Abus de droit fiscal par Zahir Meghaoui Conseil Fiscal
1. APERÇU SUR LE DISPOSITIF DE
L’ABUS DE DROIT FISCAL EN ALGERIE
ConceptionConception ::
Zahir MEGHAOUI
Conseil Fiscal Sétif
Ex-Chef de centre des impôts de Sétif
E-mail : z.meghaoui.conseil.fiscal@gmail.com
2. 1) Définition des actes d’abus de droit
2) Exclusion des actes ayant fait l’objet d’un rescrit
fiscal, de la procédure d’abus de droit
3) Institution d’un comité d’examen des abus de droit
SOMMAIRE
3) Institution d’un comité d’examen des abus de droit
fiscal
4) Institution de sanctions à l’encontre des parties à
l’acte d’abus de droit
3. 1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
La notion d'abus de droit a été introduite dans le droit
fiscal algérien en 2014, avec la création de l'article 19 bis
du CPF par l'article 25 LF 2014.
La mise en place de la notion d'abus de droit a été motivée
par l’ouverture aux marchés internationaux qui fait
apparaître une multitude d’opérations, de contrats et de
conventions conclus entres les différents partenaires
économiques.
4. Certains opérateurs économiques manipulent les
mécanismes juridiques par l’insertion dans leurs contrats
ou conventions, de clauses qui dissimulent des actes
fictifs destinés à tromper les tiers ou qui contournent une
règle fiscale contraignante.
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
règle fiscale contraignante.
Ces pratiques constituent des dépassements du droit ou
des excès dans l’utilisation du droit :
c’est la notion d’abus de droit
5. Tout contribuable a la possibilité, lorsqu'il a le choix, d'opter
pour des solutions fiscales les moins coûteuses.
Toutefois, si une entreprise détourne l'esprit de la loi en
manipulant des mécanismes juridiques, elle peut se retrouver
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
manipulant des mécanismes juridiques, elle peut se retrouver
dans une situation d'abus de droit.
En effet, être titulaire de droits ne signifie pas avoir un pouvoir
absolu.
La notion d'abus de droit permet d'encadrer et de limiter l'usage
d'un droit en sanctionnant tout exercice déraisonnable,
excessif, de mauvaise foi… de ce droit.
6. A cet effet, les dispositions de l’article 19 bis du CPF, avaient
institué le principe de l’abus de droit fiscal à opposer aux
contribuables qui, par le biais de clauses contenues dans leurs
contrats, visent à éluder ou à atténuer les charges fiscales qui,
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
contrats, visent à éluder ou à atténuer les charges fiscales qui,
sans ces clauses, auraient été normalement imposables eu
égard à leur qualité et à leur activité.
Dans ces cas, l'administration peut alors remettre en cause ces
actes et demander au contribuable le paiement des impôts qu'il
aurait dû acquitter en l'absence de ces montages juridiques.
7. Seuls les actes qui ont pour objectif d'éluder ou d'atténuer
les charges fiscales peuvent être poursuivis dans le cadre
d'une procédure pour abus de droit.
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
Autrement dit, si le contribuable poursuit d'autres
objectifs (patrimoniaux ou financier, par exemple), l'abus
de droit ne pourrait être invoqué par l'administration.
8. Exemples d’actes d’abus de droit :
Fractionnement de la facturation d'une même opération
permettant de bénéficier de la déduction de la TVA et de la
charge de l'IRG ou IBS ;
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
Prix stipulé dans un contrat de vente supérieur ou inférieur au
prix habituellement pratiqué pour un même produit ;
Déclarer une charge de sponsoring alors qu'il s'agit d'une
donation ;
Vente d'un immeuble par un particulier à son frère (2ème degré)
déguisée en donation ;
Etc.
9. Abus de droit et optimisation fiscale :
Il ne faut pas confondre l'abus de droit avec les choix
fiscaux laissés à l'appréciation du contribuable dans le
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
fiscaux laissés à l'appréciation du contribuable dans le
but de réduire son impôt en toute légalité (optimisation
fiscale).
10. Modifications apportées par l'Art. 41 LF 2018 :
Il a été procédé à la modification de l'article 19 bis du CPF, à l'effet
de :
Renforcer le dispositif par la mise en place d'une procédure de remise
en cause des actes qualifiés par l’administration fiscale d’actes
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
en cause des actes qualifiés par l’administration fiscale d’actes
constitutifs d’un abus de droit ;
définir clairement les actes d’abus de droit ;
et d’étendre son application, en plus du contrôle, à l’ensemble des
situations constitutives d’abus de droit à savoir :
les actes portant sur l’assiette, la liquidation et
le paiement de tout impôt, droit, taxe et redevance
11. Toutefois, en cas de désaccord sur le fondement de la
rectification, le litige est soumis, à la demande du
contribuable, à l’avis du comité d’examen des abus de
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
droits et ce, trente (30) jours à compter de la réception
de la notification.
L’administration fiscale, peut également saisir le comité,
avant l'établissement du rôle d'imposition. Dans ce cas,
elle doit en informer le contribuable.
12. Exemple d'application :
Au mois de janvier 2018, la SARL SOUMMAM a fait appel à un
technicien pour la réparation d'un équipement pour un montant de
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
400.000 DA HT (TVA : 19%).
Le paiement est effectué en espèces.
13. Exemple d'application (suite) :
Cette opération a fait l'objet d'un fractionnement de la facturation
comme suit :
Référence facture Montant HT TVA Montant TTC
Facture n° 01 80.000 15.200 95.200
Facture n° 02 80.000 15.200 95.200
1- Définition des actes d'abus de droit :
Facture n° 02 80.000 15.200 95.200
Facture n° 03 80.000 15.200 95.200
Facture n° 04 80.000 15.200 95.200
Facture n° 05 80.000 15.200 95.200
Totaux 400.000 76.000 476.000
La TVA de 76.000 DA a été déduite sur G50 de janvier 2018.
Le montant de 400.000 DA a été comptabilisé en charge.
14. Exemple d'application (suite) :
Questions :
Pourquoi a-t-elle procédé au fractionnement de l'opération de
réparation en 5 factures ?
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
réparation en 5 factures ?
Cet acte constitue-t-il un abus de droit fiscal ?
En supposant que la TVA n'a pas été déduite et que la charge a fait
l'objet de réintégration au T9 de la liasse fiscale, peut-on qualifier
cet acte d'abus de droit fiscal ?
15. Réponses aux questions :
Pourquoi a-t-elle procédé au fractionnement en 5 factures de l'opération de réparation ?
Vu que le paiement est effectué en espèces, l'établissement d'une facture sur un
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
Vu que le paiement est effectué en espèces, l'établissement d'une facture sur un
montant de 476.000 DA donnerait lieu aux conséquences suivantes :
Non déductibilité de la TVA d'un montant de 76.000 DA ;
Non déductibilité de la charge de 400.000 DA de la base imposable.
Le fractionnement de la facturation a permis à la société de contourner les régles
relatives à la déductibilité de la TVA (100.000 DA) et de la charge (300.000 DA).
16. Exemple d'application (suite) :
Réponses aux questions :
Cet acte constitue-t-il un abus de droit fiscal ?
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
Cet acte constitue-t-il un abus de droit fiscal ?
Dans la mesure où le fractionnement de la facturation de
l'opération, a donné lieu à une minoration de la base imposable en
matière d'IBS et à la déductibilité de la TVA, l'acte constitue un
abus de droit.
17. Exemple d'application (suite) :
Réponses aux questions :
En supposant que la TVA n'a pas été déduite et que la charge a fait l'objet de
1- Définition des actes d'abus de droit et extension de la
procédure à l'assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance
En supposant que la TVA n'a pas été déduite et que la charge a fait l'objet de
réintégration au T9 de la liasse fiscale, peut-on qualifier cet acte d'abus de droit
fiscal ?
Vu que la société n'a bénéficié d'aucune atténuation d'impôt (TVA et
IBS), elle ne peut faire l'objet de la procédure d'abus de droit.
18. Art. 19 Bis du CPF modifié par l'Art. 41 LF 2018Art. 19 Bis du CPF modifié par l'Art. 41 LF 2018
Ancienne rédaction Nouvelle rédaction
Article 19 bis : Lors du contrôle
des déclarations ainsi que les
actes utilisés pour
l’établissement de tout impôt,
droit, taxe et redevance,
l’administration fiscale est en
droit de remettre en cause la
Art. 19 bis. — Lors du contrôle des déclarations relatives
à tout impôt, droit, taxe et redevance, les actes
constitutifs d’un abus de droit ne sont pas opposables à
l’administration fiscale qui est en droit de les écarter et
de leur restituer leur véritable caractère.
Ces actes, soit qu’ils ont un caractère fictif, dissimulantdroit de remettre en cause la
sincérité des actes ou des
conventions, conclus par des
contribuables, dissimulant la
portée véritable d’un contrat à
l’aide de clauses tendant à
éluder ou atténuer les charges
fiscales.
Ces actes, soit qu’ils ont un caractère fictif, dissimulant
leur portée véritable, soit visant à créer une situation
juridique purement artificielle et qui n’ont pour but que
celui de bénéficier d'avantages fiscaux, d’éluder ou de
minorer l'impôt exigible que l’intéressé, si ces actes
n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement
supporté, eu égard à sa situation ou à ses activités
réelles.
19. Art. 19 Bis du CPF modifié par l'Art. 41 LF 2018Art. 19 Bis du CPF modifié par l'Art. 41 LF 2018
Ancienne rédaction Nouvelle rédaction
Art. 19 bis. — Suite
Il en est de même lorsqu’il est dûment établi par
l’administration fiscale, des actes constitutifs d’abus de droit
portant sur l’assiette, la liquidation et le paiement de tout
impôt, droit, taxe et redevance.
/
En cas de désaccord sur le fondement de la rectification, le
litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du
comité d’examen des abus de droits et ce, trente (30) jours à
compter de la réception de la notification.
Avant l’établissement du rôle, l’administration fiscale, peut
également saisir le comité, et doit en informer le
contribuable.
20. 2- Exclusion des actes ayant fait l'objet d'un rescrit
fiscal de la procédure d'abus de droit
Dans le cadre des garanties des droits du contribuable, il a
été procédé à la création de l'article 19 ter au CPF pour
exclure, les actes ayant fait l’objet d’une consultation de
l’administration fiscale par le biais du rescrit fiscal.l’administration fiscale par le biais du rescrit fiscal.
En effet, ils ne peuvent être remis en cause pour abus de
droit fiscal.
21. Art. 19 Ter du CPF créé par l'Art. 42 LF 2018Art. 19 Ter du CPF créé par l'Art. 42 LF 2018
Ancienne rédaction Nouvelle rédaction
/
Art. 19 ter. — Les dispositions de l’article 19 bis
ci-dessus, ne s’appliquent pas lorsque le contribuable,
préalablement à un contrôle fiscal et à la qualification
des actes en abus de droit, a consulté l’administration
fiscale par le biais d’un rescrit fiscal, conformément aux
dispositions des articles 174 bis et 174 ter ci-dessous, à
/
dispositions des articles 174 bis et 174 ter ci-dessous, à
travers lequel il doit fournir tous les éléments utiles
pour apprécier la portée véritable de ces actes.
Ces dispositions ne s’appliquent pas également lorsque
l’administration n’a pas répondu au rescrit fiscal, dans
un délai de quatre (4) mois à compter de la date de sa
saisine.
22. 3- Institution d’un comité d’examen des abus de droit
fiscal
Toujours, dans le cadre des garanties des droits du
contribuable, il a été procédé à la création de l'article
19 quater au niveau du CPF pour instituer un comité
d’examen des abus de droit fiscal auprès de la DGI pourd’examen des abus de droit fiscal auprès de la DGI pour
statuer sur les qualifications de certains actes comme
étant constitutifs ou non d’abus de droit, et ce :
• à la demande du contribuable ;
• ou de l’administration fiscale.
23. Mode de fonctionnement du comité d'examen des abus de
droit fiscal :
Le comité est constitué, outre du Directeur Général en qualité
de président :
• du directeur de la législation et de la réglementation fiscales ;
3- Institution d’un comité d’examen des abus de droit
fiscal
• du directeur de la législation et de la réglementation fiscales ;
• du directeur des recherches et des vérifications ;
• du directeur du contentieux ;
• du DGE ou DRI, selon le cas ;
• d’un S/D à la DGI en qualité de rapporteur ;
• d’un expert-comptable ;
• d’un notaire.
24. Mode de fonctionnement du comité d'examen des abus de
droit fiscal :
Le contribuable est entendu. Il peut se faire assister par un
conseil de son choix.
3- Institution d’un comité d’examen des abus de droit
fiscal
Le comité peut faire appel au concours de personnes
compétentes (notamment : des professeurs en droit).
La décision est prise par vote. En cas d'égalité de décisions
des membres, la voix du président (DGI) est prépondérante.
Le comité doit statuer sur la demande introduite dans un délai
de 6 mois.
25. Art. 19 Quater du CPF créé par l'Art. 43 LF 2018Art. 19 Quater du CPF créé par l'Art. 43 LF 2018
Ancienne
rédaction Nouvelle rédaction
Art. 19 quater. — Il est créé auprès de la direction générale des impôts un
comité d’examen des abus de droit fiscal, prévu par l’article 19 bis du présent
code, composé :
• du directeur de la législation et de la réglementation fiscales ;
• du directeur des recherches et des vérifications ;
• du directeur du contentieux ;
• du DGE ou DRI, selon le cas ;
• d’un S/D à la DGI en qualité de rapporteur ;
/
• d’un S/D à la DGI en qualité de rapporteur ;
• d’un expert-comptable ;
• d’un notaire.
Le comité peut, à la demande du directeur général des impôts, faire appel au
concours des personnes compétentes, notamment des professeurs de droit.
Le directeur général préside le comité, il fixe ses modalités de fonctionnement
et a voix prépondérante en cas d’égalité de décisions des membres.
Le contribuable est entendu, il peut se faire assister par le conseil de son choix.
Le comité ne doit pas dépasser un délai de six (6) mois pour statuer sur la
demande introduite.
26. 4- Sanctions à l’encontre des parties à l’acte d’abus de
droit
L'abus de droit est considéré comme étant des montages
juridiques dissimulant une évasion fiscale.
Une évasion fiscale doit être sanctionnée.
C'est ainsi que l'article 19 quinquies créé par l'article 44 LFC'est ainsi que l'article 19 quinquies créé par l'article 44 LF
2018, prévoit des sanctions répressives, non seulement à
l’encontre du contribuable, mais sont également concernées
toutes les parties à l’acte qui sont solidaires à l'égard des
régularisations de l’administration fiscale.
27. En effet, la solidarité de toutes les parties avec le contribuable
redressé, concerne :
Le paiement des droits ;
4- Sanctions à l’encontre des parties à l’acte d’abus de
droit
Le paiement des droits ;
Le paiement des pénalités ;
L'application des sanctions pénales prévues pour
manœuvres frauduleuses.
28. En sus du redressement du contribuable, la procédure d’abus
de droit entraîne d'autres conséquences fiscales, notamment :
l’exclusion du bénéfice de la franchise de la TVA et des régimes
dérogatoires ;
la possibilité de renouveler une vérification de comptabilité
4- Sanctions à l’encontre des parties à l’acte d’abus de
droit
la possibilité de renouveler une vérification de comptabilité
achevée ;
la possibilité d’élargir les durées de vérification sur place ;
la prorogation du délai de prescription de deux (2) ans ;
l’exclusion du droit au sursis légal de paiement ;
L'exclusion du droit à l’échéancier de paiement ;
l’inscription au fichier national des fraudeurs.
29. Art. 19 Quinquies du CPF créé par l'Art. 44 LF 2018Art. 19 Quinquies du CPF créé par l'Art. 44 LF 2018
Ancienne
rédaction Nouvelle rédaction
/
Art. 19 quinquies. — En cas d’abus de droit, toutes les parties à l’acte ou à la
convention sont tenues solidairement, avec le contribuable redressé à la
restitution d’une créance indue, au paiement des majorations et application des
sanctions pénales, prévues pour manœuvres frauduleuses.
En sus de ces majorations, la procédure d’abus de droit entraîne des
conséquences fiscales au regard des régimes d'imposition, des procédures de
contrôle, et du droit de reprise, notamment :
/
contrôle, et du droit de reprise, notamment :
l’exclusion du bénéfice de la franchise de la TVA et des régimes
dérogatoires ;
la possibilité de renouveler une vérification de comptabilité achevée ;
la possibilité d’élargir les durées de vérification sur place ;
la prorogation du délai de prescription de deux (2) ans ;
l’exclusion du droit au sursis légal de paiement de 20 % et de l’échéancier
de paiement ;
l’inscription au fichier national des fraudeurs.