1. SANTÉ CONNECTÉE
Leslaboratoirestracent
leurchemin
Applications mobiles de
santé , objets de santé
connectés,«seriousgames »...
La e-santé génère , depuis
son avènement , de
multiplesopportunités , aussi
bien du côté des utilisateurs -
professionnelsde santé , patients , entourage - que
decelui desdéveloppeurs de cessolutions.
«Lasanté digitale pourrait quasiment être
considéréecomme une évolution médicale,
s' enthousiasme Olivier Gryson,directeur de
lacommunication digitale chezServier.Elle
peut, par exemple,faciliter ledialogue entre
médecins et patients ou encore la prise en
charge dupatient entre deux consultations.
C' est unsujetpassionnant ,enthousiasmant ,
leplus grand enjeu technologique qui nous
attende dans lesprochaines années. »
Actuellement , le terreau est favorable au
développement de la santé connectée .En
témoigne la naissance d
'
Orange
Healthcare, en 2007 . « La décision est née d
'
un
constat global incluant un ratio patients/
médecins insuffisant ou encore de l
'
allongementde la durée devie qui apour
conséquenceune augmentation des maladies
chroniques , raconte Emmanuelle Pierga,
Lemarchédelae-santé,auxmultiples
facettes, offreautantdepossibilités
qu'
ilrecèledeproblématiques.
C' estauxindustrielsdu médicament
detrouvercommentappréhender
cemarchéflorissant.
directrice de la communication chezOrange
Healthcare Latransformation digitale peut
accompagner une médecine plus efficace
et performante . C' est donc devenu une
activité stratégique pour le groupe Orange,
avecdesperspectivesde développement de
services nouveaux grâce au « big data ». »
Aujourd
'
hui , Emmanuelle Pierga constate
que «le médicament nesesuffit plus à
luimême, il devrait être accompagné d
'
un
servicesupplémentaire véhiculépar la
donnée».«Leconceptmême du médicament est
en train d
'
évoluer, confirme Olivier Gryson
(Servier). Il estpar ailleurs essentiel que les
industriels apprennent à créer dela valeur
autour d
'
un médicament dont leprix baisse.
C' est pour cela que pour nous,aujourd
'
hui ,
la e-santé est une sourced
'
avantages
compétitifs.»
Une offre hétérogène
Les industriels du médicament ont dû
s'
emparer du sujet ,capitalisant sur «leur
savoir-faire dans l
'
identification des
problématiquesauprès despatients et des
professionnelsdesanté », souligne Guillaume
Marchand ,psychiatre , à la tête de la
startupdmd Santé,spécialiséedans l
'
évaluation
desapplications mobiles et objets connectés
de santé. «Lemodèle pharmaceutique
classiqueest très confortable ; la réinvention est
un défi de taille », reconnaît Pierre Leurent ,
quant à lui président et co-fondateur dela
société Voluntis ,qui développe deslogiciels
compagnons thérapeutiques dédiés aux
patients et aux professionnels de santé.
« Globalement , on constate que l
'
on est très
en retard sur le virage numérique et qu' ily a
une hétérogénéitéen termesde maturité sur
l
'
innovation ,reconnaît Emmanuelle Pierga
Leslaboratoires neprofitent pasdeleur
potentiel.Ils nesont pastous équipésen termesde
ressources; peu ont recruté despersonnes
venant desnouvelles technologies. Ainsi,les
offres proposées aujourd
'
hui par les
industrielsdu médicament sont plus ou moins
élaborées.Cependant si «chaque industriel
part dans sadirection, d
'
unefaçon générale,
lesévolutions sedéroulent dans lemême
climatd
'
euphorie que celui qui a accompagné
la bulleInternet »,analyse Olivier Gryson.
Côtéprofessionnels desanté,les apports de
la santé connectée sont nombreux ,
notammentau niveau dela formation .Ainsi
PhilippeGrédy , directeur marketing et vente
monde sur les sujets de santé connectée
au LFB, raconte que son groupe a «
commencéà travailler sur des simulations , il
y a quatre ans, avec des« serious games »,
desjeux immersifs très élaborés. Nous en
comptons aujourd
'
hui deux : hémosims
«destiné à l
'
hémorragie du post-partum »et
hémosims «trauma »,qui sont en lien avec
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2. l
'
un de nos produits , lefibrinogène
ClottafactIls ont pour objectif deformer les
professionnelsde santé à la prise en charge de
cette hémorragie . » L
'
enjeu est compris par
les pouvoirs publics qui , d
'
ici 2017 , tablent
sur le développement de l
'
apprentissage
par simulation « avec pour objectif d
'
équiperl
'
ensemble des CHU d
'
un centre de
simulationen santé », peut-on lire sur le site du
ministère de la Santé . « Nous avons toujours
accompagné et formé les professionnels de
santé , notamment car nous possédons un
portefeuille de médicaments très spécialisés
et très techniques , poursuit Philippe Grédy.
y a un besoin de diffuser et d
'
informer
qu'
on ne retrouve pas forcément ailleurs.
Aujourd
'
hui , nous faisons naturellement
évoluer cette tendance vers des outils plus
digitaux , internationalisables plus
facilement. »
Bien sûr , les industriels du médicament
utilisent aussi très largement la santé
connectée au service des patients . Servier ,
qui a créé sa communication digitale il
y a 15 ans , possède désormais toute une
gamme de services digitaux . « Comme
nous sommes spécialisés dans les maladies
chroniques , notre locus
s'
est naturellement
porté sur l
'
observance . Il y a eu des tentatives
avortées , mais il n'
en reste pas moins qu'
il y
a matière à créer de nouvelles voies
thérapeutiques. La culture du changement est à
insuffler », pense Olivier Gryson . En
particulier, les applications mobiles de santé sont
un vecteur de choix pour accompagner les
patients .MSD France , par exemple , propose
de nouvelles applications destinées aux
patients . « L
'
offre globale de santé
Immunosimpleest née de la volonté de couvrir
l
'
ensemble des besoins du parcours de soin
rstock
-
Ldprod
411111111116-
UNE AGENCE POUR DÉFINIR LES NORMES D
'
ÉCHANGE ET DE
PARTAGE DES DONNÉES
L
'
Agence des systèmes d
'
information
partagés de santé (ASIP Santé) est une
institution gouvernementale née de la
fusion des groupements d
'
intérêt public
« Carte de professionnels de santé et
Dossier médical
personnel(DMP) » , en 2009.
«
Aujourd
'
hui , l
'
Agence se
définit comme l
'
opérateur
de la santé numérique ,
avec une vocation bien
plus large qu'
l
'
origine
car les enjeux de la
santé numérique sont
Pascale immenses », explique
Sauvage , Pascale Sauvage , directrice
directrice de de la stratégie de l
'
ASIP
la
stratégie de Santé . L
'
Agence s'
occupe
l
'
ASIP Santé . notamment des
questions
de sécurité des données ,
incontournables sur le sujet de la santé
connectée . Pascale Sauvage détaille
« Nous sommes chargés d
'
élaborer les
référentiels de sécurité et d
'
interopérabilitéqui s'
appliquent aux systèmes
d
'
information de santé . Nous
produisonstout un ensemble de documents
nécessaires pour s'
approprier les règles
qui découlent de la santé connectée et
des guides pratiques pour mettre en
place ces exigences . » Un des objectifs
est de garantir à terme la
protection
des données émanant par exemple des
applications de santé mobiles . Pour la
construction de référentiels , l
'
Agence
sollicite notamment les industriels.
Elle collabore par ailleurs avec la Haute
Autorité de santé , dans le cadre d
'
un pro
gramme « Santé connectée ».
l
'
image du développement de la
e-santé , les activités de l
'
ASIP Santé sont
vouées à évoluer à l
'
avenir pour s'
adapteraux besoins grandissants du secteur.
« Nous serons très certainement
beaucoupplus proactifs , annonce Pascale
Sauvage car nous voulons
encourager
les initiatives innovantes . Les
possibilitéssont multiples nous pourrions , par
exemple , imaginer que le patient verse
des données de santé collectées via des
objets connectés à son DMP , qui est un
espace sécurisé . ». Une chose est
certaine : les évolutions devront
s'
accompagner d
'
un cadre sécuritaire.
ORANGE HEALTHCARE
S' EST LANCÉ DANS
LE DOMAINE EN 2007.
pour les maladies inflammatoires
chroniquesen immunologie , explique le
docteurLiliane Lamezec , directrice médicale
de l
'
aire thérapeutique Immunologie chez
MSD France .Au sein d
'
Irnmunosimple , à côté
des services classiques , nous proposons deux
applications
'
une en rhumatologie , l
'
autre
en gastro-entérologie , pour permettre aux
patients de suivre leur pathologie au
quotidien. » Pour élaborer les applications , MSD
a travaillé avec des sociétés savantes , et
consulté des associations de patients afin
de valider l
'
adaptation de ces outils à leurs
besoins.
Pouvoir se démarquer
Encore faut-il réussir à tirer son épingle
du jeu dans la jungle des applications.
«À savoir que le retour sur investissement
n' est pas financier actuellement , prévient
Guillaume Marchand (dmd Santé) . Fin
2012 , il n' existait qu'
un peu moins de
100 000 applications mobiles de santé dans
le monde contre près de 170 000
actuellement. Peu de marchés dans peuvent se
targuer d
'
avoir autant de dynamisme , avec
un turn-over quotidien del %%. Or une
applicationest un iceberg au premier abord , on
ne voit pas les aspects éthique , réglementaire
ou de sécurité informatique , à l
'
inverse des
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JOURNALISTE : Raphaëlle Maruchitch
1 janvier 2016 - N°93
3. LE LFB A DÉVELOPPÉ
HEMOSIMS POUR LES
PROFESSIONNELS DE
SANTÉ.
Lasanté di itale doit
être un en' eu de
com étitivité
nationale et
euro éenne.
aspects de pertinence médicale ou d
'
ergonomie. » En proposant , via sa société , la
délivranced
'
une labellisation des applications
mobiles de santé et des objets connectés ,
Guillaume Marchand veut valoriser les
applications . Pour lui , il s'
agit d
'
un levier
marketing très fort , capable de faire
réapparaîtrela confiance dans un marché «qui
évoluetrès vite et qui signe un
véritable changement de
paradigme pour les
industrielsdu médicament ,
analyse-t-il. Une application
de santé mobile demande
être animée comme un
produit . Ilfaut en proposer
une version régulière , être
l
'
écoute du marché , sortir
du lot. »
Au sein de Voluntis , qui
travaille notamment
dans des domaines
prioritairestels que le diabète
et l
'
oncologie , le choix a
été fait de « réguler nos
[ses] solutions comme des
DM et de les évaluer dans
le cadre d
'
études cliniques , explique Pierre
Leurent Une centaine d
'
applications
seulementsont régulées comme des DM et une
vingtaine bénéficient de preuves cliniques ,
suite des essais contrôlés randomisés .
Voluntis a, par exemple , accompagné un
produit testé en phase 3 avec AstraZeneca
dont le logiciel compagnon vise à aider les
patientes atteintes d
'
un cancer de l
'
ovaire à
optimiser la gestion des effets indésirables
du traitement , tout en renforçant le lien
avec l
'
équipe soignante . « Nous travaillons
sur l
'
extension des prescriptions médicales ,
afin d
'
accompagner le patient entre les
consultations physiques . C' est un
changementde la nature de l
'
offre pharmaceutique ,
dans un contexte où le rôle du médecin est
voué évoluer» , explique Pierre Leurent .
OlivierGryson précise pour sa part que Servier
s' est « interrogé sur les conditions médicales
rassembler pour que la e-santé se mue en
vraies solutions médicales : d
'
une part ,
amenerun niveau de preuve solide car l
'
offre est
pléthorique ; d
'
autre part , réussir son
intégrationdans le système de soins. »Le
laboratoirefrançais a , par exemple ,élaboré pour le
marché allemand le Deprexis 24 , logiciel de
psychothérapie commercialisé en
complémentd
'
une thérapie médicamenteuse , qui
a bénéficié de sept études cliniques.
Une concurrence mondiale rude
En outre , la santé connectée n'
a de
nouveauque son modèle économique . La
gestiondes données de santé est sous le joug
d
'
une réglementation particulièrement
contraignante en France (voir encadré) .
« Le processus de production n' est pas aisé ,
notamment cause des difficultés
techniquesd
'
ordre réglementaire , rapporte
PhilippeGrédy (LFB). Du point de vue juridique
par ailleurs , le sujet est complexe car des
données de santé sont en jeu dans un
nouvelenvironnement auquel tout le monde
doit s'
adapter . Olivier Gryson (Servier)
relève La santé digitale doit être un enjeu
de compétitivité nationale et européenne . Il
nefaut pas que l
'
Europe soit en retard sur
ce sujet et cela nécessite que les législations
ne soient pas lourdes . » Outre-Atlantique ,
le sujet de la santé connectée semble
toutefoismieux maîtrisé . «LesAméricains sont
plus avancés que nous , juge Emmanuelle
Pierga En particulier , les modèles culturels
et réglementaires sont très différents . À
titre d
'
exemple , « l
'
année dernière plus de
4 Mrds Euro ont été investis en capital-risque
aux États-Unis dans la e-santé contre
100 MEuro en Europe , note Pierre Leurent.
Si elle veut tenir ses promesses , la santé
connectée devra , à l
'
avenir , continuer à
progresser sur le sujet des problématiques
qu'
elle engendre . Orange Healthcare a ,
par exemple , monté en novembre 2014
un groupe de travail , le « Healthcare Data
Institute ». « Nous avons mis autour de la
table tous les acteurs en e-santé pour la
promotiondu big data , raconte Emmanuelle
Pierga . Le Conseil d
'
administration compte
des industriels (Sanofi , Roche) mais aussi des
acteurs du public comme des représentants
de recherche publique Inserm . Nous avons
publié un livre blanc et avons le projet de
formuler despropositions concrètes . » Selon
Liliane Lamezec (MSD) , la santé connectée
doit s'
épanouir dans un climat de réflexions
d
'
évolution du modèle et des services . «
y a de la place pour de nombreuses
plateformeset une appétence pour de nouveaux
outils , assure-t-elle . Malgré le marché
saturé - en particulier sur le versant
"
gadget"
- les possibilités restent immenses.
« Le secteur mûrit de plus en plus , enfaveur
de la convergence entre le numérique et le
thérapeutique , analyse Pierre Leurent . En
outre , le marché va tendre à se
professionnaliser. « Les besoins doivent être identifiés
auprès des associations de patients et des
professionnels de santé , enjoint Guillaume
Marchand (dmd Santé) . Ils doivent faire des
applications qui répondent correctement
des besoins simples , mais non comblés par
l
'
offre actuelle car il a trop d
'
aires
thérapeutiques«orphelines . Par exemple , il n' existe
pas d
'
application destinée aux enfants qui
souffrent d
'
un spectre autistique , mais il y a
174 applications pour rappeler aux femmes
de prendre leur pilule ... »
RAPHAËLLEMARUCHITCH
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