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Interaction entre les départements
Compliance et RH du
Groupe GDF SUEZ en cas de
lancement d’une alerte éthique
D.E.S. en Ressources Humaines
Travail de fin d’études
Janvier 2015 (année d’études 2011 – 2012)
Barbara MUELLER-LEGRAN
Table des matières Page 1 sur 51
Table des matières
Table des matières ..................................................................................1
I. Introduction ....................................................................................4
II. Présentation du Groupe GDF SUEZ....................................................6
1. Historique.................................................................................................................6
2. Organisation.............................................................................................................7
3. Marché .....................................................................................................................7
4. Actionnariat..............................................................................................................8
5. L’éthique du Groupe ................................................................................................8
III. Contexte juridique.........................................................................10
1. Droit britannique....................................................................................................10
1.1 Public Interest Disclosure Act et Employment Rights Act......................... 10
1.2 United Kingdom Bribery Act...................................................................... 11
1.3 Enterprise and Regulatory Reform Act ..................................................... 12
2. Droit américain (USA).............................................................................................12
2.1 False Claim Act .......................................................................................... 13
2.2 Sarbanes Oxley Act.................................................................................... 14
2.3 Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act ............. 15
3. Compétences juridictionnelles...............................................................................16
IV. Le lancement d’alerte....................................................................18
1. Qu’est-ce que le lancement d’alerte ?...................................................................18
2. Avantages d’une Politique de Lancement d’Alerte ...............................................18
3. Inconvénients d’une Politique de Lancement d’Alerte .........................................19
4. Risques liés à l’absence de Politique de Lancement d’Alerte................................20
Table des matières Page 2 sur 51
V. Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ.............................22
1. Situation actuelle .................................................................................................. 22
2. Points d’amélioration............................................................................................ 23
3. Hotline externe dédiée au lancement d’alerte..................................................... 24
3.1 Les entreprises spécialisées ...................................................................... 24
3.2 Les cabinets d’avocats............................................................................... 25
3.3 Option retenue par le Groupe GDF SUEZ ................................................... 25
4. Projet de Politique de Lancement d’Alerte au sein du Groupe GDF SUEZ............. 26
VI. Le lanceur d’alerte.........................................................................28
VII. Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte ..................................31
1. Les RH, interlocuteurs de proximité et facilitateurs..............................................31
2. Les RH, responsables de la prévention et de la gestion des risques psycho-
sociaux....................................................................................................................32
2.1 Qu’est-ce que le burn-out ? ...................................................................... 32
2.2 Quels sont les profils à risques ?............................................................... 33
2.3 Quels sont les symptômes du burn-out ? ................................................. 33
2.5 Comment prévenir le burn-out chez le lanceur d’alerte?......................... 35
2.6 Risques et conséquences pour une entreprise d’avoir un collaborateur en
burn-out .................................................................................................... 35
3. Les RH, gardiennes des valeurs éthiques de l’entreprise ......................................36
3.1 Recrutement.............................................................................................. 37
3.2 Accueil des nouveaux collaborateurs........................................................ 37
3.3 Formation.................................................................................................. 37
3.4 Évaluation.................................................................................................. 38
3.5 Marketing RH (employer branding) .......................................................... 38
3.6 Entretien de sortie..................................................................................... 38
Table des matières Page 3 sur 51
4. Les RH, gestionnaires des contrats de travail ........................................................39
4.1 Définition................................................................................................... 39
4.2 Procédure.................................................................................................. 40
5. Les RH, gardiennes de la protection de la vie privée.............................................41
VIII. Conclusion.....................................................................................43
IX. Bibliographie .................................................................................45
X. Dédicace et remerciements ...........................................................49
I - Introduction Page 4 sur 51
I. Introduction
Le Groupe GDF SUEZ (ci-après « le Groupe GDF SUEZ » ou « le Groupe » ou « GDF SUEZ »),
acteur-clé au niveau mondial dans le secteur de l’énergie, souhaite mettre en place
une politique en matière de lancement d’alerte, principalement pour les questions de
corruption et de violation des règles éthiques.
Ces questions couvrent à la fois un aspect juridique, puisqu’il s’agit de dénoncer des
actes qui violent les lois nationales et internationales, et un aspect de ressources
humaines, puisque les comportements dénoncés sont contraires aux valeurs et à
l’éthique du Groupe.
GDF SUEZ a fait le choix de confier le pilotage de cette politique à son département
Compliance de la Direction juridique (ci-après « la DJ Compliance »). Le département
Ressources Humaines (ci-après « les RH ») y est logiquement associé en vertu de ce qui
vient d’être expliqué.
L’objet de ce travail porte sur l’interaction entre la DJ Compliance et les RH du Groupe
GDF SUEZ en cas de lancement d’alerte en matière de corruption et de violation des
règles éthiques.
Nous nous attacherons d’abord à présenter brièvement le Groupe, ses activités, son
organisation et son éthique. Nous exposerons ensuite le contexte juridique dans lequel
GDF SUEZ évolue et nous nous focaliserons particulièrement sur les législations
britannique et américaine. Par après, nous définirons ce qu’est le lancement d’alerte
et cadrerons son étendue. Nous analyserons également la situation actuelle en
matière de lancement d’alerte chez GDF SUEZ, ses améliorations possibles et ses
perspectives. Nous nous attacherons en outre à parler du lanceur d’alerte et des
difficultés qu’il rencontre dans sa démarche. Nous examinerons par ailleurs le rôle des
RH dans le cas d’un lancement d’alerte, ses limites et ses perspectives. Enfin, nous
verrons comment les départements Compliance et RH peuvent interagir en cas de
I - Introduction Page 5 sur 51
lancement d’alerte pour satisfaire aux exigences légales et éthiques auxquelles le
Groupe est soumis.
II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 6 sur 51
II. Présentation du Groupe GDF SUEZ
GDF SUEZ est un groupe français actif dans les secteurs de l’électricité, du gaz et de
l’environnement. Présent dans 70 pays, il emploie plus de 147’000 personnes à travers
le monde et offre ses services aux particuliers, aux collectivités et aux entreprises. Son
chiffre d’affaires pour l’année 2013 s’élevait à 81.3 milliards EUR. Le groupe est coté
aux bourses de Bruxelles, Paris et Luxembourg. 1
1. HISTORIQUE
Les origines du Groupe GDF SUEZ remontent, en ce qui
concerne sa présence en Belgique, au XIXème
siècle avec la
COMPAGNIE MEEUS qui, déjà avant l’indépendance de la
Belgique, dotait les rues de Bruxelles d’un éclairage public
au gaz et distribuait le gaz aux particuliers. Au début du
XXème
siècle, à la suite de divers rapprochements, rachats, ou prises de participation,
une nouvelle société fut créée: la CENTRALE GAZ ET ELECTRICITÉ. Le groupe d’alors étendit
son activité à la production et à l’exploitation de tramways et des chemins de fer
vicinaux (TRACTIONEL) ainsi qu’à l’électrification de l’éclairage public (ELECTROBEL) tant en
Belgique qu’à l’étranger (citons entre autres les villes d’Odessa, Bangkok, Le Caire,
Izmir, etc.). Après la Seconde Guerre mondiale, suivie de la fermeture progressive des
charbonnages et du choc pétrolier des années 1970, les centrales électriques belges
durent se tourner vers un autre combustible: l’énergie nucléaire. C’est ainsi que les
centrales de Doel et de Tihange furent construites. En 1986, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE DE
BELGIQUE (SGB) initia la fusion des deux principaux groupes travaillant dans les secteurs
de l’électricité et du gaz: ELECTROBEL et TRACTIONEL. La société issue de l’opération fut
appelée TRACTEBEL. Deux ans plus tard, l’arrivée de SUEZ dans le capital de la SGB
recentra les activités du groupe, désormais SUEZ-TRACTEBEL, sur son métier de base,
1
Rapport d’activité 2013.
II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 7 sur 51
l’énergie. Aujourd’hui encore, la synergie gaz-électricité constitue toujours l’axe
majeur de la stratégie de GDF SUEZ en Belgique.2
En 2008, les assemblées générales des actionnaires de GAZ DE FRANCE et SUEZ
approuvèrent la fusion des deux groupes pour donner naissance à GDF SUEZ.3
2. ORGANISATION
4
Le Groupe est divisé en cinq branches:
• Branche Energie Europe (BEE): gestion d’énergie et trading, production
d’électricité, fourniture en gaz naturel, marketing et ventes (p.ex. ELECTRABEL);
• Branche Energie International (BEI): production d’électricité, distribution et
fourniture de gaz et d’électricité (p.ex. INTERNATIONAL POWER);
• Branche Global Gaz & GNL (B3G): exploration et production, gestion du
portefeuille de gaz naturel liquéfié;
• Branche Infrastructures (BI): infrastructures de grands transports de gaz,
terminaux de GNL en France et à l’international, réseau de distribution de gaz en
France;
• Branche Energie Services (BES): gestion de réseaux urbains, gestion
d’installations énergétiques industrielles et tertiaires, offres multi techniques
complètes (p.ex. TRACTEBEL ENGINEERING, FABRICOM).
À ces cinq branches, s’ajoute le Centre qui abrite les fonctions transverses, telles que
les départements financier, RH et juridique entre autres. C’est à la Direction juridique
Centre qu’est attaché le département Compliance.
3. MARCHÉ
5
Le Groupe GDF SUEZ occupe une place de premier rang dans trois métiers porteurs:
2
Plus de 150 ans de présence dans l’énergie en Belgique, Recherches documentaires réalisées par
René BRION et Jean-Louis MOREAU, éd. GDF SUEZ, 2011.
3
150 ans de présence dans le monde: l’énergie partagée, Recherches documentaires réalisées par
René BRION et Jean-Louis MOREAU, éd. PC, Paris, 2011.
4
Présentation de GDF SUEZ, 2 août 2012.
5
Présentation de GDF SUEZ, op.cit.
II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 8 sur 51
• Électricité: premier producteur indépendant mondial et premier producteur
mondial d’électricité non nucléaire;
• Gaz naturel: deuxième acheteur de gaz naturel en Europe, troisième importateur
de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le monde, premiers réseaux de transport et de
distribution en Europe;
• Services: premier fournisseur de services à l’efficacité énergétique et
environnementale en Europe, deuxième fournisseur de services de l’eau et de
propreté dans le monde.
4. ACTIONNARIAT
L’actionnariat du Groupe GDF SUEZ se compose comme suit6
:
5. L’ÉTHIQUE DU GROUPE
7
Conformément à ses valeurs et à ses engagements, GDF SUEZ a pour ambition d’agir
dans le respect des lois et des réglementations en vigueur dans les pays où il est
6
http://www.gdfsuez.com/actionnaires/action-gdf-suez/structure-de-lactionnariat/, le 22.12.2014.
7
http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/, le 26.12.2014.
II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 9 sur 51
présent, et ce en toutes circonstances. Pour atteindre cet objectif, le Groupe a mis en
place une politique d’éthique qui accompagne au quotidien les décisions stratégiques,
le management et les pratiques professionnelles du Groupe. Il s’est également doté
d’outils nécessaires pour mesurer la conformité à cet engagement.
L’éthique consiste en l’application concrète de ce qui est moralement acceptable ou
conforme aux valeurs dans une situation donnée. La compliance regroupe l’ensemble
des dispositifs à mettre en œuvre pour parvenir à l’objectif de conformité. Éthique et
compliance constituent ainsi les deux faces d’une même réalité, qui concerne tous les
collaborateurs de GDF SUEZ. Par conséquent, leurs principes doivent être portés à la
connaissance de tous à travers une organisation ad hoc et des référentiels existants.
GDF SUEZ fonde sa politique d’éthique et de compliance sur quatre principes d’action
simples et précis:
• Agir en conformité avec les lois et les réglementations
En toutes circonstances, les collaborateurs du Groupe doivent observer les
réglementations internationales, fédérales, nationales, locales ainsi que les règles de
déontologie professionnelle relatives à leurs activités.
• Ancrer une culture d’intégrité
L’intégrité prescrit d’éviter tout conflit entre intérêts personnels et intérêts du Groupe.
Elle forge la conviction que l’on a le devoir de respecter certaines valeurs. Elle crée
ainsi un climat de confiance et constitue un bouclier contre les pratiques de
corruption.
• Faire preuve de loyauté et d’honnêteté
Les collaborateurs tiennent leurs engagements en temps et en heure. Chaque fois
qu’ils communiquent, avec l’extérieur comme en interne, ils le font de bonne foi, dans
un esprit constructif, avec le souci d’une information sincère, précise et complète.
• Respecter les autres
Ce principe recouvre notamment le respect des droits des personnes, de leur dignité et
de leurs singularités, ainsi que le respect des cultures. Il s’applique également aux
biens matériels et immatériels appartenant à autrui.
III – Contexte juridique Page 10 sur 51
III. Contexte juridique
Actif dans 70 pays à travers le monde, le Groupe GDF SUEZ est soumis à une multitude
de législations régionales, nationales et internationales.
Par sa présence aux États-Unis et en Grande-Bretagne, le Groupe GDF SUEZ voit ses
activités régies par les droits américain et britannique en matière de corruption8
qui
reconnaissent comme légitime la dénonciation, par des systèmes d’alerte et de
signalement, d’illégalités, de risques ou de comportements contraires à l’éthique. Dans
ce travail, nous nous pencherons particulièrement sur ces deux législations qui sont les
plus avancées en matière de lancement d’alerte et de lutte contre la corruption et qui
inspireront la Politique de Lancement d’Alerte que le Groupe souhaite mettre en place.
1. DROIT BRITANNIQUE
1.1 Public Interest Disclosure Act et Employment Rights Act9
Les divulgations sont protégées par le Public Interest Disclosure Act de 1998 (ci-après
« PIDA ») et par l’Employment Rights Act de 1996 (ci-après « ERA ») quand le lanceur
d’alerte est un employé actuel ou passé de l’entreprise où ont été commis les faits
dénoncés.
Le concept de lancement d’alerte est issu du PIDA et de l’ERA qui prévoient la
protection des lanceurs d’alerte de tout traitement préjudiciable de la part de leur
employeur (licenciement, représailles, harcèlement) et qui définissent la notion de
travailleur de façon assez large.
Pour bénéficier de la « protection » du PIDA et de l’ERA, le travailleur doit introduire
de bonne foi une divulgation protégée (protected disclosure) auprès de son employeur,
d’un avocat, d’une personne de confiance ou toute autre personne désignée.
8
Ces droits s’appliquent directement aux entités implantées tant au Royaume-Uni qu’aux États-Unis;
de plus ils s’appliquent du fait de leur possible caractère extraterritorial.
9
A global guide to Whislteblowing laws, NORTON ROSE FULBRIGHT, août 2014.
III – Contexte juridique Page 11 sur 51
Pour être protégée par le PIDA et l’ERA, la divulgation doit:
• Être une véritable information, à savoir porter sur des faits, plutôt qu’une
vague allégation.
• Porter sur un des six manquements suivants: (i) infraction pénale; (ii) infraction
à une obligation légale; (iii) atteinte à la justice; (iv) danger pour la santé et la
sécurité d’autrui; (v) dégâts environnementaux; (vi) rétention délibérée
d’informations liées aux points (i) à (v) précités.
• Être faite par une personne qui a des solides raisons de croire que (i)
l’information divulguée porte sur un des six manquements évoqués ci-dessus;
(ii) la divulgation est d’intérêt public; (iii) les faits divulgués sont
substantiellement fondés.
1.2 United Kingdom Bribery Act
La mise en place de politiques de lancement d’alertes est un des six principes établis
dans les lignes directrices du United Kingdom Bribery Act (ci-après « UKBA »), loi
britannique relative à la prévention et à la répression de la corruption. L’UKBA
considère le défaut de prévention de la corruption par une entreprise comme une
infraction autonome. Il inclut des dispositifs d’alerte accessibles pour les parties
internes et externes à l’entreprise. Au-delà des ressortissants, des entreprises et du
territoire britanniques, l’UKBA a des effets extraterritoriaux, dès lors que l’un des faits
s’est produit sur le territoire du Royaume-Uni ou qu’il est commis, dans le monde, par
une personne ayant une proche connexion avec le Royaume-Uni (citoyenneté, siège ou
résidence britannique, parties tierces). Le délit de défaut de prévention de la
corruption est applicable à toute personne morale pratiquant une activité, même
partielle, au Royaume-Uni.10
Selon le droit britannique, la mise en place d’une politique de lancement d’alerte n’est
pas une obligation légale. Elle est cependant indiquée en fonction de l’évaluation des
risques de l’entreprise. La première question à se poser est de déterminer à quels
10
Le droit d’alerte en perspective: 50 années de débats dans le monde, Nicole-Marie MEYER, in AJDA n°
39/2014 du 24.11.2014.
III – Contexte juridique Page 12 sur 51
risques l’entreprise est exposée en matière de corruption. La deuxième question est de
savoir si la mise en place d’une politique contribuera à minimiser ces risques et à
découvrir la corruption, où qu’elle soit.
1.3 Enterprise and Regulatory Reform Act11
En juin 2013, la révision de l’Enterprise and Regulation Reform Act a réformé la loi en
matière de lancement d’alerte et a introduit les modifications suivantes:
• Les informations divulguées ne seront désormais protégées que si le travailleur a
un motif raisonnable de croire que la divulgation est dans l'intérêt public.
• La divulgation d’informations ne devra plus être faite obligatoirement de bonne
foi; cependant, si la divulgation est faite de mauvaise foi, la récompense
accordée sera réduite d’un quart du montant.
• Les employeurs seront indirectement responsables de leurs employés qui
commettraient des actions de représailles, de harcèlement ou tout type de
préjudice à l’égard d’un collègue lanceur d’alerte, sauf s’ils parviennent à
démontrer qu’ils ont pris toutes les mesures pour prévenir ce type d’agissement.
Le travailleur qui a soumis son collègue lanceur d’alerte à des représailles peut
être tenu pour responsable.
En résumé, on peut considérer que de nos jours, en droit britannique, avoir une
politique de lancement d’alerte doit être considéré comme une position « par
défaut »: l’entreprise qui n’en a pas doit s’attendre attendre à justifier les excellentes
raisons qui ont motivé son choix !
2. DROIT AMÉRICAIN (USA)
Aux États-Unis, la question du lancement d’alerte est consignée dans plusieurs
instruments juridiques dont nous allons envisager les principaux ci-après.
11
http://employmentlawblog.fieldfisher.com/category/enterprise-and-regulatory-reform-act-2013, le
04.01.2015.
III – Contexte juridique Page 13 sur 51
2.1 False Claim Act
Le False Claim Act (ci-après « FCA ») vise à protéger l'État contre la fraude par des
entreprises impliquées dans tout contrat ou programme financé par le gouvernement
fédéral américain, à l’exception de la fraude fiscale. Quiconque a connaissance d’une
fraude passée ou présente commise au détriment du gouvernement fédéral peut
engager des poursuites au nom du gouvernement.
En outre, en vertu du FCA, tout individu qui collabore à une poursuite judiciaire peut
recevoir tout ou partie de l’amende imposée. Le FCA prévoit d’accorder à ceux qui
rapporteront les faits des récompenses de 10 à 30 % des sommes recouvertes.
Un lanceur d’alerte a rapporté au Department of Justice américain (ci-après « DoJ »)
que GLAXOSMITHKLINE avait distribué entre 2001 et 2005 des médicaments frelatés
fabriqués dans une usine portoricaine aujourd’hui fermée. L’entreprise
pharmaceutique britannique a été condamnée en 2010 à une amende de 750 millions
USD (env. 630 millions EUR) et le lanceur d’alerte a été récompensé pour son action à
hauteur de 96 millions USD (env. 80 millions EUR).12
Le FCA vise également à sanctionner une entreprise cherchant à intimider ou harceler
un lanceur d’alerte qui dénoncerait ses malversations.
La protection que le FCA accorde au lanceur d’alerte consiste en l’interdiction de
licenciement, harcèlement, représailles en tout genre. Le lanceur d’alerte a droit à tout
le secours nécessaire pour une indemnisation complète, y compris la réintégration, le
paiement d’un double pécule de retour, le remboursement des frais de justice et
d’avocat qu’il aurait encourus.13
12
http://business-ethics.com/2010/10/26/1740-glaxosmithkline-to-pay-750-million-fine-
whistleblower-to-get-96-million/, le 01.01.2015.
13
A global guide to Whistleblowing laws, op.cit.
III – Contexte juridique Page 14 sur 51
Ainsi la directrice du trading de
PARADIGM CAPITAL MANAGEMENT INC.,
une société américaine de conseil
en hedge funds, avait dénoncé à la
Security and Exchange Commission
(ci-après la « SEC »), le
« gendarme » américain de la
bourse, des activités illégales de
son employeur. À la suite de cela,
l’employée avait été rétrogradée et dépouillée de ses responsabilités de supervision.
En juin 2014, la SEC a condamné l’entreprise à 2.2 millions USD d’amende (env. 1.8
million EUR) pour avoir pris des mesures de rétorsion à l’égard de son employée
lanceuse d’alerte.14
2.2 Sarbanes Oxley Act
En 2001, les USA assistaient à la faillite d’ENRON, entreprise qui
était alors le numéro un mondial du courtage en énergie et
septième entreprise américaine. L’enquête menée par la SEC a
révélé que les comptes de l’entreprise avait été maquillés, des
sociétés hors bilan avaient été créées dans des paradis fiscaux,
des dettes avaient été dissimulées, etc. Alors que les dirigeants encaissaient des
centaines de millions de dollars en exerçant leurs stock-options et en vendant leurs
actions, des milliers d’emplois étaient perdus et les investissements de tous les autres
petits actionnaires partaient en fumée. Un des constats qui a été fait suite à la crise
d’ENRON était que la faiblesse du système de gouvernance d’ENRON avait permis
l’apparition de comportements non éthiques et n’avait pas su jouer son rôle de « chien
de garde »: mettre à jour les problèmes et les corriger avant qu’il ne soit trop tard.15
14
http://www.bloomberg.com/news/2014-06-16/sec-fines-new-york-advisor-for-whistle-blower-
retaliation.html, le 01.01.2015.
15
http://www.adma.qc.ca/Publications/Info-ADMA/InfoADMA-Mars-
2012/Enron%2010%20ans%20plus%20tard.aspx, le 26.12.2014.
III – Contexte juridique Page 15 sur 51
À la suite de ce scandale, le législateur américain a adopté en 2002 le Sarbanes-Oxley
Act (ci-après le « SOX »), loi sur la réforme de la comptabilité des sociétés cotées et la
protection des investisseurs. Le SOX décourage les comportements non éthiques dans
les entreprises en rendant plus sévères les amendes et peines d’emprisonnement des
contrevenants. Le SOX interdit l’accès à la cotation boursière aux USA aux sociétés
dont le comité d’audit n’a pas établi de procédure pour la réception, la conservation et
le traitement de plaintes reçues par l’entreprise relatives à des questions de
comptabilité, de contrôle interne ou d’audit.
2.3 Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act16
Le Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act (ci-après le « DFA ») a
trois clauses distinctes en matière de lancement d’alerte.
• Le DFA protège les employés qui rapportent une violation du Commodity
Exchange Act17
à la Commodity Futures Trading Commission (ci-après « CTC »)
ou qui collaborent à une enquête ou une action judiciaire ou administrative de
la CTC.
• Le DFA couvre les lanceurs d’alerte qui fournissent à la SEC des renseignements
liés à une violation du droit des valeurs mobilières ou qui lancent ou
collaborent à une enquête menée par la SEC. Le DFA protège aussi les lanceurs
d’alerte qui ont fourni des renseignements réclamés par le SOX, ou par toute
autre loi soumise à la juridiction de la SEC.
• Le DFA protège l’activité du lanceur d’alerte en vertu du Consumer Financial
Protection Act (ci-après « CFPA ») qui protège de tout licenciement ou toute
discrimination un employé dans le secteur financier qui a contribué de manière
directe ou indirecte à une enquête liée à la gestion ou la mise en œuvre du
CFPA ou de toute autre clause légale qui est soumise à la juridiction du Bureau
of Consumer Financial Protection.
16
A global guide to Whislteblowing laws, op.cit.
17
Le Commodity Exchange Act prévoit la règlementation au niveau fédéral de toutes les activités de
matières premières et de trading et requiert que les futures options de matières premières soient
négociées sur des marchés régulés. (http://en.wikipedia.org/wiki/Commodity_Exchange_Act, le
06.01.2015).
III – Contexte juridique Page 16 sur 51
Ainsi en septembre 2014, la SEC a accordé une récompense record de 30 millions USD
(env. 25 millions EUR) à un lanceur d’alerte anonyme qui vit en dehors des États-Unis.
L’homme avait fourni des informations cruciales qui avaient permis à la SEC de mettre
à jour une fraude qu’il aurait été impossible de détecter autrement.18
3. COMPÉTENCES JURIDICTIONNELLES
Pour éviter toute confusion, il est bon de rappeler qu’en cas de fraude, le premier droit
applicable est celui du pays où l’infraction a été commise.
Imaginons que Monsieur QUATRÉDEUSIX
19
, citoyen français
employé aux Pays-Bas, est inculpé de corruption par un juge
néerlandais. Il sera d’abord jugé aux Pays-Bas. S’il est reconnu
coupable, il devra encourir la peine prononcée
(emprisonnement et/ou amende).
Si par contre le juge d’instruction néerlandais décide d’abandonner les poursuites
faute d’éléments à charge, la justice française ou britannique pourrait se saisir du
dossier, mener une instruction et, en cas d’indices suffisants de culpabilité, juger
Monsieur QUATRÉDEUSIX.
En vertu du principe Non bis in idem, l'article 50 de la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne dispose que « nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement
en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans
l'Union européenne par un jugement pénal définitif conformément à la loi ».20
Cela
signifie que Monsieur QUATRÉDEUSIX ne peut être jugé qu’une seule fois par le tribunal
d’un État membre de l’Union européenne.
En revanche, les États-Unis ne sont pas signataires de la Charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne. Si un élément constitutif de l’infraction
18
http://www.bbc.com/news/business-29316077, le 02.01.2015.
19
http://www.asterix.com/asterix-de-a-a-z/les-personnages/quatredeusix.html, le 02.01.2015.
20
http://fr.wikipedia.org/wiki/Non_bis_in_idem, le 06.01.2015.
III – Contexte juridique Page 17 sur 51
présente un rattachement suffisant avec les États-Unis (p.ex.: le pot-de-vin a été payé
aux États-Unis, le pacte de corruption a été conclu aux États-Unis ou par téléphone
avec une personne au moins se trouvant sur le territoire américain, etc.), le DoJ
pourrait poursuivre Monsieur QUATRÉDEUSIX et le condamner.
Au total, Monsieur QUATRÉDEUSIX pourrait être jugé et condamné deux fois !
Si l’entité employant Monsieur QUATRÉDEUSIX aux Pays-Bas est présente aux États-Unis,
et que le pacte de corruption a été commis par Monsieur QUATRÉDEUSIX au bénéfice de
celle-ci, l’entité batave pourra également être poursuivie par le DoJ et par le juge
néerlandais et faire l’objet d’une double condamnation, le principe non bis in idem ne
trouvant pas son application.
IV – Le lancement d’alerte Page 18 sur 51
IV. Le lancement d’alerte
1. QU’EST-CE QUE LE LANCEMENT D’ALERTE ?
Le lancement d’alerte est l’action par laquelle un employé rapporte
une suspicion de malversation liée au milieu professionnel dans
lequel il évolue. L’objet de cette remontée d’information peut
concerner l’entreprise elle-même, un autre employé – qu’il ait le
statut d’employé, de cadre ou de cadre dirigeant –, un fournisseur ou toute autre
partie prenante.
Lorsque les faits dénoncés par le lanceur d’alerte relèvent d’une possible violation de
la loi ou de toute affaire grave qui pourrait mettre en cause la responsabilité civile ou
pénale de l’entreprise, cette dernière doit se demander si elle mènera son enquête en
recourant à des conseillers internes ou externes et si elle doit rapporter les faits
dénoncés à des instances officielles, répondant ainsi à une exigence légale.
Les alertes concernent généralement les sujets suivants:
• Soupçon d’infraction pénale;
• Soupçon de corruption;
• Non-conformité avec la loi applicable;
• Dommages environnementaux;
• Soupçon d’infraction à l’éthique;
• Attitude à l’égard d’employés (e.g. intimidation, harcèlement);
• Discrimination;
• Dissimulation délibérée d’informations relatives aux sujets précités.
2. AVANTAGES D’UNE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE
Une Politique de Lancement d’Alerte (ci-après une « PLA ») met en place la procédure
que devra suivre un employé qui souhaite rapporter des malversations.
IV – Le lancement d’alerte Page 19 sur 51
Ainsi qu’il a déjà été dit, avoir une PLA n’est pas une contrainte légale. Cependant, aux
yeux des autorités britanniques et américaines, la PLA constitue la composante
matérielle d’un programme adéquat de compliance et fournit plusieurs avantages:
• Les problèmes peuvent être identifiés tôt, de telle sorte que l’entreprise a
l’occasion de les traiter avant que les autorités ou les médias ne soient alertés.
• Les employés sont encouragés à recourir aux canaux internes pour enregistrer
leurs plaintes et préoccupations au lieu de recourir à la justice, à la presse ou aux
réseaux sociaux.
• Les employés sont encouragés à rapporter des problèmes qu’il est dans l’intérêt
de l’entreprise de connaître et de corriger. Avoir une PLA permet à l’entreprise
d’identifier facilement et rapidement des méfaits: c’est particulièrement
important lorsqu’il s’agit d’un comportement présumé criminel.
• Avoir une personne à qui rapporter des méfaits met les employés en confiance:
ils n’auront pas l’impression que leur démarche pourrait nuire à leur carrière,
surtout si les faits qu’ils dénoncent concernent leur supérieur hiérarchique
direct.
• Le risque pour l’entreprise d’encourir des amendes, des sanctions ou un
dommage de réputation est réduit.
• Ne pas avoir de PLA peut être perçu par les autorités administratives ou
judiciaires comme l’indicateur d’un programme de compliance pauvre ou faible.
• Dans le cadre d’un appel d’offre, des clients ou des organisations étatiques qui
mènent un audit préalable (« due diligence », en anglais) relatif à une entreprise
qui n’a pas de PLA auront tendance à se montrer défavorables à son égard.
3. INCONVÉNIENTS D’UNE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE
• Avoir une PLA et la rendre publique peut encourager des fauteurs de troubles ou
des employés revanchards à déposer des plaintes de manière malintentionnée
ou inconsidérée contre l’entreprise ou d’autres employés. L’entreprise doit
prendre le temps de faire le tri entre les fausses et les vraies dénonciations et
traiter ces dernières adéquatement.
IV – Le lancement d’alerte Page 20 sur 51
• La protection qu’accorde le droit britannique aux lanceurs d’alerte peut
encourager les abus pour les employés qui n’ont pas de véritable fait à dénoncer
mais qui souhaitent éviter temporairement un licenciement. En effet,
l’Employment Rights Act 1996 autorise tout employé qui est licencié pour avoir
dénoncé des malversations à intenter une action auprès de l’Industrial Tribunal
pour licenciement abusif.
C’est ce qui est arrivé au mécanicien d’un garage du
Kent qui s’était plaint auprès de sa direction de ce
que ses supérieurs hiérarchiques surfacturaient
certaines prestations. Quatre semaines plus tard,
l’homme était licencié pour « attitude négative au
travail ». En décembre 2014, le tribunal a reconnu le licenciement abusif et a
accordé au plaignant 46'000 GBP (env. 60'000 EUR) de compensation. En
revanche, le défenseur n’a pas été poursuivi pour ses escroqueries envers ses
clients car la compétence du tribunal ne s’étendait pas à enquêter sur ces
allégations.21
• La mise en place d’une PLA génère un coût en temps et en argent mais, si elle est
faite correctement, cela évitera les problèmes identifiés supra.
• Pour qu’une PLA fonctionne convenablement, la peur d’un employé d’être perçu
comme un « mouchard » par ses collègues, sa hiérarchie ou son employeur doit
être dépassée. Les barrières culturelles qui pourraient dissuader un employé de
recourir à la PLA doivent être comprises et un programme d’éducation doit être
mis en place pour les briser.
4. RISQUES LIÉS À L’ABSENCE DE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE
• Les entreprises qui n’ont pas de PLA claire courent le risque que leurs employés
préfèrent déposer leur plainte auprès d’un organe extérieur, comme la justice ou
les médias. Cela peut mener à une enquête formelle dans l’entreprise, avec des
risques de réputation extrêmement dommageables. Même s’il existe une PLA au
21
http://www.dailymail.co.uk/news/article-2861191/Whistleblowing-garage-mechanic-wins-46-000-
compensation-sacked-accused-bosses-overcharging-customers.html, le 02.01.2015.
IV – Le lancement d’alerte Page 21 sur 51
sein de l’organisation, le risque demeure que des employés craignent malgré
tout des représailles s’ils dénoncent des méfaits.
• Les autorités américaines et britanniques encouragent vivement les lanceurs
d’alerte à se présenter à elles. En l’absence d’encouragement de même nature
de la part d’une entreprise à recourir à ses propres instances, les employés
n’auront pas d’autre alternative que de s’adresser directement aux autorités
judiciaires.
• Aux États-Unis, en vertu du Dodd-Franck Act, le lanceur d’alerte qui a fourni aux
autorités des informations utiles à leur enquête est protégé et recevra un
pourcentage de l’amende infligée à l’entreprise sur base des faits qu’il aura
dénoncés.
• Le Royaume-Uni n’offre pas pour l’instant les mêmes incitants aux lanceurs
d’alerte mais des indices laissent penser que les autorités s’apprêtent à ouvrir le
débat sur l’opportunité d’accorder de tels avantages.
• Le droit britannique prévoit qu’un employé qui dénonce certains types de
méfaits dans l’intérêt général est protégé contre le licenciement. Si l’employé est
malgré tout licencié à cause de l’alerte qu’il a lancée, le montant de l’indemnité
que son employeur lui doit est illimité.
En 2010, le directeur d’un hôpital, qui avait été licencié après avoir dénoncé des
pratiques illégales commises par l’administration dont dépendait l’institution
hospitalière qu’il dirigeait, a démontré à la justice qu’il avait été victime d’un
licenciement abusif et a été indemnisé de 1.2 million GBP (env. 1.6 million
EUR)22
.
22
http://www.xperthr.co.uk/editors-choice/unfairly-dismissed-whistleblower-wins-gbp12-million-
compensation/104755/, le 02.01.2015.
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 22 sur 51
V. Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ
1. SITUATION ACTUELLE
Un dispositif d’alerte éthique existe déjà chez
GDF SUEZ. Le site internet du Groupe y
consacre une grande partie: « GDF SUEZ a mis
en place un dispositif d’adresse électronique
(ethics@gdfsuez.com) réservé à toutes les
personnes employées par lui, quel que soit leur statut d’emploi, leur permettant de
signaler des problèmes pouvant sérieusement affecter leur activité ou engager
gravement leur responsabilité. Il ne se substitue pas aux autres canaux d’alerte
existants (auprès de la hiérarchie, des représentants du personnel, du commissaire aux
comptes, d’une autorité publique…): il en est le complément. L’identité de l’utilisateur
du dispositif est traitée de manière confidentielle sous peine de sanctions en cas de
rupture de la confidentialité. Le responsable du dispositif de signalement est le
déontologue du Groupe assisté du Directeur en charge de l’Ethique et Compliance
Groupe. »23
Un incident éthique peut être rapporté selon les manières suivantes:
• La ligne hiérarchique du lanceur d’alerte;
• Le déontologue de la branche à laquelle appartient le lanceur d’alerte, au moyen
d’un courrier postal ou électronique, d’un entretien téléphonique ou de visu,
avec ou sans rendez-vous (pratique de la « porte ouverte »);
• Le déontologue du Groupe, au moyen d’un courrier postal ou électronique, d’un
entretien téléphonique ou de visu, avec ou sans rendez-vous (pratique de la
« porte ouverte »);
• L’adresse électronique dédiée (ethics@gdfsuez.com).
23
http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/dispositif-de-mail-ethique/, le 26.12.2014.
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 23 sur 51
À la demande du lanceur d’alerte, les informations qu’il aura fournies pourront être
traitées confidentiellement.
2. POINTS D’AMÉLIORATION
• La pratique de la « porte ouverte » protège la confidentialité du lanceur d’alerte
et évite la peur des représailles. La protection pourrait être étendue en
recourant à un tiers de confiance soumis au secret professionnel et au « legal
privilege24
».
• Le lancement d’alerte devrait être encouragé en étant présenté comme un
composant de procédures de lutte contre la corruption. Les aspects culturels du
lancement d’alerte ne devraient pas être sous-estimés. Dans les pays anglo-
saxons, le lancement d’alerte est considéré positivement, alors que dans les pays
latins il est assimilé à de la délation. Ainsi la société française DUCROS a-t-elle vu
sa hotline dédiée à l’alerte rebaptisée « Allô Collabo » par ses salariés25
. La mise
en place réussie d’une PLA doit inclure ces données culturelles.
• Les lanceurs d’alerte ne doivent pas s’imaginer que la compliance est un simple
habillement de façade. Dès lors, il doit être rappelé fréquemment que la
politique de tolérance zéro pour les manquements à l’éthique est de rigueur.
• Les membres du département Audit & Risques seront encouragés à rapporter au
Comité de Compliance tout incident dont ils auraient connaissance. Cependant,
la divulgation de faits ne permet pas toujours au Comité de Compliance de se
faire une idée précise de leur étendue et de leur gravité. Un résumé accompagné
de documents probants devrait être mis à la disposition du Comité de
Compliance qui mobilisera toutes les ressources externes et internes nécessaires
pour enquêter sur un incident ou sa résolution.
• Afin de respecter la confidentialité des faits rapportés, le nombre de personnes
habilitées à recueillir les alertes devrait être limité le plus possible. Il n’est pas
24
Le « legal privilege » est un concept de common law qui vise à empêcher que toutes les
communications entre un professionnel du droit (avocat, auxiliaire de justice) et son client ne soient
divulguées sans l’autorisation du client. Le privilège est donc dans le chef du client et non du juriste.
Par facilité, nous utiliserons le terme anglais dans ce travail.
25
Quand le whistleblower est sifflé hors jeu par le système: expulsion puis résilience du footballeur
Jacques Glassmann, par Sandra CHARREIRE-PETIT et Julien CUSIN, 2006.
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 24 sur 51
nécessaire que le Directeur financier (CFO), le Directeur des communications
financières, les membres du Conseil d’administration, les membres du Comité
d’éthique et les auditeurs soient automatiquement informés de tous les
incidents rapportés.
• Un registre des incidents sera tenu et fera l’objet d’une protection renforcée
contre les hackers, les actions malintentionnées de tiers, etc.
• À supposer que le nombre d’incidents rapportés augmente significativement, le
Comité de Compliance devra définir une politique de traitement des incidents en
les classant par ordre de priorité: (1) crimes, infractions pénales qui pourraient
donner lieu à une accusation de complicité ou de dissimulation pour l’entreprise
ou pour ses dirigeants, communication d’informations privilégiées; (2) infractions
pénales qui ne peuvent pas donner lieu à une accusation de complicité ou de
dissimulation pour l’entreprise ou pour ses dirigeants, incidents qui ternissent
l’image du Groupe; (3) incidents qui ne sont pas des infractions pénales.
• Une non-sanction ou une sanction trop légère pourrait être considérée comme
une approbation de l’incident éthique rapporté. L’attention du Comité de
Compliance et des dirigeants du Groupe doit être attirée sur l’importance de
sanctionner les incidents éthiques.
• La mise en place d’une hotline externe dédiée au lancement d’alerte est la
dernière étape pour compléter la PLA de GDF SUEZ.
3. HOTLINE EXTERNE DÉDIÉE AU LANCEMENT D’ALERTE
Il existe des fournisseurs externes de service dédiés au lancement d’alerte: des
entreprises spécialisées ou des cabinets d’avocats.
3.1 Les entreprises spécialisées
Les entreprises spécialisées ont l’avantage d’être perçues comme étant indépendantes
de l’entreprise qui les engage. En effet le lanceur d’alerte veut être sûr que le
fournisseur lui doit l’obligation de – par exemple – garder son identité confidentielle.
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 25 sur 51
3.2 Les cabinets d’avocats
Les cabinets d’avocats donnent souvent l’impression de ne pas être tout à fait
indépendants, surtout s’ils travaillent depuis longtemps pour l’entreprise liée aux
pratiques douteuses que le lanceur d’alerte veut dénoncer.
En outre, les cabinets d’avocats sont au service de leur client qui pourrait demander
que l’identité du lanceur d’alerte soit révélée. Des conflits d’intérêt pourraient donc
survenir entre l’entreprise cliente du cabinet d’avocats et le lanceur d’alerte.
Il en va de même pour le legal privilege: les informations fournies par le lanceur
d’alerte au cabinet d’avocats ne sont pas couvertes par le legal privilege puisque le
privilège de divulguer l’information est dans le chef du client, à savoir l’entreprise. En
effet seules les informations échangées entre l’avocat et son client sont couvertes par
le legal privilege. Cela pourrait dissuader le lanceur d’alerte de se confier au cabinet
d’avocats.
Ces embûches pourraient être surmontées si le cabinet d’avocats pouvait traiter
comme son client le lanceur d’alerte et non pas l’entreprise. Mais il appartiendrait bien
sûr à l’entreprise de choisir le cabinet d’avocats et de régler ses honoraires. Cette
configuration rend les relations compliquées.
3.3 Option retenue par le Groupe GDF SUEZ
Le Groupe GDF SUEZ a retenu une solution médiane: ajouter deux acteurs aux
interlocuteurs existants. Si le lanceur d’alerte souhaite s’adresser à un interlocuteur
extérieur au Groupe, son premier contact sera un fournisseur de service externe par le
biais d’une hotline. Ce fournisseur de service transmettra ensuite l’alerte à un cabinet
d’avocats dont GDF SUEZ sera le client ce qui assurera l’avantage du legal privilege et
une garantie d’indépendance pour le lanceur d’alerte.
Afin de se conformer aux exigences du UKBA selon lesquelles les entreprises doivent
mettre en place des procédures adéquates pour prévenir la corruption et, partant,
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 26 sur 51
s’exonérer de la responsabilité totale ou partielle dans un cas de corruption, le Groupe
GDF SUEZ a mis au point le dispositif suivant:
• Désigner un fournisseur de service externe;
• Ce fournisseur de service externe sera le premier point de contact de tout
employé du groupe, que ce dernier souhaite rester anonyme ou non;
• Le fournisseur de service externe transmettra à un cabinet d’avocats désigné par
GDF SUEZ son rapport sur les méfaits qui lui auront été rapportés.
• Le cabinet d’avocats procédera à une analyse préliminaire pour déterminer si les
faits allégués peuvent être qualifiés de corruption, d’infraction criminelle ou
d’infraction grave. A défaut, le rapport sera rejeté.
• Au terme d’un délai raisonnable – soit une semaine, sauf urgence – le cabinet
d’avocats transmettra une note au Directeur juridique du Groupe pour qu’une
action soit entreprise.
• Le Directeur juridique du Groupe prendra le dossier en charge, en collaboration
avec la DJ Compliance.
Pour la bonne mise en place de la PLA au sein du Groupe GDF SUEZ, il sera important de
faire savoir que:
• Le recours par un lanceur d’alerte employé du Groupe au fournisseur de service
externe n’est pas obligatoire.
• Toute accusation abusive et/ou fausse et/ou calomnieuse sera punie par GDF
SUEZ et le lanceur d’alerte en sera tenu pour civilement et pénalement
responsable.
4. PROJET DE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE AU SEIN DU GROUPE
GDF SUEZ
La PLA doit tenir compte des spécificités du Groupe, telles que son activité, les régions
et les cultures où il opère. Cependant, pour une question de cohérence au sein du
Groupe, il est nécessaire d’avoir une PLA unique, avec quelques adaptations locales
pour prendre en compte certaines particularités. Les employés doivent savoir que la
V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 27 sur 51
personne avec qui ils seront en contact parle leur langue et comprend leurs conditions
de travail.
La PLA devra faire l’objet d’une vaste campagne de communication de sorte que
chaque employé (et si besoin chaque fournisseur et cocontractant) en soit informé,
sache comment l’utiliser et en connaisse la procédure. La communication de départ
devra être actualisée régulièrement pour que les employés du Groupe gardent à
l’esprit que cette PLA existe. Ils doivent être convaincus que l’entreprise considère les
sujets de fraude et de corruption avec le plus grand sérieux et prend les mesures
nécessaires. Les intranets des entités du Groupe relaieront le message, avec l’appui du
CEO.
La PLA doit encourager chaque employé à rapporter ses préoccupations d’abord à son
supérieur hiérarchique direct et à recourir ensuite et seulement aux instances mises en
place pour le lancement d’alerte si la réponse qu’il reçoit de son supérieur
hiérarchique direct ne le satisfait pas ou si le problème concerne ce dernier.
Le lanceur d’alerte, quel que soit le moyen par lequel il dénonce les faits, a besoin de
savoir que la personne à qui il s’adresse est indépendante et gardera son identité
confidentielle si nécessaire.
Quiconque reçoit une alerte doit avoir les compétences et les ressources pour mener
une investigation, la confier à des conseillers externes si nécessaire et savoir si et
quand il est opportun de rapporter l’information aux autorités administratives ou
judiciaires. Une collaboration avec les conseillers en communication ou la Direction
des relations publiques peut être utile également, selon l’ampleur de l’affaire.
Le lanceur d’alerte sera tenu informé de manière générale de la réponse que
l’entreprise apporte, de sorte que sa confiance dans le système reste intacte.
VI – Le lanceur d’alerte Page 28 sur 51
VI. Le lanceur d’alerte
Pensons à Edward SNOWDEN, cet informaticien américain, ex-employé de la CIA et de la
NSA, qui a révélé au monde les détails de plusieurs programmes de surveillance
globale d’une ampleur inédite: aujourd’hui traqué par la justice américaine qui l’accuse
d’espionnage, il a trouvé un asile temporaire en Russie pour échapper aux poursuites.
Quant au mécanicien garagiste qui avait dénoncé les pratiques de surfacturation que
nous avons évoquées au chapitre IV, il reconnaît que cette affaire a eu sur lui un
énorme impact émotionnel et psychologique.26
En effet, le lanceur d’alerte est soumis à un paradoxe: si son discours est désormais
valorisé socialement dans une société adepte de l’information en continu et de la
transparence et friande de la dénonciation des scandales, il est dans le même temps
exposé au niveau individuel à des représailles. Il y a donc la réunion de deux éléments:
d’une part, le fait de dire la « vérité » et, d’autre part, le fait que cette vérité dite
comporte un risque pour celui qui l’énonce.27
Malgré l’arsenal juridique existant, le lanceur d’alerte reste souvent seul face à sa
conscience car lancer une alerte est un
combat individuel. Alerter, c’est briser la
consigne du silence, rompre la solidarité de
corps, faire acte d’insubordination et donc,
dans une acception large du terme, désobéir.
Néanmoins, l’alerte est juste quand elle tend à
faire cesser un péril ou une atteinte à des
victimes et ce peut être l’honneur d’une personne que de dénoncer un scandale, une
malversation ou un complot. Mais en dénonçant, le lanceur d’alerte trahit. Son geste a
26
Op.cit., le 02.01.2015.
27
Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, Serge SLAMA, in AJDA n° 39/2014 du
24.11.2014.
VI – Le lanceur d’alerte Page 29 sur 51
toutes les chances d’être interprété par sa collectivité d’appartenance comme une
remise en cause de la loyauté normalement due au groupe. Lui, au contraire, mettra
en avant la fidélité à certaines valeurs – une autre forme de loyauté, donc – qui a guidé
son geste.28
Il y a trois étapes-clé pour un lanceur d’alerte.
• D’abord « je vais le faire » et l’excitation de faire face et d’être important.
• Vient ensuite la désillusion quand le lanceur d’alerte est laissé seul et que ses
collègues le lâchent alors qu’ils lui avaient promis leur aide.
• Surgit enfin un problème psychologique sous-jacent:
o Un épuisement professionnel (ou burn-out);
o Un manque de reconnaissance par rapport aux risques que le lanceur
d’alerte a encourus en dénonçant une malversation, à savoir que ce
dernier a mis en danger sa carrière, sa santé, sa vie même, puisque cela
peut conduire dans les cas les plus grave au suicide;
o Une perte de sens dans le conflit qui oppose les valeurs personnelles du
lanceur d’alerte et celles véhiculées par l’entreprise. À ce stade, le lanceur
d’alerte a le sentiment profond d’avoir tout perdu.29
Écartelés entre toutes ces
valeurs, beaucoup perdent pied.
Une étude américaine a
démontré que sur un groupe de
36 lanceurs d’alertes, la plupart
ont perdu leur emploi et n’ont
jamais retravaillé dans le même
secteur d’activité. Beaucoup ont
perdu leurs familles, car les procédures judiciaires devant les tribunaux ont duré des
années. Quasi tous ont été en burn-out. Une majorité a souffert de dépression,
28
L’alerte éthique, entre dénonciation et désobéissance, Danièle LOCHAK, in AJDA n° 39/2014 du
24.11.2014.
29
http://www.fcpablog.com/blog/2014/12/1/for-most-whistleblowers-life-is-hell.html#, le 02.12.2014.
VI – Le lanceur d’alerte Page 30 sur 51
souvent mâtinée d’alcoolisme ou de dépendance à diverses substances illicites. Le plus
grand choc provient de ce que le lanceur d’alerte apprend du monde: que rien de ce
qu’il a observé n’est vrai. Les lanceurs d’alertes, souvent isolés, finissent par souffrir de
fatigue chronique, de problèmes relationnels ou de dépression nerveuse. La
dépression provient du fait que les lanceurs d’alerte sont soudain plongés dans un
monde dont ils ignoraient l’existence, où les règles qu’ils pensaient applicables ne
s’appliquent pas. C’est terrible de faire quelque chose par idéal parce qu’on croit que
la cause est juste, puis de se retrouver à être considéré comme le corrompu !30
30
Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, op. cit.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 31 sur 51
VII. Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte
Nous avons vu que jusqu’à présent le département des Ressources Humaines est le
grand absent du processus de lancement d’alerte dans les cas de fraude et de
corruption. Le Groupe GDF SUEZ considère qu’il s’agit d’une affaire de juristes et de
déontologues. Il est vrai que les risques sont importants pour l’entreprise, tant en
termes financiers que d’image et de réputation.
Quant au lanceur d’alerte, nous venons de le voir, sa détresse et son désarroi sont
immenses.
Forts de ces constats, nous pensons que les RH ont un rôle à jouer plus important que
celui que le Groupe leur attribue actuellement. Ce rôle capital se décline en diverses
missions.
1. LES RH, INTERLOCUTEURS DE PROXIMITÉ ET FACILITATEURS
Lorsqu’un collaborateur en plein désarroi souhaite parler à une personne de confiance,
c’est souvent vers un responsable RH qu’il se tourne. Dans ce cas, ce dernier sera le
premier interlocuteur du lanceur d’alerte, il recevra ses confidences, ses craintes, ses
soupçons, etc. Parfaitement informé de la PLA, il réorientera le collaborateur vers les
contacts ad hoc vus au chapitre V: la ligne hiérarchique du lanceur d’alerte, le
déontologue de la branche à laquelle le lanceur d’alerte appartient, le déontologue du
Groupe, l’adresse électronique dédiée ou la société de services externe.
Lorsque l’alerte sera reçue par le contact ad hoc et que le processus de lancement
d’alerte sera lancé, les RH s’assureront que le droit du travail est respecté, que les
données demeurent protégées et que l’accès aux informations du dossier du personnel
est accordé conformément aux prescriptions légales.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 32 sur 51
Les RH veilleront également à s’assurer de la sécurité physique et psychique du lanceur
d’alerte. Il n’est pas question qu’il soit victime de harcèlement, de représailles ou de
menaces de la part de la personne dont il a dénoncé les malversations. Surtout s’il
s’agit de son supérieur hiérarchique direct ! Au besoin, les RH organiseront rapidement
l’« exfiltration » du lanceur d’alerte pour qu’il échappe aux foudres de celui dont il a
mis les fraudes à jour. Le lanceur d’alerte qui intégrera de nouvelles fonctions à la suite
de ce déplacement d’urgence se verra offrir par les RH tout l’encadrement dont il
pourrait avoir besoin. Cette opération d’exfiltration étant très sensible, les RH devront
faire preuve de réactivité, de confidentialité et de diplomatie.
2. LES RH, RESPONSABLES DE LA PRÉVENTION ET DE LA GESTION DES
RISQUES PSYCHO-SOCIAUX
Nous avons vu que le lanceur d’alerte fait très souvent l’objet de harcèlement et
d’intimidation.
Depuis le 1er
septembre 2014, le législateur belge31
impose aux entreprises de mettre en place avant le
28 février 2015 des mesures appropriées afin de
prévenir les risques psycho-sociaux au travail comme
le burn-out, la violence, le harcèlement moral ou
sexuel. Passé cette date, en cas de dépôt de plainte
liée à un risque psycho-social, l’employeur qui n’aura pas pris de mesures préventives
encourt le risque d’être sanctionné.
2.1 Qu’est-ce que le burn-out ?32
Le burn-out est l’utilisation excessive par une personne de son énergie et de ses
ressources jusqu’à provoquer chez elle un sentiment d’échec et d’épuisement.
31
Arrêté royal du 10.04.2014, relatif à la prévention des risques psycho-sociaux au travail, paru au
Moniteur belge du 28.04.2014 et entré en vigueur le 01.09.2014.
32
www.formation-burnout.be, le 07.01.2015.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 33 sur 51
« Littéralement, faire un burn-out c’est se consumer de l’intérieur, brûler à petit feu
jusqu’au bout. C’est un syndrome d’épuisement professionnel à la fois physique,
mental et émotionnel dont on ne sort pas indemne. C’est un tsunami qui débarque
dans la vie des gens. » Les ressources internes viennent à se consumer comme sous
l’action de la flamme d’une bougie, ne laissant qu’un vide immense à l’intérieur.
2.2 Quels sont les profils à risques ? 33
Les personnes les plus susceptibles d’être en burn-out sont très engagées dans leur
fonction, motivées voire surinvesties. En recherche de reconnaissance, elles aiment les
défis et la compétition, elles ne rechignent pas devant les heures supplémentaires et
sont très disponibles pour leur entreprise. Rien n’existe vraiment en dehors de leur
travail.
Le lanceur d’alerte a donc le « profil-type » !
2.3 Quels sont les symptômes du burn-out ?34
Voici une liste non exhaustive des symptômes du burn-out. Si le travailleur en
rencontre quelques-uns, peut-être est-il déjà entraîné dans la spirale infernale du
burn-out. Il est alors grand temps de réagir !
• Troubles du sommeil et fatigue
Le travailleur s’éveille épuisé le matin et éprouve des difficultés à se lever. Même après
un congé, ses batteries sont à plat. Le sommeil n’est plus réparateur car interrompu ou
difficile à atteindre.
• Maux de tête
Les migraines se font de plus en plus fréquentes, la consommation de paracétamol
dépasse la posologie recommandée.
• Irritabilité et agressivité
Les conflits interpersonnels avec les proches, les collègues ou la hiérarchie sont de plus
en plus courants et risquent d’empirer si la situation n’est pas éclaircie
33
www.formation-burnout.be, op.cit.
34
Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, experte en prévention du burn-out, formatrice et coach chez
FOSTER & LITTLE (08.01.2015)
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 34 sur 51
immédiatement. Ils peuvent même déboucher sur de la violence verbale et/ou
physique.
• Perte de sens et de motivation
Les valeurs personnelles de l’employé et celles de la société ne sont plus en harmonie.
Dès lors, le travailleur peut voir sa motivation au travail et sa productivité baisser, ce
qui va entraîner une grande frustration dans son chef, surtout s’il est habitué à de
bonnes performances. La perte de motivation peut aboutir à un désintérêt total pour
la fonction qu’il occupe.
• Troubles de l’alimentation
L’exposition à un stress chronique perturbe l’alimentation: ruée sur les en-cas, les
sodas, le café, les sucres rapides ou, a contrario, perte totale d’appétit sont des signes
interpellants.
• Affaiblissement du système immunitaire et pathologies cardio-vasculaires
Le travailleur sera plus sensible aux rhumes, grippes ou bronchites chroniques et à
l’asthme. Il aura tendance à recourir à l’automédication sans consulter son médecin
traitant. Parallèlement, le travailleur sentira des palpitations et une augmentation de
son rythme cardiaque. Dans les cas extrêmes, il peut être victime d’hypertension
artérielle, d’un infarctus du myocarde ou d’accidents vasculaires cérébraux.
• Appauvrissement de la vie sociale et isolement
Le travailleur aura tendance à s’isoler et à perdre le contact avec son entourage.
Stress = moteur
Troubles du
sommeil
Épuisement
Conflits
interpersonnels
Pathologies
diverses +
troubles
alimentaires
Perte de sensBURN-OUT
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 35 sur 51
2.5 Comment prévenir le burn-out chez le lanceur d’alerte?35
Il est important que le lanceur d’alerte ne se sente pas seul dans sa démarche. C’est
pourquoi aussitôt averties qu’une alerte éthique a été lancée, les RH le mettront à
l’abri de tout risque psycho-social en lui proposant un accompagnement.
Il existe un test, le Maslach Burnout Inventory, qui a pour but d’identifier le burn-out
et de faire le point sur la situation actuelle du travailleur. Nous avons vu au chapitre VI
que le lanceur d’alerte traverse d’abord une phase d’exaltation ou d’euphorie par
rapport à sa démarche. Ici, il est important de ramener le lanceur d’alerte à la réalité.
Ensuite, un coaching individuel portera sur les facteurs déclencheurs de stress. Le
travail se fera sur les symptômes physiques, les émotions vécues, les croyances,
l’environnement professionnel et personnel du travailleur.
Parallèlement à cela, et à supposer que le lanceur d’alerte n’a pas requis l’anonymat,
un groupe de parole sera créé au sein de l’entreprise à l’initiative des RH. Il sera
constitué du lanceur d’alerte, de son supérieur hiérarchique direct (si celui-ci n’est pas
concerné bien sûr par l’alerte lancée), ainsi que du Directeur juridique Compliance et
du responsable RH qui co-pilotent le processus de lancement d’alerte. Ce groupe de
parole, animé par un professionnel, sera une plateforme d’échange. Le Directeur
juridique Compliance communiquera sur l’état d’avancement du dossier et expliquera
les décisions prises, montrant ainsi au lanceur d’alerte que sa démarche a été utile et
suivie d’effets. Cela a pour but de répondre au besoin de reconnaissance du lanceur
d’alerte.
2.6 Risques et conséquences pour une entreprise d’avoir un collaborateur en
burn-out36
Le burn-out est une des premières causes d’absentéisme. Dans 50% des cas, le stress
en est l’origine.
35
Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, op.cit.
36
Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, op.cit.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 36 sur 51
Les conséquences sont, d’une part, une absence de longue – voire très longue – durée
(entre six mois et trois ans) pour l’employé en burn-out et, d’autre part, la
désorganisation du service auquel il appartient.
Le coût pour l’entreprise s’élève entre 500 et 900 EUR par collaborateur et par jour
d’absence, soit 10 milliards EUR pour les employeurs belges !
En France, d'après une évaluation de l'Institut national de recherche et de sécurité,
l'estimation du coût social du stress professionnel est de 2 à 3 milliards EUR, soit 10 à
20 % des dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de
la Sécurité sociale.37
3. LES RH, GARDIENNES DES VALEURS ÉTHIQUES DE L’ENTREPRISE
La détérioration des conditions du travail
résulte souvent d’un déficit sur le plan de
l’éthique et des valeurs. On croit à tort que
l’écart entre le discours dominant et les
pratiques est sans conséquence. C’est un
leurre: les salariés décèlent rapidement le
manque d’intégrité chez l’autorité et sa
malhonnêteté est loin de passer
inaperçue. Les deux ont un effet
démobilisateur qui détériore les conditions de travail et qui fait souffler un fort vent
d’incertitude et d’insécurité.38
Or les pratiques de gestion et la culture d’entreprise qui s’appuient sur les valeurs de
respect et l’éthique servent de bouclier contre le harcèlement. Toutes les recherches
37
http://www.lefigaro.fr/emploi/2014/12/05/09005-20141205ARTFIG00095-l-explosion-des-cas-de-
burn-out-inquiete-les-medecins-du-travail.php, le 07.01.2015.
38
http://www.psycho-ressources.com/bibli/harcelement-1.html, le 05.01.2015.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 37 sur 51
en management le prouvent, chaque salarié est une richesse potentielle pour
l’entreprise où il est embauché s’il est respecté dans sa singularité.39
Nous avons vu que le Groupe GDF SUEZ a une charte éthique basée sur quatre principes
d’action simples et précis: agir en conformité avec les lois et les réglementations,
ancrer une culture d’intégrité, faire preuve de loyauté et d’honnêteté et respecter les
autres. Le rôle des RH dans la mise en œuvre de la déclaration des valeurs se joue à
plusieurs niveaux.
3.1 Recrutement
La concordance parfaite entre les valeurs de l’entreprise et celles du candidat ne peut
exister. Par contre, s’assurer d’un seuil minimum de compatibilité est souhaitable, sous
peine d’engager un travailleur qui, tôt ou tard, quittera l’entreprise, faute de ne
pouvoir s’y identifier ou s’y intégrer. Une des questions à poser à un candidat lors de
l’entretien d’embauche est comment il comprend et interprète les valeurs éthiques de
l’organisation. Cela permet de faire prendre conscience au candidat de l’importance
que le Groupe y accorde.
3.2 Accueil des nouveaux collaborateurs
L’entrée en fonction d’un nouveau travailleur est l’occasion idéale pour faire passer un
message et induire des bonnes pratiques.
3.3 Formation
Un changement de culture, ou simplement l’accompagnement de la culture existante,
se traduit indirectement par des besoins en formations. Ces formations ont rarement
pour objet les valeurs à proprement parler, mais celles-ci sont sous-jacentes aux
aptitudes à développer.
Les barrières culturelles qui pourraient dissuader un employé de recourir à la PLA
doivent être comprises et un programme d’éducation doit être mis en place pour les
39
Op. cit.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 38 sur 51
briser. Il inclura la sensibilisation aux questions d’éthique et de corruption, la
présentation de la PLA, les comportements à adopter en cas de soupçon de
malversation et la procédure à suivre pour lancer une alerte.
3.4 Évaluation
Étant donné que les travailleurs sont une vitrine pour l’extérieur, il est important qu’ils
incarnent les valeurs véhiculées par l’entreprise. C’est pourquoi l’application des
valeurs peut être un paramètre à mesurer lors des évaluations.
Les évaluations annuelles peuvent être aussi l’occasion pour les RH de repérer un
employé qui aurait toujours donné satisfaction et qui tout à coup aurait une mauvaise
évaluation justifiée par une faible performance: serait-il victime de harcèlement ?
Aurait-il eu connaissance d’une malversation commise par son supérieur hiérarchique
ou – pire ! – aurait-il voulu la dénoncer ? Que cache cette soudaine appréciation
négative ? Les RH doivent être capables de détecter un collaborateur soumis à du
harcèlement ou à des menaces de la part de son supérieur hiérarchique.
3.5 Marketing RH (employer branding)
L’attractivité de l’entreprise et la fidélisation des collaborateurs ne se traduisent pas
qu’en termes d’avantages en tout genre au bénéfice des travailleurs. Un des éléments-
clés du marketing RH réside au départ dans la description de l’entreprise et de sa
culture.40
3.6 Entretien de sortie
Une des tâches principales dans la gestion du personnel est de conserver une trace du
comportement qui est acceptable aux yeux de la loi, qui est en ligne avec les attentes
des acteurs-clés, et qui est cohérent avec les valeurs de l’organisation. Les RH doivent
profiter des entretiens de sortie des cadres dirigeants pour détecter des
40
http://www.hrworld.be/hrworld/mssion-statement-strategie-rh-hr-didier-
erwoine.html?LangType=2060, le 03.01.2015.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 39 sur 51
comportements suspects41
. Si une malversation est soupçonnée, les RH en avertiront
sans délai la DJ Compliance qui initiera le processus de lancement d’alerte.
4. LES RH, GESTIONNAIRES DES CONTRATS DE TRAVAIL
42
Le manquement aux valeurs de l’entreprise, a fortiori s’il est qualifié d’infraction
pénale, constitue sans aucun doute un motif grave de licenciement. En cas de
licenciement pour faute grave, aucune indemnité de rupture n’est due. Lorsque la
faute grave est avérée, c’est aux RH de procéder au licenciement de l’employé fautif
en veillant à ce que les procédures soient scrupuleusement respectées.
4.1 Définition
Est considérée comme constituant un motif grave justifiant la rupture immédiate du
contrat de travail « toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement
impossible la collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur ».43
Les éléments sont donc44
:
• Le comportement fautif
La faute ne doit pas nécessairement être contractuelle. Des faits de la vie privée
peuvent constituer un motif grave en raison de leur influence sur l’exécution du
contrat de travail. Imaginons qu’un cadre du département financier de GDF SUEZ soit
trésorier du club de tennis de son village. Dans le cadre de cette dernière activité, il est
inculpé puis condamné pour détournement de fonds. Le Groupe pourrait considérer
que la confiance est rompue et mettre fin à son contrat de travail pour motif grave.
• L’impossibilité de collaboration doit être immédiate et définitive.
Il s’agit de faits détruisant la confiance qui doit présider aux relations de travail. Le
motif grave est la faute accompagnée de toutes les circonstances qui peuvent lui
donner le caractère de gravité requis pour justifier la rupture sans préavis.
41
http://www.leechgrc.com/pdf/f_e/HumanResourceVol6No589.pdf, le 02.12.2014.
42
Dans ce chapitre, nous nous référons uniquement à la législation belge du travail.
43
Loi belge du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, art. 35.
44
Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de travail, syllabus d’Antoine RASNEUR,
avocat, ICHEC Entreprises, D.E.S. RH 2011-2012.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 40 sur 51
4.2 Procédure45
Outre que le motif reproché doit être grave – ce que le juge appréciera
souverainement – il faut (i) que la rupture soit décidée dans un certain délai; ET (ii) que
le motif reproché soit notifié dans un certain délai et sous une certaine forme.
• Délais
Le délai pour donner congé en raison de motif grave est de trois jours ouvrables
suivant la connaissance des faits reprochés. Il s’agit d’une
connaissance certaine des faits: des soupçons ne suffisent
pas. La connaissance des faits ne peut être acquise avec
certitude qu’au terme d’une enquête menée en interne ou
par un juge d’instruction s’il s’agit d’une infraction pénale. En
pratique, une fois que la faute grave est connue, l’employeur
dispose de trois jours ouvrables pour notifier à son employé qu’il va le licencier.
Le délai de notification des motifs est également de trois jours ouvrables suivant la
signification du congé. La notification du motif grave (énonciation précise des motifs)
peut être concomitante à la décision du congé ou effectuée dans un acte postérieur.
• Forme
La signification du congé n’est soumise à aucune forme, elle peut être verbale. Ceci dit,
étant donné que c’est à la partie qui invoque le motif grave d’apporter la preuve que le
congé est régulier, elle a tout intérêt à le faire par le biais d’un écrit.
La notification du motif grave doit se faire par lettre recommandée ou par exploit
d’huissier de justice. Elle peut aussi se faire par la remise de l’écrit à l’autre partie,
contre accusé de réception. Le courrier doit énoncer le motif invoqué de façon
suffisamment claire pour permettre à l’autre partie de savoir ce qui lui est reproché et
au juge de vérifier que le motif invoqué devant lui est le même que celui qui a entraîné
le congé.
45
Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de travail, op.cit.
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 41 sur 51
Si les délais et/ou la forme ne sont pas respectés, la faute grave ne peut être retenue
et il s’agit alors d’un licenciement normal.
5. LES RH, GARDIENNES DE LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE
46
Comme toutes les entreprises mettant à
disposition de leurs employés divers outils
informatiques et de communication, le Groupe
est, au sens de la loi belge du 8 décembre 1992
relative à la protection de la vie privée à l'égard
des traitements de données à caractère
personnel, le responsable de nombreux
traitements de diverses données personnelles
relatives à ses employés et à l’usage que ces
derniers font des moyens suscités.
La responsabilité de ces traitements implique d’être le gardien protégeant les données
traitées des accès et des utilisations usurpées mais aussi d’être le garant que les
auteurs d’utilisation abusive pourront être démasqués.
Pour permettre la balance de ces deux rôles, le Groupe a mis en place une charte
informatique permettant aux employés d’être alertés quant aux règles par lesquelles
leurs données personnelles sont protégées et quant aux règles qui présideront à la
levée nécessaire de cette protection le cas échéant.
C’est généralement et fort heureusement aux RH qu’est confiée la mise en œuvre de
cette charte. En effet, leur autorité dans la gestion des employés s’étend également
aux cas évoqués d’utilisation abusive.
Le lancement d’alerte est souvent (pour ne pas dire toujours) générateur d’un besoin
de vérifications et de recherche de preuves en matière de données personnelles, ce
46
Interview de Bertrand VANDEVELDE, avocat, le 04.01.2015
VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 42 sur 51
qui renforce l’intérêt de confier aux RH un rôle primordial dans la gestion des
lancements d’alerte. En effet, une fois l’alerte lancée, il conviendra de vérifier le
contenu de l’alerte et, le cas échéant, de rassembler un ensemble de preuves
démontrant ou infirmant la réalité des allégations contenues dans le lancement
d’alerte. Et ces vérifications et preuves impliqueront immanquablement des analyses
circonstanciées de données personnelles allant au-delà des règles de traitement
appliquées lors de l’usage quotidien récurrent des outils informatiques et de
communication.
Le traitement des données personnelles constituant à juste titre un enjeu majeur pour
le Groupe, il est fondamental que les diverses facettes de ce traitement évoquées ci-
avant, et plus encore les conséquences des lancements d’alerte sur ce traitement,
puissent être l’attribut du département en charge des ressources humaines. Les RH
prévoiront donc dans le contrat de travail et autres documents signés par chaque
employé les clauses adéquates afin de pouvoir au besoin effectuer, à charge ou à
décharge, une recherche ciblée au niveau informatique.
VIII – Conclusion Page 43 sur 51
VIII. Conclusion
La mise en place et la gestion d’un processus de lancement d’alerte sont
fondamentales pour une entreprise, comme nous l’avons vu.
Lors de cette mise en place, la première question est de savoir si les RH doivent y
participer. Pour certains, la question est tranchée et la DJ Compliance sera le maître
d’œuvre exclusif.47
Selon nous, s’il appartient incontestablement à la DJ Compliance de piloter le volet
juridique du processus, il est indispensable d’inclure les RH pour en piloter le volet
humain. C’est à la croisée de ces chemins que l’interaction entre les deux
départements aura lieu.
En effet, les RH doivent constituer un acteur majeur du dispositif par la diffusion de la
culture éthique en incluant dans les contrats de travail et les règlements intérieurs les
exigences éthiques de l’entreprise et en protégeant les lanceurs d’alerte d’éventuelles
représailles. Cela nécessite la capacité d’exfiltrer le lanceur d’alerte et de le changer de
poste s’il subit dans son environnement de travail immédiat les conséquences de
l’alerte qu’il a lancée.
Ceci pose naturellement la question de la place de la fonction RH dans l’entreprise, de
son indépendance et de sa capacité à faire prévaloir ses vues en matière d’éthique par
rapport aux opérationnels et à la direction générale.
Alors que le fait de dénoncer présente souvent dans nos pays latins une connotation
négative, le rôle des RH est essentiel pour opérer la révolution culturelle que nécessite
la mise en place d’un système de lancement d’alerte en mettant en avant la fidélité du
47
http://www.ey.com/LU/en/Newsroom/PR-activities/Articles/Article_201401_Le-role-de-la-fonction-RH-dans-la-
sauvegarde-de-l-integrite-de-l-entreprise, le 02.12.2014
VIII – Conclusion Page 44 sur 51
lanceur d’alerte aux valeurs éthiques de l’entreprise, fidélité que trahit le collaborateur
qui s’adonne à des pratiques de corruption.
Sur ce point, force est de constater que les RH apparaissent naturellement comme les
architectes et les acteurs d’un changement majeur dans l’entreprise qu’elles piloteront
en mode projet, après avoir identifié les relais essentiels à la conduite de ce tournant.
Nous terminerons par une citation tirée d’un ouvrage du Professeur Philippe DE
WOOT
48
:
« L’ÉTHIQUE NE SE LIMITE PAS AUX CONVICTIONS NI AUX VALEURS. ELLE CONCERNE PRINCIPALEMENT NOS
ACTES ET LEURS CONSÉQUENCES. C’EST DANS L’ACTION QUE S’INCARNE L’ÉTHIQUE ET, DANS CE SENS, ELLE
EST UN ENGAGEMENT. »
48
Lettre ouverte aux décideurs chrétiens en temps d’urgence, p.125, éd. Lethielleux/Desclée de
Brouwer, Paris, 2009
IX – Bibliographie Page 45 sur 51
IX. Bibliographie
1. LIVRES
• BRION René et MOREAU Jean-Louis, Plus de 150 ans de présence dans l’énergie en
Belgique, Recherches documentaires, éd. GDF SUEZ, 2011.
• BRION René et MOREAU Jean-Louis, 150 ans de présence dans le monde: l’énergie
partagée, Recherches documentaires, éd. PC, Paris, 2011.
• DE WOOT Philippe, Lettre ouverte aux décideurs chrétiens en temps d’urgence, Éd.
Lethielleux / Desclée de Brouwer, Paris, 2009.
• NORTON ROSE FULBRIGHT, A global guide to Whistleblowing laws, août 2014.
2. RAPPORTS
• Rapport d’activité 2013 de GDF SUEZ.
• Présentation de GDF SUEZ, 2 août 2012.
3. ARTICLES
• CHARREIRE-PETIT Sandra et CUSIN Julien, Quand le whistleblower est sifflé hors jeu par
le système: expulsion puis résilience du footballeur Jacques Glassmann, 2006.
• LOCHAK Danièle, L’alerte éthique, entre dénonciation et désobéissance, in AJDA n°
39/2014 du 24.11.2014.
• MEYER Nicole-Marie, Le droit d’alerte en perspective: 50 années de débats dans le
monde, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014.
• RASNEUR Antoine, Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de
travail, syllabus, ICHEC Entreprises, D.E.S. RH 2011-2012.
• SLAMA Serge, Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, in AJDA n°
39/2014 du 24.11.2014.
IX – Bibliographie Page 46 sur 51
4. TEXTES DE LOI
Les principaux textes de loi cités dans ce travail totalisant près de 1'600 pages, nous
avons choisi de ne pas les annexer mais de les référencer par leur hyperlien. Le lecteur
désireux de les consulter les trouvera ci-après.
4.1 Droit britannique
• Public Interest Disclosure Act 1998:
http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1998/23/data.pdf, le 14.01.2015.
• Employment Rights Act 1996:
http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1996/18/data.pdf, le 14.01.2015.
• Bribery Act 2010:
http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2010/23/data.pdf, le 14.01.2015.
• Enterprise and Regulatory Reform Act 2013:
http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2013/24/enacted/data.pdf, le 14.01.2015.
4.2 Droit américain (USA)
• Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act:
https://www.sec.gov/about/laws/wallstreetreform-cpa.pdf, le 14.01.2015.
• Sarbanes-Oxley Act of 2002:
https://www.sec.gov/about/laws/soa2002.pdf, le 14.01.2015.
• False Claim Act:
http://www.justice.gov/sites/default/files/civil/legacy/2011/04/22/C-
FRAUDS_FCA_Primer.pdf, le 14.01.2015.
4.3 Droit belge
• Arrêté royal du 10.04.2014 relatif à la prévention des risques psycho-sociaux au
travail :
http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body.pl?language=fr&pub_date=2014-
04-28&numac=2014202445&caller=list, le 14.01.2015.
• Loi du 03.07.1978 relative aux contrats de travail :
http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&cn=19780
70301&table_name=loi, le 14.01.2015.
IX – Bibliographie Page 47 sur 51
• Loi du 08.12.1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements
de données à caractère personnel :
http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/loi_a.pl?language=fr&caller=list&cn=19921
20832&la=f&fromtab=loi&sql=dt='loi'&tri=dd+as+rank&rech=1&numero=1, le
14.01.2015.
5. SITES INTERNET
• http://www.fcpablog.com/blog/2014/12/1/for-most-whistleblowers-life-is-
hell.html#, le 02.12.2014.
• http://www.leechgrc.com/pdf/f_e/HumanResourceVol6No589.pdf, le 02.12.2014.
• http://www.ey.com/LU/en/Newsroom/PR-activities/Articles/Article_201401_Le-
role-de-la-fonction-RH-dans-la-sauvegarde-de-l-integrite-de-l-entreprise, le
02.12.2014.
• http://www.gdfsuez.com/actionnaires/action-gdf-suez/structure-de-lactionnariat/,
le 22.12.2014.
• http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/, le 26.12.2014.
• http://www.adma.qc.ca/Publications/Info-ADMA/InfoADMA-Mars-
2012/Enron%2010%20ans%20plus%20tard.aspx, le 26.12.2014.
• http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/dispositif-de-mail-
ethique/, le 26.12.2014.
• http://business-ethics.com/2010/10/26/1740-glaxosmithkline-to-pay-750-million-
fine-whistleblower-to-get-96-million/, le 01.01.2015.
• http://www.bloomberg.com/news/2014-06-16/sec-fines-new-york-advisor-for-
whistle-blower-retaliation.html, le 01.01.2015.
• http://www.bbc.com/news/business-29316077, le 02.01.2015.
• http://www.asterix.com/asterix-de-a-a-z/les-personnages/quatredeusix.html, le
02.01.2015.
• http://www.dailymail.co.uk/news/article-2861191/Whistleblowing-garage-
mechanic-wins-46-000-compensation-sacked-accused-bosses-overcharging-
customers.html, le 02.01.2015.
IX – Bibliographie Page 48 sur 51
• http://www.xperthr.co.uk/editors-choice/unfairly-dismissed-whistleblower-wins-
gbp12-million-compensation/104755/, le 02.01.2015.
• http://www.hrworld.be/hrworld/mssion-statement-strategie-rh-hr-didier-
erwoine.html?LangType=2060, le 03.01.2015.
• http://employmentlawblog.fieldfisher.com/category/enterprise-and-regulatory-
reform-act-2013, le 04.01.2015.
• http://www.psycho-ressources.com/bibli/harcelement-1.html, le 05.01.2015.
• http://en.wikipedia.org/wiki/Commodity_Exchange_Act, le 06.01.2015.
• http://www.lefigaro.fr/emploi/2014/12/05/09005-20141205ARTFIG00095-l-
explosion-des-cas-de-burn-out-inquiete-les-medecins-du-travail.php, le 07.01.2015.
• www.formation-burnout.be, le 07.01.2015.
6. ENTRETIENS
• Entretien avec Marc DE VOS, HR Partner de GDF SUEZ C.C., le 12.12.2014.
• Entretien avec Manoëlle VAN DER STRATEN, experte en prévention du burn-out,
formatrice et coach chez FOSTER & LITTLE, le 08.01.2015.
• Entretien avec Bertrand VANDEVELDE, avocat spécialisé en droit de l’informatique, le
04.01.2015.
X – Dédicace et remerciements Page 49 sur 51
X. Dédicace et remerciements
La finalisation du présent travail a été concomitante à l’attentat
qui a frappé CHARLIE HEBDO à Paris ce 7 janvier 2015, ôtant ainsi la
vie à douze personnes, dont cinq caricaturistes. Cabu, Charb,
Honoré, Tignous et Wolinski étaient à leur manière des lanceurs
d’alerte. Ce travail leur est dédié.
Je voudrais exprimer ma profonde reconnaissance à Monsieur Eric SEASSAUD, Directeur
juridique Compliance du Groupe GDF SUEZ. Sans sa ténacité, son soutien et son
implication, ce travail n’aurait jamais vu le jour.
Je remercie en outre Madame Manoëlle VAN DER STRATEN, formatrice et coach chez
FOSTER & LITTLE, pour son expertise en matière de burn-out, ses encouragements
précieux et ses patientes relectures.
Ma gratitude va également à Monsieur Bertrand VANDEVELDE, avocat, pour le temps
qu’il a consacré à relire, annoter et commenter avec la plus grande attention le
présent travail, et pour les conseils avisés qu’il m’a prodigués sans modération.
Mes remerciements sont aussi destinés à Monsieur Jean-Yves GOUËL, Directeur
juridique adjoint Compliance du Groupe GDF SUEZ: ses remarques pertinentes m’ont
été d’une aide précieuse.
Je remercie par ailleurs Monsieur Marc DE VOS, HR Partner de GDF SUEZ C.C., pour
m’avoir entretenue de sa vision du rôle des RH en cas de lancement d’alerte.
Je salue aussi Monsieur Michel LEMOINE, Collaborateur scientifique à l’Université de
Liège, et Madame Claire RAES qui ont mis leur connaissance pointue de la langue
française au service du présent travail. Qu’ils soient chaleureusement remerciés.
X – Dédicace et remerciements Page 50 sur 51
Je remercie enfin Madame Laetitia PARMENTIER, Responsable académique des
formations en soirée d’ICHEC ENTREPRISES, pour la compréhension et la flexibilité dont
elle a fait preuve.

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  • 1. Interaction entre les départements Compliance et RH du Groupe GDF SUEZ en cas de lancement d’une alerte éthique D.E.S. en Ressources Humaines Travail de fin d’études Janvier 2015 (année d’études 2011 – 2012) Barbara MUELLER-LEGRAN
  • 2. Table des matières Page 1 sur 51 Table des matières Table des matières ..................................................................................1 I. Introduction ....................................................................................4 II. Présentation du Groupe GDF SUEZ....................................................6 1. Historique.................................................................................................................6 2. Organisation.............................................................................................................7 3. Marché .....................................................................................................................7 4. Actionnariat..............................................................................................................8 5. L’éthique du Groupe ................................................................................................8 III. Contexte juridique.........................................................................10 1. Droit britannique....................................................................................................10 1.1 Public Interest Disclosure Act et Employment Rights Act......................... 10 1.2 United Kingdom Bribery Act...................................................................... 11 1.3 Enterprise and Regulatory Reform Act ..................................................... 12 2. Droit américain (USA).............................................................................................12 2.1 False Claim Act .......................................................................................... 13 2.2 Sarbanes Oxley Act.................................................................................... 14 2.3 Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act ............. 15 3. Compétences juridictionnelles...............................................................................16 IV. Le lancement d’alerte....................................................................18 1. Qu’est-ce que le lancement d’alerte ?...................................................................18 2. Avantages d’une Politique de Lancement d’Alerte ...............................................18 3. Inconvénients d’une Politique de Lancement d’Alerte .........................................19 4. Risques liés à l’absence de Politique de Lancement d’Alerte................................20
  • 3. Table des matières Page 2 sur 51 V. Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ.............................22 1. Situation actuelle .................................................................................................. 22 2. Points d’amélioration............................................................................................ 23 3. Hotline externe dédiée au lancement d’alerte..................................................... 24 3.1 Les entreprises spécialisées ...................................................................... 24 3.2 Les cabinets d’avocats............................................................................... 25 3.3 Option retenue par le Groupe GDF SUEZ ................................................... 25 4. Projet de Politique de Lancement d’Alerte au sein du Groupe GDF SUEZ............. 26 VI. Le lanceur d’alerte.........................................................................28 VII. Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte ..................................31 1. Les RH, interlocuteurs de proximité et facilitateurs..............................................31 2. Les RH, responsables de la prévention et de la gestion des risques psycho- sociaux....................................................................................................................32 2.1 Qu’est-ce que le burn-out ? ...................................................................... 32 2.2 Quels sont les profils à risques ?............................................................... 33 2.3 Quels sont les symptômes du burn-out ? ................................................. 33 2.5 Comment prévenir le burn-out chez le lanceur d’alerte?......................... 35 2.6 Risques et conséquences pour une entreprise d’avoir un collaborateur en burn-out .................................................................................................... 35 3. Les RH, gardiennes des valeurs éthiques de l’entreprise ......................................36 3.1 Recrutement.............................................................................................. 37 3.2 Accueil des nouveaux collaborateurs........................................................ 37 3.3 Formation.................................................................................................. 37 3.4 Évaluation.................................................................................................. 38 3.5 Marketing RH (employer branding) .......................................................... 38 3.6 Entretien de sortie..................................................................................... 38
  • 4. Table des matières Page 3 sur 51 4. Les RH, gestionnaires des contrats de travail ........................................................39 4.1 Définition................................................................................................... 39 4.2 Procédure.................................................................................................. 40 5. Les RH, gardiennes de la protection de la vie privée.............................................41 VIII. Conclusion.....................................................................................43 IX. Bibliographie .................................................................................45 X. Dédicace et remerciements ...........................................................49
  • 5. I - Introduction Page 4 sur 51 I. Introduction Le Groupe GDF SUEZ (ci-après « le Groupe GDF SUEZ » ou « le Groupe » ou « GDF SUEZ »), acteur-clé au niveau mondial dans le secteur de l’énergie, souhaite mettre en place une politique en matière de lancement d’alerte, principalement pour les questions de corruption et de violation des règles éthiques. Ces questions couvrent à la fois un aspect juridique, puisqu’il s’agit de dénoncer des actes qui violent les lois nationales et internationales, et un aspect de ressources humaines, puisque les comportements dénoncés sont contraires aux valeurs et à l’éthique du Groupe. GDF SUEZ a fait le choix de confier le pilotage de cette politique à son département Compliance de la Direction juridique (ci-après « la DJ Compliance »). Le département Ressources Humaines (ci-après « les RH ») y est logiquement associé en vertu de ce qui vient d’être expliqué. L’objet de ce travail porte sur l’interaction entre la DJ Compliance et les RH du Groupe GDF SUEZ en cas de lancement d’alerte en matière de corruption et de violation des règles éthiques. Nous nous attacherons d’abord à présenter brièvement le Groupe, ses activités, son organisation et son éthique. Nous exposerons ensuite le contexte juridique dans lequel GDF SUEZ évolue et nous nous focaliserons particulièrement sur les législations britannique et américaine. Par après, nous définirons ce qu’est le lancement d’alerte et cadrerons son étendue. Nous analyserons également la situation actuelle en matière de lancement d’alerte chez GDF SUEZ, ses améliorations possibles et ses perspectives. Nous nous attacherons en outre à parler du lanceur d’alerte et des difficultés qu’il rencontre dans sa démarche. Nous examinerons par ailleurs le rôle des RH dans le cas d’un lancement d’alerte, ses limites et ses perspectives. Enfin, nous verrons comment les départements Compliance et RH peuvent interagir en cas de
  • 6. I - Introduction Page 5 sur 51 lancement d’alerte pour satisfaire aux exigences légales et éthiques auxquelles le Groupe est soumis.
  • 7. II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 6 sur 51 II. Présentation du Groupe GDF SUEZ GDF SUEZ est un groupe français actif dans les secteurs de l’électricité, du gaz et de l’environnement. Présent dans 70 pays, il emploie plus de 147’000 personnes à travers le monde et offre ses services aux particuliers, aux collectivités et aux entreprises. Son chiffre d’affaires pour l’année 2013 s’élevait à 81.3 milliards EUR. Le groupe est coté aux bourses de Bruxelles, Paris et Luxembourg. 1 1. HISTORIQUE Les origines du Groupe GDF SUEZ remontent, en ce qui concerne sa présence en Belgique, au XIXème siècle avec la COMPAGNIE MEEUS qui, déjà avant l’indépendance de la Belgique, dotait les rues de Bruxelles d’un éclairage public au gaz et distribuait le gaz aux particuliers. Au début du XXème siècle, à la suite de divers rapprochements, rachats, ou prises de participation, une nouvelle société fut créée: la CENTRALE GAZ ET ELECTRICITÉ. Le groupe d’alors étendit son activité à la production et à l’exploitation de tramways et des chemins de fer vicinaux (TRACTIONEL) ainsi qu’à l’électrification de l’éclairage public (ELECTROBEL) tant en Belgique qu’à l’étranger (citons entre autres les villes d’Odessa, Bangkok, Le Caire, Izmir, etc.). Après la Seconde Guerre mondiale, suivie de la fermeture progressive des charbonnages et du choc pétrolier des années 1970, les centrales électriques belges durent se tourner vers un autre combustible: l’énergie nucléaire. C’est ainsi que les centrales de Doel et de Tihange furent construites. En 1986, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE DE BELGIQUE (SGB) initia la fusion des deux principaux groupes travaillant dans les secteurs de l’électricité et du gaz: ELECTROBEL et TRACTIONEL. La société issue de l’opération fut appelée TRACTEBEL. Deux ans plus tard, l’arrivée de SUEZ dans le capital de la SGB recentra les activités du groupe, désormais SUEZ-TRACTEBEL, sur son métier de base, 1 Rapport d’activité 2013.
  • 8. II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 7 sur 51 l’énergie. Aujourd’hui encore, la synergie gaz-électricité constitue toujours l’axe majeur de la stratégie de GDF SUEZ en Belgique.2 En 2008, les assemblées générales des actionnaires de GAZ DE FRANCE et SUEZ approuvèrent la fusion des deux groupes pour donner naissance à GDF SUEZ.3 2. ORGANISATION 4 Le Groupe est divisé en cinq branches: • Branche Energie Europe (BEE): gestion d’énergie et trading, production d’électricité, fourniture en gaz naturel, marketing et ventes (p.ex. ELECTRABEL); • Branche Energie International (BEI): production d’électricité, distribution et fourniture de gaz et d’électricité (p.ex. INTERNATIONAL POWER); • Branche Global Gaz & GNL (B3G): exploration et production, gestion du portefeuille de gaz naturel liquéfié; • Branche Infrastructures (BI): infrastructures de grands transports de gaz, terminaux de GNL en France et à l’international, réseau de distribution de gaz en France; • Branche Energie Services (BES): gestion de réseaux urbains, gestion d’installations énergétiques industrielles et tertiaires, offres multi techniques complètes (p.ex. TRACTEBEL ENGINEERING, FABRICOM). À ces cinq branches, s’ajoute le Centre qui abrite les fonctions transverses, telles que les départements financier, RH et juridique entre autres. C’est à la Direction juridique Centre qu’est attaché le département Compliance. 3. MARCHÉ 5 Le Groupe GDF SUEZ occupe une place de premier rang dans trois métiers porteurs: 2 Plus de 150 ans de présence dans l’énergie en Belgique, Recherches documentaires réalisées par René BRION et Jean-Louis MOREAU, éd. GDF SUEZ, 2011. 3 150 ans de présence dans le monde: l’énergie partagée, Recherches documentaires réalisées par René BRION et Jean-Louis MOREAU, éd. PC, Paris, 2011. 4 Présentation de GDF SUEZ, 2 août 2012. 5 Présentation de GDF SUEZ, op.cit.
  • 9. II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 8 sur 51 • Électricité: premier producteur indépendant mondial et premier producteur mondial d’électricité non nucléaire; • Gaz naturel: deuxième acheteur de gaz naturel en Europe, troisième importateur de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le monde, premiers réseaux de transport et de distribution en Europe; • Services: premier fournisseur de services à l’efficacité énergétique et environnementale en Europe, deuxième fournisseur de services de l’eau et de propreté dans le monde. 4. ACTIONNARIAT L’actionnariat du Groupe GDF SUEZ se compose comme suit6 : 5. L’ÉTHIQUE DU GROUPE 7 Conformément à ses valeurs et à ses engagements, GDF SUEZ a pour ambition d’agir dans le respect des lois et des réglementations en vigueur dans les pays où il est 6 http://www.gdfsuez.com/actionnaires/action-gdf-suez/structure-de-lactionnariat/, le 22.12.2014. 7 http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/, le 26.12.2014.
  • 10. II – Présentation du Groupe GDF SUEZ Page 9 sur 51 présent, et ce en toutes circonstances. Pour atteindre cet objectif, le Groupe a mis en place une politique d’éthique qui accompagne au quotidien les décisions stratégiques, le management et les pratiques professionnelles du Groupe. Il s’est également doté d’outils nécessaires pour mesurer la conformité à cet engagement. L’éthique consiste en l’application concrète de ce qui est moralement acceptable ou conforme aux valeurs dans une situation donnée. La compliance regroupe l’ensemble des dispositifs à mettre en œuvre pour parvenir à l’objectif de conformité. Éthique et compliance constituent ainsi les deux faces d’une même réalité, qui concerne tous les collaborateurs de GDF SUEZ. Par conséquent, leurs principes doivent être portés à la connaissance de tous à travers une organisation ad hoc et des référentiels existants. GDF SUEZ fonde sa politique d’éthique et de compliance sur quatre principes d’action simples et précis: • Agir en conformité avec les lois et les réglementations En toutes circonstances, les collaborateurs du Groupe doivent observer les réglementations internationales, fédérales, nationales, locales ainsi que les règles de déontologie professionnelle relatives à leurs activités. • Ancrer une culture d’intégrité L’intégrité prescrit d’éviter tout conflit entre intérêts personnels et intérêts du Groupe. Elle forge la conviction que l’on a le devoir de respecter certaines valeurs. Elle crée ainsi un climat de confiance et constitue un bouclier contre les pratiques de corruption. • Faire preuve de loyauté et d’honnêteté Les collaborateurs tiennent leurs engagements en temps et en heure. Chaque fois qu’ils communiquent, avec l’extérieur comme en interne, ils le font de bonne foi, dans un esprit constructif, avec le souci d’une information sincère, précise et complète. • Respecter les autres Ce principe recouvre notamment le respect des droits des personnes, de leur dignité et de leurs singularités, ainsi que le respect des cultures. Il s’applique également aux biens matériels et immatériels appartenant à autrui.
  • 11. III – Contexte juridique Page 10 sur 51 III. Contexte juridique Actif dans 70 pays à travers le monde, le Groupe GDF SUEZ est soumis à une multitude de législations régionales, nationales et internationales. Par sa présence aux États-Unis et en Grande-Bretagne, le Groupe GDF SUEZ voit ses activités régies par les droits américain et britannique en matière de corruption8 qui reconnaissent comme légitime la dénonciation, par des systèmes d’alerte et de signalement, d’illégalités, de risques ou de comportements contraires à l’éthique. Dans ce travail, nous nous pencherons particulièrement sur ces deux législations qui sont les plus avancées en matière de lancement d’alerte et de lutte contre la corruption et qui inspireront la Politique de Lancement d’Alerte que le Groupe souhaite mettre en place. 1. DROIT BRITANNIQUE 1.1 Public Interest Disclosure Act et Employment Rights Act9 Les divulgations sont protégées par le Public Interest Disclosure Act de 1998 (ci-après « PIDA ») et par l’Employment Rights Act de 1996 (ci-après « ERA ») quand le lanceur d’alerte est un employé actuel ou passé de l’entreprise où ont été commis les faits dénoncés. Le concept de lancement d’alerte est issu du PIDA et de l’ERA qui prévoient la protection des lanceurs d’alerte de tout traitement préjudiciable de la part de leur employeur (licenciement, représailles, harcèlement) et qui définissent la notion de travailleur de façon assez large. Pour bénéficier de la « protection » du PIDA et de l’ERA, le travailleur doit introduire de bonne foi une divulgation protégée (protected disclosure) auprès de son employeur, d’un avocat, d’une personne de confiance ou toute autre personne désignée. 8 Ces droits s’appliquent directement aux entités implantées tant au Royaume-Uni qu’aux États-Unis; de plus ils s’appliquent du fait de leur possible caractère extraterritorial. 9 A global guide to Whislteblowing laws, NORTON ROSE FULBRIGHT, août 2014.
  • 12. III – Contexte juridique Page 11 sur 51 Pour être protégée par le PIDA et l’ERA, la divulgation doit: • Être une véritable information, à savoir porter sur des faits, plutôt qu’une vague allégation. • Porter sur un des six manquements suivants: (i) infraction pénale; (ii) infraction à une obligation légale; (iii) atteinte à la justice; (iv) danger pour la santé et la sécurité d’autrui; (v) dégâts environnementaux; (vi) rétention délibérée d’informations liées aux points (i) à (v) précités. • Être faite par une personne qui a des solides raisons de croire que (i) l’information divulguée porte sur un des six manquements évoqués ci-dessus; (ii) la divulgation est d’intérêt public; (iii) les faits divulgués sont substantiellement fondés. 1.2 United Kingdom Bribery Act La mise en place de politiques de lancement d’alertes est un des six principes établis dans les lignes directrices du United Kingdom Bribery Act (ci-après « UKBA »), loi britannique relative à la prévention et à la répression de la corruption. L’UKBA considère le défaut de prévention de la corruption par une entreprise comme une infraction autonome. Il inclut des dispositifs d’alerte accessibles pour les parties internes et externes à l’entreprise. Au-delà des ressortissants, des entreprises et du territoire britanniques, l’UKBA a des effets extraterritoriaux, dès lors que l’un des faits s’est produit sur le territoire du Royaume-Uni ou qu’il est commis, dans le monde, par une personne ayant une proche connexion avec le Royaume-Uni (citoyenneté, siège ou résidence britannique, parties tierces). Le délit de défaut de prévention de la corruption est applicable à toute personne morale pratiquant une activité, même partielle, au Royaume-Uni.10 Selon le droit britannique, la mise en place d’une politique de lancement d’alerte n’est pas une obligation légale. Elle est cependant indiquée en fonction de l’évaluation des risques de l’entreprise. La première question à se poser est de déterminer à quels 10 Le droit d’alerte en perspective: 50 années de débats dans le monde, Nicole-Marie MEYER, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014.
  • 13. III – Contexte juridique Page 12 sur 51 risques l’entreprise est exposée en matière de corruption. La deuxième question est de savoir si la mise en place d’une politique contribuera à minimiser ces risques et à découvrir la corruption, où qu’elle soit. 1.3 Enterprise and Regulatory Reform Act11 En juin 2013, la révision de l’Enterprise and Regulation Reform Act a réformé la loi en matière de lancement d’alerte et a introduit les modifications suivantes: • Les informations divulguées ne seront désormais protégées que si le travailleur a un motif raisonnable de croire que la divulgation est dans l'intérêt public. • La divulgation d’informations ne devra plus être faite obligatoirement de bonne foi; cependant, si la divulgation est faite de mauvaise foi, la récompense accordée sera réduite d’un quart du montant. • Les employeurs seront indirectement responsables de leurs employés qui commettraient des actions de représailles, de harcèlement ou tout type de préjudice à l’égard d’un collègue lanceur d’alerte, sauf s’ils parviennent à démontrer qu’ils ont pris toutes les mesures pour prévenir ce type d’agissement. Le travailleur qui a soumis son collègue lanceur d’alerte à des représailles peut être tenu pour responsable. En résumé, on peut considérer que de nos jours, en droit britannique, avoir une politique de lancement d’alerte doit être considéré comme une position « par défaut »: l’entreprise qui n’en a pas doit s’attendre attendre à justifier les excellentes raisons qui ont motivé son choix ! 2. DROIT AMÉRICAIN (USA) Aux États-Unis, la question du lancement d’alerte est consignée dans plusieurs instruments juridiques dont nous allons envisager les principaux ci-après. 11 http://employmentlawblog.fieldfisher.com/category/enterprise-and-regulatory-reform-act-2013, le 04.01.2015.
  • 14. III – Contexte juridique Page 13 sur 51 2.1 False Claim Act Le False Claim Act (ci-après « FCA ») vise à protéger l'État contre la fraude par des entreprises impliquées dans tout contrat ou programme financé par le gouvernement fédéral américain, à l’exception de la fraude fiscale. Quiconque a connaissance d’une fraude passée ou présente commise au détriment du gouvernement fédéral peut engager des poursuites au nom du gouvernement. En outre, en vertu du FCA, tout individu qui collabore à une poursuite judiciaire peut recevoir tout ou partie de l’amende imposée. Le FCA prévoit d’accorder à ceux qui rapporteront les faits des récompenses de 10 à 30 % des sommes recouvertes. Un lanceur d’alerte a rapporté au Department of Justice américain (ci-après « DoJ ») que GLAXOSMITHKLINE avait distribué entre 2001 et 2005 des médicaments frelatés fabriqués dans une usine portoricaine aujourd’hui fermée. L’entreprise pharmaceutique britannique a été condamnée en 2010 à une amende de 750 millions USD (env. 630 millions EUR) et le lanceur d’alerte a été récompensé pour son action à hauteur de 96 millions USD (env. 80 millions EUR).12 Le FCA vise également à sanctionner une entreprise cherchant à intimider ou harceler un lanceur d’alerte qui dénoncerait ses malversations. La protection que le FCA accorde au lanceur d’alerte consiste en l’interdiction de licenciement, harcèlement, représailles en tout genre. Le lanceur d’alerte a droit à tout le secours nécessaire pour une indemnisation complète, y compris la réintégration, le paiement d’un double pécule de retour, le remboursement des frais de justice et d’avocat qu’il aurait encourus.13 12 http://business-ethics.com/2010/10/26/1740-glaxosmithkline-to-pay-750-million-fine- whistleblower-to-get-96-million/, le 01.01.2015. 13 A global guide to Whistleblowing laws, op.cit.
  • 15. III – Contexte juridique Page 14 sur 51 Ainsi la directrice du trading de PARADIGM CAPITAL MANAGEMENT INC., une société américaine de conseil en hedge funds, avait dénoncé à la Security and Exchange Commission (ci-après la « SEC »), le « gendarme » américain de la bourse, des activités illégales de son employeur. À la suite de cela, l’employée avait été rétrogradée et dépouillée de ses responsabilités de supervision. En juin 2014, la SEC a condamné l’entreprise à 2.2 millions USD d’amende (env. 1.8 million EUR) pour avoir pris des mesures de rétorsion à l’égard de son employée lanceuse d’alerte.14 2.2 Sarbanes Oxley Act En 2001, les USA assistaient à la faillite d’ENRON, entreprise qui était alors le numéro un mondial du courtage en énergie et septième entreprise américaine. L’enquête menée par la SEC a révélé que les comptes de l’entreprise avait été maquillés, des sociétés hors bilan avaient été créées dans des paradis fiscaux, des dettes avaient été dissimulées, etc. Alors que les dirigeants encaissaient des centaines de millions de dollars en exerçant leurs stock-options et en vendant leurs actions, des milliers d’emplois étaient perdus et les investissements de tous les autres petits actionnaires partaient en fumée. Un des constats qui a été fait suite à la crise d’ENRON était que la faiblesse du système de gouvernance d’ENRON avait permis l’apparition de comportements non éthiques et n’avait pas su jouer son rôle de « chien de garde »: mettre à jour les problèmes et les corriger avant qu’il ne soit trop tard.15 14 http://www.bloomberg.com/news/2014-06-16/sec-fines-new-york-advisor-for-whistle-blower- retaliation.html, le 01.01.2015. 15 http://www.adma.qc.ca/Publications/Info-ADMA/InfoADMA-Mars- 2012/Enron%2010%20ans%20plus%20tard.aspx, le 26.12.2014.
  • 16. III – Contexte juridique Page 15 sur 51 À la suite de ce scandale, le législateur américain a adopté en 2002 le Sarbanes-Oxley Act (ci-après le « SOX »), loi sur la réforme de la comptabilité des sociétés cotées et la protection des investisseurs. Le SOX décourage les comportements non éthiques dans les entreprises en rendant plus sévères les amendes et peines d’emprisonnement des contrevenants. Le SOX interdit l’accès à la cotation boursière aux USA aux sociétés dont le comité d’audit n’a pas établi de procédure pour la réception, la conservation et le traitement de plaintes reçues par l’entreprise relatives à des questions de comptabilité, de contrôle interne ou d’audit. 2.3 Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act16 Le Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act (ci-après le « DFA ») a trois clauses distinctes en matière de lancement d’alerte. • Le DFA protège les employés qui rapportent une violation du Commodity Exchange Act17 à la Commodity Futures Trading Commission (ci-après « CTC ») ou qui collaborent à une enquête ou une action judiciaire ou administrative de la CTC. • Le DFA couvre les lanceurs d’alerte qui fournissent à la SEC des renseignements liés à une violation du droit des valeurs mobilières ou qui lancent ou collaborent à une enquête menée par la SEC. Le DFA protège aussi les lanceurs d’alerte qui ont fourni des renseignements réclamés par le SOX, ou par toute autre loi soumise à la juridiction de la SEC. • Le DFA protège l’activité du lanceur d’alerte en vertu du Consumer Financial Protection Act (ci-après « CFPA ») qui protège de tout licenciement ou toute discrimination un employé dans le secteur financier qui a contribué de manière directe ou indirecte à une enquête liée à la gestion ou la mise en œuvre du CFPA ou de toute autre clause légale qui est soumise à la juridiction du Bureau of Consumer Financial Protection. 16 A global guide to Whislteblowing laws, op.cit. 17 Le Commodity Exchange Act prévoit la règlementation au niveau fédéral de toutes les activités de matières premières et de trading et requiert que les futures options de matières premières soient négociées sur des marchés régulés. (http://en.wikipedia.org/wiki/Commodity_Exchange_Act, le 06.01.2015).
  • 17. III – Contexte juridique Page 16 sur 51 Ainsi en septembre 2014, la SEC a accordé une récompense record de 30 millions USD (env. 25 millions EUR) à un lanceur d’alerte anonyme qui vit en dehors des États-Unis. L’homme avait fourni des informations cruciales qui avaient permis à la SEC de mettre à jour une fraude qu’il aurait été impossible de détecter autrement.18 3. COMPÉTENCES JURIDICTIONNELLES Pour éviter toute confusion, il est bon de rappeler qu’en cas de fraude, le premier droit applicable est celui du pays où l’infraction a été commise. Imaginons que Monsieur QUATRÉDEUSIX 19 , citoyen français employé aux Pays-Bas, est inculpé de corruption par un juge néerlandais. Il sera d’abord jugé aux Pays-Bas. S’il est reconnu coupable, il devra encourir la peine prononcée (emprisonnement et/ou amende). Si par contre le juge d’instruction néerlandais décide d’abandonner les poursuites faute d’éléments à charge, la justice française ou britannique pourrait se saisir du dossier, mener une instruction et, en cas d’indices suffisants de culpabilité, juger Monsieur QUATRÉDEUSIX. En vertu du principe Non bis in idem, l'article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose que « nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l'Union européenne par un jugement pénal définitif conformément à la loi ».20 Cela signifie que Monsieur QUATRÉDEUSIX ne peut être jugé qu’une seule fois par le tribunal d’un État membre de l’Union européenne. En revanche, les États-Unis ne sont pas signataires de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Si un élément constitutif de l’infraction 18 http://www.bbc.com/news/business-29316077, le 02.01.2015. 19 http://www.asterix.com/asterix-de-a-a-z/les-personnages/quatredeusix.html, le 02.01.2015. 20 http://fr.wikipedia.org/wiki/Non_bis_in_idem, le 06.01.2015.
  • 18. III – Contexte juridique Page 17 sur 51 présente un rattachement suffisant avec les États-Unis (p.ex.: le pot-de-vin a été payé aux États-Unis, le pacte de corruption a été conclu aux États-Unis ou par téléphone avec une personne au moins se trouvant sur le territoire américain, etc.), le DoJ pourrait poursuivre Monsieur QUATRÉDEUSIX et le condamner. Au total, Monsieur QUATRÉDEUSIX pourrait être jugé et condamné deux fois ! Si l’entité employant Monsieur QUATRÉDEUSIX aux Pays-Bas est présente aux États-Unis, et que le pacte de corruption a été commis par Monsieur QUATRÉDEUSIX au bénéfice de celle-ci, l’entité batave pourra également être poursuivie par le DoJ et par le juge néerlandais et faire l’objet d’une double condamnation, le principe non bis in idem ne trouvant pas son application.
  • 19. IV – Le lancement d’alerte Page 18 sur 51 IV. Le lancement d’alerte 1. QU’EST-CE QUE LE LANCEMENT D’ALERTE ? Le lancement d’alerte est l’action par laquelle un employé rapporte une suspicion de malversation liée au milieu professionnel dans lequel il évolue. L’objet de cette remontée d’information peut concerner l’entreprise elle-même, un autre employé – qu’il ait le statut d’employé, de cadre ou de cadre dirigeant –, un fournisseur ou toute autre partie prenante. Lorsque les faits dénoncés par le lanceur d’alerte relèvent d’une possible violation de la loi ou de toute affaire grave qui pourrait mettre en cause la responsabilité civile ou pénale de l’entreprise, cette dernière doit se demander si elle mènera son enquête en recourant à des conseillers internes ou externes et si elle doit rapporter les faits dénoncés à des instances officielles, répondant ainsi à une exigence légale. Les alertes concernent généralement les sujets suivants: • Soupçon d’infraction pénale; • Soupçon de corruption; • Non-conformité avec la loi applicable; • Dommages environnementaux; • Soupçon d’infraction à l’éthique; • Attitude à l’égard d’employés (e.g. intimidation, harcèlement); • Discrimination; • Dissimulation délibérée d’informations relatives aux sujets précités. 2. AVANTAGES D’UNE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE Une Politique de Lancement d’Alerte (ci-après une « PLA ») met en place la procédure que devra suivre un employé qui souhaite rapporter des malversations.
  • 20. IV – Le lancement d’alerte Page 19 sur 51 Ainsi qu’il a déjà été dit, avoir une PLA n’est pas une contrainte légale. Cependant, aux yeux des autorités britanniques et américaines, la PLA constitue la composante matérielle d’un programme adéquat de compliance et fournit plusieurs avantages: • Les problèmes peuvent être identifiés tôt, de telle sorte que l’entreprise a l’occasion de les traiter avant que les autorités ou les médias ne soient alertés. • Les employés sont encouragés à recourir aux canaux internes pour enregistrer leurs plaintes et préoccupations au lieu de recourir à la justice, à la presse ou aux réseaux sociaux. • Les employés sont encouragés à rapporter des problèmes qu’il est dans l’intérêt de l’entreprise de connaître et de corriger. Avoir une PLA permet à l’entreprise d’identifier facilement et rapidement des méfaits: c’est particulièrement important lorsqu’il s’agit d’un comportement présumé criminel. • Avoir une personne à qui rapporter des méfaits met les employés en confiance: ils n’auront pas l’impression que leur démarche pourrait nuire à leur carrière, surtout si les faits qu’ils dénoncent concernent leur supérieur hiérarchique direct. • Le risque pour l’entreprise d’encourir des amendes, des sanctions ou un dommage de réputation est réduit. • Ne pas avoir de PLA peut être perçu par les autorités administratives ou judiciaires comme l’indicateur d’un programme de compliance pauvre ou faible. • Dans le cadre d’un appel d’offre, des clients ou des organisations étatiques qui mènent un audit préalable (« due diligence », en anglais) relatif à une entreprise qui n’a pas de PLA auront tendance à se montrer défavorables à son égard. 3. INCONVÉNIENTS D’UNE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE • Avoir une PLA et la rendre publique peut encourager des fauteurs de troubles ou des employés revanchards à déposer des plaintes de manière malintentionnée ou inconsidérée contre l’entreprise ou d’autres employés. L’entreprise doit prendre le temps de faire le tri entre les fausses et les vraies dénonciations et traiter ces dernières adéquatement.
  • 21. IV – Le lancement d’alerte Page 20 sur 51 • La protection qu’accorde le droit britannique aux lanceurs d’alerte peut encourager les abus pour les employés qui n’ont pas de véritable fait à dénoncer mais qui souhaitent éviter temporairement un licenciement. En effet, l’Employment Rights Act 1996 autorise tout employé qui est licencié pour avoir dénoncé des malversations à intenter une action auprès de l’Industrial Tribunal pour licenciement abusif. C’est ce qui est arrivé au mécanicien d’un garage du Kent qui s’était plaint auprès de sa direction de ce que ses supérieurs hiérarchiques surfacturaient certaines prestations. Quatre semaines plus tard, l’homme était licencié pour « attitude négative au travail ». En décembre 2014, le tribunal a reconnu le licenciement abusif et a accordé au plaignant 46'000 GBP (env. 60'000 EUR) de compensation. En revanche, le défenseur n’a pas été poursuivi pour ses escroqueries envers ses clients car la compétence du tribunal ne s’étendait pas à enquêter sur ces allégations.21 • La mise en place d’une PLA génère un coût en temps et en argent mais, si elle est faite correctement, cela évitera les problèmes identifiés supra. • Pour qu’une PLA fonctionne convenablement, la peur d’un employé d’être perçu comme un « mouchard » par ses collègues, sa hiérarchie ou son employeur doit être dépassée. Les barrières culturelles qui pourraient dissuader un employé de recourir à la PLA doivent être comprises et un programme d’éducation doit être mis en place pour les briser. 4. RISQUES LIÉS À L’ABSENCE DE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE • Les entreprises qui n’ont pas de PLA claire courent le risque que leurs employés préfèrent déposer leur plainte auprès d’un organe extérieur, comme la justice ou les médias. Cela peut mener à une enquête formelle dans l’entreprise, avec des risques de réputation extrêmement dommageables. Même s’il existe une PLA au 21 http://www.dailymail.co.uk/news/article-2861191/Whistleblowing-garage-mechanic-wins-46-000- compensation-sacked-accused-bosses-overcharging-customers.html, le 02.01.2015.
  • 22. IV – Le lancement d’alerte Page 21 sur 51 sein de l’organisation, le risque demeure que des employés craignent malgré tout des représailles s’ils dénoncent des méfaits. • Les autorités américaines et britanniques encouragent vivement les lanceurs d’alerte à se présenter à elles. En l’absence d’encouragement de même nature de la part d’une entreprise à recourir à ses propres instances, les employés n’auront pas d’autre alternative que de s’adresser directement aux autorités judiciaires. • Aux États-Unis, en vertu du Dodd-Franck Act, le lanceur d’alerte qui a fourni aux autorités des informations utiles à leur enquête est protégé et recevra un pourcentage de l’amende infligée à l’entreprise sur base des faits qu’il aura dénoncés. • Le Royaume-Uni n’offre pas pour l’instant les mêmes incitants aux lanceurs d’alerte mais des indices laissent penser que les autorités s’apprêtent à ouvrir le débat sur l’opportunité d’accorder de tels avantages. • Le droit britannique prévoit qu’un employé qui dénonce certains types de méfaits dans l’intérêt général est protégé contre le licenciement. Si l’employé est malgré tout licencié à cause de l’alerte qu’il a lancée, le montant de l’indemnité que son employeur lui doit est illimité. En 2010, le directeur d’un hôpital, qui avait été licencié après avoir dénoncé des pratiques illégales commises par l’administration dont dépendait l’institution hospitalière qu’il dirigeait, a démontré à la justice qu’il avait été victime d’un licenciement abusif et a été indemnisé de 1.2 million GBP (env. 1.6 million EUR)22 . 22 http://www.xperthr.co.uk/editors-choice/unfairly-dismissed-whistleblower-wins-gbp12-million- compensation/104755/, le 02.01.2015.
  • 23. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 22 sur 51 V. Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ 1. SITUATION ACTUELLE Un dispositif d’alerte éthique existe déjà chez GDF SUEZ. Le site internet du Groupe y consacre une grande partie: « GDF SUEZ a mis en place un dispositif d’adresse électronique (ethics@gdfsuez.com) réservé à toutes les personnes employées par lui, quel que soit leur statut d’emploi, leur permettant de signaler des problèmes pouvant sérieusement affecter leur activité ou engager gravement leur responsabilité. Il ne se substitue pas aux autres canaux d’alerte existants (auprès de la hiérarchie, des représentants du personnel, du commissaire aux comptes, d’une autorité publique…): il en est le complément. L’identité de l’utilisateur du dispositif est traitée de manière confidentielle sous peine de sanctions en cas de rupture de la confidentialité. Le responsable du dispositif de signalement est le déontologue du Groupe assisté du Directeur en charge de l’Ethique et Compliance Groupe. »23 Un incident éthique peut être rapporté selon les manières suivantes: • La ligne hiérarchique du lanceur d’alerte; • Le déontologue de la branche à laquelle appartient le lanceur d’alerte, au moyen d’un courrier postal ou électronique, d’un entretien téléphonique ou de visu, avec ou sans rendez-vous (pratique de la « porte ouverte »); • Le déontologue du Groupe, au moyen d’un courrier postal ou électronique, d’un entretien téléphonique ou de visu, avec ou sans rendez-vous (pratique de la « porte ouverte »); • L’adresse électronique dédiée (ethics@gdfsuez.com). 23 http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/dispositif-de-mail-ethique/, le 26.12.2014.
  • 24. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 23 sur 51 À la demande du lanceur d’alerte, les informations qu’il aura fournies pourront être traitées confidentiellement. 2. POINTS D’AMÉLIORATION • La pratique de la « porte ouverte » protège la confidentialité du lanceur d’alerte et évite la peur des représailles. La protection pourrait être étendue en recourant à un tiers de confiance soumis au secret professionnel et au « legal privilege24 ». • Le lancement d’alerte devrait être encouragé en étant présenté comme un composant de procédures de lutte contre la corruption. Les aspects culturels du lancement d’alerte ne devraient pas être sous-estimés. Dans les pays anglo- saxons, le lancement d’alerte est considéré positivement, alors que dans les pays latins il est assimilé à de la délation. Ainsi la société française DUCROS a-t-elle vu sa hotline dédiée à l’alerte rebaptisée « Allô Collabo » par ses salariés25 . La mise en place réussie d’une PLA doit inclure ces données culturelles. • Les lanceurs d’alerte ne doivent pas s’imaginer que la compliance est un simple habillement de façade. Dès lors, il doit être rappelé fréquemment que la politique de tolérance zéro pour les manquements à l’éthique est de rigueur. • Les membres du département Audit & Risques seront encouragés à rapporter au Comité de Compliance tout incident dont ils auraient connaissance. Cependant, la divulgation de faits ne permet pas toujours au Comité de Compliance de se faire une idée précise de leur étendue et de leur gravité. Un résumé accompagné de documents probants devrait être mis à la disposition du Comité de Compliance qui mobilisera toutes les ressources externes et internes nécessaires pour enquêter sur un incident ou sa résolution. • Afin de respecter la confidentialité des faits rapportés, le nombre de personnes habilitées à recueillir les alertes devrait être limité le plus possible. Il n’est pas 24 Le « legal privilege » est un concept de common law qui vise à empêcher que toutes les communications entre un professionnel du droit (avocat, auxiliaire de justice) et son client ne soient divulguées sans l’autorisation du client. Le privilège est donc dans le chef du client et non du juriste. Par facilité, nous utiliserons le terme anglais dans ce travail. 25 Quand le whistleblower est sifflé hors jeu par le système: expulsion puis résilience du footballeur Jacques Glassmann, par Sandra CHARREIRE-PETIT et Julien CUSIN, 2006.
  • 25. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 24 sur 51 nécessaire que le Directeur financier (CFO), le Directeur des communications financières, les membres du Conseil d’administration, les membres du Comité d’éthique et les auditeurs soient automatiquement informés de tous les incidents rapportés. • Un registre des incidents sera tenu et fera l’objet d’une protection renforcée contre les hackers, les actions malintentionnées de tiers, etc. • À supposer que le nombre d’incidents rapportés augmente significativement, le Comité de Compliance devra définir une politique de traitement des incidents en les classant par ordre de priorité: (1) crimes, infractions pénales qui pourraient donner lieu à une accusation de complicité ou de dissimulation pour l’entreprise ou pour ses dirigeants, communication d’informations privilégiées; (2) infractions pénales qui ne peuvent pas donner lieu à une accusation de complicité ou de dissimulation pour l’entreprise ou pour ses dirigeants, incidents qui ternissent l’image du Groupe; (3) incidents qui ne sont pas des infractions pénales. • Une non-sanction ou une sanction trop légère pourrait être considérée comme une approbation de l’incident éthique rapporté. L’attention du Comité de Compliance et des dirigeants du Groupe doit être attirée sur l’importance de sanctionner les incidents éthiques. • La mise en place d’une hotline externe dédiée au lancement d’alerte est la dernière étape pour compléter la PLA de GDF SUEZ. 3. HOTLINE EXTERNE DÉDIÉE AU LANCEMENT D’ALERTE Il existe des fournisseurs externes de service dédiés au lancement d’alerte: des entreprises spécialisées ou des cabinets d’avocats. 3.1 Les entreprises spécialisées Les entreprises spécialisées ont l’avantage d’être perçues comme étant indépendantes de l’entreprise qui les engage. En effet le lanceur d’alerte veut être sûr que le fournisseur lui doit l’obligation de – par exemple – garder son identité confidentielle.
  • 26. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 25 sur 51 3.2 Les cabinets d’avocats Les cabinets d’avocats donnent souvent l’impression de ne pas être tout à fait indépendants, surtout s’ils travaillent depuis longtemps pour l’entreprise liée aux pratiques douteuses que le lanceur d’alerte veut dénoncer. En outre, les cabinets d’avocats sont au service de leur client qui pourrait demander que l’identité du lanceur d’alerte soit révélée. Des conflits d’intérêt pourraient donc survenir entre l’entreprise cliente du cabinet d’avocats et le lanceur d’alerte. Il en va de même pour le legal privilege: les informations fournies par le lanceur d’alerte au cabinet d’avocats ne sont pas couvertes par le legal privilege puisque le privilège de divulguer l’information est dans le chef du client, à savoir l’entreprise. En effet seules les informations échangées entre l’avocat et son client sont couvertes par le legal privilege. Cela pourrait dissuader le lanceur d’alerte de se confier au cabinet d’avocats. Ces embûches pourraient être surmontées si le cabinet d’avocats pouvait traiter comme son client le lanceur d’alerte et non pas l’entreprise. Mais il appartiendrait bien sûr à l’entreprise de choisir le cabinet d’avocats et de régler ses honoraires. Cette configuration rend les relations compliquées. 3.3 Option retenue par le Groupe GDF SUEZ Le Groupe GDF SUEZ a retenu une solution médiane: ajouter deux acteurs aux interlocuteurs existants. Si le lanceur d’alerte souhaite s’adresser à un interlocuteur extérieur au Groupe, son premier contact sera un fournisseur de service externe par le biais d’une hotline. Ce fournisseur de service transmettra ensuite l’alerte à un cabinet d’avocats dont GDF SUEZ sera le client ce qui assurera l’avantage du legal privilege et une garantie d’indépendance pour le lanceur d’alerte. Afin de se conformer aux exigences du UKBA selon lesquelles les entreprises doivent mettre en place des procédures adéquates pour prévenir la corruption et, partant,
  • 27. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 26 sur 51 s’exonérer de la responsabilité totale ou partielle dans un cas de corruption, le Groupe GDF SUEZ a mis au point le dispositif suivant: • Désigner un fournisseur de service externe; • Ce fournisseur de service externe sera le premier point de contact de tout employé du groupe, que ce dernier souhaite rester anonyme ou non; • Le fournisseur de service externe transmettra à un cabinet d’avocats désigné par GDF SUEZ son rapport sur les méfaits qui lui auront été rapportés. • Le cabinet d’avocats procédera à une analyse préliminaire pour déterminer si les faits allégués peuvent être qualifiés de corruption, d’infraction criminelle ou d’infraction grave. A défaut, le rapport sera rejeté. • Au terme d’un délai raisonnable – soit une semaine, sauf urgence – le cabinet d’avocats transmettra une note au Directeur juridique du Groupe pour qu’une action soit entreprise. • Le Directeur juridique du Groupe prendra le dossier en charge, en collaboration avec la DJ Compliance. Pour la bonne mise en place de la PLA au sein du Groupe GDF SUEZ, il sera important de faire savoir que: • Le recours par un lanceur d’alerte employé du Groupe au fournisseur de service externe n’est pas obligatoire. • Toute accusation abusive et/ou fausse et/ou calomnieuse sera punie par GDF SUEZ et le lanceur d’alerte en sera tenu pour civilement et pénalement responsable. 4. PROJET DE POLITIQUE DE LANCEMENT D’ALERTE AU SEIN DU GROUPE GDF SUEZ La PLA doit tenir compte des spécificités du Groupe, telles que son activité, les régions et les cultures où il opère. Cependant, pour une question de cohérence au sein du Groupe, il est nécessaire d’avoir une PLA unique, avec quelques adaptations locales pour prendre en compte certaines particularités. Les employés doivent savoir que la
  • 28. V – Le lancement d’alerte dans le Groupe GDF SUEZ Page 27 sur 51 personne avec qui ils seront en contact parle leur langue et comprend leurs conditions de travail. La PLA devra faire l’objet d’une vaste campagne de communication de sorte que chaque employé (et si besoin chaque fournisseur et cocontractant) en soit informé, sache comment l’utiliser et en connaisse la procédure. La communication de départ devra être actualisée régulièrement pour que les employés du Groupe gardent à l’esprit que cette PLA existe. Ils doivent être convaincus que l’entreprise considère les sujets de fraude et de corruption avec le plus grand sérieux et prend les mesures nécessaires. Les intranets des entités du Groupe relaieront le message, avec l’appui du CEO. La PLA doit encourager chaque employé à rapporter ses préoccupations d’abord à son supérieur hiérarchique direct et à recourir ensuite et seulement aux instances mises en place pour le lancement d’alerte si la réponse qu’il reçoit de son supérieur hiérarchique direct ne le satisfait pas ou si le problème concerne ce dernier. Le lanceur d’alerte, quel que soit le moyen par lequel il dénonce les faits, a besoin de savoir que la personne à qui il s’adresse est indépendante et gardera son identité confidentielle si nécessaire. Quiconque reçoit une alerte doit avoir les compétences et les ressources pour mener une investigation, la confier à des conseillers externes si nécessaire et savoir si et quand il est opportun de rapporter l’information aux autorités administratives ou judiciaires. Une collaboration avec les conseillers en communication ou la Direction des relations publiques peut être utile également, selon l’ampleur de l’affaire. Le lanceur d’alerte sera tenu informé de manière générale de la réponse que l’entreprise apporte, de sorte que sa confiance dans le système reste intacte.
  • 29. VI – Le lanceur d’alerte Page 28 sur 51 VI. Le lanceur d’alerte Pensons à Edward SNOWDEN, cet informaticien américain, ex-employé de la CIA et de la NSA, qui a révélé au monde les détails de plusieurs programmes de surveillance globale d’une ampleur inédite: aujourd’hui traqué par la justice américaine qui l’accuse d’espionnage, il a trouvé un asile temporaire en Russie pour échapper aux poursuites. Quant au mécanicien garagiste qui avait dénoncé les pratiques de surfacturation que nous avons évoquées au chapitre IV, il reconnaît que cette affaire a eu sur lui un énorme impact émotionnel et psychologique.26 En effet, le lanceur d’alerte est soumis à un paradoxe: si son discours est désormais valorisé socialement dans une société adepte de l’information en continu et de la transparence et friande de la dénonciation des scandales, il est dans le même temps exposé au niveau individuel à des représailles. Il y a donc la réunion de deux éléments: d’une part, le fait de dire la « vérité » et, d’autre part, le fait que cette vérité dite comporte un risque pour celui qui l’énonce.27 Malgré l’arsenal juridique existant, le lanceur d’alerte reste souvent seul face à sa conscience car lancer une alerte est un combat individuel. Alerter, c’est briser la consigne du silence, rompre la solidarité de corps, faire acte d’insubordination et donc, dans une acception large du terme, désobéir. Néanmoins, l’alerte est juste quand elle tend à faire cesser un péril ou une atteinte à des victimes et ce peut être l’honneur d’une personne que de dénoncer un scandale, une malversation ou un complot. Mais en dénonçant, le lanceur d’alerte trahit. Son geste a 26 Op.cit., le 02.01.2015. 27 Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, Serge SLAMA, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014.
  • 30. VI – Le lanceur d’alerte Page 29 sur 51 toutes les chances d’être interprété par sa collectivité d’appartenance comme une remise en cause de la loyauté normalement due au groupe. Lui, au contraire, mettra en avant la fidélité à certaines valeurs – une autre forme de loyauté, donc – qui a guidé son geste.28 Il y a trois étapes-clé pour un lanceur d’alerte. • D’abord « je vais le faire » et l’excitation de faire face et d’être important. • Vient ensuite la désillusion quand le lanceur d’alerte est laissé seul et que ses collègues le lâchent alors qu’ils lui avaient promis leur aide. • Surgit enfin un problème psychologique sous-jacent: o Un épuisement professionnel (ou burn-out); o Un manque de reconnaissance par rapport aux risques que le lanceur d’alerte a encourus en dénonçant une malversation, à savoir que ce dernier a mis en danger sa carrière, sa santé, sa vie même, puisque cela peut conduire dans les cas les plus grave au suicide; o Une perte de sens dans le conflit qui oppose les valeurs personnelles du lanceur d’alerte et celles véhiculées par l’entreprise. À ce stade, le lanceur d’alerte a le sentiment profond d’avoir tout perdu.29 Écartelés entre toutes ces valeurs, beaucoup perdent pied. Une étude américaine a démontré que sur un groupe de 36 lanceurs d’alertes, la plupart ont perdu leur emploi et n’ont jamais retravaillé dans le même secteur d’activité. Beaucoup ont perdu leurs familles, car les procédures judiciaires devant les tribunaux ont duré des années. Quasi tous ont été en burn-out. Une majorité a souffert de dépression, 28 L’alerte éthique, entre dénonciation et désobéissance, Danièle LOCHAK, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014. 29 http://www.fcpablog.com/blog/2014/12/1/for-most-whistleblowers-life-is-hell.html#, le 02.12.2014.
  • 31. VI – Le lanceur d’alerte Page 30 sur 51 souvent mâtinée d’alcoolisme ou de dépendance à diverses substances illicites. Le plus grand choc provient de ce que le lanceur d’alerte apprend du monde: que rien de ce qu’il a observé n’est vrai. Les lanceurs d’alertes, souvent isolés, finissent par souffrir de fatigue chronique, de problèmes relationnels ou de dépression nerveuse. La dépression provient du fait que les lanceurs d’alerte sont soudain plongés dans un monde dont ils ignoraient l’existence, où les règles qu’ils pensaient applicables ne s’appliquent pas. C’est terrible de faire quelque chose par idéal parce qu’on croit que la cause est juste, puis de se retrouver à être considéré comme le corrompu !30 30 Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, op. cit.
  • 32. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 31 sur 51 VII. Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Nous avons vu que jusqu’à présent le département des Ressources Humaines est le grand absent du processus de lancement d’alerte dans les cas de fraude et de corruption. Le Groupe GDF SUEZ considère qu’il s’agit d’une affaire de juristes et de déontologues. Il est vrai que les risques sont importants pour l’entreprise, tant en termes financiers que d’image et de réputation. Quant au lanceur d’alerte, nous venons de le voir, sa détresse et son désarroi sont immenses. Forts de ces constats, nous pensons que les RH ont un rôle à jouer plus important que celui que le Groupe leur attribue actuellement. Ce rôle capital se décline en diverses missions. 1. LES RH, INTERLOCUTEURS DE PROXIMITÉ ET FACILITATEURS Lorsqu’un collaborateur en plein désarroi souhaite parler à une personne de confiance, c’est souvent vers un responsable RH qu’il se tourne. Dans ce cas, ce dernier sera le premier interlocuteur du lanceur d’alerte, il recevra ses confidences, ses craintes, ses soupçons, etc. Parfaitement informé de la PLA, il réorientera le collaborateur vers les contacts ad hoc vus au chapitre V: la ligne hiérarchique du lanceur d’alerte, le déontologue de la branche à laquelle le lanceur d’alerte appartient, le déontologue du Groupe, l’adresse électronique dédiée ou la société de services externe. Lorsque l’alerte sera reçue par le contact ad hoc et que le processus de lancement d’alerte sera lancé, les RH s’assureront que le droit du travail est respecté, que les données demeurent protégées et que l’accès aux informations du dossier du personnel est accordé conformément aux prescriptions légales.
  • 33. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 32 sur 51 Les RH veilleront également à s’assurer de la sécurité physique et psychique du lanceur d’alerte. Il n’est pas question qu’il soit victime de harcèlement, de représailles ou de menaces de la part de la personne dont il a dénoncé les malversations. Surtout s’il s’agit de son supérieur hiérarchique direct ! Au besoin, les RH organiseront rapidement l’« exfiltration » du lanceur d’alerte pour qu’il échappe aux foudres de celui dont il a mis les fraudes à jour. Le lanceur d’alerte qui intégrera de nouvelles fonctions à la suite de ce déplacement d’urgence se verra offrir par les RH tout l’encadrement dont il pourrait avoir besoin. Cette opération d’exfiltration étant très sensible, les RH devront faire preuve de réactivité, de confidentialité et de diplomatie. 2. LES RH, RESPONSABLES DE LA PRÉVENTION ET DE LA GESTION DES RISQUES PSYCHO-SOCIAUX Nous avons vu que le lanceur d’alerte fait très souvent l’objet de harcèlement et d’intimidation. Depuis le 1er septembre 2014, le législateur belge31 impose aux entreprises de mettre en place avant le 28 février 2015 des mesures appropriées afin de prévenir les risques psycho-sociaux au travail comme le burn-out, la violence, le harcèlement moral ou sexuel. Passé cette date, en cas de dépôt de plainte liée à un risque psycho-social, l’employeur qui n’aura pas pris de mesures préventives encourt le risque d’être sanctionné. 2.1 Qu’est-ce que le burn-out ?32 Le burn-out est l’utilisation excessive par une personne de son énergie et de ses ressources jusqu’à provoquer chez elle un sentiment d’échec et d’épuisement. 31 Arrêté royal du 10.04.2014, relatif à la prévention des risques psycho-sociaux au travail, paru au Moniteur belge du 28.04.2014 et entré en vigueur le 01.09.2014. 32 www.formation-burnout.be, le 07.01.2015.
  • 34. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 33 sur 51 « Littéralement, faire un burn-out c’est se consumer de l’intérieur, brûler à petit feu jusqu’au bout. C’est un syndrome d’épuisement professionnel à la fois physique, mental et émotionnel dont on ne sort pas indemne. C’est un tsunami qui débarque dans la vie des gens. » Les ressources internes viennent à se consumer comme sous l’action de la flamme d’une bougie, ne laissant qu’un vide immense à l’intérieur. 2.2 Quels sont les profils à risques ? 33 Les personnes les plus susceptibles d’être en burn-out sont très engagées dans leur fonction, motivées voire surinvesties. En recherche de reconnaissance, elles aiment les défis et la compétition, elles ne rechignent pas devant les heures supplémentaires et sont très disponibles pour leur entreprise. Rien n’existe vraiment en dehors de leur travail. Le lanceur d’alerte a donc le « profil-type » ! 2.3 Quels sont les symptômes du burn-out ?34 Voici une liste non exhaustive des symptômes du burn-out. Si le travailleur en rencontre quelques-uns, peut-être est-il déjà entraîné dans la spirale infernale du burn-out. Il est alors grand temps de réagir ! • Troubles du sommeil et fatigue Le travailleur s’éveille épuisé le matin et éprouve des difficultés à se lever. Même après un congé, ses batteries sont à plat. Le sommeil n’est plus réparateur car interrompu ou difficile à atteindre. • Maux de tête Les migraines se font de plus en plus fréquentes, la consommation de paracétamol dépasse la posologie recommandée. • Irritabilité et agressivité Les conflits interpersonnels avec les proches, les collègues ou la hiérarchie sont de plus en plus courants et risquent d’empirer si la situation n’est pas éclaircie 33 www.formation-burnout.be, op.cit. 34 Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, experte en prévention du burn-out, formatrice et coach chez FOSTER & LITTLE (08.01.2015)
  • 35. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 34 sur 51 immédiatement. Ils peuvent même déboucher sur de la violence verbale et/ou physique. • Perte de sens et de motivation Les valeurs personnelles de l’employé et celles de la société ne sont plus en harmonie. Dès lors, le travailleur peut voir sa motivation au travail et sa productivité baisser, ce qui va entraîner une grande frustration dans son chef, surtout s’il est habitué à de bonnes performances. La perte de motivation peut aboutir à un désintérêt total pour la fonction qu’il occupe. • Troubles de l’alimentation L’exposition à un stress chronique perturbe l’alimentation: ruée sur les en-cas, les sodas, le café, les sucres rapides ou, a contrario, perte totale d’appétit sont des signes interpellants. • Affaiblissement du système immunitaire et pathologies cardio-vasculaires Le travailleur sera plus sensible aux rhumes, grippes ou bronchites chroniques et à l’asthme. Il aura tendance à recourir à l’automédication sans consulter son médecin traitant. Parallèlement, le travailleur sentira des palpitations et une augmentation de son rythme cardiaque. Dans les cas extrêmes, il peut être victime d’hypertension artérielle, d’un infarctus du myocarde ou d’accidents vasculaires cérébraux. • Appauvrissement de la vie sociale et isolement Le travailleur aura tendance à s’isoler et à perdre le contact avec son entourage. Stress = moteur Troubles du sommeil Épuisement Conflits interpersonnels Pathologies diverses + troubles alimentaires Perte de sensBURN-OUT
  • 36. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 35 sur 51 2.5 Comment prévenir le burn-out chez le lanceur d’alerte?35 Il est important que le lanceur d’alerte ne se sente pas seul dans sa démarche. C’est pourquoi aussitôt averties qu’une alerte éthique a été lancée, les RH le mettront à l’abri de tout risque psycho-social en lui proposant un accompagnement. Il existe un test, le Maslach Burnout Inventory, qui a pour but d’identifier le burn-out et de faire le point sur la situation actuelle du travailleur. Nous avons vu au chapitre VI que le lanceur d’alerte traverse d’abord une phase d’exaltation ou d’euphorie par rapport à sa démarche. Ici, il est important de ramener le lanceur d’alerte à la réalité. Ensuite, un coaching individuel portera sur les facteurs déclencheurs de stress. Le travail se fera sur les symptômes physiques, les émotions vécues, les croyances, l’environnement professionnel et personnel du travailleur. Parallèlement à cela, et à supposer que le lanceur d’alerte n’a pas requis l’anonymat, un groupe de parole sera créé au sein de l’entreprise à l’initiative des RH. Il sera constitué du lanceur d’alerte, de son supérieur hiérarchique direct (si celui-ci n’est pas concerné bien sûr par l’alerte lancée), ainsi que du Directeur juridique Compliance et du responsable RH qui co-pilotent le processus de lancement d’alerte. Ce groupe de parole, animé par un professionnel, sera une plateforme d’échange. Le Directeur juridique Compliance communiquera sur l’état d’avancement du dossier et expliquera les décisions prises, montrant ainsi au lanceur d’alerte que sa démarche a été utile et suivie d’effets. Cela a pour but de répondre au besoin de reconnaissance du lanceur d’alerte. 2.6 Risques et conséquences pour une entreprise d’avoir un collaborateur en burn-out36 Le burn-out est une des premières causes d’absentéisme. Dans 50% des cas, le stress en est l’origine. 35 Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, op.cit. 36 Interview de Manoëlle VAN DER STRATEN, op.cit.
  • 37. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 36 sur 51 Les conséquences sont, d’une part, une absence de longue – voire très longue – durée (entre six mois et trois ans) pour l’employé en burn-out et, d’autre part, la désorganisation du service auquel il appartient. Le coût pour l’entreprise s’élève entre 500 et 900 EUR par collaborateur et par jour d’absence, soit 10 milliards EUR pour les employeurs belges ! En France, d'après une évaluation de l'Institut national de recherche et de sécurité, l'estimation du coût social du stress professionnel est de 2 à 3 milliards EUR, soit 10 à 20 % des dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la Sécurité sociale.37 3. LES RH, GARDIENNES DES VALEURS ÉTHIQUES DE L’ENTREPRISE La détérioration des conditions du travail résulte souvent d’un déficit sur le plan de l’éthique et des valeurs. On croit à tort que l’écart entre le discours dominant et les pratiques est sans conséquence. C’est un leurre: les salariés décèlent rapidement le manque d’intégrité chez l’autorité et sa malhonnêteté est loin de passer inaperçue. Les deux ont un effet démobilisateur qui détériore les conditions de travail et qui fait souffler un fort vent d’incertitude et d’insécurité.38 Or les pratiques de gestion et la culture d’entreprise qui s’appuient sur les valeurs de respect et l’éthique servent de bouclier contre le harcèlement. Toutes les recherches 37 http://www.lefigaro.fr/emploi/2014/12/05/09005-20141205ARTFIG00095-l-explosion-des-cas-de- burn-out-inquiete-les-medecins-du-travail.php, le 07.01.2015. 38 http://www.psycho-ressources.com/bibli/harcelement-1.html, le 05.01.2015.
  • 38. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 37 sur 51 en management le prouvent, chaque salarié est une richesse potentielle pour l’entreprise où il est embauché s’il est respecté dans sa singularité.39 Nous avons vu que le Groupe GDF SUEZ a une charte éthique basée sur quatre principes d’action simples et précis: agir en conformité avec les lois et les réglementations, ancrer une culture d’intégrité, faire preuve de loyauté et d’honnêteté et respecter les autres. Le rôle des RH dans la mise en œuvre de la déclaration des valeurs se joue à plusieurs niveaux. 3.1 Recrutement La concordance parfaite entre les valeurs de l’entreprise et celles du candidat ne peut exister. Par contre, s’assurer d’un seuil minimum de compatibilité est souhaitable, sous peine d’engager un travailleur qui, tôt ou tard, quittera l’entreprise, faute de ne pouvoir s’y identifier ou s’y intégrer. Une des questions à poser à un candidat lors de l’entretien d’embauche est comment il comprend et interprète les valeurs éthiques de l’organisation. Cela permet de faire prendre conscience au candidat de l’importance que le Groupe y accorde. 3.2 Accueil des nouveaux collaborateurs L’entrée en fonction d’un nouveau travailleur est l’occasion idéale pour faire passer un message et induire des bonnes pratiques. 3.3 Formation Un changement de culture, ou simplement l’accompagnement de la culture existante, se traduit indirectement par des besoins en formations. Ces formations ont rarement pour objet les valeurs à proprement parler, mais celles-ci sont sous-jacentes aux aptitudes à développer. Les barrières culturelles qui pourraient dissuader un employé de recourir à la PLA doivent être comprises et un programme d’éducation doit être mis en place pour les 39 Op. cit.
  • 39. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 38 sur 51 briser. Il inclura la sensibilisation aux questions d’éthique et de corruption, la présentation de la PLA, les comportements à adopter en cas de soupçon de malversation et la procédure à suivre pour lancer une alerte. 3.4 Évaluation Étant donné que les travailleurs sont une vitrine pour l’extérieur, il est important qu’ils incarnent les valeurs véhiculées par l’entreprise. C’est pourquoi l’application des valeurs peut être un paramètre à mesurer lors des évaluations. Les évaluations annuelles peuvent être aussi l’occasion pour les RH de repérer un employé qui aurait toujours donné satisfaction et qui tout à coup aurait une mauvaise évaluation justifiée par une faible performance: serait-il victime de harcèlement ? Aurait-il eu connaissance d’une malversation commise par son supérieur hiérarchique ou – pire ! – aurait-il voulu la dénoncer ? Que cache cette soudaine appréciation négative ? Les RH doivent être capables de détecter un collaborateur soumis à du harcèlement ou à des menaces de la part de son supérieur hiérarchique. 3.5 Marketing RH (employer branding) L’attractivité de l’entreprise et la fidélisation des collaborateurs ne se traduisent pas qu’en termes d’avantages en tout genre au bénéfice des travailleurs. Un des éléments- clés du marketing RH réside au départ dans la description de l’entreprise et de sa culture.40 3.6 Entretien de sortie Une des tâches principales dans la gestion du personnel est de conserver une trace du comportement qui est acceptable aux yeux de la loi, qui est en ligne avec les attentes des acteurs-clés, et qui est cohérent avec les valeurs de l’organisation. Les RH doivent profiter des entretiens de sortie des cadres dirigeants pour détecter des 40 http://www.hrworld.be/hrworld/mssion-statement-strategie-rh-hr-didier- erwoine.html?LangType=2060, le 03.01.2015.
  • 40. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 39 sur 51 comportements suspects41 . Si une malversation est soupçonnée, les RH en avertiront sans délai la DJ Compliance qui initiera le processus de lancement d’alerte. 4. LES RH, GESTIONNAIRES DES CONTRATS DE TRAVAIL 42 Le manquement aux valeurs de l’entreprise, a fortiori s’il est qualifié d’infraction pénale, constitue sans aucun doute un motif grave de licenciement. En cas de licenciement pour faute grave, aucune indemnité de rupture n’est due. Lorsque la faute grave est avérée, c’est aux RH de procéder au licenciement de l’employé fautif en veillant à ce que les procédures soient scrupuleusement respectées. 4.1 Définition Est considérée comme constituant un motif grave justifiant la rupture immédiate du contrat de travail « toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible la collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur ».43 Les éléments sont donc44 : • Le comportement fautif La faute ne doit pas nécessairement être contractuelle. Des faits de la vie privée peuvent constituer un motif grave en raison de leur influence sur l’exécution du contrat de travail. Imaginons qu’un cadre du département financier de GDF SUEZ soit trésorier du club de tennis de son village. Dans le cadre de cette dernière activité, il est inculpé puis condamné pour détournement de fonds. Le Groupe pourrait considérer que la confiance est rompue et mettre fin à son contrat de travail pour motif grave. • L’impossibilité de collaboration doit être immédiate et définitive. Il s’agit de faits détruisant la confiance qui doit présider aux relations de travail. Le motif grave est la faute accompagnée de toutes les circonstances qui peuvent lui donner le caractère de gravité requis pour justifier la rupture sans préavis. 41 http://www.leechgrc.com/pdf/f_e/HumanResourceVol6No589.pdf, le 02.12.2014. 42 Dans ce chapitre, nous nous référons uniquement à la législation belge du travail. 43 Loi belge du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, art. 35. 44 Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de travail, syllabus d’Antoine RASNEUR, avocat, ICHEC Entreprises, D.E.S. RH 2011-2012.
  • 41. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 40 sur 51 4.2 Procédure45 Outre que le motif reproché doit être grave – ce que le juge appréciera souverainement – il faut (i) que la rupture soit décidée dans un certain délai; ET (ii) que le motif reproché soit notifié dans un certain délai et sous une certaine forme. • Délais Le délai pour donner congé en raison de motif grave est de trois jours ouvrables suivant la connaissance des faits reprochés. Il s’agit d’une connaissance certaine des faits: des soupçons ne suffisent pas. La connaissance des faits ne peut être acquise avec certitude qu’au terme d’une enquête menée en interne ou par un juge d’instruction s’il s’agit d’une infraction pénale. En pratique, une fois que la faute grave est connue, l’employeur dispose de trois jours ouvrables pour notifier à son employé qu’il va le licencier. Le délai de notification des motifs est également de trois jours ouvrables suivant la signification du congé. La notification du motif grave (énonciation précise des motifs) peut être concomitante à la décision du congé ou effectuée dans un acte postérieur. • Forme La signification du congé n’est soumise à aucune forme, elle peut être verbale. Ceci dit, étant donné que c’est à la partie qui invoque le motif grave d’apporter la preuve que le congé est régulier, elle a tout intérêt à le faire par le biais d’un écrit. La notification du motif grave doit se faire par lettre recommandée ou par exploit d’huissier de justice. Elle peut aussi se faire par la remise de l’écrit à l’autre partie, contre accusé de réception. Le courrier doit énoncer le motif invoqué de façon suffisamment claire pour permettre à l’autre partie de savoir ce qui lui est reproché et au juge de vérifier que le motif invoqué devant lui est le même que celui qui a entraîné le congé. 45 Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de travail, op.cit.
  • 42. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 41 sur 51 Si les délais et/ou la forme ne sont pas respectés, la faute grave ne peut être retenue et il s’agit alors d’un licenciement normal. 5. LES RH, GARDIENNES DE LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE 46 Comme toutes les entreprises mettant à disposition de leurs employés divers outils informatiques et de communication, le Groupe est, au sens de la loi belge du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel, le responsable de nombreux traitements de diverses données personnelles relatives à ses employés et à l’usage que ces derniers font des moyens suscités. La responsabilité de ces traitements implique d’être le gardien protégeant les données traitées des accès et des utilisations usurpées mais aussi d’être le garant que les auteurs d’utilisation abusive pourront être démasqués. Pour permettre la balance de ces deux rôles, le Groupe a mis en place une charte informatique permettant aux employés d’être alertés quant aux règles par lesquelles leurs données personnelles sont protégées et quant aux règles qui présideront à la levée nécessaire de cette protection le cas échéant. C’est généralement et fort heureusement aux RH qu’est confiée la mise en œuvre de cette charte. En effet, leur autorité dans la gestion des employés s’étend également aux cas évoqués d’utilisation abusive. Le lancement d’alerte est souvent (pour ne pas dire toujours) générateur d’un besoin de vérifications et de recherche de preuves en matière de données personnelles, ce 46 Interview de Bertrand VANDEVELDE, avocat, le 04.01.2015
  • 43. VII – Le rôle des RH en cas de lancement d’alerte Page 42 sur 51 qui renforce l’intérêt de confier aux RH un rôle primordial dans la gestion des lancements d’alerte. En effet, une fois l’alerte lancée, il conviendra de vérifier le contenu de l’alerte et, le cas échéant, de rassembler un ensemble de preuves démontrant ou infirmant la réalité des allégations contenues dans le lancement d’alerte. Et ces vérifications et preuves impliqueront immanquablement des analyses circonstanciées de données personnelles allant au-delà des règles de traitement appliquées lors de l’usage quotidien récurrent des outils informatiques et de communication. Le traitement des données personnelles constituant à juste titre un enjeu majeur pour le Groupe, il est fondamental que les diverses facettes de ce traitement évoquées ci- avant, et plus encore les conséquences des lancements d’alerte sur ce traitement, puissent être l’attribut du département en charge des ressources humaines. Les RH prévoiront donc dans le contrat de travail et autres documents signés par chaque employé les clauses adéquates afin de pouvoir au besoin effectuer, à charge ou à décharge, une recherche ciblée au niveau informatique.
  • 44. VIII – Conclusion Page 43 sur 51 VIII. Conclusion La mise en place et la gestion d’un processus de lancement d’alerte sont fondamentales pour une entreprise, comme nous l’avons vu. Lors de cette mise en place, la première question est de savoir si les RH doivent y participer. Pour certains, la question est tranchée et la DJ Compliance sera le maître d’œuvre exclusif.47 Selon nous, s’il appartient incontestablement à la DJ Compliance de piloter le volet juridique du processus, il est indispensable d’inclure les RH pour en piloter le volet humain. C’est à la croisée de ces chemins que l’interaction entre les deux départements aura lieu. En effet, les RH doivent constituer un acteur majeur du dispositif par la diffusion de la culture éthique en incluant dans les contrats de travail et les règlements intérieurs les exigences éthiques de l’entreprise et en protégeant les lanceurs d’alerte d’éventuelles représailles. Cela nécessite la capacité d’exfiltrer le lanceur d’alerte et de le changer de poste s’il subit dans son environnement de travail immédiat les conséquences de l’alerte qu’il a lancée. Ceci pose naturellement la question de la place de la fonction RH dans l’entreprise, de son indépendance et de sa capacité à faire prévaloir ses vues en matière d’éthique par rapport aux opérationnels et à la direction générale. Alors que le fait de dénoncer présente souvent dans nos pays latins une connotation négative, le rôle des RH est essentiel pour opérer la révolution culturelle que nécessite la mise en place d’un système de lancement d’alerte en mettant en avant la fidélité du 47 http://www.ey.com/LU/en/Newsroom/PR-activities/Articles/Article_201401_Le-role-de-la-fonction-RH-dans-la- sauvegarde-de-l-integrite-de-l-entreprise, le 02.12.2014
  • 45. VIII – Conclusion Page 44 sur 51 lanceur d’alerte aux valeurs éthiques de l’entreprise, fidélité que trahit le collaborateur qui s’adonne à des pratiques de corruption. Sur ce point, force est de constater que les RH apparaissent naturellement comme les architectes et les acteurs d’un changement majeur dans l’entreprise qu’elles piloteront en mode projet, après avoir identifié les relais essentiels à la conduite de ce tournant. Nous terminerons par une citation tirée d’un ouvrage du Professeur Philippe DE WOOT 48 : « L’ÉTHIQUE NE SE LIMITE PAS AUX CONVICTIONS NI AUX VALEURS. ELLE CONCERNE PRINCIPALEMENT NOS ACTES ET LEURS CONSÉQUENCES. C’EST DANS L’ACTION QUE S’INCARNE L’ÉTHIQUE ET, DANS CE SENS, ELLE EST UN ENGAGEMENT. » 48 Lettre ouverte aux décideurs chrétiens en temps d’urgence, p.125, éd. Lethielleux/Desclée de Brouwer, Paris, 2009
  • 46. IX – Bibliographie Page 45 sur 51 IX. Bibliographie 1. LIVRES • BRION René et MOREAU Jean-Louis, Plus de 150 ans de présence dans l’énergie en Belgique, Recherches documentaires, éd. GDF SUEZ, 2011. • BRION René et MOREAU Jean-Louis, 150 ans de présence dans le monde: l’énergie partagée, Recherches documentaires, éd. PC, Paris, 2011. • DE WOOT Philippe, Lettre ouverte aux décideurs chrétiens en temps d’urgence, Éd. Lethielleux / Desclée de Brouwer, Paris, 2009. • NORTON ROSE FULBRIGHT, A global guide to Whistleblowing laws, août 2014. 2. RAPPORTS • Rapport d’activité 2013 de GDF SUEZ. • Présentation de GDF SUEZ, 2 août 2012. 3. ARTICLES • CHARREIRE-PETIT Sandra et CUSIN Julien, Quand le whistleblower est sifflé hors jeu par le système: expulsion puis résilience du footballeur Jacques Glassmann, 2006. • LOCHAK Danièle, L’alerte éthique, entre dénonciation et désobéissance, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014. • MEYER Nicole-Marie, Le droit d’alerte en perspective: 50 années de débats dans le monde, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014. • RASNEUR Antoine, Maîtriser le droit social – Droit social individuel: le contrat de travail, syllabus, ICHEC Entreprises, D.E.S. RH 2011-2012. • SLAMA Serge, Le lanceur d’alerte, une nouvelle figure de droit public ?, in AJDA n° 39/2014 du 24.11.2014.
  • 47. IX – Bibliographie Page 46 sur 51 4. TEXTES DE LOI Les principaux textes de loi cités dans ce travail totalisant près de 1'600 pages, nous avons choisi de ne pas les annexer mais de les référencer par leur hyperlien. Le lecteur désireux de les consulter les trouvera ci-après. 4.1 Droit britannique • Public Interest Disclosure Act 1998: http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1998/23/data.pdf, le 14.01.2015. • Employment Rights Act 1996: http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1996/18/data.pdf, le 14.01.2015. • Bribery Act 2010: http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2010/23/data.pdf, le 14.01.2015. • Enterprise and Regulatory Reform Act 2013: http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2013/24/enacted/data.pdf, le 14.01.2015. 4.2 Droit américain (USA) • Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act: https://www.sec.gov/about/laws/wallstreetreform-cpa.pdf, le 14.01.2015. • Sarbanes-Oxley Act of 2002: https://www.sec.gov/about/laws/soa2002.pdf, le 14.01.2015. • False Claim Act: http://www.justice.gov/sites/default/files/civil/legacy/2011/04/22/C- FRAUDS_FCA_Primer.pdf, le 14.01.2015. 4.3 Droit belge • Arrêté royal du 10.04.2014 relatif à la prévention des risques psycho-sociaux au travail : http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body.pl?language=fr&pub_date=2014- 04-28&numac=2014202445&caller=list, le 14.01.2015. • Loi du 03.07.1978 relative aux contrats de travail : http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&cn=19780 70301&table_name=loi, le 14.01.2015.
  • 48. IX – Bibliographie Page 47 sur 51 • Loi du 08.12.1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel : http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/loi_a.pl?language=fr&caller=list&cn=19921 20832&la=f&fromtab=loi&sql=dt='loi'&tri=dd+as+rank&rech=1&numero=1, le 14.01.2015. 5. SITES INTERNET • http://www.fcpablog.com/blog/2014/12/1/for-most-whistleblowers-life-is- hell.html#, le 02.12.2014. • http://www.leechgrc.com/pdf/f_e/HumanResourceVol6No589.pdf, le 02.12.2014. • http://www.ey.com/LU/en/Newsroom/PR-activities/Articles/Article_201401_Le- role-de-la-fonction-RH-dans-la-sauvegarde-de-l-integrite-de-l-entreprise, le 02.12.2014. • http://www.gdfsuez.com/actionnaires/action-gdf-suez/structure-de-lactionnariat/, le 22.12.2014. • http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/, le 26.12.2014. • http://www.adma.qc.ca/Publications/Info-ADMA/InfoADMA-Mars- 2012/Enron%2010%20ans%20plus%20tard.aspx, le 26.12.2014. • http://www.gdfsuez.com/groupe/ethique-et-compliance/dispositif-de-mail- ethique/, le 26.12.2014. • http://business-ethics.com/2010/10/26/1740-glaxosmithkline-to-pay-750-million- fine-whistleblower-to-get-96-million/, le 01.01.2015. • http://www.bloomberg.com/news/2014-06-16/sec-fines-new-york-advisor-for- whistle-blower-retaliation.html, le 01.01.2015. • http://www.bbc.com/news/business-29316077, le 02.01.2015. • http://www.asterix.com/asterix-de-a-a-z/les-personnages/quatredeusix.html, le 02.01.2015. • http://www.dailymail.co.uk/news/article-2861191/Whistleblowing-garage- mechanic-wins-46-000-compensation-sacked-accused-bosses-overcharging- customers.html, le 02.01.2015.
  • 49. IX – Bibliographie Page 48 sur 51 • http://www.xperthr.co.uk/editors-choice/unfairly-dismissed-whistleblower-wins- gbp12-million-compensation/104755/, le 02.01.2015. • http://www.hrworld.be/hrworld/mssion-statement-strategie-rh-hr-didier- erwoine.html?LangType=2060, le 03.01.2015. • http://employmentlawblog.fieldfisher.com/category/enterprise-and-regulatory- reform-act-2013, le 04.01.2015. • http://www.psycho-ressources.com/bibli/harcelement-1.html, le 05.01.2015. • http://en.wikipedia.org/wiki/Commodity_Exchange_Act, le 06.01.2015. • http://www.lefigaro.fr/emploi/2014/12/05/09005-20141205ARTFIG00095-l- explosion-des-cas-de-burn-out-inquiete-les-medecins-du-travail.php, le 07.01.2015. • www.formation-burnout.be, le 07.01.2015. 6. ENTRETIENS • Entretien avec Marc DE VOS, HR Partner de GDF SUEZ C.C., le 12.12.2014. • Entretien avec Manoëlle VAN DER STRATEN, experte en prévention du burn-out, formatrice et coach chez FOSTER & LITTLE, le 08.01.2015. • Entretien avec Bertrand VANDEVELDE, avocat spécialisé en droit de l’informatique, le 04.01.2015.
  • 50. X – Dédicace et remerciements Page 49 sur 51 X. Dédicace et remerciements La finalisation du présent travail a été concomitante à l’attentat qui a frappé CHARLIE HEBDO à Paris ce 7 janvier 2015, ôtant ainsi la vie à douze personnes, dont cinq caricaturistes. Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski étaient à leur manière des lanceurs d’alerte. Ce travail leur est dédié. Je voudrais exprimer ma profonde reconnaissance à Monsieur Eric SEASSAUD, Directeur juridique Compliance du Groupe GDF SUEZ. Sans sa ténacité, son soutien et son implication, ce travail n’aurait jamais vu le jour. Je remercie en outre Madame Manoëlle VAN DER STRATEN, formatrice et coach chez FOSTER & LITTLE, pour son expertise en matière de burn-out, ses encouragements précieux et ses patientes relectures. Ma gratitude va également à Monsieur Bertrand VANDEVELDE, avocat, pour le temps qu’il a consacré à relire, annoter et commenter avec la plus grande attention le présent travail, et pour les conseils avisés qu’il m’a prodigués sans modération. Mes remerciements sont aussi destinés à Monsieur Jean-Yves GOUËL, Directeur juridique adjoint Compliance du Groupe GDF SUEZ: ses remarques pertinentes m’ont été d’une aide précieuse. Je remercie par ailleurs Monsieur Marc DE VOS, HR Partner de GDF SUEZ C.C., pour m’avoir entretenue de sa vision du rôle des RH en cas de lancement d’alerte. Je salue aussi Monsieur Michel LEMOINE, Collaborateur scientifique à l’Université de Liège, et Madame Claire RAES qui ont mis leur connaissance pointue de la langue française au service du présent travail. Qu’ils soient chaleureusement remerciés.
  • 51. X – Dédicace et remerciements Page 50 sur 51 Je remercie enfin Madame Laetitia PARMENTIER, Responsable académique des formations en soirée d’ICHEC ENTREPRISES, pour la compréhension et la flexibilité dont elle a fait preuve.