1. Comment elle en est arrivée là ?
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propos recueillis par aurore merchin
photoS :istock ;DR
Anne de Maupeou
Reine des campagnes provoc’, la directrice de la création
de l’agence de publicité Marcel Worldwide lance avec Intermarché
un kit de crèmes chocolatées pour nous désintoxiquer du sucre.
N a i s s a n c e l e 1 9 av r i l 1 9 6 1
à S ã o Pa u l o , a u B r é s i l .
Diplômée de l’école d’arts graphiques Penninghen, elle cafouille pendant
deux ans (« J’étais trop arrogante, aucune agence de pub ne voulait
me garder ») avant de devenir assistante directrice artistique chez TBWA.
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Elle est débauchée avec Éric Galmard par l’agence DDB
où ils conçoivent la campagne La Fourmi, pour la Polo de Volkswagen.
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Repérés par « le Dieu de la pub » Philippe Michel,
ils rejoignent l’agence CLM BBDO et travaillent
sur un film d’Étienne Chatiliez pour Eram.
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Elle rejoint comme directrice de création l’agence Opéra
du publicitaire Christophe Lambert et travaille
notamment sur le film L’Air du temps de Nina Ricci
réalisé par Tony Kaye (American History X…) et
inspiré du Jardin des délices de Jérôme Bosch.
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L’équipe d’Opéra reprend l’agence CLM BBDO.
Elle en est directrice de la création et,
trois ans plus tard, vice-présidente.
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Maurice Lévy, président du groupe Publicis,
la nomme directrice de la création
de l’agence Marcel Worldwide.
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Elle devient en parallèle directrice de la création
de l’agence La Maison, dernière-née du groupe Publicis,
et sort un spot pour la DS 3 avec l’icône de la mode Iris Apfel.
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Après sa campagne de réhabilitation des « légumes moches »,
elle lance pour Intermarché un kit détox de crèmes chocolatées :
« vous prenez un pot, c’est très très bon, le suivant est un peu
moins sucré, le dernier moitié moins. Vous reprenez le premier
il devient immangeable, vous êtes désintoxiquée. »
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Anne imitant la pub
ci-dessous pour les « Kookaïettes ».
Franco-Suisse née au Brésil,
elle a grandi à Versailles,
« un biotope caricaturalement
catho mais aussi une
pépinière d’artistes rebelles »,
et passait ses vacances
à Varengeville-sur-mer, village normand
immortalisé par Braque ou Monet.
« Ado je peignais obsessionnellement, enfermée
avec mes toiles sans manger, des trucs très torturés.
Mes proches étaient terrifiés. J’ai tout balancé quand
je suis entrée dans la pub. Un jour un monsieur m’a
appelée. Il avait tout trouvé à la poubelle et tout gardé. »
« Le créatif Alain Darfeuille
a flashé sur mon dossier,
des illustrations grivoises et
marrantes de contrepèteries avec une
grande bite peinte à l’huile. À l’époque
toutes les maquettes étaient faites main
et moi je cochonnais tout, mais j’étais
mignonne, on m’appelait “la comtesse”. »
« On m’a mise en binôme
avec le rédacteur
Éric Galmard. Le soir, on
ramassait tous les briefs
dans les bureaux
et le week-end on faisait
en douce les campagnes
des autres équipes.
On a fini par en vendre
une pour des croquettes
pour chiens et après,
tout s’est enchaîné. »
« On est passé d’une
agence de 20 à 200
personnes. J’étais
une femme, on m’aurait
donné 18 ans et je
n’expliquais jamais
mes décisions. Les
créatifs ultra-primés
m’attendaient avec un
flingue, mais ils ont
vu que j’avais des
couilles et du flair. »
« En charge des
célébrités,j’ai beaucoup
accompagné Will.i.am
et les Black Eyed Peas.
J’étais toujours en avion
alors que j’ai la trouille.
Un jour,au Costa Rica,j’ai
refusé de monter dans
un coucou brinquebalant.
C’est la goutte d’eau
qui m’a fait quitter CLM
pour l’agence Marcel. »
Mariée au publicitaire Jean-Claude Jouis, elle a deux
enfants,Juliette,23 ans,et Léo,17 ans.Son fils,autiste,est
pris en charge en Belgique. En 2012, elle a signé une
campagne pour interpeller les candidats à la présidentielle
sur le traitement pitoyable de la maladie en France.
Elle a piloté les mythiques
« Koukaïettes »,ces pestes
toutes puissantes qui
martyrisaient des hommes
lilliputiens, fait interdire
Fiat en Chine en montrant
Richard Gere au Tibet
pendant la cérémonie
d’ouverture des J.O.
de Pékin,travaillé pourTotal,
Pepsi, Orange, Renault,
Le Bon Marché,Diesel,Fnac,
Contrex,Uber,Marc Dorcel…
Elle a reçu 61 Lions au
Festival international
de la publicité de Cannes
et plus de 500 prix
internationaux. Marcel
a aussi des agences
à NewYork, Sydney,
Mexico et São Paulo, et
compte 220 salariés.
« J’ai peu connu
l’époque Mad Men où
les publicitaires
carburaient au whisky,
puis à la coke.
Aujourd’hui, pour
tenir le rythme on fait
du jogging et on mange
sans gluten. Au pire
les jeunes se mettent
minables à la bière.
C’est moins rock, plus
bien-pensant. »
Philippe Michel