LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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TAIEB AGOURRAM HEMATOLOGY PHD, DrCLS
Member of
Harvard Medical School Post-Graduate Association
Canadian Society for Medical Laboratory Science
American Society for Clinical Laboratory Science
National Postdoctoral Association
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La Cellule au Microscope
La description d'une cellule comprend trois points essentiels :
l’Aspect Général (taille et forme)
le Noyau (incluant la chromatine et les nucléoles)
le Cytoplasme (incluant les vacuoles et les granulations)
L'ASPECT GENERAL
Taille : La taille qui sert de référence pour l'évaluation de la taille de la cellule observée sur
frottis est celle d'une hématie (7µm). La comparaison des diamètres permet d'avoir une
approximation.
Forme : Elle est généralement ronde mais peut être plus allongée si la cellule est douée de
capacité de déplacement notamment.
LE NOYAU
Forme : Elle est très variable selon la lignée cellulaire
Ronde ou arrondie Encochée Lobée ou polylobée Sans forme particulière
Chromatine : (Substance constituant le noyau) Ses aspects sont très variables suivant l'étape
de maturation de la cellule. Plus la cellule est jeune et plus la chromatine est fine. Au
contraire, plus la cellule est âgée et plus sa chromatine est mottée (condensée en mottes)
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Chromatine fine Chromatine Mottée
Nucléole(s) : (Claretée(s) située(s) au sein de la chromatine) L'intensité de leur coloration
dépend de la quantité d'ARN qu'ils contiennent. Ils sont parfois incolores, révélés seulement
par un liseré de chromatine plus épais sur leurs bords. Lorsqu'ils sont très hyperbasophiles, ils
traduisent une intense activité de synthèse.
LE CYTOPLASME
Quantité : s'exprime en général par le rapport nucleocytoplasmique (N/C). Plus le
cytoplasme est réduit et plus le rapport N/C est élevé (proche de 1). En fait, on entend par
cytoplasme la surface totale de la cellule. Le rapport N/C correspond donc en réalité au
rapport Noyau/Cellule bien que dans tous les ouvrages pédagogiques on parle de rapport
nucléocytoplasmique.
Cellule à 3 nucléoles
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Rapport N/C = 0,9 Rapport N/C = 0,6 Rapport N/C = 0,4
LA COLORATION
La coloration du cytoplasme dépend de son contenu et de la technique de coloration. Au May
Grunwald-Giemsa, il apparaît très bleu (basophile) dans les cellules jeunes ou activées et plus
rosé voir translucide (ou acidophile, ou hyalin) dans les cellules matures.
Cytoplasme très basophile (bleu
foncé)
Cytoplasme basophile
(bleuté)
Cytoplasme acidophile
(rosé)
GRANULATIONS :
Elles ne sont pas toujours présentes. Lorsqu'il y en a, il faut décrire leur nombre, leur taille et
leurs affinités tinctoriales. Cet aspect étant décrit dans la partie sur les Polynucléaires, elles ne
sont pas détaillées dans ce chapitre.
Aucune granulation Granulations
Azurophiles fines et peu
nombreuses
Granulations
Basophiles, grosses et
nombreuses
Granulations
Eosinophiles, grosses
et nombreuses
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Figure 1: Microscope Optique
Bien positionner la préparation sur la platine du microscope (lamelle au dessus).
Allumer la lampe en choisissant un éclairage moyen.
Si le microscope possède une tête binoculaire, vérifier que les deux oculaires sont bien
réglés sur la même position.
Ce double réglage permet de corriger une vision binoculaire anormale chez certaines
personnes
Commencer toujours la recherche de l'objet par le plus faible grossissement (objectif
4,5).
Placer l'objet à observer sous l'objectif.
Le déplacement de la préparation se fait à l'aide des deux vis situées verticalement sous
la platine.
Repérer le sens de rotation de la molette de mise au point qui fait descendre la platine.
Approcher la platine le plus près possible de l'objectif.
A ce moment seulement, regarder dans l'oculaire en faisant redescendre doucement la
platine.
Lorsque la mise au point est faite, passer au grossissement supérieur (objectif x10)
sans bouger la platine.
Affiner la mise au point en agissant délicatement sur la molette de réglage grossier.
Placer l'objet à observer au milieu du champ
Passer à un grossissement supérieur si nécessaire (objectif x40 ou x60 ou encore x100
à immersion).
Régler l'éclairement en agissant sur le variateur de lumière, le diaphragme et le
condenseur.
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Affiner la mise au point en agissant exclusivement sur la vis micrométrique.
La molette pour réglage grossier ne doit absolument pas être utilisée avec les objectifs
dont le grossissement est supérieur à x40.
Les objectifs (dit "compensés") sont prévus pour que lorsqu'on passe d'un
grossissement à un autre la mise au point soit approximativement conservée. Il est
donc inutile de bouger la platine lorsqu'on change d'objectif.
A partir de l'objectif x40, toujours observer en agissant légèrement sur la vis
micrométrique.
Cela permet de voir l'objet sur toute son épaisseur.
Noter la position de l'objet observé en repérant ses coordonnées sur les règles graduées
situées sur deux cotés de la platine (s'il y a plusieurs préparations noter également le
nom de la lame ou a été faite l'observation).
Comment lire les coordonnées sur les échelles de la platine
Cet instrument, fixé sur deux des cotés de la platine porte-objet et formé de deux échelles,
l'une fixe l'autre mobile, s'appelle un "vernier".
Figure 2: Vernier
L'échelle mobile (à droite sur le dessin) permet de lire les dixièmes de la plus petite unité de
l'échelle fixe.
Le premier trait de l'échelle mobile indique une valeur comprise entre 15 et 16, lue sur
l'échelle fixe.
Il suffit ensuite de chercher quel trait de l'échelle mobile s'aligne le mieux avec un trait
quelconque de l'échelle fixe, il s'agit, dans l'exemple ci-dessus, du 7ème trait on lira donc la
valeur 15,7.
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LA COLORATION DE MAY-GRUNWALD GIEMSA
Réactifs
May-Grünwald (RAL: Art. 320 07-1)
Giemsa (RAL: Art. 320 311)
KH2PO4 (MERK: Art. 4873)
Na2HPO4, 12H2O (MERK: Art. 6579)
Préparation du Tampon Phosphate (Solutions mères)
Préparer les solutions filles (Solution A & B)
Solution A : 10 g de KH2PO4 + 500 ml d''eau distillée
Solution B : 25 g de Na2HPO4, 12H20 + 500 ml d''eau distillée
Agitation magnétique jusqu'à redissolution totale. Conserver à +4ƒC
Solutions d'utilisation : 50 ml de solution A + 50 ml de solution B complétés à 1000 ml d'eau
distillée
Agitation magnétique pour homogénéisation
Mode opératoire de la coloration
Recouvrir ou immerger le frottis dans la solution de May-Grunwald pendant 3 minutes.
Renverser le colorant ou égoutter la lame. (Pas de rinçage)
Recouvrir ou immerger le frottis dans du May-Grunwald dilué au 1/2 en tampon phosphate.
Rincer en tampon phosphate.
Recouvrir ou immerger dans la solution de Giemsa à 8% en tampon (préparée
extemporanément) pendant 12 minutes.
Rincer à l'eau du robinet ou en tampon.
Remarques
Le May Grunwald est un mélange de solution d'éosine et de bleu de méthylène dans une
solution d'alcool méthylique. L'alcool méthylique est responsable de la fixation du frottis. Ce
colorant permet surtout de colorer les grains cytoplasmiques mais il colore mal le noyau.
L'étape suivante de la coloration - dilution du May-Grunwald en milieux acqueux - est
également essentielle car elle ionise les colorants et produit donc une meilleure affinité.
Le Giemsa est un mélange d'une solution d'éosine et d'azur I et II (qui sont des dérivés du bleu
de méthylène) en solution acqueuse. Ce colorant colore le noyau en rouge foncé, le
cytoplasme en bleu clair et accentue également la coloration des grains.
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LA QUALITE D'UN FROTTIS
Indispensable à une analyse cytologique fiable
1 Frottis sanguin :
sang prélevé sur EDTA
2 Couche monocellulaire.
CE QU'IL FAUT FAIRE
3 Etalement correct et
bonne coloration des hématies
1 Frottis sanguin :
Sang prélevé sur héparine
2 Sang prélevé sur oxalate.
NE PAS FAIRE
3 Hématies tassées et
dépôt de colorant.
Cette analyse morphologique est une étape importante dans l'interprétation d'un
hémogramme.
1- L'examen du frottis sanguin est intéressant pour l'observation de la morphologie
érythrocytaire. Il recherche des anomalies qui d'emblée permettent d'établir le
diagnostic ou fournissent une orientation.
Ces anomalies affectent la forme, la taille, la coloration des hématies ou leur contenu.
2- L'examen du frottis sanguin permet d'établir la formule leucocytaire, ou de contrôler
les résultats rendus par l'automate.
Le dénombrement de 100 à 200 cellules, classées dans chaque catégorie de globules blancs,
permet d'obtenir un résultat en pourcentage. Mais l'interprétation finale tiendra compte des
valeurs en nombre absolu de chaque type de leucocyte. De plus, il est utile parfois de préciser
le degré de segmentation nucléaire des granulocytes : on établit alors la formule d'Arneth.
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Polynucléaire neutrophile
45 à 70 %
Polynucléaire éosinophile
1 à 5 %
Polynucléaire basophile
0 à 0,5 %
Lymphocyte
25 à 40 %
La formule leucocytaire
chez l'adulte sain
Monocyte
3 à 7 %
Soit 1800 à 7000 PN
40 à 500 PE
0 à 50 PB
1000 à 4000 Ly.
200 à 800 Mo.
par mm3
3- L'examen des plaquettes sur lame, renseigne sur la numération plaquettaire et la
présence éventuelle de signes de dysthrombopoïèse. Cet examen est indispensable en
présence d'une "thrombopénie" isolée.
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Fiches techniques – Hem-image
Parcours du frottis sanguin en vue de
la réalisation d’une formule leucocytaire
Principe
La formule leucocytaire correspond à la distribution des différentes variétés leucocytaires
identifiées le long d’un parcours qui tient compte de la distribution des globules blancs lors de
l’étalement (les granulocytes et les monocytes sont plus fréquemment rencontrés sur les bords
et en bout de frottis). Cette distribution doit être représentative de la répartition physiologique
des leucocytes.
Technique de parcours
Résultats
Identifier ainsi 200 leucocytes minimum et calculer le pourcentage des différentes variétés.
Calculer à l’aide de la numération des leucocytes les valeurs absolues indispensables à
l’interprétation de la formule leucocytaire.
Remarques
Des leucocytes anormaux ou immatures peuvent être identifier lors du parcours ; ils sont
à inclure dans le pourcentage et à introduire dans la formule leucocytaire soit avant l’élément
mature correspondant, soit à l’endroit le plus justifié .
Des érythroblastes peuvent être également rencontrés ; ces derniers ont été dénombrés
lors de la numération des cellules nucléées et il est nécessaire d'effectuer une correction de
cette numération afin qu’elle ne corresponde uniquement qu’à celle des leucocytes.
Les automates réalisent une analyse en flux d'une quantité beaucoup plus grande de
cellules selon différents critères physiques (diffraction lumineuse avec mesure à différents
angles, conductance de signaux électriques...). L'étude informatique des éléments obtenus
permet dans de nombreux cas de rendre la formule leucocytaire. Mais la présence d'anomalies
cytologiques érythrocytaires, leucocytaires et/ou thrombocytaires nécessitera l'analyse
microscopique d'un frottis sanguin coloré.
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Principales pathologies des globules rouges
Principales anomalies de taille des globules rouges
Figure 9: Macrocytose
Présence en quantité significative de globules rouges de grande taille qui peuvent apparaître
plus foncés et plus ovalaires ; leur présence est très marquée dans les anémies
mégaloblastiques.
Figure 10: Microcytose
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Présence d'un nombre significatif de globules rouges de taille plus petite que la normale
pouvant correspondre à une anomalie de la synthèse en hémoglobine (carence en fer,
thalassémie...)
Figure 11: Anisocytose
Présence de globules rouges de toutes les tailles pouvant correspondre à une régénération
avec une double population d'hématies.
Principales anomalies de forme des globules rouges
Figure 12: Ovalocytose
Présence de globules rouges déformés en ovale ou ellipse provenant d'une anomalie de
structure membranaire.
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Figure 13: Dacryocytes
Présence de globules rouges en forme de poires (poïkilocyte) ou de larmes provenant le plus
souvent d'une fibrose médullaire.
Figure 14: Schizocytes
Frottis sanguin mettant en évidence la présence de nombreux schizocytes, résultant de la
fragmentation des érythrocytes au niveau des vaisseaux de la microcirculation, dont le calibre
est réduit par les thrombi. Le schizocyte peut subir plusieurs fragmentations et peut prendre
un aspect bicorne, en cimier de casque (fréquemment crénelé), ou de triangle.
Présence de globules rouges fragmentés provenant d'un obstacle sur le parcours sanguin :
soit d'une prothèse cardiaque
soit de fibrine polymérisée (CIVD)
L’existence d’une schizocytose associée à une prothèse valvulaire doit faire vérifier le bon
fonctionnement et l’état de la valve. Une hémolyse peut se rencontrer dans les circulations
extracorporelles.
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Les schizocytes sont des fragments d’hématies observés sur un frottis sanguin. Ils sont un
stigmate des anémies hémolytiques mécaniques dont le groupe des micro-angiopathies
thrombotiques nécessite une prise en charge urgente. La détection des schizocytes et parfois
leur quantification sont donc primordiales.
La morphologie des schizocytes est variable car sa formation à partir d'une hématie normale
passe par plusieurs stades qu'illustrent les photographies suivantes. Ces stades chronologiques
sont les suivants : apparition d'une vacuole dans l'hématie (stade 1), ouverture de la vacuole
(stade 2), éversion des berges de la vacuole éclatée (stade 3 dit aussi aspect « en chapeau de
gendarme »), aspect déchiqueté de l'hématie (stade 4 dit aussi « fragment d'hématie »).
Chacun de ces aspects mérite le nom de schizocyte et coexiste sur une même lame.
Figure 15: Stade 1
Figure 16: Stade 2
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Figure 17: Stade 3
Figure 18: Stade 4
Une augmentation du pourcentage de schizocytes dans le sang s'observe dans plusieurs
circonstances, c’est une urgence hématologique.
• Beaucoup plus préoccupante est l'importante schizocytose (> 10%) que l'on observe dans le
Purpura Thrombopénique et Thrombotique (PTT) ou maladie de Moschowitz. Cette
schizocytose s'intègre dans le cadre d'une anémie hémolytique régénérative mais associée à
une thrombopénie. L'examen de la lame est alors fondamental et doit déclencher une action
thérapeutique immédiate compte tenu de la gravité du pronostic.
• On peut aussi observer une schizocytose sanguine associée à une anémie régénérative et à
une érythromyélémie dans les métastases médullaires (cf. « Sangs pathologiques » → «
Lignée granuleuse » → « Myélémies et syndromes myéloprolifératifs »).
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Figure 19: Hématies Cibles
Présence de globules rouges hypochromes qui changent leur forme de disque biconcave et
qui, de face, étalés sur une lame ont l'aspect d'une cible : hématies très claires avec un centre
foncé.
Figure 20: Drépanocytes
Présence de globules rouges déformés en navettes ou faucille : les drépanocytes ou hématies
falciformes provenant de la polymérisation d'une hémoglobine anormale S sous faibles
pressions d'oxygène
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Figure 21: Sphérocytose
Figure 22: Acanthocytes
Les hématies présentent des dispositions irrégulières des spicules (Abétalipoprotéinémie)
Principales anomalies de coloration des globules rouges
Présence de globules rouges uniformément colorés sans dépression claire centrale
correspondant
soit à une anomalie de membrane,
soit à une anémie hémolytique d'origine immune.
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Figure 23: Hématies hypochromes
Ces globules rouges possèdent moins d'hémoglobine et sont donc moins colorés : la zone
centrale décolorée est plus grande.
Figure 24: Hématies Polychromatophiles
Dysérythropoïèse entrainant une disparition trop précoce du noyau et un cytoplasme encore
polychromatophile.
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Principales pathologies des globules blancs
Figure 25: Lymphocyte activé hyperbasophile
cellules de grande taille (18-21 µm)
à noyau (NRP = 1) à chromatine plus ou moins légère, filamenteuse et nucléolée
à cytoplasme hyperbasophile sans granulations (ou exceptionnelles)
Figure 26: Forme variante hyperbasophile
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Figure 27: Myélémie périphérique
Forte hyperleucocytose avec Myélémie à pyramide de maturation conservée sur frottis
sanguin et légère érythroblastose.
Figure 28: Lymphocytes matures avec des Ombres
Nombreux lymphocytes (petits ou grands) sur frottis sanguin avec de nombreuses ombres
de Gumprecht.
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Figure 29: Cellules Blastiques
Hyperleucocytose variable avec blastose proportionnelle (blastes de cytologie variable sur
frottis sanguin).
Principaux examens complémentaires indispensables à la classification, au pronostic et au
traitement
Colorations cytochimiques (peroxydases, estérases, ...).
Caractérisation des marqueurs membranaires par analyse en cytométrie de flux des
blastes.
Réalisation du caryotype des cellules malignes pour visualiser des translocations.
Figure 30: Blaste granuleux
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Figure 31: Blastes agranulaires
Une étude minutieuse du cytoplasme sera menée à la recherche de granulations azurophiles
et/ou de corps d'Auer.
Mise en évidence des peroxydases par coloration cytochimique
Dans les granulations primaires des cellules de la lignée granuleuse et secondairement
monocytaire se trouve une enzyme nommée myélopéroxydase. Cette enzyme catalyse le
transfert d'hydrogène sur un peroxyde (le plus souvent H2O2). Le donneur d'hydrogène est
précipité après couplage en un produit coloré sur le lieu de présence de l'enzyme.
La mise en évidence de cette enzyme est importante dans le cadre des leucémies aiguës où
elle permet de séparer sur la présence de cette enzyme dans plus de 3% des blastes
médullaires des LAM.
les variétés myéloblastiques (LAM 1, LAM 2, LAM 3, LAM 4, LAM 5, LAM 6)
des variétés lymphoblastiques (LAL 1, LAL 2, LAL 3 ou LAL B et LAL T)
Deux variétés très rares appartenant aux LAM ne possèdent pas de myélopéroxydase :
la LAM 0, variété bloquée très tôt en différenciation et la LAM 7 qui possède une
plaquettoperoxydase.
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Figure 34: Blaste très positif
Figure 35: Deux blastes MPO+et MPO-
Mise en évidence des estérases par coloration cytochimique
Dans les granulations des cellules de la lignée granuleuse et monocytaire se trouve une
enzyme nommée estérase. Cette enzyme catalyse une réaction d'hydrolyse sur de nombreux
substrats comme le naphtol-AS-D-Chloroacétate ou le Naphtol-AS-D-acétate (NASDA). Le
naphtol peut être précipité en un produit coloré par un sel de diazonium.
Dans les variétés monocytaires, l'enzyme est inhibée par l'ajout de Fluorure de sodium (NaF)
au substrat.
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Dans le cadre des leucémies aiguës, cela permet de différencier les deux variétés à
composantes monocytaires LAM 4 (blastes et monocytes dystrophiques) et LAM 5
(monoblastes) en réalisant en série deux colorations : l'une sans et l'autre avec le NaF.
Figure 36: Monocyte estérase Positive
Figure 37: Inhibition des estérases monocytaires
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Figure 40: Amas plaquettaires
Les automates actuels d'hématologie cellulaire analysent les échantillons sanguins avec une
cadence élevée et fournissent des résultats précis et reproductibles. Cependant, diverses
conditions préanalytiques ou inhérentes au principe d'analyse des paramètres de
l'hémogramme sont susceptibles d'induire des résultats erronés. L’hématologiste doit
connaître ces diverses situations autant que le principe de fonctionnement de son automate
afin d'éviter de rendre des résultats erronés qui peuvent avoir un impact non négligeable pour
le patient et sa prise en charge. Dans le cadre des fausses thrombopénies, l'agrégation
plaquettaire induite in vitro en présence d'EDTA est la situation préanalytique la plus
fréquente. Les automates les plus performants gèrent assez bien cette situation, en signalant
son existence par un ou plusieurs messages d'alerte. Diverses situations plus rares, comme le
satellitisme plaquettaire autour des leucocytes, peuvent également induire une sous-estimation
du nombre des plaquettes, mais les messages d'alerte ne sont pas toujours explicites.
A l'opposé, la difficulté à discriminer les plaquettes avec d'autres particules de taille, de
densité ou de diffraction comparables, comme les hématies de taille réduite, les fragments
cytoplasmiques de certains leucocytes, les Cryoglobulines, les filaments de fibrine, les lipides
ou les bactéries, peut aboutir à une fausse thrombocytose.
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L’Hémogramme
L'hémogramme est le premier examen biologique utilisé pour dépister, explorer et suivre la
plupart des hémopathies. Ses indications sont très nombreuses et dépassent largement le cadre
des pathologies hématologiques.
Il est réalisé à partir d'un échantillon de sang prélevé par ponction veineuse et recueilli dans
un tube contenant un anticoagulant sec de type EDTA.
On peut pratiquer un prélèvement par micro méthode au talon chez le nouveau-né, au bout du
doigt chez les patients dont il convient de protéger le capital veineux (chimiothérapie,
insuffisance rénale…).
L'hémogramme est un examen automatisé. Il a pour but d'apporter des informations
quantitatives sur les cellules sanguines mais également des informations qualitatives.
Un hémogramme doit être pratiqué en urgence devant :
● Un état de choc
● Une pâleur intense
● Une angine ulcéro-nécrotique ou résistante aux antibiotiques
● Une fièvre élevée après prise de médicament, surtout après chimiothérapie antimitotique
● Une fièvre résistante aux antibiotiques
● Un purpura pétéchial avec syndrome hémorragique
Dans tous les cas :
L'hémogramme doit être pratiqué avant toute thérapeutique pouvant en modifier les données
et l'interprétation (fer, vitamine B12, acide folique, transfusion…).
Une atteinte de l'état général : asthénie, anorexie, amaigrissement, fièvre au long
cours, douleurs osseuses…
Des signes évoquant une augmentation d'une ou plusieurs lignées sanguines :
o Érythrose cutanée ou prurit à l'eau,
o Thromboses artérielles ou veineuses,
o Syndrome tumoral : adénopathies, splénomégalie.
Certaines situations systématiques ou bilans :
o Grossesse
o Médecine du travail
o Médecine de dépistage
o Bilans pré-opératoires
o Bilans pré-thérapeutiques
o Suivis thérapeutiques
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Les valeurs normales de l'hémogramme
Elles varient en fonction de l'âge, du sexe et de l'origine ethnique.
Les laboratoires donnent les résultats du patient, les valeurs normales en fonction de l'âge et
du sexe et au moins une antériorité quand elle existe.
Les valeurs normales données ci-dessous sont des valeurs simplifiées au-delà desquelles une
investigation complémentaire doit être entreprise.
Quelques principes généraux d'interprétation de l'hémogramme peuvent être dégagés :
Chaque lignée doit être interprétée quantitativement (nombre de cellules en valeur
absolue, volumes, indices…) et qualitativement (anomalies morphologiques, cellules
anormales).
Les données de l'hémogramme sont des mesures de concentration : la numération
cellulaire tient compte à la fois des cellules et du contenant (plasma)
Une anémie est définie par la diminution de la valeur de l'hémoglobine au-dessous de
la normale en fonction de l'âge et du sexe.
Les anémies sont classées en fonction du VGM (Volume Globulaire Moyen).
Toute nouvelle anémie doit s'accompagner de la numération des réticulocytes (non
incluse systématiquement dans l'hémogramme et réalisée soit par coloration
particulière, soit par cytométrie de flux)
Les résultats des différents leucocytes sont donnés en pourcentage et en valeur
absolue. L'expression en pourcentage n'a pas d'intérêt prise isolément.
Toute thrombopénie doit être vérifiée sur l'examen du frottis sanguin.
Hémoglobine
La limite inférieure de l'hémoglobine (anémie) est la suivante :
Nouveau-né : 140 g/L
Homme adulte : 130 g/L
Femme adulte : 120 g/L
Femme enceinte (à partir du second trimestre de grossesse) : 105 g/L
N'interviennent donc pas dans la définition d'une anémie, ni le nombre d'hématies ni
l'hématocrite.
Cette mesure d'hémoglobine s'exprimant en concentration, il faut se méfier des « fausses
anémies » par hémodilution :
physiologique chez la femme enceinte,
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pathologique lors des hyperprotidémies importantes (par exemple les gammapathies
monoclonales), l'insuffisance cardiaque et l'hypersplénisme.
La limite supérieure normale de l'hémoglobine est la suivante :
Nouveau-né : 230 g/L
Homme adulte : 170 g/L
Femme adulte : 160 g/L
Il existe une polyglobulie physiologique chez le nouveau-né avec une hémoglobine variant
entre 170 et 180 g/L.
Une hémoconcentration peut augmenter l'hémoglobine (déshydratation, diurétiques).
Volume Globulaire Moyen (VGM)
Mesuré par les automates, il peut être calculé par le rapport entre l'hématocrite et le nombre
d'hématies.
La valeur normale est de 82 à 98 fl.
En pratique on retient généralement les définitions suivantes :
Microcytose = VGM < 80 fl
Macrocytose = VGM > 100 fl
Normocytose = 100 < VGM > 80
Concentration Corpusculaire Moyenne en Hémoglobine (CCMH)
La Concentration Corpusculaire Moyenne en Hémoglobine (CCMH) correspond à la
concentration moyenne en hémoglobine par hématie (hémoglobine divisée par hématocrite).
Les valeurs normales sont comprises entre 32 et 36 g/dL et permettent de définir :
CCMH < 32 : Hypochromie
36 < CCMH > 32 : Normochromie
Une CCMH > 36 évoque en premier lieu un artifice d'hémogramme lié le plus souvent à la
présence d'une agglutinine froide.
Teneur Globulaire Moyenne en Hémoglobine (TGMH)
La Teneur Globulaire Moyenne en Hémoglobine (TGMH) correspond au poids moyen
d'hémoglobine contenu dans une hématie (Hb divisé par le nombre d'hématies).
Les valeurs normales sont de 27 à 32 pg par cellule.
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La numération des leucocytes sanguins
Elle varie en fonction de l'âge :
Naissance : 10 à 26 G/L
3 mois : 6 à 12 G/L
1 an : 6 à 15 G/L
3 à 6 ans : 10 à 15 G/L
10 à 12 ans : 4,5 à 13,5 G/L
Adulte : 4 à 10 G/L
Leucocytes (chez l'adulte) :
> 10 G/L = hyperleucocytose
< 4 G/L = leucopénie
La formule leucocytaire
La formule leucocytaire, exprimée en %, n'a aucun intérêt prise isolément. Il faut privilégier
les valeurs absolues. Les normes de la numération-formule leucocytaire sont les suivantes
chez l'adulte
La numération-formule leucocytaire du nouveau-né donne de façon physiologique des
résultats plus élevés pour chaque type de leucocytes :
Polynucléaires neutrophiles : 6 à 26 G/L
Lymphocytes : 2 à 11 G/L
Monocytes : 0,4 à 3,1 G/L
Au cours du premier mois de la vie il y a une diminution des polynucléaires neutrophiles et
des monocytes. Il s'installe une formule à prédominance lymphocytaire dans le contexte d'une
leucocytose totale plus élevée que chez l'adulte (jusqu'à 15 G/L).
La numération des plaquettes sanguines
Elle est maintenant incluse dans la demande standard d'un hémogramme et n'a pas besoin
d'une demande spécifique.
Plaquettes (quel que soit l'âge et le sexe) :
150 – 400 G/L = Normale
< 150 G/L = Thrombopénie
> 400 G/L = Hyperplaquettose (Thrombocytose)
LEUCOCYTES NOMBRE ABSOLU (G/L)
Poly. neutrophiles 1,5 - 7
Poly. éosinophiles 0,05 - 0,5
Poly. basophiles 0,01 - 0,05
Lymphocytes 1,5 - 4
Monocytes 0,1 - 1
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Les anomalies qui demandent une prise en charge urgente par un spécialiste
Hémoglobine < 60 g/L ou mal tolérée
Hématocrite > 60 %
Neutropénie < 0,2 G/L (agranulocytose)
Thrombopénie < 10 G/L même en l'absence de syndrome hémorragique
Hyperleucocytose avec cellules immatures > 20 G/L
Les anémies
En pratique, l'anémie est définie par une diminution de l'hémoglobine à l'hémogramme, après
avoir éliminé une fausse anémie par hémodilution.
Les anémies sont classées en fonction du VGM.
Les anémies microcytaires (VGM < 80 fl) traduisent un trouble de la synthèse de
l'hémoglobine.
Les plus fréquentes sont les anémies hyposidérémiques par carence martiale ou inflammation.
Elles nécessitent une exploration du métabolisme du fer et une recherche étiologique.
Les anémies macrocytaires (VGM > 100 fl) évoquent en premier lieu 3 grandes étiologies :
Éthylisme
Déficit en vitamine B12 ou en acide folique
Les syndromes myélodysplasiques
D'autres étiologies seront systématiquement recherchées et faciles à éliminer : régénération
médullaire (réticulocytes augmentés), hypothyroïdie (clinique, TSH), hépatopathies autres que
l'éthylisme, hémopathies malignes (le plus souvent normocytaires ou peu macrocytaires).
Les anémies normocytaires (VGM entre 80 et 100 fl) seront séparées en fonction de la
numération des réticulocytes :
Anémie régénérative avec réticulocytes > 150 G/L : Elles traduisent une régénération
médullaire après hémorragie aiguë, hémolyse ou chimiothérapie.
Anémie régénérative avec réticulocytes < 150 G/L : Elles traduisent une atteinte
centrale et seront explorées par le myélogramme après avoir éliminé
systématiquement :
o Une insuffisance rénale
o Une pathologie thyroïdienne
o Une inflammation
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
51
QQUES ANOMALIES DE L’HEMOGRAMME
1- Les principales causes des Myélémies
Présence à l’hémogramme de cellules normales de la moelle osseuse non présentes dans le
sang (cellules de la lignée granuleuse : myélocytes, métamyélocytes, promyélocytes).
Une myélémie avec 2 % de myélocytes ou métamyélocytes n’est pas pathologique si elle est
transitoire. Si signalée à plusieurs reprises : bilan nécessaire
Myélémie modérée et transitoire :
o réparation d’une insuffisance médullaire avec agranulocytose
o infection aiguë avec hyperleucocytose ou neutropénie
Myélémie persistante : avis spécialisé :
o syndrome myéloprolifératif (LMC)
o métastase médullaire d’un cancer, myélofibrose
o myélodysplasie
2- Les principales causes d’Hyperplaquettose
Syndrome inflammatoire
Carence martiale
Splénectomie/asplénie
Hémorragie aiguë
Réparation de thrombopénie
Syndrome myéloprolifératif
3- Les anomalies de l’hémogramme au cours de la grossesse
Globules rouges :
o Baisse du taux de l’hémoglobine au dernier trimestre (au plus bas à 10,5 g/dl),
correspondant à une augmentation de la masse érythrocytaire avec dilution par
un volume plasmatique encore plus élevé
o Risque d’anémie vraie par carence en fer et/ou d’acide folique (surtout si
grossesses rapprochées et niveau socio-économique faible)
Leucocytes :
o Augmentation progressive des polynucléaires neutrophiles
Plaquettes :
o Thrombopénie physiologique de la grossesse (inconstante)
Hémostase :
o La grossesse n’entraîne pas d’anomalie significative du bilan d’hémostase. Elle
effondre le taux de protéine S au-dessous de 50 % et augmente les taux de
facteur VIII et facteur Willebrand jusqu’à 300 %.
Vitesse de sédimentation :
o Habituellement augmentée (jamais au-dessus de 50 : sinon rechercher une
autre explication)
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
52
Les anomalies de l’hémogramme au cours des cirrhoses
On y retrouve de nombreux mécanismes
Anémie multifactorielle par :
o Hémodilution
o Carence vitaminique
o Toxicité de l’alcool
o Déficit en érythropoïétine
o Hyperhémolyse
Généralement macrocytaire et arégénérative
Thrombopénie par :
o Trapping splénique (hypersplénisme)
o CIVD
o Déficit en thrombopoïétine
o Carence vitaminique
Neutropénie par :
o Hypersplénisme
o Carence vitaminique
L’insuffisance hépato-cellulaire :
o Déficits en facteurs du complexe prothrombique, notamment la baisse du taux
du facteur V (diagnostic différentiel avec le déficit en vitamine K isolé). Le
taux de fibrinogène et de facteur V sont des indicateurs de la gravité de
l’insuffisance hépatique.
o Métabolisme de l’acide folique altéré
L’alcoolisme aigu :
Cytopénies régressant à l’arrêt :
o Anémies sidéroblastiques
o Anémies hémolytiques
o Neutropénies centrales
o Thrombopénies centrales
Les anomalies au cours de l’insuffisance rénale chronique
Anémie, normochrome, normocytaire ou légèrement macrocytaire, non régénérative,
habituellement bien tolérée, même à des chiffres de l’ordre de 6 g/dl ; toutefois, elle peut
justifier un traitement par l’érythropoïétine.
Principal mécanisme :
L’effondrement de la sécrétion d’érythropoïétine, et s’il en circule encore (notamment
l’érythropoïétine d’origine extra rénale), elle réagit peu aux stimuli physiologiques
normaux
Il existe aussi un raccourcissement de la durée de vie des hématies ;
Une anémie chronique est constante dans l’IRC au-dessous de 40 ml/mn de clairance de la
créatinine environ ;
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
53
Diminution de l’agrégation plaquettaire liée à l’élévation du taux d’urée (l’aspirine est
contreindiquée) donc tendance hémorragique liée à l’anomalie de l’hémostase primaire.
Allongement fréquent du temps de saignement d’autant plus important que l’hématocrite est
bas
VS souvent élevée, en l’absence de tout processus inflammatoire
Les anomalies au cours des insuffisances endocriniennes
L’hypothyroïdie
est la principale cause endocrinienne d’anémie : normochrome, normocytaire souvent,
parfois macrocytaire (sans déficit vitaminique), toujours non régénérative
elle reste modérée et réagit à la correction du déficit hormonal
L’hyperthyroïdie
souvent anémie discrètement microcytaire sans déficit en fer
neutropénie modérée fréquente
L’insuffisance surrénalienne (maladie d’Addison)
discrète anémie, normochrome, normocytaire, non régénérative
corrigeable par l’opothérapie substitutive
L’insuffisance hypophysaire
donne une anémie centrale, normochrome, normocytaire, non régénérative
La pancytopénie
Diminution simultanée des trois lignées myéloïdes au-dessous des valeurs normales pour
l’âge et le sexe : la gravité dépend de la profondeur de chaque cytopénie.
La démarche diagnostique initiale repose sur l’analyse du mécanisme de l’anémie
Trois possibilités principales :
a. l’anémie est arégénérative normochrome macrocytaire : myélogramme
A la recherche de LA, myélodysplasie, mégaloblastose par carence vitaminique.
Si myélogramme non diagnostique : biopsie ostéo-médullaire à la recherche d’une
aplasie, d’une fibrose ou d’un autre envahissement médullaire (tumoral voire
infectieux)
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54
b. elle est régénérative : rechercher une origine périphérique : auto-immunité, cause
mécanique.
c. elle est microcytaire : la pancytopénie est le plus souvent multifactorielle.
Principales causes d’hyperlymphocytose de l’enfant et de l’adulte
Définition
> 11 giga/l chez le nouveau-né
> 10 giga/l à un an
> 8 giga/l à 4 ans
> 6,5 1 giga/l à 10 ans
> 4 giga/l chez l’adulte
En fonction de la cytologie
Lymphocytes normaux
Lymphocytes atypiques et lymphocytes normaux : syndromes mononucléosique
Lymphocytes anormaux
En fonction de la durée
Aiguë < 7 jours
Syndromes mononucléosiques QS
Lymphocytoses aiguës à petits lymphocytes : coqueluche
Lymphocytoses aiguës infectieuses : (virus).
Chronique : hyperlymphocytose > à 3 mois
Petits lymphocytes : Leucémie Lymphoïde Chronique
L’immunophénotypage retrouve des lymphocytes B, CD5+, monotypiques avec peu
d’immunoglobulines de surface
Si lymphocytes atypiques : nécessité d’une consultation en hématologie
Les Thrombopénies
Une thrombopénie (< 150 giga/l), même profonde, sans purpura, peut être un résultat faux lié
à l’agglutination des plaquettes en présence de l’EDTA du tube à numération. En l’absence de
signe clinique, il faut donc :
Vérifier la cohérence du chiffre des plaquettes sur le frottis (en regardant notamment
s’il y a des amas).
Contrôler la numération sur citrate (voire au bout du doigt en micro méthode).
La thrombopénie est définie si les plaquettes sont < 150 giga/l.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
55
Il n’y a pas de risque hémorragique spontané tant que les plaquettes sont > 50 giga/l sauf
thrombopathie associée (type insuffisance rénale ou médicament).
Le risque hémorragique spontané d’une thrombopénie périphérique existe et est grave
(mortalité d’environ 5 %). Il est d’autant plus grand que :
Le patient reçoit des anticoagulants ou des antiagrégants intentionnels (aspirine,
ticlopidine) ou accessoires (AINS).
Il existe un purpura extensif ou muqueux (bulles buccales), surtout s’il prend un aspect
en carte de géographie (évocateur d’une CIVD), ou s’accompagne de saignements
viscéraux.
Il existe des hémorragies au fond d’œil (systématiques sous 20 giga/l).
Les plaquettes sont < 20 giga/l.
La thrombopénie a une origine centrale.
Il y a une CIVD associée (même biologique).
Il existe un facteur anatomique de saignement : pathologie sous-jacente
potentiellement hémorragique.
Un geste vulnérant (chirurgie, biopsie) en dessous de 50 giga/l nécessite des précautions
particulières
Le myélogramme, en présence d’une thrombopénie, permet d’orienter vers :
L’origine centrale (mégacaryocytes absents ou dysmorphiques, voire présence de
cellules anormales dans la moelle osseuse),
Ou périphérique (moelle riche en mégacaryocytes normaux, pas de cellule anormale
dans la moelle osseuse).
Les thrombopénies vraies peuvent être :
Soit centrales par absence de production : insuffisance médullaire quantitative ou
envahissement par des cellules anormales
Soit périphériques
o Soit par destruction (thrombopénies immunes)
o Soit par consommation (CIVD)
o Soit par séquestration (hypersplénisme).
Les principales causes des thrombopénies périphériques sont la destruction, la consommation
ou la séquestration.
a. Destruction : immune, virale ou médicamenteuse :
o immune : soit la thrombopénie participe à un mécanisme large (anticorps
antinucléaires du lupus, facteur rhumatoïde, hépatite chronique active) soit elle
est isolée (anticorps antiglycoprotéine plaquettaire dont la prescription relève
du spécialiste).
En situation néo-natale ou post-transfusionnelle, penser à une allo-
immunisation.
o infectieuse : surtout virale HIV, EBV, CMV, hépatite B et C mais aussi si la
clinique est compatible rubéole, rougeole
o médicamenteuse : suspecter tout médicament nouvellement introduit et
l’Héparine.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
56
b. Par séquestration : hypersplénisme des rates congestives.
c. Consommation : CIVD, infection bactérienne, microangiopathie thrombotique.
Gestes à éviter devant une thrombopénie
Si la thrombopénie est inférieure à 50 giga/l :
o Injection intramusculaire
o Biopsies percutanées
o Toute intervention chirurgicale
Si la thrombopénie est inférieure à 20 giga/l :
o Ponction lombaire
o Ponction pleurale ou péricardique
o Sports traumatisants
10-Les Leucémies Aigues
L’hémogramme traduit les conséquences de l’insuffisance médullaire et de la prolifération
blastique.
a. Insuffisance médullaire
Il existe, de façon à peu près constante, mais d’importance variable :
o Anémie normocytaire arégénérative
o Thrombopénie
o Neutropénie
b. Prolifération blastique
Elle se traduit par une blastose sanguine d’importance variable, parfois absente.
Signes d’insuffisance médullaire
Ils sont le résultat de l’insuffisance de production par la moelle des éléments sanguins
normaux du fait de son envahissement par des cellules blastiques.
Syndrome anémique
Signes hémorragiques par thrombopénie
Infections favorisées par la neutropénie
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
58
Le Myélogramme
L’étude de la moelle osseuse est indiquée lorsque les données cliniques et les études du sang
périphérique évoquent un dysfonctionnement médullaire. Elle doit être précédée par
l’évaluation de l’histoire médicale, de l’examen physique, de l’hémogramme et du frottis
sanguin. Elle permet d’amener ou de confirmer le diagnostic d’une pathologie impliquant le
système hématopoïétique.
Dans la plupart des cas, il est nécessaire de réaliser une aspiration et une biopsie de la moelle
osseuse pour une évaluation hématologique complète.
La ponction biopsie médullaire permet d’effectuer un prélèvement de moelle osseuse, dans
un but d’analyse cytologique (myélogramme), histologique (biopsie), microbiologique
(myélo-culture, PCR), immunophénotypique ou cytogénétique.
La ponction consiste en une simple aspiration de cellules médullaires, alors que la biopsie
correspond au prélèvement d’un cylindre (carotte) ostéo-médullaire. Les coupes ensuite
réalisées permettent une analyse fine de la moelle hématopoïétique et du stroma médullaire.
La moelle osseuse est l'organe le plus important (plus de 1 kg) et l'un des plus actifs tout au
long de la vie. Elle fabrique en quantité énorme les globules rouges, les polynucléaires et
monocytes et les plaquettes sanguines. Elle est le lieu de naissance des lymphocytes
primordiaux, avant qu'ils ne colonisent les organes lymphoïdes.
A la naissance la moelle osseuse a définitivement pris le relais des organes hématopoïétiques
de la vie fœtale qu'étaient le foie et la rate. Elle est alors extrêmement riche, occupant tous les
espaces intra-osseux. Progressivement cette moelle va devenir graisseuse et se limiter à
quelques segments du squelette : côtes, sternum, pelvis, vertèbres, crâne, épiphyses des os
longs. A l'âge adulte l'activité médullaire est hétérogène, elle ne travaille qu'au quart de sa
capacité, mais peut mobiliser ses réserves si besoin est.
Les logettes médullaires sont séparées les unes des autres par des lamelles osseuses et sous-
tendues par une trame réticulo-vasculaire qui joue le rôle d'un filtre, véritable barrière hémo-
médullaire ne laissant passer dans le sang périphérique que les éléments cellulaires les plus
mûrs, au cyto-squelette suffisamment malléable. En cas d'anomalie structurale de cette
barrière, ou en cas d'anomalie du cyto-squelette des cellules médullaires, des éléments
immatures passent dans le sang, constituant le phénomène de la myélémie.
La moelle osseuse fabrique tous les éléments figurés du sang circulant, par l'intermédiaire de
lignées cellulaires indépendantes, toutes issues d'une même cellule souche.
Le secteur des cellules souches est quantitativement faible mais physiologiquement très
important. Il est auto entretenu, le stock de cellules souches étant fixe tout au long de la vie. Il
est en fait très complexe, formé d'une part de cellules totipotentes capables de générer
n'importe quel précurseur de cellule sanguine, d'autre part de cellules multi, bi ou unipotentes
engendrant une ou plusieurs lignées, enfin de cellules précurseurs de lignée déjà engagées
dans un processus de différenciation irréversible qui n'aboutira qu'à un seul type de cellule
mûre.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
59
Figure 68: Histologie de la Moelle osseuse
Les lignées cellulaires naissent d'une cellule souche précurseur et comportent une phase de
multiplication cellulaire et une phase de maturation, sans division, au cours de laquelle la
cellule acquiert ses caractéristiques de cellule mûre fonctionnelle.
Les lignées granuleuses représentent environ 60% des cellules médullaires et comportent
trois sous-lignées : neutrophile, éosinophile et basophile. La phase de multiplication est faite
des stades de myéloblastes, promyélocytes et myélocytes, ces derniers correspondant à
plusieurs mitoses successives. La phase de maturation est faite des stades de métamyélocytes
et polynucléaires. Il faut environ 6 jours pour passer du stade de myéloblaste à celui de
polynucléaire.
La lignée érythroblastique représente environ 20% des cellules médullaires et aboutit au
globule rouge anucléé. Les stades de prolifération comportent les proérythroblastes, les
érythroblastes basophiles et les érythroblastes polychromatophiles, le stade de maturation les
érythroblastes acidophiles. Il faut environ 5 jours pour faire un globule rouge à partir d'un
proérythroblaste.
La lignée plaquettaire ne comporte qu'un très faible pourcentage de cellules médullaires du
fait que la phase de prolifération se fait par endomitose aboutissant à des cellules géantes, les
mégacaryocytes, qui donnent naissance aux plaquettes sanguines par fragmentation de leur
cytoplasme
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
60
La moelle osseuse contient aussi environ 20% de cellules blanches non granuleuses
comprenant des monocytes, un faible pourcentage de lymphocytes primordiaux, des
lymphocytes sanguins et des plasmocytes.
Multiplication et différenciation cellulaire se font sous l'impulsion d'une cascade complexe
de facteurs de croissance appelés cytokines (GM-CSF, G-CSF, érythropoïétine,
interleukines, etc.).
Exploration de la moelle osseuse
Les méthodes d'exploration de la moelle osseuse, utilisables en clinique, sont au nombre de
cinq : l'hémogramme, les méthodes d'étude morphologique directe par ponction ou biopsie,
les explorations isotopiques et les cultures in vitro.
1 - La banale numération formule sanguine (NFS) est sans conteste la plus simple à
condition de bien savoir l'interpréter. Les cellules sanguines sont en effet le reflet de l'activité
médullaire et presque toutes les anomalies dans l'équilibre des lignées médullaires se
traduisent par des anomalies quantitatives de la NFS. En fait le recours aux autres modes
d'exploration de la moelle osseuse est rare pour qui sait interpréter correctement une NFS.
2 - La ponction médullaire, généralement au niveau du sternum, permet une étude
morphologique précise des diverses lignées cellulaires présentes dans la moelle, de leur
équilibre respectif et de leur degré de maturation. Les prélèvements de moelle par ponction
permettent aussi des études cytochimiques, d'immunomarquages et de cytogénétiques qui
aident à la caractérisation des cellules, notamment au cours des phénomènes pathologiques.
En revanche elle ne renseigne que très approximativement sur la véritable richesse de la
moelle et ne donne aucun renseignement sur sa structure.
3 - C'est la biopsie, généralement au niveau de l'os iliaque, qui fournit au mieux ces
renseignements. La richesse cellulaire de la moelle, la quantité de cellules graisseuses, la
présence ou non de fibrose, l'infiltration par des cellules sarcomateuses ou tumorales sont
mieux appréciées par la biopsie que par la ponction.
4 - Les explorations isotopiques sont de deux types, les unes permettent d'étudier la
répartition et la richesse globale de la moelle osseuse active (par injection d'isotopes
radioactifs de Technétium ou Indium) et d'obtenir des images scintigraphiques de cette
répartition, les autres explorent en fait la physiologie de la lignée érythroblastique et la
synthèse de l'hémoglobine par l'injection de Fer radioactif.
5 - Les cultures de moelle in vitro sont passées du domaine de la recherche sur les cellules
souches au domaine clinique et sont actuellement un moyen privilégié d'affirmer certains
diagnostics d'hémopathies tels que les polyglobulies primitives et les diverses
myélodysplasies. Une forme particulière de culture de moelle de courte durée permet l'étude
cytogénétique des cellules médullaires, très utile dans le diagnostic de certaines hémopathies
malignes, notamment la leucémie myéloïde chronique.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
61
Technique du prélèvement
Le prélèvement de moelle osseuse en vue d'un examen cytologique se fait avec un trocart
(dont l'ancêtre est le trocart de Mallarmé) auquel on adapte une seringue pour aspirer le suc
médullaire. Le lieu privilégié de prélèvement est le manubrium sternal (partie supérieure du
sternum) qui est un des os plats restant le plus riche en moelle jusqu'à un âge avancé de la vie.
Cependant chez l'enfant ce site peut présenter un danger (présence en arrière du sternum des
feuillets pleuraux) et on lui préfère la crête iliaque ou une apophyse vertébrale.
Figure 69: Trocart de ponction (en haut) et de biopsie (en bas)
La pénétration de l'os se fait en deux temps : corticale puis médullaire et ne nécessite qu'une
anesthésie locale. Le suc médullaire recueilli est projeté sur une lame inclinée pour le
débarrasser du sang qui dilue la moelle proprement dite, puis les grumeaux de moelle sont
récupérés et étalés sur lame par écrasement et séchage rapide. La moelle peut aussi être
utilisée pour des études cytochimiques (peroxydases, coloration de Perls…), cytogénétiques et
immunomarquages.
Il est communément admis de pratiquer en première intention une biopsie médullaire en
supplément de l’aspiration. Cette attitude évite un second geste invasif ultérieur et n’accroît
pas de manière significative les risques de la procédure.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
62
Figure 70: Indication d'une ponction-biopsie de moelle
Tout désordre sévère de la coagulation (hémophilie sévère, coagulopathie intravasculaire
disséminée sévère, etc.) constitue, en l’absence de substitution adéquate, une contre-indication
absolue.
La thrombocytopénie n’est pas une contre-indication absolue. Cependant, il est nécessaire
d’obtenir par transfusion plaquettaire une valeur de thrombocytes supérieure à 20 G/l. Il est
admis que l’INR des patients anticoagulés ne doit pas être supérieur à 1, 5. Ces valeurs sont
indicatives en l’absence de données claires dans la littérature. Un avis spécialisé est nécessaire
en cas de doute.
Une infection de la peau ou une ostéomyélite à proximité de la zone de ponction/biopsie
constituent également une contre-indication.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
63
Figure 71: Matériels pour la ponction de biopsie médullaire
Choix du site d’aspiration/biopsie
• La crête iliaque est le seul site où une aspiration et une biopsie peuvent être réalisées avec
sécurité chez l’adulte.
En effet, l’os pelvien contient une grande quantité de moelle osseuse et aucun organe vital ne
se trouve dans sa proximité immédiate :
l’épine iliaque postéro-supérieure (partie médiane de la crête iliaque postérieure) est
le site de premier choix (figure 2) ;
l’épine iliaque antérieure peut être choisie exceptionnellement pour aspiration et
biopsie chez les patients pour lesquels un accès à l’épine iliaque postéro-supérieure est
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
64
limité (impossibilité pour le patient de se mettre en position permettant d’accéder à
l’épine iliaque postérosupérieure, obésité morbide, maladie de la peau ou irradiation
antérieure).
Figure 72: Matériels pour la ponction médullaire
Figure 73: Epine iliaque postéro-supérieure
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
65
L’analyse d’un site ayant été préalablement irradié offre généralement des résultats
suboptimaux, notamment en termes de cellularité. Un autre site devra donc être choisi.
• Une aspiration peut être réalisée au niveau du sternum mais la biopsie est formellement
contre-indiquée en raison des risques de complications dus à l’épaisseur faible de l’os à cet
endroit (voir chapitre «Complications»). L’aspiration sternale peut notamment être indiquée si
le pelvis a préalablement été irradié ainsi que chez des patients avec une obésité morbide ou
immobilisés.
• En cas d’indication clinique, l’aspiration peut également être réalisée en d’autres sites (site
de maladie osseuse focale) mais il est nécessaire de réaliser cette procédure sous contrôle
scanographique.
• Un prélèvement sous contrôle radiologique est également indiqué chez les patients
présentant une obésité sévère, en cas d’impossiblité d’identifier le site d’aspiration et de
biopsie.
Choix de la séquence aspiration-biopsie
• L’aspiration et la biopsie peuvent être réalisées à partir du même point d’incision cutanée.
L’os doit cependant être pénétré en deux points différents, distants de 1 cm au minimum.
• Lorsque la biopsie est réalisée avant l’aspiration, une libération de substances
prothrombotiques peut contribuer à une coagulation et donc à l’obtention d’un aspirât de
moindre qualité.
• Cependant, la réalisation de l’aspiration avant la biopsie peut provoquer une hypocellularité
artéfactuelle et une contamination de l’échantillon biopsié par du sang sinusoïdal.
• Au vu de ces considérations, la plupart des auteurs estiment que la séquence de réalisation
est peu importante tant que la distance minimum de 1 cm entre les deux zones d’examen est
respectée.
Confort du patient
• Des explications appropriées sur le déroulement de la procédure doivent être données au
patient qui doit, notamment, être averti des douleurs survenant lors de l’aspiration.
• Une anesthésie locale adéquate est primordiale. La peau, le tissu sous-cutané et le périoste
doivent être anesthésiés, avec une attention particulière pour le périoste. Il est important de
tester l’efficacité de l’anesthésie avant de débuter.
• Une prémédication peut être envisagée si le patient est particulièrement anxieux où si
d’éventuelles complications ont été anticipées. Une étude randomisée en double aveugle avec
contrôle placebo a démontré que l’utilisation de lorazépam 4 mg n’a pas conféré d’avantages
sur le plan de l’analgésie décrite par les patients quinze minutes après la réalisation du geste.
Cependant, ses propriétés amnestiques permettent une réduction de l’impression de douleur
ressentie à 24 heures de la réalisation du geste. Chez les patients pour lesquels une PBM doit
être répétée à de multiples reprises (patient avec leucémie ou lymphome), cette option peut
être envisagée.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
66
Préparation
• Après s’être assuré de l’absence de contre-indications et d’allergies à l’un des produits
utilisés (y compris latex et anesthésiques locaux), une explication concernant l’utilité, le
déroulement et les complications potentielles du geste est donnée au patient.
• Un consentement éclairé oral ou écrit est établi.
• Le positionnement du patient dépend du site de ponction choisi. Pour un geste au niveau de
l’épine iliaque postérieure, le décubitus ventral et le décubitus latéral sont possibles.
• Le repérage du site de ponction nécessite une bonne palpation de la crête iliaque postérieure
et de l’épine iliaque postéro-supérieure. Un marquage peut être effectué. Habituellement, la
ponction s’effectue au niveau de l’épine iliaque postéro-supérieure ou sur le tiers médian de la
crête iliaque, en visant l’épine iliaque antéro-supérieure afin de s’éloigner du sacrum. L’usage
d’un masque chirurgical et de gants stériles est requis. Le port d’une blouse stérile est
facultatif.
Désinfection-anesthésie
• La désinfection s’effectue de façon standard (centrifuge à trois reprises, à partir du site
d’aspiration-ponction et sur un diamètre de 15 cm environ), puis le champ stérile est mis en
place.
• L’anesthésie locale est réalisée avec une attention particulière sur le périoste, sur une surface
suffisamment grande, la biopsie étant réalisée à 1 cm de l’aspiration.
• L’épaisseur du tissu sous-cutané est déterminée durant la réalisation de l’anesthésie et la
garde (selon le modèle de trocart) peut ensuite être ajustée.
Aspiration
• Une incision cutanée de 2-3 mm est effectuée au moyen d’une lame de scalpel (n° 11) afin
de faciliter l’entrée de l’aiguille d’aspiration et de favoriser une cicatrisation optimale.
• L’aiguille d’aspiration est insérée perpendiculairement à la peau, jusqu’à ce qu’elle touche le
périoste. Lorsque l’aiguille avance en direction du périoste, sa pointe doit être dirigée en
direction de l’épine iliaque antéro-supérieure afin d’éviter d’atteindre l’articulation sacro-
iliaque.
• Un mouvement circulaire est appliqué à l’aiguille tout en exerçant une certaine pression afin
de traverser l’os cortical. Une perte de résistance soudaine indique l’entrée dans la cavité
médullaire. L’aiguille pénètre de 1-2 mm.
• Une seringue stérile de 20 ml permet l’aspiration de 2-5 ml de moelle. Le patient est averti
une nouvelle fois que l’aspiration peut être douloureuse. L’échantillon est contrôlé
immédiatement par un(e) laborantin(e) qui s’assure de la présence de grumeaux de moelle.
Prélever si besoin d’autres échantillons de moelle en fonction des analyses nécessaires.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
67
• Le mandrin est remis en place et l’aiguille retirée en réalisant à nouveau de faibles
mouvements de rotation. Une compresse stérile est appliquée jusqu’à l’arrêt du saignement.
Biopsie
• La biopsie est réalisée au niveau de l’épine iliaque postérieure ou exceptionnellement
antérieure, mais jamais au niveau du sternum.
• L’aiguille est avancée jusqu’à toucher le périoste, en utilisant la même incision que pour
l’aspiration mais avec un angle légèrement différent de façon à prélever une zone distincte. Le
mandrin est ensuite retiré.
• Avancer en pratiquant des mouvements de rotation et contre-rotation en exerçant une légère
pression. L’entrée dans la cavité médullaire est détectée par une soudaine diminution de
résistance. La pression nécessaire est généralement plus importante que pour l’aspiration en
raison du diamètre plus important de l’aiguille utilisée pour la biopsie. A la perte de
résistance, poursuivre l’introduction de l’aiguille sur 1-2 cm. Une sonde de mesure permet
d’établir la longueur de la carotte de moelle.
• Quand la longueur souhaitée (au minimum 1 cm) est obtenue, le TRAP system (dispositif
s’insérant dans l’aiguille et qui permet de détacher la carotte de moelle) est introduit. Un
mouvement de demi-tour dans le sens horaire puis dans le sens anti-horaire est réalisé. Ceci
permet de détacher la carotte de l’os et de l’extraire. L’aiguille est retirée en réalisant des
mouvements rotatifs. Un pansement stérile est mis en place et une pression permet l’arrêt du
saignement.
• L’échantillon est retiré en introduisant la sonde à travers l’extrémité coupante.
• Après l’extraction, l’échantillon doit être observé :
aspect normal d’une carotte : rouge avec un fin réseau trabéculaire blanchâtre ;
en cas de moelle hypocellulaire, le réseau trabéculaire reste bien visible mais on ne
voit pas de moelle rouge ;
le cartilage est blanc et lisse ;
l’os cortical est blanc ;
un aspect marbré peut indiquer un remplacement tumoral ou granulomateux
. Une autre biopsie doit être réalisée si l’échantillon est inadéquat.
• En cas de thrombocytopénie sévère ou de troubles importants de la coagulation, un
saignement excessif peut être prévenu en exerçant une ferme pression durant cinq minutes.
Dans tous les cas, il est conseillé au patient de demeurer en décubitus dorsal sans se lever
durant environ une heure.
• Le point de ponction ou d’aspiration peut rester légèrement douloureux pendant quelques
jours et le patient doit être informé de la nécessité de contacter son médecin en cas de
tuméfaction, douleurs marquées ou de saignement.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
68
Aspiration blanche
• Une aspiration est qualifiée de blanche lorsqu’elle n’a pas permis d’obtenir de matériel ou
lorsque le matériel obtenu ne contient pas de grumeaux de moelle osseuse mais uniquement
du sang médullaire. La cause la plus fréquente de ponction blanche est le mauvais
positionnement de l’aiguille dans la cavité médullaire. Tenter de répéter la manœuvre si une
erreur technique est suspectée : replacer le mandrin dans l’aiguille et repositionner.
Certaines pathologies peuvent également être responsables d’aspiration blanche :
désordres myéloprolifératifs : myélofibrose, ostéosclérose (primaires ou secondaires) ;
leucémie à tricholeucocytes ;
infiltration médullaire massive et compacte : lymphomes, leucémies ;
anémie aplasique.
• La biopsie permet de mettre en évidence les modifications pathologiques consécutives aux
pathologies sus-mentionnées.
Complications
Hémorragie
• Une hémorragie secondaire à une aspiration de moelle peut survenir sur n’importe quel site,
particulièrement chez des patients avec troubles de la coagulation, thrombocytopénie ou
fonction plaquettaire anormale. Le plus souvent il s’agit d’un hématome local. Rarement, on
peut observer une hémorragie rétro-péritonéale, intramusculaire ou intraabdominale.
• Le saignement peut généralement être maîtrisé par un pansement compressif et la mise en
décubitus dorsal permet une compression locale. En cas d’hématome glutéal important, il faut
envisager un drainage sous CT-scanner.
• Comme décrit plus haut, il convient de considérer une transfusion plaquettaire chez les
patients thrombocytopéniques à moins de 20 G/l.
• Relevons enfin que les patients avec ostéoporose, maladie de Paget et autres maladies
osseuses sont plus à risque de présenter des complications hémorragiques
Infections au niveau du site d’aspiration-biopsie
Cette complication demeure rare, pour autant que les précautions d’asepsie soient respectées.
Les patients immunodéprimés sont plus à risque de développer une infection secondaire à
l’intervention.
Complications liées à l’aspiration sternale
Les complications potentielles sont graves en cas de passage au travers du sternum qui ne
mesure que 1 cm chez l’adulte :
tamponnade cardiaque ;
pneumothorax ;
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
69
embolie pulmonaire ;
médiastinite ;
fracture sternale.
Pour ces raisons, l’aspiration de moelle au niveau sternal demeure un geste réservé au
spécialiste expérimenté et n’est pratiquée qu’en cas d’impossibilité au niveau des autres
points de ponction.
Infiltration du plexus nerveux sacré par du produit anesthésiant
• De rares cas de paresthésies ou de faiblesse unilatérale d’un membre inférieur sont décrits. Il
s’agit pour la plupart de patients modérément obèses, relativement intolérants à la douleur et
qui ont nécessité des doses plus importantes de produits pour induire une anesthésie locale. La
résolution est habituellement simple sans thérapie spécifique.
Rupture de l’aiguille dans l’os
Complication très rare. Si l’aiguille ne peut facilement être ôtée, envisager une attitude
chirurgicale.
Implications pratiques
> Les contre-indications englobent les désordres sévères de la coagulation (indiquant
une substitution), et les infections au site de ponction. La perfusion de concentrés
plaquettaires est nécessaire en cas de thrombopénie marquée (< 20 G/l)
> Une asepsie rigoureuse est requise. Les complications (hémorragies, infections,
infiltration du plexus nerveux) peuvent s’avérer sérieuses, mais sont rares en cas de
respect et de bonne connaissance de la procédure
> Le sternum constitue un site d’aspiration médullaire exceptionnel. La biopsie y est
formellement contre-indiquée
Figure 74: Confection des étalements médullaires
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
70
Figure 75: Grains Médullaires
Techniques de lecture au microscope
Elle se fait en 2 temps : une première lecture, rapide, à un faible grossissement (x10 ou x20),
une seconde lecture approfondie à l'immersion (x100) pour établir le pourcentage des cellules
médullaires.
La première lecture au faible grossissement
Apprécie la richesse de la moelle, permet de compter les mégacaryocytes, recherche
d'éventuels amas de cellules, enfin choisit le meilleur endroit, bien étalé, pour faire le
décompte des cellules médullaires.
La richesse de la moelle
L'appréciation de la richesse de la moelle est essentielle pour interpréter le myélogramme
final même si cette appréciation est grossière et imprécise. Elle comporte une cotation en 5
grades : de 0 (moelle désertique, quasi vide de cellules) à 4 (moelle hyperplasique où les
cellules sont tassées les unes contre les autres), avec les intermédiaires de 1 (moelle pauvre), 2
(moelle normale) et 3 (moelle un peu trop riche). L'indication de la richesse de la moelle doit
toujours être donnée sur la feuille de résultat.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
71
Figure 77: Richesse 0 (présence inconstante de cell)
Figure 76: Moelle Pauvre
Figure 78: Moelle de richesse normale
Figure 79: Moelle hypercellulaire
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
72
Le comptage des mégacaryocytes
Les mégacaryocytes étant en faible nombre par rapport au reste des cellules médullaires, ils ne
peuvent pas être inclus dans les pourcentages du myélogramme, ils représentent moins de
0,001% de ceux-ci. Cependant leur présence doit être attestée pour affirmer qu'une moelle est
normale. On doit donc les compter sur l'ensemble de la lame, au faible grossissement (x10 ou
x20) où ils apparaissent nettement comme de très grosses cellules. Leur nombre absolu
dépend de la longueur du frottis, en général il se situe aux alentours de 50. Au dessous de 10 à
15 la moelle est pauvre en mégacaryocyte, au dessus de 100 elle est anormalement riche en
mégacaryocytes. En cas d'aplasie médullaire il y a absence totale de mégacaryocyte sur le
frottis.
La recherche des amas de cellules
Elle se fait elle aussi à un faible grossissement.
Recherche des inégalités de répartition des lignées, notamment les amas d'érythroblastes qui
ont tendance à former des îlots (attention au risque de fausser les pourcentages),
Recherche de cellules non hématopoïétiques ou étrangères à la moelle : cellules non
hématopoïétiques mais constitutives de la moelle normale (cellules graisseuses, ostéoblastes,
ostéoclastes), cellules extra médullaires, souvent en amas, ramenées fortuitement lors du
prélèvement (cellules de la peau, cellules glandulaires, cellules pharyngées).
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
73
Figure 80: Cellules adipeuses
Recherche de cellules métastatiques, le plus souvent en amas, dans une moelle généralement
pauvre,
Figure 81: Amas de cellules métastasiques
Ostéoblastes
Cellules ovalaires ou fusiformes, de 20 à 40 µm de long, souvent regroupées en petits amas.
Le rapport N/C est bas, le noyau est ovalaire et excentré, avec une chromatine finement
dessinée.
Le cytoplasme est gris-bleu ou bleu, et les contours cytoplasmiques sont souvent peu nets.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
74
Figure 82: Ostéoblastes
Ostéoclaste
Cellule géante (jusqu'à 100 µm de diamètre), contenant 8 à 16 noyaux arrondis ou ovalaires et
de taille identique.
Le cytoplasme est basophile ou rosé et contient de nombreuses granulations rouge-violacé.
Figure 83: Ostéoclastes
Mastocyte (et un grand lymphocyte)
Le mastocyte est une cellule que l'on ne rencontre qu'occasionnellement dans la moelle normale.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
75
Figure 84: Mastocyte
Histiocyte
C'est l'une des formes de transformation du monocyte : la cellule a une grande taille (jusqu'à
50 µm de diamètre), avec un noyau arrondi et clair. Le cytoplasme est rempli de manière très
variable de débris de macrophagie de formes et de couleurs diverses.
Figure 85: Histiocyte
Hémoblaste
Il s'agit d'un blaste : 20 à 30 µm de diamètre, rapport N/C élevé, chromatine fine et nucléolée,
cytoplasme basophile dépourvu de granulations. Cette cellule correspond à un progéniteur,
c'est à dire à un stade plus précoce que celui des précurseurs des différentes lignées myéloïdes
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
76
: on ne retrouve ni granulations (comme pour le myéloblaste) ni noyau rond (comme pour le
proérythroblaste).
Figure 86: Cellule blastique
Plasmocyte
Cellule arrondie ou ovalaire (15 à 30 µm de diamètre). Le noyau est ovale, petit (rapport N/C
= 0,3 à 0,4), excentré, avec une chromatine densément mottée. Le cytoplasme est abondant,
basophile, avec une région mal délimitée et plus claire qui colle au noyau : l'archoplasme
(cette zone claire correspond à l'appareil de Golgi).
Figure 87: Plasmocyte
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
77
Les hémoblastes et les plasmocytes sont constamment présents dans la moelle normale, mais
en faible pourcentage (moins de 3% chaque fois). Les ostéoblastes et les ostéoclastes
s'observent occasionnellement sur les frottis de moelle des enfants, et très rarement chez
l'adulte. Les histiocytes macrophages et les mastocytes sont rares, et nécessitent une recherche
attentive chez le sujet sain.
Monocyte médullaire
Les granulations sont plus nettement visibles et en outre le cytoplasme est bleu plutôt que
gris-bleu : ces deux critères d'immaturité définissent le monocyte médullaire.
Figure 88: Monocyte Médullaire
Environ la moitié des monocytes médullaires est morphologiquement identique aux
monocytes sanguins. L'autre moitié présente un noyau moins contourné, souvent quelques
granulations cytoplasmiques nettement visibles et/ou un cytoplasme plus basophile : ces petits
signes d'immaturité définissent le monocyte "médullaire"(parfois également appelé
"promonocyte").
Recherche de cellules pathologiques diverses : cellules des maladies par surcharge,
macrophages, parasites.
Le choix de l'endroit de comptage
Il est nécessaire pour établir le pourcentage des cellules médullaires de choisir un endroit de la
lame qui ne comporte aucun artefact ou difficulté de lecture : cellularité ni trop faible ni trop
forte, coloration normale et homogène, absence de rayures ou tache de colorant, hématies ni
lysées ni tassées, cellules médullaires bien détachées et bien étalées, à bords nets, absence
d'îlots d'érythroblastes.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
78
Figure 89: Moelle bien étalée
La seconde lecture à l'immersion
Permet d'établir le pourcentage des cellules médullaires. Pour cela il faut : donner un nom à
toutes les cellules observées, compter au moins 200 cellules, rendre le résultat sous forme du
pourcentage de chaque catégorie cellulaire, rédiger une conclusion avec un commentaire sur
les éventuelles anomalies constatées.
Donner un nom à toutes les cellules est essentiel sous peine de fausser complètement le
résultat final. Doivent être comptabilisées et nommées toutes les cellules comprenant un
cytoplasme et un noyau, il ne faut pas « sauter » celles où l'on hésite, au besoin ouvrir une
rubrique « cellules de nature non définie » et revoir ces cellules en fin de comptage si leur
pourcentage est important (> 2 à 3%), faire attention aux noyaux nus ou aux cellules éclatées
(s'ils sont nombreux il peut s'agir de la cellule pathologique), comptabiliser dans un champ les
cellules visibles en entier et non coupées sur les bords du champ.
Le Nombre de cellules examinées et comptées doit être au moins de 200, mais il peut s'avérer
nécessaire d'en compter plus (400) en cas d'anomalies de maturation (blocage médullaire). Il
convient de compter ensemble la lignée granuleuse, la lignée érythroblastique et les cellules
blanches non granuleuses et de rapporter leur taux à 100. Commentaire et conclusion sont
utiles si des anomalies de répartition sont constatées ou si l'on observe des anomalies
morphologiques d'une lignée ou d'un type cellulaire.
Le Myélogramme
La feuille de résultat doit comporter : outre les mentions d'identification (nom, date…),
l'indication du siège de la ponction, l'appréciation de la dureté de l'os ponctionné, la cotation
de la richesse médullaire, le nombre absolu des mégacaryocytes sur l'ensemble de la lame, le
pourcentage d'ensemble de chaque lignée médullaire, le pourcentage des diverses cellules des
lignées, un commentaire sur d'éventuelles anomalies morphologiques ou sur la présence de
cellules étrangères, une conclusion
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
80
Le myélogramme normal
A été réalisé sans difficulté de pénétration de l'os, Est de richesse 2 ou 3,
Comporte un nombre de mégacaryocytes égal ou supérieur à 50 pour un étalement occupant
les 2/3 de la surface de la lame,
Montre un équilibre entre les 3 types de lignées cellulaires :
Lignée granuleuse : 60% (± 10),
Lignée érythroblastique : 25% (± 5),
Lignées non granuleuses : 15% (± 5).
Montre une image de « prolifération - maturation » harmonieuse pour les lignées
granuleuses et érythroblastiques. Les pourcentages à l'intérieur de ces deux lignées sont en
effet le reflet de leurs deux étapes de formation : étape de prolifération (division cellulaire)
et étape de maturation (sans division cellulaire).
Pour la lignée granuleuse:
Étape de prolifération : peu ou pas de myéloblastes, peu de promyélocytes (coefficient de
prolifération x 2), beaucoup de myélocytes (car plusieurs mitoses successives, soit un
coefficient de prolifération x 4 à 8).
Étape de maturation : pourcentage identique de métamyélocytes et de myélocytes, un plus
grand nombre de polynucléaires car il existe un compartiment de stockage de polynucléaires
mûrs et le prélèvement de moelle est toujours dilué de sang.
Exemple de pourcentages pour la lignée granuleuse : 1 % de myéloblastes, 3% de
promyélocytes, 19% de myélocytes, 15% de métamyélocytes et 23% de polynucléaires (total
des granuleux : 61 %).
Pour la lignée érythroblastique
Étape de prolifération : peu ou pas de proérythroblastes, un peu plus d'érythroblastes
basophiles (coefficient de prolifération x 2) et beaucoup d'érythroblastes polychromatophiles
(car plusieurs mitoses successives).
Étape de maturation : pourcentage très proche d'érythroblastes polychromatophiles et
acidophiles.
Exemple de pourcentages pour la lignée érythroblastique: 1% de proérythroblastes, 3% de
basophiles, 8% de polychromatophiles et 10% d'acidophiles (total des érythroblastes : 22%).
Moelles pathologiques
La pathologie médullaire peut être divisée en huit catégories d'anomalies.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
81
1- Les anomalies quantitatives
La moelle peut être anormalement riche ou au contraire anormalement pauvre.
La richesse cellulaire anormale d'une moelle peut être réactionnelle ou le fait d'une
prolifération maligne. C'est le polymorphisme (moelle réactionnelle) ou au contraire le
monomorphisme (prolifération maligne) de la moelle qui permet de trancher, à l'exception
près de certains syndromes myéloprolifératifs malins qui sont polymorphes.
Les moelles pauvres ou désertiques sont dues à des aplasies ou à des fibroses. Ces anomalies
peuvent être primitives ou secondaires (toxiques, infections virales).
Figure 91: Moelle de richesse augmentée
Figure 92: Moelle pauvre
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
82
Figure 93: Aplasie médullaire
2- Les déséquilibres entre les diverses lignées médullaires
Peuvent porter sur chacune des trois lignées principales de la moelle osseuse :
Hyperplasie de la lignée érythroblastique secondaire à une anémie périphérique par
hémorragie ou hémolyse.
Hyperplasie de la lignée granuleuse secondaire à une infection ou à une maladie
inflammatoire. Hyperplasie de la lignée mégacaryocytaire secondaire à une thrombopénie
périphérique.
3- Les moelles dites réactionnelles
Sont caractérisées par la présence de cellules lymphoïdes activées polymorphes, de
plasmocytes, de macrophages et monocytes et de polynucléaires éosinophiles. Le pourcentage
de ces diverses cellules est variable, aux environs de 20%. Cette réaction médullaire n'est pas
spécifique et s'observe dans un grand nombre d'états pathologiques (toxiques, viroses,
parasitoses).
4- Les anomalies de maturation d'une ou plusieurs lignées
Se traduisent par un blocage avec accumulation des cellules situées en amont de la
maturation. Elles peuvent être dues à un hypersplénisme ou s'observer lors de la phase de
réparation d'une agression toxique de la moelle. Mais elles peuvent aussi être la traduction
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
83
d'une myélodysplasie qui n'est le plus souvent qu'un état temporaire, pré leucémique. Un
blocage complet des premiers stades de la prolifération traduit une leucémie aiguë.
5-Les proliférations malignes
Peuvent porter sur une ou plusieurs lignées médullaires.
L'hyperplasie maligne d'une lignée peut s'accompagner d'une maturation plus ou moins
complète de celle-ci aboutissant à une production accrue de cellules mûres. Ce sont les
syndromes myéloprolifératifs (leucémie myéloïde chronique, polyglobulie primitive,
thrombocytémie), auxquels on rattache les hyperplasies malignes de la trame réticulaire
(ostéo-myélosclérose primitive).
La prolifération maligne de cellules souches avec hiatus complet de maturation caractérise les
leucémies aiguës, myéloïdes ou non.
La prolifération maligne peut porter sur les cellules immunitaires entraînant des syndromes
lymphoprolifératifs qui selon la cellule en cause donnent une leucémie lymphoïde chronique
(LLC), un myélome ou une maladie de Waldenstrom.
6- Les métastases
Peuvent infiltrer la moelle osseuse, organe filtre par excellence. Ces métastases peuvent
provenir d'un adénocarcinome ou d'un sarcome. Les cellules métastatiques forment
généralement des amas dans une moelle par ailleurs pauvre et siège d'une fibrose
réactionnelle.
Figure 94: Amas cellulaires
7- Les maladies par surcharge
Sont des affections métaboliques congénitales telle que la maladie de Gaucher. Le métabolite
bloqué s'accumule volontiers dans les macrophages de la moelle osseuse dont la ponction est
alors un bon moyen de diagnostic.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
84
Figure 95: Cellule de Gaucher
8- Les nécroses médullaires
Sont rares. Elles sont dues à la tuberculose et à certaines viroses. Dans la littérature la nécrose
médullaire est secondaire dans la majorité des cas à une hémopathie (60 % des cas) ou à une
tumeur solide (30 % des cas), plus rarement à d’autres causes. Les douleurs osseuses et la
fièvre sont fréquemment mentionnées, associées à des cytopénies d’importance variable avec
augmentation des lactates déshydrogénases et phosphatases alcalines sériques, toutes
anomalies non spécifiques, surtout dans le cadre de maladies cancéreuses. L’examen
médullaire permet le diagnostic : les cellules sont pycnotiques, non identifiables, au sein d’un
matériel grisâtre ou orangé, et l’histologie quand elle est réalisée montre une disparition des
espaces graisseux avec préservation du tissu osseux. L’hypoxémie tissulaire après défaillance
de la microcirculation est le mécanisme le plus souvent mis en avant pour expliquer la
nécrose, quelle que soit la maladie causale. Outre un traitement symptomatique adapté, le
traitement rapide de la maladie causale est nécessaire. Le pronostic, bien que lié à maladie
sous-jacente, est souvent péjoratif quand la nécrose médullaire est étendue.
Figure 96: Aspect de nécrose médullaire
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
88
Biopsie ostéo-médullaire
Compte rendu d’une biopsie médullaire osseuse
Il doit comprendre :
1. taille et qualité de la biopsie
2. analyse des travées osseuses
3. densité et distribution des cellules hématopoïétiques
4. évaluation quantitative et qualitative des trois lignées
5. analyse des cellules lymphoïdes, des plasmocytes et mastocytes
6. présence d’histiocytes, matériel phagocyté, granulations
7. présence ou non d’une population de cellules anormales
8. modification du stroma (œdème, hémorragie, fibrose) et des vaisseaux
9. l’aspect de la trame de soutien
Compte rendu d’une biopsie médullaire normale
Renseignements cliniques : bilan d’extension d’un lymphome de Hodgkin classique
Cylindre biopsique mesurant 1 cm de longueur, de bonne qualité. Les travées osseuses sont
d’aspect normal. Les espaces médullaires sont occupés par une moelle adipeuse contenant une
population hématopoïétique de richesse 3.
La lignée érythroblastique est constituée par une majorité d’érythroblastes matures souvent
groupés en petits nids. La lignée granuleuse comporte des éléments de tout âge, sans trouble
de maturation. Les éléments éosinophiles sont en pourcentage normal. Les mégacaryocytes de
morphologie normale sont régulièrement dispersés dans les espaces médullaires.
L’imprégnation argentique montre une trame de soutien normale. La coloration de Perls
objective un peu de pigment hémosidérinique dans les histiocytes macrophages. Les
plasmocytes, d’aspect mature, sont en nombre modéré, à prédominance périvasculaire.
Absence de localisation tumorale sur les coupes étagées dans le bloc d’inclusion.
CONCLUSION : Moelle hématopoïétique de richesse 3.
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
89
Histologie normale de la moelle osseuse
Travées osseuses
Espaces médullaires
■ Adipocytes
■ Cellules hématopoïétiques :
Lignée érythroblastique
Lignée granuleuse
Lignée mégacaryocytaire
�La lignée monocytaire n’est pas reconnaissable
■ Autres cellules lymphocytes
Plasmocytes
Mastocytes
Histiocyte-macrophages
■ Trame de soutien
■ Vaisseaux
Principales lignées myéloïdes
A l’état normal, quel que soit l’âge :
1. Erythroblastes (clusters) : 20 à 40 %
2. Lignée granuleuse : 60 à 80 %
3. Mégacaryocytes : 3 à 8 dispersés dans chaque espace médullaire
Normal G: E ratio = 1, 5 to 3
Répartition et richesse médullaire
Chez l’adulte
■ Cellules adipeuses et hématopoïétiques occupent une surface plus ou moins égale
(richesse 3)
■ Si des zones plus grandes sont occupées par des adipocytes :
�Hypoplasie (richesse 1 ou 2)
�Aplasie (richesse 0)
■ Si des zones plus grandes sont occupés par des cellules hématopoïétiques :
�Hyperplasie (richesse 4 ou 5, disparition des adipocytes)
■ NB : espaces muets physiologiques sous-corticaux
Variations selon l’âge
■ Chez l’enfant : richesse 4 ou 5
■ après 70 ans : richesse 1 ou 2, souvent hétérogène
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
90
Lignée érythroblastique
La maturation érythroblastique se traduit par une diminution de taille des cellules
(noyau, cytoplasme) et une diminution de la basophilie cytoplasmique
- 1 proérythroblaste grande cellule au noyau rond et clair, 1 à 3 nucléoles, cytoplasme
basophile, difficile à distinguer d’un myéloblaste
2 - érythroblaste basophile noyau de plus petite taille, chromatine plus dense, petit
nucléole
3 - érythroblaste polychromatophile, acidophile : Dernier stade de maturation petit
noyau rond, chromatine sombre homogène, cytoplasme clair ou rose, avec membrane
cellulaire distinct, difficile à distinguer d’un lymphocyte.
Clusters plage d’érythroblastes matures autour de blastes jeunes située au centre des
espaces médullaires, près des sinus.
Immunohistochimie : glycophorine C, hémoglobine A, quelquefois EMA
Lignée granuleuse Ŕ 1
1 Ŕ myéloblastes : (rare) cellule moyenne à grande avec noyau rond ou ovoïde, cytoplasme
basophile
2 - promyélocytes : noyau rond et clair avec nucléole proéminent
3 Ŕ myélocytes : noyau ovoïde excentré
4 Ŕ métamyélocytes : noyau réniforme
5 Ŕ granulocytes matures
Giemsa :
▪ Majorité de cellules neutrophiles : petites granulations rose pâle
▪ Moins de 5 % de cellules éosinophiles : gros grains rouge orangé
▪ Granulations basophiles : détruites par la préparation tissulaire
Lignée granuleuse Ŕ 2
Topographie « Mélange homogène »
Maturation de la lignée granuleuse de la périphérie vers le centre des espaces
médullaires
1 Ŕ près des travées osseuses : myéloblastes, promyélocytes, myélocytes
2 Ŕ au centre des espaces médullaires : myélocytes, métamyélocytes, granulocytes
matures
Immunohistochimie : MPO, CD68, lysozyme, CD15
Les monocytes ne sont pas reconnaissables sur les biopsies médullaires osseuses
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
91
Lignée mégacaryocytaire
▪ grande cellule, abondant cytoplasme, noyau polylobé
▪ même taille
▪ 3 à 8 mégacaryocytes dispersés dans chaque espace médullaire
▪ isolés
▪ à distance des travées osseuses, près des sinus vasculaires
Immunohistochimie
▪ Facteur VIII
▪ Glycoprotéines plaquettaires : CD61 (glycoprotein IIIa)
Autres cellules Ŕ 1
Lymphocytes
• interstitiels et dispersés, souvent < 10 % majorité de cellules T, quelques cellules B
• parfois en nodules au centre des espaces médullaires, rarement avec un centre
germinatif, la fréquence des nodules augmente avec l’âge
Plasmocytes
• peu nombreux, < 5 %, dispersés ou le plus souvent périvasculaires
• CD20- CD79a+ bcl-2+
• polytypiques, IgA et IgG, quelques rares IgM
Autres cellules Ŕ 2
Mastocytes
• peu nombreux près des travées osseuses ou des vaisseaux
• granulations métachromatiques (Giemsa +++)
• Immunohistochimie : tryptase CD45 CD68 CD117
Histiocytes
• dispersés et difficiles à reconnaître
• sauf s’ils contiennent des pigments, fer ou restes phagocytés
HEMATOGONES
�Cellules lymphoïdes B précurseurs
�
�Présentes normalement chez le jeune enfant
�Diminution avec l’âge
�Augmentation dans des pathologies variées, même chez l’adulte
HEMATOGONES Ŕ Morphologie
• Cellules lymphoïdes de taille variée (10-20μm)
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
92
• Noyau souvent rond, régulier, parfois lobulé, clivé, Chromatine dense, petit nucléole
inconstant
• Cytoplasme étroit, pâle
HEMATOGONES Ŕ Topographie
• Nids interstitiels localisés ou amas plus importants
• Présentes dans les sinus
HEMATOGONES Ŕ Phénotype
● positif CD10 CD79a, CMF : CD19 CD22
● en fait spectre continu de cellules en voie de maturation
● Tdt +/- CD34+/-
● % cellules CD20(-) et SIg(-)
● % cellules CD20(+) et SIg(+)
● Association d’hématogones de différents stades de maturation
HEMATOGONES Ŕ Diagnostic différentiel
● Lymphocytes B réactionnels
● Persistance ou rechute d’un lymphome/leucémie Lymphoblastique B
HEMATOGONES Ŕ Circonstances d’observation
Enfant
● Normalement présentes
● augmentées dans des situations variées
■ désordres hématologies non néoplasiques : anémies, PTI, etc.
■ Tumeurs non hématopoïétiques (neuroblastome, néphroblastome) même en l’absence
de métastase ou avant traitement
■ Régénération médullaire après chimiothérapie
Adultes
● Réapparition au cours de la régénération médullaire après chimiothérapie pour
lymphome ou leucémie
Trame de soutien
• imprégnation argentique
• fibres de réticuline fines et discontinues
Vaisseaux
• artérioles
• capillaires à endothélium continu
• sinus veineux distendu à endothélium discontinu (livraison sanguine des cellules
matures)
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Fibroblastes
• réseau entre les vaisseaux et les travées osseuses
Adipocytes
• moelle adipeuse physiologique sans cellules hématopoïétiques sous la corticale osseuse
BIOPSIE MEDULLAIRE OSSEUSE
Modifications qualitatives et quantitatives
Cytopénies du sang périphérique
Pancytopénie - infiltration tumorale
- aplasie médullaire idiopathique
- à moelle riche destruction périphérique dysmyélopoïèse (VIH)
Anémie - érythroblastopénie thymome, infection à parvovirus B19
- hyperplasie érythroblastique hémorragie, hémolyse, carence (B12, folates) toxiques
Neutropénie - agranulocytose
- leucémie à tricholeucocytes
- leucémie à grands lymphocytes granuleux NK/T
Thrombopénie - destruction périphérique (PTI) (moelle hypercellulaire avec
augmentation des mégacaryocytes)
Aplasie médullaire osseuse
BOM indispensable car aspiration de moelle « blanche »
BOM
Richesse cellulaire : 0 - 1
Œdème interstitiel
Dépôts de fer
Présence de lymphocytes, plasmocytes, mastocytes
Préciser si :
Globale ou non
Avec ou sans signes de régénération
(Diagnostic différentiel : leucémie aiguë)
Rechercher signes de mauvais pronostic : hémorragie, nécrose, myélofibrose, absence de
mégacaryocytes
Attention aux zones muettes physiologique sous-corticales
�Fragment biopsique de grande taille
LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Hyperplasie médullaire osseuse
Hyperplasie granuleuse
- neutrophile maladie infectieuse : LMC
- éosinophile parasitose, médicaments, lymphome T : MPS, / MDS (syndrome
hyperéosinophilique)
Hyperplasie érythroblastique : Polyglobulie primitive
Hyperplasie mégacaryocytaire : Thrombocytémie essentielle
Attention aux hyperplasies globales pseudo-syndrome myéloprolifératif :
- associées à une maladie de Hodgkin classique
- dues à des facteurs de croissance (G-CSF …)
Attention aux hyperplasies avec dysmyélopoïèse (sujets VIH+)
Lésions iatrogènes
Modifications de la moelle osseuse après traitement chimiothérapie, greffe de moelle,
radiothérapie
■ chimiothérapie, greffe de moelle : myélopathie toxique
- œdème hémorragique interstitiel +/-
- parfois répartition hétérogène des cellules hématopoïétiques (clusters de régénération)
- dysmyélopoïèse (principalement de la lignée érythroblastique)
- lymphocytes, plasmocytes, mastocytes, dépôt de fer
■ Radiothérapie localisée : nécrose
�Myélofibrose et modifications osseuses
�Eviter la biopsie médullaire osseuse dans les territoires irradiés
Modifications de la moelle osseuse après traitement Chimiothérapie
Survenue de
- syndrome myélodysplasique
- leucémie aiguë
Prudence si excès de cellules CD34+
Régénération ? Persistance de LA ?
Traitements particuliers
- Anti CD20 CD79a+++)
- Facteurs de croissance : G-CSF et GM-CSF, érythropoïétine
- Fludarabine (éosinophilie)