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Sud Ouest - lundi 19 juillet 2021
LES ÉLUS VICTIMES DE VIOLENCES
« En cas de problème, je n’y vai s plus seul »
Elisa Artigue-Cazcarra, e.cazcarra@sudouest.fr
Philippe Becheau, maire de Saint-Philippe-d’Aiguille, au milieu de ses vignes, un an après son agression. E. A.-
C.
En août 2020, Philippe Becheau, maire de Saint-Philippe-d’Aiguille, est agressé alors
qu’il demande à un groupe de faire moins de bruit. Il raconte comment il s’est relevé
Il nous accueille chez lui, au milieu des vignes, à deux pas de Saint-Émilion. Philippe Becheau
est viticulteur et maire de son village depuis 2014, Saint-Philippe-d’Aiguille, 400 habitants. Le 4
août 2020, il a été agressé. Appelé par des administrés excédés par le bruit d’un groupe qui
jouait à la pétanque sur une place du village, il était intervenu, en soirée. Il avait eu à peine le
temps de se présenter et de demander de baisser la musique, qu’un homme, ivre, s’en était pris
à lui.
Gironde
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« Ce fut un choc »
Frappé à terre, Philippe Becheau s’en était sorti avec dix jours d’incapacité totale de travail.
Retrouvé et jugé quelques jours plus tard, son agresseur, un habitant de 26 ans d’une
commune voisine, avait été condamné à 12 mois de prison, dont 6 mois ferme, sans mandat de
dépôt.
Un an plus tard, le maire de Saint-Philippe-d’Aiguille le reconnaît, cette agression l’a «
complètement changé ». « Il y a un avant et un après. Avant d’être maire, j’ai été adjoint. Les
situations tendues, où le ton monte, j’avais connu. Mais jamais, avant ce jour de 2020, je
n’avais été agressé physiquement. Ce fut un choc. » Pendant un mois, il a « perdu le sommeil
», obsédé par une question : « Pourquoi ? »
« Vous prendre une raclée par une personne alcoolisée qui ne supporte pas l’autorité, alors que
vous venez demander de faire un peu moins de
Pendant un mois, il a perdu le sommeil, obsédé par une question : Pourquoi ?
bruit, et que depuis des années vous vous démenez pour le vivre-ensemble, ça fait très mal.
Les semaines qui ont suivi ont été difficiles. Mon épouse et mes enfants m’ont aidé. J’ai aussi
vu une psychologue. Ça m’a permis de comprendre et de gérer mon traumatisme. Après
l’agression, je suis passé par une phase où je pouvais devenir moi-même agressif verbalement
», confie le maire de Saint-Philippe-d’Aiguille.
Engagement « renforcé »
A-t-il envisagé de démissionner ? « Au contraire, mon désir de m’engager pour les autres en
est ressorti renforcé. Ce qui peut paraître paradoxal. Mon affaire a été médiatisée et m’a ouvert
des portes. J’ai reçu de nombreux messages de soutien, d’anonymes, d’élus de tous bords, de
partout en France, et même du plus haut niveau de l’État. J’ai gardé des contacts. J’ai décidé
de m’en servir pour lutter contre la banalisation de la violence. Régulièrement, j’envoie des
notes à des décideurs à Paris. Il faut qu’ils écoutent les élus de province et des petites
communes », explique l’édile.
Changer sa façon d’agir
Depuis son agression, Philippe Becheau a revu sa façon d’intervenir, en cas de problème. « Je
n’y vais plus seul et j’alerte la gendarmerie si nécessaire. S’il s’agit d’un rendez-vous en mairie,
je m’arrange pour qu’un témoin soit présent à proximité. » Autres conseils : « Il faut éviter les
attitudes agressives. Par exemple, prendre une photo peut être considéré comme agressif.
Surtout, il ne faut pas oublier qu’on ne vit qu’une fois et qu’il y a des forces de sécurité, formées
et prêtes à intervenir si besoin. Il ne faut pas hésiter à les appeler. »