lE gel a figé les espoirs des agriculteurs

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Sud Ouest - samedi 10 avril 2021
Le gel a figé les espoirs de récol te des
producteurs
Valérie Deymes, v.deymes@sudouest.fr
Face à la violence de l’épisode de gel, les viticulteurs et arboriculteurs n’ont rien pu faire. GUILLAUME
BONNAUD / “SUD OUEST”
Les deux épisodes de gel de la semaine ont eu sur les vignes et vergers des
conséquences d’ores et déjà jugées très lourdes. On compare à 2017 voire à 1991. Tour
d’horizon
Le fait du jour

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Deux nuits. Du 6 au 7 avril et du 7 au 8 avril. Une catastrophe climatique s’est abattue sur toute
la France. Et des espoirs de récoltes partent en fumée, ou plutôt se figent, brûlés. Le gel a
encore frappé alors que, les jours précédents, le printemps avait fait une entrée fracassante

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dans le calendrier avec des records de températures vers le haut. Là, c’est vers le bas qu’il a
poussé la compétition. Et ce n’est pas fini. On attend d’autres épisodes, entre le 12 et le 14
avril.
1 Coup de massue dans les vignes et les vergers
« C’est le chaos… » lâche Bernard Farges, président du Conseil interprofessionnel des vins de
Bordeaux (CIVB). « Certains viticulteurs savent d’ores et déjà que 100 % de leurs vignes sont
touchées. D’autres évaluent les dégâts à 30 %. Impossible de faire un bilan à ce stade. La zone
des Graves, du Langonnais jusqu’à Pessac-Léognan, le Sauternais compris, ainsi qu’en rive
droite la Vallée de la Garonne et notamment les bas coteaux, sans oublier une partie du Blayais
et la Vallée de la Dordogne ont été particulièrement vulnérables. »
On lâche les mots « violent », « terrible » « En quelques heures, le sinistre climatique anéantit
une production ». Une production… plutôt plusieurs. Du côté du cognac, le bureau
interprofessionnel reste prudent : « Pour le moment, les vignes sont relativement épargnées. »
Dans les Landes, le bilan avancé par le bureau inter-professionnel de l’Armagnac est glaçant :
« 70 % du vignoble détruit. »
Après les vignes, les arbres fruitiers. Le syndicat de l’AOC des pommes du Limousin est sûr
d’une chose : les dégâts sont réels. Leur ampleur reste suspendue aux estimations verger par
verger, via la coupe des bourgeons témoins et leur état : noir, c’est mort, vert, il reste un peu
d’espoir. En Lot-et-Garonne et Dordogne qui concentrent 90 % des vergers de la région, le
moral est gelé, lui aussi. Pruniers, pommiers et noisetiers ont subi, « à hauteur de 50 %, c’est
sûr », fait remarquer Rémi Muller, technicien arboriculture à la Chambre d’agriculture de Lot-et-
Garonne. « Les dégâts pourraient atteindre 80 % de la production. Du côté de la vigne, les
pertes pourraient osciller entre 50 et 60 %. Du jamais vu depuis 1991. »
« En quelques heures, le sinistre climatique a anéanti une production »
2 Un gel spécifique qui résiste aux dispositifs
Pourquoi ces gels printaniers sont-ils si dévastateurs ? « Parce que les bourgeons sont au
stade pleine-fleur et sont donc très sensibles. Ils tiennent jusqu’à des températures de -2 °C,
mais à certains endroits, on est descendu à -5° », souligne Agnès Donzeau, directrice de l’AOC
Pommes du Limousin. « On a même relevé -7°, dans certaines zones de la Gironde », renchérit
Bernard Farges. « Les cellules du bourgeon claquent. Quelques heures plus tard, la vigne est
desséchée. »
Particularité de ces deux épisodes de gel : leur durée. Effectifs à 23 heures le soir et se
prolongeant jusqu’à 8 heures le lendemain quand d’ordinaire ils se concentrent sur 2 ou 3
heures au petit matin. « Résultat, les systèmes de réchauffement de l’air ont été moins
efficaces, souligne Rémi Muller. Et ce, alors que l’équipement est très cher : 3 000 € par
hectare et par nuit. »

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Les systèmes d’aspersion se sont avérés meilleurs. « Nous avons 390 hectares de pommes
répartis sur six vergers. Cinq sur six sont irrigués, en bord de la Dordogne. Irrigation qui nous
sert à protéger 60 % des surfaces avec des systèmes d’aspersion. L’eau gèle autour du
bourgeon et lui offre une carapace contre la baisse des températures », constate Jean
Champeix, directeur d’exploitation du Domaine de Castang, en Dordogne. « On aura donc des
dégâts limités. D’où la nécessité pour les arboriculteurs d’avoir accès à l’eau… »
3 Dispositifs de soutien et dédommagement
Jeudi, le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, a annoncé l’activation du régime de
calamité agricole. « Les comités départementaux de calamité vont estimer les pertes avec l’aide
des organisations professionnelles. Puis il y aura un suivi jusqu’aux récoltes, pour voir ce qui a
été réellement perdu. L’indemnisation n’entrera en compte que dans un an… » explique Luc
Servant, président de la Chambre régionale. « Le dispositif permet d’aller voir les banques pour
des avances, à condition que l’État fasse un signe. »
La présidente de la FNSEA, Christiane Lambert demande l’accélération des procédures et des
mesures fiscales, le Modef, une année blanche pour les cotisations sociales, la Confédération
paysanne, un fonds mutuel solidaire. « Pour les viticulteurs, la crise est déjà là, avec la
fermeture des restaurants entre autres. Les Français peuvent nous aider à réduire les stocks
existants en achetant du vin français », conclut Bernard Farges.