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Bordelais : la récolte des blancs débute sous la
canicule
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Accueil Vin
Au
château Lafargue (15 hectares), à Martillac, on vendange de 7 heures à midi, car il fait trop chaud au-delà. © Crédit
photo : Thierry David/ « SUD OUEST »
Par César Compadre - c.compadre@sudouest.fr
Publié le 24/08/2023 à 16h15. Mis à jour le 24/08/2023 à 21h56
Au château Lafargue, en AOC Pessac-Léognan, la récolte des blancs est lancée. Malgré les fortes
chaleurs, en quantité comme en qualité, les indicateurs sont au vert
Le thermomètre indiquait déjà 22 degrés à 7 heures du matin, mercredi 23 août, au moment où la
troupe d’une quinzaine de vendangeurs pénétrait dans une parcelle de raisins blancs au château
Lafargue (15 hectares). Nous sommes à Martillac, en AOC Pessac-Léognan, à une douzaine
de kilomètres au sud de Bordeaux. La première impression est bonne : les grappes sont
nombreuses et belles, en bon état sanitaire général, et les baies bien sucrées. Le degré potentiel
des futurs vins est à 13,4°.
Carole Peyrout, la propriétaire, semble peu stressée à l’heure de récolter le fruit d’un an de
travail. « Peu impactés par le mildiou cette année, nous devrions rentrer une récolte au volume
normal, alors que c’étaient des demi-récoltes en 2021 et en 2022, et ce, à cause de différents
aléas climatiques, notamment le gel. »
De 7 heures à midi
Ces jours-ci commence donc dans notre département la récolte des raisins pour produire des
vins blancs secs, et ce à des dates similaires aux années précédentes (1). Comme de
coutume, les crémants — qui ont besoin de raisins peu mûrs — avaient ouvert le bal la semaine
dernière ; puis suivront les rosés et les rouges — début septembre pour les merlots les plus
précoces — avant que les liquoreux ne referment la saison. La filière viticole est donc partie
pour environ huit semaines de vendanges.
Carole Peyrout, après vingt-deux ans comme assistante sociale, a pris la suite de son père,
Jean-Pierre Leymarie, 80 ans. Les deux habitent sur la propriété.
Thierry David/ « SUD OUEST »
À Lafargue, la sueur coule sur les fronts et les tee-shirts sont humides. Les sécateurs seront
posés à midi. Ni les organismes ni les raisins blancs n’aiment les fortes chaleurs. La canicule et
ses 40 degrés peuvent faire mal. De l’eau et des jus de fruits sont proposés en abondance. Il
faut choyer un personnel difficile à recruter (2).
Le temps est chaud mais il a plu 50 millimètres depuis début août, des pluies bienfaitrices pour les volumes
et la qualité.
« Notre raisin rouge est vendangé à la machine. Le blanc (3 hectares), plus fragile, l’est
manuellement. L’an passé, certains vendangeurs ont arrêté dès le premier jour ! C’est difficile à
gérer. J’envisage de tout passer à la machine, d’autant qu’elles sont de plus en plus
performantes », indique celle qui a repris l’exploitation familiale il y a sept ans, après une carrière
d’assistante sociale. Son père, Jean-Pierre Leymarie (80 ans), qui comme elle, habite sur
l’exploitation, vient jeter un œil : « Il me tarde que la récolte soit rentrée. » Il est vrai qu’après la
canicule viennent souvent les orages, parfois de grêle.
Les trois hectares de blanc sont récoltés manuellement, car plus fragile.
Thierry David/ « SUD OUEST »
Veiller au grain
Faisant des allers-retours entre les vignes et le chai, Philippe Simonnet, directeur technique
depuis 22 ans, est lui aussi plutôt confiant. « Nous ne souffrons pas de sécheresse cette année.
Le temps est chaud, mais il a plu 50 millimètres depuis début août, des pluies bienfaitrices pour
les volumes et la qualité. Nos terroirs argileux permettent de retenir l’eau puis de la relarguer vers
la plante si nécessaire. Cela évite de la stresser. » Dans le cuvier, les raisins resteront une
journée au frais dans des cuves, avant d’être pressés puis de lancer les fermentations. Le
technicien sera là tous les jours dès 6 heures pour veiller au grain.
Le coup d’envoi des vendanges des blancs secs a été donné mi-août dans certaines propriétés du Sauternais. Pour
les travailleurs de la vigne, il faut s’adapter aux grosses chaleurs
Carole Peyrout retourne à son bureau, car son stress est ailleurs : les ventes de la propriété (20
à 25 euros la bouteille) sont à la peine malgré la notoriété de son appellation. Il faut relancer les
clients (son fichier en compte près de 18 000) et préparer la vingtaine de salons auxquels elle
participe tous les ans, partout en France. Si le millésime 2023 avait bonne presse, cela pourrait
l’aider. Mais la ligne d’arrivée est encore loin. De sa fenêtre, on aperçoit presque les
vendangeurs s’engager dans un nouveau rang de vigne. Le soleil tape déjà fort et il leur tarde
midi.
(1) Les blancs secs représentent 8 % de la production girondine. C’est 85 % pour les rouges,
4 % pour les rosés, 2 % pour les crémants et 1 % pour les vins doux.
(2) Lafargue fait appel au GEA de Léognan (Gironde Emploi Agricole) qui recrute toujours (tél. :
05 56 64 46 20).
L’impact du mildiou
Avec plus ou moins de virulence, le mildiou attaque tous les ans la vigne. Il n’est jamais une
surprise. En 2018, il avait fortement amputé la récolte. Qu’en sera-t-il cette année ? Début juillet,
la pression était à son maximum, allant jusqu’à un déplacement du ministre de l’Agriculture et à
une demande d’aide de la profession auprès des assureurs (avec une fin de non-recevoir). À
cette heure, les conséquences sur les volumes de récolte dans le département seraient limitées.
La belle sortie de grappes (il y en avait beaucoup) après la floraison devrait permettre de limiter
les pertes. Les situations sont évidemment différentes suivant les exploitations, en
conventionnel comme en bio. Les volumes précis ne seront connus qu’en fin d’année, une fois
les déclarations de récolte faites par les vignerons.

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  • 1. Bordelais : la récolte des blancs débute sous la canicule Lecture 3 min Accueil Vin Au château Lafargue (15 hectares), à Martillac, on vendange de 7 heures à midi, car il fait trop chaud au-delà. © Crédit photo : Thierry David/ « SUD OUEST » Par César Compadre - c.compadre@sudouest.fr Publié le 24/08/2023 à 16h15. Mis à jour le 24/08/2023 à 21h56 Au château Lafargue, en AOC Pessac-Léognan, la récolte des blancs est lancée. Malgré les fortes chaleurs, en quantité comme en qualité, les indicateurs sont au vert Le thermomètre indiquait déjà 22 degrés à 7 heures du matin, mercredi 23 août, au moment où la troupe d’une quinzaine de vendangeurs pénétrait dans une parcelle de raisins blancs au château Lafargue (15 hectares). Nous sommes à Martillac, en AOC Pessac-Léognan, à une douzaine de kilomètres au sud de Bordeaux. La première impression est bonne : les grappes sont nombreuses et belles, en bon état sanitaire général, et les baies bien sucrées. Le degré potentiel des futurs vins est à 13,4°. Carole Peyrout, la propriétaire, semble peu stressée à l’heure de récolter le fruit d’un an de travail. « Peu impactés par le mildiou cette année, nous devrions rentrer une récolte au volume normal, alors que c’étaient des demi-récoltes en 2021 et en 2022, et ce, à cause de différents aléas climatiques, notamment le gel. » De 7 heures à midi
  • 2. Ces jours-ci commence donc dans notre département la récolte des raisins pour produire des vins blancs secs, et ce à des dates similaires aux années précédentes (1). Comme de coutume, les crémants — qui ont besoin de raisins peu mûrs — avaient ouvert le bal la semaine dernière ; puis suivront les rosés et les rouges — début septembre pour les merlots les plus précoces — avant que les liquoreux ne referment la saison. La filière viticole est donc partie pour environ huit semaines de vendanges. Carole Peyrout, après vingt-deux ans comme assistante sociale, a pris la suite de son père, Jean-Pierre Leymarie, 80 ans. Les deux habitent sur la propriété. Thierry David/ « SUD OUEST » À Lafargue, la sueur coule sur les fronts et les tee-shirts sont humides. Les sécateurs seront posés à midi. Ni les organismes ni les raisins blancs n’aiment les fortes chaleurs. La canicule et ses 40 degrés peuvent faire mal. De l’eau et des jus de fruits sont proposés en abondance. Il faut choyer un personnel difficile à recruter (2). Le temps est chaud mais il a plu 50 millimètres depuis début août, des pluies bienfaitrices pour les volumes et la qualité. « Notre raisin rouge est vendangé à la machine. Le blanc (3 hectares), plus fragile, l’est manuellement. L’an passé, certains vendangeurs ont arrêté dès le premier jour ! C’est difficile à gérer. J’envisage de tout passer à la machine, d’autant qu’elles sont de plus en plus performantes », indique celle qui a repris l’exploitation familiale il y a sept ans, après une carrière d’assistante sociale. Son père, Jean-Pierre Leymarie (80 ans), qui comme elle, habite sur l’exploitation, vient jeter un œil : « Il me tarde que la récolte soit rentrée. » Il est vrai qu’après la canicule viennent souvent les orages, parfois de grêle.
  • 3. Les trois hectares de blanc sont récoltés manuellement, car plus fragile. Thierry David/ « SUD OUEST » Veiller au grain Faisant des allers-retours entre les vignes et le chai, Philippe Simonnet, directeur technique depuis 22 ans, est lui aussi plutôt confiant. « Nous ne souffrons pas de sécheresse cette année. Le temps est chaud, mais il a plu 50 millimètres depuis début août, des pluies bienfaitrices pour les volumes et la qualité. Nos terroirs argileux permettent de retenir l’eau puis de la relarguer vers la plante si nécessaire. Cela évite de la stresser. » Dans le cuvier, les raisins resteront une journée au frais dans des cuves, avant d’être pressés puis de lancer les fermentations. Le technicien sera là tous les jours dès 6 heures pour veiller au grain. Le coup d’envoi des vendanges des blancs secs a été donné mi-août dans certaines propriétés du Sauternais. Pour les travailleurs de la vigne, il faut s’adapter aux grosses chaleurs Carole Peyrout retourne à son bureau, car son stress est ailleurs : les ventes de la propriété (20 à 25 euros la bouteille) sont à la peine malgré la notoriété de son appellation. Il faut relancer les clients (son fichier en compte près de 18 000) et préparer la vingtaine de salons auxquels elle participe tous les ans, partout en France. Si le millésime 2023 avait bonne presse, cela pourrait l’aider. Mais la ligne d’arrivée est encore loin. De sa fenêtre, on aperçoit presque les
  • 4. vendangeurs s’engager dans un nouveau rang de vigne. Le soleil tape déjà fort et il leur tarde midi. (1) Les blancs secs représentent 8 % de la production girondine. C’est 85 % pour les rouges, 4 % pour les rosés, 2 % pour les crémants et 1 % pour les vins doux. (2) Lafargue fait appel au GEA de Léognan (Gironde Emploi Agricole) qui recrute toujours (tél. : 05 56 64 46 20). L’impact du mildiou Avec plus ou moins de virulence, le mildiou attaque tous les ans la vigne. Il n’est jamais une surprise. En 2018, il avait fortement amputé la récolte. Qu’en sera-t-il cette année ? Début juillet, la pression était à son maximum, allant jusqu’à un déplacement du ministre de l’Agriculture et à une demande d’aide de la profession auprès des assureurs (avec une fin de non-recevoir). À cette heure, les conséquences sur les volumes de récolte dans le département seraient limitées. La belle sortie de grappes (il y en avait beaucoup) après la floraison devrait permettre de limiter les pertes. Les situations sont évidemment différentes suivant les exploitations, en conventionnel comme en bio. Les volumes précis ne seront connus qu’en fin d’année, une fois les déclarations de récolte faites par les vignerons.