutira ainsi à reconnaitre l'o~
bligation de justifier de le14r caractère salvifi
que, non pas seulement au peint de vue de la
vie dans l'autre monde, mais aussi au point de
vue de la vie dans notre monde terrestre.
5. La Jérusalem céleste, telle qu'elle est pré
dite dans lellvro de l'Apocalypse, doit descen
dre du ciel sur la lerre, et ainsi se réaliser sur
la terre comme aussi dans le ciel, suivant le
passage même de l'Oraison dominicale qui sert
de titre à ce chapitre.
La vérité est une, mais elle doit se présenter
dans ses applications infiniment variées, sous
des formes plus intérieures, ou plus extérieures,
suivant qu'elle plane dans les hauteurs des so
ciétés célestes, ou suivant qu'ell~ descend dans
le monde des hommes, pour revêtir des formes
50. SUR LA TERRE 5
externes, terrestres et même mondaines.
Les doctrines de foi prêchées au nom de la
fraternité, dans les différents cultes, sont desti
nées avec le progrès des lumières, à s'unifier
graduellement de manière à pouvoir se mani
fester dans des applications sociales, ainsi à se
séculariser ou à se laïciser dans des actes de so
lidarité et de justice sociale.
Il est, en effet, généralement reconnu, par
l'histoire même det; dogmes ou de leur évolu
tion dans les différents cultes, que les Eglises
de toutes les dénominations avec le progrès des
idées modernes, s'écartent graduellement de
leurs confessions de foi origiuaires: celles·ci
tendent toujours à étouffer la religion dans un
cadre trop étroit. Mais les formes et les dogmes
s'usent peu à peu, ets'etlacent dans leurs carac
tères trop accentués, pour se fondre dans un
selltiment universel de charité ou de fraternité
socialement pratique, tel qu'on le trouve si sa
vamment développé dans les œuvres d'Emma
nueI8wédenborg(1}.
JI est vrai que si chaque Eglise particulière a
une mission speciale à remplir pour l'humanité,
il ne s'ensuit pas que toutes les Eglises so!ent
également aptes à procurt:lr par "leur enseigne
mentie même degré d'élévation morale, la même
qualité dans la ri>génération de l'âme humaine,
et de la société en gélH~ral, car la qualité de la
régénération varie sll.ivant la qualité de la foi
religieuse, de même que le travail de l'ouvrier
est plus p,'omptement réalisé et mieux t'ait sui
vant la qualité des instruments, Mais les hom
mes ont, trop souvent, l'orguf.il de croire que la
religion dans laqublle ils sont nés, est la seule
(1) VOil' notre livre intitulé. La N(lLtvellc Jérus'llem,
d'l&près les enseignements d'Et Swédenbol'g. Ses progr'ès
dans le monde, ses principes de droit di vin et leurs appli
51. 6 LE RÈONE OE OiEU
vraie, au lieu d'é.voir assez d'indépendance d'es
prit pour faire table rase de leurs croyances ir
réfléchies, et de rechercher le ~ystème reli
gieux qui s'adapte le mieux il l'esprit moderne
par son caractère rationnel, ainsi qu'à la prati
que de la vie sociale.
Cependant, toutes le~ Eglises n'en ont pas'
moins cette tendance heureuse de s'unir avec le
progrès des temps dans un sentiment de frater
nité genel'ale, car leurs doctrines se fusionnent,
sinon dans leurs expreSSlOns quant aux formes
externes du culte, très certainement dans les
principes essentiels: ceux-ci se résument dans
l'amour de Dieu et du prochain, sentiment qui
trouve des applications de plus en plus étendues,
dans les différentes branches des sciences so
ciales; or, le but final de la religion, qui est loin
encore socialement paI'lant,c1'être realisé dans
notre civilisation moderne, est l'unité dans la va·
riété, c'est-il·dire, la fraternité dans la liberté.
6. Le nouveau lègue de Dieu parmi les hom
mes suppose, en effet, les mœUl'S de la frater'nilé
dorlt l'absence est la seule cause qui cache, à
nous autres modernes, la vraie solution de la
question sociale.
Mais ces mœurs nouvelles de la justice, de la
liberté et de la fraternité supposent elles-mê
mes, préalablement, cbez la généralité des homo
mes, un accroissement de lumière suffisant
pour déraciner de leurs cœllrs tout exclusi
visme, tout fanatisme, tout esprit sectaire.
Cette largeur de vues, ce libéralisme qui doit
progressivement se substituer dans le bon sens
public, à l'esprit etroit des Eglises sectaires et
du fanatisme religieux, suppuse aussi une union
des plus étroites entre la rèligion, la philoso
cations sociales. Paris, t2, rue Thouio, à la Iibrail'Ïe de
la Nou"clle Jérusalem.
52. WR LA TERRE 7
phie, la science, l'économie sociale et les beaux
arls, en un mot, une vue synthétique de toutes
les branches des connaissances humaines.
7. Or, cotte union étroite et en mème temps
cetie vue syothétique de toutes les branches des
connaissances humaines, doit exister également
chez les représent<'lllts de ces connaissances, et
elle doiLs:operer de manière à etouffer tout ~
prit sedaire, tout exclusivisme.
Cherchons donc à dégager cette synthèse ou
cette idée-mère qui doit leur servir de trait d'u
nion.
Dans ce bu"t,observons, en premier lieu, que
celui qui, dans la recherche de la vérité, ne re
connaît d'autre idéal que la science, et qui ne
voit, en conséquence, que le fait matériel, abou
tit fatalement au matérialisme. En effet, la
science n'embrasse que les lois de la nature
matérielle, et celles-ci sont susceptibles d'être
connues seulement par l'aide de nos sens: Il eu
résulte un danger pour nos savants modernes
qui, lorsqu'ils ne reconnaissent comme vrais
que les faits scientifiquement démontrés, tom
bent dans le matérialisme, qualifié de natura
lisme, ou encore qualifié dans sa forme la plus
savante, Ile positivisme.
Observons en second lieu, que celui qui, as
pirant à un idéal plus élevé que le matérialisme,
ne recherche cet idéal que dans la raison pure,
celui-là abuutit falalement au rationalisme,
et c'est là généralemeut récueil de l'esprit mo
derne.
Enfin, observons en dernier lieu que celui qui,
aspirant à s'élever plus haut encore, ne 1'e
cherclle son idéal que dans la connaissance lit
térale de la vérité révélée sans vouloir s'aider,
en même temps, de la philosophie et de la
science, celui-là absorbe la philosophie et la
science dans la superstition, et il aboutit au
53. 8 LE RÈGNE DE DIEU
mysticisme. C'était là l'écueil des écoles scho
las tiques, contre lequel se heurtent encore trop
souvent nos Eglises modernes.
8. La religion ne nous est révélée directement
que par la littérature sacrée; elle formule des
vérités telles que celles de l'existence de Dieu,
et de son unité, qu'il nous serait impossible de
découvrir par nous-mêmes, au moyen du se
cours de la raison seule, ou de la science seule,
car ces vérités révélées sont spirituelles et doi·
vent être qualifiées de surnaturelles; elles
constituent en effd, des principes qui dominent
le monde matériel, planent au-dessus de lui et
au-dessus de la science elle-même.
Si donc la philosophie ou la raison pure ne
peut pas nous servir à découvrir par nous-mê
mes, ces vérités nouvelles que nous ne pouvons
connaître qu'à mesure que nous apprenons à les
dégager plus clairement des textes de la litté
rature sacrée, elle peut, tout au moins. nous
servir à leur donner droit de cité parmi les
hommes de notre monde moderne, eu faisant
ressortir leur caractère rationnel.
La philosophie peut, en effet. par le moyen de
la logique, nous servir à présenter rationnelle
ment certai nes vérités clairement révélées dans
le domaine religieux, ainsi à les rendre vrai- .
semblables, et à leur imprimer un plus grand
cêlractère de certitude.
Ces vérités révélées qui se trouvent placées
au-dessus de la raison humaine, et au-deS~lls
de la science, ne doivent plus cependant, dans
nos idées modernes, rester susceptibles de se
trouver en opposition avec la raison ou avec la
science, ainsi que cela a eu lieu jusqu'en ces
derniers temps, par les inspiratIons d'un pou
voir sacerdotal, intéressé à assoupir les cons
ciences et à obscurcir les intelligences, afin de
les dominer et de les asservir.
54. SUR LA TERRE 9
Si, de son côté, la science seule ne peut nous
servir il. découvrir par nous-mêmes les vérités
révélées, bien qu'elles nousapparai&sentcomme
susceptibles d'être présentées sous un jour
rationnel, et même scielitifique, elle peut, ce
pendant, servir à les confirmer scientifique
ment, c'est-à-dire, dacs leurs applications maté·
rielles, ou les plus externes, et même à les
formuler ainsi par voie d'analogie.
9. A côté de la vérité révélée dans notre Bible
écrite, ily a, en effet, la vérité révélée dans la
BiLle de la nature, c'est-à-dire dans les signa
tures mêmes des créations naturelles.
Il en est question dans notre Bible écrite, car
l'étude de son sens spirituel, nous initie à la
science des correspondances entre les vérités
spirituelles et les vérités naturelles, soit scien
tifiques, soit simplement historiques. Celles·ci
sont les signes, et celles·là, les choses signi
fiées, Celles-ci sont des représentatifs et celles
là les choses représentées. Cette science des cor·
respondances ou cette symbolique sacrée nous
manifeste les signes des vérités spirituelles au
tant dans les fails de l'histoire sainte, autant
dans les créations humaines que dans les créa
tions divines. Elle nous initie en même temp:::
aux lois de l'esthétique, c'est-à-dire à la science
du beau, et en même temps elle nous fait tou·
cher du doi gt l'erreur et la folie des artis tes qui
prétendent faire de l'ad pour l'art, au lieu de
voir dans les signatures des choses et dans les
beaux.arts, le langage de la sagesse divine.
La sagesse antique avait cette perception de
la vérité que l'homme spirituel, par le moyen
de ses facuItés rationnelles, voyait les choses
spirituelles dans les sciences et dans les arts,
de même qu'un homme se voit dans un miroir et
s'y recoIJnait.
10. En somme, la philosophip doit nous ap
55. 10 LE RÈGNE DE DIEO
prendre à être rationnels, religieusement par
lant, tandis que la science doit nous enseigner,
par voie d'analogie, à confirmer ell nous,la con
naissance des vérirés spirituelles.
La philo~ophie est donc destinée à servir de
trait d'union entre la religion et la soience.
De son côté, la science est destinee à servir
de manteall à la religion, car elle nous présente
dans les créations de la nature des harmonies et
des beautés, que nous devons imiter ou répéter
sous de Douvelles formes dans nos institutions
sociales.
L'esprit philosophique est une des tendances
de l'esprit moderDl~; c'est celle de la civjlisa
tion do l'avenir. Cet esprit n'accepte rien qui se
présente comme contraire à 1:1 raison, mais son
caractère libéral, fait qu'il accepte certaines
vérités qui sont au-dessus de la raison humaine,
parce qu'elles échappent à toute investigation
scientifique, bien que, néanmoins, elles soient
llusceptib!es d'être formulées rationnellement.
En s'harmonisant avec la religion, la science
évite de tùmber dans le matérialisme, et elle se
transforme alors en sagesse, ce qui empêche,
d'un autre côté, la religion de tomber dans le
mysticisme. Or, l'un ou l'autre de ces deux mal
heurs arrive, toutes les fois que la science et la
religion, au lieu de s'harmoniser, vivent isolées,
ou même opposées l'une à l'autre, ou encore
lorsqu'elles sont abwrbées l'une par l'autre.
11. Le fait naturel ou matét'iel fait l'objet de la
science. Or, la vérité de fait, peut être envisa
gée tour à tour au point de yue du juste et de
l'utile, au pointde vue purement scientifique et
au point de vue purement esthétique. Il y a
donc dans le seul fait matériel, à envisager le
côté des sciences sociales, celui des sciences
exactes et celui des beaux·arls.
Les sciences sociales comprennent le juste et
56. sun LA TSRRE 1'1
l'utile: il leur cal'act.èJ'e purement scientlflque
et naturaliste, il faut donc ajoutel' uu élément
moral de~tin.é à les t.ransformer eIl sagesse.
Il ya, par conséquent, quatre points de vue de
la vérité de fait ou de la vérité naturelle, qui
fOI'ment les divisions générales, et en même
temps la synthèse de toutes nos connaissances.
Ces quatre points de vue de la vérité de fait,
se lienl en tre eux corn me la fiu, la cause, les
/fets premiers et les effets derniers: ou ellcore,
commele bien, le vrai ,le bon ou l'ulile, eUe beau.
La conclusion de ce qui précède, est que la
religion, la philosophie et la science, doivent
s'équilibrer mutuellement dans leurs applica
ions social èS, et qu'elles ont chacune leurs li
mites respectives, tracées d'avance dans les
idées universelles du bien, du vrai, et du fait,
c'est-à-dire, de la fin, de la cause et dos effets.
Ce n'est pas à dire que le bien, le vrai et le
fait, ne concourent pas à la fois à la réalhation
pratique des principes soit religieux, soit phi
losophiques, soit scientifiques, mais c'est à
dire, que la religion envisage les choses plus
essentiellement au point de vue du bien en lui
même, que la philosophie les envisage plus
essentiellement au point de vue du vrai dans
ses dérivations rationnelles, enfin que la
science envisage les choses au poi nt de vue du
fait matériel, vu en lui-même.
Il ya donc à la fois de la religion, de la phi
losophie et de la science dans chacun de ces
trois domaines de la pensée humaine; seule
ment, il y a, pour la distinction ùe la sphère
respective de chacune de ces branches du sa
voir humain, la religion proprement dite, la
philosophie proprement dite et la science pro
ment dite.
12. IL en résulte que les liens des différentes
branches des connaissances humaines, sont
57. i2 LE RÈGNE DE DIEU SUR LA TERRE
aussi étroits que les liens fraternels qui doivant
unir tous les hommes entre eux, comme les
enfants d'un même Dieu.
n en résulte encore que les hommes qui per
sistent à vivre en castes isolées, dont les unes
se réclament exclusivement de la religion, les
autres aussi exclusivement de la philosophie,
d'autres encore aussi exclusivement de la
science seule, d'autres enfin, de l'utilité seule,
vivent en réalité dans un état de barbarie et
d'exclusivisme qui est le résultat nécessaire de
leur caractère fanatique et sectaire. .
De leur côté, les différentes Eglises qui vi
vent isolées et opposées les unes aux autres, à
cause de leurs différences théologiques, de
vraient s'unir au nom de leur principe commun
qui est l'amour de Dieu et l'amour du prochain.
Elles devraient laisser de côté, à l'arrIère.plan,
ce qui les divise pour rechercher de concert les
principes théologiques qui leur sont communs,
parce qu'ils serviront de traits d'union et d'ins
truments de réalisation des œuvres de charité
et de fraternité sociales, pour l' enseigne men t gé.
néral de la pratique de ces mêmes œuvres.
Mais partout où l'esprit d'exclusivisme et de
division persiste, contrairement à l'enseigne
ment de Jésus-Christ, qu'il a ainsi formulé:
« Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas
jugés, » (Matth. VII. 1) c'est la force qui prime
le droit, et c'est la raison du plus fort que s'im
pose toujours comme la meilleure. De là vient
aussi que le règne de Dieu sur la terre, et que
la solution de la question sociale, sont aussi
loin de nous, que la connaissance du nou.vel
Evangile social de l'Eglise et de la civilisation
de l'aveair.
58. CHAPITRE II
La pratiqne des enseignements religieux
SOMMAIRE
13, La religion qui est au-dessus du domaine de la ma
tière, doit descendre et senlr à inspil'er même le lan
gage des affaires. - 14, Distinction à faire entre la
f"tlternité et la wliJarité. - 15, Les Jois qui reglent d
qui gouvernent la distribution des richesses, bien que
purement scientifiques, dépendent d'une cause morale.
Celle-ci est destinee à sc greffer SUI' la science qu'on
nomme maintenant: wciologic, - 16, Les tendances
démocratiques de l'csPI'it modeme nous conduisent à
une évolution, qui tend à substituer le gouvernement
"al' la justice au gouvernement par ia raison d'Etat.
11, Parallèle entre la religion et le socialisme.- 18. Les
Eglises ont eu une iDfiuence funeste SUl' l'enseignement
des sciences sociales, tandis que leur mission est d'être
les auxiliaires de cet enseignement. - 19. Le Chl'istia
nisme a eu cependant, celle influence heul'euse, de faire
naître l'esprit de tolérance et de charité, qui s'est affi, mé
dans nos mœUl'S, à partil' du dix-buitième siècle, mais il
n'a pas su encore s'aff,'anchir de l'esprit sectaire, qui di
vise les Eglises des di.tfèrentes Communion S.- 20. L'ex
périence enseigne que l'homme ne reç,oit la vérité qu'en
proportion qu'il cst dans le bien: le bien désire le vrai,
parce que celui-ci l'éclaire el l'équilibre dans ses appli
cations à tous les actes de la vie sociale.
01', Jéms lUi dit: dans la loi qu'y
a-t-il d'ecrit 1 Comment lis-lu
En répondaut il dit : ~ Tu aime
ras le Seignenr ton Dieu de tout
ton cœur et de toute ton àm~ et
de toule ta force et de toute ta.
pensée; et ton prochain comme
toi-même, " Alors il lui dit:
Convenablement tu as répondu,
fais cela et tu vivras, (Luc. X,
26, 27, 28.)
13. Ce texte de l'Ecriture sainte forme le som
maire de toute la Loi, et il pose le principe
.2
59. 14 T.A t'RATIQUE
fondamental de toute religion. L'amour de Dieu
et du prochain n'est pas seulament l'expression
du sentiment de fraternité, qui Juit uuir tou~
les hommes dans leurs rapporls r.eligieux, mais
cet amour est destiné, avec le progrès des mumrs
et de la civilisation, à sa séculariser de ma
nière à étendre ses ramificatIOns et ses arpli
cations, à toutes les branches des scieuces socia
les, ainsi qU'à tous les rapports du monde des
affaires.
Pour laïciser la religion, pour la seculal'iser,
de manière à la rendr'e populaire, en familiari
sant les hommes avec ses enseignements, il est
nécessaire de montrer son cûté pratique et son
adaptation à tous les acles de la vie sociale,
particulièrement au langage même des affaires.
On arrivera donc à se servir du langage des
économistes, et des hommes d'affaires pour en
seigner les vérités religieuses dans les actes,
et de manière à manifester clairement le carac
tère pratique de ces enseignements.
i4.0bservons, à ce propos, que la fraternité,
seul sentiment qui ait survécu à la décadence
des Eglises du passé, appartient depuis un siècle
à la devise républicaine, et qu'elle fait place,
dans le langage économique, à la notion plus
concrète de la solidarité.
Ces deux expressions: la fraternité et la soli
darité, s'emploient souvent l'une pour l'autre,
bien qu'il soit ulile et même nèce::lsaire de les
distinguer. En effet, la fraternilé existe en théo
ris ou en principe dans nos aspirations poli ti
ques, plutôt qULl dans nos mœurs et nos institu
tions, taiHlis que la solidarité humaine, lors
qu'elle est reconnue et admise, de manière à
produire de bons, au lieu de mauvais résultats,
suppose cette fraternité comme ayant pénétré
jusque dans la pratique de la vie sociale.
Si, au contraire, nous méconnaissons, dans la
60. DES ENSEIGNEMENTS RELIGlEliX 15
pratique des affaires, cette solidarite sociale
qui {aille fondement même de la science de
l'économie poli lürue, nous suùissons des crises
économiques et l1uuncièt'es, d'une manière
d'autant plus crueUe, que l'esprit de fraternite
a moiDS imprégné nos mœu)'s.
On s'aper'çoit alors, au prix des souffl'ances
et des misères sociales, que la solidarite s'im
pose à lous, parce qu'elle fait retomber le mal
des uns sur les autres, de telle sorte que tous
les membres du corps social en souffrent, tan
dis que (~ette mêm~~ solidarité sociale est, en
réalité, destinée à étendre le bien de chacun à
tous ou de tous à chacun.
15. La société se trouve ùonc en face d'un
grand devoir à remplir: eelUl de découvrir le
l'emède contre tout mal qui afflige l'individu,
parce que ce mal tend a devenir social.
Il faut, pOUl' cela, qu e la société trouve des
procédés scientifiques, qui soient l'expression
juste et en même temps l'inspiration du senti
ment dé la solidarité fraternelle. Il s'agit donc,
pour tous 1es hommes, de remplir un gl'and de
voir religieux en même temp.> que social: celui
de s'unir pour conjurer tout mat qui menace ùe
de veuil' social.
Le besoin d'uuiou dans ce sens se fait d'autant
plus sentir, que les crises économiques pt finan
cières se renouvdlellt plus fréquemment de nos
jours. Or,observons que toutes nuisibles qu'elles
soient, les maux qu'elles caus(~nt fiuisserit par
avoir celte utilite salutait/e, de ré-eiller àans
le cœul' des hommes l'esprit de justice qui y
sommeillait, et ùe stLmuler en même temps le
progrès des mœurs publiques. lIllles contribuent
aussi à stimuter cet espl'H nouveau du monde
mademe, rrni a soifde véritr. etrle justIce; elles
contribuent, enOo, à accro'itre nÇ>S lu.mlères, li
61. 16 LA PRATI~UE
mesure que cet esprit nouveau s'inspire mieux
du sentiment de la fraternité et de la solidarité
humaines.
Il y a donc lieu de conclure que les lois qui
règlent et qui gouvernent la distribution des ri
chesses, bien que scientifiques, dépendent d'une
cause morale. Cette nouvelle science qui a surgi
de l'étude de ces lois, et qu'on nomme« laso
ciologie,» tomberait en décadence, en deve
nant purement scientifique et matérialiste, si
l'on n'avisait pas aux moyens de greffer sur tous
ses éléments purement scientifi'lues un élément
moral.
Aussi, ce sentiment nouveau de douceur et de
tolérance qui caractérise notre époque, et la
distingue du fanatismereligi.eux desâges passés,
réveille la conscience de l'homme moderne et
le remue de manière à le préparer à se consa
crer intérieurement, à un nouveau culte d'amour
pour la vérité et lajustice, dans ses applications
sociologiques encore méconnues.
Les réformes sociales que le nouvel âge nous
promet, ne s'obtiendront que par les efforts hé
roïques de certaines individualités qui auront
reçu la mission toute providentielle, de nettoyer
ce qui reste encore des écuries d'Augias de l'an.
cien monde: époque de tentation::;, époque de
combats incessants pour déblayer le tert'~in, et
permettre à l'esprit nouveau d'édifier des ins
titutions rénovatrices, au lieu et place des an
ciennes, tombées en pourriture.
Ces individualités nouvelles, ces héros ou ces
hercules de l'âge héroïque de l'avenir, qui fe
ront (;e déblaiement de l'ancien monde, ne se
ront autres que des personnes morales, car l'âge
des héros individuels et des grands despotes
est passé. Ces personnes morales et civiles en
même temps, sous des forilles d'une variét'
infinie de coopérations et d'associalions corpo
62. DES ENSEIGNEMENTS RELlGIEUX 17
ratives, rétabliront dans les sociétés humaines,
le culte de la vérité et de la ju~tice, non plus
seulement par de pures déclarations de prin
cipe." mais par des faits sociaux et economiques,
ainsi par la leçon même des choses.
Ce culte nouveau de la vérité et de la justice
doit avoir encore pour résultat de prévoir, au
moyen de l'u 0 ion par l'association ou la coopéra
tion,le mal produit par les crises économiques et
financières, en conjurant les excès de la produc
tion, les désastres de la concurrence et les abus
de laconsommation, sources originaires des mal.
heurs et des injustices qui assaillent les tra
vailleurs.
Les missionnaires de ce nouvrau culte, ne
sont pas seulement des pasteurs proprement
dits; ce sont aussi ceux qui, dans toutes les bran
ches du travail humain, profitent de l'accrois
sement général des lumières, et qui s'en ser
veutpour contribuer à l'affranchissement des
travailleurs de la misère, à leur relèvement par
la diminution du nombre des heures du travail
physique, afin de leur donner la jouissance
libre des heures du travail de J'esprit. Ils leur
prêcheron t le nouvel Evan gile social, qui doit
grouper autour du drapeau de la fraternité,
tous les hommes indistinctement.
16. Déjà on peut constater, à ce propos, un
grand progrès de l'espri t moderne dans les gou
vernements des nations: en effet. tout Etat mo
derne s'éloigne de plus en plus de l'antique ten·
dance, qui consistait à laisser a1,lxEglises ou à
la classe riche le monopole de l'intluencp-. On
vise maintenant à tout laïciser, à tout démocra
tiser, en développant l'instruction desmasses,et
particulièrement en ce qui concerne l'esprit,
dont doivent s'inspirer les ingtitutions créées
par l'initiative gouvernementale, ou qui appar
tiennent à la direction de l'Etat.
63. 18 LA PRATIQUE
L'esprit ùes institutions tIc bienfaisa,nce doit·'
également s'élargir, de manièt'e à devenir so
cial, et à adoucir réellement les souffrances d
la misère, de manière aussi à ne plus compren.
dre le mot charité, autt'ement que comme syno
nyme de fraternité et de justice.
Dans nos idées mollernes, touLe vérite, pour
être acceptable, doit avoir son utilité pratique,
et cesser d'être présentée au nom Ù'llle autorité
quèlconque qui prétend l'im poser; cette auto
rité <loit ètrû assez aimable, et assez imprégnée
de l'esprit de tolérance et de charité, pour se
mettre à la portée de tous indlstinctement er.
se rendant intelligible, et par suite, en presen
tant 'tous une forme rationnelle toute doctrine
dont elle se prévaut.
c'est à cause de eette émancit)alion de l'es
prit moderne de la tutelle de l'espdt sacer
dotal ou de l'esprit purement autoritaire, que
la yérilé religieuse doit deycnir susceptible
d'être propagée en dehors de toule Eglise, et
qu'ainsi elle doit se séculariser comme chose
pratique et d'application sociale. Elle doit êlr
acceptable, autant en dehors qu'en dedans des
Eglises qui l'admettent comme article de foi.
C'est là une éyolution sociale qui tend à sub
stituer en toutes choses, le gouvernement par
la justice au gouvernement personnol, qui
prend le masque de gouvernement par la rai
son d'Etat.
La foi aveugle imposée par le pouvoir sacer
dotal caractéri~e le mysticisme r~ligieux, Le
gouvernement par 13 raison d'Elal. s'impose
également aux sociétés humaines, en dehors de
tout eSprit de juslice, et cal'actérise le mysti
cisme poli tique ou le socialis me d'Elat.
17. Le Ohristianisme autoritaire ou clérical
doit, de même que le socialisme d'Etat, se t!'all~
former et subir la même évolulion dans le sellS
64. IiES ENSElGNEMENTS RELIGIEUX 19
Uoéral, en se présentant sous (Jes formes ration
nelles comprisos par la généralité des hommes .
. On él sauvent opposé le socialisme à la reli.
glOn, parce qu'on a montré le socialisme de
même qu'on a montl'é la religion, sous un as.
péet aulori,taire, soit comme mysticisme, soit
comme moyen de gouvernement despotique.
C'est ,par suite de ce (aux aspect, sous lequel
on a etouffé leur c::.l.ractère essentiellement li
béral, qu'on a prétendu, avec quelque apparence
de raison, que la religion serait un jour détrôtlée
par le socialisme, et qu'ainsi le socialisme ré
ussirait à s'édifier sur les ruines du christia
nisme.
En réalité, ces dell,x, la religion et le socia
lisme dans leurs tendances iibérales, ne devien
dront possibles, pratiquement, qu'avec le pro
grès des; mœurs, et aus~i à la condition seule
ment d'être librement acceptés par la généra.
lité (Jes hommes.
Mais supposons ce progrès des mœurs de la li·
berté réellement accompli, le chrbtianisme et
le socialisme, de même que la fraternité et la
solidarité humaines, deviennent tous les (Jeux
aussi condliables qu'une théorie l'est avec la
pratique rles principes au nom desquels elle
existe. Ils sont oonc destinés, dans un avonir
plus ou moins éloigné, à se fusionner l'un avec
l'autre, par la raison même que la religion est
r.on seulement la doctrine de la fraternité mais
aussi la vie d'aprôs cette doctrine.
Le christianisme, en effet, prêche la fraternité
et la justice; celles-ci forment d'ailleurs le fon·
dement essentiel de la vraie religion.
Le socialisme, de sou côté, prétend imprégner
de cette fraternité toutes les institutions poli
tiques et sociales, ainsi que les mœurs pu
bliques.
Il s'ensuit que celui-ci ne peut se réaliser
65. 20 LA. l'RATlQUE
pratiquement sans le secours de l'influence de
l'autre, et :llors il ne peut plus être sérieusement
question de les substituer l'un à l'autre.
La seule chose dont il puisse être question,
c'est de les réformer de manière à les rappro
cher l'un de l'autre, pour les rectifier d3.ns tous
les points qui les rendent incompatibles ou qui
les divisent, et pour les développer dans tous
les points qui peuvent cimenter leur union.
L'enseignement religieux et la pratique so
ciale, une fois remis en harmonie l'un avec
l'autre, celui·là dans ses principe:;:, celle-ci dans
les actes, tous deux contribueront efficacement
à l'avancement du règne de la fraternité et de
la justice dans tous les rapports sociaux. Ils
auront alors, l'un etl'autre, dépouillé tout esprit
sectaire ou d'exclusivisme, et ils auront fondé,
sur des assi:;:es inébranlables, la doctrine uni
verselle de charité et de fraternité.
Ce nouveau culte se manifestel'a dans les
Eglises de toutes les communions par une va
riété infinie de formes, et il sera cependant le
culte d'une seule et même Eglise universelle,
réellement catholique, laquelle sera caradé
risée par le lien fédératif des E~lises de toutes
l es communions.
Ce développement de l'amour mutuel dans le
cœur de la généralité des hommes, formera un
nouveau droit divin, qui se transformera dans
nos lois et nos institutions, en préceptes de droit
positif humain.
18, Toutes les Eglises du passé ont eu leurrai·
son d'être, quant à la variété de leurs formes de
culte, mais elles ont cessé d'avoir leur raison
cl 'être, quant à leur principe d'unité, l'amour de
Dieu et du prochain, suivant qu'elles se sont
plus ou moillg écartées de ce principe d'ori
gine. Elle~ se sont écartées de l'amou[' de Dieu,
en perdant la conception de l'unité de Dieu; elies
.