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LA VALORISATION HUMAINE DES DISPOSITIFS DE
MÉDIATION CULTURO-TOURISTIQUES URBAINS.
LE CAS DES SENTIERS NUMÉRIQUES DE LA VILLE D’ARLES :
ACCROÎTRE LA VISIBILITÉ, LA COMPRÉHENSION ET LA
FRÉQUENTATION PAR LE RÉSEAU HUMAIN LOCAL.

Priscillia Galarme

Mémoire de recherche (2ème année),

UNIVERSITÉ D’AVIGNON ET DES PAYS

septembre 2013

DE VAUCLUSE

Master Stratégie du Développement

Sous la direction de Cécile Tardy

Culturel, mention Médiations de la

Et le tutorat d’Éva Sandri

Culture et des Patrimoines

Année universitaire 2012-2013

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

1
Afin de respecter l’environnement et votre dos, ce mémoire est imprimé recto-verso. Je
vous remercie d’avance de votre compréhension et vous prie de vouloir pardonner cette
lecture exhaustive et ainsi mise en page.

Je souhaite ardemment reprendre la dédicace de Cécile Schall (Schall, 2010) pour sa
thèse sur la médiation de l’archéologie à la télévision : la construction d’une relation au passé.
« AU FOND, TOUTE NOTRE EXISTENCE, NOUS SOMMES EN
QUÊTE D’UNE HISTOIRE DE NOS ORIGINES QUI NOUS DISE
POURQUOI

NOUS

NAISSONS

ET

NOUS

VIVONS.

NOUS

CHERCHONS SOIT UNE HISTOIRE COSMIQUE, L’HISTOIRE DE
L’UNIVERS, SOIT NOTRE PROPRE HISTOIRE

[...]. ET PARFOIS,

NOUS OSONS ESPÉRER QUE NOTRE HISTOIRE PERSONNELLE
COÏNCIDE AVEC CELLE DE L’UNIVERS.

»

UMBERTO ECO, SIX PROMENADES DANS LES BOIS DU ROMAN
ET D’AILLEURS, 1994.

NB : ce mémoire est une version anonyme du travail de recherche rendu en
septembre 2013. Ainsi pour des raisons de confidentialité et de respect les noms des
personnes interrogées ont été enlevés.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

2
RÉSUMÉ

Un nouveau dispositif de médiation urbain.
Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) ont
toujours été présentes pour renouveler les outils d’aide à la visite. Que ce soit pour augmenter
l’expérience de visite ou reconstituer ce qui n’est plus, ces nouvelles images et ces nouveaux
médias induisent des nouvelles manières de visiter et parfois des rapports différents aux objets
culturels et patrimoniaux.
Les Sentiers Numériques sont un dispositif innovant de visite dans la ville d’Arles : nés
des évolutions technologiques, de nombreuses réflexions sur des moyens d’accéder à la
culture en renouvelant le paysage urbain, notamment en matière de signalétique, ces 40
panneaux lumineux et colorés (les tabaluz) forment un parcours urbain, culturel et patrimonial
d’un nouveau genre. Même si ce dispositif expérimental gagnerait à être davantage
communiqué pour développer sa visibilité dans la ville, il possède en lui les clés pour devenir
un projet urbain global de visite presque participatif, cohérent et fonctionnel. Il inaugure une
volonté de rendre autonome et libre le visiteur en lui laissant le choix de plusieurs thématiques
de visites qu’il peut agrémenter à sa guise par la visite de lieux où il se laisse guider.

A new mediation and urban tool.
The New Information and Communication Technologies have always been there to
renew the tools that help the visit. To increase the visitor’s experience or to reconstitute what
is not any more, these new images and new media induce new way of visiting and sometimes
different relationships to cultural objects also related to heritage.
The Digital Paths are an innovating tool to visit Arles: born from technological
evolutions, numerous thoughts on the ways to access culture by renewing the urban
landscape, especially when it comes to signage, these 40 luminous and coloured signs (the
tabaluz) form a new kind of an urban way, cultural and related to the heritage. Even if this
experimental tool would earn more with a publicity that will raise its visibility in the town, it
possesses inside itself the keys to become a global urban project for visiting, nearly
participating, coherent and functional. It launches a want to make the visitor free and
autonomous giving him the choice of several thematic that he can brighten up as he wants
with visiting places where the path would lead him.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

3
MOTS-CLÉS

DISPOSITIF. Équipement. SIGNALÉTIQUE (dynamique, lumineuse, numérique, statique.).
Support médiatique. TABALUZ
Circuit. Itinéraire. PARCOURS. Sentier.

Connaissance. PERCEPTION. PRESCRIPTION. Usage

Multimédia. Numérique. NTIC/TIC. Technologie.
Applications Smartphones (Arles Tour, Arles Tracker, Rallyvisit). QR Code.

Affichage. Balisage. Communication. Guidage.
Affiche. Cartel. Étiquette. PANNEAU.

CHARTE GRAPHIQUE. Contenu. DESIGN. Image. Information. Instantané.

Avant-première. Expérimentation. INNOVATION. Unique.
Balade. Cheminement. Déambulation. Hors les murs. MÉDIATION (humaine, numérique,
print). Promenade. Visite.

ARLES. Provence.
Politique (engagement, intention, volonté), Labels (Marseille-Provence 2013, Unesco, Ville
d’Art et d’Histoire).
Architecture. CULTURE. Folklore. Histoire. Monuments. PATRIMOINE. TOURISME.
Tradition

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

4
ABRÉVIATIONS

MP13/MP2013 : Marseille-Provence 2013
MDAA : Musée Départemental de l’Arles Antique
NTIC : Nouvelles technologies de l’information et de la communication
NSP : Ne sait pas / Ne Se Prononce pas = non-réponses (dans le cadre de l’analyse des
entretiens, l’un ou l’autre n’a aucune incidence sur les réponses puisque dans tous les cas la
personne ne s’est pas prononcée à ce sujet)
OT : Office du tourisme
PP : Pourquoi Pas
SN : Sentiers Numériques
TIC : Technologies de l’information et de la communication

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

5
AVANT-PROPOS

Je me suis toujours intéressée à la mémoire de la culture. Fortement marquée par les
écrits de Henri-Pierre Jeudy, notamment La Machinerie Patrimoniale, je souhaitais voir
comment pouvait s’opérer cette transmission. Ma passion pour les nouvelles technologies m’a
amené à me demander ce qu’elles pourraient changer dans le secteur culturel et comment elles
pourraient servir cette transmission, noble tâche souvent dévolue aux conservateurs des
musées ou aux médiateurs du savoir. Nos sociétés opèrent un travail archéologique de la
mémoire, une reconstruction incertaine de ce qui a été et qui suppose une destruction partielle
de ce qui nous est donné à voir : « Le devenir de l’homme reste toujours pensé en référence à
son passé. Il n’est pas imaginé comme ce qui n’est pas encore. » (Jeudy, 2001).
Durant mes deux années de master, le projet a beaucoup évolué et s’est parfois perdu.
Les fausses opportunités ont aussi fait que ce mémoire arbore cette teinte actuelle. Je suis en
effet partie au deuxième semestre du M1 (janvier-juin 2012) à Manchester pour y étudier leur
point de vue sur la culture et le patrimoine, et leur avenir avec les NTIC. Malheureusement les
cours disponibles n’ont pas pu m’apporter de connaissances supplémentaires en la matière, et
le prestigieux Centre de Muséologie de Manchester ne m’a pas été accessible.
L’étude des Sentiers Numériques de la ville d’Arles s’est donc offerte à moi par le biais
de Cécile Tardy qui m’a proposée de suivre le projet et de prendre la suite des enquêtes qui
ont été faites à ce sujet. L’intérêt de ce terrain fut double pour moi. D’une part, il me
permettait de voir une utilisation des NTIC à grande échelle et pas seulement au sein d’une
institution, et d’autre part il me permettait d’expérimenter la médiation du savoir hors les
murs, et même sur les murs. Le projet de départ fut d’étudier la réception du dispositif par les
visiteurs, sur la continuité des travaux effectués entre autres par Jessica Cendoya sur la partie
test du parcours (8 bornes étudiées en 2012 contre 40 actuellement). Cependant, la mise en
place de l’enquête, plus compliquée que prévue, m’a poussée à m’intéresser davantage aux
relais de la communication. J’ai ainsi interrogé les commerces, galeries, restaurants et
institutions touristiques pour savoir comment se transmettait l’information jusqu’à chez eux,

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

6
et de chez eux aux oreilles du visiteur. Même si c’eut été dommage de ne pas pouvoir avoir
d’informations sur la réception et l’usage réel du dispositif, les résultats ont néanmoins été
très intéressants à analyser et ont fourni des pistes d’action non-négligeables.
Ce fut un projet qui m’a profondément intéressé dans son traitement particulier de
l’espace urbain et du patrimoine culturel. Pour Roland Barthes dans ses Mythologies nous
n’arrivons pas à dépasser une saisie instable du réel « nous voguons sans cesse entre l’objet et
sa démystification, impuissants à rendre sa totalité : car si nous pénétrons l’objet, nous le
libérons mais nous le détruisons ; et si nous lui laissons son poids, nous le respectons, mais
nous le restituons encore mystifié. » (Barthes, 1957). Nous sommes condamnés à toujours
parler excessivement du réel. Barthes nous invite à chercher une réconciliation du réel et des
hommes, de la description et de l’explication, de l’objet et du savoir. Dans un sens plus
global, c’est un appel à la vigilance face aux images toutes faites, aux clichés de la vie
quotidienne que l’on finit par ne plus remarquer et qui pourtant guident nos comportements,
nos choix. C’est une dénonciation de l’utilisation, à des fins commerciales, de l’ignorance, du
manque d’esprit critique. Et dans notre société actuelle où nous sommes littéralement
bombardés de messages, cette analyse des mythes de notre société nous montre que rien n’est
dit au hasard et que derrière chaque message peut se trouver une déformation du sens qui
légitime et naturalise des formes bourgeoises de domination sociale. Ce qui m’a avant tout
intéressé dans les Sentiers Numériques, c’est cette initiative de créer une visite libre et simple
de la ville, et malgré les ressorts financiers et touristiques de tout projet culturel, de regarder
comment ils parlent du réel, de quelle manière, dans quel but, et vers quelles évolutions de la
médiation cela peut-il conduire.

Je terminerai en justifiant la quantité de travail et de rédactionnel par une intention
d’exhaustivité et la volonté de saisir mon objet de la manière la plus complète possible.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

7
REMERCIEMENTS

Ce travail de recherche a été le fruit d’un travail personnel mais il n’aurait pas pu se
présenter ainsi sans l’apport de toutes ces personnes qui de près ou de loin m’ont soutenue,
conseillé, aidé, sans oublier bien sûr celles qui ont collaboré à ce projet.

Avant tout je souhaite remercier ma directrice de mémoire, Cécile Tardy sans qui ce
mémoire n’aurait pas trouvé de terrain aussi intéressant que celui-ci, et ma tutrice Éva
Sandri, pour leurs conseils pertinents, pour m’avoir aidée à faire mûrir mes idées et faire
évoluer mon étude, pour leur encadrement et leur disponibilité.
Merci également à l’ensemble de l’équipe pédagogique du Master Stratégie du
Développement Culturel sans qui certaines idées n’auraient jamais trouvé leur chemin avant
tout, mais aussi pour la qualité de l’enseignement humain et théorique reçu.

Je suis également reconnaissante à Émilie Prévost qui dirige actuellement le projet des
Sentiers Numériques. Par sa réactivité et sa transparence, elle a pu me donner ce dont j’avais
besoin pour mener à bien cette enquête. Ce lien a davantage été celui d’une collaboration
puisque mon travail pourra servir à améliorer éventuellement le dispositif. J’ai été ravie de
discuter avec elle et de partager sa vision de la culture et de ce média urbain d’un nouveau
genre.
Même si la plupart d’entre-deux ne liront sans doute pas cet écrit, je tiens vivement à
remercier les personnes interrogées, ces gens qui ont voulu prendre le temps de discuter
autour d’un projet novateur, qui ont partagé leurs idées, qui ont su être honnêtes et critiquer de
façon positive autant que négative ce projet. Sans eux, la construction de cette connaissance
sur le parcours urbain n’aurait été possible.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

8
Je souhaite adresser également ma plus profonde gratitude aux personnes qui m’ont
soutenue, aidé et conseillé pendant ce marathon de fin d’études.
À Anne-Séverine Labre et Marie-Claire Galarme pour leur soutien et leur aide pour
les retranscriptions et la relecture du « manuscrit ».
À tous mes amis qui ont été là pour me changer les idées, me conseiller, me questionner
sur ma démarche pour qu’accouchent en moi les principes d’une maïeutique plutôt réussie…
Pour leur présence d’esprit et leur humanité, depuis le début et pendant ce mémoire.

Et enfin, un immense merci à mon compagnon, Frédéric Baron, pour qui la foi
inébranlable en mon travail a été une énergie fabuleuse qui m’a poussée à surpasser la fatigue
et les doutes. Son investissement dans les retranscriptions et observations, la pertinence de ses
retours lors de nos discussions interminables sur le sujet, sa douceur et sa fermeté quand le
mémoire n’avance pas, et sa conviction quant à l’issue de cette étude m’ont été d’une aide
inestimable et prolifique. Pour sa précieuse compagnie et son amour, je lui dédie ce travail,
cette recherche, ces réflexions.
À vous tous, un immense merci de m’avoir, à votre rythme et votre manière,
permis de réaliser ce mémoire !

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

9
SOMMAIRE

RÉSUMÉ
MOTS-CLÉS
ABRÉVIATIONS
AVANT-PROPOS
REMERCIEMENTS

3
4
5
6
8

INTRODUCTION

14

PREMIÈRE PARTIE – ETAT DE L’ART : VERS DES NOUVEAUX MODES DE MÉDIATION URBAINE ?

18

CHAPITRE 1 – LA MARCHE DU PATRIMOINE VERS LES NTIC
I. Un patrimoine en danger ? La migration des usages culturels

20
21

1.1. Vers un zapping culturel
1.2. Les politiques culturelles : de la culture à la mémoire
1.3. Une considération de la mémoire urbaine

II.

La volonté de donner le relai au numérique
2.1. Exposer au musée : de la vitrine à la médiation
2.2. Le visiteur, « interacteur » ou « hyperacteur » ?
2.3. Évolution des usages et révolution numérique relative

CHAPITRE 2 – MÉDIATION ET USAGES NUMÉRIQUES
I. Les initiatives du numérique : monstration et usage
1.1. L’émergence de nouvelles formes via les TIC
a) Les « services numériques culturels innovants »
b) Le « développement de la culture scientifique »

1.2. L’utilisation du numérique pour reconstituer le passé
1.3. Des pratiques culturelles digitales
a) « L’homo-mobilis » de la ville numérique
b) Smartphones et QR Codes

II.

Les interfaces multimédia
2.1. Média, multimédia, ou hypermédia : quelle notion choisir ?
2.2. L’énonciation multimédia d’un propos scientifique

III. Conclusion / Instant critique
CHAPITRE 3 – LA SIGNALÉTIQUE URBAINE COMME DISPOSITIF DE MÉDIATION
I. Énonciation, communication et médiation
II.

Un dispositif d’expérience et de savoir

III. Du dispositif de monstration au dispositif d’ostension
CHAPITRE 4 : PATRIMOINE ET TOURISME CULTURELS, UNE QUESTION URBAINE
I. Un pléonasme ?

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

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33
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35
35
36

38
40
40
41
42
43
43

10
II.

La construction de la « touristicité » et l’appel au tourisme

45

III. Offre touristique et fréquentation

46

3.1. Il est temps de ressemer…
3.2. Les derniers chiffres de 2013

46
47

IV. Le tourisme jugé : La théorie du sight-seeing
4.1. Visiter pour voir des images des objets réels de contemplation
4.2. Le bétail touristique
4.3. L'homme passif et aliéné face au capitalisme

CHAPITRE 5 – LA NOTION DE PARCOURS
I. Circuit, sentier, et parcours
II.

Des villes et des rues : entre utilitarisme du passage et redécouverte de la vie urbaine

47
47
48
48

51
51
52

CONCLUSION – POUR EN FINIR SUR LA THÉORIE…

53

DEUXIÈME PARTIE : MÉTHODOLOGIE MISE EN PLACE

54

I.

Trois temps pour comprendre et analyser les SN

55

II.

Analyse du discours : revirement de situation

55

2.1. Des visiteurs aux relais d’information
2.2. La définition de l’échantillon

55
59

a) Marketing et prescription
b) Le réseau arlésien

III. Une poétique de l’entretien
3.1. L’entretien semi-directif : envisager l'homme et la société
3.2. Au carrefour des registres d’interrogation du public

IV. Résultats précédents et hypothèses de recherche
4.1. Rappel des résultats de l’enquête de Jessica Cendoya
4.2. Hypothèses de recherche

V.

Méthodologie d’analyse des entretiens

59
60

61
61
62

63
63
64

65

TROISIÈME PARTIE : COMMUNICATION, CONCURRENCE, ET EXPERTISE FORMELLE DU DISPOSITIF

66

CHAPITRE 1 – REMISE EN SITUATION
I. Un contexte florissant et volontariste

68
68

1.1. La genèse des sentiers : mouvements et innovation
1.2. Un terrain étudié depuis sa conception jusqu’à son implantation

II.

Le stade actuel du parcours
2.1. Ce qui a changé depuis la dernière enquête

III. Tableau récapitulatif des tabaluz
CHAPITRE 2 – L’ANALYSE DU PARCOURS

I.

Une ville labellisée
1.1. Arles, Ville d’art et d’histoire
1.2. Marseille-Provence 2013
1.3. Le patrimoine mondial de l’UNESCO

II.

L’offre touristique d’Arles
2.1. Quelques chiffres
a) En 2000 : le patrimoine comme but

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

68
69

69
69

71
76
76
76
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78

78
78
78

11
b) En 2007 : la primauté des Arènes.

2.2. L’implantation des SN parmi l’offre touristique
a) Le découpage de la ville en quartiers
b) L’extension du parcours actuel
c) Les circuits piétonniers existants, une volonté qui s’efface dans la ville
CHAPITRE 3 – LA TABALUZ, UN OBJET TECHNIQUE

79

80
80
83
83

I.

Un dispositif contraint entre lumière et couleur

86
86

II.

La discrétion urbaine du dispositif

90

CHAPITRE 4 – LA TABALUZ, UN ÉCRIT SPÉCIFIQUE VISUEL
I. Les étiquettes des musées
1.1. Le signalement de l’objet
1.2. Un média exposition
1.3. Formes et rédaction

II.

La signalétique patrimoniale
2.1. Un juste milieu entre visibilité et discrétion
2.2. La visite d’un parcours
a) La compétence de visite
b) Choix et rythmes
c) Les contraintes de l’espace

94
94
94
95
97

99
101
102
102
102
103

III. Le panneau d’information

104

IV. Un dispositif graphique

107

4.1.
4.2.
4.3.
4.4.

Typographie de la tabaluz
La grille de conception graphique
Les couleurs
Les pictogrammes

107
108
111
111

CONCLUSION, LES TABALUZ, ENTRE INDÉPENDANCE ET CONTINUITÉ

113

QUATRIÈME PARTIE : CONNAISSANCE ET RECOMMANDATION DU DISPOSITIF

114

CHAPITRE 1 – ÉCHANTILLON ET MISE EN ANALYSE

I.

Comment lire les tableaux ?

115
115

II.

La couleur des interviewés

115

CHAPITRE 2 – LA CONNAISSANCE GÉNÉRALE DU PROJET
I. Typologies des entretiens

118
118

II.

Le niveau de connaissance des SN
2.1. Le profil « expert / spécialiste »
2.2. Le profil « Connaisseur / informé »
2.3. Le profil « Non-connaisseur / novice »

119
120
121
122

III. Le mot « tabaluz »

125

IV. Le circuit emprunté par les SN

125

CHAPITRE 3 – LA PERCEPTION DES SENTIERS NUMÉRIQUES

I.

Le projet, une nouvelle façon de visiter la ville
1.1.
1.2.
1.3.
1.4.

II.

L’essentiel arlésien
La technologie au service de l’urbain
Une manière ludique d’apprendre pour les enfants
Un manque de communication

L’utilisation potentielle du dispositif par les arlésiens

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

127
127
127
129
130
131

131

12
a)
b)
c)
d)

Désintérêt des locaux pour ce qui est fait pour les touristes
Le détournement de l’intérêt et de la pratique
Une pratique d’apprentissage déjà établie
Arlésiens pure souche et curieux

III. L’environnement de la tabaluz
3.1. Une bonne implantation des SN
3.2. Lisible pour les enfants, la bonne hauteur
3.1. La dualité de la tabaluz : visibilité et discrétion
a) Une visibilité qui oscille entre discrétion et ostentation
b) La couleur
c) Un attrape-œil
CHAPITRE 4 – UTILISATION ET PRESCRIPTION D’UN DISPOSITIF D’AIDE À LA VISITE

132
133
134
135

136
136
138
139
139
141
143

I.

Une faible pratique du parcours complet

145
145

II.

Une visite de la ville à recommander

146

CHAPITRE 5 – CONCLUSION ET REMISE EN QUESTION
I. Vers un bonus de visite, entre redondance et renouvellement
II.

Inadéquation et contraste positif

III. L’avenir des SN

148
148
149
150

CONCLUSION GÉNÉRALE

151

BIBIOGRAPHIE RAISONNÉE
I. Muséographie, art et culture

156
156

II.

Ville, tourisme et Arles

157

III. NTIC, culture numérique et multimédia

159

IV. Dispositifs et parcours

162

V.

162

Méthodologie et entretiens

RÉFÉRENCES

LECTURES COMPLÉMENTAIRES

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

165
168

13
INTRODUCTION

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

14
Depuis quelques années déjà le numérique est vu comme un moteur de création
pour aider les musées et institutions de la culture à trouver de nouveaux anges
d’approche pour faire découvrir et aimer, instruire et expliquer. Des musées vitrine aux
dispositifs actuels, beaucoup de réflexions ont été lancées et certaines ont abouti à des outils
performants permettant de renouveler l’expérience du visiteur et de lui proposer de nouveaux
moyens d’accéder au savoir mais également au loisir, au plaisir des yeux et des sens. Parfois
même, ces dispositifs semblent tendre vers un effacement de l’humain, comme si la machine
pouvait nous donner des choses que ce que les médiateurs pourraient nous offrir. Cette dualité
entre évolutions technologiques et besoin de l’humain ou peur de vouloir le remplacer par un
revêtement technique et un cœur de circuits est au cœur des débats sur les NTIC, qu’elles
soient dans le secteur culturel ou non d’ailleurs.

Les Sentiers Numériques font partie de ces nouveaux projets innovants mêlant
technologies et intentions de médiation, utiliser les potentialités techniques pour offrir de
nouvelles choses au visiteur, à voir et à utiliser.

Ce mémoire a voulu être le plus exhaustif possible sur le contexte de création de ce
projet et ce qui sous-tend son image : des musées multimédia aux dispositifs hors les murs en
passant par la communication des SN, cet écrit contextualise l’arrivé de ce média dans le
monde urbain arlésien. La ville, qui a toujours tenté d’innover en matière de culture, ne seraitce pour des raisons de ressorts économiques, s’est drapée cette année de nombreux projets
culturels innovants et ludiques. La première partie aborde ainsi toute la partie théorique autour
des concepts de nouvelles technologies, de parcours et de signalétique, mais aussi de tourisme
culturel. Il s’agit de délimiter et l’état de l’art autour des SN et de comprendre en quoi les
NTIC peuvent-elles favoriser la médiatisation et la médiation d’un patrimoine culturel
via la mise en place d’un parcours numérique urbain dans la ville d’Arles ? En avantpremière dans la ville, le dispositif est encore peu connu par les touristes et la population
locale.
Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

15
Ce qui nous a intéressé c’est de voir comment il était possible de percevoir ce terrain
de façon globale et complète, mais surtout d’étudier les SN du point de vue de leur
communication et de ce qui se transmet ou non in situ. La deuxième partie aborde ainsi
l’aspect métrologique mis en place et explicite la démarche entreprise pour englober les SN.

La troisième partie est la mise en place de cette méthodologie de compréhension de
l’objet d’étude. Un premier temps a cerné l’existant à savoir les spécificités et
caractéristiques du parcours afin de déceler des comportements spécifiques induits par
l’implantation du dispositif. Un deuxième temps s’est ensuite attaché à analyser la
communication des SN pour savoir ce qui se disait, à quel niveau, par quels biais, pour ensuite
opérer des rapprochements avec les discours (qui sera la quatrième partie). Il s’agissait de voir
sur quels principes de conception et de communication repose le dispositif des SN de la
ville d’Arles.
Quant à la quatrième et dernière partie, il s’agit de l’interrogation des commerces et
boutiques de la ville, et de toutes les entités situées à proximité du parcours qui avaient la
possibilité d’en parler et de devenir des relais d’information. En partant du constant que les
commercent présentent des flyers sur leurs comptoirs, on peut imaginer la place réservée à un
flyer des SN, présentant le projet brièvement et donnant à voir le plan du parcours. Il
s’agissait de saisir la perception et la connaissance des relais d’information de la ville, comme
base à une utilisation réussie par les visiteurs. Ces données furent aussi complétées par un
volet utilisation et prescription de ce derniers pour voir comment on peut mobiliser les
ressources humaines dans un projet urbain, faire participer la population pour faire des SN un
projet urbain total incluant les murs et les voix, les rhodoïds et les présentoirs. La
problématique de cette dernière partie était de découvrir la perception et la connaissance,
l’utilisation et la prescription des SN par les infrastructures culturo-touristiques et
commerciales de la ville d’Arles.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

16
Ce mémoire s’organise ainsi en quatre grandes parties correspondant à quatre
problématiques qui ont alimenté ma réflexion et structuré ma recherche :

Partie

1

2

3

4

Champ

Théorique

Problématique
- Quel état de l’art autour des SN
- Les NTIC peuvent-elles
favoriser la médiatisation et la
médiation d’un patrimoine
culturel via la mise en place d’un
parcours numérique urbain dans
la ville d’Arles ?

- Comment saisir de manière
globale les SN ?
- Comment étudier les SN du
Méthodologique
point de vue de leur
communication et de ce qui se
transmet ou non in situ ?

Analytique

Sur quels principes de conception
et de communication repose le
dispositif des SN de la ville
d’Arles ?

Terrain

Structure
Conceptualisation et théorie :
- NTIC
- Parcours
- Dispositif
- Tourisme
- Urbain
Segmentation de l’objet
étudié par une remise en
contexte du projet et une
analyse de l’existant
(communication et parcours)
Analyse :
- Contexte de création
- Parcours existant
- Communication

Quelle est la perception et la
connaissance, l’utilisation et la
prescription des SN par les
infrastructures culturo-touristiques
et commerciales de la ville
d’Arles ?

Interrogation et analyse
- Entretiens
- Analyse individuelle
- Analyse croisée

Cette démarche progressive a permis de comprendre de manière progressive le côté
technologique d’un dispositif assez simple en apparence ; de comprendre quelle fut mon
approche pour étudier les Sentiers Numériques ; quel est ce fameux parcours sur lequel je me
suis penchée, qu’est-ce qui le caractérise et quelle est son identité médiatique et
communiquée ; et enfin quelle est la connaissance et la perception des infrastructures locales
sur cet objet : le comprennent-ils, sont-ils prêts à être acteur de sa communication, l’utilisentils et finalement, le conseillent-ils aux visiteurs ?

Je vous souhaite une agréable lecture !
Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

17
PREMIÈRE PARTIE – ETAT DE L’ART : VERS
DES NOUVEAUX MODES DE MÉDIATION
URBAINE ?

Les NTIC peuvent-elles favoriser la
médiatisation et la médiation d’un
patrimoine culturel via la mise en
place

d’un

parcours

numérique

urbain dans la ville d’Arles ?

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

18
Le projet des Sentiers Numériques (SN) est un dispositif unique en son genre. Il pose
entre autre la question de savoir comment les nouvelles technologies vont pouvoir changer un
parcours culturel via une signalétique urbaine. Au cœur des initiatives culturelles depuis
quelques années, les innovations techniques et les avancées technologiques ont permis à de
nombreux projets innovants de naître, certains continuant encore à s’améliorer car au stade de
la conception et de la réflexion.
Dans cette partie nous allons analyser les concepts de nouvelles technologies pour
savoir ce qui se cache concrètement et techniquement derrière ce terme, et en quoi les Sentiers
Numériques disposent d’une telle innovation technique. Ensuite, nous verrons la notion de
parcours depuis son emploi pour des circuits davantage muséaux avant de regarder ce qui se
passe au niveau urbain. Il s’agit de voir en quoi le terrain étudié peut être considéré comme
parcours et en quoi il en diffère. Également la notion de signalétique urbaine sera abordée
selon plusieurs angles comme celui des étiquettes, des cartels ou encore des panneaux. Et
enfin, le côté touristique de la culture sera abordé.
Tous ces concepts permettent de comprendre dans quel contexte s’insèrent les SN de la
Ville d’Arles et m’ont permis de m’interroger sur le circuit de plusieurs manières :


En quoi les SN font partie des nouvelles technologies puisqu’ils ne disposent au
niveau numérique que de la présence d’un QR Code sur chaque tabaluz et d’un
rétroéclairage coloré ?



Comment considérer les SN comme un parcours alors que les tabaluz sont
conçues comme des bornes d’informations indépendantes les unes des autres ?



Comment qualifier les tabaluz : borne, panneau, affichage, signalétique
urbaine ? Sous quel concept peut-on regrouper tous ces adjectifs et comment
analyser un objet nouveau pour en comprendre le fonctionnement, l’usage et la
réception ?



Comment considérer le côté touristique du parcours alors qu’il est nommé
culturel et patrimonial ?

C’est au travers de ces chapitres que chacun de ces concepts et thématiques seront
abordés. Nous verrons que les NTIC ont permis l’avènement de dispositifs qui croisent
technique et médiation et que les SN sont un dispositif particulier mis en scène dans la ville
selon un parcours défini.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

19
CHAPITRE 1 – LA MARCHE DU PATRIMOINE
VERS LES NTIC

« LES NOUVELLES TECHNOLOGIES OFFRENT DE NOUVELLES
VOIES

POUR

L'EXPRESSION

DE

CETTE

DÉMOCRATIE.

TOUTEFOIS, DEUX MENACES GUETTENT : D'UNE PART,
L'INÉGALITÉ DES CITOYENS FACE AU NUMÉRIQUE, CE QUE L'ON
APPELLE LA FRACTURE NUMÉRIQUE

; ET, D'AUTRE PART, LE

RISQUE LIÉ À L'UTILISATION DE DONNÉES PUBLIQUES, CE QUE
L'ON APPELLE L'OPEN DATA. », DAVID LACOMBLED

Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC),
anciennement Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) sont issues de la
convergence de l'informatique, des télécommunications et de l'audiovisuel. Depuis que nous
sommes entrés dans la société de l’information ou Galaxie Marconi (McLuhan, 1962), elles
n’ont cessé d’être utilisées pour rendre le savoir accessible aux visiteurs et de développer de
nouveaux moyens de se l’approprier, entre autre de façon ludique ou interactive : « Les
musées recourent de plus en plus aux dernières innovations informatiques pour informer les
visiteurs de manière ludo-éducative. » (Breakwell et Bernier, 1998 : 3).
Les Sentiers Numériques ont entre autres ceci d’intéressant de lier patrimoine et
technologie, culture et numérique, mais aussi visite et urbain, parcours et signalétique. C’est
un sentier de bornes d’informations, les tabaluz, qui forment un réseau de balades thématiques
pour vivre autrement Arles, rendre la ville plus accueillante, mieux se repérer et comprendre
ce qu’il se passe à Arles, ce qu’est son patrimoine et son histoire. Pour comprendre le
contexte de recherche et d’innovation de ce terrain qui sera expliqué plus en détail dans la
deuxième partie, nous allons nous pencher sur l’évolution et la croissance des technologies
dans le secteur culturel, et plus précisément au musée.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

20
I. UN PATRIMOINE EN DANGER ? LA MIGRATION DES USAGES
CULTURELS
Le patrimoine signifie littéralement en latin « l’héritage du père ». D’abord legs
familial, il fut ensuite cantonné à la conservation de monuments et d’objets mobiliers, puis
recouvre actuellement de nombreuses formes dont neuf ont été officialisées mais auxquelles
nous pourrions sans doute rajouter littéraire, cinématographique, culinaire, ou encore
vestimentaire : archéologique, monumental, urbain, rural, parcs et jardins, industriel,
maritime, ethnologique, et photographique. (Service pédagogique Château Guillaume le
Conquérant, fiche enseignant « La notion de patrimoine »).

1.1. Vers un zapping culturel
Roland Recht en 1999 se posait déjà la question de savoir quoi faire de notre
patrimoine, de son utilité. Ce n’est plus seulement une mémoire collective qui se construit, il
est aussi question de savoir ce que cela nous apporte subjectivement. Même si le patrimoine
constitue une part de notre histoire et donc est intrinsèquement ce qui nous constitue
aujourd'hui, il est menacé de zapping (Recht, 1999). Peut-être en avons-nous assez de
regarder ce qui nous a transformé, façonné… les œuvres ne sont plus que des collections, des
objets de musée à regarder, une certaine culture à connaître et non plus une sorte d’hommage
à ces témoins du passé. L’aura du patrimoine se farde d’une obligation de mémoire, un
impératif de fréquentation qui ne semble plus naturel et que nous voyons avec les yeux du
marketing, de la consommation, du loisir. Le patrimoine en tant que témoin du passé semble
être devenu un patrimoine de loisir, un patrimoine simplement touristique qui oscille sans
cesse entre les différents sens que nous lui octroyons. Il faut donc opérer un rééquilibrage,
« ce n’est pas d’un public pléthorique que le patrimoine a besoin, mais d’un nombre
régulièrement croissant d’individus attentifs, curieux, motivés, qui considèrent que les
monuments et les musées sont nécessaires à la vie de l’esprit. » (Recht, 1994).

Mais il ne semble pas aisé de séparer patrimoine et mémoire collective, patrimoine et
consommation culturelle… La société moderne se trouve dans un cercle vicieux entre
conservation et évolution, oubli et stagnation. Pour l’instant une piste : renforcer les pôles
patrimoniaux par l’éducation et un apprentissage du regard. Ne plus se pencher sur
l’institution patrimoniale, mais sur les utilisateurs de cette dernière. Même si les nouvelles
technologies apportent avec elles des espoirs de médiation numérique plus autonome et

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

21
interactive, c’est l’éducation et la communication vers le visiteur qui porte en elle la
possibilité d’une réelle démocratisation et d’une appropriation par le visiteur.
C’est ainsi que l’on a vu les politique culturelles se renforcer dans les années quatrevingt-dix notamment.

1.2.

Les politiques culturelles : de la culture à la mémoire

La politique culturelle est liée à la consolidation nationale (Poirrier, 2011). Après la
guerre, les nations ont commencé à lier recherche et action, démarche déjà adoptée par
d’autres institutions telles que le Conseil de l’Europe ou l’Unesco. C’est notamment dans ce
contexte que fut créé en France en 1989 l’Observatoire des politiques culturelles1. Nous
sommes dans l’ère de l’Interculturalité, définie par Jean-Pierre Saez comme la « juxtaposition
de différentes cultures et du processus d’échange, de transfert entre des cultures coprésentes » (Saez J.P, 2004). C’est le projet politique d’organiser le dialogue entre diverses
cultures présentes sur un espace public et de promouvoir une conception de la culture qui
fasse honneur à l’idée de sa pluralité. Depuis le Musée Imaginaire de Malraux2 et de sa
conception multiculturaliste de l’art, la France a toujours revendiqué la compréhension et le
dialogue des cultures. Les institutions et organismes agissent de concert avec le Ministère de
la Culture pour favoriser des dispositifs ou des projets d’intervention prenant en compte
l’interculturel, particulièrement dans le cadre de la politique de la ville. Cependant
l’immigration reste un point sensible. Nous n’en sommes pas encore à une dynamique
politique culturelle propre, mais elle puise ses racines dans ce processus. Ainsi certaines
collectivités osent soutenir des formes de mise en valeur des cultures immigrées dans le cadre
de leurs politiques culturelles et socio-culturelles. Les musées quant à eux tentent d’intégrer
les mémoires immigrées dans la mémoire nationale, richesse patrimoniale participant à
l’identité territoriale. C’est ce travail d’intégration des mémoires dans une mémoire collective
qui est intéressante. Halbwachs a définit la mémoire comme « une reconstruction du passé
faite en fonction du présent du groupe » (Halbwachs, 1950). C’est ce que nous tentons de

Il se définit actuellement comme « un organisme national dont la mission est d'accompagner la décentralisation et la
déconcentration des politiques culturelles, la réflexion sur le développement et l'aménagement culturel du territoire
mais aussi sur les dynamiques artistiques et culturelles, à travers des actions de formation, d'études, de conseil et
d'information. »
2 André Malraux : « J'appelle Musée Imaginaire la totalité de ce que les gens peuvent connaître aujourd'hui même en
n'étant pas dans un musée, c'est-à-dire ce qu'ils connaissent par la reproduction, ce qu'ils connaissent par les
bibliothèques, etc. » in Le musée imaginaire, 1996.
1

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

22
faire aujourd'hui, avec la complexité de notre société et de notre culture, une reconstruction
d’un rapport avec la culture et notre patrimoine.

À ce propos, Jean Caune remarquait trois formes de médiation dans la politique
culturelle : la forme im-médiate de contact avec les œuvres (communion avec les grandes
œuvres de l’esprit), l’art comme facteur d’engagement personnel et collectif
(transformation du monde et progrès social), et la communication culturelle et la médiation
s’opère par la médiatisation des objets de culture (Caune, 1999). Pour l’auteur, c'est par
l'expérience sensible des formes, qui fonde la médiation esthétique, que nous pouvons
comprendre les choses et penser le monde. Nous pouvons récapituler ainsi :
Orientation de l’État en
matière de politique
culturelle

Années
60
70
80
90 (début
21°s)

État esthétique
État culturel
État séducteur
État partenaire

Mode de médiation
privilégié

Conception de l’art
privilégiée

Par contact
Par l’expression
Par la médiatisation de l’art
Par l’éducation et la
sensibilisation

Art comme mimesis
Art comme agon
Art comme vertige
Art comme système
de signes

L’État se rend acteur de la culture et de son accès, on peut ainsi parler de médiation
(Caillet, 1995) pour défendre des politiques culturelles soucieuses de réparer la fracture
sociale, mais le mot devient alibi si on reste enfermé dans des démarches de consommation
des biens culturels.

1.3.

Une considération de la mémoire urbaine

Toujours lié à la notion de souvenir, Jean-Pierre Saez analyse l’espace urbain comme un
terrain d’affirmation identitaire, il est une mémoire vivante qu’aujourd'hui nous tentons de
sauvegarder (J.P Saez, 2001). Avant la ville n’était qu’un outil que l’on pouvait détruire pour
reconstruire de nouvelles choses, notamment après la guerre3. Le tissu urbain n’est pas conçu
comme un monument en soi, peut être détruit pour dégager des perspectives autour des
monuments dignes d’intérêt (Choay & Merlin, 1988). Mais dans les années soixante-dix les
murs sont vus comme des témoins à sauvegarder comme le quartier du Vieux Lyon sauvé de
la destruction par sa mise en patrimonialisation et devenu patrimoine mondial de l’Unesco en
1998. La patrimonialisation est désormais un angle des politiques culturelles et les vieux
Hausmann, contemporain de Mérimée justifie la destruction des vieux quartiers de Paris par le besoin de salubrité
et de modernisation.
3

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

23
bâtiments autrefois détruits sont aujourd'hui réutilisés pour faire parler leur histoire en
présentant des collections, qu’elles soient nouvelles ou appartenant au passé (J.P Saez, 2001).
L’intérêt est que les habitants reconnaissent les objets patrimoniaux qui leur sont
proches en les inscrivant dans des logiques d'usages qui s'accordent mal de la
patrimonialisation institutionnelle (Rautenberg, 2003). Faut-il donc renouveler le lien que les
habitants entretiennent avec leur patrimoine ? Doit-on changer de point de vue concernant nos
politiques culturelles ? Ces questions ne sont pas nouvelles et ont donné lieu au rapport
commandité par le Ministère de la Culture et de la Communication Culture & médias 2030,
réalisé pour répondre aux questions stratégiques de l’avenir de la culture et des médias, et de
la politique culturelle de l’État, à un moment marqué par l’impact de la révolution numérique
sur l’offre et les pratiques, un tournant dans le processus de globalisation et de profondes
transformations sociales. Le rapport annonce l’hypothèse d’une accélération du changement
culturel, incluant la possibilité d’un changement de paradigme culturel, une très profonde
transformation de la culture au cours des prochaines décennies, une rupture. Cette dernière a
déjà été annoncée par Guy Saez (J.P Saez, 2001) : actuellement les villes connaissent des
ruptures dues à la mondialisation. L’espace urbain et la morphologie des villes deviennent
extraordinairement désordonnés car l’excès de capacités culturelles provoque un désordre
culturel. C’est une tendance de notre société de connaître une explosion des formes et une
volonté d’affirmation de soi.
Ces deux tendances font naître de nouvelles initiatives qui essayent d’opérer un
équilibrage qui soit le plus juste possible et le plus intéressant en matière de création et de
médiation.

II. LA VOLONTÉ DE DONNER LE RELAI AU NUMÉRIQUE
2.1.

Exposer au musée : de la vitrine à la médiation

Il y a environ une trentaine d’années, le monde de la culture a commencé à se parer des
nouvelles technologies pour conserver le patrimoine et le rendre davantage accessible, ou du
moins d’une autre manière. La définition apportée au musée est multiple et repose souvent sur
ses missions4. Nous retiendrons celle du Conseil International des Musées (ICOM) qui le
L'UNESCO lui en reconnaît cinq : « l'identification, la protection, la conservation, la mise en valeur et la
transmission aux générations futures du patrimoine culturel », la Direction des Musées de France en énumère les sept
vertus : « inventorier, conserver, décrire, classer, communiquer, exhiber et enrichir. »
4

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

24
perçoit comme « une institution au service de la société qui acquiert, conserve, communique,
et présente à des fins d'accroissement du savoir, de sauvegarde et de développement du
patrimoine, d'éducation et de culture, des biens représentatifs de l'homme. »

Jusque dans les années soixante-dix, les musées se présentaient comme des « vitrines »
et ont commencé à mettre un premier pas dans l’animation. Alors que l’exposition ne
proposait « qu’un espace de rencontre » (Verhaegen, 2010) avec les objets, nous sommes
progressivement passés d’une médiation formelle du savoir à un mode plus technologique de
médiation via l’image et la vidéo dans les années quatre-vingt. Rendre davantage accessible le
savoir au public, lui permettre de découvrir la culture sous l’angle interactif de nouveaux
supports technologiques, telles étaient les nouvelles idées de cette époque où l’on commence
sérieusement à étudier les technologies audiovisuelles et leurs langage spécifiques : texte,
image, et son.
C’est aussi la décennie où les premières bornes interactives prenaient place dans
certains musées et où l’on intégrait les objets dans la construction d’une idée et d’un message
à faire passer : « ce dispositif audio-scripto-visuel est essentiellement transmissif : il s’agit de
communiquer au mieux un savoir en exploitant les capacités synergiques de différents médias
» (Verhaegen, 2010). Comme le décrit Jean Davallon, cette muséologie est partagée entre la
relation d’éducation informelle et les pratiques de communication : « elle est prise entre
l’école et la publicité, si l’on peut dire » (Davallon, 1992). À la naissance des services
pédagogiques se joint peu à peu les préoccupations des chercheurs Info-Com sur trois plans :
la focalisation sur les processus cognitifs, le développement des TIC et l’essor muséal.

Dans les années quatre-vingt-dix, la mise en forme médiatique des connaissances
occupe toujours une position centrale : les nouveaux modes d’appropriation intellectuelle se
font par la combinaison particulière des discours et des médias : « la communication est
comprise alors comme un acte où les sujets participent à la co-construction du sens »
(Davallon, 1992). On a parlé de visiteur « inter-acteur » (Vidal, 2006) : « L’acte créatif n’est
pas réalisé par l’artiste seul ; le spectateur met l’œuvre en contact avec le monde extérieur en
déchiffrant et en interprétant ses caractéristiques internes et ajoute ainsi sa contribution à
l’acte créatif. »5 (Duchamp, 1957).

Phrase prononcée par Marcel Duchamp au Session on the Creative Act, Convention of The American Federation
Of Arts, Houston, Texas, Avril 1957.
5

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

25
2.2.

Le visiteur, « interacteur » ou « hyperacteur » ?

Dès 1997, Jean Davallon parlait d’un « visiteur-expert » possédant des compétences sur
le média (Davallon, 1997). À cette époque, cette dernière s’apparentait à la maîtrise des codes
d’écriture de l’exposition, mais aujourd'hui le visiteur s’approprie directement les outils
multimédia destinés à la visite, soit parce qu’il les connait ou les possède (Ipad, IPhone), soit
parce que son utilisation intuitive est proche des outils qu’il utilise quotidiennement ou
occasionnellement. Hélène Bourdeloie le rejoint en 2001 en insistant sur les potentialités des
médias dans l’acquisition du savoir : « l’usager ne peut plus être appréhendé comme passif :
ce dernier construit son usage en fonction des possibilités et des contraintes de l'outil ou du
service utilisés. […] Ainsi, cette diffusion culturelle qu'est le multimédia de musée met en jeu
un rapport singulier : les potentialités de la technique permettent de s'approprier autrement
l'œuvre, de personnaliser son parcours par la possibilité que les usagers ont de naviguer à leur
guise dans le contenu » (Bourdeloie, 2001). Le visiteur a donc un pouvoir (Vidal, 2006)
puisqu’il collabore à la construction du sens avec le musée (Russo, Watkins, Kelly et Chan,
2008). Geneviève Vidal utilise le terme « hyperacteur » car avec les nouvelles technologies le
visiteur a un pouvoir et un savoir : il dispose d’« une culture technique se confirme et enrichit
les savoir-faire informatiques dans l’ensemble des activités de communication et
d’information. Cette culture technique se fond de plus en plus désormais avec la culture des
réseaux » (Vidal, 2006).
On passe de la médiatisation à la médiation culturelle au sens d’ensemble d’actions qui
visent à réduire l’écart entre l’œuvre, l’objet d’art ou de culture, et les publics et les
populations : « La question du médiateur n’est plus « Comment transmettre un savoir ? » mais
bien « Quel dispositif sémio-technique mettre en place pour favoriser la co-construction de ce
savoir ? » (Beillerot, 2000 : 3). Et c’est le développement des TIC qui aura permis l’essor de
tels dispositifs. Depuis, cette initiative est devenu le fer de lance du développement culturel.
Le numérique est un média d’avenir et les projets croissants qui gravitent autour sont un
moyen d’accompagner la transition vers une société usant tant que possible de ces médias
intelligents pour communiquer, transmettre, faire découvrir et aimer, faire interagir le public
avec une œuvre… La sociabilité est omniprésente et l’apprentissage social. À l’inverse des
médias traditionnels (journaux, radios, télévisions), ces nouveaux médias font de l’exposition
« un véritable lieu d’expérimentation corporelle » où « c’est le visiteur qui, en passant d’un
objet ou d’un lieu à un autre, va s’efforcer de comparer ceux-ci, de les confronter, d’établir le
lien — de similarité, de causalité, de sérialité... — qui les unit, bref de les comprendre (au
Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

26
sens étymologique du terme) » (Beillerot, 2000 : 5). L’exposition est ainsi vue comme un
« dispositifs de médiation corporelle du savoir » qui lui permet d’occuper une place
prépondérante dans les réflexions sur la médiation des savoirs (Ibid.).

2.3.

Évolution des usages et révolution numérique relative

On navigue désormais dans une culture de « l’écrit-d’écran » (Souchier, Jeanneret, Le
Marec, 2003). Depuis l’informatisation de la société dans les années quatre-vingt, les foyers
sont de plus en plus équipés en informatique. On a souvent vu les années deux-mille/deuxmille dix comme une transition vers le numérique et parfois le tout-numérique et selon l’étude
d’Olivier Donnat sur les pratiques culturelles des français à l’ère du numérique, la culture
d’écran est montée en puissance (Donnat, 2010).
Avec la dématérialisation des contenus, la généralisation de l’internet à haut débit, et le
progrès de l’équipement des ménages, les appareils sont devenus nomades et
multifonctionnels en moins de dix ans, au croisement de la culture, de l’Entertainment et de la
communication interpersonnelle. Cette évolution a définitivement consacré les écrans comme
support privilégié de nos rapports à la culture : tout est désormais potentiellement visualisable
sur un écran et accessible par l’intermédiaire de l’internet, ce nouveau média à tout faire
diffusé rapidement.
Cependant, l’enquête fait ressortir un point clé en matière de révolution numérique : elle
est relative. Si elle a radicalement modifié les conditions d’accès à une grande partie des
contenus culturels et déstabilisé les équilibres économiques dans les secteurs des industries
culturelles et des médias, elle n’a pas bouleversé la structure générale des pratiques culturelles
ni, surtout, infléchi les tendances d’évolution de la fin du siècle dernier. La société française
est vue comme l’addition de quatre générations qui entretiennent des liens différents avec la
technologie (Donnat, 2010). La génération née avant la Seconde Guerre mondiale qui est celle
du livre et des premières télévisions. La génération des baby-boomers qui témoigne de la
culture juvénile centrée sur la musique des années 1960. Elle a connu l’ouverture du système
scolaire et le développement des industries culturelles. La génération des 30-40 ans a connu la
massification de l’accès à l’enseignement supérieur, la diversification de l’offre culturelle.
C’est la génération du second âge des médias : radios, télévisions privées, multiéquipement,
programmes en continu, etc. Et enfin, la génération des moins de 30 ans est celle du troisième
âge médiatique qui a grandi au milieu des téléviseurs, ordinateurs, consoles de jeux et autres

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

27
écrans dans un contexte marqué par la dématérialisation des contenus et la généralisation de
l’internet à haut débit.

Ce mélange des générations explique en partie le décalage actuel entre des générations
avides de numériques et d’autres qui sont restées dans un monde où ces usages n’existaient
pas encore. Ce constat explique aussi la difficulté de cette période transitoire où les anciennes
générations éprouvent souvent des difficultés à se mettre au numérique et à la technologie.

Cette constatation est relayée par le Ministère de la Culture et de la Communication sur
l’accès aux technologies de l’information6. Il y a quelques années, la catégorie
« Smartphone » n’existait pas encore, et en 2012, la proportion de personnes y ayant accès est
relativement importante.
Fig 1 : l’accès aux technologies de l’information

6

Ministère de la Culture et de la Communication. 2013. Chiffres clés : financement de la culture

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

28
CHAPITRE 2 – MÉDIATION ET USAGES
NUMÉRIQUES

« LE TEMPS EST CAUSE PAR SOI DE DESTRUCTION PLUTÔT
QUE DE GÉNÉRATION », ARISTOTE

I. LES INITIATIVES DU NUMÉRIQUE : MONSTRATION ET USAGE
1.1. L’émergence de nouvelles formes via les TIC
« Il ne fait guère de doute, pour les sciences de l’information et de la communication,
que l’évolution des techniques joue un rôle structurant, mais non exclusif, dans la production
et l’échange des connaissances », ainsi débute le 6ème colloque international du chapitre
français de l’ISKO organisé en 2007 (Davallon, Jeanneret, Tardy, 2007). Les technologies
permettent ainsi de générer des expériences artistiques pour que l’intention puisse être perçue
par les visiteurs (Transforming Culture In The Digital Age, 2010 : 197), rôle des technologies
multimédia déjà analysé par Kit Messham-Muir l’année précédente (Messham-Muir, 2006).

Certaines institutions, conscientes de ces opportunités et enjeux, ont porté des projets
ambitieux et innovants :
 Bordeaux 3D ou B3D Bordeaux XVIIIème est un
parcours historique multimédia et interactif en réalité
augmentée mobile dans le cœur historique de Bordeaux.
Il transporte le visiteur dans un voyage dans le temps,
accompagné par les personnages célèbres de la ville. Il a
été mis en service au printemps 2012.
 Le projet européen CHESS Experience (Cultural
Heritage

Experiences

through

Socio-personal

interactions and Storytelling) a pour but de rechercher et développer des solutions
pour aider les institutions culturelles à rendre leur héritage plus engageant, et plus
spécifiquement pour les jeunes générations du « Boom numérique » (« Digital
Natives »). Il intègre des recherches interdisciplinaires dans la personnalisation et

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

29
l’adaptation, la narration numérique, les méthodologies de l’interaction et les
nouvelles technologies mixant la réalité.

a) Les « services numériques culturels innovants »
L’État reste le financeur principal des projets numériques, même si sa participation
varie selon les institutions et les projets et qu’elle s’amenuise chaque année, elle est
néanmoins toujours présente. Le Ministère de la Culture et de la Communication considère
que « l’émergence de nouvelles formes d’innovation, de médiation et d’accès à la culture se
développent via l’usage croissant des technologies de l’information et de la communication.
En donnant des possibilités nouvelles en termes de création, de production, de diffusion et
d'accès aux biens et aux services culturels, ainsi qu'une proximité plus grande entre le créateur
et son public, les technologies numériques modifient la chaîne de valeur, l'équilibre
économique des industries culturelles et l'accès à la culture numérique » (Appel à projets
« Culture numérique »). Edmond Couchot annonçait il y a plus de 20 ans « Nous assistons à
l'émergence d'un nouvel ordre visuel » (Couchot, 1988). Adapté à notre époque, il s’agit des
nouvelles possibilités offertes par la production d’images dynamiques, d’images propres à
l’action et à l’intervention.

Il a également lancé toujours via le Ministère de la Culture et de la Communication en
novembre 2011 un appel à projet « services numériques culturels innovants ». Doté d’1,5
millions d’euros, de dispositif permet « l’émergence de nouvelles formes d'innovation tirées
par les usages et les services » et favorise la création de partenariats entres les acteurs
culturels. Sur 220 candidats, 60 ont été retenus dans l’ensemble des champs culturels (cinéma,
danse,

arts

numériques,

livre,

théâtre,

patrimoine

muséographique,

archivistique,

ethnographique, linguistique, etc.) pour expérimenter les technologies innovantes appliquées à
la culture : technologies NFC7, QR Codes, et réalité augmentée pour découvrir des œuvres et
visiter « territoires alliant tourisme, culture et patrimoine » (Appel à projets « Culture
numérique »).

La technologie NFC (Near Field Communication) est un mode spécifique de transmission sans fil de données à très
courte portée ( quelques centimètres ), développé dans le cadre d’une famille de technologies plus vaste, la radioidentification (RFID). Pour en savoir plus : http://www.transportintelligent.net/technologies/transmission/article/la-technologie-nfc-near-field
7

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

30
Parmi les 60 projets finaux, on peut noter la forte implication de la ville d’Arles via ces
trois idées novatrices concrétisées en 2013 :
 Vol de nuit (sans effraction) du Museon Arlaten : visite via une caméra
embarquée sur un drone, télécommandé depuis l'espace public alors que
l'exposition est fermée à la visite la nuit
 La web TV des rencontres d'Arles
 Les Sentiers numériques : « média urbain citoyen », dispositif de balisage
lumineux et d’affichage d’informations dynamiques pour des parcours thématiques
dans la ville d'Arles

b) Le « développement de la culture scientifique »
De nombreux autres projets qui ont trait au numérique se développent pour proposer un
accès au savoir et aux œuvres. L’appel à projets « Développement de la culture scientifique,
technique et industrielle et l’égalité des chances »8 a été lancé en 2010 pour diffuser la culture
scientifique et technique, et accroître l'accès pour les publics défavorisés. L'Agence Nationale
pour la Rénovation Urbaine bénéficiait de 50 millions d'euros pour sélectionner 12 projets
dont deux vont vous être présentés.
ESTIM (Egalite d’accès aux Sciences, aux Technologies, à l’Innovation et au
Multimédia)9 est un projet global, porté par Universcience en partenariat avec 51 acteurs de la
culture, de l’éducation, de la recherche, de l’industrie et des médias pour développer un
portail numérique de la culture scientifique, technique et industrielle.
Inmédiats (Innovation pour la Médiation dans les Territoires)10 est un projet
interrégional mené par le regroupement de six centres de sciences dont l’objectif est de
promouvoir l’égalité des chances dans l’accès à la culture technique et scientifique par le biais
du numérique, et il regroupe une dizaine de projets qui se répartissent selon trois axes de
développement :
 Création de contenus et services innovants : offrir un accès à des ressources via
des services numériques collaboratifs, construire un ensemble de contenus innovants
permettant de toucher de nouvelles cibles et de suivre l’utilisation des publics (lien
physique/virtuel, serious game, interaction avec les réseaux sociaux, etc.)
Ministère de la Culture et de la communication : douze projets soutenus pour le développement de la culture
scientifique, technique et industrielle et pour l'égalité des chances.
9 ESTIM :
http://www.universcience.fr/cs/Satellite?blobcol=urldata&blobheader=application%2Fpdf&blobkey=id&blobtable
=MungoBlobs&blobwhere=1195517702023&ssbinary=true
10 Inmédiats : http://inmediats.fr/
8

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

31
 Mise en place de nouveaux lieux de rencontre avec les publics via l’élaboration de
nouveaux types de ressources et d’interfaces numériques (réalité augmentée, 3D,
etc.)
 Évaluation, diffusion, et formalisation de l’ensemble des dispositifs et
innovations.

1.2.

L’utilisation du numérique pour reconstituer le passé

Les innovations et les évolutions technologiques, nous venons de le voir, ont toujours eu
leur place au sein des musées, en particulier dans les musées de sciences. Les institutions
culturelles suivent de près ces évolutions et proposent parfois des projets innovants et
ambitieux. Au lieu de n’être qu’une simple présence, les NTIC sont désormais un moteur, un
noyau (avec les objets) autour duquel la proposition du musée se fait.
Prenons l’exemple de la réalité augmentée ou de la 3D, sans aller plus loin dans
l’explication car ce n’est pas le propos de ce mémoire. Se voit à travers ces technologies
l’opportunité de re-créer des choses qui ne sont plus : « Immersion visuelle et interaction
intuitive avec l’environnement sont les maîtres mots de la réalité augmentée. Entre virtuel et
réel, elle permet de superposer en temps réel, un modèle virtuel 3D ou 2D à la perception que
nous avons naturellement de la réalité. Un cadre parfait donc, pour développer des
applications culturelles et patrimoniales interactives. Reconstitution de monuments
historiques, voyage dans un cadre historique ou artistique, visite de lieux inaccessibles ou
d’une autre époque … [la réalité augmentée nous fait] vivre ou revivre notre patrimoine. » (La
Fabrique BNSA, 2011). Selon le site WebEvangelists.net, la Réalité Augmentée (RA) désigne
toutes les interactions, rendues possibles par des applications, entre des éléments réels et des
éléments virtuels. Au lieu de proposer une autre réalité, la RA se greffe à cette dernière pour
ajouter du contenu, solliciter tous nos sens, elle « va accroître nos capacités à agir en
complétant notre expérience du réel. » Certaines institutions jouent double carte tel le Palais
des Papes à Avignon qui propose des commentaires multimédia synthétiques et des
commentaires muséographiques plus approfondis : « le visiteur dispose ainsi d’une double
lecture : il peut choisir en fonction des thèmes, mais aussi de ses dispositions et de ses centres
d’intérêt, le support de médiation le plus adapté »11.

11

Le Palais des Papes, une visite ludique et interactive : http://www.palais-des-papes.com/fr/content/visite-ludique

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

32
1.3.

Des pratiques culturelles digitales

L’utilisation des NTIC fait émerger le concept de culture numérique qui regroupe
nombre de recherches et notions, notamment la participation, l’interaction et le changement
des rôles de l’utilisateur : on observe l’émergence d’une culture plus participante (Jenkins,
2006 ; Benkler, 2007 ; Manovich, 2007). Les rôles des utilisateurs sont hybrides, on parle de
« produser » (contraction en anglais de producteur et utilisateur). Les pratiques culturelles
digitales, qui se placent désormais sous le triple concept de « singularité, expressivité et
remixabilité » renvoient à un geste d’appropriation de contenu à des fins expressives (Allard,
2009). Elles montrent également que ce qui se noue dans cette appropriation, c’est une
singularisation de la pratique de la visite et également la construction « d’une mémoire de
spectateurs » (Éthis, 2007).
a) « L’homo-mobilis » de la ville numérique12
Depuis Descartes on pourrait dire « Je suis connecté donc je suis » (Wachter, 2010).
L’individu type de la ville numérique est nomade, il est connecté en permanence au cours de
ses déplacements, le mouvement n’est donc pas signe de déconnexion ici. On parle d’« homomobilis » muni de prothèses communicantes. La perception de l’individu devient augmentée :
la ville et les espaces offrent des potentialités d’usage plus importantes et diversifiées
qu’auparavant. On vit l’espace plus intensément car « un processus d’expansion de l’être au
monde » s’accomplit. Dans ce nouvel état mi-virtuel, mi-réel, « le citadin accède à de
nouvelles perceptions augmentées » qui démultiplient ses capacités cognitives et sensorielles.
(Wachter, 2010 : 117). La société est qualifiée d’ubiquitaire et l’environnement de pervasif
(les objets communicants se reconnaissent et se localisent automatiquement entre eux. Les
objets interagissent entre eux sans action particulière de l'utilisateur).
Selon Wachter, les villes se dématérialisent mais « c’est plus l’individu que la ville qui
devient numérique » (Wachter, 2010 : 16). L’homme est « biométrique », il navigue sur le
web et développe de nouvelles facultés sensorielles et intellectuelles dites « augmentées ».
Dans ce contexte les TIC ont un rôle de mesure de progrès de la ville écologique, elles
ouvrent aussi la voie aux débats de société. On assiste à la naissance d’un homme nouveau, un
« homme-réseau », le nomade est un « cyborg » ou un « homme-radar », un « post-robot
hyper-intelligent ». On parle d’individus « post-humains » dotés de « facultés cognitives,
sensorielles et cérébrales démultipliant leurs capacités d’agir. »
12

Les citations de cette partie a) proviennent du livre de : Wachter (Serge). 2010. La ville interactive,
l'architecture et l'urbanisme au risque du numérique et de l'écologie. Paris : Ed. L’Harmattan

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

33
b) Smartphones et QR Codes
Pour Ornella Pavani (Pavani, 2012) le téléphone est un vecteur de culture qui ne cesse
de connaître de nouvelles modifications tout en gardant ses caractéristiques primaires.
D’après Bernard Deloche nous assistons actuellement à un phénomène d’obsolescence des
références traditionnelles qui n’expliquent pas les mutations sociales actuelles (Deloche,
2007). Le web permet de se former et de créer, parfois beaucoup plus facilement et
rapidement selon ce que l’on veut faire ou apprendre. Le téléphone peut ainsi promouvoir le
territoire via des applications comme Monument Tracker (qui sera explicité pour Arles dans le
chapitre 2 de la deuxième partie). La plupart des applications mobiles restent gratuites quand
le contenu qu’elles offrent reste proche de ce que l’on peut trouver sur internet. Ornella
Pavani montre avec justesse que les utilisateurs de Smartphones recherchent une plus-value
culturelle (Pavani, 2012) pour faire face « à une nouvelle version du fast food culturel »
(Deloche, 2007). Ainsi de plus en plus d’applications Smartphone à usage culturel se
développent pour valoriser culture, territoire, patrimoine, et quotidien d’une nouvelle ville que
l’on visite. Elle montre également que ces applications ne sont pas totalement « intégrées en
tant qu’outil de médiation, car, en effet, ses ressources ne se limitent pas à la communication
et à la transmission d’information. Son aspect pratique et son association au web lui
permettent véritablement de développer des médiations basées sur la participation,
l’expérience, de façon individuelle ou en réseau. Il est possible de personnaliser sa visite en
choisissant d’approfondir des points qui nous paraissent essentiels ou intéressants et de les
conserver. » (Pavani, 2012 : 72). Les Smartphones sont tendance et continuent leur
progression sur le marché culturel. L’utilisation de ces nouveaux outils va évoluer rapidement
dans les prochaines années.

Quant au QR Code (Quick Reponse en anglais car le contenu peut être décodé
rapidement) ou encore appelé flashcode, c’est une sorte de code-barres en 2D. Créé en 1994
par l'entreprise japonaise Denso-Wave le QR code côtoie d’autre formats de codage
d’information très prisés au Pays du Soleil Levant :
Fig 2 : les différents formats de code (de gauche à droite) : QR, Datamatrix, Shotcode, Colorzip, Maxicode

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

34
À la différence d'un code-barres classique, le code QR peut contenir beaucoup plus
d’informations : 7089 caractères numériques, 4296 caractères alphanumériques, contrairement
au code-barres normal qui ne peut stocker que de 10 à 13 caractères.13 Ils facilitent l’accès à
l’information en la condensant en un code renvoyant au contenu réel stocké en ligne et sont
utilisés dans le cadre culturel pour avoir accès à des agendas, des applications, etc.

II. LES INTERFACES MULTIMÉDIA
L’arrivée massive sur le marché des produits multimédias est en voie de modifier
profondément les modes d’accès à la connaissance. L’expression « terminaux intelligents »
(Paquel, 1993) désigne l’association de l’informatique et de l’audio et la puissance des
logiciels pour accéder au son, à l’image et aux textes. Le rapprochement d'éléments de nature
différente que permet le multimédia correspond en outre à la construction même de notre
cerveau : si le cerveau gauche est le siège de la rationalité, de l'objectivité, de la connaissance
organisée, le cerveau droit, domaine de la connaissance intuitive, laisse libre cours à la
créativité et à la subjectivité. Le multimédia favoriserait donc les liaisons entre nos deux
hémisphères cérébraux. Une connaissance enregistrée par l'hémisphère droit de notre cerveau
peut ainsi être transmise à l'hémisphère gauche sous forme de symbole et donc être identifiée
comme quelque chose de déjà connu14. La contextualisation, la mise en rapport d'éléments
divers, contribue à l'émergence du sens. Le cerveau droit, capable de saisir les structures et les
totalités, est essentiel pour comprendre le contexte (au sens littéral : « tissé avec ») et pour
détecter de nouveaux sens. Cela témoigne d’une logique combinatoire (Vieira, 1994).

2.1.

Média, multimédia, ou hypermédia : quelle notion choisir ?

Jusqu’à aujourd'hui on utilisait la notion de média pour décrire les supports
d’information utilisés pour accéder à une œuvre.
Pour Geneviève Vidal le multimédia « doit être un facilitateur d’accès. L’usager
apprécie le fait de pouvoir mener des consultations courtes et instructives, alors que le musée
demande de l’énergie, de la disponibilité et une organisation. » (Vidal, 2006 : 83). Le
multimédia, comme « compromis pour un accès à la culture », reste globalement du
divertissement et de l’information quotidienne, de fait les usagers cherchent une position de
Codes QR, définition des flashcodes et présentation : http://www.code-qr.net/definition.php
Cf. les travaux du Professeur Roger Sperry, de Los Angeles, prix Nobel de médecine en 1981, cités in Louis
Timbal-Duclaux, La communication écrite, scientifique et technique, Paris, ESF, 1990.
13
14

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

35
lecture avec peu d’intervention. C’est le plaisir d’être guidé par une technologie offrant un
pré-réfléchi, permettant de ne pas toujours être « hyperactif ». On peut ainsi alterner moment
passifs et actifs selon son humeur… on rentre dans la « logique de la productivité qui consiste
à rendre plus efficaces des gestes inscrits dans des pratiques culturelles. » L’émotion est le
moteur de la consultation multimédia car on se souvient de la sensation originale. C’est
l’interaction d’émotion : le multimédia comme trace du musée réel.
Le multimédia est un calque du système sensoriel humain : « Le concept du « toutnumérique » est simple : c'est la copie du système humain de traitement de l'information »
(Motro, 1994). Ainsi, les techniques multimédia sont des traitements simultanés de données
graphiques, textuelles, sonores, et vidéo (Carreño et Clémençot, 1993 ; Motro, 1994).
Nous pouvons distinguer deux types de multimédia (Cohen, 1997) : les Off line (hors
ligne) qui fonctionnent de manière autonome sur un équipement informatique (généralement
les consoles de jeux et les micro-ordinateurs multimédia), et les On line (en ligne) dont le
contenu informationnel est délivré à distance à un terminal par des réseaux numériques de
télécommunication (internet et d’autres opérateurs).
L’apparition des hypermédias est née de la convergence de trois filières techniques : les
télécommunications, l’audiovisuel et l’informatique. Pour Corinne Welger-Barboza, comme
ce fut le cas pour Mariano Cébrién (Cébrién, 1993), « Les hypermédia ont pour
caractéristiques principales de permettre des parcours multiples dans un ensemble de données
(textes, sons, images). Ils permettent de solliciter sur l’écran de l’ordinateur plusieurs
ensembles de données, ce que l’on appelle le multi-fenêtrage » (Welger-Barboza, 2001).
Même si à l’époque les hypermédias en question se résument à internet, la conception de
l’auteure englobe également les technologies de maintenant. Par un système de renvoi
dynamique, elles permettent aux utilisateurs de découvrir des animations et des informations.

2.2.

L’énonciation multimédia d’un propos scientifique

Pour Jean Caune la médiation culturelle est « un processus ternaire mettant en rapport
un sujet, un support d’énonciation et un espace de références » (Caune, 1999). Les interfaces
multimédia se rapprochent de cette idée à travers un « dialogue home-machine » (Vidal,
2006) où le visiteur consulte des contenus via une interface, par l’immédiateté du corps, et
dans un contexte technicisé. Jean Davallon, la même année, le décrit comme « un dispositif
pragmatique qui produit de la signification à travers une coopération entre lui et le récepteur »
(Davallon, 1999 : 199). Le multimédia trouve donc bien à son origine l’intention de produire
Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

36
du sens pour un récepteur, d’organiser le savoir par l’interconnexion de plusieurs données
sémiotiques diverses textuelles, visuelles ou encore sonores. L’hypermédia est ainsi considéré
comme « hypertexte multimédia », ou « hyperdocument multimédia ». Dans le cas des SN, le
dispositif est un fonctionnement textuel alors qu’un musée aura un fonctionnement
institutionnel.

Selon Perrot, « le multimédia dépasse les deux dimensions des panneaux et cartels
imprimés et s’affranchit de la contrainte du temps linéaire ; de la séquentialité de
l’audiovisuel. » (Perrot, 1996). Il y a trois catégories d’hypermédias dans les musées :
 Les bornes et les stations de travail : ce sont les plus simples des ressources de
documentations extérieures. Certains participent à l’animation de l’exposition en
proposant activité ou informations pratiques autour d’un thème central. D’autres
multimédias dits de présentation ont été développés spécialement pour l’exposition.
 Les installations spécifiques : ce sont des associations entre multimédia et
dispositifs mécaniques ou audiovisuels. Le contenu numérique offre la possibilité
de simulations spectaculaires.
 Les hyperguides : comme un petit ordinateur individuel, cet hypermédia est
libéré des contraintes de son emplacement fixe. Le contenu peut alors « remplacer
l’objet réel – et non sa représentation – au centre de la conception, et intégrer le
parcours signifiant du visiteur dans l’exposition. » Malheureusement c’est un
système très prometteur qui n’est pas assez exploité de nos jours.
Malgré leur complexité, les NTIC n’ont pas induit de profonds bouleversements tant du
point de vue de l'œuvre que du point de vue des relations entre le musée et le public (Le
Marec, 1998). Hélène Bourdeloie se demande alors « Ne faut-il pas plutôt considérer le
multimédia comme une technique supplémentaire qui élargit les différentes activités
proposées par le musée et offre une nouvelle forme d'accès aux contenus muséaux ? »
(Bourdeloie, 2001).
Selon Kamal, Petrie et Power de l’université de York nous pouvons dégager quatre
points concernant le visiteur face au multimédia (Othman, Petrie, Power, 2010) :
 L’engagement avec les expositions et objets exposés (cela rend également le
musée plus engagé vers les visiteurs).

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

37
 Le savoir acquis par la stimulation de penser et gagner plus de savoir : c’est
le stimulus principal des visiteurs et le résultat est décuplé avec le multimédia.
 La clarté de la présentation de l’exposition, information facile à
comprendre. Idéalement, la clarté et le savoir doivent être placés en premier pour
les expositions.
 Le sens de l’étonnement, le fun de l’exposition.

Les musées ne doivent pas être seulement le lieu où il y a seulement du savoir ou de la
diversion. Il doit aussi y avoir de l’émerveillement, de la joie, mais ceci vient de l’exposition
elle-même et n’est pas accentuée par le multimédia.

III. CONCLUSION / INSTANT CRITIQUE
Régis Debray dresse un portrait négatif de l’image dans le type de logique qu’elle
instaure est qu’elle ne peut montrer que le particulier et ignore l’universel : « Elle formera des
esprits déstructurés, dépourvus d’esprits critiques, crédules, dociles et passifs. Sans recul, ni
mémoire qui vivent intensément le moment présent » (Debray, 1999).
Jean Jacques Wunenburger nous invite quant à lui à prendre du recul sur les NTIC. Pour
lui, cette révolution numérique « nous installerait dans une routine et nous rendrait insensibles
à ce que nous percevons. Au musée les tableaux se donnent successivement au regard à
mesure que le corps du spectateur avance, tandis que, avec les nouvelles images, c’est plutôt
l’image elle-même qui intégrerait le mouvement et par là, provoquerait notre passivité. ».
Ainsi « l’image numérique entraîne une fragmentation de l’expérience esthétique qui se
réduirait à un simple rapport homme-machine. La désincarnation de la rencontre avec l’objet,
la dessensorialisation et la disparition des bruits et des sons ambiants constituent une menace
pour l’objet lui-même et à terme pour le musée. » (Wunenburger, 2000).

Notre société ne peut se passer de ces nouvelles technologies qui sont omniprésentes
tant dans notre environnement que dans nos usages : « L'homme, multimédia par nature, se
comporte différemment dans un environnement devenu lui-même multimédia. » (Motro,
1994). Pour Jean-Paul Gavard-Perret le multimédia est l'ère du simulacre : « Croire ainsi
qu'une nouvelle humanité peut naître ou renaître par l'audiovisuel multimédia n'est qu'une vue
de l'esprit. D'autant que nous sommes loin de tout sevrage, et tout se passe, à l'inverse, comme

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

38
si nous craignions qu'on nous retire notre biberon numérique. » (Gavard-Perret, 2000 : 6). Les
NTIC constituent un champ d’exploration et d’application dans le secteur culturel aussi riche
qu’inattendu parfois et ce la manière de concevoir, de proposer et d’utiliser ces technologies
doit faire en sorte de nous aider, nous amener à faire ou comprendre quelque chose, sans que
cela ne devienne indispensable à notre quotidien. Les SN sont le produit de ces réflexions sur
la ville, le patrimoine, les nouvelles technologies, etc. Nous allons voir dans le chapitre
suivant l’organisation spatiale et la structuration matérielle de cette manière de visiter.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

39
CHAPITRE 3 – LA SIGNALÉTIQUE URBAINE
COMME DISPOSITIF DE MÉDIATION

I. ÉNONCIATION, COMMUNICATION ET MÉDIATION
Le terme dispositif est né en psychanalyse en tant qu’« appareil d’énonciation » chez
Benveniste15. Louis Marin introduira quant à lui la notion de « dispositif perceptif » mais
aussi « énonciatif », « représentatif » et parfois même « narratif » comme « métaphore de
l’appareil de l’énonciation » (Marin, 1994). Éliseo Véron reprend cette idée dans son analyse
des journaux télévisés (Véron, 1981) et d’autres auteurs par la suite mettrons en avant son
côté pragmatique et de processus (Schaeffer, 1987).
Pour résumer, le dispositif c’est « des objets et des processus qui visent – prétendent – à
fonctionner comme objets et faits de langage, mais qui sont avant tout des pratiques sociales »
tout comme l’exposition (Davallon, 1999). Un dispositif est « une forme de délégation quasi
inhérente à tout objet communicationnel », c’est l’agencement technique des éléments fondés
socialement,

pris

en

charge

institutionnellement,

attestés

symboliquement,

réglés

communicationellement pour constituer un dispositif (Davallon, 1999). L’exposition est vue
comme un dispositif monstratif (au sens de Jean Davallon) et explicatif « L’exposition,
monde de langage, propose un modèle du monde réel. Cela signifie qu’elle opère une
réduction et une modélisation du monde ; celui-ci perd en réalité ce qu’il commence à gagner
en signification ». (Davallon, 1999 : 187). Doté d’une intention de communication vers le
public ou le visiteur, le dispositif est aussi médiatique car il gère une relation sociale et
s’inscrit dans un espace social. Il est un espace de rencontre entre soi et l’œuvre. Avec les SN,
le support de la tabaluz permet cette rencontre et cette médiation et de former l’opinion du
visiteur (Ibid. : 239). C’est une organisation structurée du savoir pour proposer un sens au
visiteur. Davallon rajoute d’ailleurs que « nous passons progressivement d’un dispositif
communicationnel restreint, organisé autour de la prise d’information par le visiteur et de sa
compréhension du contenu scientifique présenté, à un dispositif élargi, qui s’organise cette
fois-ci autour d’une logique de médiation des savoirs. » (Ibid. : 292). Un dispositif diffuse et
publicise les savoirs mais dans cette logique-là, il les rend aussi accessibles dans la manière

15

Cité par Davallon (Jean) in L’exposition à l’œuvre, p.23.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

40
dont le dispositif lui-même est pensé et construit, dans l’intention et la production (et dans
l’idéal recherché, la réception). Le dispositif s’élargit16 ainsi aux autres médias, c’est un
savoir social relié au quotidien ou à la science.

II. UN DISPOSITIF D’EXPÉRIENCE ET DE SAVOIR
Les dispositifs sont des moments d’expériences (Boutaud, Véron, 2007) :
 ils sont une discontinuité, une parenthèse par rapport au continuum de la vie
ordinaire
 ils permettent au sujet d’avoir une position réflexive, à la fois acteur et spectateur
de sa situation et de la transformation qu’elle opère sur lui
 ils supposent une épaisseur narrative, c’est-à-dire qu’ils assignent au sujet un rôle
en situation, se mettant en scène devant le chercheur ou devant les membres du
groupe, se laissant prendre au jeu
 ils supposent également une coloration affective favorable, c’est-à-dire que le
sujet désire avant tout partager avec d’autres son expérience ordinaire
 ils laissent une empreinte mémorielle qui fixe l’expérience (Watremez, 2009).

Jean Davallon (Ibid. : 113) décrit trois formes de muséologie :
D’objet
Caractéristiques
des différentes
formes
d’exposition

Fonctionnement
de l’institution
muséale du
point de vue de
la relation
qu’elle établit
avec le visiteur

16

Muséologie
De savoir

De point de vue

Modalité de
fonctionnement

L’objet est
rencontré par le
visiteur

Le savoir est
présenté par le
visiteur

Le visiteur
traverse un
point de vue

Type de rapport au
visiteur

Rencontre

Communication

Représentation

Unité de
présentation

Objet ou vitrine

Panneau ou
interactif

Séquence ou
exposition

Le personnage
central est…

Conservateur

Scientifique

Chef de projet

Matrice
communicationnelle

Réflexive

Transitive

Inclusive

Niveau
institutionnel
pertinent

Relation

Communication

Organisation

Jean Davallon parle de « dispositif communicationnel élargi », p295.

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

41
De plus le visiteur porte un intérêt croissant au dispositif lui-même, et non plus
seulement au savoir accessible. Dans les dispositifs multimédiaux muséaux (JacquinotDelaunay, 1999), les plaisirs et les contraintes traduisent le pouvoir des usagers, dotés d’une
culture technique. Il n’est plus seulement question de compétence de visite mais de
compétence multimédia pour ainsi dire.

III. DU DISPOSITIF DE MONSTRATION AU DISPOSITIF
D’OSTENSION
On peut donner sens à l’exposition en organisant un circuit textuel qui crée un fil
conducteur à la visite. C’est une superposition d’écrits sur l’environnement. On peut aussi
organiser l’exposition sur un texte central fondateur qui permet au visiteur de faire le lien
entre le propos et ce qu’il voit et d’exercer une activité d’interprétation. Symétrique à la
première, elle ferme le texte de l’exposition sur ce programme et s’apparente davantage à un
livre sans donner la possibilité au visiteur de naviguer dans un système ouvert. Enfin, si on
regarde l’exposition comme dispositif de monstration, on offre au visiteur la possibilité
d’explorer la visite avec ses sens et ses cognitions.
C’est cette dernière que Jean Davallon, et moi-même, allons retenir dans le cadre de
cette recherche : « l’exposition ne se contente plus seulement de montrer, elle va montrer au
visiteur ce qu’elle lui propose de faire en rendant visible et lisible sa propre organisation. On
peut dire qu’elle va se montrer montrant. Le dispositif de monstration, en attirant l’attention
sur la manière dont il montre, devient, à un second niveau, dispositif d’ostension17 »
(Davallon, 1999 : 215). Entre forme et éclairage, de nombreux moyens permettent de signifier
le dispositif des Sentiers Numériques qui, en attirant le regard sur ce qu’il est et ce qu’il
propose, devient un dispositif ostensible en plus de présenter/représenter un objet de
connaissance.

Bernard Deloche semble prendre un certain recul vis-à-vis de ces technologies, en
prônant la primauté du but du processus, affirmant « qu’importe en définitive ce que l’on
montre, car l’essentiel est de montrer » (Deloche, 2007).

De façon littérale, il s’agit de montrer ou de se montrer. En sémiologie, c’est le fait, dans une situation de
communication, de montrer une chose dont on veut parler, soit du doigt, soit autrement, mais sans l'aide du langage
(Rey Sémiot. 1979).
17

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

42
CHAPITRE 4 : PATRIMOINE ET TOURISME
CULTURELS, UNE QUESTION URBAINE

Dans le cadre de l’offre culturelle spécifique des Sentiers Numérique, nous ne pouvons
laisser de côté la question du tourisme. D’abord nommé parcours culturel et touristique il
s’intitule désormais parcours patrimoine et culture. Ce changement de l’adjectif au nom
montre avant tout la volonté de caractériser un objet (le patrimoine et la culture) mais
également que la notion de tourisme est délicate à utiliser car elle possède le sens de pratique
panurgiste qui est donc moins authentique et moins attrayante dans le cadre d’une offre
culturelle et patrimoniale.
Le tourisme est pensé comme un voyage mais il se fait la plupart du temps comme un
« déplacement de masse » organisé pour trouver des images clichées habituelles d’une
destination visée (Ceriani, Kanfou, Stock, 2003). Vendue par la publicité, l’incroyable
logistique sous-jacente demeure cachée et tout ce qui pourrait choquer est rendu invisible aux
yeux du touriste. Comme un écho a la compétence de visite, le touriste intègre ces processus
et essaye a contrario d’organiser sa propre pratique touristique : « La régularité de cette
transhumance va créer cependant un savoir et un savoir-faire, un « capital spatial », pour
paraphraser P. Bourdieu que le touriste acquiert au terme d'une certaine expérience, ce qui le
rendra méfiant à l'endroit de la consommation touristique de masse qu'il cherchera à éviter au
profit de l'auto-organisation totale ou partielle qui lui laisse une certaine autonomie dans le
choix de ces circuits et de ces rencontres. » (Ibid.).

I. UN PLÉONASME ?
Le tourisme culturel peut être considéré à l’origine comme un pléonasme (Origet de
Cluzot, 2006). En effet, jusqu’au début du XIXème siècle, il était par nature culturel et se
diversifie au XXème siècle (voyage d'agrément, voyage d'affaire, thermalisme…) grâce en
France au Front Populaire et la création des congés payés en 1936. La grande vogue du « sea,
sex and sun » apparaît dans les années soixante et aujourd’hui 75% des français profitent de
cette pratique. Le tourisme culturel devient alors une définition restreinte de la notion de
tourisme. Les années quatre-vingt sont celles d’un renouveau, un tourisme culturel et certains
Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

43
voyageurs recherchent dans les vacances de nouvelles expériences et découvertes. Le
tourisme moderne est né de trois phénomènes liés en Occident : l'augmentation de la durée du
temps hors travail, l'enrichissement massif des classes moyennes et l'affaiblissement du lien
social communautaire. Avec L'individualisation des sociétés, « le contact remplace la
rencontre » (Cazes et Courade, 2004). Claude Origet de Cluzot définit le tourisme culturel
comme une extrapolation de la visite de sites culturels, c’est un déplacement de personnes
assidues ou occasionnelles : « une pratique culturelle qui nécessite un déplacement, [d’au
moins une nuitée], ou que le déplacement va favoriser » « dont la motivation principale est
d’élargir ses horizons, de rechercher des connaissances et des émotions au travers de la
découverte d’un patrimoine et de son territoire. » (Origet de Cluzot, 2006). C’est en ce sens
qu’on parle de tourisme pratiqué.

Puisque leurs enjeux économiques se croisent au niveau du tourisme culturel, les
stratégies touristiques et culturelles marchent main dans la main. Ainsi, la culture se met
parfois au service des enjeux touristiques : l’effet d’appel qu’elle convoie peut rehausser le
potentiel d’une ville, comme ce fut le cas de Bilbao depuis l’implantation du Musée
Guggenheim. Une stratégie du tourisme culturel peut également peser sur les flux touristiques
au sein d’une région, en témoignent les expositions organisées en 1998 à La Rochelle et
Rochefort qui incitaient à se déplacer d’une exposition à l’autre et donc d’une ville à l’autre.

Josquin Barré quant à lui propose une vision plus marketing du tourisme culturel où le
touriste découvre le plaisir de voir quelque chose qui l’éloigne de son quotidien, comme une
échappatoire : « Le tourisme culturel, c’est aussi l’organisation d’une opportunité offerte à des
vacanciers auxquels on ménage la surprise, préméditée ou non, d’un moment de
contemplation inattendu, de quelques heures de spectacle, ou l’occasion de s’abstraire de leur
vie quotidienne pour se livrer à une initiation ou à la création artistique qui, parfois, suscitera
une vocation jusque-là ignorée, qui révèlera un potentiel de créativité jusqu’alors
insoupçonné. » (Barré, 1995). Le touriste culturel est un voyageur qui effectue son
déplacement pour satisfaire une curiosité d’ordre culturel (Origet de Cluzot, 2006). Il n’en
demeure pas moins que, dans l’imaginaire du tourisme culturel des publics européens, on peut
identifier certains grands axes communs de curiosité et d’attentes :


une sensibilité à « l’exotisme » et à l’identité locale (qui donne tout son sens
au déplacement),

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

44


la quête de sens de la vie ou de l’histoire à laquelle l’expérience culturelle peut
apporter des éléments de réflexion,



la curiosité alertée par certains faits tirés de l’actualité politique, sociale,
artistique (livres, films...).

Sous l’impulsion du tourisme, l’offre culturelle s’est considérablement étoffée,
renouvelée et diversifiée. Mais sa complémentarité avec les autres composantes logistiques du
voyage est difficile à assurer, même par des voyagistes de talent. De fait, l’offre du tourisme
culturel est entre les mains de professionnels dont les compétences et les objectifs sont loin
d’être harmonisés (Origet de Cluzot, 2006 : 16).

II. LA CONSTRUCTION DE LA « TOURISTICITÉ » ET L’APPEL AU
TOURISME
La touristicité se fait par les atouts patrimoniaux du pays et la qualité de l’accueil qui
sont mis en avant et transformés en images vendeuses de la destination. Ajoutons à cela la
libéralisation économique et financière de la reconversion de l’économie et de la
démocratisation de la vie politique. Beaucoup d’arguments actuels tournent autour des mots
écotourisme, ethnotourisme, aménagement durable qui permettent de valoriser un potentiel
bien protégé (Cazes et Courade, 2004).

L'activité touristique repose comme l'a écrit Cazes sur trois systèmes imbriqués : un
système d'images, un système d'espaces et un système d'acteurs (Cazes, 1992). Du point de
vue de la production des espaces, les acteurs de la mise en tourisme de la ville se heurtent à
deux séries de contradictions. Tout d'abord, dans un sens, pour une ville, être compétitive c'est
se doter des attributs normaux d'une ville, ceux qui font la réussite de toutes les autres, en ne
manquant d'aucun symbole de la modernité. Dans un autre, c'est se distinguer, posséder ou
créer l'attrait supplémentaire dont l'acteur espère qu'il déclenchera le désir de sa ville. De plus,
« le tourisme est un reflet assez fidèle de l'organisation du monde dont il révèle (au sens
photographique) les dynamismes et les déséquilibres fondamentaux. » (Cazes et Courade,
2004). La réussite dans l'économie touristique suppose surtout d'enclencher des flux de
visiteurs et de les satisfaire (Gravari-Barbas et Violier, 1998).

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

45
III. OFFRE TOURISTIQUE ET FRÉQUENTATION
Selon les experts, le tourisme culturel représenterait de 8 à 20% des parts du marché
touristique. Cependant la culture est un phénomène tellement large et complexe qu’un
inventaire des activités du tourisme culturel est très difficile : tourisme religieux,
gastronomique, viticole, incluant visite de musées, monuments, lieux patrimoniaux en
général. Cette pratique peut se faire de plusieurs manières : des circuits à thème, organisés,
pèlerinages, croisières… L’offre touristique est de plus en plus abondante et variée.
Inversement, la venue de touristes représentant une augmentation de la « demande », le
tourisme se fait facteur d’émulation culturelle. Cependant, ceci se doit d’être nuancé par la
multiplication des lieux destinés aux touristes, qui sont accusés de capter une part
conséquente des visiteurs potentiels des lieux de culture.

3.1.

Il est temps de ressemer…

Au terme d’un rapport commandité par le Conseil National du Tourisme en 1994, Alain
Monferrand met en garde quant au déséquilibre de fréquentation des lieux culturels en France.
Il considère notre offre culturelle comme désordonnée : « La France culturelle offre ainsi
l’aspect d’une véritable « jachère touristique », dont le considérable potentiel, tant en ce qui
concerne les aspects les plus traditionnels de ce patrimoine (architecture, musée, histoire) que
les plus nouveaux (thématiques, scientifiques et techniques), mérite à l’évidence un plan
systématique de mise en valeur. » (Monferrand, 1994). Les Sentiers Numériques s’inscrivent
dans ces nouvelles initiatives de narration du patrimoine, d’un accès libre à la culture et d’une
proposition culturelle innovante pour attirer, instruire, et plaire (« Une exposition réussie doit
à la fois divertir et éduquer. » Jacobi et Le Roy, 2013 : 8) à la manière d’une exposition mais
hors les murs cette fois : « L’alternative est à cet égard assez simple. Savoir raconter l’histoire
du pays aux touristes qui viennent le visiter et créer ainsi des emplois au pays, ou le laisser
progressivement se vider de ses habitants qui s’en iront ailleurs, écrire ou raconter »
(Monferrand, 1994).

Rachid Amirou met en évidence une stratégie unique et nécessaire dans le secteur du
tourisme culturel : « En termes de méthodologie d’action, il semble qu’on s’oriente vers une
démarche ternaire qui appréhende simultanément les trois impératifs légitimes qui devraient
structurer le secteur du tourisme culturel : à savoir la protection du patrimoine, sa nécessaire
démocratisation (médiation, politiques tarifaires…), et sa mise en marché en tant qu’élément

Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme

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Les Sentiers Numériques de la ville d'Arles - Mémoire Master Priscillia Galarme
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Les Sentiers Numériques de la ville d'Arles - Mémoire Master Priscillia Galarme

  • 1. LA VALORISATION HUMAINE DES DISPOSITIFS DE MÉDIATION CULTURO-TOURISTIQUES URBAINS. LE CAS DES SENTIERS NUMÉRIQUES DE LA VILLE D’ARLES : ACCROÎTRE LA VISIBILITÉ, LA COMPRÉHENSION ET LA FRÉQUENTATION PAR LE RÉSEAU HUMAIN LOCAL. Priscillia Galarme Mémoire de recherche (2ème année), UNIVERSITÉ D’AVIGNON ET DES PAYS septembre 2013 DE VAUCLUSE Master Stratégie du Développement Sous la direction de Cécile Tardy Culturel, mention Médiations de la Et le tutorat d’Éva Sandri Culture et des Patrimoines Année universitaire 2012-2013 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 1
  • 2. Afin de respecter l’environnement et votre dos, ce mémoire est imprimé recto-verso. Je vous remercie d’avance de votre compréhension et vous prie de vouloir pardonner cette lecture exhaustive et ainsi mise en page. Je souhaite ardemment reprendre la dédicace de Cécile Schall (Schall, 2010) pour sa thèse sur la médiation de l’archéologie à la télévision : la construction d’une relation au passé. « AU FOND, TOUTE NOTRE EXISTENCE, NOUS SOMMES EN QUÊTE D’UNE HISTOIRE DE NOS ORIGINES QUI NOUS DISE POURQUOI NOUS NAISSONS ET NOUS VIVONS. NOUS CHERCHONS SOIT UNE HISTOIRE COSMIQUE, L’HISTOIRE DE L’UNIVERS, SOIT NOTRE PROPRE HISTOIRE [...]. ET PARFOIS, NOUS OSONS ESPÉRER QUE NOTRE HISTOIRE PERSONNELLE COÏNCIDE AVEC CELLE DE L’UNIVERS. » UMBERTO ECO, SIX PROMENADES DANS LES BOIS DU ROMAN ET D’AILLEURS, 1994. NB : ce mémoire est une version anonyme du travail de recherche rendu en septembre 2013. Ainsi pour des raisons de confidentialité et de respect les noms des personnes interrogées ont été enlevés. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 2
  • 3. RÉSUMÉ Un nouveau dispositif de médiation urbain. Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) ont toujours été présentes pour renouveler les outils d’aide à la visite. Que ce soit pour augmenter l’expérience de visite ou reconstituer ce qui n’est plus, ces nouvelles images et ces nouveaux médias induisent des nouvelles manières de visiter et parfois des rapports différents aux objets culturels et patrimoniaux. Les Sentiers Numériques sont un dispositif innovant de visite dans la ville d’Arles : nés des évolutions technologiques, de nombreuses réflexions sur des moyens d’accéder à la culture en renouvelant le paysage urbain, notamment en matière de signalétique, ces 40 panneaux lumineux et colorés (les tabaluz) forment un parcours urbain, culturel et patrimonial d’un nouveau genre. Même si ce dispositif expérimental gagnerait à être davantage communiqué pour développer sa visibilité dans la ville, il possède en lui les clés pour devenir un projet urbain global de visite presque participatif, cohérent et fonctionnel. Il inaugure une volonté de rendre autonome et libre le visiteur en lui laissant le choix de plusieurs thématiques de visites qu’il peut agrémenter à sa guise par la visite de lieux où il se laisse guider. A new mediation and urban tool. The New Information and Communication Technologies have always been there to renew the tools that help the visit. To increase the visitor’s experience or to reconstitute what is not any more, these new images and new media induce new way of visiting and sometimes different relationships to cultural objects also related to heritage. The Digital Paths are an innovating tool to visit Arles: born from technological evolutions, numerous thoughts on the ways to access culture by renewing the urban landscape, especially when it comes to signage, these 40 luminous and coloured signs (the tabaluz) form a new kind of an urban way, cultural and related to the heritage. Even if this experimental tool would earn more with a publicity that will raise its visibility in the town, it possesses inside itself the keys to become a global urban project for visiting, nearly participating, coherent and functional. It launches a want to make the visitor free and autonomous giving him the choice of several thematic that he can brighten up as he wants with visiting places where the path would lead him. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 3
  • 4. MOTS-CLÉS DISPOSITIF. Équipement. SIGNALÉTIQUE (dynamique, lumineuse, numérique, statique.). Support médiatique. TABALUZ Circuit. Itinéraire. PARCOURS. Sentier. Connaissance. PERCEPTION. PRESCRIPTION. Usage Multimédia. Numérique. NTIC/TIC. Technologie. Applications Smartphones (Arles Tour, Arles Tracker, Rallyvisit). QR Code. Affichage. Balisage. Communication. Guidage. Affiche. Cartel. Étiquette. PANNEAU. CHARTE GRAPHIQUE. Contenu. DESIGN. Image. Information. Instantané. Avant-première. Expérimentation. INNOVATION. Unique. Balade. Cheminement. Déambulation. Hors les murs. MÉDIATION (humaine, numérique, print). Promenade. Visite. ARLES. Provence. Politique (engagement, intention, volonté), Labels (Marseille-Provence 2013, Unesco, Ville d’Art et d’Histoire). Architecture. CULTURE. Folklore. Histoire. Monuments. PATRIMOINE. TOURISME. Tradition Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 4
  • 5. ABRÉVIATIONS MP13/MP2013 : Marseille-Provence 2013 MDAA : Musée Départemental de l’Arles Antique NTIC : Nouvelles technologies de l’information et de la communication NSP : Ne sait pas / Ne Se Prononce pas = non-réponses (dans le cadre de l’analyse des entretiens, l’un ou l’autre n’a aucune incidence sur les réponses puisque dans tous les cas la personne ne s’est pas prononcée à ce sujet) OT : Office du tourisme PP : Pourquoi Pas SN : Sentiers Numériques TIC : Technologies de l’information et de la communication Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 5
  • 6. AVANT-PROPOS Je me suis toujours intéressée à la mémoire de la culture. Fortement marquée par les écrits de Henri-Pierre Jeudy, notamment La Machinerie Patrimoniale, je souhaitais voir comment pouvait s’opérer cette transmission. Ma passion pour les nouvelles technologies m’a amené à me demander ce qu’elles pourraient changer dans le secteur culturel et comment elles pourraient servir cette transmission, noble tâche souvent dévolue aux conservateurs des musées ou aux médiateurs du savoir. Nos sociétés opèrent un travail archéologique de la mémoire, une reconstruction incertaine de ce qui a été et qui suppose une destruction partielle de ce qui nous est donné à voir : « Le devenir de l’homme reste toujours pensé en référence à son passé. Il n’est pas imaginé comme ce qui n’est pas encore. » (Jeudy, 2001). Durant mes deux années de master, le projet a beaucoup évolué et s’est parfois perdu. Les fausses opportunités ont aussi fait que ce mémoire arbore cette teinte actuelle. Je suis en effet partie au deuxième semestre du M1 (janvier-juin 2012) à Manchester pour y étudier leur point de vue sur la culture et le patrimoine, et leur avenir avec les NTIC. Malheureusement les cours disponibles n’ont pas pu m’apporter de connaissances supplémentaires en la matière, et le prestigieux Centre de Muséologie de Manchester ne m’a pas été accessible. L’étude des Sentiers Numériques de la ville d’Arles s’est donc offerte à moi par le biais de Cécile Tardy qui m’a proposée de suivre le projet et de prendre la suite des enquêtes qui ont été faites à ce sujet. L’intérêt de ce terrain fut double pour moi. D’une part, il me permettait de voir une utilisation des NTIC à grande échelle et pas seulement au sein d’une institution, et d’autre part il me permettait d’expérimenter la médiation du savoir hors les murs, et même sur les murs. Le projet de départ fut d’étudier la réception du dispositif par les visiteurs, sur la continuité des travaux effectués entre autres par Jessica Cendoya sur la partie test du parcours (8 bornes étudiées en 2012 contre 40 actuellement). Cependant, la mise en place de l’enquête, plus compliquée que prévue, m’a poussée à m’intéresser davantage aux relais de la communication. J’ai ainsi interrogé les commerces, galeries, restaurants et institutions touristiques pour savoir comment se transmettait l’information jusqu’à chez eux, Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 6
  • 7. et de chez eux aux oreilles du visiteur. Même si c’eut été dommage de ne pas pouvoir avoir d’informations sur la réception et l’usage réel du dispositif, les résultats ont néanmoins été très intéressants à analyser et ont fourni des pistes d’action non-négligeables. Ce fut un projet qui m’a profondément intéressé dans son traitement particulier de l’espace urbain et du patrimoine culturel. Pour Roland Barthes dans ses Mythologies nous n’arrivons pas à dépasser une saisie instable du réel « nous voguons sans cesse entre l’objet et sa démystification, impuissants à rendre sa totalité : car si nous pénétrons l’objet, nous le libérons mais nous le détruisons ; et si nous lui laissons son poids, nous le respectons, mais nous le restituons encore mystifié. » (Barthes, 1957). Nous sommes condamnés à toujours parler excessivement du réel. Barthes nous invite à chercher une réconciliation du réel et des hommes, de la description et de l’explication, de l’objet et du savoir. Dans un sens plus global, c’est un appel à la vigilance face aux images toutes faites, aux clichés de la vie quotidienne que l’on finit par ne plus remarquer et qui pourtant guident nos comportements, nos choix. C’est une dénonciation de l’utilisation, à des fins commerciales, de l’ignorance, du manque d’esprit critique. Et dans notre société actuelle où nous sommes littéralement bombardés de messages, cette analyse des mythes de notre société nous montre que rien n’est dit au hasard et que derrière chaque message peut se trouver une déformation du sens qui légitime et naturalise des formes bourgeoises de domination sociale. Ce qui m’a avant tout intéressé dans les Sentiers Numériques, c’est cette initiative de créer une visite libre et simple de la ville, et malgré les ressorts financiers et touristiques de tout projet culturel, de regarder comment ils parlent du réel, de quelle manière, dans quel but, et vers quelles évolutions de la médiation cela peut-il conduire. Je terminerai en justifiant la quantité de travail et de rédactionnel par une intention d’exhaustivité et la volonté de saisir mon objet de la manière la plus complète possible. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 7
  • 8. REMERCIEMENTS Ce travail de recherche a été le fruit d’un travail personnel mais il n’aurait pas pu se présenter ainsi sans l’apport de toutes ces personnes qui de près ou de loin m’ont soutenue, conseillé, aidé, sans oublier bien sûr celles qui ont collaboré à ce projet. Avant tout je souhaite remercier ma directrice de mémoire, Cécile Tardy sans qui ce mémoire n’aurait pas trouvé de terrain aussi intéressant que celui-ci, et ma tutrice Éva Sandri, pour leurs conseils pertinents, pour m’avoir aidée à faire mûrir mes idées et faire évoluer mon étude, pour leur encadrement et leur disponibilité. Merci également à l’ensemble de l’équipe pédagogique du Master Stratégie du Développement Culturel sans qui certaines idées n’auraient jamais trouvé leur chemin avant tout, mais aussi pour la qualité de l’enseignement humain et théorique reçu. Je suis également reconnaissante à Émilie Prévost qui dirige actuellement le projet des Sentiers Numériques. Par sa réactivité et sa transparence, elle a pu me donner ce dont j’avais besoin pour mener à bien cette enquête. Ce lien a davantage été celui d’une collaboration puisque mon travail pourra servir à améliorer éventuellement le dispositif. J’ai été ravie de discuter avec elle et de partager sa vision de la culture et de ce média urbain d’un nouveau genre. Même si la plupart d’entre-deux ne liront sans doute pas cet écrit, je tiens vivement à remercier les personnes interrogées, ces gens qui ont voulu prendre le temps de discuter autour d’un projet novateur, qui ont partagé leurs idées, qui ont su être honnêtes et critiquer de façon positive autant que négative ce projet. Sans eux, la construction de cette connaissance sur le parcours urbain n’aurait été possible. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 8
  • 9. Je souhaite adresser également ma plus profonde gratitude aux personnes qui m’ont soutenue, aidé et conseillé pendant ce marathon de fin d’études. À Anne-Séverine Labre et Marie-Claire Galarme pour leur soutien et leur aide pour les retranscriptions et la relecture du « manuscrit ». À tous mes amis qui ont été là pour me changer les idées, me conseiller, me questionner sur ma démarche pour qu’accouchent en moi les principes d’une maïeutique plutôt réussie… Pour leur présence d’esprit et leur humanité, depuis le début et pendant ce mémoire. Et enfin, un immense merci à mon compagnon, Frédéric Baron, pour qui la foi inébranlable en mon travail a été une énergie fabuleuse qui m’a poussée à surpasser la fatigue et les doutes. Son investissement dans les retranscriptions et observations, la pertinence de ses retours lors de nos discussions interminables sur le sujet, sa douceur et sa fermeté quand le mémoire n’avance pas, et sa conviction quant à l’issue de cette étude m’ont été d’une aide inestimable et prolifique. Pour sa précieuse compagnie et son amour, je lui dédie ce travail, cette recherche, ces réflexions. À vous tous, un immense merci de m’avoir, à votre rythme et votre manière, permis de réaliser ce mémoire ! Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 9
  • 10. SOMMAIRE RÉSUMÉ MOTS-CLÉS ABRÉVIATIONS AVANT-PROPOS REMERCIEMENTS 3 4 5 6 8 INTRODUCTION 14 PREMIÈRE PARTIE – ETAT DE L’ART : VERS DES NOUVEAUX MODES DE MÉDIATION URBAINE ? 18 CHAPITRE 1 – LA MARCHE DU PATRIMOINE VERS LES NTIC I. Un patrimoine en danger ? La migration des usages culturels 20 21 1.1. Vers un zapping culturel 1.2. Les politiques culturelles : de la culture à la mémoire 1.3. Une considération de la mémoire urbaine II. La volonté de donner le relai au numérique 2.1. Exposer au musée : de la vitrine à la médiation 2.2. Le visiteur, « interacteur » ou « hyperacteur » ? 2.3. Évolution des usages et révolution numérique relative CHAPITRE 2 – MÉDIATION ET USAGES NUMÉRIQUES I. Les initiatives du numérique : monstration et usage 1.1. L’émergence de nouvelles formes via les TIC a) Les « services numériques culturels innovants » b) Le « développement de la culture scientifique » 1.2. L’utilisation du numérique pour reconstituer le passé 1.3. Des pratiques culturelles digitales a) « L’homo-mobilis » de la ville numérique b) Smartphones et QR Codes II. Les interfaces multimédia 2.1. Média, multimédia, ou hypermédia : quelle notion choisir ? 2.2. L’énonciation multimédia d’un propos scientifique III. Conclusion / Instant critique CHAPITRE 3 – LA SIGNALÉTIQUE URBAINE COMME DISPOSITIF DE MÉDIATION I. Énonciation, communication et médiation II. Un dispositif d’expérience et de savoir III. Du dispositif de monstration au dispositif d’ostension CHAPITRE 4 : PATRIMOINE ET TOURISME CULTURELS, UNE QUESTION URBAINE I. Un pléonasme ? Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 21 22 23 24 24 26 27 29 29 29 30 31 32 33 33 34 35 35 36 38 40 40 41 42 43 43 10
  • 11. II. La construction de la « touristicité » et l’appel au tourisme 45 III. Offre touristique et fréquentation 46 3.1. Il est temps de ressemer… 3.2. Les derniers chiffres de 2013 46 47 IV. Le tourisme jugé : La théorie du sight-seeing 4.1. Visiter pour voir des images des objets réels de contemplation 4.2. Le bétail touristique 4.3. L'homme passif et aliéné face au capitalisme CHAPITRE 5 – LA NOTION DE PARCOURS I. Circuit, sentier, et parcours II. Des villes et des rues : entre utilitarisme du passage et redécouverte de la vie urbaine 47 47 48 48 51 51 52 CONCLUSION – POUR EN FINIR SUR LA THÉORIE… 53 DEUXIÈME PARTIE : MÉTHODOLOGIE MISE EN PLACE 54 I. Trois temps pour comprendre et analyser les SN 55 II. Analyse du discours : revirement de situation 55 2.1. Des visiteurs aux relais d’information 2.2. La définition de l’échantillon 55 59 a) Marketing et prescription b) Le réseau arlésien III. Une poétique de l’entretien 3.1. L’entretien semi-directif : envisager l'homme et la société 3.2. Au carrefour des registres d’interrogation du public IV. Résultats précédents et hypothèses de recherche 4.1. Rappel des résultats de l’enquête de Jessica Cendoya 4.2. Hypothèses de recherche V. Méthodologie d’analyse des entretiens 59 60 61 61 62 63 63 64 65 TROISIÈME PARTIE : COMMUNICATION, CONCURRENCE, ET EXPERTISE FORMELLE DU DISPOSITIF 66 CHAPITRE 1 – REMISE EN SITUATION I. Un contexte florissant et volontariste 68 68 1.1. La genèse des sentiers : mouvements et innovation 1.2. Un terrain étudié depuis sa conception jusqu’à son implantation II. Le stade actuel du parcours 2.1. Ce qui a changé depuis la dernière enquête III. Tableau récapitulatif des tabaluz CHAPITRE 2 – L’ANALYSE DU PARCOURS I. Une ville labellisée 1.1. Arles, Ville d’art et d’histoire 1.2. Marseille-Provence 2013 1.3. Le patrimoine mondial de l’UNESCO II. L’offre touristique d’Arles 2.1. Quelques chiffres a) En 2000 : le patrimoine comme but Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 68 69 69 69 71 76 76 76 77 78 78 78 78 11
  • 12. b) En 2007 : la primauté des Arènes. 2.2. L’implantation des SN parmi l’offre touristique a) Le découpage de la ville en quartiers b) L’extension du parcours actuel c) Les circuits piétonniers existants, une volonté qui s’efface dans la ville CHAPITRE 3 – LA TABALUZ, UN OBJET TECHNIQUE 79 80 80 83 83 I. Un dispositif contraint entre lumière et couleur 86 86 II. La discrétion urbaine du dispositif 90 CHAPITRE 4 – LA TABALUZ, UN ÉCRIT SPÉCIFIQUE VISUEL I. Les étiquettes des musées 1.1. Le signalement de l’objet 1.2. Un média exposition 1.3. Formes et rédaction II. La signalétique patrimoniale 2.1. Un juste milieu entre visibilité et discrétion 2.2. La visite d’un parcours a) La compétence de visite b) Choix et rythmes c) Les contraintes de l’espace 94 94 94 95 97 99 101 102 102 102 103 III. Le panneau d’information 104 IV. Un dispositif graphique 107 4.1. 4.2. 4.3. 4.4. Typographie de la tabaluz La grille de conception graphique Les couleurs Les pictogrammes 107 108 111 111 CONCLUSION, LES TABALUZ, ENTRE INDÉPENDANCE ET CONTINUITÉ 113 QUATRIÈME PARTIE : CONNAISSANCE ET RECOMMANDATION DU DISPOSITIF 114 CHAPITRE 1 – ÉCHANTILLON ET MISE EN ANALYSE I. Comment lire les tableaux ? 115 115 II. La couleur des interviewés 115 CHAPITRE 2 – LA CONNAISSANCE GÉNÉRALE DU PROJET I. Typologies des entretiens 118 118 II. Le niveau de connaissance des SN 2.1. Le profil « expert / spécialiste » 2.2. Le profil « Connaisseur / informé » 2.3. Le profil « Non-connaisseur / novice » 119 120 121 122 III. Le mot « tabaluz » 125 IV. Le circuit emprunté par les SN 125 CHAPITRE 3 – LA PERCEPTION DES SENTIERS NUMÉRIQUES I. Le projet, une nouvelle façon de visiter la ville 1.1. 1.2. 1.3. 1.4. II. L’essentiel arlésien La technologie au service de l’urbain Une manière ludique d’apprendre pour les enfants Un manque de communication L’utilisation potentielle du dispositif par les arlésiens Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 127 127 127 129 130 131 131 12
  • 13. a) b) c) d) Désintérêt des locaux pour ce qui est fait pour les touristes Le détournement de l’intérêt et de la pratique Une pratique d’apprentissage déjà établie Arlésiens pure souche et curieux III. L’environnement de la tabaluz 3.1. Une bonne implantation des SN 3.2. Lisible pour les enfants, la bonne hauteur 3.1. La dualité de la tabaluz : visibilité et discrétion a) Une visibilité qui oscille entre discrétion et ostentation b) La couleur c) Un attrape-œil CHAPITRE 4 – UTILISATION ET PRESCRIPTION D’UN DISPOSITIF D’AIDE À LA VISITE 132 133 134 135 136 136 138 139 139 141 143 I. Une faible pratique du parcours complet 145 145 II. Une visite de la ville à recommander 146 CHAPITRE 5 – CONCLUSION ET REMISE EN QUESTION I. Vers un bonus de visite, entre redondance et renouvellement II. Inadéquation et contraste positif III. L’avenir des SN 148 148 149 150 CONCLUSION GÉNÉRALE 151 BIBIOGRAPHIE RAISONNÉE I. Muséographie, art et culture 156 156 II. Ville, tourisme et Arles 157 III. NTIC, culture numérique et multimédia 159 IV. Dispositifs et parcours 162 V. 162 Méthodologie et entretiens RÉFÉRENCES LECTURES COMPLÉMENTAIRES Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 165 168 13
  • 14. INTRODUCTION Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 14
  • 15. Depuis quelques années déjà le numérique est vu comme un moteur de création pour aider les musées et institutions de la culture à trouver de nouveaux anges d’approche pour faire découvrir et aimer, instruire et expliquer. Des musées vitrine aux dispositifs actuels, beaucoup de réflexions ont été lancées et certaines ont abouti à des outils performants permettant de renouveler l’expérience du visiteur et de lui proposer de nouveaux moyens d’accéder au savoir mais également au loisir, au plaisir des yeux et des sens. Parfois même, ces dispositifs semblent tendre vers un effacement de l’humain, comme si la machine pouvait nous donner des choses que ce que les médiateurs pourraient nous offrir. Cette dualité entre évolutions technologiques et besoin de l’humain ou peur de vouloir le remplacer par un revêtement technique et un cœur de circuits est au cœur des débats sur les NTIC, qu’elles soient dans le secteur culturel ou non d’ailleurs. Les Sentiers Numériques font partie de ces nouveaux projets innovants mêlant technologies et intentions de médiation, utiliser les potentialités techniques pour offrir de nouvelles choses au visiteur, à voir et à utiliser. Ce mémoire a voulu être le plus exhaustif possible sur le contexte de création de ce projet et ce qui sous-tend son image : des musées multimédia aux dispositifs hors les murs en passant par la communication des SN, cet écrit contextualise l’arrivé de ce média dans le monde urbain arlésien. La ville, qui a toujours tenté d’innover en matière de culture, ne seraitce pour des raisons de ressorts économiques, s’est drapée cette année de nombreux projets culturels innovants et ludiques. La première partie aborde ainsi toute la partie théorique autour des concepts de nouvelles technologies, de parcours et de signalétique, mais aussi de tourisme culturel. Il s’agit de délimiter et l’état de l’art autour des SN et de comprendre en quoi les NTIC peuvent-elles favoriser la médiatisation et la médiation d’un patrimoine culturel via la mise en place d’un parcours numérique urbain dans la ville d’Arles ? En avantpremière dans la ville, le dispositif est encore peu connu par les touristes et la population locale. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 15
  • 16. Ce qui nous a intéressé c’est de voir comment il était possible de percevoir ce terrain de façon globale et complète, mais surtout d’étudier les SN du point de vue de leur communication et de ce qui se transmet ou non in situ. La deuxième partie aborde ainsi l’aspect métrologique mis en place et explicite la démarche entreprise pour englober les SN. La troisième partie est la mise en place de cette méthodologie de compréhension de l’objet d’étude. Un premier temps a cerné l’existant à savoir les spécificités et caractéristiques du parcours afin de déceler des comportements spécifiques induits par l’implantation du dispositif. Un deuxième temps s’est ensuite attaché à analyser la communication des SN pour savoir ce qui se disait, à quel niveau, par quels biais, pour ensuite opérer des rapprochements avec les discours (qui sera la quatrième partie). Il s’agissait de voir sur quels principes de conception et de communication repose le dispositif des SN de la ville d’Arles. Quant à la quatrième et dernière partie, il s’agit de l’interrogation des commerces et boutiques de la ville, et de toutes les entités situées à proximité du parcours qui avaient la possibilité d’en parler et de devenir des relais d’information. En partant du constant que les commercent présentent des flyers sur leurs comptoirs, on peut imaginer la place réservée à un flyer des SN, présentant le projet brièvement et donnant à voir le plan du parcours. Il s’agissait de saisir la perception et la connaissance des relais d’information de la ville, comme base à une utilisation réussie par les visiteurs. Ces données furent aussi complétées par un volet utilisation et prescription de ce derniers pour voir comment on peut mobiliser les ressources humaines dans un projet urbain, faire participer la population pour faire des SN un projet urbain total incluant les murs et les voix, les rhodoïds et les présentoirs. La problématique de cette dernière partie était de découvrir la perception et la connaissance, l’utilisation et la prescription des SN par les infrastructures culturo-touristiques et commerciales de la ville d’Arles. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 16
  • 17. Ce mémoire s’organise ainsi en quatre grandes parties correspondant à quatre problématiques qui ont alimenté ma réflexion et structuré ma recherche : Partie 1 2 3 4 Champ Théorique Problématique - Quel état de l’art autour des SN - Les NTIC peuvent-elles favoriser la médiatisation et la médiation d’un patrimoine culturel via la mise en place d’un parcours numérique urbain dans la ville d’Arles ? - Comment saisir de manière globale les SN ? - Comment étudier les SN du Méthodologique point de vue de leur communication et de ce qui se transmet ou non in situ ? Analytique Sur quels principes de conception et de communication repose le dispositif des SN de la ville d’Arles ? Terrain Structure Conceptualisation et théorie : - NTIC - Parcours - Dispositif - Tourisme - Urbain Segmentation de l’objet étudié par une remise en contexte du projet et une analyse de l’existant (communication et parcours) Analyse : - Contexte de création - Parcours existant - Communication Quelle est la perception et la connaissance, l’utilisation et la prescription des SN par les infrastructures culturo-touristiques et commerciales de la ville d’Arles ? Interrogation et analyse - Entretiens - Analyse individuelle - Analyse croisée Cette démarche progressive a permis de comprendre de manière progressive le côté technologique d’un dispositif assez simple en apparence ; de comprendre quelle fut mon approche pour étudier les Sentiers Numériques ; quel est ce fameux parcours sur lequel je me suis penchée, qu’est-ce qui le caractérise et quelle est son identité médiatique et communiquée ; et enfin quelle est la connaissance et la perception des infrastructures locales sur cet objet : le comprennent-ils, sont-ils prêts à être acteur de sa communication, l’utilisentils et finalement, le conseillent-ils aux visiteurs ? Je vous souhaite une agréable lecture ! Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 17
  • 18. PREMIÈRE PARTIE – ETAT DE L’ART : VERS DES NOUVEAUX MODES DE MÉDIATION URBAINE ? Les NTIC peuvent-elles favoriser la médiatisation et la médiation d’un patrimoine culturel via la mise en place d’un parcours numérique urbain dans la ville d’Arles ? Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 18
  • 19. Le projet des Sentiers Numériques (SN) est un dispositif unique en son genre. Il pose entre autre la question de savoir comment les nouvelles technologies vont pouvoir changer un parcours culturel via une signalétique urbaine. Au cœur des initiatives culturelles depuis quelques années, les innovations techniques et les avancées technologiques ont permis à de nombreux projets innovants de naître, certains continuant encore à s’améliorer car au stade de la conception et de la réflexion. Dans cette partie nous allons analyser les concepts de nouvelles technologies pour savoir ce qui se cache concrètement et techniquement derrière ce terme, et en quoi les Sentiers Numériques disposent d’une telle innovation technique. Ensuite, nous verrons la notion de parcours depuis son emploi pour des circuits davantage muséaux avant de regarder ce qui se passe au niveau urbain. Il s’agit de voir en quoi le terrain étudié peut être considéré comme parcours et en quoi il en diffère. Également la notion de signalétique urbaine sera abordée selon plusieurs angles comme celui des étiquettes, des cartels ou encore des panneaux. Et enfin, le côté touristique de la culture sera abordé. Tous ces concepts permettent de comprendre dans quel contexte s’insèrent les SN de la Ville d’Arles et m’ont permis de m’interroger sur le circuit de plusieurs manières :  En quoi les SN font partie des nouvelles technologies puisqu’ils ne disposent au niveau numérique que de la présence d’un QR Code sur chaque tabaluz et d’un rétroéclairage coloré ?  Comment considérer les SN comme un parcours alors que les tabaluz sont conçues comme des bornes d’informations indépendantes les unes des autres ?  Comment qualifier les tabaluz : borne, panneau, affichage, signalétique urbaine ? Sous quel concept peut-on regrouper tous ces adjectifs et comment analyser un objet nouveau pour en comprendre le fonctionnement, l’usage et la réception ?  Comment considérer le côté touristique du parcours alors qu’il est nommé culturel et patrimonial ? C’est au travers de ces chapitres que chacun de ces concepts et thématiques seront abordés. Nous verrons que les NTIC ont permis l’avènement de dispositifs qui croisent technique et médiation et que les SN sont un dispositif particulier mis en scène dans la ville selon un parcours défini. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 19
  • 20. CHAPITRE 1 – LA MARCHE DU PATRIMOINE VERS LES NTIC « LES NOUVELLES TECHNOLOGIES OFFRENT DE NOUVELLES VOIES POUR L'EXPRESSION DE CETTE DÉMOCRATIE. TOUTEFOIS, DEUX MENACES GUETTENT : D'UNE PART, L'INÉGALITÉ DES CITOYENS FACE AU NUMÉRIQUE, CE QUE L'ON APPELLE LA FRACTURE NUMÉRIQUE ; ET, D'AUTRE PART, LE RISQUE LIÉ À L'UTILISATION DE DONNÉES PUBLIQUES, CE QUE L'ON APPELLE L'OPEN DATA. », DAVID LACOMBLED Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), anciennement Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) sont issues de la convergence de l'informatique, des télécommunications et de l'audiovisuel. Depuis que nous sommes entrés dans la société de l’information ou Galaxie Marconi (McLuhan, 1962), elles n’ont cessé d’être utilisées pour rendre le savoir accessible aux visiteurs et de développer de nouveaux moyens de se l’approprier, entre autre de façon ludique ou interactive : « Les musées recourent de plus en plus aux dernières innovations informatiques pour informer les visiteurs de manière ludo-éducative. » (Breakwell et Bernier, 1998 : 3). Les Sentiers Numériques ont entre autres ceci d’intéressant de lier patrimoine et technologie, culture et numérique, mais aussi visite et urbain, parcours et signalétique. C’est un sentier de bornes d’informations, les tabaluz, qui forment un réseau de balades thématiques pour vivre autrement Arles, rendre la ville plus accueillante, mieux se repérer et comprendre ce qu’il se passe à Arles, ce qu’est son patrimoine et son histoire. Pour comprendre le contexte de recherche et d’innovation de ce terrain qui sera expliqué plus en détail dans la deuxième partie, nous allons nous pencher sur l’évolution et la croissance des technologies dans le secteur culturel, et plus précisément au musée. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 20
  • 21. I. UN PATRIMOINE EN DANGER ? LA MIGRATION DES USAGES CULTURELS Le patrimoine signifie littéralement en latin « l’héritage du père ». D’abord legs familial, il fut ensuite cantonné à la conservation de monuments et d’objets mobiliers, puis recouvre actuellement de nombreuses formes dont neuf ont été officialisées mais auxquelles nous pourrions sans doute rajouter littéraire, cinématographique, culinaire, ou encore vestimentaire : archéologique, monumental, urbain, rural, parcs et jardins, industriel, maritime, ethnologique, et photographique. (Service pédagogique Château Guillaume le Conquérant, fiche enseignant « La notion de patrimoine »). 1.1. Vers un zapping culturel Roland Recht en 1999 se posait déjà la question de savoir quoi faire de notre patrimoine, de son utilité. Ce n’est plus seulement une mémoire collective qui se construit, il est aussi question de savoir ce que cela nous apporte subjectivement. Même si le patrimoine constitue une part de notre histoire et donc est intrinsèquement ce qui nous constitue aujourd'hui, il est menacé de zapping (Recht, 1999). Peut-être en avons-nous assez de regarder ce qui nous a transformé, façonné… les œuvres ne sont plus que des collections, des objets de musée à regarder, une certaine culture à connaître et non plus une sorte d’hommage à ces témoins du passé. L’aura du patrimoine se farde d’une obligation de mémoire, un impératif de fréquentation qui ne semble plus naturel et que nous voyons avec les yeux du marketing, de la consommation, du loisir. Le patrimoine en tant que témoin du passé semble être devenu un patrimoine de loisir, un patrimoine simplement touristique qui oscille sans cesse entre les différents sens que nous lui octroyons. Il faut donc opérer un rééquilibrage, « ce n’est pas d’un public pléthorique que le patrimoine a besoin, mais d’un nombre régulièrement croissant d’individus attentifs, curieux, motivés, qui considèrent que les monuments et les musées sont nécessaires à la vie de l’esprit. » (Recht, 1994). Mais il ne semble pas aisé de séparer patrimoine et mémoire collective, patrimoine et consommation culturelle… La société moderne se trouve dans un cercle vicieux entre conservation et évolution, oubli et stagnation. Pour l’instant une piste : renforcer les pôles patrimoniaux par l’éducation et un apprentissage du regard. Ne plus se pencher sur l’institution patrimoniale, mais sur les utilisateurs de cette dernière. Même si les nouvelles technologies apportent avec elles des espoirs de médiation numérique plus autonome et Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 21
  • 22. interactive, c’est l’éducation et la communication vers le visiteur qui porte en elle la possibilité d’une réelle démocratisation et d’une appropriation par le visiteur. C’est ainsi que l’on a vu les politique culturelles se renforcer dans les années quatrevingt-dix notamment. 1.2. Les politiques culturelles : de la culture à la mémoire La politique culturelle est liée à la consolidation nationale (Poirrier, 2011). Après la guerre, les nations ont commencé à lier recherche et action, démarche déjà adoptée par d’autres institutions telles que le Conseil de l’Europe ou l’Unesco. C’est notamment dans ce contexte que fut créé en France en 1989 l’Observatoire des politiques culturelles1. Nous sommes dans l’ère de l’Interculturalité, définie par Jean-Pierre Saez comme la « juxtaposition de différentes cultures et du processus d’échange, de transfert entre des cultures coprésentes » (Saez J.P, 2004). C’est le projet politique d’organiser le dialogue entre diverses cultures présentes sur un espace public et de promouvoir une conception de la culture qui fasse honneur à l’idée de sa pluralité. Depuis le Musée Imaginaire de Malraux2 et de sa conception multiculturaliste de l’art, la France a toujours revendiqué la compréhension et le dialogue des cultures. Les institutions et organismes agissent de concert avec le Ministère de la Culture pour favoriser des dispositifs ou des projets d’intervention prenant en compte l’interculturel, particulièrement dans le cadre de la politique de la ville. Cependant l’immigration reste un point sensible. Nous n’en sommes pas encore à une dynamique politique culturelle propre, mais elle puise ses racines dans ce processus. Ainsi certaines collectivités osent soutenir des formes de mise en valeur des cultures immigrées dans le cadre de leurs politiques culturelles et socio-culturelles. Les musées quant à eux tentent d’intégrer les mémoires immigrées dans la mémoire nationale, richesse patrimoniale participant à l’identité territoriale. C’est ce travail d’intégration des mémoires dans une mémoire collective qui est intéressante. Halbwachs a définit la mémoire comme « une reconstruction du passé faite en fonction du présent du groupe » (Halbwachs, 1950). C’est ce que nous tentons de Il se définit actuellement comme « un organisme national dont la mission est d'accompagner la décentralisation et la déconcentration des politiques culturelles, la réflexion sur le développement et l'aménagement culturel du territoire mais aussi sur les dynamiques artistiques et culturelles, à travers des actions de formation, d'études, de conseil et d'information. » 2 André Malraux : « J'appelle Musée Imaginaire la totalité de ce que les gens peuvent connaître aujourd'hui même en n'étant pas dans un musée, c'est-à-dire ce qu'ils connaissent par la reproduction, ce qu'ils connaissent par les bibliothèques, etc. » in Le musée imaginaire, 1996. 1 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 22
  • 23. faire aujourd'hui, avec la complexité de notre société et de notre culture, une reconstruction d’un rapport avec la culture et notre patrimoine. À ce propos, Jean Caune remarquait trois formes de médiation dans la politique culturelle : la forme im-médiate de contact avec les œuvres (communion avec les grandes œuvres de l’esprit), l’art comme facteur d’engagement personnel et collectif (transformation du monde et progrès social), et la communication culturelle et la médiation s’opère par la médiatisation des objets de culture (Caune, 1999). Pour l’auteur, c'est par l'expérience sensible des formes, qui fonde la médiation esthétique, que nous pouvons comprendre les choses et penser le monde. Nous pouvons récapituler ainsi : Orientation de l’État en matière de politique culturelle Années 60 70 80 90 (début 21°s) État esthétique État culturel État séducteur État partenaire Mode de médiation privilégié Conception de l’art privilégiée Par contact Par l’expression Par la médiatisation de l’art Par l’éducation et la sensibilisation Art comme mimesis Art comme agon Art comme vertige Art comme système de signes L’État se rend acteur de la culture et de son accès, on peut ainsi parler de médiation (Caillet, 1995) pour défendre des politiques culturelles soucieuses de réparer la fracture sociale, mais le mot devient alibi si on reste enfermé dans des démarches de consommation des biens culturels. 1.3. Une considération de la mémoire urbaine Toujours lié à la notion de souvenir, Jean-Pierre Saez analyse l’espace urbain comme un terrain d’affirmation identitaire, il est une mémoire vivante qu’aujourd'hui nous tentons de sauvegarder (J.P Saez, 2001). Avant la ville n’était qu’un outil que l’on pouvait détruire pour reconstruire de nouvelles choses, notamment après la guerre3. Le tissu urbain n’est pas conçu comme un monument en soi, peut être détruit pour dégager des perspectives autour des monuments dignes d’intérêt (Choay & Merlin, 1988). Mais dans les années soixante-dix les murs sont vus comme des témoins à sauvegarder comme le quartier du Vieux Lyon sauvé de la destruction par sa mise en patrimonialisation et devenu patrimoine mondial de l’Unesco en 1998. La patrimonialisation est désormais un angle des politiques culturelles et les vieux Hausmann, contemporain de Mérimée justifie la destruction des vieux quartiers de Paris par le besoin de salubrité et de modernisation. 3 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 23
  • 24. bâtiments autrefois détruits sont aujourd'hui réutilisés pour faire parler leur histoire en présentant des collections, qu’elles soient nouvelles ou appartenant au passé (J.P Saez, 2001). L’intérêt est que les habitants reconnaissent les objets patrimoniaux qui leur sont proches en les inscrivant dans des logiques d'usages qui s'accordent mal de la patrimonialisation institutionnelle (Rautenberg, 2003). Faut-il donc renouveler le lien que les habitants entretiennent avec leur patrimoine ? Doit-on changer de point de vue concernant nos politiques culturelles ? Ces questions ne sont pas nouvelles et ont donné lieu au rapport commandité par le Ministère de la Culture et de la Communication Culture & médias 2030, réalisé pour répondre aux questions stratégiques de l’avenir de la culture et des médias, et de la politique culturelle de l’État, à un moment marqué par l’impact de la révolution numérique sur l’offre et les pratiques, un tournant dans le processus de globalisation et de profondes transformations sociales. Le rapport annonce l’hypothèse d’une accélération du changement culturel, incluant la possibilité d’un changement de paradigme culturel, une très profonde transformation de la culture au cours des prochaines décennies, une rupture. Cette dernière a déjà été annoncée par Guy Saez (J.P Saez, 2001) : actuellement les villes connaissent des ruptures dues à la mondialisation. L’espace urbain et la morphologie des villes deviennent extraordinairement désordonnés car l’excès de capacités culturelles provoque un désordre culturel. C’est une tendance de notre société de connaître une explosion des formes et une volonté d’affirmation de soi. Ces deux tendances font naître de nouvelles initiatives qui essayent d’opérer un équilibrage qui soit le plus juste possible et le plus intéressant en matière de création et de médiation. II. LA VOLONTÉ DE DONNER LE RELAI AU NUMÉRIQUE 2.1. Exposer au musée : de la vitrine à la médiation Il y a environ une trentaine d’années, le monde de la culture a commencé à se parer des nouvelles technologies pour conserver le patrimoine et le rendre davantage accessible, ou du moins d’une autre manière. La définition apportée au musée est multiple et repose souvent sur ses missions4. Nous retiendrons celle du Conseil International des Musées (ICOM) qui le L'UNESCO lui en reconnaît cinq : « l'identification, la protection, la conservation, la mise en valeur et la transmission aux générations futures du patrimoine culturel », la Direction des Musées de France en énumère les sept vertus : « inventorier, conserver, décrire, classer, communiquer, exhiber et enrichir. » 4 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 24
  • 25. perçoit comme « une institution au service de la société qui acquiert, conserve, communique, et présente à des fins d'accroissement du savoir, de sauvegarde et de développement du patrimoine, d'éducation et de culture, des biens représentatifs de l'homme. » Jusque dans les années soixante-dix, les musées se présentaient comme des « vitrines » et ont commencé à mettre un premier pas dans l’animation. Alors que l’exposition ne proposait « qu’un espace de rencontre » (Verhaegen, 2010) avec les objets, nous sommes progressivement passés d’une médiation formelle du savoir à un mode plus technologique de médiation via l’image et la vidéo dans les années quatre-vingt. Rendre davantage accessible le savoir au public, lui permettre de découvrir la culture sous l’angle interactif de nouveaux supports technologiques, telles étaient les nouvelles idées de cette époque où l’on commence sérieusement à étudier les technologies audiovisuelles et leurs langage spécifiques : texte, image, et son. C’est aussi la décennie où les premières bornes interactives prenaient place dans certains musées et où l’on intégrait les objets dans la construction d’une idée et d’un message à faire passer : « ce dispositif audio-scripto-visuel est essentiellement transmissif : il s’agit de communiquer au mieux un savoir en exploitant les capacités synergiques de différents médias » (Verhaegen, 2010). Comme le décrit Jean Davallon, cette muséologie est partagée entre la relation d’éducation informelle et les pratiques de communication : « elle est prise entre l’école et la publicité, si l’on peut dire » (Davallon, 1992). À la naissance des services pédagogiques se joint peu à peu les préoccupations des chercheurs Info-Com sur trois plans : la focalisation sur les processus cognitifs, le développement des TIC et l’essor muséal. Dans les années quatre-vingt-dix, la mise en forme médiatique des connaissances occupe toujours une position centrale : les nouveaux modes d’appropriation intellectuelle se font par la combinaison particulière des discours et des médias : « la communication est comprise alors comme un acte où les sujets participent à la co-construction du sens » (Davallon, 1992). On a parlé de visiteur « inter-acteur » (Vidal, 2006) : « L’acte créatif n’est pas réalisé par l’artiste seul ; le spectateur met l’œuvre en contact avec le monde extérieur en déchiffrant et en interprétant ses caractéristiques internes et ajoute ainsi sa contribution à l’acte créatif. »5 (Duchamp, 1957). Phrase prononcée par Marcel Duchamp au Session on the Creative Act, Convention of The American Federation Of Arts, Houston, Texas, Avril 1957. 5 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 25
  • 26. 2.2. Le visiteur, « interacteur » ou « hyperacteur » ? Dès 1997, Jean Davallon parlait d’un « visiteur-expert » possédant des compétences sur le média (Davallon, 1997). À cette époque, cette dernière s’apparentait à la maîtrise des codes d’écriture de l’exposition, mais aujourd'hui le visiteur s’approprie directement les outils multimédia destinés à la visite, soit parce qu’il les connait ou les possède (Ipad, IPhone), soit parce que son utilisation intuitive est proche des outils qu’il utilise quotidiennement ou occasionnellement. Hélène Bourdeloie le rejoint en 2001 en insistant sur les potentialités des médias dans l’acquisition du savoir : « l’usager ne peut plus être appréhendé comme passif : ce dernier construit son usage en fonction des possibilités et des contraintes de l'outil ou du service utilisés. […] Ainsi, cette diffusion culturelle qu'est le multimédia de musée met en jeu un rapport singulier : les potentialités de la technique permettent de s'approprier autrement l'œuvre, de personnaliser son parcours par la possibilité que les usagers ont de naviguer à leur guise dans le contenu » (Bourdeloie, 2001). Le visiteur a donc un pouvoir (Vidal, 2006) puisqu’il collabore à la construction du sens avec le musée (Russo, Watkins, Kelly et Chan, 2008). Geneviève Vidal utilise le terme « hyperacteur » car avec les nouvelles technologies le visiteur a un pouvoir et un savoir : il dispose d’« une culture technique se confirme et enrichit les savoir-faire informatiques dans l’ensemble des activités de communication et d’information. Cette culture technique se fond de plus en plus désormais avec la culture des réseaux » (Vidal, 2006). On passe de la médiatisation à la médiation culturelle au sens d’ensemble d’actions qui visent à réduire l’écart entre l’œuvre, l’objet d’art ou de culture, et les publics et les populations : « La question du médiateur n’est plus « Comment transmettre un savoir ? » mais bien « Quel dispositif sémio-technique mettre en place pour favoriser la co-construction de ce savoir ? » (Beillerot, 2000 : 3). Et c’est le développement des TIC qui aura permis l’essor de tels dispositifs. Depuis, cette initiative est devenu le fer de lance du développement culturel. Le numérique est un média d’avenir et les projets croissants qui gravitent autour sont un moyen d’accompagner la transition vers une société usant tant que possible de ces médias intelligents pour communiquer, transmettre, faire découvrir et aimer, faire interagir le public avec une œuvre… La sociabilité est omniprésente et l’apprentissage social. À l’inverse des médias traditionnels (journaux, radios, télévisions), ces nouveaux médias font de l’exposition « un véritable lieu d’expérimentation corporelle » où « c’est le visiteur qui, en passant d’un objet ou d’un lieu à un autre, va s’efforcer de comparer ceux-ci, de les confronter, d’établir le lien — de similarité, de causalité, de sérialité... — qui les unit, bref de les comprendre (au Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 26
  • 27. sens étymologique du terme) » (Beillerot, 2000 : 5). L’exposition est ainsi vue comme un « dispositifs de médiation corporelle du savoir » qui lui permet d’occuper une place prépondérante dans les réflexions sur la médiation des savoirs (Ibid.). 2.3. Évolution des usages et révolution numérique relative On navigue désormais dans une culture de « l’écrit-d’écran » (Souchier, Jeanneret, Le Marec, 2003). Depuis l’informatisation de la société dans les années quatre-vingt, les foyers sont de plus en plus équipés en informatique. On a souvent vu les années deux-mille/deuxmille dix comme une transition vers le numérique et parfois le tout-numérique et selon l’étude d’Olivier Donnat sur les pratiques culturelles des français à l’ère du numérique, la culture d’écran est montée en puissance (Donnat, 2010). Avec la dématérialisation des contenus, la généralisation de l’internet à haut débit, et le progrès de l’équipement des ménages, les appareils sont devenus nomades et multifonctionnels en moins de dix ans, au croisement de la culture, de l’Entertainment et de la communication interpersonnelle. Cette évolution a définitivement consacré les écrans comme support privilégié de nos rapports à la culture : tout est désormais potentiellement visualisable sur un écran et accessible par l’intermédiaire de l’internet, ce nouveau média à tout faire diffusé rapidement. Cependant, l’enquête fait ressortir un point clé en matière de révolution numérique : elle est relative. Si elle a radicalement modifié les conditions d’accès à une grande partie des contenus culturels et déstabilisé les équilibres économiques dans les secteurs des industries culturelles et des médias, elle n’a pas bouleversé la structure générale des pratiques culturelles ni, surtout, infléchi les tendances d’évolution de la fin du siècle dernier. La société française est vue comme l’addition de quatre générations qui entretiennent des liens différents avec la technologie (Donnat, 2010). La génération née avant la Seconde Guerre mondiale qui est celle du livre et des premières télévisions. La génération des baby-boomers qui témoigne de la culture juvénile centrée sur la musique des années 1960. Elle a connu l’ouverture du système scolaire et le développement des industries culturelles. La génération des 30-40 ans a connu la massification de l’accès à l’enseignement supérieur, la diversification de l’offre culturelle. C’est la génération du second âge des médias : radios, télévisions privées, multiéquipement, programmes en continu, etc. Et enfin, la génération des moins de 30 ans est celle du troisième âge médiatique qui a grandi au milieu des téléviseurs, ordinateurs, consoles de jeux et autres Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 27
  • 28. écrans dans un contexte marqué par la dématérialisation des contenus et la généralisation de l’internet à haut débit. Ce mélange des générations explique en partie le décalage actuel entre des générations avides de numériques et d’autres qui sont restées dans un monde où ces usages n’existaient pas encore. Ce constat explique aussi la difficulté de cette période transitoire où les anciennes générations éprouvent souvent des difficultés à se mettre au numérique et à la technologie. Cette constatation est relayée par le Ministère de la Culture et de la Communication sur l’accès aux technologies de l’information6. Il y a quelques années, la catégorie « Smartphone » n’existait pas encore, et en 2012, la proportion de personnes y ayant accès est relativement importante. Fig 1 : l’accès aux technologies de l’information 6 Ministère de la Culture et de la Communication. 2013. Chiffres clés : financement de la culture Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 28
  • 29. CHAPITRE 2 – MÉDIATION ET USAGES NUMÉRIQUES « LE TEMPS EST CAUSE PAR SOI DE DESTRUCTION PLUTÔT QUE DE GÉNÉRATION », ARISTOTE I. LES INITIATIVES DU NUMÉRIQUE : MONSTRATION ET USAGE 1.1. L’émergence de nouvelles formes via les TIC « Il ne fait guère de doute, pour les sciences de l’information et de la communication, que l’évolution des techniques joue un rôle structurant, mais non exclusif, dans la production et l’échange des connaissances », ainsi débute le 6ème colloque international du chapitre français de l’ISKO organisé en 2007 (Davallon, Jeanneret, Tardy, 2007). Les technologies permettent ainsi de générer des expériences artistiques pour que l’intention puisse être perçue par les visiteurs (Transforming Culture In The Digital Age, 2010 : 197), rôle des technologies multimédia déjà analysé par Kit Messham-Muir l’année précédente (Messham-Muir, 2006). Certaines institutions, conscientes de ces opportunités et enjeux, ont porté des projets ambitieux et innovants :  Bordeaux 3D ou B3D Bordeaux XVIIIème est un parcours historique multimédia et interactif en réalité augmentée mobile dans le cœur historique de Bordeaux. Il transporte le visiteur dans un voyage dans le temps, accompagné par les personnages célèbres de la ville. Il a été mis en service au printemps 2012.  Le projet européen CHESS Experience (Cultural Heritage Experiences through Socio-personal interactions and Storytelling) a pour but de rechercher et développer des solutions pour aider les institutions culturelles à rendre leur héritage plus engageant, et plus spécifiquement pour les jeunes générations du « Boom numérique » (« Digital Natives »). Il intègre des recherches interdisciplinaires dans la personnalisation et Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 29
  • 30. l’adaptation, la narration numérique, les méthodologies de l’interaction et les nouvelles technologies mixant la réalité. a) Les « services numériques culturels innovants » L’État reste le financeur principal des projets numériques, même si sa participation varie selon les institutions et les projets et qu’elle s’amenuise chaque année, elle est néanmoins toujours présente. Le Ministère de la Culture et de la Communication considère que « l’émergence de nouvelles formes d’innovation, de médiation et d’accès à la culture se développent via l’usage croissant des technologies de l’information et de la communication. En donnant des possibilités nouvelles en termes de création, de production, de diffusion et d'accès aux biens et aux services culturels, ainsi qu'une proximité plus grande entre le créateur et son public, les technologies numériques modifient la chaîne de valeur, l'équilibre économique des industries culturelles et l'accès à la culture numérique » (Appel à projets « Culture numérique »). Edmond Couchot annonçait il y a plus de 20 ans « Nous assistons à l'émergence d'un nouvel ordre visuel » (Couchot, 1988). Adapté à notre époque, il s’agit des nouvelles possibilités offertes par la production d’images dynamiques, d’images propres à l’action et à l’intervention. Il a également lancé toujours via le Ministère de la Culture et de la Communication en novembre 2011 un appel à projet « services numériques culturels innovants ». Doté d’1,5 millions d’euros, de dispositif permet « l’émergence de nouvelles formes d'innovation tirées par les usages et les services » et favorise la création de partenariats entres les acteurs culturels. Sur 220 candidats, 60 ont été retenus dans l’ensemble des champs culturels (cinéma, danse, arts numériques, livre, théâtre, patrimoine muséographique, archivistique, ethnographique, linguistique, etc.) pour expérimenter les technologies innovantes appliquées à la culture : technologies NFC7, QR Codes, et réalité augmentée pour découvrir des œuvres et visiter « territoires alliant tourisme, culture et patrimoine » (Appel à projets « Culture numérique »). La technologie NFC (Near Field Communication) est un mode spécifique de transmission sans fil de données à très courte portée ( quelques centimètres ), développé dans le cadre d’une famille de technologies plus vaste, la radioidentification (RFID). Pour en savoir plus : http://www.transportintelligent.net/technologies/transmission/article/la-technologie-nfc-near-field 7 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 30
  • 31. Parmi les 60 projets finaux, on peut noter la forte implication de la ville d’Arles via ces trois idées novatrices concrétisées en 2013 :  Vol de nuit (sans effraction) du Museon Arlaten : visite via une caméra embarquée sur un drone, télécommandé depuis l'espace public alors que l'exposition est fermée à la visite la nuit  La web TV des rencontres d'Arles  Les Sentiers numériques : « média urbain citoyen », dispositif de balisage lumineux et d’affichage d’informations dynamiques pour des parcours thématiques dans la ville d'Arles b) Le « développement de la culture scientifique » De nombreux autres projets qui ont trait au numérique se développent pour proposer un accès au savoir et aux œuvres. L’appel à projets « Développement de la culture scientifique, technique et industrielle et l’égalité des chances »8 a été lancé en 2010 pour diffuser la culture scientifique et technique, et accroître l'accès pour les publics défavorisés. L'Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine bénéficiait de 50 millions d'euros pour sélectionner 12 projets dont deux vont vous être présentés. ESTIM (Egalite d’accès aux Sciences, aux Technologies, à l’Innovation et au Multimédia)9 est un projet global, porté par Universcience en partenariat avec 51 acteurs de la culture, de l’éducation, de la recherche, de l’industrie et des médias pour développer un portail numérique de la culture scientifique, technique et industrielle. Inmédiats (Innovation pour la Médiation dans les Territoires)10 est un projet interrégional mené par le regroupement de six centres de sciences dont l’objectif est de promouvoir l’égalité des chances dans l’accès à la culture technique et scientifique par le biais du numérique, et il regroupe une dizaine de projets qui se répartissent selon trois axes de développement :  Création de contenus et services innovants : offrir un accès à des ressources via des services numériques collaboratifs, construire un ensemble de contenus innovants permettant de toucher de nouvelles cibles et de suivre l’utilisation des publics (lien physique/virtuel, serious game, interaction avec les réseaux sociaux, etc.) Ministère de la Culture et de la communication : douze projets soutenus pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle et pour l'égalité des chances. 9 ESTIM : http://www.universcience.fr/cs/Satellite?blobcol=urldata&blobheader=application%2Fpdf&blobkey=id&blobtable =MungoBlobs&blobwhere=1195517702023&ssbinary=true 10 Inmédiats : http://inmediats.fr/ 8 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 31
  • 32.  Mise en place de nouveaux lieux de rencontre avec les publics via l’élaboration de nouveaux types de ressources et d’interfaces numériques (réalité augmentée, 3D, etc.)  Évaluation, diffusion, et formalisation de l’ensemble des dispositifs et innovations. 1.2. L’utilisation du numérique pour reconstituer le passé Les innovations et les évolutions technologiques, nous venons de le voir, ont toujours eu leur place au sein des musées, en particulier dans les musées de sciences. Les institutions culturelles suivent de près ces évolutions et proposent parfois des projets innovants et ambitieux. Au lieu de n’être qu’une simple présence, les NTIC sont désormais un moteur, un noyau (avec les objets) autour duquel la proposition du musée se fait. Prenons l’exemple de la réalité augmentée ou de la 3D, sans aller plus loin dans l’explication car ce n’est pas le propos de ce mémoire. Se voit à travers ces technologies l’opportunité de re-créer des choses qui ne sont plus : « Immersion visuelle et interaction intuitive avec l’environnement sont les maîtres mots de la réalité augmentée. Entre virtuel et réel, elle permet de superposer en temps réel, un modèle virtuel 3D ou 2D à la perception que nous avons naturellement de la réalité. Un cadre parfait donc, pour développer des applications culturelles et patrimoniales interactives. Reconstitution de monuments historiques, voyage dans un cadre historique ou artistique, visite de lieux inaccessibles ou d’une autre époque … [la réalité augmentée nous fait] vivre ou revivre notre patrimoine. » (La Fabrique BNSA, 2011). Selon le site WebEvangelists.net, la Réalité Augmentée (RA) désigne toutes les interactions, rendues possibles par des applications, entre des éléments réels et des éléments virtuels. Au lieu de proposer une autre réalité, la RA se greffe à cette dernière pour ajouter du contenu, solliciter tous nos sens, elle « va accroître nos capacités à agir en complétant notre expérience du réel. » Certaines institutions jouent double carte tel le Palais des Papes à Avignon qui propose des commentaires multimédia synthétiques et des commentaires muséographiques plus approfondis : « le visiteur dispose ainsi d’une double lecture : il peut choisir en fonction des thèmes, mais aussi de ses dispositions et de ses centres d’intérêt, le support de médiation le plus adapté »11. 11 Le Palais des Papes, une visite ludique et interactive : http://www.palais-des-papes.com/fr/content/visite-ludique Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 32
  • 33. 1.3. Des pratiques culturelles digitales L’utilisation des NTIC fait émerger le concept de culture numérique qui regroupe nombre de recherches et notions, notamment la participation, l’interaction et le changement des rôles de l’utilisateur : on observe l’émergence d’une culture plus participante (Jenkins, 2006 ; Benkler, 2007 ; Manovich, 2007). Les rôles des utilisateurs sont hybrides, on parle de « produser » (contraction en anglais de producteur et utilisateur). Les pratiques culturelles digitales, qui se placent désormais sous le triple concept de « singularité, expressivité et remixabilité » renvoient à un geste d’appropriation de contenu à des fins expressives (Allard, 2009). Elles montrent également que ce qui se noue dans cette appropriation, c’est une singularisation de la pratique de la visite et également la construction « d’une mémoire de spectateurs » (Éthis, 2007). a) « L’homo-mobilis » de la ville numérique12 Depuis Descartes on pourrait dire « Je suis connecté donc je suis » (Wachter, 2010). L’individu type de la ville numérique est nomade, il est connecté en permanence au cours de ses déplacements, le mouvement n’est donc pas signe de déconnexion ici. On parle d’« homomobilis » muni de prothèses communicantes. La perception de l’individu devient augmentée : la ville et les espaces offrent des potentialités d’usage plus importantes et diversifiées qu’auparavant. On vit l’espace plus intensément car « un processus d’expansion de l’être au monde » s’accomplit. Dans ce nouvel état mi-virtuel, mi-réel, « le citadin accède à de nouvelles perceptions augmentées » qui démultiplient ses capacités cognitives et sensorielles. (Wachter, 2010 : 117). La société est qualifiée d’ubiquitaire et l’environnement de pervasif (les objets communicants se reconnaissent et se localisent automatiquement entre eux. Les objets interagissent entre eux sans action particulière de l'utilisateur). Selon Wachter, les villes se dématérialisent mais « c’est plus l’individu que la ville qui devient numérique » (Wachter, 2010 : 16). L’homme est « biométrique », il navigue sur le web et développe de nouvelles facultés sensorielles et intellectuelles dites « augmentées ». Dans ce contexte les TIC ont un rôle de mesure de progrès de la ville écologique, elles ouvrent aussi la voie aux débats de société. On assiste à la naissance d’un homme nouveau, un « homme-réseau », le nomade est un « cyborg » ou un « homme-radar », un « post-robot hyper-intelligent ». On parle d’individus « post-humains » dotés de « facultés cognitives, sensorielles et cérébrales démultipliant leurs capacités d’agir. » 12 Les citations de cette partie a) proviennent du livre de : Wachter (Serge). 2010. La ville interactive, l'architecture et l'urbanisme au risque du numérique et de l'écologie. Paris : Ed. L’Harmattan Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 33
  • 34. b) Smartphones et QR Codes Pour Ornella Pavani (Pavani, 2012) le téléphone est un vecteur de culture qui ne cesse de connaître de nouvelles modifications tout en gardant ses caractéristiques primaires. D’après Bernard Deloche nous assistons actuellement à un phénomène d’obsolescence des références traditionnelles qui n’expliquent pas les mutations sociales actuelles (Deloche, 2007). Le web permet de se former et de créer, parfois beaucoup plus facilement et rapidement selon ce que l’on veut faire ou apprendre. Le téléphone peut ainsi promouvoir le territoire via des applications comme Monument Tracker (qui sera explicité pour Arles dans le chapitre 2 de la deuxième partie). La plupart des applications mobiles restent gratuites quand le contenu qu’elles offrent reste proche de ce que l’on peut trouver sur internet. Ornella Pavani montre avec justesse que les utilisateurs de Smartphones recherchent une plus-value culturelle (Pavani, 2012) pour faire face « à une nouvelle version du fast food culturel » (Deloche, 2007). Ainsi de plus en plus d’applications Smartphone à usage culturel se développent pour valoriser culture, territoire, patrimoine, et quotidien d’une nouvelle ville que l’on visite. Elle montre également que ces applications ne sont pas totalement « intégrées en tant qu’outil de médiation, car, en effet, ses ressources ne se limitent pas à la communication et à la transmission d’information. Son aspect pratique et son association au web lui permettent véritablement de développer des médiations basées sur la participation, l’expérience, de façon individuelle ou en réseau. Il est possible de personnaliser sa visite en choisissant d’approfondir des points qui nous paraissent essentiels ou intéressants et de les conserver. » (Pavani, 2012 : 72). Les Smartphones sont tendance et continuent leur progression sur le marché culturel. L’utilisation de ces nouveaux outils va évoluer rapidement dans les prochaines années. Quant au QR Code (Quick Reponse en anglais car le contenu peut être décodé rapidement) ou encore appelé flashcode, c’est une sorte de code-barres en 2D. Créé en 1994 par l'entreprise japonaise Denso-Wave le QR code côtoie d’autre formats de codage d’information très prisés au Pays du Soleil Levant : Fig 2 : les différents formats de code (de gauche à droite) : QR, Datamatrix, Shotcode, Colorzip, Maxicode Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 34
  • 35. À la différence d'un code-barres classique, le code QR peut contenir beaucoup plus d’informations : 7089 caractères numériques, 4296 caractères alphanumériques, contrairement au code-barres normal qui ne peut stocker que de 10 à 13 caractères.13 Ils facilitent l’accès à l’information en la condensant en un code renvoyant au contenu réel stocké en ligne et sont utilisés dans le cadre culturel pour avoir accès à des agendas, des applications, etc. II. LES INTERFACES MULTIMÉDIA L’arrivée massive sur le marché des produits multimédias est en voie de modifier profondément les modes d’accès à la connaissance. L’expression « terminaux intelligents » (Paquel, 1993) désigne l’association de l’informatique et de l’audio et la puissance des logiciels pour accéder au son, à l’image et aux textes. Le rapprochement d'éléments de nature différente que permet le multimédia correspond en outre à la construction même de notre cerveau : si le cerveau gauche est le siège de la rationalité, de l'objectivité, de la connaissance organisée, le cerveau droit, domaine de la connaissance intuitive, laisse libre cours à la créativité et à la subjectivité. Le multimédia favoriserait donc les liaisons entre nos deux hémisphères cérébraux. Une connaissance enregistrée par l'hémisphère droit de notre cerveau peut ainsi être transmise à l'hémisphère gauche sous forme de symbole et donc être identifiée comme quelque chose de déjà connu14. La contextualisation, la mise en rapport d'éléments divers, contribue à l'émergence du sens. Le cerveau droit, capable de saisir les structures et les totalités, est essentiel pour comprendre le contexte (au sens littéral : « tissé avec ») et pour détecter de nouveaux sens. Cela témoigne d’une logique combinatoire (Vieira, 1994). 2.1. Média, multimédia, ou hypermédia : quelle notion choisir ? Jusqu’à aujourd'hui on utilisait la notion de média pour décrire les supports d’information utilisés pour accéder à une œuvre. Pour Geneviève Vidal le multimédia « doit être un facilitateur d’accès. L’usager apprécie le fait de pouvoir mener des consultations courtes et instructives, alors que le musée demande de l’énergie, de la disponibilité et une organisation. » (Vidal, 2006 : 83). Le multimédia, comme « compromis pour un accès à la culture », reste globalement du divertissement et de l’information quotidienne, de fait les usagers cherchent une position de Codes QR, définition des flashcodes et présentation : http://www.code-qr.net/definition.php Cf. les travaux du Professeur Roger Sperry, de Los Angeles, prix Nobel de médecine en 1981, cités in Louis Timbal-Duclaux, La communication écrite, scientifique et technique, Paris, ESF, 1990. 13 14 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 35
  • 36. lecture avec peu d’intervention. C’est le plaisir d’être guidé par une technologie offrant un pré-réfléchi, permettant de ne pas toujours être « hyperactif ». On peut ainsi alterner moment passifs et actifs selon son humeur… on rentre dans la « logique de la productivité qui consiste à rendre plus efficaces des gestes inscrits dans des pratiques culturelles. » L’émotion est le moteur de la consultation multimédia car on se souvient de la sensation originale. C’est l’interaction d’émotion : le multimédia comme trace du musée réel. Le multimédia est un calque du système sensoriel humain : « Le concept du « toutnumérique » est simple : c'est la copie du système humain de traitement de l'information » (Motro, 1994). Ainsi, les techniques multimédia sont des traitements simultanés de données graphiques, textuelles, sonores, et vidéo (Carreño et Clémençot, 1993 ; Motro, 1994). Nous pouvons distinguer deux types de multimédia (Cohen, 1997) : les Off line (hors ligne) qui fonctionnent de manière autonome sur un équipement informatique (généralement les consoles de jeux et les micro-ordinateurs multimédia), et les On line (en ligne) dont le contenu informationnel est délivré à distance à un terminal par des réseaux numériques de télécommunication (internet et d’autres opérateurs). L’apparition des hypermédias est née de la convergence de trois filières techniques : les télécommunications, l’audiovisuel et l’informatique. Pour Corinne Welger-Barboza, comme ce fut le cas pour Mariano Cébrién (Cébrién, 1993), « Les hypermédia ont pour caractéristiques principales de permettre des parcours multiples dans un ensemble de données (textes, sons, images). Ils permettent de solliciter sur l’écran de l’ordinateur plusieurs ensembles de données, ce que l’on appelle le multi-fenêtrage » (Welger-Barboza, 2001). Même si à l’époque les hypermédias en question se résument à internet, la conception de l’auteure englobe également les technologies de maintenant. Par un système de renvoi dynamique, elles permettent aux utilisateurs de découvrir des animations et des informations. 2.2. L’énonciation multimédia d’un propos scientifique Pour Jean Caune la médiation culturelle est « un processus ternaire mettant en rapport un sujet, un support d’énonciation et un espace de références » (Caune, 1999). Les interfaces multimédia se rapprochent de cette idée à travers un « dialogue home-machine » (Vidal, 2006) où le visiteur consulte des contenus via une interface, par l’immédiateté du corps, et dans un contexte technicisé. Jean Davallon, la même année, le décrit comme « un dispositif pragmatique qui produit de la signification à travers une coopération entre lui et le récepteur » (Davallon, 1999 : 199). Le multimédia trouve donc bien à son origine l’intention de produire Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 36
  • 37. du sens pour un récepteur, d’organiser le savoir par l’interconnexion de plusieurs données sémiotiques diverses textuelles, visuelles ou encore sonores. L’hypermédia est ainsi considéré comme « hypertexte multimédia », ou « hyperdocument multimédia ». Dans le cas des SN, le dispositif est un fonctionnement textuel alors qu’un musée aura un fonctionnement institutionnel. Selon Perrot, « le multimédia dépasse les deux dimensions des panneaux et cartels imprimés et s’affranchit de la contrainte du temps linéaire ; de la séquentialité de l’audiovisuel. » (Perrot, 1996). Il y a trois catégories d’hypermédias dans les musées :  Les bornes et les stations de travail : ce sont les plus simples des ressources de documentations extérieures. Certains participent à l’animation de l’exposition en proposant activité ou informations pratiques autour d’un thème central. D’autres multimédias dits de présentation ont été développés spécialement pour l’exposition.  Les installations spécifiques : ce sont des associations entre multimédia et dispositifs mécaniques ou audiovisuels. Le contenu numérique offre la possibilité de simulations spectaculaires.  Les hyperguides : comme un petit ordinateur individuel, cet hypermédia est libéré des contraintes de son emplacement fixe. Le contenu peut alors « remplacer l’objet réel – et non sa représentation – au centre de la conception, et intégrer le parcours signifiant du visiteur dans l’exposition. » Malheureusement c’est un système très prometteur qui n’est pas assez exploité de nos jours. Malgré leur complexité, les NTIC n’ont pas induit de profonds bouleversements tant du point de vue de l'œuvre que du point de vue des relations entre le musée et le public (Le Marec, 1998). Hélène Bourdeloie se demande alors « Ne faut-il pas plutôt considérer le multimédia comme une technique supplémentaire qui élargit les différentes activités proposées par le musée et offre une nouvelle forme d'accès aux contenus muséaux ? » (Bourdeloie, 2001). Selon Kamal, Petrie et Power de l’université de York nous pouvons dégager quatre points concernant le visiteur face au multimédia (Othman, Petrie, Power, 2010) :  L’engagement avec les expositions et objets exposés (cela rend également le musée plus engagé vers les visiteurs). Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 37
  • 38.  Le savoir acquis par la stimulation de penser et gagner plus de savoir : c’est le stimulus principal des visiteurs et le résultat est décuplé avec le multimédia.  La clarté de la présentation de l’exposition, information facile à comprendre. Idéalement, la clarté et le savoir doivent être placés en premier pour les expositions.  Le sens de l’étonnement, le fun de l’exposition. Les musées ne doivent pas être seulement le lieu où il y a seulement du savoir ou de la diversion. Il doit aussi y avoir de l’émerveillement, de la joie, mais ceci vient de l’exposition elle-même et n’est pas accentuée par le multimédia. III. CONCLUSION / INSTANT CRITIQUE Régis Debray dresse un portrait négatif de l’image dans le type de logique qu’elle instaure est qu’elle ne peut montrer que le particulier et ignore l’universel : « Elle formera des esprits déstructurés, dépourvus d’esprits critiques, crédules, dociles et passifs. Sans recul, ni mémoire qui vivent intensément le moment présent » (Debray, 1999). Jean Jacques Wunenburger nous invite quant à lui à prendre du recul sur les NTIC. Pour lui, cette révolution numérique « nous installerait dans une routine et nous rendrait insensibles à ce que nous percevons. Au musée les tableaux se donnent successivement au regard à mesure que le corps du spectateur avance, tandis que, avec les nouvelles images, c’est plutôt l’image elle-même qui intégrerait le mouvement et par là, provoquerait notre passivité. ». Ainsi « l’image numérique entraîne une fragmentation de l’expérience esthétique qui se réduirait à un simple rapport homme-machine. La désincarnation de la rencontre avec l’objet, la dessensorialisation et la disparition des bruits et des sons ambiants constituent une menace pour l’objet lui-même et à terme pour le musée. » (Wunenburger, 2000). Notre société ne peut se passer de ces nouvelles technologies qui sont omniprésentes tant dans notre environnement que dans nos usages : « L'homme, multimédia par nature, se comporte différemment dans un environnement devenu lui-même multimédia. » (Motro, 1994). Pour Jean-Paul Gavard-Perret le multimédia est l'ère du simulacre : « Croire ainsi qu'une nouvelle humanité peut naître ou renaître par l'audiovisuel multimédia n'est qu'une vue de l'esprit. D'autant que nous sommes loin de tout sevrage, et tout se passe, à l'inverse, comme Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 38
  • 39. si nous craignions qu'on nous retire notre biberon numérique. » (Gavard-Perret, 2000 : 6). Les NTIC constituent un champ d’exploration et d’application dans le secteur culturel aussi riche qu’inattendu parfois et ce la manière de concevoir, de proposer et d’utiliser ces technologies doit faire en sorte de nous aider, nous amener à faire ou comprendre quelque chose, sans que cela ne devienne indispensable à notre quotidien. Les SN sont le produit de ces réflexions sur la ville, le patrimoine, les nouvelles technologies, etc. Nous allons voir dans le chapitre suivant l’organisation spatiale et la structuration matérielle de cette manière de visiter. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 39
  • 40. CHAPITRE 3 – LA SIGNALÉTIQUE URBAINE COMME DISPOSITIF DE MÉDIATION I. ÉNONCIATION, COMMUNICATION ET MÉDIATION Le terme dispositif est né en psychanalyse en tant qu’« appareil d’énonciation » chez Benveniste15. Louis Marin introduira quant à lui la notion de « dispositif perceptif » mais aussi « énonciatif », « représentatif » et parfois même « narratif » comme « métaphore de l’appareil de l’énonciation » (Marin, 1994). Éliseo Véron reprend cette idée dans son analyse des journaux télévisés (Véron, 1981) et d’autres auteurs par la suite mettrons en avant son côté pragmatique et de processus (Schaeffer, 1987). Pour résumer, le dispositif c’est « des objets et des processus qui visent – prétendent – à fonctionner comme objets et faits de langage, mais qui sont avant tout des pratiques sociales » tout comme l’exposition (Davallon, 1999). Un dispositif est « une forme de délégation quasi inhérente à tout objet communicationnel », c’est l’agencement technique des éléments fondés socialement, pris en charge institutionnellement, attestés symboliquement, réglés communicationellement pour constituer un dispositif (Davallon, 1999). L’exposition est vue comme un dispositif monstratif (au sens de Jean Davallon) et explicatif « L’exposition, monde de langage, propose un modèle du monde réel. Cela signifie qu’elle opère une réduction et une modélisation du monde ; celui-ci perd en réalité ce qu’il commence à gagner en signification ». (Davallon, 1999 : 187). Doté d’une intention de communication vers le public ou le visiteur, le dispositif est aussi médiatique car il gère une relation sociale et s’inscrit dans un espace social. Il est un espace de rencontre entre soi et l’œuvre. Avec les SN, le support de la tabaluz permet cette rencontre et cette médiation et de former l’opinion du visiteur (Ibid. : 239). C’est une organisation structurée du savoir pour proposer un sens au visiteur. Davallon rajoute d’ailleurs que « nous passons progressivement d’un dispositif communicationnel restreint, organisé autour de la prise d’information par le visiteur et de sa compréhension du contenu scientifique présenté, à un dispositif élargi, qui s’organise cette fois-ci autour d’une logique de médiation des savoirs. » (Ibid. : 292). Un dispositif diffuse et publicise les savoirs mais dans cette logique-là, il les rend aussi accessibles dans la manière 15 Cité par Davallon (Jean) in L’exposition à l’œuvre, p.23. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 40
  • 41. dont le dispositif lui-même est pensé et construit, dans l’intention et la production (et dans l’idéal recherché, la réception). Le dispositif s’élargit16 ainsi aux autres médias, c’est un savoir social relié au quotidien ou à la science. II. UN DISPOSITIF D’EXPÉRIENCE ET DE SAVOIR Les dispositifs sont des moments d’expériences (Boutaud, Véron, 2007) :  ils sont une discontinuité, une parenthèse par rapport au continuum de la vie ordinaire  ils permettent au sujet d’avoir une position réflexive, à la fois acteur et spectateur de sa situation et de la transformation qu’elle opère sur lui  ils supposent une épaisseur narrative, c’est-à-dire qu’ils assignent au sujet un rôle en situation, se mettant en scène devant le chercheur ou devant les membres du groupe, se laissant prendre au jeu  ils supposent également une coloration affective favorable, c’est-à-dire que le sujet désire avant tout partager avec d’autres son expérience ordinaire  ils laissent une empreinte mémorielle qui fixe l’expérience (Watremez, 2009). Jean Davallon (Ibid. : 113) décrit trois formes de muséologie : D’objet Caractéristiques des différentes formes d’exposition Fonctionnement de l’institution muséale du point de vue de la relation qu’elle établit avec le visiteur 16 Muséologie De savoir De point de vue Modalité de fonctionnement L’objet est rencontré par le visiteur Le savoir est présenté par le visiteur Le visiteur traverse un point de vue Type de rapport au visiteur Rencontre Communication Représentation Unité de présentation Objet ou vitrine Panneau ou interactif Séquence ou exposition Le personnage central est… Conservateur Scientifique Chef de projet Matrice communicationnelle Réflexive Transitive Inclusive Niveau institutionnel pertinent Relation Communication Organisation Jean Davallon parle de « dispositif communicationnel élargi », p295. Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 41
  • 42. De plus le visiteur porte un intérêt croissant au dispositif lui-même, et non plus seulement au savoir accessible. Dans les dispositifs multimédiaux muséaux (JacquinotDelaunay, 1999), les plaisirs et les contraintes traduisent le pouvoir des usagers, dotés d’une culture technique. Il n’est plus seulement question de compétence de visite mais de compétence multimédia pour ainsi dire. III. DU DISPOSITIF DE MONSTRATION AU DISPOSITIF D’OSTENSION On peut donner sens à l’exposition en organisant un circuit textuel qui crée un fil conducteur à la visite. C’est une superposition d’écrits sur l’environnement. On peut aussi organiser l’exposition sur un texte central fondateur qui permet au visiteur de faire le lien entre le propos et ce qu’il voit et d’exercer une activité d’interprétation. Symétrique à la première, elle ferme le texte de l’exposition sur ce programme et s’apparente davantage à un livre sans donner la possibilité au visiteur de naviguer dans un système ouvert. Enfin, si on regarde l’exposition comme dispositif de monstration, on offre au visiteur la possibilité d’explorer la visite avec ses sens et ses cognitions. C’est cette dernière que Jean Davallon, et moi-même, allons retenir dans le cadre de cette recherche : « l’exposition ne se contente plus seulement de montrer, elle va montrer au visiteur ce qu’elle lui propose de faire en rendant visible et lisible sa propre organisation. On peut dire qu’elle va se montrer montrant. Le dispositif de monstration, en attirant l’attention sur la manière dont il montre, devient, à un second niveau, dispositif d’ostension17 » (Davallon, 1999 : 215). Entre forme et éclairage, de nombreux moyens permettent de signifier le dispositif des Sentiers Numériques qui, en attirant le regard sur ce qu’il est et ce qu’il propose, devient un dispositif ostensible en plus de présenter/représenter un objet de connaissance. Bernard Deloche semble prendre un certain recul vis-à-vis de ces technologies, en prônant la primauté du but du processus, affirmant « qu’importe en définitive ce que l’on montre, car l’essentiel est de montrer » (Deloche, 2007). De façon littérale, il s’agit de montrer ou de se montrer. En sémiologie, c’est le fait, dans une situation de communication, de montrer une chose dont on veut parler, soit du doigt, soit autrement, mais sans l'aide du langage (Rey Sémiot. 1979). 17 Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 42
  • 43. CHAPITRE 4 : PATRIMOINE ET TOURISME CULTURELS, UNE QUESTION URBAINE Dans le cadre de l’offre culturelle spécifique des Sentiers Numérique, nous ne pouvons laisser de côté la question du tourisme. D’abord nommé parcours culturel et touristique il s’intitule désormais parcours patrimoine et culture. Ce changement de l’adjectif au nom montre avant tout la volonté de caractériser un objet (le patrimoine et la culture) mais également que la notion de tourisme est délicate à utiliser car elle possède le sens de pratique panurgiste qui est donc moins authentique et moins attrayante dans le cadre d’une offre culturelle et patrimoniale. Le tourisme est pensé comme un voyage mais il se fait la plupart du temps comme un « déplacement de masse » organisé pour trouver des images clichées habituelles d’une destination visée (Ceriani, Kanfou, Stock, 2003). Vendue par la publicité, l’incroyable logistique sous-jacente demeure cachée et tout ce qui pourrait choquer est rendu invisible aux yeux du touriste. Comme un écho a la compétence de visite, le touriste intègre ces processus et essaye a contrario d’organiser sa propre pratique touristique : « La régularité de cette transhumance va créer cependant un savoir et un savoir-faire, un « capital spatial », pour paraphraser P. Bourdieu que le touriste acquiert au terme d'une certaine expérience, ce qui le rendra méfiant à l'endroit de la consommation touristique de masse qu'il cherchera à éviter au profit de l'auto-organisation totale ou partielle qui lui laisse une certaine autonomie dans le choix de ces circuits et de ces rencontres. » (Ibid.). I. UN PLÉONASME ? Le tourisme culturel peut être considéré à l’origine comme un pléonasme (Origet de Cluzot, 2006). En effet, jusqu’au début du XIXème siècle, il était par nature culturel et se diversifie au XXème siècle (voyage d'agrément, voyage d'affaire, thermalisme…) grâce en France au Front Populaire et la création des congés payés en 1936. La grande vogue du « sea, sex and sun » apparaît dans les années soixante et aujourd’hui 75% des français profitent de cette pratique. Le tourisme culturel devient alors une définition restreinte de la notion de tourisme. Les années quatre-vingt sont celles d’un renouveau, un tourisme culturel et certains Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 43
  • 44. voyageurs recherchent dans les vacances de nouvelles expériences et découvertes. Le tourisme moderne est né de trois phénomènes liés en Occident : l'augmentation de la durée du temps hors travail, l'enrichissement massif des classes moyennes et l'affaiblissement du lien social communautaire. Avec L'individualisation des sociétés, « le contact remplace la rencontre » (Cazes et Courade, 2004). Claude Origet de Cluzot définit le tourisme culturel comme une extrapolation de la visite de sites culturels, c’est un déplacement de personnes assidues ou occasionnelles : « une pratique culturelle qui nécessite un déplacement, [d’au moins une nuitée], ou que le déplacement va favoriser » « dont la motivation principale est d’élargir ses horizons, de rechercher des connaissances et des émotions au travers de la découverte d’un patrimoine et de son territoire. » (Origet de Cluzot, 2006). C’est en ce sens qu’on parle de tourisme pratiqué. Puisque leurs enjeux économiques se croisent au niveau du tourisme culturel, les stratégies touristiques et culturelles marchent main dans la main. Ainsi, la culture se met parfois au service des enjeux touristiques : l’effet d’appel qu’elle convoie peut rehausser le potentiel d’une ville, comme ce fut le cas de Bilbao depuis l’implantation du Musée Guggenheim. Une stratégie du tourisme culturel peut également peser sur les flux touristiques au sein d’une région, en témoignent les expositions organisées en 1998 à La Rochelle et Rochefort qui incitaient à se déplacer d’une exposition à l’autre et donc d’une ville à l’autre. Josquin Barré quant à lui propose une vision plus marketing du tourisme culturel où le touriste découvre le plaisir de voir quelque chose qui l’éloigne de son quotidien, comme une échappatoire : « Le tourisme culturel, c’est aussi l’organisation d’une opportunité offerte à des vacanciers auxquels on ménage la surprise, préméditée ou non, d’un moment de contemplation inattendu, de quelques heures de spectacle, ou l’occasion de s’abstraire de leur vie quotidienne pour se livrer à une initiation ou à la création artistique qui, parfois, suscitera une vocation jusque-là ignorée, qui révèlera un potentiel de créativité jusqu’alors insoupçonné. » (Barré, 1995). Le touriste culturel est un voyageur qui effectue son déplacement pour satisfaire une curiosité d’ordre culturel (Origet de Cluzot, 2006). Il n’en demeure pas moins que, dans l’imaginaire du tourisme culturel des publics européens, on peut identifier certains grands axes communs de curiosité et d’attentes :  une sensibilité à « l’exotisme » et à l’identité locale (qui donne tout son sens au déplacement), Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 44
  • 45.  la quête de sens de la vie ou de l’histoire à laquelle l’expérience culturelle peut apporter des éléments de réflexion,  la curiosité alertée par certains faits tirés de l’actualité politique, sociale, artistique (livres, films...). Sous l’impulsion du tourisme, l’offre culturelle s’est considérablement étoffée, renouvelée et diversifiée. Mais sa complémentarité avec les autres composantes logistiques du voyage est difficile à assurer, même par des voyagistes de talent. De fait, l’offre du tourisme culturel est entre les mains de professionnels dont les compétences et les objectifs sont loin d’être harmonisés (Origet de Cluzot, 2006 : 16). II. LA CONSTRUCTION DE LA « TOURISTICITÉ » ET L’APPEL AU TOURISME La touristicité se fait par les atouts patrimoniaux du pays et la qualité de l’accueil qui sont mis en avant et transformés en images vendeuses de la destination. Ajoutons à cela la libéralisation économique et financière de la reconversion de l’économie et de la démocratisation de la vie politique. Beaucoup d’arguments actuels tournent autour des mots écotourisme, ethnotourisme, aménagement durable qui permettent de valoriser un potentiel bien protégé (Cazes et Courade, 2004). L'activité touristique repose comme l'a écrit Cazes sur trois systèmes imbriqués : un système d'images, un système d'espaces et un système d'acteurs (Cazes, 1992). Du point de vue de la production des espaces, les acteurs de la mise en tourisme de la ville se heurtent à deux séries de contradictions. Tout d'abord, dans un sens, pour une ville, être compétitive c'est se doter des attributs normaux d'une ville, ceux qui font la réussite de toutes les autres, en ne manquant d'aucun symbole de la modernité. Dans un autre, c'est se distinguer, posséder ou créer l'attrait supplémentaire dont l'acteur espère qu'il déclenchera le désir de sa ville. De plus, « le tourisme est un reflet assez fidèle de l'organisation du monde dont il révèle (au sens photographique) les dynamismes et les déséquilibres fondamentaux. » (Cazes et Courade, 2004). La réussite dans l'économie touristique suppose surtout d'enclencher des flux de visiteurs et de les satisfaire (Gravari-Barbas et Violier, 1998). Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 45
  • 46. III. OFFRE TOURISTIQUE ET FRÉQUENTATION Selon les experts, le tourisme culturel représenterait de 8 à 20% des parts du marché touristique. Cependant la culture est un phénomène tellement large et complexe qu’un inventaire des activités du tourisme culturel est très difficile : tourisme religieux, gastronomique, viticole, incluant visite de musées, monuments, lieux patrimoniaux en général. Cette pratique peut se faire de plusieurs manières : des circuits à thème, organisés, pèlerinages, croisières… L’offre touristique est de plus en plus abondante et variée. Inversement, la venue de touristes représentant une augmentation de la « demande », le tourisme se fait facteur d’émulation culturelle. Cependant, ceci se doit d’être nuancé par la multiplication des lieux destinés aux touristes, qui sont accusés de capter une part conséquente des visiteurs potentiels des lieux de culture. 3.1. Il est temps de ressemer… Au terme d’un rapport commandité par le Conseil National du Tourisme en 1994, Alain Monferrand met en garde quant au déséquilibre de fréquentation des lieux culturels en France. Il considère notre offre culturelle comme désordonnée : « La France culturelle offre ainsi l’aspect d’une véritable « jachère touristique », dont le considérable potentiel, tant en ce qui concerne les aspects les plus traditionnels de ce patrimoine (architecture, musée, histoire) que les plus nouveaux (thématiques, scientifiques et techniques), mérite à l’évidence un plan systématique de mise en valeur. » (Monferrand, 1994). Les Sentiers Numériques s’inscrivent dans ces nouvelles initiatives de narration du patrimoine, d’un accès libre à la culture et d’une proposition culturelle innovante pour attirer, instruire, et plaire (« Une exposition réussie doit à la fois divertir et éduquer. » Jacobi et Le Roy, 2013 : 8) à la manière d’une exposition mais hors les murs cette fois : « L’alternative est à cet égard assez simple. Savoir raconter l’histoire du pays aux touristes qui viennent le visiter et créer ainsi des emplois au pays, ou le laisser progressivement se vider de ses habitants qui s’en iront ailleurs, écrire ou raconter » (Monferrand, 1994). Rachid Amirou met en évidence une stratégie unique et nécessaire dans le secteur du tourisme culturel : « En termes de méthodologie d’action, il semble qu’on s’oriente vers une démarche ternaire qui appréhende simultanément les trois impératifs légitimes qui devraient structurer le secteur du tourisme culturel : à savoir la protection du patrimoine, sa nécessaire démocratisation (médiation, politiques tarifaires…), et sa mise en marché en tant qu’élément Les Sentiers Numériques de la ville d’Arles, mémoire septembre 2013 – Priscillia Galarme 46