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Après les verdicts rendus par le Bureau du Contentieux électoral départemental
(BCED), pas moins de onze recours sont enregistrés au greffe du Bureau du
Contentieux électoral national (BCEN). Tous les candidats écartés de la course
électorale contestent la décision du BCED, parmi eux, l’ancien Premier ministre
Laurent Lamothe qui focalise les projecteurs.
Pas de moratoire,
pas de déportation massive
LUNDI 8 JUIN 2015 NUMÉRO 12
WWW.LENATIONAL.HT
QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI
RELATIONS HAÏTIANO-DOMINICAINES
HAÏTI / ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
ACTUALITÉ
Onze cas devant le BCENPar Noclès Débréus
D
’un côté, Antoine Joseph,
Anthony Benneth, Laurent
Lamothe n’en démordent pas
: (Ils sont) « victimes d’abus
et complot ». Ils veulent leur réinté-
gration dans la course. Ils entendent
aller jusqu’au bout. De l’autre, l’ancien
député Jonas Coffy, entre autres con-
testataires de Jacky Lumarque, a
aussi fait appel de la décision du BCED
de recommander au Conseil électoral
provisoire (Cep) de maintenir en lice la
candidature du recteur de l’Université
Quisqueya, porte- étendard de la plate-
forme VERITE.
Petite célébration,
grosses inquiétudes
par Lionel Edouard
Les chanceliers haitiens et dominicains, Lener Renauld et Andrés Navarro. / Photo : J. J. Augustin
» P. 9
» P. 23
»   P. 6
ÉCONOMIE
SPORT
» lire page 5
» suite page 4
Question de liquidité,
liquidité en question...
Par Evens Regis
Marc Collat a dévoilé
sa pré-liste pour la
Gold Cup
par Gérald Bordes
Le temps
des jeunes
femmes
Nouvelle chronique
du quotidien Le National
à partir de mardi
2 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
Geôlier des motsPar Jacques Ted Saint-Dic
TRIBUNE
O
n oublie souvent que tout
ce qu’on dit est un mot.
La parole emprisonne le
mot pour libérer la pensée
et l’acte qu’elle suggère. Homme est
un mot. Et dans toutes les langues,
il y a un mot pour dire l’homme. Ce
mot a le même sens mais n’exprime
pas la même pensée. La pensée de
l’homme ou penser l’homme revient
à le conceptualiser. Aussi le mettre
dans un ordre, un ensemble et lui
attacher d’autres mots régissant son
existence. Désigner son humanité et
lui construire, lui donner une éternité
en bordure, à la limite, de la pensée
; sans s’inquiéter de sa finitude, sa
temporalité.
Les mots ont été construits, bâtis,
négociés, acceptés, agréés, utilisés,
pour que la parole prenne sens,
Pour que la réflexion, la pensée,
circulent, se développent. Une
construction permanente, la tour
de Babel est passée par cette issue.
Depuis les limites se sont installées.
Tant géographiques qu’humaines.
Les races sont définies et localisées.
à la lumière s’opposent les ténèbres.
Le pluriel du plus faible à l’unicité
du plus grand. Le pluriel n’est pas
la force, mais l’union fait la force.
Depuis les mots sont libres. Libérés
de leur créateur par l’usage qu’on
en fait. La liberté du mot est
intrinsèque, elle est intimement
liée à l’homme en mutation. Il
vieillit et meurt autant que lui en
toute liberté. La mort est la seule
libre qui décide quand tuer. Elle est
libre de son imprévisible et unique
acte. Sa vie est la mort. Le seul
mot a sens unique. La résurrection
! Une impasse.
Le mot est un outil de guerre. Le
mot est subversif. Une arme contre
la « momentanéité » en transition
de permanence, d’intemporalité.
Sa survie, objet de son éternité est
indissociable de celle de l’homme.
Sa lute, elle la mène en multitude
regroupée, codifiée, conjuguée. Un
bloc.
Une langue. Une civilisation. Tous
les mots sont des noms propres
d’objet ou d’être. Le mot est en
guerre contre son homologue
d’une autre langue et défend son
territoire contre l’invasion des
dénominations différentes. Il
assimile sans exclusion quand il
n’est pas en péril.
Le mot ne périt jamais. Il se
dépasse, se donne une autre vie.
Se mue sous l’action destructrice
de la pensée. Le mot n’est ni
masculin ni féminin, un double
sexe. Hermaphrodite. Le « yon »
du créole immortalise l’asexualité
du mot. Aucun mot ne préexiste
à l’objet à définir à nommer. Il
est concomitant à l’existence de
la matière et de l’être. Il survit à
l’objet.
Son « hétérohomosexualité », ce mot
vient à l’instant , de cette écriture,
d’être inventé, d’être « créé ». Son
informalité n’est en quête d’aucune
formalisation et n’est inférieure à
aucune normalité. Il se crée sans
règle, sans loi, mais en contexité
d’utilité, d’expressivité. Le sexe
ne peut se prévaloir d’aucune
puissance si elle n’est pas pensée et
imposée. Il est neutre, sans pouvoir,
comme le mot.
Comme les fleurs, les mots ont leur
saison. Ils bourgeonnent dans les
marchés publics. Les veillées. Les
combites. Les Gaguères. Les Raras.
Le Carnaval. Les lieux saints. Les
jeûnes. Les actes sexuels. Les
congrès de gens lettrés. Dans la
douleur des regards croisés. Dans le
silence. Les signes qui deviennent
mot dans leur incapacité à traduire
leur réalité et celle des porteurs de
gestes.
La pensée ne peut être que mot, elle
est d’essence verbale. Le logiciel
qui la transfèrerait en écrit n’existe
pas encore. Nous pensons parce
que nous parlons. C’est-a-dire nous
utilisons des mots. Pourquoi pas
nous « motons » ? Cette conjugaison
vient d’exister car elle est pensée.
Tristes sont ceux qui établissent la
primauté de l’écrit à la parole, bien
qu’ils soient tous deux dépendants
du mot.
De quelle sagesse peut-on se
prévaloir quand on part à la
chasse des mots, quand on veut
l’embrigader. Lui donner un sens.
Comme si l’usage ne le lui en avait
déjà assigné à l’originel. Alors on se
veut proconsul et lui donner un visa
de transit. Bien que son passeport
ne soit pas biométrique mais
communautaire, de civilisation, de
contextualité, de « contemporalité
». Outil d’un moment en transe
d’éternité.
Comment se prévaloir d’un droit
divin, mais heureusement non
universel et sans éternité mais
simplement immortel. Comment
aller dire à l’humanité la manière
d’écrire : Amour ? Je l’écris, sans
conviction d’avoir l’orthographe
correcte. Comment haïr et tuer
auraient chacun un mot bien écrit
qui soit masculin, féminin, ou
neutre pour justifier qu’on peut se
le permettre ?
Comment esclavage et civilité,
civilisation peuvent être
contemporains et permettre
à l’âme de se libérer pour
l’éternité et revenir immaculé
au nom de la grâce et du pardon
d’un non, éternel. L’éternité est
essentiellement humaine parce que
historique et datée. Indissociable
de la permanence existentielle.
C’est à ce jeu de « paume », et du
code noir qu’ils t’ont convié pour
devenir un nouveau membre de
l’ordre des « Kidnappeurs de mots ».
Des mots sont libérés sous rançons
de règles et d’expropriation.
L’indépendance des mots payée au
prix de leur liberté.
La rançon de la dette et de
la reconnaissance. L’oubli de
la soumission en signe de
représentation et de vengeur
de race. La guerre oubliée, et la
mémoire qui nous jette au visage
l’immoralité de leur moralité en
signe de pardon.
Que l’épée soit de bronze, d’or ou
d’ébène, aucun motif Legba ou de
Napoléon ne peut justifier quelle
soit le glaive d’une justice des mots.
Toi, qui fais de la « fatigue » un mot
nouveau à connotation existentielle
différente : un luxe, que seul le
Nègre peut se payer. Une éternelle
fatigue comme celle d’après la
création. Le Nègre se repose après
trois siècles.
Ton éternité ne peut être que
celle du refus de la codification
régulatrice, dominatrice des mots.
Le temps du Marron est vécu !
Et, dans notre actualité, notre
modernité nous vivons le temps des
libertés, et celui du créateur de se
forger une société nationale a l’aune
de notre identité en permanente
mutation, d’adaptation à notre
singularité dans le monde large qui
est devenu ton dortoir où tu enfiles
ton pyjama à bannières multiples.
La croix et la bannière.
Nous ne serons pas un nouveau
geôlier des mots.
ENMARGEDEL’ENTRÉEDEDANYLAFERRIÈREÀL’ACADÉMIEFRANÇAISE
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 3
Les élections,
une étape
fondamentale vers
la stabilité
Sources : Alterpresse
ACTUALITÉ
U
ne étape fondamentale sur le
chemin de la stabilité passe
par les élections, souligne
la Trinidadienne Sandra
Honoré, la Représentante spéciale du
secrétaire général (RSSG) des Nations
Unies en Haïti, dans une note de la
Mission des nations unies de stabilisa-
tion en Haïti (Minustah) transmise à
AlterPresse.
« En Haïti, la stabilité a connu trop
d’éclipses. Elle doit aujourd’hui
solidifier ses fondations, posées
par les trois élections successives,
tenues depuis 2006, qui ont vu,
pour la première fois, un président
élu succéder à un président élu et
des parlementaires aller au terme
de leur mandat », affirme Honoré.
La RSSG encourage les protago-
nistes du processus électoral,
- dont l’organisme électoral, les
candidates et candidats, les partis
politiques, la société civile, les
autorités, l’ensemble des électrices
et électeurs - à faire des élections
à venir (9 août, 26 octobre et 27
décembre 2015) une avancée défin-
itive vers la stabilité et le dével-
oppement. « Le pays a besoin de ses
parlementaires, pour qu’ils votent
les lois, afin de répondre aux aspi-
rations de la société toute entière.
Le pays a besoin de représent-
ants municipaux et locaux pour
délivrer les services à la population
», affirme la Minustah. La RSSG
déplore l’irrespect, depuis 2011, du
renouvellement des représentants
de la population, suivant les pre-
scrits de la Constitution haïtienne.
L’absence d’élections, d’un
parlement et de représentants
locaux, n’est pas acceptable,
dénonce Sandra Honoré, tout en
appelant au renouvellement de
ces représentants, qui constitue
un impératif démocratique. Le
parlement est dysfonctionnel
depuis le lundi 12 janvier 2015.
Le premier tour des législatives est
annoncé pour le dimanche 9 août
2015. Le premier tour de l’élection
présidentielle et les élections
municipales et locales sont
programmés pour le dimanche 25
octobre 2015, en même temps que
le second tour des législatives, selon
le calendrier émis par le Conseil
électoral provisoire (Cep). Sandra
Honoré encourage les femmes à
s’engager comme candidates dans
les élections locales et municipales,
dont la date du dépôt des dossiers
de candidature dans les différents
Bureaux électoraux communaux
(Bec) devrait prendre fin le
dimanche 7 juin 2015.
Seulement six femmes ont été
inscrites comme candidates à
la présidentielle de 2015. Entre-
temps, le Bureau du contentieux
électoral départemental (BCED) a
écarté trois inscrits pour la pré-
sidentielle, dont Laurent Lamothe
pour absence de décharge.
Édito
Des armes aux... pwen !
Sic’étaitsortidelabouched’unleaderpolitique,onpourraitdirequecelacommencedéjà:lesdénonciations
et autres attaques d’un camp contre l’autre dans l’aventure électorale. On affirmerait que cette histoire de
carnet sur des questions de décharge commence à faire des dégâts au niveau de l’opinion publique. Il en
est de même pour ce qui sera, éventuellement, considéré, au début du mois d’aout, comme l’électorat. C’est
plutôt un leader paysan qui déclare, sans broncher, que toute cette bataille qui s’annonce ne sera pas une
affaire de vote, mais plutôt une dangereuse histoire d’armes et de pwen.
DPour la question des armes, on sait déjà que la sécurité du pays, assurée par une Police nationale non
encore bien déployée sur tout le territoire national et dépourvue de moyens logistiques efficaces, est une
chose trop stratégique pour être laissée entre les mains des contingents de la Minustha. Le banditisme, qui
relance la terreur au sein de la population, frappant par hasard ou de façon ciblée des citoyens aussi bien
dans l’aire métropolitaine que dans les provinces, est le signe le plus évident que des calibres les plus chers
comme, par exemple, un Gluck qui coûte aux environs de 2 000 us, sont distribués comme de petits pains
sur tout le territoire. Les élections qui viennent développer des pulsions d’orgueil et de puissance chez les
uns et les autres mettent déjà tous les citoyens sur leur garde. Car, c’est revenu l’époque des règlements de
compte ! Personne n’est épargné.
Mais, la troublante affaire des… « pwen », une autre dimension de l’insécurité, jusqu’à présent non
sanctionnée par les lois du pays, crée un traumatisme plus généralisé.
La littérature haïtienne depuis les histoires de Justin Lhérisson nous fait croire que la relation entre la poli-
tiqueetlemysticismedatedepuislesdébutsdu19esiècle.Lescandidatsauxpostesprésidentielsrecherchent
toujourslaprotectiond’un«lwa».Lefilmd’ArnoldAntonin«Lesamoursd’unzombi»présentedesimages
contemporainesdeditsleadersquiveulentconquérirlepalaisnationalenselaissantarroserdepissat,dans
un oumfò isolé, par papa Legba. Quelques romanciers haïtiens ont montré les dimensions insoupçonnées
de la magie dans l’univers politique haïtien.
L’Anthropologiehaïtienneaaussiexplorélephénomène.DeLaenecHurbonàDéitaenpassantpard’autres
étudesacadémiquespointues,le«domainedumerveilleuxmagique»estprésentécommeunépiphénomène
qui a une existence clandestine, mais efficace. Cette efficacité est connue par nos politiciens. En dépit du
vernisrationneldontilsseparent,lescandidatsconsultentdessorciers.Cesderniersleurdonnentdesrecettes
pour foudroyer ou affaiblir leurs adversaires.
Le leader paysan sait de quoi il parle quand il mentionne les armes et les pwen, en particulier l’un nommé
: se mwen pou wè. En voilà deux défis pour le CEP et les partenaires internationaux qui financent - honte à
nous ! - nos élections ! Quand on pense contrôler de façon cartésienne ou scientifique le vote des électeurs,
il faudrait aussi avoir un instrument de mesure pour statuer sur la peur des armes et sur la manipulation
insidieusedesekspedisyon.Cesdernièrespeuvent-ellesaussibrouillerlesdécisionsetconfondrelesdonnées
informatisées du Centre de tabulation ? Le peuple dit plutôt « tribulation » !
Quand la distribution des armes vient se mêler aux ekspedisyon, pwen et autres koutlè , on prévoit déjà
le cocktail explosif. Ou ce que va coûter aux pays, en termes de gaspillage économique et de manipulation
d’énergie négative, cette « démocratie » et ces « élections », sous contrôle international, qui en sont un
passage obligé.
Résumé : Dans notre culture politique on ne croit pas vraiment au principe des élections. Ã la violence, à la
manipulation ? Oui. On est prêt à tous les coups bas pour réaliser un rêve qui souvent n’a fleuri que dans le
cerveaumaladed’unindividu.Cen’estpassansraisonqu’onseracertainementàplusdecinquantecandidats
à la présidence, chacun prêt à renverser la table s’il en a les moyens dans le cas où il verrait ses ambitions
partir en fumée. Une folie, un chaos qui fait plaisir à toutes les mafias nationales et internationales et aux
étrangersheureuxdenousfaireravalersommetoutenotrefaussefiertéd’avoirbattul’arméeNapoléonienne,
car finalement nous n’avons pas réussi grand-chose de ce pays.
Un pays au bord du chaos ! Des élections crédibles plus qu’hypothétiques ! Mais au National nous sommes
encorecertainqu’ilyaencoredutempspourunréveilnationalderaisonetdeluciditésansarmesetsans…
pwen. Ce temps pourtant, il est compté.
Vingt-trois (23) candidats à la
présidence avaient été l’objet
de contestations, 14 d’entre eux
avaient la décharge comme motif
d’objection à leur candidature.
Marise Narcisse, Moïse Jean
Charles, Dieuseul Simon Desras,
Jacky Lumarque, Marie Antoinette
Gauthier, Jude Célestin, Mario
Andresol, Antoine Joseph, Daniel
Saint-Lot, Marie Josepha Gauth-
ier, Edner Gonzague Day, Duly
Pierre Brutus, Laurent Lamothe
et Thierry Mayard Paul font partie
des contestés pour décharge.
Alors que tous ces cas étaient
mis en cause pour défaut de
décharge, le BCED, dans son ver-
dict, a demandé au CEP de rayer
seulement les noms de Laurent
Lamothe et Antoine Joseph de la
liste des candidats ayant fait le
dépôt de leurs candidatures sans
cette pièce maitresse, et celui
d’Anthony Benneth pour cause de
nationalité étrangère.
Laurent Lamothe dénonce un
complot
L’ancien Premier ministre, accom-
pagné de ses avocats Michel Bru-
nache, Jacques Lochard, Ephésien
Joissaint et Wilson Estimé, a ainsi
dénoncé un complot concocté de
toutes pièces pour lui barrer la
route à la magistrature suprême
de l’État. Se sentant lésé, il a
exercé un recours au Bureau du
Contentieux électoral national
(BCEN), le vendredi 5 juin, en
vue de faire valoir son droit par
devant les juges de cette dernière
juridiction, dénonçant au passage
la décision, qu’il qualifie de « deux
poids deux mesures ».
Intervenant à ce sujet, maître
Jacques Lochard a fait état d’un
ensemble de contradictions fla-
grantes relevées dans le jugement
du même tribunal électoral du
BED-Ouest 1, statuant sur les
mêmes motifs de contestations et
mêmes contestataires, mais en des
compositions différentes.
En effet, la troisième chambre
composée de Wally Désence, pré-
sident du BED-Ouest 1, et des
maîtres Canova Jean Baptiste et
Merlan Belabre, a déclaré fondées
les contestations portées contre
Laurent Lamothe pour défaut de
décharge, en dépit du fait que ce
dernier détienne une ordonnance
du tribunal des référés qui, « con-
statant le dysfonctionnement du
Parlement et se fondant sur la
théorie des formalités impossibles
», enjoint au Conseil électoral pro-
visoire d’accepter sa candidature.
Ce même tribunal siégeant dans
une autre composition a statué
en faveur de la candidate, Marie
Josepha Gauthier - elle aussi, con-
testée pour les mêmes motifs et
par les mêmes contestataires que
M. Lamothe - tout en évoquant
la théorie des formalités impos-
sibles, ainsi que les deux ordon-
nances rendues par le tribunal des
référés favorables aux candidats à
la présidence Thierry Mayard Paul
et Laurent Salvador Lamothe.
à en croire les avocats de Laurent
Lamothe, si les juges avaient tenu
compte de la forme, les contesta-
tions auraient dû être déclarées
irrecevables. Pour cause, ils n’ont
pas respecté l’article 105 du
décret électoral relatif à la contes-
tation du candidat. Arnel Bélizaire
aurait fait une usurpation de titre
en utilisant le papier à en-tête de
la chambre des députés alors qu’il
n’est plus député. Jean Nazaire
Thidée, contre qui une décision
de justice est pendante, aurait
menti, selon les défenseurs de M.
Lamothe, en utilisant des témoins
qui n’existent pas. Aussi enten-
dent-ils entamer des poursuites
contre tous ces contestataires, a
informé Me Wilson Estimé.
Tenant compte de ces contradic-
tions, l’ancien chef de la Prima-
ture, qui a salué la décision du
BCED de maintenir des anciens
ministres dépourvus de certifi-
cats de décharge, assimile cette
démarche à une manœuvre
politicienne visant à l’écarter de la
course pour le fauteuil présiden-
tiel et ses avocats entendent faire
valoir son droit au BCEN. « Au nom
de la Justice et de l’équité, nous
demandons au BCEN d’annuler la
décision du BCED et d’exiger du
CEP de garder la candidature de
Laurent Lamothe », a fait savoir
Michel Brunache arguant que « se
pèp ki bay pouvwa se pèp ki dwe
bay kanè ».
De son côté, Me Ephésien Jois-
saint a dénoncé une campagne
d’intoxication juridique menée
par certains membres du CEP
à travers des prises de position
publique. Il a ciblé notamment Me
Néhémie Joseph qui avait informé
que « le CEP, étant une juridiction
de jugement, il n’ est lié par aucun
jugement de tribunal de droit
commun », alors qu’on sait que
deux candidats à la présidence,
Thierry Mayard Paul et Laurent
Lamothe, sont en possession de
deux ordonnances du tribunal des
référés qui font même jurispru-
dence car, le BCED, s’est basé sur
ces ordonnances pour maintenir
en lice la candidature de Josepha
Gauthier.
Ainsi, Me Joissaint a expliqué que
le CEP est bel et bien opposable
à l’ordonnance des référés, parce
que cette dernière n’a fait l’ objet
d’aucun recours, elle détient donc
l’autorité de la chose jugée et en
ce sens le CEP est contraint d’en
tenir compte, a-t-il dit, précisant
que n’importe quel conseiller qui
s’est prononcé publiquement sur
ce dossier, doit se déporter s’il
devait siéger au BCEN.
4 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
ACTUALITÉ
Onze cas devant le BCENpar Noclès Débréus
HAÏTI/ÉLECTIONPRÉSIDENTIELLE
L’ancien président du Sénat Dieuseul Simon Desras. / Photo: J. J. Augustin
L’ancien Premier ministre Laurent Salvador Lamothe. / Photo: J. J. Augustin
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LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 5
ACTUALITÉ
C
’est pourquoi, un protocole
de rapatriement entre les
deux pays voisins est appelé
à définir les conditions dans
lesquelles s’effectueront la déporta-
tion de ces haïtiens. Toutefois, ce pro-
tocole d’accord entre les deux États,
n’a pas été paraphé au cours de la
visite de M. Navarro en Haïti comme
l’avait annoncé son homologue haï-
tien, le mardi 2 juin dernier. Une
commission bilatérale, qui devrait
être effective ce mercredi 10 juin
2015, sera chargée de travailler d’un
commun accord sur l’élaboration du
protocole de rapatriement, lequel ser-
vira de référence pour un dialogue
permanent entre les deux pays, selon
M. Navarro.
Entre-temps, le processus d’enre-
gistrement des haïtiens au Plan
national de régularisation des
étrangers (PNRE) s’achève le
17 juin. Pas de moratoire. La
République Dominicaine se donne
un délai de 45 jours pour analyser
les dossiers des étrangers inscrits au
PNRE dont 96 % sont des haïtiens,
informe le diplomate dominicain.
Ce dernier dit espérer qu’avant la
date butoir, le nombre d’inscrits à
ce plan, estimé à plus de 230 mille
passera à 250 mille. Cependant,
les informations dont dispose le
Groupe d’appui aux rapatriés et
réfugiés (Garr), font état de 2 000
haïtiens seulement éligibles à ce
plan. Ces personnes bénéficieront
de documents légaux leur habilitant
à vaquer librement à leurs activités
en République Dominicaine.
Par contre, dans l’attente de
compléter leurs dossiers, des
documents provisoires de séjour
seront accordés aux personnes qui
n’auront pas rempli les conditions
requises, conformément au décret
en vigueur sur la migration à l’Est
de l’île.
D’énormes défis à relever
La déportation ne sera, certes,
pas massive, néanmoins, des défis
majeurs attendent le gouvernement
haïtien. Conscient ou non des
enjeux, ce dernier prévoit d’y faire
face, selon le ministre Renauld,
à travers l’aménagement de deux
centres d’accueil provisoires en
construction, l’un à Ouanaminthe
et l’autre à Malpasse. Un train de
mesures, à en croire le chef de
la diplomatie haïtienne, seront
envisagées afin de rééduquer
et faciliter l’intégration de ces
compatriotes dans la société
haïtienne pour laquelle ils n’ont,
en majorité, aucune attache.
La création d’emplois figure parmi
les mesures d’accompagnement
de l’État, affirme M. Renault.
Or il reconnait que la quête de
l’emploi et du mieux-être obligent
de nombreux haïtiens à migrer
vers d’autres pays, notamment la
République dominicaine.
Et la situation actuelle ne bouge
pas d’un cran: plus de 76% de la
population haïtienne croupissent
sous le poids harassant du chômage.
Interpellé par la question, l’éco-
nomiste Fritz Jean estime que
la déportation de ces haïtiens
représente un danger social
et politique pour le pays, en
particulier pour la région du Nord-
est, déjà pauvre en ressources.
Fortement préoccupé par le sujet,
l’ex-gouverneur de la Banque
centrale, questionne la capacité
de l’État, dont la lenteur dans
ses prises de décisions n’est plus
à démontrer, à doter ces gens des
services sociaux de base. Il dit
craindre des retombées néfastes
pour la société haïtienne en
général, surtout à l’approche de la
période électorale qui coïncide avec
la déportation de ces ressortissants
haïtiens. Car, explique-t-il, parmi
les personnes qui seront refoulées
sur le sol haïtien, plusieurs seraient
de réputation douteuse, ce qui
risque encore de perturber le climat
sécuritaire déjà fragile du pays.
Depuis la décision de la Cour
constitutionnelle dominicaine qui
a rendu apatrides des dominicains
d’ascendance haïtienne, la menace
de déportation de 300 mille
personnes sur le sol haïtien hante
les esprits. Suite à un accord
bilatéral, Haïti et la République
dominicaine ont convenu de régler
la question via un Plan national de
Régularisation des Étrangers qui
permettra notamment à certains
haïtiens de régulariser leur situation
alors que ceux qui ne répondent pas
aux critères exigés seront déportés
en Haïti.
Pas de moratoire, pas de déportation massive
par Jean Michel Cadet
RELATIONSHAÏTIANO-DOMINICAINES
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Le suspense prend fin… La visite tant attendue du chancelier dominicain, Andres Navarro, le samedi 6 juin,
n’aura servi qu’à calmer les esprits. « Il n’y aura pas de déportation massive », a rassuré le diplomate lors d’une
conférence de presse donnée conjointement avec son homologue haïtien, Lener Renauld. Mais le problème
fondamental demeure : de nombreux compatriotes haïtiens, en situation irrégulière, en République Dominicaine,
seront inévitablement déportés en Haïti à la veille des élections, soit au début du mois d’août prochain.
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12 LUNDI 8 JUIN 2015
ACTUALITÉ
ÉCHO
CNASE veut sécuriser
les élections
Le Conseil national d’Agents de
Sécurité électorale (CNASE) a
lancé un appel à l’endroit du
Conseil électoral provisoire sol-
licitant l’intégration de leurs
membres, à l’échelle nationale,
lors des élections. C’est ce qu’a
demandé Léo Renaudin, prési-
dent du CNASE.
Le CEP, des forums
pour contrôler les
zones rouges
Le Conseil électoral provisoire,
à travers ses bureaux électoraux
départementaux (BED), organ-
ise un ensemble de forum visant
à sensibiliser la population
dans des communes et localités
qualifiées de zone rouge.
Le CEP cherche à établir les
conditions nécessaires pour la
réalisation d’une élection libre,
démocratique et sans violence,
a fait savoir Me. Eugène Luther,
secrétaire et trésorier du BED-
Ouest 1.
Terrible accident sur
la route nationale #3, 1
mort et 3 blessés
Un camion assurant le trans-
port en commun dans le cir-
cuit Hinche - Port-au-Prince,
a heurté, jeudi dans la soirée,
deux motocyclettes au niveau
de la localité Lezier située à 4
km de la ville de Mirebalais.
Jean Wilbeau Michel a été tué
sur place.
Trois personnes blessées ont été
conduites d’urgence à l’hôpital.
Le chauffeur du camion s’est
enfui.
Le Commissariat de la
commune de Vallières
incendié
Des bandits non identifiés ont
incendié récemment le Com-
missariat de la commune de
Vallières. Ce forfait visait à
faciliter l’élargissement de plu-
sieurs bandits incarcérés dans
ce commissariat, a expliqué
Charles Nazaire Noël, directeur
départemental de la PNH. Une
commission d’enquête est mise
sur pied afin de déterminer les
responsables.
Fort-Liberté : un
adolescent tué de
quatre balles
Un adolescent a été assassiné
à Fort-Liberté par des bandits
armés. L’enfant âgé de 14 ans se
préparait lundi à participer aux
funérailles de sa mère, quand
il a été tué de plusieurs balles
tirées par un individu non iden-
tifié. Le drame s’est produit à
la rue du Quai prolongé, zone
Sicard. Le juge de paix Colas
François a fait le constat légal.
La police mène les investiga-
tions afin de démasquer et
mettre à la disposition de la jus-
tice l’auteur de ce crime odieux.
Jérémie :
manifestation cette
semaine à Caracoli
Une nouvelle manifestation est
annoncée pour cette semaine
afin d’exiger la reprise des
travaux de reconstruction du
tronçon de route de Caracoli, à
Jérémie. La population sollicite
l’intervention du Premier min-
istre Évens Paul pour enquêter
sur la dilapidation des fonds
alloués à ces travaux.
À
l’occasion de la journée mon-
diale de l’environnement,
célébrée le 5 juin dernier, le
ministre Dominique Pierre,
fraîchement intronisé, a été plutôt
dans la simplicité. Il a simplement
tenu à sensibiliser la population
autour des menaces environnemen-
tales qui se multiplient, tout en
appelant à agir en vue de réhabiliter
l’écosystème du pays.
« L’environnement est en train de
se dégrader de manière irréversible
», fait remarquer Dominique Pierre
qui appelle tous les secteurs de la
vie nationale et tous les citoyens à
protéger nos ressources naturelles
qui s’amenuisent de plus en plus.
Également à agir ensemble pour
réhabiliter l’environnement.
Cependant, le ministre n’a pas
informé de la stratégie de l’État en
vue de contribuer à la réduction
des risques liés à l’environnement.
Soulignant les dégâts systématiques
liés au passage des cyclones et
autres intempéries sur Haïti,
M. Dominique Pierre a attiré
l’attention sur le fait que « le
monde fait face aujourd’hui à un
déséquilibre climatique provoqué
par le réchauffement de la planète.
Cette situation est à la base de la
modification du rythme des saisons
et de l’augmentation du nombre de
cyclones tropicaux, préjudiciables
aux petits pays de la Caraïbe », a-t-il
informé.
Conséquemment, les pêcheurs ont
de graves difficultés à pratiquer leur
profession, alors que l’agriculture
consent d’énormes pertes, non
seulement dans les infrastructures
agricoles, mais également dans la
perte considérable des cultures,
a-t-il rapporté. Les dégâts causés
par les cyclones en 2004 ont
avoisiné les 270 millions de dollars
pour le secteur agricole, rappelle
le ministre, qui ajoute qu’en 2013,
ils ont avoisiné les 10 millions de
dollars, rien que pour les pluies du
mois de novembre.
« Nous sommes donc dans
l’obligation de protéger l’environ-
nement afin de garantir l’avenir
des générations futures », insiste
Dominique Pierre qui renouvelle
l’engagement du chef de l’État
Michel Martelly et du Premier
ministre, Évans Paul d’appuyer
les actions visant le renforcement
de l’équilibre environnemental du
pays.
Un prix pour william Cinéa et
c’est tout!
William Cinéa qui a reçu un prix
pour le « Jardin botanique des
Cayes », a expliqué qu’après ses
études en Angleterre, il voulait
mettre sur pied le plus grand jardin
botanique de la Caraïbe.
L’idée initiale était d’établir ce
projet sur 200 carreaux de terre.
à cet effet, plus de 13 experts et
directeurs de telles entités venus
de l’étranger, ont apporté leur
contribution afin de faire atterrir
ce projet, a-t-il relaté.
Cette cérémonie de remise de prix
a constitué le fait marquant de
cette célébration. S’il est vrai que
le projet stagne encore, l’agronome
Cinéa, spécialiste en gestion de
jardin botanique, croit que si tous
les acteurs s’impliquent, ce jardin
pourra être inauguré le 5 juin 2020
et devra permettre de rehausser un
peu plus l’image d’Haïti à travers
le monde.
Aussi, Le jardin botanique des
Cayes serait un modèle de projet
haïtien, selon William Cinéa qui
invite les jeunes à venir apprendre
un peu plus sur l’environnement,
à travers les cours de botanique
dispensés à l’intérieur même du
jardin.
La célébration de cette impor-
tante journée qui s’est faite,
pour le moins calmement, con-
tribue à augmenter un peu plus
les inquiétudes des citoyens pour
lesquels l’environnement con-
stitue aujourd’hui, la plus grande
menace.
Petite célébration, grosses inquiétudespar Lionel Edouard
HAÏTI-JOURNÉEMONDIALEDEL’ENVIRONNEMENT
Le ministre de l’Environnement, Dominique Pierre. / Photo : ministère de la
Communication
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 7
MONDE
U
n responsable de l’ONU a
appelé vendredi toutes les
parties en conflit en Ukraine,
théâtre d’un regain de vio-
lences, à respecter « totalement » le
cessez-le-feu prévu dans les fragiles
accords de paix de février, que les
deux camps s’accusent réciproque-
ment de violer.
L’Union européenne devrait prolon-
ger de son côté les lourdes sanc-
tions économiques prises contre la
Russie jusqu’en janvier, a appris
l’AFP vendredi de sources concor-
dantes.
Ces sanctions frappent des pans
entiers de l’économie russe
(banques, défense, pétrole), qui ne
peuvent se financer sur les marchés
européens. Elles doivent expirer fin
juillet.
« Le cessez-le-feu doit être totale-
ment respecté et la protection
des civils doit être une priorité »,
a affirmé le secrétaire général
adjoint de l’ONU aux Affaires poli-
tiques Jeffrey Feltman, lors d’une
réunion convoquée en urgence du
Conseil de sécurité en raison de
l’inquiétude suscitée par ce regain
de tensions.
« Nous sommes en train d’assister
soit à l’aggravation d’un conflit dif-
ficile à régler, soit à un regain tem-
poraire de tensions dans certaines
zones », a-t-il ajouté. Or « nous ne
pouvons nous permettre aucun de
ces scénarios ».
Sur le terrain, les combats se pour-
suivent, mais comparé à mercredi
--jour d’une offensive meurtrière
des séparatistes prorusses, selon
Kiev, contre la localité de Mariinka,
à l’est de Donetsk--, leur intensité a
considérablement baissé.
L’armée ukrainienne a cepen-
dant accusé vendredi les rebelles
séparatistes de viser ses positions
autour de Donetsk (est), tandis que
les séparatistes pro-russes repro-
chaient aux forces ukrainiennes
d’utiliser des systèmes de lance-
roquettes multiples.
« Les développements autour de
Mariinka sont inquiétants », a
estimé vendredi devant le Conseil
Alexander Hug, chef-adjoint de la
mission d’observation de l’OSCE en
Ukraine, qui a évoqué les « inquié-
tudes » concernant des livraisons
de ce type d’armements.
L’Ukraine elle-même avait demandé
au Conseil de sécurité d’aborder
l’offensive de Mariinka, qui a fait
28 morts, selon le représentant de
Kiev auprès des Nations unies, Iouri
Sergueïev. L’UE, les Etats-Unis,
ainsi que Paris et Berlin, parrains
des très fragiles accords de paix de
Minsk 2, signés le 12 février, ont
unanimement exprimé leur préoc-
cupation concernant cette reprise
des affrontements dans la partie
orientale de l’Ukraine, Moscou aver-
tissant de son côté que le proces-
sus de paix risquait de « voler en
éclats ».
L’ambassadeur russe à l’ONU, Vitali
Tchourkine, a accusé les forces
ukrainiennes de viser des civils et
de ne pas respecter leurs engage-
ments. “Nous sommes à un moment
décisif”, a-t-il estimé.
“Si nous laissons Kiev continuer
à ne pas prendre les mesures poli-
tiques nécessaires dans le Donbass,
la situation pourrait échapper à tout
contrôle, avec des conséquences
imprévisibles”, a-t-il prévenu.
Mais pour l’ambassadrice des Etats-
Unis à l’ONU Samantha Power, « les
récentes violences proviennent
d’un assaut combiné séparatiste et
russe ».
Mme Power doit se rendre à Kiev la
semaine prochaine pour rencontrer
des responsables ukrainiens ainsi
que les habitants « les plus affectés
par ce conflit alimenté par Moscou »,
selon son compte Twitter.
Le président ukrainien Petro Poro-
chenko a annoncé qu’une conver-
sation téléphonique était prévue
vendredi avec son homologue
américain Barack Obama afin de «
coordonner leurs positions en vue
du sommet du G7 », dimanche et
lundi en Allemagne, où il va aussi
s’entretenir avec la chancelière alle-
mande Angela Merkel.
Une source diplomatique française
a évoqué l’ « intérêt » des séparat-
istes prorusses à « dramatiser » la
situation en Ukraine à l’approche
du sommet du G7.
Le dirigeant ukrainien n’a cessé de
mettre en garde contre la menace
d’une « guerre totale » avec la
Russie, accusée de soutenir et
d’armer la rébellion dans l’Est
séparatiste, après avoir annexé en
mars 2014 la péninsule de Crimée.
« La menace d’une invasion russe
n’a jamais été aussi grande », a-t-il
encore affirmé vendredi, assurant
que plus de 9.000 soldats russes
se trouvaient actuellement sur le
territoire ukrainien.
Le secrétaire général de l’Otan, Jens
Stoltenberg, a de son côté accusé la
Russie de « continuer à soutenir les
séparatistes (...) avec des équipe-
ments lourds, de l’artillerie ».
Les récents combats ont été les plus
intenses depuis la reprise par les
rebelles du noeud ferroviaire stra-
tégique de Debaltseve, à mi-chemin
des bastions rebelles de Donetsk et
de Lougansk, peu après l’entrée en
vigueur, le 15 février, du cessez-le-
feu conclu à Minsk.
A Telmanové, à 60 kilomètres de
Donetsk, un bébé a été tué et trois
adultes ont été blessés jeudi, a indi-
qué vendredi Edouard Bassourine,
un responsable du “ministère” de
la Défense de la « République popu-
laire de Donetsk ». Un combattant
de la DNR a également été tué et
quatre autres ont été blessés au
cours des dernières 24 heures.
De leur côté, les forces ukraini-
ennes pro-occidentales ont qualifié
la situation d’ « instable ». Quatre
soldats ont été blessés ces dernières
24 heures, selon le porte-parole
militaire ukrainien Andriï Lys-
senko.
Le conflit dans l’est a déjà fait
plus de 6.400 morts depuis son
déclenchement en avril 2014.
L'ONU appelle au respect de la trêve
Le président ukrainien Petro Porochenko. / Photo : ladepeche.fr
8 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
MONDE
Le gouvernement américain a
annoncé avoir détecté le piratage
informatique des données
personnelles de quatre millions
d’employés fédéraux qui, selon
le Washington Post, aurait été
perpétré par des Chinois, dernière
offensive numérique en date contre
des intérêts américains.
Cette « cyber-intrusion » a été
détectée en avril dernier par l’Office
ofPersonnelManagement(OPM),qui
gère les effectifs du gouvernement
et attribue des centaines de milliers
d’accréditations aux fonctionnaires
fédéraux chaque année.
Elle aurait été fomentée en
décembre par des pirates
informatiques chinois, selon le
Washington Post, qui l’a appris
de responsables américains sous
couvert d’anonymat. Il s’agirait du
deuxième piratage majeur de cette
agence perpétré par la Chine.
Mais l’ambassade de Chine aux
Etats-Unis a rejeté ces accusations.
« Tirer des conclusions hâtives et
lancer des accusations sur la base
d’hypothèses est irresponsable
et contreproductif », a déclaré le
porte-parole de l’ambassade, Zhu
Haiquan.
« La législation chinoise interdit la
cyber-criminalité sous toutes ses
formes. La Chine a fait beaucoup
d’efforts pour combattre la cyber-
criminalité », a assuré M. Zhu.
Dans un communiqué, l’OPM
a indiqué que les données
personnelles d’environ 4 millions
d’employés -- actuels et anciens
-- du gouvernement auraient été
compromises et a annoncé que
ces personnes seraient informées à
partir du 8 juin.
On ignorait si le piratage avait
affecté le président Barack Obama,
d’autres hauts responsables de
l’administration ou la communauté
du renseignement.
Mais l’OPM n’a pas exclu que
d’autres victimes soient identifiées
au cours de l’enquête et a proposé
de les dédommager à hauteur d’un
million de dollars en cas « de fraude
et de vol d’identité ».
Cette agence a utilisé de nouveaux
outils informatiques ces derniers
mois qui lui ont permis de détecter
cette attaque quatre mois après son
lancement. Or celle-ci a été menée
au moment même où l’OPM se
dotait de nouvelles procédures de
sécurité.
L’objectif des pirates n’était pas
immédiatement clair, entre vol
d’identités et espionnage.
Le FBI a indiqué dans un bref
communiqué enquêter sur cette
affaire et « prendre au sérieux
toutes les attaques potentielles
contre les systèmes du secteur
public et privé ».
La police fédérale a estimé que
« tous ceux qui constituent une
menace dans le cyberespace »
devraient rendre des comptes.
La directrice de l’OPM Katherine
Archuleta a assuré prendre « très
au sérieux notre responsabilité de
sécuriser les informations stockées
dans nos systèmes ».
L’OPM a appelé toutes les victimes
potentielles à se montrer très
attentives dans la gestion de
leurs comptes en banque et la
manipulation de leurs données
personnelles.
Les piratages se sont multipliés
ces derniers mois aux Etats-Unis,
la plupart visant les systèmes
informatiques internet de grands
groupes comme le distributeur
Target, l’assureur santé Anthem ou
les studios de cinéma Sony Pictures
Entertainment.
L’an dernier, des pirates chinois
s’étaient introduits dans le réseau
informatique de l’OPM et de deux
sous-traitants, ciblant en particulier
les dossiers de candidature pour
une accréditation secret défense de
dizaines de milliers d’employés.
L’attaque, détectée en mars 2014,
avait été immédiatement bloquée
et attribuée à la Chine par un haut
responsable américain.
Des boîtes de courrier électronique
à la Maison Blanche et au
département d’Etat avaient aussi
étaient prises pour cible par des
hackers l’an dernier, y compris des
courriels du président Obama lui-
même, ont admis récemment des
responsables américains. Cette
fois-là, la Russie aurait été derrière
l’attaque, selon le New York Times.
Le GAO, équivalent de la Cour des
comptes française, avait pointé en
avril les « faiblesses de l’approche
du gouvernement américain pour
protéger les systèmes informatiques
fédéraux ».
L’espionnage par la Chine
d’entreprises américaines « reste
un problème significatif », avait
souligné en février le directeur
du renseignement américain
James Clapper, en rappelant que
Pékin et Moscou disposaient pour
ces attaques de systèmes « très
sophistiqués ».
Il avait explicitement cité la
Chine dans une autre attaque
informatique, en août 2014, contre
des hôpitaux gérés par la société
Community Health Systems, qui
représente 200 établissements,
où des données personnelles de
patients avaient été dérobées.
L’annoncedecetteattaqueintervient
le jour où le New York Times a
rapporté, citant des documents de
l’ex-consultant de la NSA Edward
Snowden, que l’administration
Obama avait donné à l’agence du
renseignement des pouvoirs élargis
pour surveiller les communications
sur internet afin d’y repérer des
pirates informatiques travaillant
pour des gouvernements étrangers.
La direction nationale du
renseignement (Odni) s’est
défendue jeudi en rappelant
que la « fréquence, l’échelle, la
sophistication et la gravité » de la
cyber-menace sur les Etats-Unis
augmentait.
La Chine soupçonnée du piratage des données
de quatre millions d'employés fédéraux
L
e gouvernement colombien et
les rebelles des Forces armées
révolutionnaires de Colombie
(Farc) se sont mis d’accord
jeudi pour former une commission
vérité qui devra mettre en lumière
les atrocités de la plus longue guerre
en cours en Amérique latine, une fois
qu’elle sera terminée.
Les négociateurs sont parvenus à
cet accord malgré une escalade de
la violence ces dernières semaines,
susceptible de mettre en péril les
négociations de paix, qui se dérou-
lent à Cuba. « La commission (...)
commencera à fonctionner après
la signature d’un accord définitif
et une fois que les Farc auront
déposé les armes », est-il précisé
dans l’accord lu par les représent-
ants de Cuba et de la Norvège, les
deux pays qui supervisent les dis-
cussions de paix.
« Le gouvernement s’engagera à (...)
l’établissement de la vérité dans
tous les épisodes du conflit, y com-
pris les plus graves violations des
droits de l’homme. »
Les combats se sont poursuivis
depuis que les négociations ont
commencé il y a deux ans et demi
à la Havane, portant à 220.000 le
total des victimes de ce conflit de
50 ans, qui a également entraîné le
déplacement de millions de Colom-
biens.
Il y a plus de deux semaines, les
Farc avaient annoncé la rupture
de leur cessez-le-feu unilatéral à
la suite de la mort de 26 des leurs
dans une opération menées la veille
par les forces gouvernementales.
Cette trêve avait été proclamée en
décembre dernier.
Les délégués des Farc et du gouver-
nement colombien se sont déjà mis
d’accord sur trois des cinq points
en négociation, la réforme agraire,
l’arrêt du commerce de la drogue et
l’intégration politique des anciens
rebelles.
Ils discutent actuellement de la
compensation des victimes et de
la démobilisation des combattants.
Une fois qu’un accord partiel aura
été trouvé sur chacun des cinq
points, les deux parties passeront
en revue le texte dans son intégral-
ité qui, le cas échéant, sera ensuite
soumis aux électeurs colombiens
pour être ratifié.
Bogota et les Farc s'entendent
pour former une commission vérité
Y aurait-il actuellement des prob-
lèmes de liquidité sur le marché
haïtien ? Pas du tout, affirme Pat-
rick Tassy de la Direction de la
Caisse à la Banque centrale. Une
appréciation qui semble ne pas
faire l’unanimité dans bon nombre
d’entreprises commerciales de la
place.
Mais le cadre de la Banque de la
République d’Haïti (BRH), persiste
et signe. « La quantité de monnaie
en circulation dans l’économie
nationale est passée de 23,1 mil-
liards, pendant l’exercice fiscale
2012-2013, à 26,7 milliards de
gourdes durant l’exercice 2013-
2014 ». Alors, où est le problème ?
L’économie nationale – c’est une
lapalissade – fait face à des situ-
ations difficiles depuis un certain
temps. Hausse des prix, érosion
du pouvoir d’achat, dévaluation de
la gourde, crise du crédit, entre
autres : la liste est longue. Et
qu’en serait-il, s’il fallait, de sur-
croit, faire face à des problèmes de
liquidité ? En tant que moyen de
paiement sans délai et à valeur cer-
taine, la liquidité est indispensable
dans le cadre de toute transaction
commerciale.
Pour parler de problèmes de liquidi-
té, il faut au moins, apprend-t-on,
trois cas de figure. Le premier est
quand l’Etat ne peut plus rémunér-
er ses employés. Le deuxième est
lorsqu’une banque commerciale ne
peut pas vous rendre votre argent
épargné. Le troisième cas de figure
est lorsqu’un grand entrepreneur
veut puiser dans ses réserves à la
banque pour en tirer, en cash, un
certain montant et que l’institution
se révèle incapable de lui fournir la
quantité requise en liquide. Autre-
ment, peut-on parler de problèmes
de liquidité ?
La BRH est là - rappelle-t-on - pour
veiller au grain et assurer une ali-
mentation équilibrée du marché en
billets et en pièces de monnaie. Ni
trop, ni trop peu. Elle doit éviter
d’injecter trop de monnaie dans
l’économie si elle ne veut pas pro-
voquer une poussée inflationniste.
Par contre, un approvisionnement
insuffisant en billets et en pièces
de monnaie pourrait occasion-
ner le blocage des transactions
de toutes sortes. Pour garantir la
disponibilité de liquidité, confie
Patrick Tassy, la BRH a recours à
l’émission des billets et des pièces
de monnaie en cas de besoins, et
au remplacement régulier des bil-
lets et pièces usagés.
Des clients accusent, les
banques privées se défendent
Lors des assises organisées récem-
ment par la Banque centrale pour
renforcer les capacités des journal-
istes économiques des différents
médias de la capitale, Donald
Dégeois, de la Direction Caisse et
Réseau à la BRH, avait expliqué
que la rareté de liquidité peut être
due au processus de commande
qui demande beaucoup de temps,
mais, avait-il ajouté, la BRH gère
toujours la masse monétaire en
circulation de façon à éviter toute
rareté.
Pour ce qui est de la pénurie de
billets et de pièces de monnaie,
il a déploré le comportement de
certaines banques commercia-
les privées, qui ne veulent pas
accepter les pièces de monnaie en
épargne, sous prétexte que leur
gestion n’est pas chose facile. «
Elles prennent trop d’espace, elles
sont trop lourdes, trop usées, etc.
», un refrain repris à satiété depuis
quelque temps. Une situation qui,
selon lui, est à l’origine de la pénu-
rie constatée lorsqu’elles ne sont
pas récupérées pour réalimenter
le marché.
18,270.000 pièces de monnaie au
total (pièces de 20 centimes, de
50 centimes, d’une gourde, et de 5
gourdes) ont été mis en circulation
dans le système durant l’exercice
2013-2014, affirme une source
autorisée de la Banque centrale. II
ne devrait pas y avoir de problèmes
liés à une quelconque pénurie de
pièces de monnaie.
Alors, où sont donc passées les
pièces de monnaie ? Contacté
par Le National à ce sujet, Savio
Louis, Directeur de la succursale
de Carrefour de la Scotia Bank, a
affirmé que ce problème n’existe
pas au niveau de son institution. «
Au contraire le taux du dollar US
augmente, c’est signe qu’il y a trop
de gourdes en circulation », a-t-il
déclaré. Des pièces de monnaie
sont disponible en grande quan-
tité à la Scotia Bank, a-t-il plaidé,
et si les supermarchés en veulent,
ils peuvent venir en faire la com-
mande.
Mêmes explications du côté de
la Unibank. Selon un cadre de la
succursale de Thor ayant requis
l’anonymat, tout problème de
liquidité équivaudrait en quelque
sorte à une situation d’insolvabilité
de la banque, et à ce moment-là, la
BRH interviendrait pour prendre
les décisions qui s’imposent. Il n’y
a pas de problèmes de liquidité,
encore moins de pénurie de pièces
de monnaie au niveau de la Uni-
bank, a-t-il affirmé. À souligner :
les dirigeants de deux succursales
de la Sogebank ont été approchées
dans le cadre de cette enquête,
mais ils n’ont refusé de se pronon-
cer sur le sujet.
Les banques se dédouanent et
les supermarchés se défilent
Si les dirigeants de la BRH et
ceux des banques commerciales
font état d’un marché sans pro-
blèmes de liquidité, au niveau
des boutiques et supermarchés,
notamment du Big Star Market et
de Délimart, la perception de la
situation semble être différente.
Chef de caisse au Big Star Market
à Pétion-ville, Daphné Pierre croit
que le manque de liquidité est tou-
jours lié à une baisse du taux de
fréquentation du supermarché.
Daphné affirme que le super-
marché n’est en rien responsable
de la pénurie de pièces de monnaie
et renvoie la balle aux banques
commerciales : « nous ne sommes
pas responsables de ce fléau, je
vous conseille de vous adresser
aux banques commerciales». « Ce
sont les banques commerciales,
se défend-t-elle, qui détiennent le
monopole des pièces de monnaie,
et qui ne veulent pas les livrer aux
supermarchés ou aux petits com-
merçants des boutiques ».
Pour pallier à cette situation,
l’institution adopte parfois la poli-
tique de réduction des prix des
produits – rabais – pendant les
fêtes de fin d’année par exemple,
pour compenser les clients forcés
de renoncer à leur monnaie à cause
de cette rareté. « Il arrive parfois
que nous soyons obligés, face à des
clients intransigeants, de verser
une pièce de 5 gourdes pour rendre
de la monnaie évaluée à trois, deux
et même une gourde ».
Les observateurs de la situation
s’accordent au moins sur un point
: cette pénurie de pièces de mon-
naie fait évidemment le bonheur
des uns et le malheur des autres.
Entre la banque des banques qui
joue au Ponce Pilate, les banques
commerciales qui se dédouanent
et les supermarchés qui se défilent,
le consommateur lambda est pris
en étau et c’est lui qui casque, en
dernier ressort. Une situation qui,
à cause de ses répercussions tant
au niveau micro qu’au niveau mac-
roéconomique, devrait intéresser
les pouvoirs publics au plus haut
point.
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 9
ÉCONOMIE
HAÏTI-CONJONCTUREÉCONOMIQUE
Question de liquidité,
liquidité en question...Par Evens Regis
Cette pénurie de pièces de monnaie fait évidemment le bonheur des uns et le
malheur des autres.
Entre la Banque centrale qui joue au Ponce Pilate, les banques commerciales qui
se dédouanent et les supermarchés qui se défilent, le consommateur lambda est
pris en étau.
10 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
ÉCONOMIE
MARCHÉDESCHANGES
L
es économistes Marc Alain
Boucicaut (American Univer-
sity) et l’ancien gouverneur
de la Banque centrale Fritz
Alphonse Jean (Fordham Universi-
ty)) étaient les conférenciers invités
par la Chambre franco-haïtienne de
commerce et d’industrie (CFHCI) à
ces assises pour conduire la réflexion
autour du thème « Taux de change :
enjeux et défis».
L’analyse des causes de la dévalu-
ation de la gourde fut le principal
exercice conduit dans le cadre de
cet atelier de réflexion sur les pro-
blèmes que confronte l’économie
haïtienne. En fait, explique Gré-
gory Brandt, président du Conseil
d’administration de la CFHCI, nous
devions « dégager des perspectives
pour les prochaines années ».
Dans son allocution d’ouverture,
Grégory Brandt a fait le point sur
la situation sociodémographique
d’Haïti. « Nous vivons actuellement
une situation économique pré-
caire, a-t-il déploré. Une croissance
économique quasi nulle, associée
à une poussée démographique sig-
nificative » qui, selon les statis-
tiques, prévoit pour 2016 et 2017
une augmentation de la popula-
tion avoisinant les douze millions
d’habitants.
« Le déficit budgétaire a atteint un
record historique », a-t-il soutenu,
indiquant qu’en 2010 en dépit de
l’annulation de la dette, le taux
d’intérêt est passé de 5% à 6%
en cinq ans. Un taux mesurant le
glissement de la gourde de 44% à
50%. « Pour pallier le problème de
la dette publique, trois solutions
nécessaires : l’impôt, l’austérité et
l’inflation ». a-t-il ajouté.
Si Grégory Brandt trouve la situa-
tion socioéconomique d’Haïti cha-
otique, Marc Alain Boucicaut, lui,
en dessine le contour historique.
La crise politique de 2004, expli-
que-t-il, nous a donné la MINUS-
TAH. Et cette venue des troupes
onusiennes a eu un impact négatif
sur l’économie haïtienne. « Cela va
conduire à une situation de dépré-
ciation de la gourde qui va créer
de l’instabilité économique ainsi
qu’une augmentation de la quan-
tité de dollars dans l’économie
haïtienne ».
« Chaque année, la gourde perd
une valeur monétaire de 7,3%
», a pour sa part constaté Marc
Alain Boucicaut, maître en poli-
tique économique et financière.
Selon lui, ce bourbier fait suite à
l’absence d’investissement étrang-
er direct. La mise en contexte de la
thématique est l’occasion de poser
aussi des interrogations pertinen-
tes. Pourquoi la gourde est en train
de perdre sa valeur monétaire et
pour quels résultats ?
Inflation ou récession :
l’économie haïtienne en 2015
et le taux de change
La situation économique haï-
tienne est précaire. Seule une
politique monétaire authentique
permettrait de resserrer les liens
dans l’économie haïtienne. Ce
sera funeste si rien n’est fait pour
remédier à ce problème. Marc
Alain Boucicaut argumente : « sans
l’augmentation des réserves ou une
politique monétaire restrictive, la
dépréciation de la gourde semble
inévitable en Haïti ».
En dépit de tout cela, poursuit
l’économiste, le comportement
des agents économiques n’est pas
uniforme. La population vit de
transferts sans contrepartie (aug-
mentation du pouvoir d’achat). Les
actifs et les opérations de change
des banques commerciales sont
en dollars. Et, se demande-t-il,
la compétitivité des entreprises
d’exportation s’améliorera-t-elle
avec l’augmentation de la produc-
tion ? Quelle qualité et pour quelle
valeur ajoutée ? Augmentation des
prix, élasticité de la demande à
déterminer. La perte du pouvoir
d’achat du salarié haïtien.
Marc Alain Boucicaut en profite
pour s’interroger : quelles sont
les options pour « stabiliser » le
taux de change en Haïti ? Faut-il
faire augmenter les IDE ? Is Haïti
really open for business ?. Y a–t-il
lieu d’augmenter l’aide interna-
tionale alors que les prêts et les
dons sont en diminution » ? Est-il
possible d’augmenter les trans-
ferts sans contrepartie : « variable
exogène » ?
Devrait-on augmenter les expor-
tations et diminuer les importa-
tions, conclut l’économiste en
mettant l’emphase sur l’appareil
productif haïtien, notamment la
production agricole. Tentative
de répondre à la question : « Il
faut augmenter l’importation et
diminuer l’exportation. La banque
centrale doit jouer son rôle dans
ce marasme économique. C’est à
nous de répondre, de façon respon-
sable aux enjeux et défis du taux
de change ».
Marc Alain Boucicaut prône un
changement de comportement
par la production en passant par
une harmonisation des politiques
monétaires et fiscales. Cette
réconciliation vise la discipline
budgétaire et le renforcement
de l’appareil productif pour aug-
menter la valeur ajoutée dans les
secteurs. Il nous faut une politique
monétaire qui vise l’augmentation
du crédit à la production.
Pour rappel, le taux de change
d’une devise (monnaie) est le
prix de cette devise par rapport
à une autre. Le taux de change
a une grande importance pour
l’économie d’un pays, notamment
pour son commerce extérieur. S’il
n y a pas de production nationale
pour éviter d’importer moins sur-
tout les matières premières. Cela
pourrait être un facteur d’inflation
dans le pays de change.
Le taux de change et la situation de la gourde ont fait l’objet de débats qui ont réuni en atelier, le mercredi 3 juin
écoulé à l’hôtel El Rancho de Pétion-Ville, une cinquantaine de personnalités du système bancaire et du monde
politique.
Vers une politique de change en HaïtiPar Therno N. Alisthène S.
Haïti : une croissance économique quasi nulle, associée à une poussée démographique significative. / Photo : mef.gouv.ht
Chaque année, la gourde perd une valeur monétaire de 7,3%.
Photo : planeteayitim.com
L
a Grèce est décidée à rejeter
les dernières propositions de
l’Union européenne pour lui
éviter un défaut de paiement,
ont indiqué dimanche deux ministres,
dont celui des Finances, Yanis Varou-
fakis, pour qui Athènes ne se laissera
pas « terroriser ».
« C’était un geste agressif destiné
à terroriser le gouvernement (...)
sans comprendre que ce gouver-
nement grec ne peut pas être ter-
rorisé », a lancé Yanis Varoufakis
au quotidien Proto Thema.
La Commission européenne a
présenté au cours de la semaine
écoulée à Athènes un docu-
ment de cinq pages de mesures
d’économies comportant notam-
ment une hausse de la TVA, et des
coupes dans les salaires et pen-
sions des fonctionnaires.
Le Premier ministre, Alexis Tsip-
ras, avait déjà qualifié vendredi
les propositions européennes
d’ « absurdes » et avait expliqué
qu’Athènes n’accepterait pas un
accord qui n’incluerait pas une
restructuration de la dette abys-
sale du pays.
« Le document présenté au Premier
ministre est à la limite de l’insulte
», a ajouté M. Varoufakis.
« Nous avons besoin de réformes,
de restructuration de la dette
et d’investissement (...) si nous
n’avons pas les trois ensemble
nous ne signerons pas », a averti
le ministre des Finances.
Athènes a reporté le rembourse-
ment de 300 millions d’euros dus
la semaine dernière au FMI et
décidé de verser les quatre éché-
ances restantes en une seule fois
à la fin du mois.
Il lui faut donc trouver 1,6 milliard
d’euros en trois semaines, ce qui
doit passer par un accord avec ses
créanciers : UE et FMI.
Si la Grèce ne peut honorer ces
paiements avant le 30 juin, elle
sera en défaut de paiement, avec
la menace d’une sortie de la zone
euro.
Athènes, le FMI et l’Union euro-
péenne s’opposent depuis des
semaines sur un plan de réformes
d’austérité, qui conditionne le
déblocage de 7,2 milliards d’euros
restant à verser depuis l’automne
2014, dans le cadre du plan
d?assistance internationale mis
en oeuvre en 2010.
Des ministres du parti de gauche
radicale Syriza estiment que le
Premier ministre devrait con-
voquer des élections anticipées
plutôt que d’accepter des mesures
d’austérité imposées par les créan-
ciers d’Athènes.
« Je ne crois pas qu’il y ait beau-
coup de place pour un accord
positif avec les créanciers (...) ils
recherchent la soumission » de la
Grèce, a déclaré pour sa part le
ministre de l’Energie, Panagiotis
Lafazanis, au journal To Vima.
« Ils veulent écraser le pays soci-
alement et humilier le gouverne-
ment », a dit cet eurosceptique
virulent.
Beaucoup des engagements de
réformes que les institutions récla-
ment à M. Tsipras vont à l’encontre
de ses promesses électorales anti-
austérité, et toute une aile de
Syriza s’insurge contre de trop
importantes concessions.
Ces derniers jours, propositions
grecques et contre-propositions
des institutions ont fait la navette,
sans aucune avancée.
Faute de progrès, le patron de la
Commission européenne, Jean-
Claude Juncker, a refusé samedi
de prendre au téléphone le Pre-
mier ministre grec. M. Tsipras
s’est en revanche entretenu avec
Mme Merkel et le président fran-
çais François Hollande en fin de
journée.
Le psychodrame grec va occuper
une bonne partie des discussions
au sommet du G7 en Allemagne
qui démarre ce dimanche.
La Grèce déterminée à rejeter les
propositions de l'UESources : AFP
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ÉCONOMIE
Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis. / Photo : lesechos.fr
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INSERTION DEMANDÉE
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INSERTION DEMANDÉE
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12 LUNDI 8 JUIN 2015
SOCIÉTÉ
D
ans les pays développés et
industrialisés, la religion est
immanente. Avoir la foi en
Dieu, c’est aussi participer
à la réalisation de soi sur la terre.
Le chrétien croit qu’il doit achever
l’œuvre de la création divine par une
attitude laborieuse. Son ascétisme
moral guide son action vers des entre-
prises économiquement fructueuses.
Ainsi,ilpeutêtreunbonentrepreneur
agricole, un médecin, un banquier, un
ingénieur qui se fait rémunérer par la
société dont il est membre. Dans ce
cas précis, le travail devient une vertu
qui contribue à la création de richess-
es et au développement économique.
Qu’on se rappelle de l’Éthique prot-
estante et l’Esprit du capitalisme de
Max Weber pour essayer de compren-
dre cette idée de l’immanence de la
religion pratiquée en Allemagne et en
Angleterre. Rappelons nous aussi de
la thèse développée par Ernst Troltch
qui a démontré comment certaines
attitudes façonnées par la religion de
l’immanence permettent aux prati-
quants de réaliser leur bien-être sur
la terre, en espérant et en travaillant
pour le salut de leur âme qui est la
promesse faite par Dieu.
L’inébranlable foi
des chrétiens
Tandis que dans les pays sous-
développés et faiblement industri-
alisés, où le taux du chômage est
élevé et croissant, avoir la foi sig-
nifie se soustraire du monde par
la prière pour gagner une place au
paradis promis, là où l’abondance
et le bien-être seront les récom-
penses de ceux qui auront souffert
sur la terre. C’est cette attitude que
Ernst Troltch nomme l’évitement
du monde par le croyant. Celui-ci
ne veut pas travailler pour trans-
former son état présent, mais se
consacre à la prière pour sauver
son âme, laquelle est le seul bien
qui compte. Son compte physique
étant périssable et l’objet de tous
les péchés et de toutes les tenta-
tions. Pour le croyant, la religion
se résume à la transcendance et
doit conduire l’homme à éviter
le monde. D’où changer les con-
ditions de misère, de pauvreté,
d’injustice sociale et économique,
c’est se livrer à une entreprise
vaine. Puisqu’il y aura un monde
d’abondance, de justice divine, de
bien-être qui sera réservé à ceux
qui auront œuvré pour le salut de
leur âme. Et il importe peu donc
qu’ils soient des affamés, des
pauvres ou des appauvris dans le
temps actuel.
De ces deux catégories de croy-
ants dont nous venons de parler,
nous pensons que les milliers de
croyants haïtiens qui s’en vont
jeûner, appartiennent à la deux-
ième catégorie. Cette pratique de
jeûne peut s’interpréter comme
le reflet d’un abandon du monde
physique et une quête farouche du
salut promis par Dieu. Quand ces
milliers d’hommes et de femmes
vont défiler dans les églises
catholiques et protestantes, cela
traduit la condition de chômeur
qui est la leur, et l’évitement du
monde où la souffrance, la misère,
la pauvreté, la maladie, et tous
les maux que nous connaissons,
constituent le salaire du péché,
selon les arguments des évangiles.
Par conséquent, ces croyants ne
croient guère ou ne veulent pas
croire qu’ils ont la responsabilité
de transformer le monde pour
leur bien-être et pour y jouir des
richesses à produire. Toute leur
espérance de vie heureuse est
fondée sur la promesse divine
d’un autre monde où régneront
l’abondance, la joie et le bonheur.
Le jeûne en Haïti, qui est un fait
social religieux, exprime la grande
foi inébranlable des chrétiens
catholiques et protestants.
Il peut être aussi vu comme un
terrain pour l’observation d’un
autre fait social économique, le
chômage. L’économiste et le socio-
logue qui voudraient se renseigner
sur le niveau de chômage, pour-
raient y appliquer leurs méthodes
d’enquête, recueillir les données
sur ce fait, afin d’en comprendre
la nature et d’en analyser sa pro-
gression.
En d’autres termes, l’économiste
et le sociologue se mettraient dans
la peau de l’enquêteur qui observe
cette condition que dissimule le
fait religieux et dans la peau du
statisticien qui veut chiffrer les
données recueillies.
Il importe de dire que si certains
vont jeûner, cela ne veut pas sig-
nifier absolument que ceux-ci
ont une grande foi en Dieu. Ils
se livrent à cette pratique parce
qu’il n’y a pas un bureau qui les
attend. Ce sont des chômeurs qui
s’ennuient de leur oisiveté et dont
l’espoir est de trouver un emploi.
Donc, le jeûne n’est pas néces-
sairement un marqueur de foi,
mais un substitut du curriculum
vitae qu’ils soumettent au moment
de la prière à un Dieu qui rem-
place l’employeur dans le système
socioéconomique que Max Weber
appelle la bureaucratie. Donc, la
foi remplace la rationalité chez
ces acteurs qui ne connaissent
pas encore le désenchantement
du monde dont parle minutieuse-
ment le sociologue allemand.
Pour conclure, nous dirions que
le jeûne que l’on pratique en
Haïti, est un grand laboratoire
d’étude où économiste et socio-
logue peuvent observer l’objet de
leurs questionnements et de leurs
analyses. Cette pratique sociale
religieuse permettra au premier
de mesurer le chômage partiel-
lement, et au second d’établir la
différence entre la religion de la
transcendance et la religion de
l’immanence.
Au sociologue et à l’économiste,
nous dirions qu’ils ont du pain sur
la planche. Allez donc faire une
expérience dans ce grand labora-
toire où celui qui jeûne peut être
à la fois croyant et chômeur.
Mais, où il est surtout ce chômeur
qui espère, non le salut de l’âme,
mais un emploi avec un salaire
mensuel qui lui permettra de vivre
dans la dignité et la joie avec sa
famille.
Prisme à l'évaluation
de la foi et du chômagepar CHERISCLER Evens Boukman
HAÏTISOCIÉTÉ/RELIGION
Ils sont des milliers en Haïti, ceux qui vont jeûner. On les compte dans les églises catholiques aussi bien que dans
les églises protestantes. Ce spectacle ne symbolise pas uniquement la grande foi chrétienne dans le pays. Mais,
il est aussi un prisme qui permet de lire l’ampleur du chômage et cette différence existant entre les religieux qui
continuent l’œuvre de la création divine et les religieux qui évitent le monde pour se consacrer au salut de leur
âme.
Sacré-Coeur de Turgeau. / Photo : J. J. Augustin
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12 | 15
SOCIÉTÉ
À
l’entrée de la ville de Lasca-
hobas, la première chose que
l’on remarque est une station
de motos. De toutes les cou-
leurs, elles sont alignées le long de la
rue logeant le commissariat de la ville.
En face de la cathédrale, non loin de
la place, dans cette ancienne caserne
convertie en commissariat, certains
agents de police font un va-et-vient
ennuyeux. D’autres lisent à l’ombre
d’un grand arbre. Aucun d’entre eux
ne semble se préoccuper des activi-
tés qui se déroulent dehors. La ville
fonctionne dans sa normalité la plus
parfaite.
Fait insolite, aucune de ces
motocyclettes, logées à la barbe
des policiers, n’a une plaque
d’immatriculation. Comme pour
questionner la raison d’être de
ce commissariat, ou encore la
présence de ces policiers. Ou alors
pour affirmer que ces motocy-
clettes ne sont pas des véhicules
à moteur ; que les conducteurs
font fi de la décision de doter
tout véhicule de nouvelle plaque
depuis octobre 2014. Dans l’autre
station de motos de la ville, c’est
le même tableau. Pas de plaque
d’immatriculation. Ni l’ancienne
plaque bleue. Voire cette nouvelle
« perle des Antilles », disponible
depuis le 1er
octobre de l’année
dernière.
Un habitant de la zone déclare
que ce phénomène n’est pas rare
à Lascahobas. « Il fut un temps,
les motocyclettes avaient des
plaques.
Mais depuis quelque temps, c’est
le désordre généralisé. Elles n’ont
plus de plaque d’immatriculation.
» À son avis, rien de spécifique
n’explique cette situation. Car
la succursale de la DGI (Direc-
tion générale des Impôts) qui est
censée délivrer les plaques, con-
tinue de fonctionner.
Ce n’est pas l’omission des plaques
d’immatriculation qui préoccupe
ce citoyen. C’est plutôt les dangers
auxquels sont exposés les habi-
tants de la ville. Plus précisément,
les enfants qui vont à l’école à
moto. Dangers sur lesquels per-
sonne ne se penche. « Les matins,
ils sont cinq sur une seule moto,
continue-t-il. Le chauffeur et
quatre enfants. C’est inacceptable.
La vie de tous ces gosses sont en
danger ».
Selon lui, les autorités policières
interviennent uniquement en
cas d’accident. Et là encore,
l’intervention n’est pas rigou-
reuse. Tout dépendra du chauffeur
et de l’agent de police. Il existe
donc une certaine complicité qui
empêche l’application efficace des
sanctions. « Parfois, les policiers
interviennent. Mais il y a des pots
de vins. Depi yo jere polisye a, li
kite sa pase. ».
D’autres citoyens préfèrent com-
prendre la situation autrement.
Selon eux, les policiers évitent
tout simplement de perdre la vie.
« Talè w al bay kontravansyon pou
plak epi demen w wè w pa la »,
révèle un chauffeur de bus.
Les nouvelles plaques posent
encore problème. Malgré la
promesse de la DGI d’agréer les
surplus de demande, nombreux
sont les chauffeurs qui hésitent
encore à se les procurer. Ou qui
ne veulent tout simplement pas
le faire.
Quels sont les stratégies de dis-
tribution ? Faudrait-il les changer
? Comment contrôler ce flot de
motocyclettes qui circule sans la
moindre immatriculation ? Com-
ment éviter ces dangers ambu-
lants ? À ces questions, seules les
autorités concernées détiennent
les réponses.
H
aïti ne compte que 15 car-
diologues pour près de 11
millions d’habitants. Ils sont
pratiquement tous dans
la capitale, Port-au-Prince. La plus
grande inquiétude, la relève n’est
pas assurée. À cause des difficultés
économiques, les jeunes médecins
ne s’intéressent guère à cette spéci-
alité qui ne nécessite pas moins de
dix années d’études après le bacca-
lauréat.
À l’occasion de la tenue du 8e con-
grès du Collège haïtien de cardi-
ologie, les docteurs Richard Pilié
et Claude Sam ont à nouveau tiré
la sonnette d’alarme. Ils invitent
les autorités haïtiennes à créer
un centre moderne de cardiologie
en Haïti et à adopter des mesures
incitatives pour que plus de méde-
cins s’intéressent à la cardiologie.
Après le séisme de 2010, Haïti
a pu compter sur la présence de
nombreuses missions humani-
taires pour faire face aux lacunes
dans ce secteur. Par exemple la «
Fondation Chaine de l’Espoir Paris
» a pu, en sept missions, réalis-
er de nombreuses opérations et
sauver la vie de 130 personnes.
Mais Haïti n’est pas le centre du
monde et l’attention internatio-
nale a diminué. Pour proposer
une solution sur le long terme,
un projet de centre de cardiolo-
gie moderne est envisagé par la
branche haïtienne de cette fonda-
tion. Mais dix millions de dollars
sont nécessaires à sa concrétisa-
tion.
La cardiologie moderne n’est
pas encore accessible en Haïti.
Les interventions des cardio-
logues haïtiens se limitent à
l’évaluation clinique basée sur
l’échocardiographie et d’autres
types d’examens. La prise en
charge des patients souffrant
d’une malformation cardiaque
est faite simplement à partir de
médicaments qui ne peuvent que
ralentir la déformation du cœur.
Pourtant, la gravité du problème
n’échappe pas à l’État haïtien, les
maladies cardiovasculaires – et en
tête de liste l’hypertension artéri-
elle - sont les principales causes
de mortalité chez les adultes selon
le document de Politique natio-
nale de Santé du ministère haï-
tien de la Santé publique publié
en 2012. Cependant, les actions
concrètes pour s’attaquer au pro-
blème tardent encore.
Habitudes alimentaires
et environnement
sociopolitique mis en causes
Les cardiologues Pilié et Sam qui
intervenaient sur radio Métropole,
le 02 juin passé, se sont adressés
à cœur ouvert à la population haï-
tienne, l’invitant à changer ses
habitudes alimentaires pour éviter
les complications. Pour accentuer
leur discours, ils ont rappelé un
proverbe très caricatural : « nous
creusons notre tombe avec nos
dents ».
De manière générale, ils ont
recommandé à la population de
réduire sa consommation de sel et
de graisse et de s’adonner à plus
d’exercices physiques. Mais aussi
d’apprendre à relativiser pour
mieux gérer le stress quotidien.
Aux personnes de 40 ans et plus
ils ont, de surcroit, conseillé de
ne pas prendre de repas copieux
après 6hpm et de consulter régu-
lièrement un cardiologue.
Aux politiciens : les spéciali-
stes du cœur ont recommandé à
penser deux fois aux conséquenc-
es de leurs actes sur la santé de la
population.
Plaques d'immatriculation :
entre insouciance et pots de vinPAr Stéphanie Balmir
Un défi de santé publique en HaïtiPAr Vantz Brutus
HAÏTISOCIÉTÉ/CIRCULATION
HAÏTI-SANTÉ/MALADIESCARDIOVASCULAIRES
Depuis la fin de l’année 2014, les nouvelles plaques d’immatriculation sont disponibles. La date limite fixée au 31
décembre 2014 n’a pas, semble-t-il, été respectée. Puisqu’aujourd’hui encore, certains véhicules, privés ou autre,
circulent sans ces nouvelles plaques. À Lascahobas, les motocyclettes n’ont ni l’ancienne ni la nouvelle plaque
d’immatriculation.
Des motos saisi par la PNH. / Photo : J. J. Augustin
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12 LUNDI 8 JUIN 2015
SOCIÉTÉ
A
ccusée de n’avoir reconstruit
que six habitations en dur
cinq ans après le tremble-
ment de terre qui a dévasté
Haïti, malgré quelque 500 millions
de dollars de dons récoltés, la Croix-
Rouge américaine tente de défendre
son bilan, en expliquant notamment
avoir surtout eu recours à des aides
au logement.
Le site internet d’investigation
new-yorkais ProPublica et la
chaîne de radio publique améri-
caine NPR ont présenté cette
semaine un rapport qui accuse
l’organisation humanitaire d’avoir
gaspillé l’argent donné par une
mauvaise gestion et en ayant trop
souvent fait appel à des travail-
leurs humanitaires étrangers ne
parlant par le français ou le créole.
De son côté, la Fondation Thom-
son Reuters a appris que la Croix-
Rouge avait dépensé au moins
17% des fonds collectés pour Haïti
en frais de fonctionnement alors
que la Croix-Rouge américaine et
la Croix-Rouge internationale affir-
ment que pour un dollar récolté,
91 cents doivent être consacrés à
la mission humanitaire.
La Croix-Rouge américaine estime
que les informations publiées par
la presse américaine sont « inex-
actes” et doivent être remises
dans “leur contexte ». Elle affirme
que son travail à Haïti a aidé des
millions d’Haïtiens.
« Malgré des conditions particu-
lièrement difficiles, notamment
des changements de gouverne-
ment, le manque de terrain pour
la construction de logements et
les troubles civils, notre person-
nel qui travaille dur, et qui est à
90% constitué d’Haïtiens, contin-
ue à répondre aux besoins à long
terme du peuple haïtien », déclare
l’Organisation non gouvernemen-
tale (ONG) dans un communiqué
publié sur son site internet.
« Et si les choses ne progressent
jamais à un rythme aussi rapide
que nous le souhaiterions, Haïti
va mieux aujourd’hui qu’il y a cinq
ans. »
Le tremblement de terre du 12 jan-
vier 2010 a fait plus de 220.000
morts et 1,5 million de déplacés.
D’AUTRES MÉTHODES
La Croix-Rouge affirme que les
dons ont permis de constru-
ire huit hôpitaux et cliniques,
d’endiguer une épidémie de
choléra, de fournir de l’eau pota-
ble et des installations sanitaires,
de réparer des routes et des écoles
et de reloger 130.000 personnes
qui avaient dû s’abriter dans des
tentes et autres abris de fortune
après le séisme.
Les journalistes de ProPublica
et de NPR soutiennent que leur
travail d’enquête, qui se base sur
diverses informations, dont des
courriels confidentiels de hauts
dirigeants, leur permet de dire
que seulement six habitations en
dur ont été construites à Haïti en
cinq ans.
La Croix-Rouge répond qu’elle a
utilisé d’autres méthodes pour
améliorer la vie quotidienne des
sinistrés.
« Quand il n’y avait pas de terrains
disponibles pour de nouveaux
logements, la Croix-Rouge a
fourni une série de solutions en
la matière, notamment des aides
à la location, la réparation et la
modernisation des structures
existantes, tenant ainsi notre
promesse de reloger des dizaines
de milliers d’Haïtiens », explique
l’ONG.
Elle a refusé de répondre à tout
autre question de la Fondation
Thomson Reuters et précise dans
une note accompagnant son com-
muniqué que la manière la plus
rapide et la plus efficace est de
distribuer des aides permettant
de payer les loyers.
Un de ces programmes d’aide à
la location (six millions de dol-
lars) est géré par la Fédération
internationale des Sociétés de
la Croix-Rouge et du Croissant-
Rouge (FISCR), basée à Genève, et
cela augmente les frais généraux,
explique l’ONG.
Si la Croix-Rouge américaine
assure que 91% des dons vont
à l’aide humanitaire, la FISCR a
expliqué à la fondation Thomson
Reuters que quand elle gère elle-
même un programme, elle facture
6,5 % supplémentaires localement
pour couvrir les frais administra-
tifs, de télécoms et autres coûts
d’exploitation.
La FISCR n’a pu fournir de préci-
sions sur ce qu’elle avait facturé
en plus pour gérer ce programme
de subvention de six millions de
dollars. Dans son rapport sur cinq
ans sur l’aide à Haïti, elle dit qu’en
moyenne 17 % sont dépensés en
« soutien et coordination des pro-
grammes ».
Épinglée pour son travail à Haïti,
la Croix-Rouge US se défendSources : Reuters
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 17
CULTURE
S
ouriante, chaleureuse, très
honorée, avec les marques
d’une hospitalité sans pareille,
elle s’est approchée de nous
dans sa robe blanche portée spéciale-
ment pour l’occasion. « Le blanc sym-
bolise la pureté », justifie-t-elle pour
commencer. On aurait cru que même
son âme est blanche vu la joie qu’elle
a témoigné à nous recevoir sur son
habitation. C’est par une génuflexion
qu’elle nous a salués en nous invitant
à nous asseoir.
Sa rencontre avec le vaudou
Son père et sa mère n’avaient
aucun rapport avec le vaudou.
Mais son grand-père était un «
Houngan ». C’est de lui qu’elle
aurait reçu probablement cet héri-
tage. Née le 16 mars 1954, Marie
Yoleine Gateau a grandi dans le
culte du catholicisme. Elle a même
fait ses études primaires à l’école
Sainte-Rose de Lima et celles
du secondaire au Sacré-Cœur de
Turgeau. Élevée loin de toute pra-
tique vaudouesque, cela n’a pas
empêché que les esprits fassent
appel à elle dans un songe : « C’est
à travers un songe que cette déter-
mination de devenir « Mambo » a
vu le jour en moi », raconte-t-elle
avec le sourire aux lèvres. Durant
ses études à l’étranger, elle était
intriguée par son souci de com-
prendre le vaudou. Et déjà, ses
transes incontrôlables augmen-
taient ses préoccupations. C’est
finalement dans les bras de son
mari, un psychologue italo-améri-
cain, qu’elle retrouve le moral et
arrive à comprendre ce qu’est la
transe. Si Marie Yoleine Gateau
est « assogue » (du bénin : être
choisi) dès sa naissance, ce n’est
qu’en août 2014 qu’elle a finale-
ment « pran ason » – équivalent
de l’ordination dans la religion
catholique. Conseillère péda-
gogique, madame Gateau a cette
capacité de ne pas confondre sa
vie professionnelle avec sa vie
spirituelle.
Mambo : entre guide spirituel
et profession
La Mambo dans le vaudou est
l’égale du Houngan. Elle est la
maîtresse de son temple. C’est un
leader qui doit gérer tous les éven-
tuels conflits. Pour devenir une
vraie Mambo, il faut passer par le «
Kan-zo ». C’est une sorte de voyage
mystique qui dure onze jours,
et qui doit commencer un jeudi
(qu’on appelle « monte bila »). Le
« ouyon » i.e. la personne qui fait
le « voyage », doit s’enfermer dans
un « djèvò », lieu où l’on réalise
le « voyage », après avoir quitté
le « rafrechi », lieu où l’on puri-
fie le « ouyon ». Durant les onze
jours du Kan-zo, on apprend au «
ouyon » à canaliser de l’énergie, à
maitriser le feu… avec l’aide des
esprits. Une fois passée l’étape du
Kan-zo, le « ouyon » est devenu un
« Hounsi simple » pour devenir
ensuite un « Hounsi sous point
». Si le Hounsi (communément
appelé « pitit kay ») décide de «
pran ason », il doit se rendre à
« les lieux » qui représente une
sorte de tribunal, où l’on inter-
roge le Hounsi pour voir s’il est
digne d’être Mambo ou Houngan.
« C’est la procédure pour devenir
Mambo quand on est « assogue »»,
explique madame Gâteau. Mais les
« mambos lakay », les « mambos
makout » n’ont reçu aucun appel
des « loas », et peuvent ainsi
ignorer cette étape. D’où naît un
sérieux malentendu selon Marie
Yoleine Gateau : « Beaucoup de
gens pensent qu’être Mambo est
un métier. Cela doit s’expliquer
par le fait qu’elles (Mambos)
réclament parfois des frais en
contrepartie des services rendus
; cela est dû à leur précarité
économique, mais n’enlève rien
à leur identité de guide spirituel
». Pour ainsi dire, le statut de
Mambo n’est pas un titre professi-
onnel. La Mambo doit être perçue
comme un berger, un mentor. Elle
est placée pour aider les gens à
bien servir les « loas » (esprits ser-
vant d’intermédiaire entre Dieu et
les hommes, au même titre que les
saints de l’Église catholique) et le
« grand maître ».
Vaudou : entre mode de vie
et religion
Considéré comme le culte du
diable par une bonne majorité
des chrétiens, le vaudou semble
être tout autre chose. Marie Yole-
ine Gateau développe une double
conception du vaudou. Selon elle,
cette pratique doit être entendue,
d’un côté, comme un mode de vie,
et de l’autre, comme une religion.
En effet, d’une part, il n’y a pas
de principes préétablis dans le
vaudou pour réguler le comporte-
ment des adeptes. Néanmoins, ces
derniers cultivent le respect de
l’autre, le sentiment de partage et
d’entraide… D’autre part, dans le
vaudou, il y a des divinités qu’on
sert et qui chaque jour réalise
des « miracles » dans la vie de ses
adeptes. La gérante du temple «
Asòtò » pense même que les vau-
douisants pourraient écrire leur
propre livre sacré.
« La Bible, le livre sacré des chré-
tiens, est le récit des exploits du
peuple juif avec son Dieu, ajoute-
t-elle. L’histoire des vaudouisants
est tout aussi vaste et est dotée de
grands « miracles » qu’on devrait
raconter aux enfants ». Conjointe-
ment à ces deux points de vue,
la Mambo pense qu’un temple
vaudou est « le seul endroit en
Haïti où l’on peut se sentir accepté
tel que l’on est ». Le vaudou ayant
pour principe la tolérance.
A Voyage dans le vaudou haïtien :
rencontre avec Marie Yoleine Gateau
Par Ritzamarum ZÉTRENNE et Romaric FILS-AIMÉ
Non loin de la station de Léogane, au cœur d’une habitation dénommée « Mon p’tit village », se situe le temple «
Asòtò ». Si, d’après la doxa, le décor des « péristyles » inspire la peur et génère du frisson, dans ce temple vaudou,
n’étaient-ce les signatures des esprits (vèvè), les portraits de certains « loas » et autres signes propres à ce culte,
l’on pourrait s’imaginer dans n’importe quel temple du christianisme. C’est donc sous le kiosque de ce vaste
terrain que Marie Yoleine Gateau – la « Mambo » du « lakou » – nous a reçus avec une convivialité exemplaire.
Mambo Marie Yoleine Gateau.
18 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
CULTURE
«
Mouvman vwazinaj » est une
initiative qui consiste, pour les
sept jeunes porteurs de cette
idée, à concevoir des projets
culturels dont la mise en œuvre
est laissée à des groupes organisés
existant au sein des communautés
appelées à recevoir le projet. Pour
reprendre les propos de Kensly-Carl
Olibrice, l’un des porteurs du projet,
« Mouvman Vwazinaj » est une
abstraction qui prend corps dans une
dynamique d’action instituée par des
structures culturelles locales. Nous
axons notre démarche de travail
sur l’approche participative. Pour
l’instant nous réalisons le projet
à Port-de-Paix parce que nous
sommes tous de cette ville mais,
dans pas longtemps, on étendra
notre action sur d’autres villes du
pays. ».
Dans le cadre de la réalisation de
« Mouvman Vwazinaj » à Port-de-
Paix, des structures culturelles de
la ville comme « Bonne humeur
club », « l’Union des héros »,
« samba Zele », ajoutés aux jeunes
concepteurs et porteurs du projet
ont constitué un comité de coor-
dination.
Malheureusement, pour reprendre
Carl Olibrice, aucune des insti-
tutions en charge de financer la
culture ou même le ministère de
la Culture ne les a aidés.
Ils se sont mis ensemble, ont
mobilisé en konbit le peu de res-
sources personnelles dont ils dis-
posaient pour rendre matérielle
cette idée.
Au menu : formation,
spectacle et projection de
films
à Port-de-Paix il n’existe que très
peu d’infrastructures culturel-
les, pour cette première vague
d’activités lancées par « Mouvman
Vwazinaj », les organisateurs ont
dû mobiliser locaux d’écoles et
de night-club pour recevoir les
jeunes qui sont venus à eux.
Le comédien et conteur Shelson
Ermoza a été invité à animer une
formation sur le conte, la lody-
ans, l’expression corporelle et le
déplacement scénique.
Dans la nuit du samedi 7 Juin,
à l’alliance Française de la ville,
le public a visionné l’adaptation
au cinéma du roman de Jacques
Roumain titré « Gouverneurs de
la rosée ».
Le Dimanche 8 Juin 2015, au
Classica Convention Center, avec
le talent fou qui est le sien, Shel-
son Ermoza a animé une bonne
soirée de contes.
Tous les horizons de la ville étaient
venus retremper leur imaginaire
dans le fleuve de l’enfance et des
premières candeurs.
Adresse aux grands
opérateurs culturels, aux
mécènes et à l’État
à côté des activités artistiques -
que Kensly-Carl Olibrice, Brunel
Docilet, Jamesley Liberice,
Mackendy Vixamar, Fleur Aimé
Obenson et Fransnel Dorsainvil
ont exécutées dans la logique de
réalisation de leur projet « Mouv-
man vwazinaj » -, ce groupe de
jeunes dynamiques est également
en train de planifier l’institution
d’une université populaire dans
la ville de Jean Rabel.
Ces jeunes auront définitivement
compris qu’il était de leur ressort
de s’organiser et de bâtir ensemble
des projets pouvant permettre à
leurs pairs de s’épanouir dans un
climat mettant en avant l’intellect
et la culture. Souhaitons que l’État
haïtien et quelques mécènes pas-
sent les voir et daignent supporter
cette louable initiative dans une
logique de continuité.
Le conteur Shelson Ermoza.
« Mouvman vwazinaj »
à Port-de-PaixPar Dangelo Néard
Du 5 au 8 Juin 2015, la ville de Port-de-Paix a vibré au rythme du théâtre, du conte et du cinéma. De la culture
à pleine main, en grande gorgée pour une ville qui ne demandait que ça. Plusieurs lieux de la principale cité du
Nord-Ouest ont été reconvertis en infrastructures culturelles devant recevoir les activités organisées dans le
cadre de « Mouvman vwazinaj ».
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 19
CULTURE
L
es responsables du centre
culturel ARAKA ont rendu un
vibrant hommage à l’auteur
des Gouverneurs de la rosée,
Jacques Roumain, dans l’après-midi
du mercredi 3 juin 2015. Pour com-
mémorer l’anniversaire de naissance
de ce grand intellectuel et écrivain,
une conférence débat était organ-
isée au local du centre situé dans les
parages du cimetière national par le
professeur, écrivain et journaliste
culturel, Marc Exavier. « Jacques
Roumain et Jean Giono deux regards
sur l’environnement et la politique
» fut le thème retenu au cours de
cette rencontre intellectuelle entre le
panéliste et le public composé pour la
plupart d’écoliers et d’universitaires.
Passionné de Roumain et de Giono,
Marc Exavier a retracé leur iti-
néraire et leur parcours. « Ce sont
deux personnalités différentes. Ils ont
grandi dans deux univers politiques
et économiques différents. Ã part un
certain intérêt pour la nature.
Roumain fut communiste. Giono,
un pacifiste, refusant de parti-
ciper à la seconde guerre mon-
diale. Cependant ils ont mis au
grand jour les ressorts les plus
implacables de la tyrannie et
nous livrent une leçon de vie, un
exemple de combat pour élever
la part d’humanité en nous. »
Ensuite, Marc Exavier a parlé du
rapprochement entre la Montagne
ensorcelée de Jaques Roumain et
Colline de Jean Giono. Comme
l’a déjà démontré feu l’historien
Roger Gaillard.
Dans la « Montagne ensorcelée »,
Roumain en huit courts chapitres
montre la série d’évènements dra-
matiques, mais aussi la chaine col-
lective de pensées irrationnelles
qui mènent au meurtre de la jeune
Grace et de sa mère Placinette.
Victimes expiatoires de la misère
et de la superstition, sacrifiées
par une communauté conduite
au bord de la folie, par son isole-
ment, son extrême pauvreté et son
obscurantisme. Ce récit sombre, à
peine éclairé par l’amour de Grace
et d’Aurel, est le constat sans fard
de l’immense dénuement matériel
et moral de ces paysans plongés
dans l’angoisse de la survie quo-
tidienne, puis dans l’horreur d’un
meurtre collectif. Exalté dans un
langage riche et puissant Giono a
raconté dans « Colline » les liens
profonds liant les paysans à la
nature.
Dédié à la mémoire de son père,
le roman « Colline » débute par
la venue d’un sanglier, que l’on
essaie de tuer mais qui parvient
à s’échapper. Plus tard, lorsque
la fontaine du hameau, située
dans un petit village en France
qui avait alimenté les habitants
depuis très longtemps, se tarit,
tout commence à aller mal. Ã
cette même période, l’ainé du
village, Janet, paralysé et alité,
commence à parler de manière
peu compréhensible. Il ne faudra
pas longtemps pour que les autres
habitants pensent que Janet est
à l’origine de tous ces malheurs.
Toujours selon le conférencier,
ces deux grands hommes sont
d’une grande générosité. L’œuvre
de Giono est beaucoup plus
abondante que Roumain. Si les
paysages varient d’une contrée à
l’autre, les paysans partagent la
même condition sociale. Ils sont
démunis et pauvres. L’œuvre de
ces deux auteurs mêle un human-
isme naturel à une révolte vio-
lente contre la société du 20e
siècle traversée par la misère et
l’obscurantisme. Elle dépeint
l’indigence de l’homme dans le
monde, face aux questions morales
et métaphysiques et possède une
portée universelle.
Jacques Roumain et Jean Giono
deux regards sur l'environnement
et la politiquePar Schultz Laurent Junior
Jacques Roumain. / Photo : babelio.com
20 | N0
12 LUNDI 8 JUIN 2015
INSERTION DEMANDÉE
LUNDI 8 JUIN 2015 N0
12 | 21
INSERTION DEMANDÉE
No.12
No.12
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  • 1. Après les verdicts rendus par le Bureau du Contentieux électoral départemental (BCED), pas moins de onze recours sont enregistrés au greffe du Bureau du Contentieux électoral national (BCEN). Tous les candidats écartés de la course électorale contestent la décision du BCED, parmi eux, l’ancien Premier ministre Laurent Lamothe qui focalise les projecteurs. Pas de moratoire, pas de déportation massive LUNDI 8 JUIN 2015 NUMÉRO 12 WWW.LENATIONAL.HT QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI RELATIONS HAÏTIANO-DOMINICAINES HAÏTI / ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE ACTUALITÉ Onze cas devant le BCENPar Noclès Débréus D ’un côté, Antoine Joseph, Anthony Benneth, Laurent Lamothe n’en démordent pas : (Ils sont) « victimes d’abus et complot ». Ils veulent leur réinté- gration dans la course. Ils entendent aller jusqu’au bout. De l’autre, l’ancien député Jonas Coffy, entre autres con- testataires de Jacky Lumarque, a aussi fait appel de la décision du BCED de recommander au Conseil électoral provisoire (Cep) de maintenir en lice la candidature du recteur de l’Université Quisqueya, porte- étendard de la plate- forme VERITE. Petite célébration, grosses inquiétudes par Lionel Edouard Les chanceliers haitiens et dominicains, Lener Renauld et Andrés Navarro. / Photo : J. J. Augustin » P. 9 » P. 23 »   P. 6 ÉCONOMIE SPORT » lire page 5 » suite page 4 Question de liquidité, liquidité en question... Par Evens Regis Marc Collat a dévoilé sa pré-liste pour la Gold Cup par Gérald Bordes Le temps des jeunes femmes Nouvelle chronique du quotidien Le National à partir de mardi
  • 2. 2 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 Geôlier des motsPar Jacques Ted Saint-Dic TRIBUNE O n oublie souvent que tout ce qu’on dit est un mot. La parole emprisonne le mot pour libérer la pensée et l’acte qu’elle suggère. Homme est un mot. Et dans toutes les langues, il y a un mot pour dire l’homme. Ce mot a le même sens mais n’exprime pas la même pensée. La pensée de l’homme ou penser l’homme revient à le conceptualiser. Aussi le mettre dans un ordre, un ensemble et lui attacher d’autres mots régissant son existence. Désigner son humanité et lui construire, lui donner une éternité en bordure, à la limite, de la pensée ; sans s’inquiéter de sa finitude, sa temporalité. Les mots ont été construits, bâtis, négociés, acceptés, agréés, utilisés, pour que la parole prenne sens, Pour que la réflexion, la pensée, circulent, se développent. Une construction permanente, la tour de Babel est passée par cette issue. Depuis les limites se sont installées. Tant géographiques qu’humaines. Les races sont définies et localisées. Ã la lumière s’opposent les ténèbres. Le pluriel du plus faible à l’unicité du plus grand. Le pluriel n’est pas la force, mais l’union fait la force. Depuis les mots sont libres. Libérés de leur créateur par l’usage qu’on en fait. La liberté du mot est intrinsèque, elle est intimement liée à l’homme en mutation. Il vieillit et meurt autant que lui en toute liberté. La mort est la seule libre qui décide quand tuer. Elle est libre de son imprévisible et unique acte. Sa vie est la mort. Le seul mot a sens unique. La résurrection ! Une impasse. Le mot est un outil de guerre. Le mot est subversif. Une arme contre la « momentanéité » en transition de permanence, d’intemporalité. Sa survie, objet de son éternité est indissociable de celle de l’homme. Sa lute, elle la mène en multitude regroupée, codifiée, conjuguée. Un bloc. Une langue. Une civilisation. Tous les mots sont des noms propres d’objet ou d’être. Le mot est en guerre contre son homologue d’une autre langue et défend son territoire contre l’invasion des dénominations différentes. Il assimile sans exclusion quand il n’est pas en péril. Le mot ne périt jamais. Il se dépasse, se donne une autre vie. Se mue sous l’action destructrice de la pensée. Le mot n’est ni masculin ni féminin, un double sexe. Hermaphrodite. Le « yon » du créole immortalise l’asexualité du mot. Aucun mot ne préexiste à l’objet à définir à nommer. Il est concomitant à l’existence de la matière et de l’être. Il survit à l’objet. Son « hétérohomosexualité », ce mot vient à l’instant , de cette écriture, d’être inventé, d’être « créé ». Son informalité n’est en quête d’aucune formalisation et n’est inférieure à aucune normalité. Il se crée sans règle, sans loi, mais en contexité d’utilité, d’expressivité. Le sexe ne peut se prévaloir d’aucune puissance si elle n’est pas pensée et imposée. Il est neutre, sans pouvoir, comme le mot. Comme les fleurs, les mots ont leur saison. Ils bourgeonnent dans les marchés publics. Les veillées. Les combites. Les Gaguères. Les Raras. Le Carnaval. Les lieux saints. Les jeûnes. Les actes sexuels. Les congrès de gens lettrés. Dans la douleur des regards croisés. Dans le silence. Les signes qui deviennent mot dans leur incapacité à traduire leur réalité et celle des porteurs de gestes. La pensée ne peut être que mot, elle est d’essence verbale. Le logiciel qui la transfèrerait en écrit n’existe pas encore. Nous pensons parce que nous parlons. C’est-a-dire nous utilisons des mots. Pourquoi pas nous « motons » ? Cette conjugaison vient d’exister car elle est pensée. Tristes sont ceux qui établissent la primauté de l’écrit à la parole, bien qu’ils soient tous deux dépendants du mot. De quelle sagesse peut-on se prévaloir quand on part à la chasse des mots, quand on veut l’embrigader. Lui donner un sens. Comme si l’usage ne le lui en avait déjà assigné à l’originel. Alors on se veut proconsul et lui donner un visa de transit. Bien que son passeport ne soit pas biométrique mais communautaire, de civilisation, de contextualité, de « contemporalité ». Outil d’un moment en transe d’éternité. Comment se prévaloir d’un droit divin, mais heureusement non universel et sans éternité mais simplement immortel. Comment aller dire à l’humanité la manière d’écrire : Amour ? Je l’écris, sans conviction d’avoir l’orthographe correcte. Comment haïr et tuer auraient chacun un mot bien écrit qui soit masculin, féminin, ou neutre pour justifier qu’on peut se le permettre ? Comment esclavage et civilité, civilisation peuvent être contemporains et permettre à l’âme de se libérer pour l’éternité et revenir immaculé au nom de la grâce et du pardon d’un non, éternel. L’éternité est essentiellement humaine parce que historique et datée. Indissociable de la permanence existentielle. C’est à ce jeu de « paume », et du code noir qu’ils t’ont convié pour devenir un nouveau membre de l’ordre des « Kidnappeurs de mots ». Des mots sont libérés sous rançons de règles et d’expropriation. L’indépendance des mots payée au prix de leur liberté. La rançon de la dette et de la reconnaissance. L’oubli de la soumission en signe de représentation et de vengeur de race. La guerre oubliée, et la mémoire qui nous jette au visage l’immoralité de leur moralité en signe de pardon. Que l’épée soit de bronze, d’or ou d’ébène, aucun motif Legba ou de Napoléon ne peut justifier quelle soit le glaive d’une justice des mots. Toi, qui fais de la « fatigue » un mot nouveau à connotation existentielle différente : un luxe, que seul le Nègre peut se payer. Une éternelle fatigue comme celle d’après la création. Le Nègre se repose après trois siècles. Ton éternité ne peut être que celle du refus de la codification régulatrice, dominatrice des mots. Le temps du Marron est vécu ! Et, dans notre actualité, notre modernité nous vivons le temps des libertés, et celui du créateur de se forger une société nationale a l’aune de notre identité en permanente mutation, d’adaptation à notre singularité dans le monde large qui est devenu ton dortoir où tu enfiles ton pyjama à bannières multiples. La croix et la bannière. Nous ne serons pas un nouveau geôlier des mots. ENMARGEDEL’ENTRÉEDEDANYLAFERRIÈREÀL’ACADÉMIEFRANÇAISE
  • 3. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 3 Les élections, une étape fondamentale vers la stabilité Sources : Alterpresse ACTUALITÉ U ne étape fondamentale sur le chemin de la stabilité passe par les élections, souligne la Trinidadienne Sandra Honoré, la Représentante spéciale du secrétaire général (RSSG) des Nations Unies en Haïti, dans une note de la Mission des nations unies de stabilisa- tion en Haïti (Minustah) transmise à AlterPresse. « En Haïti, la stabilité a connu trop d’éclipses. Elle doit aujourd’hui solidifier ses fondations, posées par les trois élections successives, tenues depuis 2006, qui ont vu, pour la première fois, un président élu succéder à un président élu et des parlementaires aller au terme de leur mandat », affirme Honoré. La RSSG encourage les protago- nistes du processus électoral, - dont l’organisme électoral, les candidates et candidats, les partis politiques, la société civile, les autorités, l’ensemble des électrices et électeurs - à faire des élections à venir (9 août, 26 octobre et 27 décembre 2015) une avancée défin- itive vers la stabilité et le dével- oppement. « Le pays a besoin de ses parlementaires, pour qu’ils votent les lois, afin de répondre aux aspi- rations de la société toute entière. Le pays a besoin de représent- ants municipaux et locaux pour délivrer les services à la population », affirme la Minustah. La RSSG déplore l’irrespect, depuis 2011, du renouvellement des représentants de la population, suivant les pre- scrits de la Constitution haïtienne. L’absence d’élections, d’un parlement et de représentants locaux, n’est pas acceptable, dénonce Sandra Honoré, tout en appelant au renouvellement de ces représentants, qui constitue un impératif démocratique. Le parlement est dysfonctionnel depuis le lundi 12 janvier 2015. Le premier tour des législatives est annoncé pour le dimanche 9 août 2015. Le premier tour de l’élection présidentielle et les élections municipales et locales sont programmés pour le dimanche 25 octobre 2015, en même temps que le second tour des législatives, selon le calendrier émis par le Conseil électoral provisoire (Cep). Sandra Honoré encourage les femmes à s’engager comme candidates dans les élections locales et municipales, dont la date du dépôt des dossiers de candidature dans les différents Bureaux électoraux communaux (Bec) devrait prendre fin le dimanche 7 juin 2015. Seulement six femmes ont été inscrites comme candidates à la présidentielle de 2015. Entre- temps, le Bureau du contentieux électoral départemental (BCED) a écarté trois inscrits pour la pré- sidentielle, dont Laurent Lamothe pour absence de décharge. Édito Des armes aux... pwen ! Sic’étaitsortidelabouched’unleaderpolitique,onpourraitdirequecelacommencedéjà:lesdénonciations et autres attaques d’un camp contre l’autre dans l’aventure électorale. On affirmerait que cette histoire de carnet sur des questions de décharge commence à faire des dégâts au niveau de l’opinion publique. Il en est de même pour ce qui sera, éventuellement, considéré, au début du mois d’aout, comme l’électorat. C’est plutôt un leader paysan qui déclare, sans broncher, que toute cette bataille qui s’annonce ne sera pas une affaire de vote, mais plutôt une dangereuse histoire d’armes et de pwen. DPour la question des armes, on sait déjà que la sécurité du pays, assurée par une Police nationale non encore bien déployée sur tout le territoire national et dépourvue de moyens logistiques efficaces, est une chose trop stratégique pour être laissée entre les mains des contingents de la Minustha. Le banditisme, qui relance la terreur au sein de la population, frappant par hasard ou de façon ciblée des citoyens aussi bien dans l’aire métropolitaine que dans les provinces, est le signe le plus évident que des calibres les plus chers comme, par exemple, un Gluck qui coûte aux environs de 2 000 us, sont distribués comme de petits pains sur tout le territoire. Les élections qui viennent développer des pulsions d’orgueil et de puissance chez les uns et les autres mettent déjà tous les citoyens sur leur garde. Car, c’est revenu l’époque des règlements de compte ! Personne n’est épargné. Mais, la troublante affaire des… « pwen », une autre dimension de l’insécurité, jusqu’à présent non sanctionnée par les lois du pays, crée un traumatisme plus généralisé. La littérature haïtienne depuis les histoires de Justin Lhérisson nous fait croire que la relation entre la poli- tiqueetlemysticismedatedepuislesdébutsdu19esiècle.Lescandidatsauxpostesprésidentielsrecherchent toujourslaprotectiond’un«lwa».Lefilmd’ArnoldAntonin«Lesamoursd’unzombi»présentedesimages contemporainesdeditsleadersquiveulentconquérirlepalaisnationalenselaissantarroserdepissat,dans un oumfò isolé, par papa Legba. Quelques romanciers haïtiens ont montré les dimensions insoupçonnées de la magie dans l’univers politique haïtien. L’Anthropologiehaïtienneaaussiexplorélephénomène.DeLaenecHurbonàDéitaenpassantpard’autres étudesacadémiquespointues,le«domainedumerveilleuxmagique»estprésentécommeunépiphénomène qui a une existence clandestine, mais efficace. Cette efficacité est connue par nos politiciens. En dépit du vernisrationneldontilsseparent,lescandidatsconsultentdessorciers.Cesderniersleurdonnentdesrecettes pour foudroyer ou affaiblir leurs adversaires. Le leader paysan sait de quoi il parle quand il mentionne les armes et les pwen, en particulier l’un nommé : se mwen pou wè. En voilà deux défis pour le CEP et les partenaires internationaux qui financent - honte à nous ! - nos élections ! Quand on pense contrôler de façon cartésienne ou scientifique le vote des électeurs, il faudrait aussi avoir un instrument de mesure pour statuer sur la peur des armes et sur la manipulation insidieusedesekspedisyon.Cesdernièrespeuvent-ellesaussibrouillerlesdécisionsetconfondrelesdonnées informatisées du Centre de tabulation ? Le peuple dit plutôt « tribulation » ! Quand la distribution des armes vient se mêler aux ekspedisyon, pwen et autres koutlè , on prévoit déjà le cocktail explosif. Ou ce que va coûter aux pays, en termes de gaspillage économique et de manipulation d’énergie négative, cette « démocratie » et ces « élections », sous contrôle international, qui en sont un passage obligé. Résumé : Dans notre culture politique on ne croit pas vraiment au principe des élections. Ã la violence, à la manipulation ? Oui. On est prêt à tous les coups bas pour réaliser un rêve qui souvent n’a fleuri que dans le cerveaumaladed’unindividu.Cen’estpassansraisonqu’onseracertainementàplusdecinquantecandidats à la présidence, chacun prêt à renverser la table s’il en a les moyens dans le cas où il verrait ses ambitions partir en fumée. Une folie, un chaos qui fait plaisir à toutes les mafias nationales et internationales et aux étrangersheureuxdenousfaireravalersommetoutenotrefaussefiertéd’avoirbattul’arméeNapoléonienne, car finalement nous n’avons pas réussi grand-chose de ce pays. Un pays au bord du chaos ! Des élections crédibles plus qu’hypothétiques ! Mais au National nous sommes encorecertainqu’ilyaencoredutempspourunréveilnationalderaisonetdeluciditésansarmesetsans… pwen. Ce temps pourtant, il est compté.
  • 4. Vingt-trois (23) candidats à la présidence avaient été l’objet de contestations, 14 d’entre eux avaient la décharge comme motif d’objection à leur candidature. Marise Narcisse, Moïse Jean Charles, Dieuseul Simon Desras, Jacky Lumarque, Marie Antoinette Gauthier, Jude Célestin, Mario Andresol, Antoine Joseph, Daniel Saint-Lot, Marie Josepha Gauth- ier, Edner Gonzague Day, Duly Pierre Brutus, Laurent Lamothe et Thierry Mayard Paul font partie des contestés pour décharge. Alors que tous ces cas étaient mis en cause pour défaut de décharge, le BCED, dans son ver- dict, a demandé au CEP de rayer seulement les noms de Laurent Lamothe et Antoine Joseph de la liste des candidats ayant fait le dépôt de leurs candidatures sans cette pièce maitresse, et celui d’Anthony Benneth pour cause de nationalité étrangère. Laurent Lamothe dénonce un complot L’ancien Premier ministre, accom- pagné de ses avocats Michel Bru- nache, Jacques Lochard, Ephésien Joissaint et Wilson Estimé, a ainsi dénoncé un complot concocté de toutes pièces pour lui barrer la route à la magistrature suprême de l’État. Se sentant lésé, il a exercé un recours au Bureau du Contentieux électoral national (BCEN), le vendredi 5 juin, en vue de faire valoir son droit par devant les juges de cette dernière juridiction, dénonçant au passage la décision, qu’il qualifie de « deux poids deux mesures ». Intervenant à ce sujet, maître Jacques Lochard a fait état d’un ensemble de contradictions fla- grantes relevées dans le jugement du même tribunal électoral du BED-Ouest 1, statuant sur les mêmes motifs de contestations et mêmes contestataires, mais en des compositions différentes. En effet, la troisième chambre composée de Wally Désence, pré- sident du BED-Ouest 1, et des maîtres Canova Jean Baptiste et Merlan Belabre, a déclaré fondées les contestations portées contre Laurent Lamothe pour défaut de décharge, en dépit du fait que ce dernier détienne une ordonnance du tribunal des référés qui, « con- statant le dysfonctionnement du Parlement et se fondant sur la théorie des formalités impossibles », enjoint au Conseil électoral pro- visoire d’accepter sa candidature. Ce même tribunal siégeant dans une autre composition a statué en faveur de la candidate, Marie Josepha Gauthier - elle aussi, con- testée pour les mêmes motifs et par les mêmes contestataires que M. Lamothe - tout en évoquant la théorie des formalités impos- sibles, ainsi que les deux ordon- nances rendues par le tribunal des référés favorables aux candidats à la présidence Thierry Mayard Paul et Laurent Salvador Lamothe. Ã en croire les avocats de Laurent Lamothe, si les juges avaient tenu compte de la forme, les contesta- tions auraient dû être déclarées irrecevables. Pour cause, ils n’ont pas respecté l’article 105 du décret électoral relatif à la contes- tation du candidat. Arnel Bélizaire aurait fait une usurpation de titre en utilisant le papier à en-tête de la chambre des députés alors qu’il n’est plus député. Jean Nazaire Thidée, contre qui une décision de justice est pendante, aurait menti, selon les défenseurs de M. Lamothe, en utilisant des témoins qui n’existent pas. Aussi enten- dent-ils entamer des poursuites contre tous ces contestataires, a informé Me Wilson Estimé. Tenant compte de ces contradic- tions, l’ancien chef de la Prima- ture, qui a salué la décision du BCED de maintenir des anciens ministres dépourvus de certifi- cats de décharge, assimile cette démarche à une manœuvre politicienne visant à l’écarter de la course pour le fauteuil présiden- tiel et ses avocats entendent faire valoir son droit au BCEN. « Au nom de la Justice et de l’équité, nous demandons au BCEN d’annuler la décision du BCED et d’exiger du CEP de garder la candidature de Laurent Lamothe », a fait savoir Michel Brunache arguant que « se pèp ki bay pouvwa se pèp ki dwe bay kanè ». De son côté, Me Ephésien Jois- saint a dénoncé une campagne d’intoxication juridique menée par certains membres du CEP à travers des prises de position publique. Il a ciblé notamment Me Néhémie Joseph qui avait informé que « le CEP, étant une juridiction de jugement, il n’ est lié par aucun jugement de tribunal de droit commun », alors qu’on sait que deux candidats à la présidence, Thierry Mayard Paul et Laurent Lamothe, sont en possession de deux ordonnances du tribunal des référés qui font même jurispru- dence car, le BCED, s’est basé sur ces ordonnances pour maintenir en lice la candidature de Josepha Gauthier. Ainsi, Me Joissaint a expliqué que le CEP est bel et bien opposable à l’ordonnance des référés, parce que cette dernière n’a fait l’ objet d’aucun recours, elle détient donc l’autorité de la chose jugée et en ce sens le CEP est contraint d’en tenir compte, a-t-il dit, précisant que n’importe quel conseiller qui s’est prononcé publiquement sur ce dossier, doit se déporter s’il devait siéger au BCEN. 4 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 ACTUALITÉ Onze cas devant le BCENpar Noclès Débréus HAÏTI/ÉLECTIONPRÉSIDENTIELLE L’ancien président du Sénat Dieuseul Simon Desras. / Photo: J. J. Augustin L’ancien Premier ministre Laurent Salvador Lamothe. / Photo: J. J. Augustin » suite de la première page WWW.LENATIONAL.HT 2, DELMAS 40 B EMAIL: INFO@LENATIONAL.HT PUBLICITE@LENATIONAL.HT REDACTION@LENATIONAL.HT (509) 46 11 10 10 (509) 32 14 55 54 PROPRIÉTAIRE : LE NATIONAL. 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  • 5. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 5 ACTUALITÉ C ’est pourquoi, un protocole de rapatriement entre les deux pays voisins est appelé à définir les conditions dans lesquelles s’effectueront la déporta- tion de ces haïtiens. Toutefois, ce pro- tocole d’accord entre les deux États, n’a pas été paraphé au cours de la visite de M. Navarro en Haïti comme l’avait annoncé son homologue haï- tien, le mardi 2 juin dernier. Une commission bilatérale, qui devrait être effective ce mercredi 10 juin 2015, sera chargée de travailler d’un commun accord sur l’élaboration du protocole de rapatriement, lequel ser- vira de référence pour un dialogue permanent entre les deux pays, selon M. Navarro. Entre-temps, le processus d’enre- gistrement des haïtiens au Plan national de régularisation des étrangers (PNRE) s’achève le 17 juin. Pas de moratoire. La République Dominicaine se donne un délai de 45 jours pour analyser les dossiers des étrangers inscrits au PNRE dont 96 % sont des haïtiens, informe le diplomate dominicain. Ce dernier dit espérer qu’avant la date butoir, le nombre d’inscrits à ce plan, estimé à plus de 230 mille passera à 250 mille. Cependant, les informations dont dispose le Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés (Garr), font état de 2 000 haïtiens seulement éligibles à ce plan. Ces personnes bénéficieront de documents légaux leur habilitant à vaquer librement à leurs activités en République Dominicaine. Par contre, dans l’attente de compléter leurs dossiers, des documents provisoires de séjour seront accordés aux personnes qui n’auront pas rempli les conditions requises, conformément au décret en vigueur sur la migration à l’Est de l’île. D’énormes défis à relever La déportation ne sera, certes, pas massive, néanmoins, des défis majeurs attendent le gouvernement haïtien. Conscient ou non des enjeux, ce dernier prévoit d’y faire face, selon le ministre Renauld, à travers l’aménagement de deux centres d’accueil provisoires en construction, l’un à Ouanaminthe et l’autre à Malpasse. Un train de mesures, à en croire le chef de la diplomatie haïtienne, seront envisagées afin de rééduquer et faciliter l’intégration de ces compatriotes dans la société haïtienne pour laquelle ils n’ont, en majorité, aucune attache. La création d’emplois figure parmi les mesures d’accompagnement de l’État, affirme M. Renault. Or il reconnait que la quête de l’emploi et du mieux-être obligent de nombreux haïtiens à migrer vers d’autres pays, notamment la République dominicaine. Et la situation actuelle ne bouge pas d’un cran: plus de 76% de la population haïtienne croupissent sous le poids harassant du chômage. Interpellé par la question, l’éco- nomiste Fritz Jean estime que la déportation de ces haïtiens représente un danger social et politique pour le pays, en particulier pour la région du Nord- est, déjà pauvre en ressources. Fortement préoccupé par le sujet, l’ex-gouverneur de la Banque centrale, questionne la capacité de l’État, dont la lenteur dans ses prises de décisions n’est plus à démontrer, à doter ces gens des services sociaux de base. Il dit craindre des retombées néfastes pour la société haïtienne en général, surtout à l’approche de la période électorale qui coïncide avec la déportation de ces ressortissants haïtiens. Car, explique-t-il, parmi les personnes qui seront refoulées sur le sol haïtien, plusieurs seraient de réputation douteuse, ce qui risque encore de perturber le climat sécuritaire déjà fragile du pays. Depuis la décision de la Cour constitutionnelle dominicaine qui a rendu apatrides des dominicains d’ascendance haïtienne, la menace de déportation de 300 mille personnes sur le sol haïtien hante les esprits. Suite à un accord bilatéral, Haïti et la République dominicaine ont convenu de régler la question via un Plan national de Régularisation des Étrangers qui permettra notamment à certains haïtiens de régulariser leur situation alors que ceux qui ne répondent pas aux critères exigés seront déportés en Haïti. Pas de moratoire, pas de déportation massive par Jean Michel Cadet RELATIONSHAÏTIANO-DOMINICAINES 1er Forfait : 1000 USD SMS bundle : 100K Appels Robot : 5000 Notification en fin d’appel Flash Ad: 2 semaines 2ème Forfait: 500 US SMS bundle: 50K Appels Robot: 2500 Notificationenfind’appel, Flash Ad: 1 semaine AVEC NOTRE GAMME DE PRODUITS DE “MOBILE ADVERTISING” TRANSMETTEZ VOTRE MESSAGE À QUI IL FAUT, QUAND IL LE FAUT, LÀ OÙ IL LE FAUT Contactez-nous dès aujourd'hui au +509 28 11 95 55 ou digicelmorehaiti@digicelgroup.com DIGICELHAITI.COM MORE *Offre valable jusqu’au 30 juin 2015 Le suspense prend fin… La visite tant attendue du chancelier dominicain, Andres Navarro, le samedi 6 juin, n’aura servi qu’à calmer les esprits. « Il n’y aura pas de déportation massive », a rassuré le diplomate lors d’une conférence de presse donnée conjointement avec son homologue haïtien, Lener Renauld. Mais le problème fondamental demeure : de nombreux compatriotes haïtiens, en situation irrégulière, en République Dominicaine, seront inévitablement déportés en Haïti à la veille des élections, soit au début du mois d’août prochain. » suite de la première page
  • 6. 6 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 ACTUALITÉ ÉCHO CNASE veut sécuriser les élections Le Conseil national d’Agents de Sécurité électorale (CNASE) a lancé un appel à l’endroit du Conseil électoral provisoire sol- licitant l’intégration de leurs membres, à l’échelle nationale, lors des élections. C’est ce qu’a demandé Léo Renaudin, prési- dent du CNASE. Le CEP, des forums pour contrôler les zones rouges Le Conseil électoral provisoire, à travers ses bureaux électoraux départementaux (BED), organ- ise un ensemble de forum visant à sensibiliser la population dans des communes et localités qualifiées de zone rouge. Le CEP cherche à établir les conditions nécessaires pour la réalisation d’une élection libre, démocratique et sans violence, a fait savoir Me. Eugène Luther, secrétaire et trésorier du BED- Ouest 1. Terrible accident sur la route nationale #3, 1 mort et 3 blessés Un camion assurant le trans- port en commun dans le cir- cuit Hinche - Port-au-Prince, a heurté, jeudi dans la soirée, deux motocyclettes au niveau de la localité Lezier située à 4 km de la ville de Mirebalais. Jean Wilbeau Michel a été tué sur place. Trois personnes blessées ont été conduites d’urgence à l’hôpital. Le chauffeur du camion s’est enfui. Le Commissariat de la commune de Vallières incendié Des bandits non identifiés ont incendié récemment le Com- missariat de la commune de Vallières. Ce forfait visait à faciliter l’élargissement de plu- sieurs bandits incarcérés dans ce commissariat, a expliqué Charles Nazaire Noël, directeur départemental de la PNH. Une commission d’enquête est mise sur pied afin de déterminer les responsables. Fort-Liberté : un adolescent tué de quatre balles Un adolescent a été assassiné à Fort-Liberté par des bandits armés. L’enfant âgé de 14 ans se préparait lundi à participer aux funérailles de sa mère, quand il a été tué de plusieurs balles tirées par un individu non iden- tifié. Le drame s’est produit à la rue du Quai prolongé, zone Sicard. Le juge de paix Colas François a fait le constat légal. La police mène les investiga- tions afin de démasquer et mettre à la disposition de la jus- tice l’auteur de ce crime odieux. Jérémie : manifestation cette semaine à Caracoli Une nouvelle manifestation est annoncée pour cette semaine afin d’exiger la reprise des travaux de reconstruction du tronçon de route de Caracoli, à Jérémie. La population sollicite l’intervention du Premier min- istre Évens Paul pour enquêter sur la dilapidation des fonds alloués à ces travaux. À l’occasion de la journée mon- diale de l’environnement, célébrée le 5 juin dernier, le ministre Dominique Pierre, fraîchement intronisé, a été plutôt dans la simplicité. Il a simplement tenu à sensibiliser la population autour des menaces environnemen- tales qui se multiplient, tout en appelant à agir en vue de réhabiliter l’écosystème du pays. « L’environnement est en train de se dégrader de manière irréversible », fait remarquer Dominique Pierre qui appelle tous les secteurs de la vie nationale et tous les citoyens à protéger nos ressources naturelles qui s’amenuisent de plus en plus. Également à agir ensemble pour réhabiliter l’environnement. Cependant, le ministre n’a pas informé de la stratégie de l’État en vue de contribuer à la réduction des risques liés à l’environnement. Soulignant les dégâts systématiques liés au passage des cyclones et autres intempéries sur Haïti, M. Dominique Pierre a attiré l’attention sur le fait que « le monde fait face aujourd’hui à un déséquilibre climatique provoqué par le réchauffement de la planète. Cette situation est à la base de la modification du rythme des saisons et de l’augmentation du nombre de cyclones tropicaux, préjudiciables aux petits pays de la Caraïbe », a-t-il informé. Conséquemment, les pêcheurs ont de graves difficultés à pratiquer leur profession, alors que l’agriculture consent d’énormes pertes, non seulement dans les infrastructures agricoles, mais également dans la perte considérable des cultures, a-t-il rapporté. Les dégâts causés par les cyclones en 2004 ont avoisiné les 270 millions de dollars pour le secteur agricole, rappelle le ministre, qui ajoute qu’en 2013, ils ont avoisiné les 10 millions de dollars, rien que pour les pluies du mois de novembre. « Nous sommes donc dans l’obligation de protéger l’environ- nement afin de garantir l’avenir des générations futures », insiste Dominique Pierre qui renouvelle l’engagement du chef de l’État Michel Martelly et du Premier ministre, Évans Paul d’appuyer les actions visant le renforcement de l’équilibre environnemental du pays. Un prix pour william Cinéa et c’est tout! William Cinéa qui a reçu un prix pour le « Jardin botanique des Cayes », a expliqué qu’après ses études en Angleterre, il voulait mettre sur pied le plus grand jardin botanique de la Caraïbe. L’idée initiale était d’établir ce projet sur 200 carreaux de terre. Ã cet effet, plus de 13 experts et directeurs de telles entités venus de l’étranger, ont apporté leur contribution afin de faire atterrir ce projet, a-t-il relaté. Cette cérémonie de remise de prix a constitué le fait marquant de cette célébration. S’il est vrai que le projet stagne encore, l’agronome Cinéa, spécialiste en gestion de jardin botanique, croit que si tous les acteurs s’impliquent, ce jardin pourra être inauguré le 5 juin 2020 et devra permettre de rehausser un peu plus l’image d’Haïti à travers le monde. Aussi, Le jardin botanique des Cayes serait un modèle de projet haïtien, selon William Cinéa qui invite les jeunes à venir apprendre un peu plus sur l’environnement, à travers les cours de botanique dispensés à l’intérieur même du jardin. La célébration de cette impor- tante journée qui s’est faite, pour le moins calmement, con- tribue à augmenter un peu plus les inquiétudes des citoyens pour lesquels l’environnement con- stitue aujourd’hui, la plus grande menace. Petite célébration, grosses inquiétudespar Lionel Edouard HAÏTI-JOURNÉEMONDIALEDEL’ENVIRONNEMENT Le ministre de l’Environnement, Dominique Pierre. / Photo : ministère de la Communication
  • 7. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 7 MONDE U n responsable de l’ONU a appelé vendredi toutes les parties en conflit en Ukraine, théâtre d’un regain de vio- lences, à respecter « totalement » le cessez-le-feu prévu dans les fragiles accords de paix de février, que les deux camps s’accusent réciproque- ment de violer. L’Union européenne devrait prolon- ger de son côté les lourdes sanc- tions économiques prises contre la Russie jusqu’en janvier, a appris l’AFP vendredi de sources concor- dantes. Ces sanctions frappent des pans entiers de l’économie russe (banques, défense, pétrole), qui ne peuvent se financer sur les marchés européens. Elles doivent expirer fin juillet. « Le cessez-le-feu doit être totale- ment respecté et la protection des civils doit être une priorité », a affirmé le secrétaire général adjoint de l’ONU aux Affaires poli- tiques Jeffrey Feltman, lors d’une réunion convoquée en urgence du Conseil de sécurité en raison de l’inquiétude suscitée par ce regain de tensions. « Nous sommes en train d’assister soit à l’aggravation d’un conflit dif- ficile à régler, soit à un regain tem- poraire de tensions dans certaines zones », a-t-il ajouté. Or « nous ne pouvons nous permettre aucun de ces scénarios ». Sur le terrain, les combats se pour- suivent, mais comparé à mercredi --jour d’une offensive meurtrière des séparatistes prorusses, selon Kiev, contre la localité de Mariinka, à l’est de Donetsk--, leur intensité a considérablement baissé. L’armée ukrainienne a cepen- dant accusé vendredi les rebelles séparatistes de viser ses positions autour de Donetsk (est), tandis que les séparatistes pro-russes repro- chaient aux forces ukrainiennes d’utiliser des systèmes de lance- roquettes multiples. « Les développements autour de Mariinka sont inquiétants », a estimé vendredi devant le Conseil Alexander Hug, chef-adjoint de la mission d’observation de l’OSCE en Ukraine, qui a évoqué les « inquié- tudes » concernant des livraisons de ce type d’armements. L’Ukraine elle-même avait demandé au Conseil de sécurité d’aborder l’offensive de Mariinka, qui a fait 28 morts, selon le représentant de Kiev auprès des Nations unies, Iouri Sergueïev. L’UE, les Etats-Unis, ainsi que Paris et Berlin, parrains des très fragiles accords de paix de Minsk 2, signés le 12 février, ont unanimement exprimé leur préoc- cupation concernant cette reprise des affrontements dans la partie orientale de l’Ukraine, Moscou aver- tissant de son côté que le proces- sus de paix risquait de « voler en éclats ». L’ambassadeur russe à l’ONU, Vitali Tchourkine, a accusé les forces ukrainiennes de viser des civils et de ne pas respecter leurs engage- ments. “Nous sommes à un moment décisif”, a-t-il estimé. “Si nous laissons Kiev continuer à ne pas prendre les mesures poli- tiques nécessaires dans le Donbass, la situation pourrait échapper à tout contrôle, avec des conséquences imprévisibles”, a-t-il prévenu. Mais pour l’ambassadrice des Etats- Unis à l’ONU Samantha Power, « les récentes violences proviennent d’un assaut combiné séparatiste et russe ». Mme Power doit se rendre à Kiev la semaine prochaine pour rencontrer des responsables ukrainiens ainsi que les habitants « les plus affectés par ce conflit alimenté par Moscou », selon son compte Twitter. Le président ukrainien Petro Poro- chenko a annoncé qu’une conver- sation téléphonique était prévue vendredi avec son homologue américain Barack Obama afin de « coordonner leurs positions en vue du sommet du G7 », dimanche et lundi en Allemagne, où il va aussi s’entretenir avec la chancelière alle- mande Angela Merkel. Une source diplomatique française a évoqué l’ « intérêt » des séparat- istes prorusses à « dramatiser » la situation en Ukraine à l’approche du sommet du G7. Le dirigeant ukrainien n’a cessé de mettre en garde contre la menace d’une « guerre totale » avec la Russie, accusée de soutenir et d’armer la rébellion dans l’Est séparatiste, après avoir annexé en mars 2014 la péninsule de Crimée. « La menace d’une invasion russe n’a jamais été aussi grande », a-t-il encore affirmé vendredi, assurant que plus de 9.000 soldats russes se trouvaient actuellement sur le territoire ukrainien. Le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a de son côté accusé la Russie de « continuer à soutenir les séparatistes (...) avec des équipe- ments lourds, de l’artillerie ». Les récents combats ont été les plus intenses depuis la reprise par les rebelles du noeud ferroviaire stra- tégique de Debaltseve, à mi-chemin des bastions rebelles de Donetsk et de Lougansk, peu après l’entrée en vigueur, le 15 février, du cessez-le- feu conclu à Minsk. A Telmanové, à 60 kilomètres de Donetsk, un bébé a été tué et trois adultes ont été blessés jeudi, a indi- qué vendredi Edouard Bassourine, un responsable du “ministère” de la Défense de la « République popu- laire de Donetsk ». Un combattant de la DNR a également été tué et quatre autres ont été blessés au cours des dernières 24 heures. De leur côté, les forces ukraini- ennes pro-occidentales ont qualifié la situation d’ « instable ». Quatre soldats ont été blessés ces dernières 24 heures, selon le porte-parole militaire ukrainien Andriï Lys- senko. Le conflit dans l’est a déjà fait plus de 6.400 morts depuis son déclenchement en avril 2014. L'ONU appelle au respect de la trêve Le président ukrainien Petro Porochenko. / Photo : ladepeche.fr
  • 8. 8 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 MONDE Le gouvernement américain a annoncé avoir détecté le piratage informatique des données personnelles de quatre millions d’employés fédéraux qui, selon le Washington Post, aurait été perpétré par des Chinois, dernière offensive numérique en date contre des intérêts américains. Cette « cyber-intrusion » a été détectée en avril dernier par l’Office ofPersonnelManagement(OPM),qui gère les effectifs du gouvernement et attribue des centaines de milliers d’accréditations aux fonctionnaires fédéraux chaque année. Elle aurait été fomentée en décembre par des pirates informatiques chinois, selon le Washington Post, qui l’a appris de responsables américains sous couvert d’anonymat. Il s’agirait du deuxième piratage majeur de cette agence perpétré par la Chine. Mais l’ambassade de Chine aux Etats-Unis a rejeté ces accusations. « Tirer des conclusions hâtives et lancer des accusations sur la base d’hypothèses est irresponsable et contreproductif », a déclaré le porte-parole de l’ambassade, Zhu Haiquan. « La législation chinoise interdit la cyber-criminalité sous toutes ses formes. La Chine a fait beaucoup d’efforts pour combattre la cyber- criminalité », a assuré M. Zhu. Dans un communiqué, l’OPM a indiqué que les données personnelles d’environ 4 millions d’employés -- actuels et anciens -- du gouvernement auraient été compromises et a annoncé que ces personnes seraient informées à partir du 8 juin. On ignorait si le piratage avait affecté le président Barack Obama, d’autres hauts responsables de l’administration ou la communauté du renseignement. Mais l’OPM n’a pas exclu que d’autres victimes soient identifiées au cours de l’enquête et a proposé de les dédommager à hauteur d’un million de dollars en cas « de fraude et de vol d’identité ». Cette agence a utilisé de nouveaux outils informatiques ces derniers mois qui lui ont permis de détecter cette attaque quatre mois après son lancement. Or celle-ci a été menée au moment même où l’OPM se dotait de nouvelles procédures de sécurité. L’objectif des pirates n’était pas immédiatement clair, entre vol d’identités et espionnage. Le FBI a indiqué dans un bref communiqué enquêter sur cette affaire et « prendre au sérieux toutes les attaques potentielles contre les systèmes du secteur public et privé ». La police fédérale a estimé que « tous ceux qui constituent une menace dans le cyberespace » devraient rendre des comptes. La directrice de l’OPM Katherine Archuleta a assuré prendre « très au sérieux notre responsabilité de sécuriser les informations stockées dans nos systèmes ». L’OPM a appelé toutes les victimes potentielles à se montrer très attentives dans la gestion de leurs comptes en banque et la manipulation de leurs données personnelles. Les piratages se sont multipliés ces derniers mois aux Etats-Unis, la plupart visant les systèmes informatiques internet de grands groupes comme le distributeur Target, l’assureur santé Anthem ou les studios de cinéma Sony Pictures Entertainment. L’an dernier, des pirates chinois s’étaient introduits dans le réseau informatique de l’OPM et de deux sous-traitants, ciblant en particulier les dossiers de candidature pour une accréditation secret défense de dizaines de milliers d’employés. L’attaque, détectée en mars 2014, avait été immédiatement bloquée et attribuée à la Chine par un haut responsable américain. Des boîtes de courrier électronique à la Maison Blanche et au département d’Etat avaient aussi étaient prises pour cible par des hackers l’an dernier, y compris des courriels du président Obama lui- même, ont admis récemment des responsables américains. Cette fois-là, la Russie aurait été derrière l’attaque, selon le New York Times. Le GAO, équivalent de la Cour des comptes française, avait pointé en avril les « faiblesses de l’approche du gouvernement américain pour protéger les systèmes informatiques fédéraux ». L’espionnage par la Chine d’entreprises américaines « reste un problème significatif », avait souligné en février le directeur du renseignement américain James Clapper, en rappelant que Pékin et Moscou disposaient pour ces attaques de systèmes « très sophistiqués ». Il avait explicitement cité la Chine dans une autre attaque informatique, en août 2014, contre des hôpitaux gérés par la société Community Health Systems, qui représente 200 établissements, où des données personnelles de patients avaient été dérobées. L’annoncedecetteattaqueintervient le jour où le New York Times a rapporté, citant des documents de l’ex-consultant de la NSA Edward Snowden, que l’administration Obama avait donné à l’agence du renseignement des pouvoirs élargis pour surveiller les communications sur internet afin d’y repérer des pirates informatiques travaillant pour des gouvernements étrangers. La direction nationale du renseignement (Odni) s’est défendue jeudi en rappelant que la « fréquence, l’échelle, la sophistication et la gravité » de la cyber-menace sur les Etats-Unis augmentait. La Chine soupçonnée du piratage des données de quatre millions d'employés fédéraux L e gouvernement colombien et les rebelles des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) se sont mis d’accord jeudi pour former une commission vérité qui devra mettre en lumière les atrocités de la plus longue guerre en cours en Amérique latine, une fois qu’elle sera terminée. Les négociateurs sont parvenus à cet accord malgré une escalade de la violence ces dernières semaines, susceptible de mettre en péril les négociations de paix, qui se dérou- lent à Cuba. « La commission (...) commencera à fonctionner après la signature d’un accord définitif et une fois que les Farc auront déposé les armes », est-il précisé dans l’accord lu par les représent- ants de Cuba et de la Norvège, les deux pays qui supervisent les dis- cussions de paix. « Le gouvernement s’engagera à (...) l’établissement de la vérité dans tous les épisodes du conflit, y com- pris les plus graves violations des droits de l’homme. » Les combats se sont poursuivis depuis que les négociations ont commencé il y a deux ans et demi à la Havane, portant à 220.000 le total des victimes de ce conflit de 50 ans, qui a également entraîné le déplacement de millions de Colom- biens. Il y a plus de deux semaines, les Farc avaient annoncé la rupture de leur cessez-le-feu unilatéral à la suite de la mort de 26 des leurs dans une opération menées la veille par les forces gouvernementales. Cette trêve avait été proclamée en décembre dernier. Les délégués des Farc et du gouver- nement colombien se sont déjà mis d’accord sur trois des cinq points en négociation, la réforme agraire, l’arrêt du commerce de la drogue et l’intégration politique des anciens rebelles. Ils discutent actuellement de la compensation des victimes et de la démobilisation des combattants. Une fois qu’un accord partiel aura été trouvé sur chacun des cinq points, les deux parties passeront en revue le texte dans son intégral- ité qui, le cas échéant, sera ensuite soumis aux électeurs colombiens pour être ratifié. Bogota et les Farc s'entendent pour former une commission vérité
  • 9. Y aurait-il actuellement des prob- lèmes de liquidité sur le marché haïtien ? Pas du tout, affirme Pat- rick Tassy de la Direction de la Caisse à la Banque centrale. Une appréciation qui semble ne pas faire l’unanimité dans bon nombre d’entreprises commerciales de la place. Mais le cadre de la Banque de la République d’Haïti (BRH), persiste et signe. « La quantité de monnaie en circulation dans l’économie nationale est passée de 23,1 mil- liards, pendant l’exercice fiscale 2012-2013, à 26,7 milliards de gourdes durant l’exercice 2013- 2014 ». Alors, où est le problème ? L’économie nationale – c’est une lapalissade – fait face à des situ- ations difficiles depuis un certain temps. Hausse des prix, érosion du pouvoir d’achat, dévaluation de la gourde, crise du crédit, entre autres : la liste est longue. Et qu’en serait-il, s’il fallait, de sur- croit, faire face à des problèmes de liquidité ? En tant que moyen de paiement sans délai et à valeur cer- taine, la liquidité est indispensable dans le cadre de toute transaction commerciale. Pour parler de problèmes de liquidi- té, il faut au moins, apprend-t-on, trois cas de figure. Le premier est quand l’Etat ne peut plus rémunér- er ses employés. Le deuxième est lorsqu’une banque commerciale ne peut pas vous rendre votre argent épargné. Le troisième cas de figure est lorsqu’un grand entrepreneur veut puiser dans ses réserves à la banque pour en tirer, en cash, un certain montant et que l’institution se révèle incapable de lui fournir la quantité requise en liquide. Autre- ment, peut-on parler de problèmes de liquidité ? La BRH est là - rappelle-t-on - pour veiller au grain et assurer une ali- mentation équilibrée du marché en billets et en pièces de monnaie. Ni trop, ni trop peu. Elle doit éviter d’injecter trop de monnaie dans l’économie si elle ne veut pas pro- voquer une poussée inflationniste. Par contre, un approvisionnement insuffisant en billets et en pièces de monnaie pourrait occasion- ner le blocage des transactions de toutes sortes. Pour garantir la disponibilité de liquidité, confie Patrick Tassy, la BRH a recours à l’émission des billets et des pièces de monnaie en cas de besoins, et au remplacement régulier des bil- lets et pièces usagés. Des clients accusent, les banques privées se défendent Lors des assises organisées récem- ment par la Banque centrale pour renforcer les capacités des journal- istes économiques des différents médias de la capitale, Donald Dégeois, de la Direction Caisse et Réseau à la BRH, avait expliqué que la rareté de liquidité peut être due au processus de commande qui demande beaucoup de temps, mais, avait-il ajouté, la BRH gère toujours la masse monétaire en circulation de façon à éviter toute rareté. Pour ce qui est de la pénurie de billets et de pièces de monnaie, il a déploré le comportement de certaines banques commercia- les privées, qui ne veulent pas accepter les pièces de monnaie en épargne, sous prétexte que leur gestion n’est pas chose facile. « Elles prennent trop d’espace, elles sont trop lourdes, trop usées, etc. », un refrain repris à satiété depuis quelque temps. Une situation qui, selon lui, est à l’origine de la pénu- rie constatée lorsqu’elles ne sont pas récupérées pour réalimenter le marché. 18,270.000 pièces de monnaie au total (pièces de 20 centimes, de 50 centimes, d’une gourde, et de 5 gourdes) ont été mis en circulation dans le système durant l’exercice 2013-2014, affirme une source autorisée de la Banque centrale. II ne devrait pas y avoir de problèmes liés à une quelconque pénurie de pièces de monnaie. Alors, où sont donc passées les pièces de monnaie ? Contacté par Le National à ce sujet, Savio Louis, Directeur de la succursale de Carrefour de la Scotia Bank, a affirmé que ce problème n’existe pas au niveau de son institution. « Au contraire le taux du dollar US augmente, c’est signe qu’il y a trop de gourdes en circulation », a-t-il déclaré. Des pièces de monnaie sont disponible en grande quan- tité à la Scotia Bank, a-t-il plaidé, et si les supermarchés en veulent, ils peuvent venir en faire la com- mande. Mêmes explications du côté de la Unibank. Selon un cadre de la succursale de Thor ayant requis l’anonymat, tout problème de liquidité équivaudrait en quelque sorte à une situation d’insolvabilité de la banque, et à ce moment-là, la BRH interviendrait pour prendre les décisions qui s’imposent. Il n’y a pas de problèmes de liquidité, encore moins de pénurie de pièces de monnaie au niveau de la Uni- bank, a-t-il affirmé. À souligner : les dirigeants de deux succursales de la Sogebank ont été approchées dans le cadre de cette enquête, mais ils n’ont refusé de se pronon- cer sur le sujet. Les banques se dédouanent et les supermarchés se défilent Si les dirigeants de la BRH et ceux des banques commerciales font état d’un marché sans pro- blèmes de liquidité, au niveau des boutiques et supermarchés, notamment du Big Star Market et de Délimart, la perception de la situation semble être différente. Chef de caisse au Big Star Market à Pétion-ville, Daphné Pierre croit que le manque de liquidité est tou- jours lié à une baisse du taux de fréquentation du supermarché. Daphné affirme que le super- marché n’est en rien responsable de la pénurie de pièces de monnaie et renvoie la balle aux banques commerciales : « nous ne sommes pas responsables de ce fléau, je vous conseille de vous adresser aux banques commerciales». « Ce sont les banques commerciales, se défend-t-elle, qui détiennent le monopole des pièces de monnaie, et qui ne veulent pas les livrer aux supermarchés ou aux petits com- merçants des boutiques ». Pour pallier à cette situation, l’institution adopte parfois la poli- tique de réduction des prix des produits – rabais – pendant les fêtes de fin d’année par exemple, pour compenser les clients forcés de renoncer à leur monnaie à cause de cette rareté. « Il arrive parfois que nous soyons obligés, face à des clients intransigeants, de verser une pièce de 5 gourdes pour rendre de la monnaie évaluée à trois, deux et même une gourde ». Les observateurs de la situation s’accordent au moins sur un point : cette pénurie de pièces de mon- naie fait évidemment le bonheur des uns et le malheur des autres. Entre la banque des banques qui joue au Ponce Pilate, les banques commerciales qui se dédouanent et les supermarchés qui se défilent, le consommateur lambda est pris en étau et c’est lui qui casque, en dernier ressort. Une situation qui, à cause de ses répercussions tant au niveau micro qu’au niveau mac- roéconomique, devrait intéresser les pouvoirs publics au plus haut point. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 9 ÉCONOMIE HAÏTI-CONJONCTUREÉCONOMIQUE Question de liquidité, liquidité en question...Par Evens Regis Cette pénurie de pièces de monnaie fait évidemment le bonheur des uns et le malheur des autres. Entre la Banque centrale qui joue au Ponce Pilate, les banques commerciales qui se dédouanent et les supermarchés qui se défilent, le consommateur lambda est pris en étau.
  • 10. 10 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 ÉCONOMIE MARCHÉDESCHANGES L es économistes Marc Alain Boucicaut (American Univer- sity) et l’ancien gouverneur de la Banque centrale Fritz Alphonse Jean (Fordham Universi- ty)) étaient les conférenciers invités par la Chambre franco-haïtienne de commerce et d’industrie (CFHCI) à ces assises pour conduire la réflexion autour du thème « Taux de change : enjeux et défis». L’analyse des causes de la dévalu- ation de la gourde fut le principal exercice conduit dans le cadre de cet atelier de réflexion sur les pro- blèmes que confronte l’économie haïtienne. En fait, explique Gré- gory Brandt, président du Conseil d’administration de la CFHCI, nous devions « dégager des perspectives pour les prochaines années ». Dans son allocution d’ouverture, Grégory Brandt a fait le point sur la situation sociodémographique d’Haïti. « Nous vivons actuellement une situation économique pré- caire, a-t-il déploré. Une croissance économique quasi nulle, associée à une poussée démographique sig- nificative » qui, selon les statis- tiques, prévoit pour 2016 et 2017 une augmentation de la popula- tion avoisinant les douze millions d’habitants. « Le déficit budgétaire a atteint un record historique », a-t-il soutenu, indiquant qu’en 2010 en dépit de l’annulation de la dette, le taux d’intérêt est passé de 5% à 6% en cinq ans. Un taux mesurant le glissement de la gourde de 44% à 50%. « Pour pallier le problème de la dette publique, trois solutions nécessaires : l’impôt, l’austérité et l’inflation ». a-t-il ajouté. Si Grégory Brandt trouve la situa- tion socioéconomique d’Haïti cha- otique, Marc Alain Boucicaut, lui, en dessine le contour historique. La crise politique de 2004, expli- que-t-il, nous a donné la MINUS- TAH. Et cette venue des troupes onusiennes a eu un impact négatif sur l’économie haïtienne. « Cela va conduire à une situation de dépré- ciation de la gourde qui va créer de l’instabilité économique ainsi qu’une augmentation de la quan- tité de dollars dans l’économie haïtienne ». « Chaque année, la gourde perd une valeur monétaire de 7,3% », a pour sa part constaté Marc Alain Boucicaut, maître en poli- tique économique et financière. Selon lui, ce bourbier fait suite à l’absence d’investissement étrang- er direct. La mise en contexte de la thématique est l’occasion de poser aussi des interrogations pertinen- tes. Pourquoi la gourde est en train de perdre sa valeur monétaire et pour quels résultats ? Inflation ou récession : l’économie haïtienne en 2015 et le taux de change La situation économique haï- tienne est précaire. Seule une politique monétaire authentique permettrait de resserrer les liens dans l’économie haïtienne. Ce sera funeste si rien n’est fait pour remédier à ce problème. Marc Alain Boucicaut argumente : « sans l’augmentation des réserves ou une politique monétaire restrictive, la dépréciation de la gourde semble inévitable en Haïti ». En dépit de tout cela, poursuit l’économiste, le comportement des agents économiques n’est pas uniforme. La population vit de transferts sans contrepartie (aug- mentation du pouvoir d’achat). Les actifs et les opérations de change des banques commerciales sont en dollars. Et, se demande-t-il, la compétitivité des entreprises d’exportation s’améliorera-t-elle avec l’augmentation de la produc- tion ? Quelle qualité et pour quelle valeur ajoutée ? Augmentation des prix, élasticité de la demande à déterminer. La perte du pouvoir d’achat du salarié haïtien. Marc Alain Boucicaut en profite pour s’interroger : quelles sont les options pour « stabiliser » le taux de change en Haïti ? Faut-il faire augmenter les IDE ? Is Haïti really open for business ?. Y a–t-il lieu d’augmenter l’aide interna- tionale alors que les prêts et les dons sont en diminution » ? Est-il possible d’augmenter les trans- ferts sans contrepartie : « variable exogène » ? Devrait-on augmenter les expor- tations et diminuer les importa- tions, conclut l’économiste en mettant l’emphase sur l’appareil productif haïtien, notamment la production agricole. Tentative de répondre à la question : « Il faut augmenter l’importation et diminuer l’exportation. La banque centrale doit jouer son rôle dans ce marasme économique. C’est à nous de répondre, de façon respon- sable aux enjeux et défis du taux de change ». Marc Alain Boucicaut prône un changement de comportement par la production en passant par une harmonisation des politiques monétaires et fiscales. Cette réconciliation vise la discipline budgétaire et le renforcement de l’appareil productif pour aug- menter la valeur ajoutée dans les secteurs. Il nous faut une politique monétaire qui vise l’augmentation du crédit à la production. Pour rappel, le taux de change d’une devise (monnaie) est le prix de cette devise par rapport à une autre. Le taux de change a une grande importance pour l’économie d’un pays, notamment pour son commerce extérieur. S’il n y a pas de production nationale pour éviter d’importer moins sur- tout les matières premières. Cela pourrait être un facteur d’inflation dans le pays de change. Le taux de change et la situation de la gourde ont fait l’objet de débats qui ont réuni en atelier, le mercredi 3 juin écoulé à l’hôtel El Rancho de Pétion-Ville, une cinquantaine de personnalités du système bancaire et du monde politique. Vers une politique de change en HaïtiPar Therno N. Alisthène S. Haïti : une croissance économique quasi nulle, associée à une poussée démographique significative. / Photo : mef.gouv.ht Chaque année, la gourde perd une valeur monétaire de 7,3%. Photo : planeteayitim.com
  • 11. L a Grèce est décidée à rejeter les dernières propositions de l’Union européenne pour lui éviter un défaut de paiement, ont indiqué dimanche deux ministres, dont celui des Finances, Yanis Varou- fakis, pour qui Athènes ne se laissera pas « terroriser ». « C’était un geste agressif destiné à terroriser le gouvernement (...) sans comprendre que ce gouver- nement grec ne peut pas être ter- rorisé », a lancé Yanis Varoufakis au quotidien Proto Thema. La Commission européenne a présenté au cours de la semaine écoulée à Athènes un docu- ment de cinq pages de mesures d’économies comportant notam- ment une hausse de la TVA, et des coupes dans les salaires et pen- sions des fonctionnaires. Le Premier ministre, Alexis Tsip- ras, avait déjà qualifié vendredi les propositions européennes d’ « absurdes » et avait expliqué qu’Athènes n’accepterait pas un accord qui n’incluerait pas une restructuration de la dette abys- sale du pays. « Le document présenté au Premier ministre est à la limite de l’insulte », a ajouté M. Varoufakis. « Nous avons besoin de réformes, de restructuration de la dette et d’investissement (...) si nous n’avons pas les trois ensemble nous ne signerons pas », a averti le ministre des Finances. Athènes a reporté le rembourse- ment de 300 millions d’euros dus la semaine dernière au FMI et décidé de verser les quatre éché- ances restantes en une seule fois à la fin du mois. Il lui faut donc trouver 1,6 milliard d’euros en trois semaines, ce qui doit passer par un accord avec ses créanciers : UE et FMI. Si la Grèce ne peut honorer ces paiements avant le 30 juin, elle sera en défaut de paiement, avec la menace d’une sortie de la zone euro. Athènes, le FMI et l’Union euro- péenne s’opposent depuis des semaines sur un plan de réformes d’austérité, qui conditionne le déblocage de 7,2 milliards d’euros restant à verser depuis l’automne 2014, dans le cadre du plan d?assistance internationale mis en oeuvre en 2010. Des ministres du parti de gauche radicale Syriza estiment que le Premier ministre devrait con- voquer des élections anticipées plutôt que d’accepter des mesures d’austérité imposées par les créan- ciers d’Athènes. « Je ne crois pas qu’il y ait beau- coup de place pour un accord positif avec les créanciers (...) ils recherchent la soumission » de la Grèce, a déclaré pour sa part le ministre de l’Energie, Panagiotis Lafazanis, au journal To Vima. « Ils veulent écraser le pays soci- alement et humilier le gouverne- ment », a dit cet eurosceptique virulent. Beaucoup des engagements de réformes que les institutions récla- ment à M. Tsipras vont à l’encontre de ses promesses électorales anti- austérité, et toute une aile de Syriza s’insurge contre de trop importantes concessions. Ces derniers jours, propositions grecques et contre-propositions des institutions ont fait la navette, sans aucune avancée. Faute de progrès, le patron de la Commission européenne, Jean- Claude Juncker, a refusé samedi de prendre au téléphone le Pre- mier ministre grec. M. Tsipras s’est en revanche entretenu avec Mme Merkel et le président fran- çais François Hollande en fin de journée. Le psychodrame grec va occuper une bonne partie des discussions au sommet du G7 en Allemagne qui démarre ce dimanche. La Grèce déterminée à rejeter les propositions de l'UESources : AFP LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 11 ÉCONOMIE Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis. / Photo : lesechos.fr
  • 12. 12 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 INSERTION DEMANDÉE
  • 13. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 13 INSERTION DEMANDÉE
  • 14. 14 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 SOCIÉTÉ D ans les pays développés et industrialisés, la religion est immanente. Avoir la foi en Dieu, c’est aussi participer à la réalisation de soi sur la terre. Le chrétien croit qu’il doit achever l’œuvre de la création divine par une attitude laborieuse. Son ascétisme moral guide son action vers des entre- prises économiquement fructueuses. Ainsi,ilpeutêtreunbonentrepreneur agricole, un médecin, un banquier, un ingénieur qui se fait rémunérer par la société dont il est membre. Dans ce cas précis, le travail devient une vertu qui contribue à la création de richess- es et au développement économique. Qu’on se rappelle de l’Éthique prot- estante et l’Esprit du capitalisme de Max Weber pour essayer de compren- dre cette idée de l’immanence de la religion pratiquée en Allemagne et en Angleterre. Rappelons nous aussi de la thèse développée par Ernst Troltch qui a démontré comment certaines attitudes façonnées par la religion de l’immanence permettent aux prati- quants de réaliser leur bien-être sur la terre, en espérant et en travaillant pour le salut de leur âme qui est la promesse faite par Dieu. L’inébranlable foi des chrétiens Tandis que dans les pays sous- développés et faiblement industri- alisés, où le taux du chômage est élevé et croissant, avoir la foi sig- nifie se soustraire du monde par la prière pour gagner une place au paradis promis, là où l’abondance et le bien-être seront les récom- penses de ceux qui auront souffert sur la terre. C’est cette attitude que Ernst Troltch nomme l’évitement du monde par le croyant. Celui-ci ne veut pas travailler pour trans- former son état présent, mais se consacre à la prière pour sauver son âme, laquelle est le seul bien qui compte. Son compte physique étant périssable et l’objet de tous les péchés et de toutes les tenta- tions. Pour le croyant, la religion se résume à la transcendance et doit conduire l’homme à éviter le monde. D’où changer les con- ditions de misère, de pauvreté, d’injustice sociale et économique, c’est se livrer à une entreprise vaine. Puisqu’il y aura un monde d’abondance, de justice divine, de bien-être qui sera réservé à ceux qui auront œuvré pour le salut de leur âme. Et il importe peu donc qu’ils soient des affamés, des pauvres ou des appauvris dans le temps actuel. De ces deux catégories de croy- ants dont nous venons de parler, nous pensons que les milliers de croyants haïtiens qui s’en vont jeûner, appartiennent à la deux- ième catégorie. Cette pratique de jeûne peut s’interpréter comme le reflet d’un abandon du monde physique et une quête farouche du salut promis par Dieu. Quand ces milliers d’hommes et de femmes vont défiler dans les églises catholiques et protestantes, cela traduit la condition de chômeur qui est la leur, et l’évitement du monde où la souffrance, la misère, la pauvreté, la maladie, et tous les maux que nous connaissons, constituent le salaire du péché, selon les arguments des évangiles. Par conséquent, ces croyants ne croient guère ou ne veulent pas croire qu’ils ont la responsabilité de transformer le monde pour leur bien-être et pour y jouir des richesses à produire. Toute leur espérance de vie heureuse est fondée sur la promesse divine d’un autre monde où régneront l’abondance, la joie et le bonheur. Le jeûne en Haïti, qui est un fait social religieux, exprime la grande foi inébranlable des chrétiens catholiques et protestants. Il peut être aussi vu comme un terrain pour l’observation d’un autre fait social économique, le chômage. L’économiste et le socio- logue qui voudraient se renseigner sur le niveau de chômage, pour- raient y appliquer leurs méthodes d’enquête, recueillir les données sur ce fait, afin d’en comprendre la nature et d’en analyser sa pro- gression. En d’autres termes, l’économiste et le sociologue se mettraient dans la peau de l’enquêteur qui observe cette condition que dissimule le fait religieux et dans la peau du statisticien qui veut chiffrer les données recueillies. Il importe de dire que si certains vont jeûner, cela ne veut pas sig- nifier absolument que ceux-ci ont une grande foi en Dieu. Ils se livrent à cette pratique parce qu’il n’y a pas un bureau qui les attend. Ce sont des chômeurs qui s’ennuient de leur oisiveté et dont l’espoir est de trouver un emploi. Donc, le jeûne n’est pas néces- sairement un marqueur de foi, mais un substitut du curriculum vitae qu’ils soumettent au moment de la prière à un Dieu qui rem- place l’employeur dans le système socioéconomique que Max Weber appelle la bureaucratie. Donc, la foi remplace la rationalité chez ces acteurs qui ne connaissent pas encore le désenchantement du monde dont parle minutieuse- ment le sociologue allemand. Pour conclure, nous dirions que le jeûne que l’on pratique en Haïti, est un grand laboratoire d’étude où économiste et socio- logue peuvent observer l’objet de leurs questionnements et de leurs analyses. Cette pratique sociale religieuse permettra au premier de mesurer le chômage partiel- lement, et au second d’établir la différence entre la religion de la transcendance et la religion de l’immanence. Au sociologue et à l’économiste, nous dirions qu’ils ont du pain sur la planche. Allez donc faire une expérience dans ce grand labora- toire où celui qui jeûne peut être à la fois croyant et chômeur. Mais, où il est surtout ce chômeur qui espère, non le salut de l’âme, mais un emploi avec un salaire mensuel qui lui permettra de vivre dans la dignité et la joie avec sa famille. Prisme à l'évaluation de la foi et du chômagepar CHERISCLER Evens Boukman HAÏTISOCIÉTÉ/RELIGION Ils sont des milliers en Haïti, ceux qui vont jeûner. On les compte dans les églises catholiques aussi bien que dans les églises protestantes. Ce spectacle ne symbolise pas uniquement la grande foi chrétienne dans le pays. Mais, il est aussi un prisme qui permet de lire l’ampleur du chômage et cette différence existant entre les religieux qui continuent l’œuvre de la création divine et les religieux qui évitent le monde pour se consacrer au salut de leur âme. Sacré-Coeur de Turgeau. / Photo : J. J. Augustin
  • 15. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 15 SOCIÉTÉ À l’entrée de la ville de Lasca- hobas, la première chose que l’on remarque est une station de motos. De toutes les cou- leurs, elles sont alignées le long de la rue logeant le commissariat de la ville. En face de la cathédrale, non loin de la place, dans cette ancienne caserne convertie en commissariat, certains agents de police font un va-et-vient ennuyeux. D’autres lisent à l’ombre d’un grand arbre. Aucun d’entre eux ne semble se préoccuper des activi- tés qui se déroulent dehors. La ville fonctionne dans sa normalité la plus parfaite. Fait insolite, aucune de ces motocyclettes, logées à la barbe des policiers, n’a une plaque d’immatriculation. Comme pour questionner la raison d’être de ce commissariat, ou encore la présence de ces policiers. Ou alors pour affirmer que ces motocy- clettes ne sont pas des véhicules à moteur ; que les conducteurs font fi de la décision de doter tout véhicule de nouvelle plaque depuis octobre 2014. Dans l’autre station de motos de la ville, c’est le même tableau. Pas de plaque d’immatriculation. Ni l’ancienne plaque bleue. Voire cette nouvelle « perle des Antilles », disponible depuis le 1er octobre de l’année dernière. Un habitant de la zone déclare que ce phénomène n’est pas rare à Lascahobas. « Il fut un temps, les motocyclettes avaient des plaques. Mais depuis quelque temps, c’est le désordre généralisé. Elles n’ont plus de plaque d’immatriculation. » À son avis, rien de spécifique n’explique cette situation. Car la succursale de la DGI (Direc- tion générale des Impôts) qui est censée délivrer les plaques, con- tinue de fonctionner. Ce n’est pas l’omission des plaques d’immatriculation qui préoccupe ce citoyen. C’est plutôt les dangers auxquels sont exposés les habi- tants de la ville. Plus précisément, les enfants qui vont à l’école à moto. Dangers sur lesquels per- sonne ne se penche. « Les matins, ils sont cinq sur une seule moto, continue-t-il. Le chauffeur et quatre enfants. C’est inacceptable. La vie de tous ces gosses sont en danger ». Selon lui, les autorités policières interviennent uniquement en cas d’accident. Et là encore, l’intervention n’est pas rigou- reuse. Tout dépendra du chauffeur et de l’agent de police. Il existe donc une certaine complicité qui empêche l’application efficace des sanctions. « Parfois, les policiers interviennent. Mais il y a des pots de vins. Depi yo jere polisye a, li kite sa pase. ». D’autres citoyens préfèrent com- prendre la situation autrement. Selon eux, les policiers évitent tout simplement de perdre la vie. « Talè w al bay kontravansyon pou plak epi demen w wè w pa la », révèle un chauffeur de bus. Les nouvelles plaques posent encore problème. Malgré la promesse de la DGI d’agréer les surplus de demande, nombreux sont les chauffeurs qui hésitent encore à se les procurer. Ou qui ne veulent tout simplement pas le faire. Quels sont les stratégies de dis- tribution ? Faudrait-il les changer ? Comment contrôler ce flot de motocyclettes qui circule sans la moindre immatriculation ? Com- ment éviter ces dangers ambu- lants ? À ces questions, seules les autorités concernées détiennent les réponses. H aïti ne compte que 15 car- diologues pour près de 11 millions d’habitants. Ils sont pratiquement tous dans la capitale, Port-au-Prince. La plus grande inquiétude, la relève n’est pas assurée. À cause des difficultés économiques, les jeunes médecins ne s’intéressent guère à cette spéci- alité qui ne nécessite pas moins de dix années d’études après le bacca- lauréat. À l’occasion de la tenue du 8e con- grès du Collège haïtien de cardi- ologie, les docteurs Richard Pilié et Claude Sam ont à nouveau tiré la sonnette d’alarme. Ils invitent les autorités haïtiennes à créer un centre moderne de cardiologie en Haïti et à adopter des mesures incitatives pour que plus de méde- cins s’intéressent à la cardiologie. Après le séisme de 2010, Haïti a pu compter sur la présence de nombreuses missions humani- taires pour faire face aux lacunes dans ce secteur. Par exemple la « Fondation Chaine de l’Espoir Paris » a pu, en sept missions, réalis- er de nombreuses opérations et sauver la vie de 130 personnes. Mais Haïti n’est pas le centre du monde et l’attention internatio- nale a diminué. Pour proposer une solution sur le long terme, un projet de centre de cardiolo- gie moderne est envisagé par la branche haïtienne de cette fonda- tion. Mais dix millions de dollars sont nécessaires à sa concrétisa- tion. La cardiologie moderne n’est pas encore accessible en Haïti. Les interventions des cardio- logues haïtiens se limitent à l’évaluation clinique basée sur l’échocardiographie et d’autres types d’examens. La prise en charge des patients souffrant d’une malformation cardiaque est faite simplement à partir de médicaments qui ne peuvent que ralentir la déformation du cœur. Pourtant, la gravité du problème n’échappe pas à l’État haïtien, les maladies cardiovasculaires – et en tête de liste l’hypertension artéri- elle - sont les principales causes de mortalité chez les adultes selon le document de Politique natio- nale de Santé du ministère haï- tien de la Santé publique publié en 2012. Cependant, les actions concrètes pour s’attaquer au pro- blème tardent encore. Habitudes alimentaires et environnement sociopolitique mis en causes Les cardiologues Pilié et Sam qui intervenaient sur radio Métropole, le 02 juin passé, se sont adressés à cœur ouvert à la population haï- tienne, l’invitant à changer ses habitudes alimentaires pour éviter les complications. Pour accentuer leur discours, ils ont rappelé un proverbe très caricatural : « nous creusons notre tombe avec nos dents ». De manière générale, ils ont recommandé à la population de réduire sa consommation de sel et de graisse et de s’adonner à plus d’exercices physiques. Mais aussi d’apprendre à relativiser pour mieux gérer le stress quotidien. Aux personnes de 40 ans et plus ils ont, de surcroit, conseillé de ne pas prendre de repas copieux après 6hpm et de consulter régu- lièrement un cardiologue. Aux politiciens : les spéciali- stes du cœur ont recommandé à penser deux fois aux conséquenc- es de leurs actes sur la santé de la population. Plaques d'immatriculation : entre insouciance et pots de vinPAr Stéphanie Balmir Un défi de santé publique en HaïtiPAr Vantz Brutus HAÏTISOCIÉTÉ/CIRCULATION HAÏTI-SANTÉ/MALADIESCARDIOVASCULAIRES Depuis la fin de l’année 2014, les nouvelles plaques d’immatriculation sont disponibles. La date limite fixée au 31 décembre 2014 n’a pas, semble-t-il, été respectée. Puisqu’aujourd’hui encore, certains véhicules, privés ou autre, circulent sans ces nouvelles plaques. À Lascahobas, les motocyclettes n’ont ni l’ancienne ni la nouvelle plaque d’immatriculation. Des motos saisi par la PNH. / Photo : J. J. Augustin
  • 16. 16 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 SOCIÉTÉ A ccusée de n’avoir reconstruit que six habitations en dur cinq ans après le tremble- ment de terre qui a dévasté Haïti, malgré quelque 500 millions de dollars de dons récoltés, la Croix- Rouge américaine tente de défendre son bilan, en expliquant notamment avoir surtout eu recours à des aides au logement. Le site internet d’investigation new-yorkais ProPublica et la chaîne de radio publique améri- caine NPR ont présenté cette semaine un rapport qui accuse l’organisation humanitaire d’avoir gaspillé l’argent donné par une mauvaise gestion et en ayant trop souvent fait appel à des travail- leurs humanitaires étrangers ne parlant par le français ou le créole. De son côté, la Fondation Thom- son Reuters a appris que la Croix- Rouge avait dépensé au moins 17% des fonds collectés pour Haïti en frais de fonctionnement alors que la Croix-Rouge américaine et la Croix-Rouge internationale affir- ment que pour un dollar récolté, 91 cents doivent être consacrés à la mission humanitaire. La Croix-Rouge américaine estime que les informations publiées par la presse américaine sont « inex- actes” et doivent être remises dans “leur contexte ». Elle affirme que son travail à Haïti a aidé des millions d’Haïtiens. « Malgré des conditions particu- lièrement difficiles, notamment des changements de gouverne- ment, le manque de terrain pour la construction de logements et les troubles civils, notre person- nel qui travaille dur, et qui est à 90% constitué d’Haïtiens, contin- ue à répondre aux besoins à long terme du peuple haïtien », déclare l’Organisation non gouvernemen- tale (ONG) dans un communiqué publié sur son site internet. « Et si les choses ne progressent jamais à un rythme aussi rapide que nous le souhaiterions, Haïti va mieux aujourd’hui qu’il y a cinq ans. » Le tremblement de terre du 12 jan- vier 2010 a fait plus de 220.000 morts et 1,5 million de déplacés. D’AUTRES MÉTHODES La Croix-Rouge affirme que les dons ont permis de constru- ire huit hôpitaux et cliniques, d’endiguer une épidémie de choléra, de fournir de l’eau pota- ble et des installations sanitaires, de réparer des routes et des écoles et de reloger 130.000 personnes qui avaient dû s’abriter dans des tentes et autres abris de fortune après le séisme. Les journalistes de ProPublica et de NPR soutiennent que leur travail d’enquête, qui se base sur diverses informations, dont des courriels confidentiels de hauts dirigeants, leur permet de dire que seulement six habitations en dur ont été construites à Haïti en cinq ans. La Croix-Rouge répond qu’elle a utilisé d’autres méthodes pour améliorer la vie quotidienne des sinistrés. « Quand il n’y avait pas de terrains disponibles pour de nouveaux logements, la Croix-Rouge a fourni une série de solutions en la matière, notamment des aides à la location, la réparation et la modernisation des structures existantes, tenant ainsi notre promesse de reloger des dizaines de milliers d’Haïtiens », explique l’ONG. Elle a refusé de répondre à tout autre question de la Fondation Thomson Reuters et précise dans une note accompagnant son com- muniqué que la manière la plus rapide et la plus efficace est de distribuer des aides permettant de payer les loyers. Un de ces programmes d’aide à la location (six millions de dol- lars) est géré par la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant- Rouge (FISCR), basée à Genève, et cela augmente les frais généraux, explique l’ONG. Si la Croix-Rouge américaine assure que 91% des dons vont à l’aide humanitaire, la FISCR a expliqué à la fondation Thomson Reuters que quand elle gère elle- même un programme, elle facture 6,5 % supplémentaires localement pour couvrir les frais administra- tifs, de télécoms et autres coûts d’exploitation. La FISCR n’a pu fournir de préci- sions sur ce qu’elle avait facturé en plus pour gérer ce programme de subvention de six millions de dollars. Dans son rapport sur cinq ans sur l’aide à Haïti, elle dit qu’en moyenne 17 % sont dépensés en « soutien et coordination des pro- grammes ». Épinglée pour son travail à Haïti, la Croix-Rouge US se défendSources : Reuters
  • 17. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 17 CULTURE S ouriante, chaleureuse, très honorée, avec les marques d’une hospitalité sans pareille, elle s’est approchée de nous dans sa robe blanche portée spéciale- ment pour l’occasion. « Le blanc sym- bolise la pureté », justifie-t-elle pour commencer. On aurait cru que même son âme est blanche vu la joie qu’elle a témoigné à nous recevoir sur son habitation. C’est par une génuflexion qu’elle nous a salués en nous invitant à nous asseoir. Sa rencontre avec le vaudou Son père et sa mère n’avaient aucun rapport avec le vaudou. Mais son grand-père était un « Houngan ». C’est de lui qu’elle aurait reçu probablement cet héri- tage. Née le 16 mars 1954, Marie Yoleine Gateau a grandi dans le culte du catholicisme. Elle a même fait ses études primaires à l’école Sainte-Rose de Lima et celles du secondaire au Sacré-Cœur de Turgeau. Élevée loin de toute pra- tique vaudouesque, cela n’a pas empêché que les esprits fassent appel à elle dans un songe : « C’est à travers un songe que cette déter- mination de devenir « Mambo » a vu le jour en moi », raconte-t-elle avec le sourire aux lèvres. Durant ses études à l’étranger, elle était intriguée par son souci de com- prendre le vaudou. Et déjà, ses transes incontrôlables augmen- taient ses préoccupations. C’est finalement dans les bras de son mari, un psychologue italo-améri- cain, qu’elle retrouve le moral et arrive à comprendre ce qu’est la transe. Si Marie Yoleine Gateau est « assogue » (du bénin : être choisi) dès sa naissance, ce n’est qu’en août 2014 qu’elle a finale- ment « pran ason » – équivalent de l’ordination dans la religion catholique. Conseillère péda- gogique, madame Gateau a cette capacité de ne pas confondre sa vie professionnelle avec sa vie spirituelle. Mambo : entre guide spirituel et profession La Mambo dans le vaudou est l’égale du Houngan. Elle est la maîtresse de son temple. C’est un leader qui doit gérer tous les éven- tuels conflits. Pour devenir une vraie Mambo, il faut passer par le « Kan-zo ». C’est une sorte de voyage mystique qui dure onze jours, et qui doit commencer un jeudi (qu’on appelle « monte bila »). Le « ouyon » i.e. la personne qui fait le « voyage », doit s’enfermer dans un « djèvò », lieu où l’on réalise le « voyage », après avoir quitté le « rafrechi », lieu où l’on puri- fie le « ouyon ». Durant les onze jours du Kan-zo, on apprend au « ouyon » à canaliser de l’énergie, à maitriser le feu… avec l’aide des esprits. Une fois passée l’étape du Kan-zo, le « ouyon » est devenu un « Hounsi simple » pour devenir ensuite un « Hounsi sous point ». Si le Hounsi (communément appelé « pitit kay ») décide de « pran ason », il doit se rendre à « les lieux » qui représente une sorte de tribunal, où l’on inter- roge le Hounsi pour voir s’il est digne d’être Mambo ou Houngan. « C’est la procédure pour devenir Mambo quand on est « assogue »», explique madame Gâteau. Mais les « mambos lakay », les « mambos makout » n’ont reçu aucun appel des « loas », et peuvent ainsi ignorer cette étape. D’où naît un sérieux malentendu selon Marie Yoleine Gateau : « Beaucoup de gens pensent qu’être Mambo est un métier. Cela doit s’expliquer par le fait qu’elles (Mambos) réclament parfois des frais en contrepartie des services rendus ; cela est dû à leur précarité économique, mais n’enlève rien à leur identité de guide spirituel ». Pour ainsi dire, le statut de Mambo n’est pas un titre professi- onnel. La Mambo doit être perçue comme un berger, un mentor. Elle est placée pour aider les gens à bien servir les « loas » (esprits ser- vant d’intermédiaire entre Dieu et les hommes, au même titre que les saints de l’Église catholique) et le « grand maître ». Vaudou : entre mode de vie et religion Considéré comme le culte du diable par une bonne majorité des chrétiens, le vaudou semble être tout autre chose. Marie Yole- ine Gateau développe une double conception du vaudou. Selon elle, cette pratique doit être entendue, d’un côté, comme un mode de vie, et de l’autre, comme une religion. En effet, d’une part, il n’y a pas de principes préétablis dans le vaudou pour réguler le comporte- ment des adeptes. Néanmoins, ces derniers cultivent le respect de l’autre, le sentiment de partage et d’entraide… D’autre part, dans le vaudou, il y a des divinités qu’on sert et qui chaque jour réalise des « miracles » dans la vie de ses adeptes. La gérante du temple « Asòtò » pense même que les vau- douisants pourraient écrire leur propre livre sacré. « La Bible, le livre sacré des chré- tiens, est le récit des exploits du peuple juif avec son Dieu, ajoute- t-elle. L’histoire des vaudouisants est tout aussi vaste et est dotée de grands « miracles » qu’on devrait raconter aux enfants ». Conjointe- ment à ces deux points de vue, la Mambo pense qu’un temple vaudou est « le seul endroit en Haïti où l’on peut se sentir accepté tel que l’on est ». Le vaudou ayant pour principe la tolérance. A Voyage dans le vaudou haïtien : rencontre avec Marie Yoleine Gateau Par Ritzamarum ZÉTRENNE et Romaric FILS-AIMÉ Non loin de la station de Léogane, au cœur d’une habitation dénommée « Mon p’tit village », se situe le temple « Asòtò ». Si, d’après la doxa, le décor des « péristyles » inspire la peur et génère du frisson, dans ce temple vaudou, n’étaient-ce les signatures des esprits (vèvè), les portraits de certains « loas » et autres signes propres à ce culte, l’on pourrait s’imaginer dans n’importe quel temple du christianisme. C’est donc sous le kiosque de ce vaste terrain que Marie Yoleine Gateau – la « Mambo » du « lakou » – nous a reçus avec une convivialité exemplaire. Mambo Marie Yoleine Gateau.
  • 18. 18 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 CULTURE « Mouvman vwazinaj » est une initiative qui consiste, pour les sept jeunes porteurs de cette idée, à concevoir des projets culturels dont la mise en œuvre est laissée à des groupes organisés existant au sein des communautés appelées à recevoir le projet. Pour reprendre les propos de Kensly-Carl Olibrice, l’un des porteurs du projet, « Mouvman Vwazinaj » est une abstraction qui prend corps dans une dynamique d’action instituée par des structures culturelles locales. Nous axons notre démarche de travail sur l’approche participative. Pour l’instant nous réalisons le projet à Port-de-Paix parce que nous sommes tous de cette ville mais, dans pas longtemps, on étendra notre action sur d’autres villes du pays. ». Dans le cadre de la réalisation de « Mouvman Vwazinaj » à Port-de- Paix, des structures culturelles de la ville comme « Bonne humeur club », « l’Union des héros », « samba Zele », ajoutés aux jeunes concepteurs et porteurs du projet ont constitué un comité de coor- dination. Malheureusement, pour reprendre Carl Olibrice, aucune des insti- tutions en charge de financer la culture ou même le ministère de la Culture ne les a aidés. Ils se sont mis ensemble, ont mobilisé en konbit le peu de res- sources personnelles dont ils dis- posaient pour rendre matérielle cette idée. Au menu : formation, spectacle et projection de films à Port-de-Paix il n’existe que très peu d’infrastructures culturel- les, pour cette première vague d’activités lancées par « Mouvman Vwazinaj », les organisateurs ont dû mobiliser locaux d’écoles et de night-club pour recevoir les jeunes qui sont venus à eux. Le comédien et conteur Shelson Ermoza a été invité à animer une formation sur le conte, la lody- ans, l’expression corporelle et le déplacement scénique. Dans la nuit du samedi 7 Juin, à l’alliance Française de la ville, le public a visionné l’adaptation au cinéma du roman de Jacques Roumain titré « Gouverneurs de la rosée ». Le Dimanche 8 Juin 2015, au Classica Convention Center, avec le talent fou qui est le sien, Shel- son Ermoza a animé une bonne soirée de contes. Tous les horizons de la ville étaient venus retremper leur imaginaire dans le fleuve de l’enfance et des premières candeurs. Adresse aux grands opérateurs culturels, aux mécènes et à l’État à côté des activités artistiques - que Kensly-Carl Olibrice, Brunel Docilet, Jamesley Liberice, Mackendy Vixamar, Fleur Aimé Obenson et Fransnel Dorsainvil ont exécutées dans la logique de réalisation de leur projet « Mouv- man vwazinaj » -, ce groupe de jeunes dynamiques est également en train de planifier l’institution d’une université populaire dans la ville de Jean Rabel. Ces jeunes auront définitivement compris qu’il était de leur ressort de s’organiser et de bâtir ensemble des projets pouvant permettre à leurs pairs de s’épanouir dans un climat mettant en avant l’intellect et la culture. Souhaitons que l’État haïtien et quelques mécènes pas- sent les voir et daignent supporter cette louable initiative dans une logique de continuité. Le conteur Shelson Ermoza. « Mouvman vwazinaj » à Port-de-PaixPar Dangelo Néard Du 5 au 8 Juin 2015, la ville de Port-de-Paix a vibré au rythme du théâtre, du conte et du cinéma. De la culture à pleine main, en grande gorgée pour une ville qui ne demandait que ça. Plusieurs lieux de la principale cité du Nord-Ouest ont été reconvertis en infrastructures culturelles devant recevoir les activités organisées dans le cadre de « Mouvman vwazinaj ».
  • 19. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 19 CULTURE L es responsables du centre culturel ARAKA ont rendu un vibrant hommage à l’auteur des Gouverneurs de la rosée, Jacques Roumain, dans l’après-midi du mercredi 3 juin 2015. Pour com- mémorer l’anniversaire de naissance de ce grand intellectuel et écrivain, une conférence débat était organ- isée au local du centre situé dans les parages du cimetière national par le professeur, écrivain et journaliste culturel, Marc Exavier. « Jacques Roumain et Jean Giono deux regards sur l’environnement et la politique » fut le thème retenu au cours de cette rencontre intellectuelle entre le panéliste et le public composé pour la plupart d’écoliers et d’universitaires. Passionné de Roumain et de Giono, Marc Exavier a retracé leur iti- néraire et leur parcours. « Ce sont deux personnalités différentes. Ils ont grandi dans deux univers politiques et économiques différents. Ã part un certain intérêt pour la nature. Roumain fut communiste. Giono, un pacifiste, refusant de parti- ciper à la seconde guerre mon- diale. Cependant ils ont mis au grand jour les ressorts les plus implacables de la tyrannie et nous livrent une leçon de vie, un exemple de combat pour élever la part d’humanité en nous. » Ensuite, Marc Exavier a parlé du rapprochement entre la Montagne ensorcelée de Jaques Roumain et Colline de Jean Giono. Comme l’a déjà démontré feu l’historien Roger Gaillard. Dans la « Montagne ensorcelée », Roumain en huit courts chapitres montre la série d’évènements dra- matiques, mais aussi la chaine col- lective de pensées irrationnelles qui mènent au meurtre de la jeune Grace et de sa mère Placinette. Victimes expiatoires de la misère et de la superstition, sacrifiées par une communauté conduite au bord de la folie, par son isole- ment, son extrême pauvreté et son obscurantisme. Ce récit sombre, à peine éclairé par l’amour de Grace et d’Aurel, est le constat sans fard de l’immense dénuement matériel et moral de ces paysans plongés dans l’angoisse de la survie quo- tidienne, puis dans l’horreur d’un meurtre collectif. Exalté dans un langage riche et puissant Giono a raconté dans « Colline » les liens profonds liant les paysans à la nature. Dédié à la mémoire de son père, le roman « Colline » débute par la venue d’un sanglier, que l’on essaie de tuer mais qui parvient à s’échapper. Plus tard, lorsque la fontaine du hameau, située dans un petit village en France qui avait alimenté les habitants depuis très longtemps, se tarit, tout commence à aller mal. Ã cette même période, l’ainé du village, Janet, paralysé et alité, commence à parler de manière peu compréhensible. Il ne faudra pas longtemps pour que les autres habitants pensent que Janet est à l’origine de tous ces malheurs. Toujours selon le conférencier, ces deux grands hommes sont d’une grande générosité. L’œuvre de Giono est beaucoup plus abondante que Roumain. Si les paysages varient d’une contrée à l’autre, les paysans partagent la même condition sociale. Ils sont démunis et pauvres. L’œuvre de ces deux auteurs mêle un human- isme naturel à une révolte vio- lente contre la société du 20e siècle traversée par la misère et l’obscurantisme. Elle dépeint l’indigence de l’homme dans le monde, face aux questions morales et métaphysiques et possède une portée universelle. Jacques Roumain et Jean Giono deux regards sur l'environnement et la politiquePar Schultz Laurent Junior Jacques Roumain. / Photo : babelio.com
  • 20. 20 | N0 12 LUNDI 8 JUIN 2015 INSERTION DEMANDÉE
  • 21. LUNDI 8 JUIN 2015 N0 12 | 21 INSERTION DEMANDÉE