1. Note d’intention de Christophe Vindis - Réalisateur
C'est en faisant un film sur le rugby des champs et celui des cités, que j'ai rencontré pour la
première fois Henry Broncan, professeur d'histoire au collège de Samatan et entraineur de
l'équipe de rugby d'Auch. Après avoir était joueur puis entraineur de l'entente rugbystique
Lombez-Samatan, il venait de quitter celle-ci pour frotter sa carcasse d'ancien demi de mêlée
au niveau sportif supérieur. De cette rencontre et de l'entretien qui en suivi, je compris au bout
de deux phrases que je tenais devant moi un homme nourri de passion et d'humanité.
Quelqu'un de rare, qui est capable de parler de rugby et d'histoire avec la même passion, qui
est capable de parler des hommes et de la vie avec la même humanité.
Plus tard j'ai eu le privilège de le côtoyer durant toute une saison quand il entraîna le club
d'Agen en proD2. Un lien particulier s'est ainsi tissé entre nous. De la complicité, mais surtout
de la confiance.
Depuis une bonne dizaine de films, le rugby est devenu pour moi, après avoir été un jeu
formateur, un terrain d'investigation documentaire. Et il me sert de prisme pour aborder des
problématiques sociales et culturelles qui, c'est en tout cas mon ambition, servent à
questionner le spectateur et son époque. Ainsi tirer le portrait d'un homme comme Henry
Broncan, c'est bien sûr s'interroger sur l'évolution du rugby mais aussi sur l'évolution de notre
monde. La parole d'Henry est intelligente. C'est quelqu'un qui croit. Et c'est quelqu'un qui
s'interroge. A 69 ans, c'est un entraineur qui a des convictions et c'est un homme qui continue
à se poser des questions.
Pas d'hagiographie au programme, mais faire le portrait d'Henry Broncan, c'est avoir le
privilège d'interroger quelqu'un à la fois simple et complètement atypique. Quelqu'un qui peut
vous parler d'Histoire comme on analyse un match de rugby, et qui prendra à témoin l'Histoire
pour vous expliquer son rugby. De son métier d'enseignant, il gardera à perpétuité son sens de
la pédagogie. Et une certaine devise : qu’il faille apprendre à un enfant (à un joueur) à devenir
le héros de sa propre légende !
Ce qui, par dessus tout, motive mon envie de faire ce film, c'est la personnalité profonde
d'Henry. Il aime les vrais gens, la terre, les choses simples, celles qui l'ont toujours nourri. Il
n'y a pas d'artifice, de faux semblants. Et même s'il parait quelques fois solitaire et réservé,
c'est bien le sens du partage qui motive son destin.
Les blessures profondes de la vie lui ont imposé sa philosophie. Personne, jamais, ne
l'obligera à quoi que ce soit qui puisse aller à l'encontre de son sentiment d'homme libre. Pour
toujours, il refusera de ne pas être maître de son destin et de ses actes.
Henry Broncan, c'est en quelque sorte un personnage de Western de ma jeunesse. Il ressemble
à cet homme mystérieux, héros récurrent, au visage couturé et tanné qui surgit dans une ville
en proie au doute... Il apporte la pluie aux campagnes qui en manquent, récolte son dû puis
disparaît...