2. Critique politique
L'un des sujets radicalement nouveaux de la littérature de
ce siècle consiste en une réflexion sur les formes du
gouvernement, qui ira jusqu'à remettre en cause la
légitimité de l'absolutisme monarchique français. En effet à
cette époque, les points de comparaison se sont multipliés
et l'Angleterre, en particulier, offrait le modèle d'une
monarchie constitutionnelle exemplaire.
Diderot « Et ses mains ourdissaient les entrailles du prêtre,
à défaut d'un cordon pour étrangler les rois. »
3. Critique politique
Montesquieu dans l’Esprit des lois (1748) étudie les différentes
formes de gouvernements existant dans le monde, en établit
une typologie et recommande la monarchie parlementaire.
Voltaire dans ses Lettres philosophiques (1734) fait également
l’éloge de la monarchie parlementaire après son séjour en
Angleterre.
Diderot dans l’Encyclopédie, dans ses Entretiens avec Catherine
II (1773) et dans ses Pages contre un tyran (1771) réfute la
monarchie de droit divin et appelle à une monarchie basé sur
le « consentement des peuples »
Rousseau dans Du contrat social (1762) se montre radicalement
contre la monarchie et en faveur de la démocratie républicaine.
4. Critique des mœurs
La remise en question du mode de gouvernement en
France s'étend naturellement à une critique, plus générale,
de la société et des mentalités françaises. Cette critique
s'exerce souvent par le biais prudent de la fiction, mettant
en scène la confrontation entre le monde occidental et
d'autres formes de civilisation : celles du Nouveau Monde
ou de l'Orient.
5. Critique des mœurs
Montesquieu dans les Lettres persanes (1721) recourt à la
fiction et à la satire comique pour critiquer la société, la
politique, la religion la justice ou la morale.
Diderot dans son Supplément au Voyage de Bougainville
(1772- publié en 1796) montre lui aussi la confrontation du
monde occidental avec d'autres civilisations : les Occidentaux
se révèlent incapables d'appréhender les habitants du nouveau
monde, et ces derniers ne peuvent adopter le système de
valeurs de leurs visiteurs tant il leur semble absurde.
Voltaire, dans son Essai sur les mœurs et l'esprit des nations
(1756), tente de réaliser un tableau des sociétés orientales, en
les comparants plus ou moins explicitement avec les sociétés
occidentales ; il reconnaît en l'Homme les traits universels de la
passion et de la raison.
6. Critique religieuse
Diderot, dans Discours d'un philosophe à un roi (1774, éd. 1796), et
dans la Religieuse (1760, éd. 1796), dénonce l'obscurantisme et la
volonté de pouvoir de l'Eglise catholique. Dans sa Lettre sur les
aveugles à l'usage de ceux qui voient (1749), il s'inscrit dans une
pensée résolument matérialiste et évolutionniste et, dans le Rêve de
d'Alembert (1769, éd. 1830), il affirme son athéisme.
Voltaire dans Zadig (1748), montre la confrontation des différentes
religions révélées en leur reprochant leur prosélytisme et leur
intolérance ; sa conviction s'oriente davantage vers le déisme. Il
s'interroge également sur la fragilité de la vie humaine exprime sa
révolte contre le dogme de la providence divine dans un Poème sur
le désastre de Lisbonne (1756) et prend parti contre les philosophies
optimistes dans Candide ou l'Optimisme (1759).
7. Critique religieuse
Rousseau, d'abord calviniste, puis converti au catholicisme, rejette lui
aussi les religions révélées pour adopter une religion intime, sincère
et personnelle, sans l'intermédiaire d'une Eglise officielle et de
dogmes ; il expose ses idées déistes dans nombre de ses ouvrages,
notamment l'Emile ou De l'éducation (1762) mais on en retrouve
également la trace dans son autobiographie, les Confessions
(posthumes, 1782).
8. L’entreprise encyclopédique
De 1751 à 1766, la vie de Diderot se confond avec l'histoire de
l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des
métiers.
Cette œuvre monumentale, en 17 volumes de textes et 11 volumes
d’illustrations (initialement prévus pour tenir en 10 volumes de textes
et 2 d’illustrations), est le fruit du travail de 160 collaborateurs sous la
direction de Diderot et d’Alembert.
les idées des lumières sont mises en avant sous la plume de
Voltaire, de Montesquieu, de Rousseau, du chevalier de Jaucourt, la
recherche appliquée que représente l'Histoire naturelle de Buffon, le
matérialisme d'Helvétius (Claude-Adrien Schweitzer) et du baron
d'Holbach.
cette œuvre est tout à fait révélatrice d'un siècle où la pensée
scientifique et philosophique bouleverse les convictions passées.
9. Le Débat nature vs culture
La plupart des auteurs des Lumières, tout en célébrant la nature et
le mythe du « bon sauvage », figure d'un Homme dont les mœurs
et la morale sont en harmonie avec la nature, se prononcent
majoritairement pour le progrès des arts et des techniques, dont ils
espèrent qu'il va améliorer la vie du peuple.
Montesquieu, conscient des dangers liés aux arts et aux techniques,
s'exprime pourtant lui aussi en leur faveur : le travail, la prospérité
économique, la libre concurrence, le luxe, lui semblent en effet des
moyens d'améliorer la vie des gens.
Auteur de l'article « Luxe » de l’Encyclopédie, Voltaire fait avec
insolence, dans un poème satirique célèbre intitulé « le Mondain »,
l'éloge d'un bonheur tout à la fois intellectuel et sensuel, fondé sur
le progrès des arts et sur le luxe.
10. Le Débat nature vs culture
Diderot, dans son Supplément au Voyage de Bougainville, se plaît
pour sa part à souligner le ridicule des mœurs occidentales, sans
fondements solides, et à louer la sagesse des Tahitiens, qui vivent
conformément à la nature. Cependant dans l’Encyclopédie, il loue la
maîtrise de la nature aux fins d'améliorer le confort matériel des
Hommes.
Jean-Jacques Rousseau va s’opposer au culte du progrès et du luxe.
Son Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les
hommes (1755) célèbre la pureté de l'état de nature et dénonce la
corruption de l'Homme, naturellement bon, par la société et
notamment par la création de la propriété. Il dénonce la mollesse
des peuples dits civilisés, allant jusqu'à condamner le théâtre, et ne
cesse de célébrer le mythe du « bon sauvage » et un bonheur
originel, conforme à l'ordre naturel et marqué par la simplicité et la
vertu (Discours sur les sciences et les arts, 1750).