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UN SOURIRE A LA COP 21
Je vais tenter de résumer mes deux semaines passées à la COP21, à porter le
sourire de la terre. La tâche est difficile, tellement d’évènements se sont passés
qui m’ont marqués de façon indélébile et m’ont façonné, du plus insignifiant
au plus extraordinaire.
Alors, comment cette idée de sourire aux délégations de la COP21 m’a-t-elle
conduit à cet hôpital psychiatrique de Thiers, d’où j’écris ces lignes ?
Cela peut faire peur et pourtant c’est une belle histoire, presque un beau
roman…, qui se termine bien puisque je suis en bonne santé, nourri et logé
gracieusement par la sécurité sociale depuis bientôt un mois.
Je suis donc arrivé seul sur le rond-point à l’entrée de la COP21 ce lundi 7
décembre 2015, jour de visite des 147 chefs d’états de la planète. A vouloir
sourire la main sur le cœur, j’étais une manifestation à moi tout seul, pour la
police. Il m’a donc fallu bouger. J’ai eu la chance ensuite de pouvoir sourire aux
convois des chefs d’états qui passaient sur l’autoroute A1 déserte, puis au bord
de la bretelle de sortie. Quelle tristesse de voir ces hommes d’états accueillis
dans une ville déserte !
Toujours poussé à bouger par la police, J’en ai rencontré un qui m’a finalement
conseillé de demander l’autorisation à la Préfecture de Paris :
- Je viens demander l’autorisation de sourire ! ai-je annoncé à l’accueil,
déclenchant le rire des hôtesses. L’autorisation m’a été refusé, bien sûr ! On ne
sourit pas à la COP21, vous comprenez…
- Et allez donc demander à Bobigny, mais s’ils disent oui, nous on dira non…
En sortant de là après avoir offert une boite de chocolats aux hôtesses d’accueil
en récompense de leur sourire et de leur bonne humeur, je me suis ressourcé à
Notre Dame, devant les splendides tapisseries représentant une nature
luxuriante de dom Robert. Quelle beauté et quelle paix !
Gilles Edmond François Sauvat 1/13
27 décembre 2015
Mardi matin me voilà donc à la préfecture de Bobigny : mêmes rires et même
refus. J’avais aussi écrit à notre cher président de la république mais j’attends
toujours sa réponse…
La France ne veut pas de mon sourire ? Qu’à cela ne tienne, je vais l’offrir à
l’ONU, après tout c’est elle qui organise ! Un petit coup de fil au siège à
Bruxelles et me voilà avec en poche le numéro de portable d’une organisatrice
présente à la COP21 ! Wahou ! Que faire avec ? De retour au Bourget, je profite
du parc pour méditer à cette nouvelle situation. Et je me fais mettre dehors par
la police montée, le parc devant rester désert.
Surtout ne soyez pas en contact avec la nature !
Et comment des hommes qui s’enferment toute une journée dans une grosse
boite, fut elle en bois, sans voir le jour peuvent-ils prendre des décisions
correctes pour le climat ?
Mon SMS à l’organisatrice ne donnera rien, pas de réponse…
Je rentre à nouveau à la COP21 et découvre l’espace réservé au public et aux
organisations de défense de la nature et du climat. Le décor est troublant : des
arbres facétisés ornent les murs , un grand arbre en panneau de bois permet
d’accrocher des post-it avec des bonnes idées. Et où est la nature ? Ah là ! Il y a
des jardinières avec des plantes…ouf ! Personne ne les regarde bien sûr, tout le
monde est affairé…
Dans un recoin, je découvre une très belle sculpture de Gaia tenant la terre
dans sa main, en marbre blanc, Splendide ! Et puis cette rencontre, à deux pas
de la table où Nicolas Hulot discute avec des visiteurs.
Il est jeune, habillé de feu, il a passé trois ans avec la tribu des Guaranis en
Amérique du sud. Nous sommes frères, je l’invite à vivre avec moi en Auvergne,
il accepte. Nous nous retrouvons attablés avec Nicolas, moi à chanter les
accords Toltèques et lui, Anthony Julien à chanter son chant de guérison
guarani. Nicolas nous quitte en disant « wahou ! je me sens équilibré ! » .
Gilles Edmond François Sauvat 2/13
27 décembre 2015
J’accompagne ensuite le chant d’un Qatari qui transmet sa révolte contre la
pollution de son village. Plus tard sa guitare a failli être déminée car il l’avait
laissée sans surveillance le temps du repas ! Que la peur nous rend méfiants !
Lui ne comprenait pas pourquoi il se faisait fouiller à cause de cela ! Ce n’est
pas ainsi dans son village …
ET puis Juan Manuel de l’association ‘Sustaining All Life’ se présente à moi, le
regard lumineux. Il me propose de présenter mon projet de vie lors d’un
forum. J’accepte bien volontiers et entraine les gens à danser ‘eh malala’ pour la
terre à la fin du forum.
Le lendemain, je passe la journée à dire bonjour aux gens. Je fais d’autres
rencontres j’assiste à un autre forum où les gens du monde entier exposent
leurs actions et leurs souffrances de minorités. En fin de soirée avec Anthony,
nous décidons d’aller sourire aux délégations qui sortent de la zone bleue, vers
la forêt de drapeaux. Nous nous plaçons la main sur le cœur et saluons d’un
bonsoir chaque personne qui sort. Une soudanaise se joint à nous. Les gens
sont contents. Quand ils nous demandent pourquoi, nous répondons « C’est le
bonsoir de la terre qui vous remercie d’avoir travaillé toute la journée pour
elle » Les sourires se font plus larges encore.
- Vos papiers s’il vous plait, puis, par ici la sortie. Le chef ne vous autorise pas à
continuer ! dixit un agent de police bienveillant…
- Ah ? Bon ! Vous direz au chef « Bonsoir, bonne nuit, demain tout ira bien « .
Et nous partons avec la satisfaction du sourire de plus de trois cent personnes…
Je me réveille jeudi avec cette pensée : La police ne peut plus m’empêcher de
sourire, ils sont allés trop loin. Si j’en parle ils seront ridiculisés. En arrivant à la
COP 21, des pommes sont distribuées, j’en prend une et commence à arpenter
l’esplanade au milieu de la foule des délégations qui rentrent dans le hall. Je
souris en regardant droit devant moi, la pomme tenue précieusement dans
mes mains. Comme pour dire « Regardez, la nature est là, voici son
cadeau ».Théa Marie Robert vient à ma rencontre, elle est touchée.
Gilles Edmond François Sauvat 3/13
27 décembre 2015
Elle m’apprend l’hymne du citoyen de la planète, écrit sur l’air de la
marseillaise, puis porté par un nouvel air. Quelle puissance dans ce chant !
Quel appel au rassemblement de tous sur cette terre ! Nous le chantons sur
place, puis sur un podium au sein de la zone publique. Théa défend depuis très
longtemps les valeurs humaines, elle a déjà chanté son hymne à Fukushima,
nous avons une longue conversation.
A la sortie de la COP21, j’oublie mon blouson au vestiaire. Impossible de le
récupérer, la sécurité veille sur lui ! Adieu pour un temps la chaleur, les clés de
l’appart et les papiers d’identités……
Cela ne m’empêche pas de manger avec l’asso ‘Sustaining All Life’ et d’aller
dormir chez mon ami.
Vendredi matin, me voilà propulsé à l’intérieur de la zone bleue, celle gardée
par l’ONU , où l’on ne peut rentrer qu’avec un badge. Sauf si…. A la descente
du bus, de bonne heure un homme m’accoste, je raconte mon histoire de
blouson et me fait mettre au chaud à l’intérieur au-delà des gardiens du sas
d’entrée. Là, un policier de l’ONU me fait franchir les portillons de contrôle et
me dit d’attendre là l’heure d’ouverture de la zone publique.
Et voilà, j’y suis, et je n’ai rien demandé !! Simplement parce que deux
personnes ont écoutés leur cœur plutôt que le règlement.
J’en profite pour sourire à tous ceux qui rentrent. Jusqu’à ce qu’un chef me dise
de bien vouloir quitter les lieux…..
De nouveau dans la zone publique, j’échappe mon porte-monnaie entre les
barreaux des gradins. Et me vient cette idée : que serait le monde sans argent,
sans échange ?
Et puis je rencontre un jeune homme. A force de discuter, nous en arrivons à la
conclusion que pour régler le problème des déchets, les hommes doivent
apprendre à faire de la merde ! …de l’engrais pour la planète.
Gilles Edmond François Sauvat 4/13
27 décembre 2015
Et me voilà avec deux idées fortes : l’argent n’est qu’une autorisation à faire des
choses et les hommes doivent faire de la merde !
J’en ai assez pour aujourd’hui et je pars au Bataclan avec Anthony rejoindre
Théa et chanter l’hymne des citoyens de la planète avec treize personnes au
total pour les victimes des attentats.
Voilà terminée une première semaine à la COP21 et je rentre me ressourcer à
Clermont-Ferrand chez mon ami Wahib. Dans le métro, je demande de passer
à la caissière, qui me l’accorde après vingt minutes de discussion…
L’Auvergne, son Puy d Dôme, sa nature forte et douce à la fois. Dimanche je
remonte pieds nus le cours de la Tiretaine en direction du Puy de Dôme. Au
retour, je dis bonjour à un jardinier qui brule des branchages. Nous engageons
la conversation et surprise, il participe à la COP, une délégation pour les
forets ! Je lui passe mes deux messages !
Le matin avec mon ami couvreur charpentier zingueur, nous avons décidé de
donner un chantier dans le hameau de Deux Frères et de trouver des
entreprises pour nous donner le peu de matériaux nécessaire. Un chantier
pilote quoi !
Le lundi matin une nouvelle idée se fait jour : je vais organiser la première
journée internationale du don et ce sera le 14 décembre 2015. Les attentats à
Paris ont été connus en quelques heures, la journée du don peut bien être
connue en une semaine non ?
Et la journée commence ainsi : je fais don de mon sac de voyage en l’oubliant
dans le train à Clermont-Ferrand. Plus tard dans la journée, alors que je
marchais du Bourget à l’Olympia, mon sac à dos me pesait trop, j’ai fini par le
donner à un étudiant dans la rue, place de la république. Je lui ai aussi fait part
de mes pensées pour Daech, je voulais lui apporter le sourire et leur dire de
rentrer chez eux s’occuper de leur femme et de leurs enfants, mais on en
reparlera…..
Gilles Edmond François Sauvat 5/13
27 décembre 2015
J’ai ensuite donné mon téléphone portable à une femme infirmière en lui
demandant de répondre à ma famille que tout allait bien pour moi. Je voulais
juste devenir invisible de la police, pensant être éventuellement sur écoute
depuis mes aventures du rond-point. Et pour aller au bout et être plus
convaincant, j’ai aussi donné ma carte bleue à une famille de mendiants avec
deux petites filles et avec, bien sûr….le code !
Dans la rue je continuais à donner le message de la journée internationale du
don et de la fabrication de la merde. L’aventure du don, sans argent
commençait là pour moi. J’ai passé le reste de la semaine à vivre de don et à
annoncer mon message. J’avais aussi en tête de faire un clip avec Yannick Noah
pour l’annoncer. Pourquoi lui ? Pourquoi pas ? Il me semblait apte à
comprendre et à adhérer.
Ah j’oubliai, ou plutôt je n’osais pas vous dire quelque chose d’essentiel pour
comprendre la suite. Ce lundi matin, j’ai remis mon alliance, celle de mon
mariage avec Monique, la mère de mes enfants, la grand-mère de mes petits-
enfants. Nous sommes mariés devant Dieu et le restons malgré notre divorce
irrémédiable, et puis j’ai fait alliance avec Dieu, le divin, l’univers, car je me
sens guidé par lui et je me rends compte que ma vie est plus douce et plus belle
lorsque je m’en remets à lui. Je sais, c’est une position qui n’est toujours pas
courante de nos jours et qui peut faire peur, et c’est ainsi, bien ou mal.
Me voici donc allégé, marchant dans les rues de Paris avec Anthony. Nous
arrivons à l’Olympia ou Nicolas Hulot organise une conférence nommée
« osons » (Sic). Nous ne voulons pas perdre de temps à assister à la conférence
et y rentrer gratuitement parait difficile, je laisse le message a un jeune couple
pour qu’il le fasse passer à Nicolas et aux participants. A la demande
d’Anthony et après un repas à Montmatre offert par lui-même, nous allons
chez son logeur a Saint Denis. Il est profondément anarchiste, il me vire de
chez lui, mes idées lui étant insupportables, comme si il rageait que la solution
de sa lutte contre le système ne vienne pas de lui. Nous continuons dans la rue
et rencontrons Yass « le loup garou de Saint Denis ». Il dit ne pas croire à mon
Gilles Edmond François Sauvat 6/13
27 décembre 2015
message, mais il nous garde à manger chez lui, il nous fait graver nos noms sur
la table. Il a la foi c’est clair, ses lectures en attestent et son regard aussi. Il nous
offre le couvert et sa protection contre les « loups » des squats. Je suis fatigué, je
m’endors sur le canapé pendant qu’Anthony et Yass partent voir les loups.
A leur retour, Yass me mets dehors, Anthony reste avec lui. Je lui fait confiance,
le message va continuer de passer…
Six heures du matin, le marché s’installe, j’attends l’ouverture de la cathédrale
dans un bistrot. Je laisse au patron les papiers de ma moto pour qu’il puisse la
récupérer à Deux Frères, je lui la donne.
A la cathédrale, je chante l’Ave Maria de Gounod, comme à mon habitude
depuis le chemin de Saint-Jacques. J’assiste à la messe. La lecture est celle de la
genèse, Adam et Eve. Je découvre comment Adam s’est défaussé sur Eve et lui a
fait porter la responsabilité du péché. Après avoir récité un chapelet à la vierge
et à Dieu avec un groupe de pratiquants et beaucoup de ferveur, je pars sur les
routes, direction : Yannick Noah. J’ai Feucherolles en tête, lieu d’habitation
pour lui.
Arrivée gare du Nord, je m’égare dans les couloirs et me retrouve sur un quai
de gare, un train attend portes grandes ouvertes. Je monte sans réfléchir, je suis
guidé. Arrivée au terminus à Persan-Beaumont, je descends et rencontre un
mendiant, Alain, il me demande un centime ! C’est justement ce qui reste au
fond de ma sacoche !...mon dernier centime, je lui donne. Il m’emmène chez lui
ou je rencontre Michel qui a appris en six mois d’armée dans la marine que
« ça rigole pas », il ne l’a jamais oublié, jusqu’à ce jour où mon histoire le
déride… il y a aussi Christian qui ne parle qu’avec des carrés et des ronds etc…
dans la bouche. Je le prends dans mes bras, il dit « c’est cela que je voulais
dire »… rien à comprendre, juste vivre…
Dans le kebab voisin, la serveuse m’offre un café et un verre d’eau. Café que
j’offre à un voisin rencontré sur place. Je discute avec le patron, il veut bien
croire à mon idée si je lui dégote un ouvrier qui travaille gratuitement, connait
Gilles Edmond François Sauvat 7/13
27 décembre 2015
tous les métiers et veut bien travailler tout le temps. J’accepte de chercher
quelqu’un, mais ne lui offre pas la lune.
De quoi a-t-il vraiment besoin ? Il m’avoue un peu plus tard qu’il n’a besoin de
rien, c’était un test. Au fait, j’ai réussi ?...
Le soir arrive je cherche asile au presbytère et là surprise : « votre projet ne me
parait pas très catholique » dixit la personne dévouée venu faire une
préparation au mariage pour un jeune couple. Je ris intérieurement, il m’offre
un souper, mais ne peut pas me laisser dormir au presbytère, il n’est pas
responsable, d’autres pourront l’être. Il m’envoie chez Emaus. La bas, la grille
est fermée, le digicode ne réponds pas ! Quelqu’un sors par la porte de service,
je demande… Non c’est plein, je ne peux pas vous laisser entrer, je ne suis pas
responsable, allez sonner à la porte… je réessaye sans succès.
Retour en ville. Ou dormir ? A l’hôtel ! C’est fait pour les voyageurs non ? Le
jeune black qui garde l‘hôtel ne peut pas accepter, il n’est pas responsable.
-Que peux-tu faire pour moi ? Il me donne une couverture, Merci ! Merci ! Je
passe la nuit dehors devant le cinéma « Le palace »…
Mercredi matin, retour à Paris en train, sans payer, quelqu’un me laisse passer
derrière lui au tourniquet. Direction Poissy, vers Yannick Noah de nouveau, en
passant par la COP21. Je délivre à nouveau mon message de journée du don, je
trouve des gens très motivés pour le faire suivre. Je passe au self et me sers un
repas raisonnable, le caissier refuse de me laisser passer sans payer, il appelle
son chef qui lui accepte- Yes !!
Et les plantes ? Elles sont toujours là dans l’indifférence la plus totale. Je respire
le parfum de leurs belles fleurs roses au pistil jaune…hum … délicieux ! J’invite
une personne a sentir également « hum ! ils ont mis du parfum ? » et une
deuxième « hum, ça vient de sortir ? », je réponds oui, depuis quelques
centaines de millions d’années !
Comment des hommes peuvent-ils être coupés à ce point de la nature pour ne
pas la reconnaitre ?
Gilles Edmond François Sauvat 8/13
27 décembre 2015
Je pars pour Poissy. Arrivé là-bas, les portes d’ un LCL (ma banque) sont
ouvertes, je rentre pour donner l’argent de mon compte en banque. J’aurai pu
le donner à une association comme « Sustaining All Life », mais comme je
prône qu’on peut vivre sans argent et que nous avons besoin de matériaux et
de main d’œuvre, je préfère laisser mon argent à la banque, histoire
d’officialiser qu’ils s’en servent déjà « à l’insu de mon plein gré ». Stupeur de la
guichetière, elle me fait attendre dans une petite salle ou débarque trois
personnes… du SAMU. Vous allez bien ? Moi oui, et vous ? Une demi-heure de
discussion plus tard, ils ont compris que c’est vrai, je vais bien, mais il faut voir
un médecin quand même, nous attendons, il arrive. Rediscutions, nouvel
accord pour dire que je vais bien, malgré mes idées farfelues. Mais il faut aller
aux urgences voir un psychiatre, c’est la procédure !
Le SAMU m’y emmène, trois personnes auront été mobilisées pendant trois
heures pour cette histoire, pendant que d’autres attendent pour de réels
secours !
Dans la salle d’attente je fais connaissance avec Monsieur Provost retraité, à la
voie de stentor et qui lui aussi dit bonjour à tout le monde. Il me donne son
adresse à Chatou avant d’être emmené pour sa consultation.
Je n’ai rien à faire ici, je pars, j’ai l’adresse de Mr Provost, j’y vais. Sur place, on
m’indique mal la rue, et je passe une deuxième nuit dehors, ou je rencontre
deux personnes dont une me dit venir de l’an 2230 où des couvertures comme
la mienne, avec des motifs ponctuels, servent de téléphone lorsque l’on appuie
sur les points… bon à savoir…
Au petit matin, je trouve enfin l’adresse. C’est un foyer pour petits vieux, un
Ehpad ! Avec un portail et un gardien qui refuse de me laisser rentrer au
chaud en attendant une heure descente pour aller voir Mr… dont j’ai oublié le
nom. J’apprends ensuite qu’il ne se lève pas avant onze heures. Cela me laisse
le temps pour aller chez Yannick Noah ! à Feucherolles. Sur place on me
renseigne, il n’est pas là, plus souvent ailleurs. Je décide de rentrer à Paris.
Gilles Edmond François Sauvat 9/13
27 décembre 2015
Avant je rentre chez l’épicier et lui demande de quoi manger, il est là pour cela
non ? Après discussion, il m’offre de quoi me nourrir. Merci ! Merci !
De retour à Paris je décide de m’occuper vraiment de mon sommeil et donc de
dormir dans un bon lit. Direction les Champs-Elysées. Quoi de mieux que
l’hôtel Mariott, cinq étoiles ? Je rentre après avoir donné ma couverture à une
personne sans abris. Et j’ai failli y dormir. La responsable était attirée par mon
projet de vie « comme en famille » avec des dons sans rien attendre en retour.
Mais quelque chose l’a retenue, et ça l‘a mise de mauvaise humeur. Tant pis
j’aurai vu le hall magnifique et des gens mal habillés y déambuler. Ils ont
l’argent, mais pas le standing d’un tel établissement ! Au final j’ai quand même
gagné une place de cinéma en racontant cette histoire !...
Je décide d’aller dormir chez mon ami Pierre, mais en route, je rencontre un
activiste de la COP21 qui m’emmène dans son squat avec d’autres jeunes, où je
suis bien accueilli, et trouve enfin un matelas, des couvertures, de la chaleur
pour une nuit pleine de beaux rêves….
Au petit matin, de ce vendredi du dernier jour de la COP21, j’apprends qu’une
radio libre est à deux pas d’ici, il s’agit de FPP, aux 1 rue de la solidarité. Ca ne
s’invente pas ! Je me dis que c’est bon pour mon message et qu’à défaut de clip
avec Yannick Noah, une émission de radio fera l’affaire.
J’y rencontre un écrivain et son acolyte qui viennent enregistrer une émission
avec une jeune écrivaine qu’ils attendent. Ils m’offrent un verre au bistrot du
coin. La femme est en retard. Je leur propos d’utiliser ce laps de temps pour
enregistrer mon message et ils acceptent. Et voilà, c’est dans la boite, ou plutôt
sur la clé USB de l’écrivain, reste à diffuser. Je ne sais pas si cela a été fait, on
m’a fait comprendre que je commençais à déranger, alors je suis parti, satisfait
tout de même.
Cela m’a permis de préciser mon message et je passe encore un bon moment au
bistrot pour l’écrire proprement en choisissant chaque mot. Je me dis que
Gilles Edmond François Sauvat 10/13
27 décembre 2015
comme j’ai perdu mes papiers, cela m’en fera office et servira aussi de laisser
passer.
J’ai envie de retrouver mon fils qui travaille à Saint-Michel pour le tenir au
courant de mes aventures parisiennes.
Dans le métro ça buggue à nouveau, je fais des allers retour autour d’une
station pour un changement. OK, j’ai compris, je sors d’ici, je verrai bien ! Il y a
une boutique de laine, je rentre et rencontre une dame intéressée par mon
message. Elle est pressée, je l’accompagne en marchant à ses côtés. J’ai envie de
changer de vêtements, cela fait cinq jours que je garde les même et n’ai pas fait
de toilette. Elle m’indique une banque de vêtements à la paroisse Saint-Jacques,
à deux pas d’ici. J’y vais, c’est l’heure de la messe, cette fois la lecture porte sur
la présence du Christ parmi nous. A la fin, je me présente en riant à
l’assemblée comme le sauveur, avec un message : la journée internationale du
don ! Mais pas d’Alléluia, pas de rameaux pour moi !
Je fais une petite halte au resto « coup raisonnable », en souvenir de ma
première année de mariage vécue rue Saint Jacques. Je discute avec le barman
au sujet d’Adam et Eve. Quelle pourrait être la réponse d’Adam s’il avait été un
homme sans peur ? Et le barman de répondre «Et pourquoi tu nous interdit de
manger ce fruit que tu as fait si appétissant pour nous ? ». La révélation,
l’évidence, merci jeune barman bien vivant !
En sortant je tombe sur des affiches placardées sur les grilles du jardin du
Luxembourg : Le rôle des abeilles dans la sauvegarde de la planète. J’enregistre
le message pour plus tard sans doute.
Et puis je trouve une affiche de concert : le Messie de Haendel à l’église Saint-
Sulpice ! C’est pour moi ! Et maintenant ! C’est déjà commencé lorsque je
rentre dans l’édifice. Sans argent je suis autorisé à rester au fond de l’église. J’ai
de la place pour danser, je danse sur cette musique et ces cœurs merveilleux,
pour le finale le fameux Alléluia, je danse comme les derviches tourneurs…
Gilles Edmond François Sauvat 11/13
27 décembre 2015
divin ! Je vais remercier le chef d’orchestre d’avoir fait jouer ce « messie » pour
moi, pour le Messie lui-même !(Sic)
En sortant je danse encore, puis mes pas me dirigent vers la porte d’Orléans
avec l’idée d’aller dormir chez mes amis les gadz’arts. Je me retrouve place du
Panthéon à minuit sous le regard de Jean Zay et d’autres figures de la
résistance, au milieu des douze blocs de glace mis en place pour la COP21
devant des frontons avec gravé « Liberté, Egalité, Fraternité » et la tour Effeil
devant moi. C’est le moment, je suis guidé. Je me diverti, je suis nu au milieu de
cette place, humblement nu et aussi réceptacle de toute cette énergie qui vient
de la glace et de cette ville magnifique qu’est Paris. Je tends les bras vers les
gens qui me regardent, deux femmes se décident et avec quelques autres nous
formons un début de chaine humaine. Un groupe de jeune vient me voir, je ne
sais pourquoi je dis que je suis gadz’art « Ah super, notre copain aussi ! » le
voilà, il se présente « 84 Metz 2009 » c’est l’éxplosion de joie à cette découverte,
il fait partie de la famille 84 ! De ma famille gadzarique repérée par ce numéro
84 ! Nous nous embrassons chaleureusement, remerciant la vie de ce beau
cadeau !
Nous passons la nuit dans un bar boite de nuit. Quand je lui demande de
m’héberger, il répond que « ce n’est pas possible, tu comprends, je suis chez
mes parents, … »bla bla »… Je lui fait remarquer que je suis surpris qu’à 28 ans
il ne puisse pas recevoir quelqu’un dans sa chambre et je le quitte pour aller à
la résidence Arts et Métiers porte d’Orléans.
Là c’est une nouvelle déception, la fraternité gadzarique ne fonctionne plus,
bloquée par un gardien à l’entrée qui joue parfaitement son rôle, sans aucun
attendrissement malgré trois tentatives et l’aide de jeunes gadz’arts rencontrés
sur place. Le monde a donc bien changé, la peur a pris la place de la
confiance ! Je passerai donc la nuit dehors une troisième fois !
J’ai appris que la COP21 se poursuivait ce samedi de façon exceptionnelle.
Gilles Edmond François Sauvat 12/13
27 décembre 2015
Je décide de m’y rendre à pied, comme je n’ai rien pour dormir cela me tiendra
chaud. En chemin, on me donne un plateau rempli des restes de toasts d’une
soirée. Je vais les distribuer gare de Lyon, sur ma route. A ma surprise, les
mendiants ne se jettent pas dessus, non, ils prennent une part et laissent le
reste pour d’autres. Belle leçon de partage ! Il se trouve même quelqu’un qui
insiste pour que je prenne cinquante centimes en échange. Je finis par accepter
et repart avec mon plateau doré et mes cinquante centimes vers la COP21.
Cette fois, plus de pommes distribuées à l’arrivée, l’organisation n’a pas suivi.
Alors je propose aux gens mes cinquante centimes posés précieusement sur le
plateau doré : « cinquante centime pour une pomme ! que préférez-vous ?
Cinquante centime ou une pomme ? » Je fais l’unanimité, tout le monde veux
des pommes, pas d’argent !
C’est la conclusion de ma quinzaine a la COP21 et je rentre à Clermont, sans
payer mon billet de train. Arrivé le soir chez mon ami, je le trouve tout
énervé : « Ah, tu es là, enfin ! Tout le monde te cherche ! La police aussi, ils sont
allés chez toi perquisitionner, ils sont allés voir tes parents, tes voisins. Fais
attention ! Mais qu’est-ce que tu as fait ? »- euh et bien ? ce que je viens de vous
raconter que je lui compte également.
Dimanche matin, je profite du sommeil de mon ami pour le quitter et me
rendre à la police la plus proche qui me met en garde à vue et m’informe que je
suis sur le coup d’une plainte pour apologie du terrorisme et d’une autre pour
recherche par ma famille, alertée par des agissements qui pourraient me
nuire !
Ils finissent par m’emmener au CHU menottes aux poignets, puis du CHU à
l’hôpital de Thiers en isolement. Et la suite ? Et bien je l’écrirai lorsque j’en serai
sorti et que j’aurai suffisamment de recul. J’ai à le vivre !
A bientôt !
Fraternellement.
Gilles Edmond François Sauvat 13/13
27 décembre 2015
Gilles Edmond Francois Sauvat le 08/01/2015.
PS : J’ai omis de raconter les moments joies intenses passés à danser dans les
couloirs du métro au son des musiques Slaves ou d’une rame de métro sur des
airs de guitare sud-américaine.
PS 2 : Je tiens à remercier du fond du cœur absolument toutes les personnes
rencontrées pendant ces quinze jours. Aussi bien ceux qui ont suivi les règles
dictées par l’autorité que ceux qui ont écouté leur cœur. Vous m’avez tous
permis de vivre une expérience inoubliable
Gilles Edmond François Sauvat 14/13
27 décembre 2015

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Cop21

  • 1. UN SOURIRE A LA COP 21 Je vais tenter de résumer mes deux semaines passées à la COP21, à porter le sourire de la terre. La tâche est difficile, tellement d’évènements se sont passés qui m’ont marqués de façon indélébile et m’ont façonné, du plus insignifiant au plus extraordinaire. Alors, comment cette idée de sourire aux délégations de la COP21 m’a-t-elle conduit à cet hôpital psychiatrique de Thiers, d’où j’écris ces lignes ? Cela peut faire peur et pourtant c’est une belle histoire, presque un beau roman…, qui se termine bien puisque je suis en bonne santé, nourri et logé gracieusement par la sécurité sociale depuis bientôt un mois. Je suis donc arrivé seul sur le rond-point à l’entrée de la COP21 ce lundi 7 décembre 2015, jour de visite des 147 chefs d’états de la planète. A vouloir sourire la main sur le cœur, j’étais une manifestation à moi tout seul, pour la police. Il m’a donc fallu bouger. J’ai eu la chance ensuite de pouvoir sourire aux convois des chefs d’états qui passaient sur l’autoroute A1 déserte, puis au bord de la bretelle de sortie. Quelle tristesse de voir ces hommes d’états accueillis dans une ville déserte ! Toujours poussé à bouger par la police, J’en ai rencontré un qui m’a finalement conseillé de demander l’autorisation à la Préfecture de Paris : - Je viens demander l’autorisation de sourire ! ai-je annoncé à l’accueil, déclenchant le rire des hôtesses. L’autorisation m’a été refusé, bien sûr ! On ne sourit pas à la COP21, vous comprenez… - Et allez donc demander à Bobigny, mais s’ils disent oui, nous on dira non… En sortant de là après avoir offert une boite de chocolats aux hôtesses d’accueil en récompense de leur sourire et de leur bonne humeur, je me suis ressourcé à Notre Dame, devant les splendides tapisseries représentant une nature luxuriante de dom Robert. Quelle beauté et quelle paix ! Gilles Edmond François Sauvat 1/13 27 décembre 2015
  • 2. Mardi matin me voilà donc à la préfecture de Bobigny : mêmes rires et même refus. J’avais aussi écrit à notre cher président de la république mais j’attends toujours sa réponse… La France ne veut pas de mon sourire ? Qu’à cela ne tienne, je vais l’offrir à l’ONU, après tout c’est elle qui organise ! Un petit coup de fil au siège à Bruxelles et me voilà avec en poche le numéro de portable d’une organisatrice présente à la COP21 ! Wahou ! Que faire avec ? De retour au Bourget, je profite du parc pour méditer à cette nouvelle situation. Et je me fais mettre dehors par la police montée, le parc devant rester désert. Surtout ne soyez pas en contact avec la nature ! Et comment des hommes qui s’enferment toute une journée dans une grosse boite, fut elle en bois, sans voir le jour peuvent-ils prendre des décisions correctes pour le climat ? Mon SMS à l’organisatrice ne donnera rien, pas de réponse… Je rentre à nouveau à la COP21 et découvre l’espace réservé au public et aux organisations de défense de la nature et du climat. Le décor est troublant : des arbres facétisés ornent les murs , un grand arbre en panneau de bois permet d’accrocher des post-it avec des bonnes idées. Et où est la nature ? Ah là ! Il y a des jardinières avec des plantes…ouf ! Personne ne les regarde bien sûr, tout le monde est affairé… Dans un recoin, je découvre une très belle sculpture de Gaia tenant la terre dans sa main, en marbre blanc, Splendide ! Et puis cette rencontre, à deux pas de la table où Nicolas Hulot discute avec des visiteurs. Il est jeune, habillé de feu, il a passé trois ans avec la tribu des Guaranis en Amérique du sud. Nous sommes frères, je l’invite à vivre avec moi en Auvergne, il accepte. Nous nous retrouvons attablés avec Nicolas, moi à chanter les accords Toltèques et lui, Anthony Julien à chanter son chant de guérison guarani. Nicolas nous quitte en disant « wahou ! je me sens équilibré ! » . Gilles Edmond François Sauvat 2/13 27 décembre 2015
  • 3. J’accompagne ensuite le chant d’un Qatari qui transmet sa révolte contre la pollution de son village. Plus tard sa guitare a failli être déminée car il l’avait laissée sans surveillance le temps du repas ! Que la peur nous rend méfiants ! Lui ne comprenait pas pourquoi il se faisait fouiller à cause de cela ! Ce n’est pas ainsi dans son village … ET puis Juan Manuel de l’association ‘Sustaining All Life’ se présente à moi, le regard lumineux. Il me propose de présenter mon projet de vie lors d’un forum. J’accepte bien volontiers et entraine les gens à danser ‘eh malala’ pour la terre à la fin du forum. Le lendemain, je passe la journée à dire bonjour aux gens. Je fais d’autres rencontres j’assiste à un autre forum où les gens du monde entier exposent leurs actions et leurs souffrances de minorités. En fin de soirée avec Anthony, nous décidons d’aller sourire aux délégations qui sortent de la zone bleue, vers la forêt de drapeaux. Nous nous plaçons la main sur le cœur et saluons d’un bonsoir chaque personne qui sort. Une soudanaise se joint à nous. Les gens sont contents. Quand ils nous demandent pourquoi, nous répondons « C’est le bonsoir de la terre qui vous remercie d’avoir travaillé toute la journée pour elle » Les sourires se font plus larges encore. - Vos papiers s’il vous plait, puis, par ici la sortie. Le chef ne vous autorise pas à continuer ! dixit un agent de police bienveillant… - Ah ? Bon ! Vous direz au chef « Bonsoir, bonne nuit, demain tout ira bien « . Et nous partons avec la satisfaction du sourire de plus de trois cent personnes… Je me réveille jeudi avec cette pensée : La police ne peut plus m’empêcher de sourire, ils sont allés trop loin. Si j’en parle ils seront ridiculisés. En arrivant à la COP 21, des pommes sont distribuées, j’en prend une et commence à arpenter l’esplanade au milieu de la foule des délégations qui rentrent dans le hall. Je souris en regardant droit devant moi, la pomme tenue précieusement dans mes mains. Comme pour dire « Regardez, la nature est là, voici son cadeau ».Théa Marie Robert vient à ma rencontre, elle est touchée. Gilles Edmond François Sauvat 3/13 27 décembre 2015
  • 4. Elle m’apprend l’hymne du citoyen de la planète, écrit sur l’air de la marseillaise, puis porté par un nouvel air. Quelle puissance dans ce chant ! Quel appel au rassemblement de tous sur cette terre ! Nous le chantons sur place, puis sur un podium au sein de la zone publique. Théa défend depuis très longtemps les valeurs humaines, elle a déjà chanté son hymne à Fukushima, nous avons une longue conversation. A la sortie de la COP21, j’oublie mon blouson au vestiaire. Impossible de le récupérer, la sécurité veille sur lui ! Adieu pour un temps la chaleur, les clés de l’appart et les papiers d’identités…… Cela ne m’empêche pas de manger avec l’asso ‘Sustaining All Life’ et d’aller dormir chez mon ami. Vendredi matin, me voilà propulsé à l’intérieur de la zone bleue, celle gardée par l’ONU , où l’on ne peut rentrer qu’avec un badge. Sauf si…. A la descente du bus, de bonne heure un homme m’accoste, je raconte mon histoire de blouson et me fait mettre au chaud à l’intérieur au-delà des gardiens du sas d’entrée. Là, un policier de l’ONU me fait franchir les portillons de contrôle et me dit d’attendre là l’heure d’ouverture de la zone publique. Et voilà, j’y suis, et je n’ai rien demandé !! Simplement parce que deux personnes ont écoutés leur cœur plutôt que le règlement. J’en profite pour sourire à tous ceux qui rentrent. Jusqu’à ce qu’un chef me dise de bien vouloir quitter les lieux….. De nouveau dans la zone publique, j’échappe mon porte-monnaie entre les barreaux des gradins. Et me vient cette idée : que serait le monde sans argent, sans échange ? Et puis je rencontre un jeune homme. A force de discuter, nous en arrivons à la conclusion que pour régler le problème des déchets, les hommes doivent apprendre à faire de la merde ! …de l’engrais pour la planète. Gilles Edmond François Sauvat 4/13 27 décembre 2015
  • 5. Et me voilà avec deux idées fortes : l’argent n’est qu’une autorisation à faire des choses et les hommes doivent faire de la merde ! J’en ai assez pour aujourd’hui et je pars au Bataclan avec Anthony rejoindre Théa et chanter l’hymne des citoyens de la planète avec treize personnes au total pour les victimes des attentats. Voilà terminée une première semaine à la COP21 et je rentre me ressourcer à Clermont-Ferrand chez mon ami Wahib. Dans le métro, je demande de passer à la caissière, qui me l’accorde après vingt minutes de discussion… L’Auvergne, son Puy d Dôme, sa nature forte et douce à la fois. Dimanche je remonte pieds nus le cours de la Tiretaine en direction du Puy de Dôme. Au retour, je dis bonjour à un jardinier qui brule des branchages. Nous engageons la conversation et surprise, il participe à la COP, une délégation pour les forets ! Je lui passe mes deux messages ! Le matin avec mon ami couvreur charpentier zingueur, nous avons décidé de donner un chantier dans le hameau de Deux Frères et de trouver des entreprises pour nous donner le peu de matériaux nécessaire. Un chantier pilote quoi ! Le lundi matin une nouvelle idée se fait jour : je vais organiser la première journée internationale du don et ce sera le 14 décembre 2015. Les attentats à Paris ont été connus en quelques heures, la journée du don peut bien être connue en une semaine non ? Et la journée commence ainsi : je fais don de mon sac de voyage en l’oubliant dans le train à Clermont-Ferrand. Plus tard dans la journée, alors que je marchais du Bourget à l’Olympia, mon sac à dos me pesait trop, j’ai fini par le donner à un étudiant dans la rue, place de la république. Je lui ai aussi fait part de mes pensées pour Daech, je voulais lui apporter le sourire et leur dire de rentrer chez eux s’occuper de leur femme et de leurs enfants, mais on en reparlera….. Gilles Edmond François Sauvat 5/13 27 décembre 2015
  • 6. J’ai ensuite donné mon téléphone portable à une femme infirmière en lui demandant de répondre à ma famille que tout allait bien pour moi. Je voulais juste devenir invisible de la police, pensant être éventuellement sur écoute depuis mes aventures du rond-point. Et pour aller au bout et être plus convaincant, j’ai aussi donné ma carte bleue à une famille de mendiants avec deux petites filles et avec, bien sûr….le code ! Dans la rue je continuais à donner le message de la journée internationale du don et de la fabrication de la merde. L’aventure du don, sans argent commençait là pour moi. J’ai passé le reste de la semaine à vivre de don et à annoncer mon message. J’avais aussi en tête de faire un clip avec Yannick Noah pour l’annoncer. Pourquoi lui ? Pourquoi pas ? Il me semblait apte à comprendre et à adhérer. Ah j’oubliai, ou plutôt je n’osais pas vous dire quelque chose d’essentiel pour comprendre la suite. Ce lundi matin, j’ai remis mon alliance, celle de mon mariage avec Monique, la mère de mes enfants, la grand-mère de mes petits- enfants. Nous sommes mariés devant Dieu et le restons malgré notre divorce irrémédiable, et puis j’ai fait alliance avec Dieu, le divin, l’univers, car je me sens guidé par lui et je me rends compte que ma vie est plus douce et plus belle lorsque je m’en remets à lui. Je sais, c’est une position qui n’est toujours pas courante de nos jours et qui peut faire peur, et c’est ainsi, bien ou mal. Me voici donc allégé, marchant dans les rues de Paris avec Anthony. Nous arrivons à l’Olympia ou Nicolas Hulot organise une conférence nommée « osons » (Sic). Nous ne voulons pas perdre de temps à assister à la conférence et y rentrer gratuitement parait difficile, je laisse le message a un jeune couple pour qu’il le fasse passer à Nicolas et aux participants. A la demande d’Anthony et après un repas à Montmatre offert par lui-même, nous allons chez son logeur a Saint Denis. Il est profondément anarchiste, il me vire de chez lui, mes idées lui étant insupportables, comme si il rageait que la solution de sa lutte contre le système ne vienne pas de lui. Nous continuons dans la rue et rencontrons Yass « le loup garou de Saint Denis ». Il dit ne pas croire à mon Gilles Edmond François Sauvat 6/13 27 décembre 2015
  • 7. message, mais il nous garde à manger chez lui, il nous fait graver nos noms sur la table. Il a la foi c’est clair, ses lectures en attestent et son regard aussi. Il nous offre le couvert et sa protection contre les « loups » des squats. Je suis fatigué, je m’endors sur le canapé pendant qu’Anthony et Yass partent voir les loups. A leur retour, Yass me mets dehors, Anthony reste avec lui. Je lui fait confiance, le message va continuer de passer… Six heures du matin, le marché s’installe, j’attends l’ouverture de la cathédrale dans un bistrot. Je laisse au patron les papiers de ma moto pour qu’il puisse la récupérer à Deux Frères, je lui la donne. A la cathédrale, je chante l’Ave Maria de Gounod, comme à mon habitude depuis le chemin de Saint-Jacques. J’assiste à la messe. La lecture est celle de la genèse, Adam et Eve. Je découvre comment Adam s’est défaussé sur Eve et lui a fait porter la responsabilité du péché. Après avoir récité un chapelet à la vierge et à Dieu avec un groupe de pratiquants et beaucoup de ferveur, je pars sur les routes, direction : Yannick Noah. J’ai Feucherolles en tête, lieu d’habitation pour lui. Arrivée gare du Nord, je m’égare dans les couloirs et me retrouve sur un quai de gare, un train attend portes grandes ouvertes. Je monte sans réfléchir, je suis guidé. Arrivée au terminus à Persan-Beaumont, je descends et rencontre un mendiant, Alain, il me demande un centime ! C’est justement ce qui reste au fond de ma sacoche !...mon dernier centime, je lui donne. Il m’emmène chez lui ou je rencontre Michel qui a appris en six mois d’armée dans la marine que « ça rigole pas », il ne l’a jamais oublié, jusqu’à ce jour où mon histoire le déride… il y a aussi Christian qui ne parle qu’avec des carrés et des ronds etc… dans la bouche. Je le prends dans mes bras, il dit « c’est cela que je voulais dire »… rien à comprendre, juste vivre… Dans le kebab voisin, la serveuse m’offre un café et un verre d’eau. Café que j’offre à un voisin rencontré sur place. Je discute avec le patron, il veut bien croire à mon idée si je lui dégote un ouvrier qui travaille gratuitement, connait Gilles Edmond François Sauvat 7/13 27 décembre 2015
  • 8. tous les métiers et veut bien travailler tout le temps. J’accepte de chercher quelqu’un, mais ne lui offre pas la lune. De quoi a-t-il vraiment besoin ? Il m’avoue un peu plus tard qu’il n’a besoin de rien, c’était un test. Au fait, j’ai réussi ?... Le soir arrive je cherche asile au presbytère et là surprise : « votre projet ne me parait pas très catholique » dixit la personne dévouée venu faire une préparation au mariage pour un jeune couple. Je ris intérieurement, il m’offre un souper, mais ne peut pas me laisser dormir au presbytère, il n’est pas responsable, d’autres pourront l’être. Il m’envoie chez Emaus. La bas, la grille est fermée, le digicode ne réponds pas ! Quelqu’un sors par la porte de service, je demande… Non c’est plein, je ne peux pas vous laisser entrer, je ne suis pas responsable, allez sonner à la porte… je réessaye sans succès. Retour en ville. Ou dormir ? A l’hôtel ! C’est fait pour les voyageurs non ? Le jeune black qui garde l‘hôtel ne peut pas accepter, il n’est pas responsable. -Que peux-tu faire pour moi ? Il me donne une couverture, Merci ! Merci ! Je passe la nuit dehors devant le cinéma « Le palace »… Mercredi matin, retour à Paris en train, sans payer, quelqu’un me laisse passer derrière lui au tourniquet. Direction Poissy, vers Yannick Noah de nouveau, en passant par la COP21. Je délivre à nouveau mon message de journée du don, je trouve des gens très motivés pour le faire suivre. Je passe au self et me sers un repas raisonnable, le caissier refuse de me laisser passer sans payer, il appelle son chef qui lui accepte- Yes !! Et les plantes ? Elles sont toujours là dans l’indifférence la plus totale. Je respire le parfum de leurs belles fleurs roses au pistil jaune…hum … délicieux ! J’invite une personne a sentir également « hum ! ils ont mis du parfum ? » et une deuxième « hum, ça vient de sortir ? », je réponds oui, depuis quelques centaines de millions d’années ! Comment des hommes peuvent-ils être coupés à ce point de la nature pour ne pas la reconnaitre ? Gilles Edmond François Sauvat 8/13 27 décembre 2015
  • 9. Je pars pour Poissy. Arrivé là-bas, les portes d’ un LCL (ma banque) sont ouvertes, je rentre pour donner l’argent de mon compte en banque. J’aurai pu le donner à une association comme « Sustaining All Life », mais comme je prône qu’on peut vivre sans argent et que nous avons besoin de matériaux et de main d’œuvre, je préfère laisser mon argent à la banque, histoire d’officialiser qu’ils s’en servent déjà « à l’insu de mon plein gré ». Stupeur de la guichetière, elle me fait attendre dans une petite salle ou débarque trois personnes… du SAMU. Vous allez bien ? Moi oui, et vous ? Une demi-heure de discussion plus tard, ils ont compris que c’est vrai, je vais bien, mais il faut voir un médecin quand même, nous attendons, il arrive. Rediscutions, nouvel accord pour dire que je vais bien, malgré mes idées farfelues. Mais il faut aller aux urgences voir un psychiatre, c’est la procédure ! Le SAMU m’y emmène, trois personnes auront été mobilisées pendant trois heures pour cette histoire, pendant que d’autres attendent pour de réels secours ! Dans la salle d’attente je fais connaissance avec Monsieur Provost retraité, à la voie de stentor et qui lui aussi dit bonjour à tout le monde. Il me donne son adresse à Chatou avant d’être emmené pour sa consultation. Je n’ai rien à faire ici, je pars, j’ai l’adresse de Mr Provost, j’y vais. Sur place, on m’indique mal la rue, et je passe une deuxième nuit dehors, ou je rencontre deux personnes dont une me dit venir de l’an 2230 où des couvertures comme la mienne, avec des motifs ponctuels, servent de téléphone lorsque l’on appuie sur les points… bon à savoir… Au petit matin, je trouve enfin l’adresse. C’est un foyer pour petits vieux, un Ehpad ! Avec un portail et un gardien qui refuse de me laisser rentrer au chaud en attendant une heure descente pour aller voir Mr… dont j’ai oublié le nom. J’apprends ensuite qu’il ne se lève pas avant onze heures. Cela me laisse le temps pour aller chez Yannick Noah ! à Feucherolles. Sur place on me renseigne, il n’est pas là, plus souvent ailleurs. Je décide de rentrer à Paris. Gilles Edmond François Sauvat 9/13 27 décembre 2015
  • 10. Avant je rentre chez l’épicier et lui demande de quoi manger, il est là pour cela non ? Après discussion, il m’offre de quoi me nourrir. Merci ! Merci ! De retour à Paris je décide de m’occuper vraiment de mon sommeil et donc de dormir dans un bon lit. Direction les Champs-Elysées. Quoi de mieux que l’hôtel Mariott, cinq étoiles ? Je rentre après avoir donné ma couverture à une personne sans abris. Et j’ai failli y dormir. La responsable était attirée par mon projet de vie « comme en famille » avec des dons sans rien attendre en retour. Mais quelque chose l’a retenue, et ça l‘a mise de mauvaise humeur. Tant pis j’aurai vu le hall magnifique et des gens mal habillés y déambuler. Ils ont l’argent, mais pas le standing d’un tel établissement ! Au final j’ai quand même gagné une place de cinéma en racontant cette histoire !... Je décide d’aller dormir chez mon ami Pierre, mais en route, je rencontre un activiste de la COP21 qui m’emmène dans son squat avec d’autres jeunes, où je suis bien accueilli, et trouve enfin un matelas, des couvertures, de la chaleur pour une nuit pleine de beaux rêves…. Au petit matin, de ce vendredi du dernier jour de la COP21, j’apprends qu’une radio libre est à deux pas d’ici, il s’agit de FPP, aux 1 rue de la solidarité. Ca ne s’invente pas ! Je me dis que c’est bon pour mon message et qu’à défaut de clip avec Yannick Noah, une émission de radio fera l’affaire. J’y rencontre un écrivain et son acolyte qui viennent enregistrer une émission avec une jeune écrivaine qu’ils attendent. Ils m’offrent un verre au bistrot du coin. La femme est en retard. Je leur propos d’utiliser ce laps de temps pour enregistrer mon message et ils acceptent. Et voilà, c’est dans la boite, ou plutôt sur la clé USB de l’écrivain, reste à diffuser. Je ne sais pas si cela a été fait, on m’a fait comprendre que je commençais à déranger, alors je suis parti, satisfait tout de même. Cela m’a permis de préciser mon message et je passe encore un bon moment au bistrot pour l’écrire proprement en choisissant chaque mot. Je me dis que Gilles Edmond François Sauvat 10/13 27 décembre 2015
  • 11. comme j’ai perdu mes papiers, cela m’en fera office et servira aussi de laisser passer. J’ai envie de retrouver mon fils qui travaille à Saint-Michel pour le tenir au courant de mes aventures parisiennes. Dans le métro ça buggue à nouveau, je fais des allers retour autour d’une station pour un changement. OK, j’ai compris, je sors d’ici, je verrai bien ! Il y a une boutique de laine, je rentre et rencontre une dame intéressée par mon message. Elle est pressée, je l’accompagne en marchant à ses côtés. J’ai envie de changer de vêtements, cela fait cinq jours que je garde les même et n’ai pas fait de toilette. Elle m’indique une banque de vêtements à la paroisse Saint-Jacques, à deux pas d’ici. J’y vais, c’est l’heure de la messe, cette fois la lecture porte sur la présence du Christ parmi nous. A la fin, je me présente en riant à l’assemblée comme le sauveur, avec un message : la journée internationale du don ! Mais pas d’Alléluia, pas de rameaux pour moi ! Je fais une petite halte au resto « coup raisonnable », en souvenir de ma première année de mariage vécue rue Saint Jacques. Je discute avec le barman au sujet d’Adam et Eve. Quelle pourrait être la réponse d’Adam s’il avait été un homme sans peur ? Et le barman de répondre «Et pourquoi tu nous interdit de manger ce fruit que tu as fait si appétissant pour nous ? ». La révélation, l’évidence, merci jeune barman bien vivant ! En sortant je tombe sur des affiches placardées sur les grilles du jardin du Luxembourg : Le rôle des abeilles dans la sauvegarde de la planète. J’enregistre le message pour plus tard sans doute. Et puis je trouve une affiche de concert : le Messie de Haendel à l’église Saint- Sulpice ! C’est pour moi ! Et maintenant ! C’est déjà commencé lorsque je rentre dans l’édifice. Sans argent je suis autorisé à rester au fond de l’église. J’ai de la place pour danser, je danse sur cette musique et ces cœurs merveilleux, pour le finale le fameux Alléluia, je danse comme les derviches tourneurs… Gilles Edmond François Sauvat 11/13 27 décembre 2015
  • 12. divin ! Je vais remercier le chef d’orchestre d’avoir fait jouer ce « messie » pour moi, pour le Messie lui-même !(Sic) En sortant je danse encore, puis mes pas me dirigent vers la porte d’Orléans avec l’idée d’aller dormir chez mes amis les gadz’arts. Je me retrouve place du Panthéon à minuit sous le regard de Jean Zay et d’autres figures de la résistance, au milieu des douze blocs de glace mis en place pour la COP21 devant des frontons avec gravé « Liberté, Egalité, Fraternité » et la tour Effeil devant moi. C’est le moment, je suis guidé. Je me diverti, je suis nu au milieu de cette place, humblement nu et aussi réceptacle de toute cette énergie qui vient de la glace et de cette ville magnifique qu’est Paris. Je tends les bras vers les gens qui me regardent, deux femmes se décident et avec quelques autres nous formons un début de chaine humaine. Un groupe de jeune vient me voir, je ne sais pourquoi je dis que je suis gadz’art « Ah super, notre copain aussi ! » le voilà, il se présente « 84 Metz 2009 » c’est l’éxplosion de joie à cette découverte, il fait partie de la famille 84 ! De ma famille gadzarique repérée par ce numéro 84 ! Nous nous embrassons chaleureusement, remerciant la vie de ce beau cadeau ! Nous passons la nuit dans un bar boite de nuit. Quand je lui demande de m’héberger, il répond que « ce n’est pas possible, tu comprends, je suis chez mes parents, … »bla bla »… Je lui fait remarquer que je suis surpris qu’à 28 ans il ne puisse pas recevoir quelqu’un dans sa chambre et je le quitte pour aller à la résidence Arts et Métiers porte d’Orléans. Là c’est une nouvelle déception, la fraternité gadzarique ne fonctionne plus, bloquée par un gardien à l’entrée qui joue parfaitement son rôle, sans aucun attendrissement malgré trois tentatives et l’aide de jeunes gadz’arts rencontrés sur place. Le monde a donc bien changé, la peur a pris la place de la confiance ! Je passerai donc la nuit dehors une troisième fois ! J’ai appris que la COP21 se poursuivait ce samedi de façon exceptionnelle. Gilles Edmond François Sauvat 12/13 27 décembre 2015
  • 13. Je décide de m’y rendre à pied, comme je n’ai rien pour dormir cela me tiendra chaud. En chemin, on me donne un plateau rempli des restes de toasts d’une soirée. Je vais les distribuer gare de Lyon, sur ma route. A ma surprise, les mendiants ne se jettent pas dessus, non, ils prennent une part et laissent le reste pour d’autres. Belle leçon de partage ! Il se trouve même quelqu’un qui insiste pour que je prenne cinquante centimes en échange. Je finis par accepter et repart avec mon plateau doré et mes cinquante centimes vers la COP21. Cette fois, plus de pommes distribuées à l’arrivée, l’organisation n’a pas suivi. Alors je propose aux gens mes cinquante centimes posés précieusement sur le plateau doré : « cinquante centime pour une pomme ! que préférez-vous ? Cinquante centime ou une pomme ? » Je fais l’unanimité, tout le monde veux des pommes, pas d’argent ! C’est la conclusion de ma quinzaine a la COP21 et je rentre à Clermont, sans payer mon billet de train. Arrivé le soir chez mon ami, je le trouve tout énervé : « Ah, tu es là, enfin ! Tout le monde te cherche ! La police aussi, ils sont allés chez toi perquisitionner, ils sont allés voir tes parents, tes voisins. Fais attention ! Mais qu’est-ce que tu as fait ? »- euh et bien ? ce que je viens de vous raconter que je lui compte également. Dimanche matin, je profite du sommeil de mon ami pour le quitter et me rendre à la police la plus proche qui me met en garde à vue et m’informe que je suis sur le coup d’une plainte pour apologie du terrorisme et d’une autre pour recherche par ma famille, alertée par des agissements qui pourraient me nuire ! Ils finissent par m’emmener au CHU menottes aux poignets, puis du CHU à l’hôpital de Thiers en isolement. Et la suite ? Et bien je l’écrirai lorsque j’en serai sorti et que j’aurai suffisamment de recul. J’ai à le vivre ! A bientôt ! Fraternellement. Gilles Edmond François Sauvat 13/13 27 décembre 2015
  • 14. Gilles Edmond Francois Sauvat le 08/01/2015. PS : J’ai omis de raconter les moments joies intenses passés à danser dans les couloirs du métro au son des musiques Slaves ou d’une rame de métro sur des airs de guitare sud-américaine. PS 2 : Je tiens à remercier du fond du cœur absolument toutes les personnes rencontrées pendant ces quinze jours. Aussi bien ceux qui ont suivi les règles dictées par l’autorité que ceux qui ont écouté leur cœur. Vous m’avez tous permis de vivre une expérience inoubliable Gilles Edmond François Sauvat 14/13 27 décembre 2015