Avez vous le sentiment d’avoir été soutenus par vos ainés publics et/ou privés ?
Plus ou moins.
A titre personnel, j’ai eu la chance d’avoir des chefs de services et des PH qui ont clairement soutenu et facilité notre mouvement et ont porté haut nos revendications dans des Assemblées Générales et jusque sur les pavés parisiens.
Cependant, ça n’a pas été le cas partout.
D’abord les internes via l’ISNIH ont compris très tôt les risques et les enjeux de ces réformes injustes, inadaptées et délétères pour la Santé de demain. De nombreux praticiens hospitaliers n’ont pas fait l’effort de chercher la réalité derrière le discours démagogique de la ministre se pensant intouchables à l’hôpital. Beaucoup ont d’ailleurs retourné leur veste après avoir enn compris que Mme Tourraine vendait littéralement la Santé aux Mutuelles.
Même si ça a toujours été difficile, il semble que les internes et CCA se montrent capables de se fédérer, dans leurs rangs mais aussi entre les deux inter-syndicales, où en êtes-vous ?
Nos relations avec l’ISNCCA (Syndicat majoritaire des chefs de clinique) ont été cordiales et les combats que mènent les internes et les CCA nous emmènent souvent à nous retrouver sur beaucoup de points.
Dans le dernier combat syndical que nous avons mené, notre action a été complémentaire, pour la grève en particulier, les chefs de clinique nous ont soutenu en assurant naturellement la permanence des soins localement.
Les représentants des internes et chefs de clinique sont régulièrement entendus ensemble et portent leur revendications d’une seule voix constituant un véritable front jeune, crédible et incontournable.
reseauprosante.fr
Ride the Storm: Navigating Through Unstable Periods / Katerina Rudko (Belka G...
Interview de marc olivier gauci, chirurgie orthopédique à nice, vice-président de l’ isnih.
1. Interviews
Interview de
Marc-Olivier Gauci,
Chirurgie orthopédique à Nice
Vice-Président de l’ ISNIH (Inter
syndicat National des Internes des
Hôpitaux)
Avez vous le sentiment
d’avoir été soutenus par vos
ainés publics et/ou privés ?
Plus ou moins.
A titre personnel, j’ai eu la chance d’avoir
des chefs de services et des PH qui ont
clairement soutenu et facilité notre mou-vement
et ont porté haut nos revendica-tions
dans des Assemblées Générales
et jusque sur les pavés parisiens.
Cependant, ça n’a pas été le cas par-tout.
D’abord les internes via l’ISNIH ont
compris très tôt les risques et les enjeux
de ces réformes injustes, inadaptées et
délétères pour la Santé de demain. De
nombreux praticiens hospitaliers n’ont
pas fait l’effort de chercher la réalité
derrière le discours démagogique de
la ministre se pensant intouchables
à l’hôpital. Beaucoup ont d’ailleurs
retourné leur veste après avoir en„n
compris que Mme Tourraine vendait
littéralement la Santé aux Mutuelles.
Même si ça a toujours été
dif#cile, il semble que les in-ternes
et CCA se montrent
capables de se fédérer,
dans leurs rangs mais aussi
entre les deux inter-syndi-cales,
où en êtes-vous ?
Nos relations avec l’ISNCCA (Syndicat
majoritaire des chefs de clinique) ont été
cordiales et les combats que mènent
les internes et les CCA nous emmènent
souvent à nous retrouver sur beaucoup
de points.
Dans le dernier combat syndical que
nous avons mené, notre action a été
complémentaire, pour la grève en
particulier, les chefs de clinique nous
ont soutenu en assurant naturellement
la permanence des soins localement.
Les représentants des internes et chefs
de clinique sont régulièrement entendus
ensemble et portent leur revendications
d’une seule voix constituant un véritable
front jeune, crédible et incontournable.
Que pensez-vous de la
façon dont les médias ont
couvert les revendications
médicales ?
La dif„culté de ces revendications était
leur complexité. Le danger se trouve
dans le détail des textes.
Les médias sont très avides des
questions sur les compléments
d’honoraires et cherchent le scoop,
la caricature du médecin nanti faisant
grève pour protéger son portefeuille
c’est vendeur. Et c’est du pain béni pour
le ministère qui en pro„te pour éluder
le vrai problème.
Justement, ce dernier combat a
permis de démontrer que l’ISNIH était
désormais l’interlocuteur légitime et
privilégié sur les plateaux ou sur les
ondes pour communiquer sur les
préoccupations des jeunes générations.
22 Lettre du SCH N°23 - Janvier 2013 S H
Au-delà du mouvement de
grêve, quel est selon vous
l’élément le plus détermi-nant
dans le malaise des
jeunes chirurgiens ?
Nous sommes à la croisée des mondes.
Je crois que les nouvelles générations,
depuis la « génération Y », celle des
années 80’ a compris que le chirurgien
n’avait plus l’aura du siècle dernier au-près
des patients. En parallèle, l’interne
de chirurgie dans la conjecture écono-mique
actuelle doit rendre des comptes
en termes d’activité et de productivité :
soigner des patients de plus en plus exi-geants
et moins respectueux du corps
médical, coder les actes, penser aux
contraintes médico-légales, se battre
pour chercher un enseignement, s’ins-crire
à de nombreux DIU que les labo-ratoires
ne paient plus et se dire qu’on
aura peut-être pas de poste d’assistant
et qu’on exercera sous le joug des nou-velles
toutes puissantes mutuelles, c’est
pas facile au quotidien...
La seule façon de soutenir cette
pression est de se battre pour conserver
les lettres de noblesse de la chirurgie.
Et voir certains chirurgiens senior ne
plus s’investir dans l’enseignement sous
le faux prétexte que la passion chez les
jeunes n’existe plus, c’est abdiquer sur
la dernière chance de salut de notre
profession.
2. www.scialytique.org S H 23
Interviews
Contrairement à vos ainés,
vous avez encore toutes les
perspectives de choix entre
le public et l’activité libérale.
Avez-vous le sentiment,
qu’à cause des réformes
incessantes et des uctua-tions
politiques, vous avez
un manque de visibilité qui
ne vous permet pas d’appré-hender
correctement vos
perspectives de carrière ?
Le principal problème pour un interne
de spécialité est l’accès aux postes du
post-internat ; aujourd’hui les internes
en chirurgie ne peuvent pas tous avoir
accès au post-internat à la #n des 5 an-nées
d’internat. Souvent, un interne doit
attendre 1 voire 2 ans sur des postes
« d’attente » comme celui de praticien
contractuel. Pour un interne de chirur-gie,
il est aujourd’hui indispensable de
faire un assistanat a#n de pouvoir tra-vailler
en ville et ceci n’est pas toujours
garanti.
D’autre part, l’accès à un stage dans le
privé, là où pratiqueront la majorité des
internes formés, est loin d’être généra-lisé.
C’est comme si un généraliste ne
mettait jamais les pied dans un cabi-net
libéral pendant son internat ! Il faut
encourager ces stages et éviter que
l’interne ne soit qu’une main-d’oeuvre
quali#ée à faible coût pour les périphé-riques
où il manque des chirurgiens et
où, dans quelques cas, la formation est
quasi inexistante.
Mais peut-être faut-il voir encore plus
loin... Si la Santé française se privatise
au fur et à mesure et que le coeur même
du système est progressivement envahi
par les mutuelles (on le voit, le #nance-ment
du Tarif Opposable va progressive-ment
tomber aux mains des mutuelles),
ce sont des organismes privés qui #nan-ceront
la majorité du coût des soins et
imposeront leur conditions à l’hôpital.
Pas sûr que l’intérêt du patient passe
avant le pro#t !
Demain peut être sera-t-on obligé de
poser telle ou telle prothèse parce que
la mutuelle qui rembourse nos patients
auront négocié avec un laboratoire.
Intellectuellement et éthiquement, c’est
très gênant.
Quels sont, à vos yeux, les
principaux avantages et in-convénients
d’une carrière
hospitalière ? d’une carrière
libérale ?
Le principal avantage de la carrière hos-pitalière
pour un interne reste la possi-bilité
d’y faire une carrière universitaire
et de pratiquer les 3 axes d’une activité
médicale : les soins, l’enseignement et
la recherche.
Même si l’enseignement reste encore
possible pour certains chirurgiens as-sez
spécialisés et pointus dans leur
domaine, la recherche semble impos-sible
en libéral et sans l’émulation d’une
équipe. La recherche et la publication
nécessitent du temps et ne sont pas
compatibles avec la tenue d’une activité
libérale. De plus, pour avoir une crédibi-lité
et une légitimité, il faut une certaine
constance dans l’activité de recherche,
dif#cilement tenable quand on doit gérer
une véritable entreprise libérale.
Bien entendu, une carrière libérale nous
affranchit de la hiérarchie hospitalière et
semble à première vue plus rémunéra-trice.
En parallèle, elle oblige à la perfor-mance
et le chirurgien de ville, s’il veut
survivre, en particulier dans des zones
attractives, doit être hyperspécialisé, il
faut qu’on pense à lui. A l’opposé, une
carrière hospitalière assure la sécurité
de l’emploi.
Outre les longues études,
vous êtes bien placé pour
savoir ce que la chirurgie
demande d’investissement
et d’efforts personnels pour
être un honnête opérateur.
Avez vous le sentiment
qu’autour de vous, les autres
en aient conscience ?
La chirurgie est un sacerdoce mais ça
on nous avait prévenu !
Nous nous dé#nissons par notre profes-sion
et c’est vrai que cet état d’esprit va
à l’encontre de la tendance actuelle où
on laisse plus la place aux loisirs et à la
« vie privée ».
De nos jours, c’est moins le regard des
autres qui fait la noblesse de notre pro-fession
que l’unique passion qui nous
habite et aujourd’hui, si l’on s’engage
dans la chirurgie, c’est par conviction
non par prétention
Y a-t-il une question que
vous auriez aimé que je
vous pose ?
Où en est-on du PPL 296 concernant les
mutuelles ?
Après le vote à l’Assemblée, le texte
doit passer devant le Sénat, cela fait
depuis novembre que celui-ci reporte la
discussion à plus tard au moins jusqu’en
février, preuve que ce texte ne fait pas
consensus même au sein de la majorité.
Les internes font du lobbying auprès
des sénateurs, certains commencent à
comprendre que c’est aussi leur propre
santé qui sera en jeu si ce texte passe.