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Promenade : - environ de Périgné - la Pierre -. 
Entre les murs de pierres sèches ébouillés * , la petite route grimpe en serpentant dans 
un 
cadre de verdure où les nombreux végétaux surpris par le froid précoce du mois de 
novembre ont gardé leurs couleurs estivales. 
Les érables dévoilent leur nudité et leur parure automnale jonche de rouge cramoisi 
et de mordoré les bermes du sentier. 
Dans la profondeur de la sombre combe, coule une rivière parfois dolente, bruissante, 
parfois vive, assourdissante. 
La pureté de l'air avivée par le froid est cristalline et le sentier qui descend dans la vallée 
en larges lacets disparaît sous de vastes taches d'herbes poudrées à frimas. 
Un pied de grande consoude est là, avachi, surpris par le gel, il n'a pas eu le temps 
d'éclore toutes ses fleurs et ses larges feuilles gaufrées sont misérablement étendues sur 
le sol. 
En descendant vers la rivière le sentier laisse sur sa gauche un petit bois de pins 
sylvestres incongrus en ces lieux voués aux feuillus, leurs longs troncs rouges 
desquamés s'élèvent désespérément vers les cieux en poussant au-dessus d'eux leurs 
toupets déplumés. 
Dans l'air l'odeur balsamique de grands peupliers blanchâtres, persistante, domine celle 
des mousses humides et de matières organiques en décomposition. 
Arrivé au bord de la rivière le regard ne peut pas ne pas voir un grand frêne affublé à une 
dizaine de mètre de haut d'un beau trou circulaire bien régulier, oeuvre à coup sûr d'un pic 
vert à la recherche d'un abri pour procréer et y tenir au chaud sa nichée prochaine. 
Au printemps la vallée retentira du cri, rire sonore, des parents en quête de nourritures 
pour leur progéniture. 
A côté de ce géant de frêne, un autre transformé en têtard projette ses membres 
dénudés vers le ciel et son tronc creux lui aussi sera providentiel pour les petits animaux 
de ces lieux. 
Lancée dans un coude de la rivière une grosse poutre branlante unit les deux rives, les 
bois et la prairie, les herbes y sont hautes, denses, échevelées. 
Le bruit rageur d'une tondeuse à gazon vient troubler le silence, un petit chemin pierreux 
se faufile tant bien que mal entre les maisons imbriquées, les aboiements d'un chien, le 
regard curieux des moutons intrigués par tout ce qui passe. 
La rivière est encore là, le méandre en est la cause, elle est franchie cette fois ci par un 
vieux tronçon de voie Decauville, deux rails une traverse, un trou, une traverse, un trou... 
La prairie, un verger abandonné, vieux pommiers noirs et tourmentés, hiératiques, 
quelques fruits vestiges du jardin des hespérides, odeurs de feux de bois, traverse sous 
un vieux noyer mutilé à la blessure troublante, au loin la tour de la Guitonière et là dans un 
coin de mur, bien acagnardé, un superbe pied de bourrache officinale, étalant ses feuilles 
poilues, déployant comme un défi au froid, ses étoiles de fleur d'un bleu si vif, d'une 
beauté.... 
Un chien jappe, un autre lui répond, le froid se fait de plus en plus vif et la nuit commence 
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Je rentre à la maison, en craignant une fois encore que mes oreilles ne m'abandonnent en 
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