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1. Regnabit. Revue universelle du Sacré-Coeur. 1922/03.
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2. 1„ ANNÉE-N-IO MARS 1922
EN FAMILLE
On nous a dit : « Regnabit » doit être un poids bien lourd.
— Regnabit est une forée, qui soulève.
Chaque jour, Regnabit nous vaut des joies nouvelles :
Joies des bénédictions divines qui attestent la satisfaction
du Christ Amour ;
joies des bénédictions humaines- qui expriment le bonheur
des âmes.
Appréciation de S. G. Monseigneur Marius Besson, évêque
de Lausanne et de Genève, dans la partie officielle de la « Semaine
Catholique de la Suisse Française, organe du diocèse de Lausanne
et Genève », 22 décembre 1921.
On nous prie de signaler à nos diocésains, et d'abord aux membres
de notre clergé, Regnabit. Nous le faisons volontiers. — Qu'est-ce que
Regnabit ? C'est une Revue fondée en juin 1921 et paraissant douze
fois par an : les six premiers fascicules forment un volume de 544 pages.
Son titre, emprunté au message angélique de l'Annonciation : Regna-
bit in domo Jacob in aeternum (Luc. 1. 32), indique son but : le règne
du Coeur de Jésus. Elle a pour objet : « toute la question du Sacré-
Coeur, tout le mouvement des âmes vers le Sacré-Coeur ». Les articles
déjà parus se distinguent par la variété des matières et le sérieux
de la doctrine. Une qualité, d'ailleurs, la recommandé spécialement ;
« Elle n'est l'organe particulier d'aucune oeuvre, d'aucun pèlerinage,
d'aucune confrérie, d'aucun groupe»... Elle est «universelle». Nous
avons tant souffert de la multiplicité des petites revues qui se font
concurrence et de la bigarrure des petites dévotions, plus ou moins
3. '
346 En famille
en rapport avec le Sacré-Coeur, qui se succèdent les unes aux autres
que nous saluons avec joie cet organe de concentration. En mention-
nant et en commentant les innombrables formes extérieures que peut
revêtir la piété sincère envers le Coeur de Jésus, Regnabit nous fait
toucher du doigt cette double vérité que, d'une part, les pratiques
pieuses les plus diverses peuvent être permises à ceux qui pensent y
trouver un encouragement au bien (pourvu qu'elles ne soient con-
traires ni à la foi ni aux moeurs), et que, d'autre part, il serait inop-
portun de les propager indistinctement, comme il est ridicule de
vouloir imposer à tout prix telle forme particulière de préférence à
telle autre, comme si la vie de l'Église en dépendait. L'essentiel, c'est
l'attachement personnel au Christ, en dehors duquel nul ne peut être
sauvé. Nous souhaitons que Regnabit répande la dévotion raisonnable,
sérieuse, solide, au Coeur du divin Maître, celle qui ne s'arrête pas au
sentiment superficiel, mais va jusqu'au fond de l'âme et la transforme
en la pénétrant du véritable esprit de l'Évangile.
MARIUS BESSON,
évêque de Lausanne et Genève.
Lettre de S. G. Mgr Nicolas, îles Fidji, Océanie.
6 janvier 1922.
Mon Révérend Père,
Combien je vous remercie de m'avoir assuré la joie si vivement
sentie de lire « Regnabit ». Plus je le lis, plus je l'aime ; je n'en passe
pas une ligne. Que de bien vous faites dans le monde entier ! « Prospère
procède », c'est mon souhait à vous et à « Regnabit ». Daigne le Sacré-
Coeur vous bénir, ainsi que tous ceux qui coopèrent à une si belle
OEuvre.
Vous renouvelant mes remerciements et mes voeux, je demeure
bien religieusement vôtre en J. M.
CH. NICOLAS,S. M.
Du R. P. L. Cestoc, Directeur de « El Bien ».
Assomption, 25 novembre 1921.
...Je ne puis m'empêcher d'admirer et de remercier le Divin
Coeur de Jésus d'avoir inspiré une si belle pensée aux fondateurs de
« Regnabit ». Comme cette Revue va magnifiquement remplir le vide
qui existait dans nos publications religieuses ! Quel beau développe-
ment elle va donner au culte et à l'amour du Sacré-Coeur. Mais aussi
avec quelle piété, quel amour pour Notre Seigneur et quel beau talent
tous ces Messieurs de la rédaction s'acquittent-ils de la belle tâche ?
Je prie Dieu tous les jours et je fais prier les bonnes âmes d'ici pour
qu'ils trouvent dans leur travail une source inépuisable de toujours
nouvelles énergies morales et aussi physiques. Je me figure en effet,
que c'est à travers des difficultés sans nombre qu'ils le mènent à bonne
fin : mais ce seront ces difficultés qui en feront la fécondité.
4. En famille 347
Ici déjà ceux qui sont à même de lire ces articles — rares mal-
heureusement, car l'Espagnol est plutôt que le français la langue
des âmes dévotes — sentent comme un renouveau dans leur ferveur
et leur amour.du Sacré-Coeur. Et malgré tout, la répercussion doit
s'en faire sentir dans les masses, de langues indigènes.
J'en augure un grand accroissement de piété pour le Coeur de
Notre Seigneur, par conséquent des Communions plus fréquentes, et
des vocations religieuses et sacerdotales plus nombreuses.
Du R. P. Paul Régembeau, S.J.
Rose-Hill, Ile Maurice, 15 septembre 1921.
Monsieur,
Je. vous prie de m'inscrire comme abonné à Regnabit. Le premier
numéro de la Revue nous a beaucoup plu, à nos Pères de Saint Ignace
et h moi. Autant que le permettent les circonstances, je. répandrai
Regnabit autour de nous. Sans doute, d'autres prêtres de l'île Maurice
s'abonneront. Dans ce diocèse, la dévotion au Sacré-Coeur est tout à
fait florissante ; on peut dire que c'est la grande dévotion du pays :
et sa forme la plus générale est la Communion du 1er Vendredi du mois.
Viennent ensuite l'Apostolat de la Prière, la Garde d'honneur. L'image
du Sacré-Coeur se trouve dans toutes les maisons Catholiques ; et l'in-
tronisation du Sacré-Coeur dans les familles se répand.
Je vous souhaite plein succès. Regnabit annonce Régnât.
Lettre d'un Curé de Campagne de l'Anjou, à un bon Frère
convers, zélé propagateur de Regnabit *.
Je constate avec plaisir que vos efforts et vos fatigues sont dès,
maintenant grandement récompensés par la diffusion si rapide de la
Revue « Regnabit » — Vous avez fait joliment l'article — Vous avez
eu plein succès, et sans crainte de vous donner aucun sentiment d'or-
gueil, je vous en félicite chaudement, puisque ce n'est pas.pour vous
que vous avez peiné mais pour la gloire du Sacré-Coeur. Pour ce qui
me concerne, Dieu me garde de porter une appréciation sur une oeuvre
si importante, ce n'est pas à un pauvre Curé comme moi de la juger —
Mais il ni'est bien permis de dire que je lis « Regnabit » avec le plus
vif intérêt, et je l'espère aussi avec profit. Alors merci de tout coeur
et continuez votre oeuvre à laquelle je souhaite de plus en plus de
succès — Travaillez pour le Sacré-Coeur.
D'une maison des Soeurs de la Sainte Famille, Joliette,
Canada.
Nous sentons le Sacré-Coeur embraser nos coeurs à mesure que.
nous lisons le charmant « Regnabit ». Puisse le Coeur de Jésus em-
braser le monde entier de ce feu... « Amour au Divin Coeur de Jésus ».
5. 348 En famille
D'un monastère de la Visitation, ce charmant détail :
Puisque notre simplicité vous plait, je vous citerai deux bonnes
soeurs du voile blanc (converses) qui, après une journée d'extrême
fatigue, s'entendent encore nommer le soir, à l'obéissance, pour se
lever à 2 h. du matin et faire le pain de la communauté. Leur première
pensée fut de faire connaître leur grande lassitude ; mais se ravisant
aussitôt, une dit à l'autre : eh bien ! ce sera pour « Gnabit » ! Le mot
fit fortune, et, maintenant, quand se présente quelque pratique pé-
nible, on l'accepte pour « Regnabit » et les Anges du Monastère ins-
crivent la victoire à l'actif de la Revue.
Comme il faut toujours progresser, puisque l'activité est un signe
de vie, chaque matin à la Consécration de nos deux Messes quoti-
diennes nous demandons à, Jésus Hostie qui descend sur l'Autel,
d'élever son Regnabit et tous ses collaborateurs à la hauteur de la
tâche qu'ils se sont imposée, afin que selon son but il atteigne un grand
nombre d'âmes, les gagnant à l'amour du Divin Coeur.
Lettres d'âmes pieuses :
«Regnabit* me donne idée d'un trait d'union entre les divers
moyens dont les âmes se servent pour travailler à la gloire du Maître
très aimé, et par votre revue, nous de si loin, pouvons jouir, applaudir,
vibrer, apprécier nos frères, nos soeurs, tous ceux qui se dépensent au
service du Coeur Sacré de Jésus.
Que Notre Seigneur vous continue à vous et à tous vos collabo-
rateurs les grâces et les bénédictions qui vous rendent de plus en
plus aptes à faire le bien et beaucoup de bien.
Je ferai tout le possible pour faire connaître et propager votre
revue Regnabit: vous pouvez compter sur mes. prières et mes efforts
à cette intention.
Vous pouvez compter, Monsieur l'Abbé, sur mes Communions et
prières, l'acceptation de nies peines et souffrances, pour l'extension de
Regnabit, et aussi pour que le Sacré-Coeur vous facilite votre ministèret
Je dois vous dire que j'ai une vie, quoique bien humble, très
absorbante, de plus je suis plutôt isolée et j'ai bien peu d'influence;
néanmoins je vous promets de faire tout mon possible pour répandre
«Regnabit» et lui amener des abonnés qui, à leur tour, le feront
connaître.
Ce que je puis vous assurer pour votre si belle oeuvre c'est le
secours de mes pauvres prières et de mes petits sacrifices, et croyez
bien qu'il vous sera fidèle, trop heureuse serai-je de travailler pour
le règne du Sacré-Coeur de Jésus.
6. En famille 349.
Terminons par cette lettre d'un prêtre qui est un ami.
Je me réjouis sincèrement, vous le savez, du succès de Regnabit.
Et je vous avoue, maintenant, que j'étais un peu sceptique.. Il me
semblait qu'une revue pareille ne pouvait plaire qu'à un public très,
très restreint.
Cette impression, vous n'étiez pas seul, cher ami, à l'avoir.
En quoi... vous aviez tort.
Certes, si ce qu'on appelle « le grand nombre » est composé
de ceux qui regimbent d'instinct contre le sérieux et qui refusent
délibérément de jamais réfléchir, Regnabit n'est pas fait pour
« le grand nombre » : pour ce grand nombre là, j'entends.
Mais — grâce à Dieu et pour l'honneur de l'humanité —
dans toutes les régions du monde, et par dizaines de milliers
(ce qui est tout de même « un beau nombre ») il est des âmes qui,
jusque là restées à un niveau peu digne d'elles, consentent
joyeusement à s'élever, dès qu'elles y voient un intérêt, ou un
devoir.
A celles-là, à toutes celles-là, à ce grand nombre là, s'adresse
Regnabit.
Amis, cherchez ces âmes. Parlez-leur cordialement. Montrez-
leur qu'elles peuvent et qu'elles doivent monter.
Elles ont la grâce, participation de la Divinité qui est Vie
et Splendeur. Elles ont deux caractères sacramentels, puissances
ajoutées aux puissances quasi infinies d'une âme spirituelle.
Elles ont la foi, qui est une lumière ; trois dons de l'Esprit Saint
qui s'appellent Science, Sagesse, Intelligence. Supposé qu'elles
n'aient pas toutes ces forces surnaturelles — qui restent à leur
disposition et qu'elles recevront dès qu'elles s'y serontpotalc-
ment disposées— elles gardent l'attrait de la beauté, un désir
latent de vie profonde. Celles-là, toutes celles-là peuvent s'élever
au-dessus du niveau où elles sont aujourd'hui.
Elles le peuvent ? Elles le doivent.
Elles se le doivent à elles-mêmes, puisqu'elles furent créées
et rachetées pour vivre dans les altitudes, et puisque nul ne doit
laisser enfoui le talent qu'il a reçu.
Elles le doivent au Sacré-Coeur qui triomphera davantage
a mesure que ses amis, montés plus haut, rayonneront eux-mêmes
davantage, par Lui et pour Lui.
Ce ne sera pas le moindre bienfait de Regnabit d'attirer et
o établir ces âmes au seul niveau
qui leur convient.
Heureux ceux là qui l'aideront en cette tâche, ceux qui,
7. 350 En Famille
rencontrant des âmes hésitantes, leur feront prendre conscience
d'elles-mêmes, et les encourageront à « s'élever » enfin :
Cette ascension des âmes les maintiendra dans la lumière,
dans la joie.
Elle magnifiera le Sacré-Coeur.
Eh ! ne faut-il pas qu'il soit magnifié ?
— « J'ai rêvé, m'a écrit une âme idéale : j'ai vu Dieu sous
la forme d'un coeur immense. Il renfermait toute la terre, pour
la|faire vivre et se mouvoir en Lui. »
Le beau rêve ! Voici deux cent quinze ans, il fut exprimé
d'une façon fort curieuse, et suggestive.
Sonnen- Licht- 1708.
Motifcentralde la gravureinitialede S^Ilgemeines
Bibliothèqueu Hiéron,Paray.
d
Il ne se fait pas de la mappemonde une idée bien exacte,
ce cher Michael Leonti Eberlein.
Espagne, France, Europe sont déformées. -La Chine (Sina)
est une presqu'île. Notre Océan Atlantique — où l'auteur place
la plaie saignante du coeur— se divise, on ne sait pourquoi, en
Mer du Nord (Mare Sept.) et en Océan Ethiopique ( Oceanus
Ethiopieus). Et nous nous sentons hésitants aux abords de ce
pôle sud où voici la Terre Australe ineonnue (Terra Australis
incognita).
8. En Famille 351
Du moins nous apprenons que le Monomatapa —c'est vous,
bon La Fontaine qui m'en avez parlé le premier — se trouve à
même distance, à peu près, de l'Abassie ? (Abassia) et du Cap
de Bonne Espérance (Prom. Bonae Spei).
Traversons « l'Océan Ethiopique ». Voici des noms connus :
le'détroit de Magellan (Fretum Magell.), le « Chili », le Paraguay
(Paracuaria), le « Peru ». Si nous sommes un peu déconcertés par
l'Océan Occidental (Oceanus Occidentalis) et par la Mer Pacifique
(Mare Pacificum), quelle joie de saluer la Nouvelle Espagne
(Nova Hispania), la Nouvelle Grenade (Nova Granata), la Nou-
velle|France (Nova Francia) !..
Queljbonheur surtout d'acclamer avec les anges « le Coeur
de Jésus,*Coeur de l'univers » (Cor Jesu, Cor Universi), et de voir
dépeinte,1^deux cents ans à l'avance, la parfaite réalisation du
grand acte de Léon XIII, la Consécration du genre humain au
Sacré-Coeur l
Hélas!..
Après l'idéal, figurons la -réalité :
9. 352 En Famille
Deux mille ans donc après que Jésus « nous a donné, sur
la croix, son coeur » ;
Sept cents ans après les premières manifestations connues
du Sacré-Coeur ;
Deux cent cinquante ans après les révélations de Paray-le
Monial ;
Vingt-cinq ans bientôt après la Consécration officielle du
genre humain au Sacré-Coeur :
Les dedx tiers des âmes sont païennes ;
Du troisième tiers, la plus large moitié... voyez de qui elle
est faite.
Et dans le reste, dans le pauvre reste, à côté de splendeurs
qui reposent les yeux de Jésus et qui attirent sa miséricordieuse
tendresse, combien de déchéances et de non valeurs !
Ah ! travaillons !
Naguère, notre très aimé pape, Benoît XV, indiquait pour
objectif à tous ses enfants la conquête mondiale qui doit réaliser
la consécration de tout le genre humain au Sacré-Coeur. Animés
de « l'esprit missionnaire » qu'il voulait nous infuser, nous com-
blerons les voeux de notre Pape très aimé, Pie XI.
Archevêque de Milan, c'est lui qui inaugura, dans cette ville,
l'Université du Sacré-Coeur. Aussitôt après son élection, il s'est
avancé jusqu'à l'extrême limite vers ses fils, et vers tous ceux
qui devraient être ses fils, pour les bénir tous d'un coeur
paternel...
Une fois de plus, Regnabit demande :
des prières,
des sacrifices,
des communions,
des efforts d'apostolat,
afin qu'advienne le Règne béni de l'Amour !
F. ANIZAN.
10. 353
L'objet des révélations privées
/. - DOCTRINE
Les Révélations privées
YI. -L'objet tes Révélations privées
Nos dernières conclusions au sujet de la croyance que mé-
ritent les révélations privées ont pu sembler, peut-être, un peu
étroites. Comment expliquer l'influence si profonde de ces sortes
de révélations dans la vie d'un bon nombre de saints, et même
dans plusieurs manifestations de la vie sociale de l'Église, s'il
est vrai qu'on ne peut les croire de foi divine proprement dite,
et même qu'on ne peut en avoir généralement qu'une certitude
approximative ?
Les réflexions suivantes sur l'objet de révélations privées
fourniront la réponse à cette question, et en même temps nous
feront mieux pénétrer dans la nature de ces phénomènes sur-
naturels qui, même lorsqu'ils sont réels et véritables, ne laissent
pas d'avoir habituellement quelque chose de voilé et d'obscur,
soit dans leur origine, soit dans leur interprétation.
1° — LES RÉVÉLATIONSPRIVÉES N'APPORTENT PAS A L'AME
UNE NOUVELLE DOCTRINE, MAIS SEULEMENT UNE NOUVELLE
LIGNEDE CONDUITE.
Toute révélation, toute parole de Dieu tend finalement à
nous manifester quelque chose de la vérité divine. Mais cette
manifestation peut avoir un double but, selon que Dieu se pro-
. pose directement de nous instruire et de nous former dans la foi
des mystères divins, ou bien seulement de diriger d'une manière
particulière quelques-uns de nos actes, en nous donnant une règle
de conduite plus précise et plus immédiate. (1)
La révélation qui a pour but direct de nous instruire dans la
foi est achevée et complète, pour
l'Église, depuis le temps des
apôtres. Elle a commencé au paradis terrestre, s'est peu à peu
développée au temps des patriarches, ensuite sous Moïse et les
Prophètes, pour arriver à sa plénitude sous la loi de grâce, donnée
Par Jésus-Christ et ses apôtres. Depuis lors, Dieu n'a plus rien
révélé à l'Église, et il ne lui révélera jamais plus, ici-bas, aucun
Mystère nouveau, aucune doctrine nouvelle. Sans doute, il y
aura vie et progrès dans
et l'Église, même au point de vue doctrinal
dogmatique, mais cette vie et ce progrès n'apporteront jamais
0) S. Th. II — II. 174 a. 6.
11. 354 Doctrine
une vérité vraiment nouvelle ; ils ne feront qu'amener une intel-
ligence de plus en plus complète et de plus en plus claire de la
même vérité qui a été révélée toute entière à l'Église, dès l'origine.
Ce que nous disons ainsi, en toute certitude, de la révélation
faite à l'Eglise, pouvons-nous le dire aussi des révélations privées ?
Et,, comme nous disons que, depuis les apôtres, Dieu n'a plus
révélé, ni ne révélera jamais plus aucune nouvelle vérité doctri-
nale à son Église sur la terre, pouvons-nous affirmer qu'il en
agit de même avec les saints, ses confidents, de sorte qu'il ne
leur manifeste à eux non plus, aucun mystère, aucune doctrine
qu'il n'ait déjà- révélée à son Église dès le commencement ?
Nous ne pourrions pas l'affirmer avec une absolue certitude ;
cependant c'est au moins très vraisemblable, sinon moralement
certain. Sur terre, en effet, toute âme chrétienne doit être soumise
à l'autorité enseignante de l'Église. Et comment pourrait-elle
l'être, si elle savait, de la part de Dieu, quelque doctrine que
Dieu n'ait pas dite à son Église ? — De plus, la première règle
à suivre pour juger des révélations, privées, c'est de voir si la
doctrine qu'elles contiennent est positivement conforme à celle
que l'Église enseigne. Et comment pourrait-on établir cette con-
formité, si une véritable révélation privée pouvait contenir des
doctrines que l'Église ne connaît pas ? — Enfin, si l'âme, ainsi
illuminée d'en haut, veut agir avec prudence, et se conduire
d'après les directions que Dieu même lui donne ordinairement,
elle doit soumettre ses communications surnaturelles, même les
plus intimes, au contrôle et au jugement de son confesseur ou
directeur qui, lui, n'a que Venseignement de l'Église pour se
former une conviction et pour régler sa conduite.
Nous pouvons donc établir, comme pratiquement certain,
que Dieu ne révèle plus d'autre doctrine, depuis les apôtres, pas
plus à certaines âmes en particulier qu'à la société de l'Église.
Les paroles de Dieu peuvent bien se rapporter à quelque mystère,
ou à quelque vérité doctrinale, mais alors elles ne font que répéter,
expliquer, éclairer la vérité donnée une fois pour toutes, à l'Église.
L'action du Maître intérieur pourra être, il est vrai, imcompara-
blement plus efficace et plus intime ; sa lumière' pourra être
incomparablement plus claire et plus vive, que l'action et !a
lumière de n'importe quel enseignement humain ; mais elles
porteront toujours sur les mêmes vérités que Jésus-Christ a don-
nées autrefois à son Église, et que celle-ci enseigne maintenant
à tous les fidèles.
Nous sommes donc en droit de conclure que les révélations
privées ne sont pas données par Dieu directement pour instruire
l'âme, ni lui manifester ce qu'elle doit croire, mais qu'elles appar-
tiennent toutes à cette deuxième catégorie de révélations, dont
parle saint Thomas, qui ne contiennent à proprement parler.
12. L'objet des révélations privées 355
*
qu'une règle de conduite, une norme donnée par Dieu pour une
meilleure orientation de la vie ou, au moins, de quelques-uns de
ses actes. (1)
2° — LES DIFFÉRENTES SORTES DE RÉVÉLATIONSPRIVÉES
D'APRÈSLEUR OBJET SPÉCIAL.
Si nous voulons maintenant descendre dans le détail, et
examiner les différentes méthodes que Dieu emploie pour éclairer
et diriger ainsi ses confidents et ses intimes, nous devons tout
d'abord reconnaître qu'il est impossible de classifier exactement
j les divers modes de l'action divine, car elle varie et selon les
! personnes à qui Dieu s'adresse, et selon le but spécial qu'il veut
i atteindre en se communiquant à chacune d'elles.
Cependant, il nous semble que toutes les révélations privées
H pourraient se ramener, d'après leur objet spécial, à l'une ou
l'autre des catégories que nous allons brièvement exposer.
1° Les révélations privées peuvent avoir pour but et objet
J spécial de porter l'âme à une plus grande ferveur, en lui don-
' nant une connaissance
plus précise, plus distincte ou plus péné-
trante des mystères de la religion.
Ces révélations, nous les trouvons dans la vie où les écrits
d'un grand nombre de saints personnages : les unes nous rap-
portent, dans les plus menus détails, les circonstances de la vie
et les mystères de Notre-Seigneur ou de la Sainte-Vierge ; d'autres
nous décrivent le séjour et les fêtes du ciel, ou encore les tourments
du purgatoire et de l'enfer ; d'autres nous donnent des explica-
tions théologiques des mystères etc.. Pour n'en citer que quelques
unes, mentionnons par exemple les révélations de Sainte Fran-
çoise Romaine. L'auteur de sa vie nous raconte près d'une cen-
taine de visions de la sainte, sur les différents sujets que nous
venons d'énumérer. (2) Nous lisons de même une longue série
<te révélations les plus diverses dans la vie de la bienheureuse
Véronique de Binasco. (3) On en trouve de semblables, et en
très grand nombre, dans la vie de sainte Brigitte, de sainte
Gertrude, de sainte Catherine de Sienne, et de tant d'autres.
, ,.0) «Prophétia ordinatur ad cqgnitionemdivinaeveritatis pcr cujus contem-
Pjationem solum fide instruimur, sed etiam in nostris operibus gubernamur...
non
*' er8°deprophétia
loquamur, in quantum ordinatur ad fidem Deitatis, sicguidera
suh se?undum très temporum distinctiones :humanorum legem, sub lege et
scilicet, ante
revi^!?tia"" Quan*um vero adsecundum
diversrficata est, non
directionem actuum, prophetica
conri^i- m negotioruni...Et, ideo temporis processum, sed secundum
nit? ae
ns rf agendis, secundum quolibet tempore instructi sunt homines divi-
quod erat expediens ad salutem electorum».
S. Theol. II - II. Q. 174art. 6.
non defuerunt aliqui prophetiae spiritum habentes,
nonn "§ul'sad riovam doctrinam fidei
rfii-»»?-em temporib'us, depromendam,sed ad humanorumactuum
«"ectionem.Wd. ad 3».
i
>t'Acta SS. (Palmé) VIII p. 104 - 154.
W)Acta SS. II, p. 186- 206.
13. 356 Doctrine
Celles qui sont peut-être les plus répandues parmi les fidèles sont
les révélations de Marie d'Agréda sur la vie de la Sainte Vierge
et celles de Catherine Emmerich sur la Passion de Notre-Seigneur!
A ce genre de révélations peuvent assez facilement se ramener
toutes celles qui ont trait à des sujets historiques, ou à des exposés
théologiques, ou encore à des sujets scientifiques, comme sont
surtout les révélations de sainte Hildegarde. Cette sainte, dans
son ouvrage, Liber divinorum operum (1), nous décrit l'ensemble
dés oeuvres de Dieu dans la création ; et dans le livre suivant :
Liber subtilitatum diversarum naturarum creatarum (2), elle nous
donne un véritable traité de physique et de médecine, tel qu'un
savant de l'époque, au XII 8 siècle, aurait pu le composer. Et la
sainte prétend ne rien dire qu'elle n'ait appris de Dieu lui-même,
Que penser de ces sortes de révélations, et comment sont-
elles objet de la parole.de Dieu ?
D'une part, nous avons des raisons plus que suffisantes
pour admettre qu'elles viennent de Dieu : la scienee miraculeuse
qu'elles supposent bien souvent, la sincérité et la dignité des
témoins qui nous les rapportent, ne peuvent nous laisser de doute
sur leur vérité d'ensemble. Comment les rejeter, en effet, sans
supposer que tous ces saints personnages qui nous les racontent,
commes divines, n'ont été que des hallucinés ? — car, encore une
fois, nous ne parlons que des personnes d'une sainteté incontes-
table reconnue par l'Église ; des autres, il n'est pas question.—
Et quel est le catholique qui oserait penser qu'une sainte Gertrude,
une sainte Thérèse, et tant d'autres saints que l'Église propose
à notre admiration et à notre imitation, n'ont été habituellement
que des hallucinés ?
D'autre part cependant, lorsque nous venons à comparer
ces révélations entre elles, ou à les confronter avec des vérités
que nous connaissons certainement par ailleurs, nous voyons
aussitôt que tout ce qu'elles contiennent ne peut venir de Dieu.
Entre quantité de révélations également acceptables, nous trou-
vons des contradictions nombreuses et manifestes ; (3) dans celles
qui touchent à des questions historiques ou scientifiques, nous
constatons beaucoup d'erreurs certaines ; parmi celles qui donnent
quelque explication théologique des mystères, les unes adoptent
tel système, les autres le système contraire, selon les écoles théo-
logiques dont le voyant a subi l'influence. Même dans les révéla-
tions les plus authentiques, et les plus incontestables, si elles ont
une certaine étendue, il y a des difficultés insolubles, des erreurs
manifestes. (4)
(1) Migne, P.L. CXCVIl, col. 742 - 1079.
(2) Ibid. col. Ï126 - 1351.
(3) Voir quelques exemples dans Poulain : Des grâces d'oraison p. 343-
(4) On peut lire dans Amort : De Revelationibus...,un grand nombre de aiw
14. L'objet des révélations privées 357
Cette double constatation nous met en présence d'une ano-
malie qui paraît, au premier abord, bien étrange : le fait de révé-
lations vraiment divines qui contiennent des erreurs de détail
de toutes sortes. A notre avis, le seul moyen de résoudre cette
apparente contradiction se trouve dans le principe que nous
avons emprunté plus haut à saint Thomas : toute révélation,
depuis les apôtres, est donnée par Dieu, non pas pour instruire
les âmes dans la foi, mais pour les diriger spécialement dans .
quelques-uns de leurs actes.
Ainsi, lorsque Dieu manifeste à une âme, par exemple, le.
mystère de la Passion, son intention n'est pas de lui apprendre
toutes les menues circonstances qu'elle aperçoit dans cette
vision, mais seulement de la porter à une ferveur plus
grande, à une piété plus intense, en lui faisant mieux voir l'éten-
due et la profondeur du mystère.
Pour arriver à ce but, Dieu peut bien parfois dire lui-même,
en paroles précises et distinctes, ce qu'il veut faire savoir à l'âme ;
dans ce cas, les divines paroles, sont nécessairement vraies. Mais
le plus souvent, Dieu ne parlera pas à l'âme aussi distinctement ;
il ne se manifestera à elle que par des visions plus ou moins
précises qu'il présentera à son imagination ou à son intelligence.
Il pourra bien, ici encore, donner lui-même, ou disposer tous
les éléments de ces visions, de telle sorte que tout y soit conforme
à la vérité qu'il veut manifester ; mais souvent aussi, il ne fera
que se servir des images, des idées, des connaissances qu'il trouve
dans l'âme. Il se révélera à elle, il l'éclairera surnaturellement,
«n lui disant plus nettement et plus vivement, de tel ou tel
mystère, tout ce que les idées qu'elle avait peuvent en représenter
mais il ne lui donnera pas de nouvelles connaissances ; il ne corri-
gera pas même les erreurs où elle se trouvait. La lumière qui
éclaire le mystère dans cette âme viendra de Dieu ; mais elle
n'arrivera à l'intelligence qu'à travers les notions imparfaites
qu'elle possédait auparavant.
Si donc cette âme veut raconter sa vision, et réfléchir sur
d'autres intelligences la divine lumière qui l'a inondée, elle ne
pourra l'exprimer que par les mêmes notions, les mêmes idées
plus ou moins justes qui lui ont servi à la recevoir. Elle nous
rapportera une véritable révélation divine, en ce sens que c'est
Dieu lui-même qui, par son action immédiate, lui aura mieux
rait voir le mystère ; mais elle- nous le rapportera dans des des-
criptions défectueuses, ou inexactes, selon les idées à travers les-
quelles elle a reçu la lumière de Dieu et par lesquelles elle doit
la renvoyer au dehors.
dMéSi^u a'erreurs>relevéesdans les révélationsde sainte Gertrude (p. 170- 220),
e « bienheureuse
Véroniquede Binasco(p. 241 - 248), et surtout de la vénérable
*ane d'Agreda (p. 248-365).
15. 358 Doctrine
C'est comme si Dieu, pour captiver davantage notre esprit
et notre coeur, nous faisait voir, par son action directe, très vive-
ment tout ce que la science actuelle peut exprimer de sa puissance
et de sa bonté. Nous pourrions dire vraiment que Dieu se révèle à
nous, qu'il nous révèle ses attributs, puisque c'est par son action
immédiate qu'il nous éclairerait ainsi ; mais pour décrire ensuite
ce qu'il nous aurait ainsi fait voir de sa bonté et de sa puissance
nous devrions nous servir des mêmes connaissances que nous
avions auparavant et dont Dieu se serait servi pour nous éclairer.
Nous ferions le récit d'une véritable révélation divine ; mais
avec toutes les imperfections ou les erreurs de la science
moderne. (1)
Nous ne disons pas qu'on doive ainsi expliquer toutes les
révélations privées. Il en est, nous l'avons déjà noté, où la parole
de Dieu est précise, distincte ; mais il en est d'autres, moins
parfaites, où la parole de Dieu n'arrive à l'âme qu'à travers un
ensemble d'idées déjà fait. Telles sont, croyons-nous, presque
toutes les révélations que nous pourrions appeler, d'après leur
forme extérieure, historiques, théologiques ou scientifiques. 11
ne faut pas y chercher des leçons divines d'histoire, de sciences
ou de théologie : ce n'est pas ce que Dieu a voulu donner à ses
confidents, et ce n'est pas ce qu'il leur a dit. Il faut y chercher
seulement des leçons d'édification et de piété, c'est-à-dire une
.intelligence plus intime, et plus affectueuse des mystères. C'est
là seulement ce que Dieu a voulu donner, c'est pour cela seule-
ment qu'il a envoyé sa lumière et répandu sa céleste clarté. (2)
On le voit : du fait que bien des révélations contiennent des
erreurs d'histoire, de science, ou même de théologie, on ne saurait
en déduire qu'elles ne sont pas divines. Tout n'y est pas divin,
il est vrai ; mais qu'on s'applique à distinguer ce qui vient de
l'esprit de Dieu et ce qui vient de l'esprit de l'homme, et l'on
n'aura plus aucune difficulté à les recevoir comme divines dans
leur fond, (surtout si elles nous viennent de grands saints) quoi-
que dans leur forme extérieure elles portent parfois des imper-
fections, des inexactitudes, des erreurs même sur des points qui
sont étrangers à ce que Dieu voulait révéler à l'âme.
(1) Mêmesi Dieu donnait cette science miraculeusement,elle ne serait pas
nécessairement pour cela exempte d'erreurs ; car Dieu pourrait bien se contenter
de la donnerdans la mesureoù les hommessavants de l'époquepeuvent l'acquérir.
Tel est vraisemblablementle cas pour les révélationsde plusieurs saints.
(2) Dans ces révélationsimparfaites, il peut arriver que le voyant lui-même
se trompe et attribue à Dieu des chosesque Dieu ne lui a pas dites : « menspro-
phetae dupliciter a Deo ihstruitur : uno modo per expressamrevelationerh; ano
modo per quemdam ihstinctum occultissimum...sed ad ea quae cognoscit per
instinctum, aliquando sic se habet ut non plene discernera possit utrutn h_aec
cogitaverit aliquo divino instinctu, vel per spiritum proprium... talis enim ins-
tinctus est quiddam imperfectumin génèreprophetiae. »
S. Th. II - II, 171, a. 5.
16. L'objet des révélations privées 359
Qu'y a-t-il à croire de foi divine dans ces révélations ? Au
fond, pas autre chose que le mystère que nous croyions déjà par
la foi chrétienne, et que nous trouvons exposé ici plus pieusement,
plus affectueusement et peut-être plus complètement. Tout le
reste -n'est qu'un revêtement d'idées humaines, que le voyant, a
dû donner à son récit ; aussi n'y trouvons-nous rien que nous
devions accepter sur l'autorité de Dieu.
L'explication que nous venons de proposer s'applique
proportionnellement à toutes les autres révélations : nous allons
le montrer en quelques mots.
2° Dans une deuxième catégorie, nous comprenons les révé-
lations prophétiques, c'est-à-dire celles qui donnent la connais-
sance surnaturelle de quelques événements futurs. Il est peu de
: vies de saints qui n'en contiennent au moins quelques-unes.
; Dans leur ensemble, elles sont moins étendues que les précédentes,
j et ne remplissent pas comme celles-ci dés volumes entiers ; mais
[ elles sont plus fréquentes. Le don de prophétie, comme le don
, des miracles, est un des privilèges, par lesquels Dieu se plait
; souvent à récompenser la sainteté de ses meilleurs serviteurs.
; Aussi le trouve-t-on chez presque tous les grands saints, uni assez
souvent avec le don de discernement des esprits.
Ici, le but spécial de l'action divine n'est pas, comme précé-
demment, de former l'âme à une plus grande ferveur, mais bien
de la conduire, de la diriger en vue de l'avenir. Ces révélations
sont données, tantôt pour l'utilité des autres : tel ce don vraiment
extraordinaire de discernement des esprits qui contribua beau-
coup à rendre le ministère du Curé d'Ars si fécond et si fructueux ;
tantôt pour l'utilité personnelle de celui qui les reçoit : telles ces
visions divines par lesquelles les Fondateurs d'Ordres religieux
contemplèrent si souvent, par avance, les fruits'de salut que
devaient produire leurs instituts naissants, et dans lesquelles ils
puisèrent un courage à toute épreuve pour surmonter tous les
obstacles.
Il est manifeste ici encore, que l'intention de Dieu, en dévoi-
lant ainsi les secrets de l'avenir, n'est pas d'instruire ses confidents
sur tous les détails de ce qui doit arriver, ni d'imposer quelque
nouvelle vérité à leur croyance ; il veut seulement les conduire,
leur montrer d'avance le chemin, les avertir, les prémunir. Dieu
Veut, sans doute, être écouté ; mais il ne s'adresse pas directement
a la foi du
voyant, ni à plus forte raison, des autres fidèles..
il n'est donc pas nécessaire, ici non plus, que Dieu parle
toujours en paroles nettes et claires ; il peut éclairer autrement
ame qu'il veut conduire ; il peut faire qu'elle se conforme à la
suggestion divine, même si elle ne sait pas distinguer si cette
Suggestion vient de Dieu, ni déterminer avec exactitude tout ce
W elle comporte.
17. 360
Doctrine
3° Une troisième catégorie peut comprendre les révélations
par lesquelles Dieu donne une mission spéciale à remplir. $j
Dieu parle à l'âme, ce n'est plus directement pour la former à
une
plus grande piété, ni seulement pour l'avertir et lui suggérer une
ligne de conduite, c'est pour lui commander et lui imposer tels
actes et tels travaux. Il pourra lui demander des actes purement
intérieurs, — et ce sera le cas le plus fréquent — comme de
prier à telle intention, de souffrir et de réparer pour tel pécheur
ou telle âme du purgatoire, de s'offrir tout spécialement en
victime en union avec Jésus crucifié ; mais il pourra aussi lui
demander de remplir telle mission extérieure et publique : mission
par exemple de Sainte Catherine de Sienne de travailler au retour
du Pape, d'Avignon à Rome ; de sainte Jeanne d'Arc d'aller
délivrer la France du joug des Anglais ; de sainte Thérèse, de
fonder son monastère d'Avila et de travailler à la réforme du
Carmel ; de sainte Marguerite-Marie, de faire connaître au monde
l'amour du Sacré-Coeur; etc..
Dans ces communications, Dieu parlera à l'âme assez claire-
ment pour lui manifester la mission qu'il veut lui donner ; il lui
fournira même souvent des preuves miraculeuses pour qu'elle
puisse faire reconnaître sa mission comme divine ; mais ici encore,
il ne fera souvent entendre sa parole à l'âme qu'à travers les
idées qu'elle avait déjà. Et ainsi il pourra arriver que l'âme,
quoique vraiment éclairée par Dieu, ne distingue pas toujours
ce qui vient de Dieu, et ce qui vient d'elle-même.
4° Enfin on peut classer dans une dernière catégorie toutes
les révélations qui ne sont que des paroles de pure intimité entre
Dieu et l'âme. Dieu s'adresse ainsi à ses amis les plus fidèles ; il
leur parle comme un ami parle à son ami. Il le faisait déjà avec
Moïse, selon le témoignage de l'Ecriture ; il l'a fait depuis avec
beaucoup de saints dont nous pouvons lire la vie ou les écrits ; il
l'a.fait encore avec un bien plus grand nombre que nous ne
connaîtrons qu'au ciel. Qu'on lise par exemple les oeuvres de
Sainte Gertrude, et on verra jusqu'à quelle familiarité Dieu peut
descendre avec les âmes qu'il aime ! Au témoignage du
B. Raymond de Capoue, confesseur de sainte Catherine de Sienne,
à peine pourrait-on trouver, sur terre, deux âmes qui soient en
communication aussi intime et aussi fréquente, que l'était
cette sainte avec Notre-Seigneur. De nos jours, ces divines
intimités n'ont pas cessé ; bien au contraire. Les Vies de soeuf
Thérèse de l'Enfant Jésus, de Gemma Galgani, de la soeur Ger-
trude-Marie, et de bien d'autres sont là pour le prouver
évidemment.
Pourrions-nous rejeter comme fausses toutes ces révélations
ou du moins les négliger comme douteuses ? Il faudrait drre
18. L'objet des révélations privées 361
alors qu'une grande partie de ce mouvement de piété intense qui
porte les plus belles âmes vers Dieu ne repose que sur des illusions ;
jl faudrait dire que l'Église se trompe bien quand elle nous pro-
pose comme des parfaits modèles, ces âmes qui n'ont vécu que
sous l'influence de paroles divines.
Nous accepterons donc ces révélations comme divines,
dans leur substance, surtout pour ce qui concerne la perfection
de vie chrétienne qu'elles expriment ; mais nous saurons que la
parole de Dieu peut bien ne pas s'étendre à chacune des expres-
sions que l'âme a cru entendre, parce que Dieu parle parfois, et
peut-être souvent, par le moyen des idées et dés connaissances
que l'âme avait déjà.
En résumé : toutes les révélations privées peuvent se ramener -
à l'une ou à l'autre des catégories que nous venons d'énumérer ;
et, de toutes se vérifie parfaitement l'explication donnée par
saint Thomas : Dieu ne les accorde pas pour proposer une nouvelle
doctrine qu'il faudrait croire, mais pour donner une direction
spéciale qu'il faut suivre.
Dans ces divins entretiens, Dieu ne se conduit pas comme
un maître qui enseigne, mais bien comme un père qui prend un
soin spécial de quelques-uns de ses enfants. Parmi les paroles
qu'il leur fait entendre, il y en a, sans doute, parfois qui récla-
meront de leur part un véritable acte de foi ; tout comme dans
une conversation ordinaire, il arrive qu'on doive croire positi-
vement certaines assertions de l'ami qui nous parle —mais
généralement elles n'exigeront que la soumission, la confiance,
l'abandon à la toute condescendante bonté de Dieu ; c'est-à-dire
les sentiments d'un enfant à l'égard de son père qui lui parle
dans l'intimité et le coeur à coeur.
Quant à ceux qui lisent ensuite le récit de ces révélations,
si elles offrent des garanties suffisantes d'authenticité, — ce qui
est le cas ordinaire pour les révélations des saints — ils devront
les accepter avec respect ; mais ils n'y trouveront rien qui s'im-
pose à eux comme objet d'un nouvel acte de foi divine : ni le
fond doctrinal qu'elles peuvent contenir, car cette doctrine
ils la croient déjà comme enseignée par l'Église ; ni l'objet direct
et spécial de ces révélations, car cet objet se réduit à une direction
pratique donnée par Dieu à ceux à qui il s'adresse ; ni surtout
Chacune des assertions particulières par lesquelles le voyant a
mterprété la parole de Dieu qu'il a entendue, car dans cette inter-
prétation, le voyant est loin d'être infaillible.
Nous lirons donc les révélations des saints comme des récits
ordinairement exacts des entretiens que Dieu leur à accordés ;
19. 362
'Doctrine
nous les lirons dans un but tout pratique de piété et
sans aller jamais y chercher une règle de notre foi, d'édification,
ni un exposé
de certaines vérités théologiques que l'enseignement de l'Église
ne saurait nous donner. Pour nous, comme pour le
voyant, elles
n'auront d'autre but que de nous aider et de nous diriger dans
notre conduite, non pas de nous instruire ou de nous former
dans la foi.
(A suivre)
A. ESTÈVE, O.M.I.
20. pourquoi Jésus prend nos infirmités 363
LE SACRÉ-COEUR
et les infirmités de sa nature humaine
CSuiïeJ
IY. - Pourquoi le Verte se faisant ctiair prend nos infirmités.
Le Sacré-Coeur est infirme comme nous : c'est un fait. Pour-
quoi en fut-il ainsi ? pourquoi fallait-il que le Verbe se faisant
chair renonçât à son droit rigoureux de posséder une nature
humaine impassible et glorieuse, pour s'unir à une humanité
semblable à la nôtre, telle que l'a faite le péché, avec les infir-
mités et les misères auxquelles il l'a soumise ? A cette curiosité
légitime, S. Thomas répond par. trois raisons de haute conve-
nance, q. 14, a. 1.
1. — La première raison est la fin même de l'Incarnation,'
Or la fin de l'Incarnation, c'est la Rédemption : le Verbe de
Dieu se fait chair pour nous racheter et pour nous sauver. « Il
est descendu des cieux, chantons-nous dans le Symbole, pour
nous autres hommes et pour notre salut ». « Lé Fils de Dieu,
dit le docteur angélique, vient en ce monde, revêtu de notre
chair, afin de satisfaire pour les péchés du genre humain. On ne
satisfait pour le péché d'un autre qu'en prenant sur soi et en
subissant la peine due à ce péché. Or les infirmités de la chair
sont historiquement le châtiment du péché. Il convenait donc
que le Christ prît sur lui lès pénalités encourues par notre race
depuis Adam ». Il fallait qu'il acceptât la faim, la soif, la fatigué,
la douleur, la mort, en un mot, tout ce qu'un homme peut souf-
frir dans son corps. Isaïe l'avait prédit : «Véritablement c'é-
taient nos misères qu'il portait et nos douleurs dont il s'était
chargé». (2)
Le Verbe s'unit à notre nature pour apaiser la justice de
son Père et réconcilier avec lui le genre humain. L'expiation
du péché était en effet voulue par la justice divine, et l'expia-
tion réclame la souffrance et la mort. Sans effusion de sang,
Pas de pardon. Sine sanguinis effusione, non fit remissio. (3)
Les victimes de l'Ancien Testament ont par leur impuissance
cessé de plaire à Dieu. Afin de pouvoir s'immoler à la justice
divine et reconnaître par sa mort le souverain domaine de Dieu,
(1) Voir Regnabit : I, 424 ; H, 16.
2) ISAÏE,LUI, 4.
(3) Hebr., IX, 22.
21. 364 Doctrine
le Verbe prend donc un corps passible et mortel comme le nôtre,
qui sache souffrir et mourir. Le Christ infirme a fait pour nous
pécheurs ce que ne pouvait un Christ glorieux. Racheter, c'est
prendre à son compte le montant d'une dette. Glorieux, le Christ
pouvait nous sauver et faire éclater la miséricorde de Dieu ;
il ne pouvait pas à proprement parler nous racheter, c'est-à-dire
payer notre dette de souffrances, de misères et de mort ; il a
donc pris notre place, substitué sa personne divine à notre per-
sonne pécheresse, et reçu tous les coups que la justice de Dieu
nous destinait. « Comme Dieu le Père, dit S. Cyrille d'Alexan-
drie, avait résolu de sauver le genre humain de la corruption
du péché, et qu'aucune créature qui excède les forces de
toutes, n'était capable d'une telle oeuvre le Fils unique de
Dieu, Dieu comme son Père, prit à coeur cette volonté pater-
nelle connue et se chargea de la réaliser. Il s'humilia dans un
abaissement volontaire tel, qu'il s'anéantit jusqu'à la mort la
plus infamante. Mourir suspendu à une croix, n'est-ce pas le
comble de l'ignominie ? Parce qu'il a souffert de la sorte, Dieu
l'a souverainement élevé ». (1)
2. — Le Verbe prend une nature humaine infirme comme
là nôtre, sensible à tous les chocs qui nous font souffrir, afin
d'établir et d'affermir nôtre foi en l'Incarnation, et de nous mon-
trer jusqu'à la dernière évidence qu'il est homme comme nous
et notre frère vraiment. « Puis donc que les enfants ont eu en
partage le sang et la chair, lui aussi y a participé également...
De là vient qu'il a dû être fait semblable en tout à ses frères ».(2)
Comme la nature humaine se présente universellement à nous
.. avec son cortège obligé de besoins, de faiblesses et de misères,
on aurait pu douter que le Christ fût vraiment homme, s'il avait
pris une humanité sans les infirmités qui en sont aujourd'hui
inséparables, majestueuse, impassible, investie de privilèges surhu-
mains. « Bien souvent, dit S. Jean Chrysostome, les Anges et
même Dieu se sont montrés en terre sous forme humaine ; or,
ce qui se voyait alors n'était pas la réalité d'une chair humaine,
mais condescendance et pure apparence. Pour donc que tu ne
penses pas que l'avènement du Fils de Dieu a été comme ces
apparitions angéliques, mais afin que tu croies qu'il s'est mani-
festé dans une chair humaine vraie et réelle, il a été conçu et
est né, il a été allaité et couché dans une crèche, non pas dans
le secret d'une chambre, mais dans une hôtellerie, au milieu
d'une multitude de peuple, afin que sa naissante fût chose pu-
blique et connue de tous». (3)
Le Verbe incarné a tant à coeur, si j'ose ainsi m'exprimer,
(1) In Joannem, I. X, c. 2. P. G. 74; 374.
(2) Hebr., II, 14, 17. .
13) De Consubstantiall,conira .Anomaeos, hom. VII, n. 6. P. Q. 48, 765.
22. pourquoi Jésus prend nos infirmités 365
de prouver qu'il est bien l'un des nôtres, de notre chair et de
notre sang ; — il veut établir si irréfutablement la vérité de son
être humain et la réalité de ses saintes infirmités que, durant
les trente années de sa vie cachée, il vit obscurément sans rien
qui le distingue des autres hommes, habitu inventus ut-homo,
pris vulgairement pour le fils d'un charpentier, filius fabri, s'as-
treignant à tous nos besoins de nature, si bien que ses ennemis
le veulent faire passer pour un homme adonné au vin et aimant
la bonne chère, homo vorax et potator vini, (1) alors qu'il satisr
fait légitimement aux exigences et aux besoins dé sa chair. Dur
rant sa vie publique, il opérera des miracles dont son corps sera
l'objet ou l'instrument, — il faut bien qu'il prouve sa filiation
divine ; — cependant son mode de vie conforme au nôtre, ses
fatigues, ses souffrances et finalement sa mort n'en continuer
ront pas moins d'attester qu'il est homme et de la même subs-
tance que nous. (2) La souffrance est le lot ordinaire de toute
vie humaine, comme la mort en est le terme inévitable. Souffrir
comme nous et mourir à son tour devenaient donc pour le Verbe
incarné la preuve la plus efficace et à la portée de tous de sa
parfaite communauté de nature avec nous.
« Le but du Verbe incarné, dit S. Cyrille d'Alexandrie, à
été de démontrer avec évidence qu'il a réellement pris chair
et s'est fait véritablement homme, non pourtant en cessant
d'être Dieu le Verbe, — car il n'aurait pu, s'il ne l'était plus,
sauver le genre humain. Mais de peur que celui-ci ou celui-là,
entendant dire qu'il s'est fait chair, n'en conclue que le Verbe
immuable de Dieu s'est converti en ce qu'il n'est pas dès tour
jours, à juste titre, il prononce d'une part des paroles qui sont
celles d'un homme véritable, et, d'autre part, il accomplit des
oeuvres qui appartiennent à Dieu seul, afin que nous compre-
nions bien qu'il est en même temps Dieu et homme. Quand
donc il importait de manifester qu'il était véritablement homme,
il ne manquait pas de l'établir. Si le péché, qu'il ne pouvait
commettre, lui demeure. totalement étranger, il n'a pas refusé
de souffrir dans son corps et dans son humanité tout ce qui est
de la nature humaine, dans le but de démontrer que réellement
il s'est fait chair et véritablement homme, ainsi qu'il est écrit...
« Donc quand tu entends dire qu'il a pleuré, qu'il a éprouvé
de la tristesse et de la
frayeur, comprends qu'il était homme
en même temps que Dieu, et rapporte à la nature humaine ce
qu] lui appartient. Puisqu'il a pris un corps mortel et passible,
Sujet à ces différentes affections, nécessairement il a, avec la
chair humaine, assumé ses propriétés et ses souffrances. Or,
lorsque la chair souffre en lui et subit ce qui est de sa n'attire*
(1) MATTH., 49.
XI,
(2) Cf. LÉONCE BYZANCE,
de Contra Nestonan. & Eutych. P. Q. 86, 1335.
23. 366 Doctrine
c'est lui qui, à cause de l'unité de personne, le souffre et le subit»(i)
3. — Le Verbe incarné dans une chair passible et mortelle
a voulu encore nous donner la preuve irréfragable de son amour
compatissant pour nous, en passant par toutes nos épreuves
et finalement en sacrifiant sa vie pour nous : « car nous n'avons
pas un grand prêtre impuissant à compatir à nos infirmités :
pour nous ressembler, il les a éprouvées toutes, hormis le péché».(2
Par là encore il nous laisse un soutien et une force ; car il emprunte
à l'épreuve et à la souffrance le pouvoir irrésistible de secourir
ceux qui sont éprouvés et tentés : « car, c'est parce qu'il a souf-
fert et a été lui-même éprouvé, qu'il peut secourir ceux qui sont
éprouvés ». (3) Enfin, souffrant et infirme comme nous, volon-
tairement soumis aux mêmes nécessités et aux mêmes misères,
il nous est un encouragement et un exemple de patience et de
vigueur surnaturelles dans nos misères et nos souffrances. « Le
Christ a souffert pour vous, vous laissant un modèle, afin que
vous suiviez ses traces. (4) Il a supporté contre sa personne de
la part des pécheurs une si grande contradiction, afin que nous
ne nous laissions pas abattre par le découragement ». (5)
Le Fils de Dieu s'est fait homme, afin de combattre pour
nous et de vaincre en notre nom la mort et le diable. Le conflit
engagé lui faisait donc une loi de ramener au combat cette même
nature qui une première fois s'était laissée vaincre, et de lui
assurer la victoire. « Notre-Seigneur Jésus-Christ se présente à
nous, dit S. Cyrille d'Alexandrie, comme un modèle et un
exemple de sainte vie, principalement en ce qu'il a vécu sous la
loi et n'a pas pour nous dédaigné de prendre les conditions mêmes
de notre pauvreté. Par un amoureux dessein pour nous, il se
conforme à notre mode commun de vie et, par son exemple,
devient pour les siens le chef et l'auteur d'une vie nouvelle et
inaccessible à nos seuls efforts ». (6)
Lé Sacré-Coeur, infirme et souffrant, est donc le modèle
de ce que nous devons être ici-bas, comme, glorieux, il est le
modèle de ce que, un jour, nous serons. Or, comment eût-il pu
se proposer en exemple, s'il n'eût pas partagé notre nature avec
toutes ses infirmités ? Comment n'eussions-nous pas été excusés
de ne pas tenter dans une chair infirme et passible l'imitation
de celui qui aurait vécu dans une chair glorieuse et impassible ?
Vraiment, dans ces conditions, il en eût été de la loi d'imita-
tion du Seigneur, comme de celle qui ordonnerait à un artisan
(1) Thesaur., Assert. XXIV. P. G. 75, 394, 395.
(2) Hebr., iv, 15.
(3) Hebr., il, 18.
(4) I PETR.,II, 21.
(5) Hebr., xn, 3.
(6) In Joannem, I. X. P. G. 74, 372.
24. Pourquoi Jésus prend nos infirmités 367
d'accomplir les oeuvres d'un joailler avec les outils d'un char-
pentier. D'ailleurs, quels exemples de vertu eût pu nous laisser
le Seigneur, si sa chair n'eut pas été comme la nôtre infirme et
passible? (1)
4. — A ces trois motifs de convenance suggérés par S.
Thomas pour la passibilité du Christ, il est permis, je crois, d'en
ajouter un quatrième : le Verbe incarné a voulu une nature
infirme comme la nôtre, afin de s'assurer une plus grande gloire
et pour mériter par droit de conquête l'exaltation qui lui était
régulièrement due par droit de naissance. Si par ses propres
souffrances, il apprend expérimentalement, tout Fils qu'il est,
ce que c'est qu'obéir, (2) — en obéissant, il mérite d'être exalté
par Dieu et de porter un nom devant lequel tout genou doit
fléchir. (3) « Jésus, nous le voyons couronné de gloire et d'hon-
neur à cause de la"mort qu'il a soufferte ». (4)
Pour nous également notre part de souffrance et de tribu-
lation généreusement acceptée est la cause productrice de notre
gloire. « Ce quelque chose de momentané et de léger qu'est notre
souffrance d'aujourd'hui, dit S. Paul, produit pour nous au
delà de toute mesure un poids éternel de gloire ». (5) Dès lors,,
tout fardeau nous doit être facile et léger à porter. « Si nous
sommes enfants, dit encore l'Apôtre, nous sommes héritiers,
héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ, si toutefois nous souf-
frons avec lui pour être glorifiés avec lui. Car j'estime que les
souffrances du temps présent sont sans proportion avec la gloire
à venir qui sera manifestée en nous ». (6)
Le Yerne s'incarnant prend sur lui nos infinités communes,
nullement nos infirmités personnelles.
Jésus-Christ a voulu communier aux infirmités de notre
nature, afin de satisfaire pour nous, de nous prouver la réalité
de son humanité sainte, de nous donner un exemple de patience
et de vertu, de mieux nous témoigner son amour et de s'assurer
à lui-même par droit de conquête une plus grande gloire. Mais
ces infirmités et ces misères humaines sont bien nombreuses
et de nature très diverse. Le Christ les a-t-il prises toutes ou
seulement quelques-unes ? C'est le problème que S. Thomas
se pose, q. 14, a. 4 : « Le Christ devait-il prendre toutes nos
infirmités corporelles ?»
(1) Cf LÉONCEe BYZANCE,
d Contra Nestor,et Eutych., I. II. P. G. 86, 1350
(2) Hebr., v, 8.
(?) Phil., il, 8.
(4) Hebr., n, 9.
(5) n Cor., iv, 17.
(6) Rom., vin, 17, 18.
25. 368 Doctrine
« Le Christ, fépond-il aussitôt, a pris sur lui les infirmités
humaines, afin de pouvoir satisfaire en notre place à la justice
divine pour le péché de la nature humaine. Or cet office de ré-
dempteur exigeait précisément qu'il eût en son âme la plénitude
de la grâce et de la science. Par conséquent il a dû prendre les
infirmités ou défauts qui sont la suite du péché commun de toute
la nature, mais ne s'opposent pas à la perfection de sa grâce
et de sa science. Il ne se peut donc qu'il ait pris sur lui tous les
défauts ou toutes les infirmités de la nature humaine ».
Afin de bien préciser cette doctrine, le docteur angélique
classe les infirmités de la nature humaine en deux grandes caté-
gories dont la seconde se partage en deux espèces :
La première catégorie comprend les infirmités personnelles,
les tares et les défauts particuliers, qui n'accompagnent pas
universellement et partout la nature humaine du fait de la faute
originelle, mais affectent accidentellement certaines natures in-
dividuelles et sont l'effet de causes particulières : vice de cons-
titution, plaie héréditaire, intempérance, abus des plaisirs, etc.,
etc. A cette catégorie se rattachent toutes les maladies en géné-
ral. Ces défauts ne sont pas des défauts de nature, mais des dé-
fauts de personne.
La seconde catégorie renferme les communs défauts de la
descendance d'Adam pécheur, les infirmités communes, natu-
relles, qui accompagnent partout la nature humaine, en d'au-
tres termes qui se retrouvent et se constatent dans tous les en-
fants d'Adam, parce qu'elles découlent naturellement et néces-
sairement, non d'une imperfection ou d'un vice personnel, mais
des principes mêmes de la nature humaine, telle qu'elle a été
dépouillée et laissée à elle-même par le péché du premier homme.
Ces infirmités communes sont de deux sortes : — les pre-
mières ne comportent par elles-mêmes ni tare, ni déshonneur,
comme la faim, la soif, la fatigue, la nécessité de souffrir, la fai-
blesse du premier et du dernier âge, la mort ; elles sont en notre
face une nécessité de la nature organique, réduite à ses seules
ressources connaturelles. S. Jean Damoscène les appelle «in-
firmités naturelles » parce que toute nature humaine y est sou-
mise, — et « non infamantes », parce qu'elles ne dépendent pas
de notre libre arbitre et ne répugnent à aucune perfection, ni
à la science parfaite ni à la plénitude de la sainteté. (1) — Les
secondes sont de leur nature humiliantes, « infamantes », comme
les ténèbres de l'ignorance, comme la. concupiscence, l'inclina-
tion au mal, la difficulté au bien, toutes suites historiques en
nous du péché originel, mais s'opposant à la perfection de la
sainteté et de la science.
(1) De jide orihod.,V III, c. 20. P. O. 94, 1082 b.
26. pourquoi Jésus prend nos infirmités 369
Des infirmités de la nature humaine, le Verbe, se faisant
homme, ne pouvait accepter, — la chose est évidente, — que
les infirmités communes de la première sorte, les «infirmités
naturelles et non infamantes » ; il aura donc faim, il aura soif,
jl souffrira, il mourra. Ces infirmités ne s'opposent nullement,
comme celles de la seconde sorte, à la perfection et à la pléni-
tude de sa sainteté et de sa science ; elles sont au contraire or-
données à la fin de l'Incarnation qui est la Rédemption, le rachat
du genre humain par la passion et par la mort, puisqu'elles
mettent en vive lumière « la bonté et l'amour de Dieu notre
Sauveur pour nous ». (1)
Mais s'il se soumet à nos infirmités communes, qui sont
comme le fruit spontané de notre nature dépouillée de tous ses
dons gratuits et réduite à ses seules et propres ressources, le
Sauveur écarte absolument de son humanité les infirmités per-
sonnelles, les défauts particuliers à certains individus, a Parce
que le Christ, dit S. Bonaventurej était venu racheter la nature
humaine en général, sans distinction de personnes, il a dû ac-
cepter les infirmités naturelles, non les infirmités personnelles ;
les infirmités qui sont peines du péché, non les infirmités
impliquant vice et déshonneur ». (2)
D'ailleurs, ni hérédité morbide, ni défaut ou faiblesse de
constitution, ni vice personnel, en un mot, ni l'une ni l'autre
de ces causes qui produisent en nous ces infirmités personnelles,
ne se retrouvent en NotrerSeigneur, parce qu'elles répugnent
à sa très pure nature: et qu'elles seraient un obstacle aux fins
de l'Incarnation. En effet, aucune tare héréditaire ne pouvait
exister chez lui : Marie sa mère est vierge et elle a été conçue
sans péché ; — ni aucun vice de génération et par suite de cons-
titution : « Sa chair, dit S. Thomas, a été formée de la substance
très pure de Marie par l'opération du Saint-Esprit, qui ne sau-
rait ni défaillir ni se tromper dans son opération, puisqu'il est
infiniment sage et tout-puissant; (3) — ni vice personnel, ni
désordre dans la conduite : « Le régime de sa vie, dit encore
S. Thomas, fut toujours sagement ordonné *.~.D'un tempéra-
ment parfait, absolument sain de corps et d'âme, le Seigneur
était de par ailleurs garanti de tout excès, de toute erreur, de
route imprudence même de détail par son impeccabilité et sa
science universelle.
Et en tout état, ne craignons pas de le répéter, Notre-Sei-
gneur ne pouvait accepter ces Infirmités personnelles : elles
W TH., m, 4.
(2) In III sent, d. 15, a. 1, q. 2.
(3) 0. 14 a. 4.
27. 370 Doctrine
eussent dérogé à sa dignité et compromis la fin de l'Incarna.
tion, en raison du déshonneur qui souvent les accompagne, et
<les désordres qu'elles supposent trop souvent dans leur sujet,
DOM G. DÉMÀRET, moine de Solesmes.
Gravuredu "KaavaleDevctionis a Rmabilteaimvmor JBU piis kominvmcorditx"
erg C
oblatum,ûuctoreP. FranciscoSchauenburg, J. - 1763.
S.
28. Le Sacré-Coeur du Donjon de Chinon 371
LE SACRÉ-COEUR DU DONJON DE CHINON
attribué aux Chevaliers du Temple
(Second Article)
J'ai donné dans Regnabit, en janvier dernier, la réduction
de la gravure murale du donjon du Coudray, à Chinon, où paraît
un coeur rayonnant entouré de personnages et de signes énig-
niatiqués.
Cette image, je l'ai taillée d'après un simple levé à vue,
pris sous la mauvaise lumière d'un jour de pluie qui rendait plus
sombre encore la sombre salle où il se trouve. Depuis lors, le
très distingué directeur du Hiéron de Paray, Mr de Noaillat
s'est rendu à Chinon, et là, à pied d'oeuvre, son Regnabit à la
main, il a comparé l'original et le dessin ; puis, de lui-même,
s'est empressé, ce dont je lui reste très reconnaissant, d'assurer
à Regnabit que la reproduction donnée est bien exacte.
J'ai cependant voulu ces jours derniers revoir le graffite de
Chinon par un jour de clair soleil et à l'heure où les rayons, faee
à la porte, éclairent d!une caresse oblique les traits creusés, et les
font ressortir pleinement. C'est ainsi que j'ai corrigé une diffé-
rence de proportion entre deux figures, sans importance du
reste, et que j'ai relevé quelques menus détails inaperçus d'abord,
notamment un I H S en cursive gothique, devant le personnage
agenouillé qui porte au bras gauche son bouclier.
je consigne ce nouvel et définitif état dans les planches
incluses en ces lignes qui donnent plus en grand, la partie prin-
cipale de la précieuse gravure murale du château de Chinon.
Le premier article la concernant a valu à son auteur un
afflux assez considérable de lettres qui témoignent de l'intérêt
que les érudits catholiques accordent à l'iconographie du Sacré-
Coeur.
Une seule de ces lettres refuse absolument de reconnaître
dans le coeur représenté à Chinon celui de Jésus-Christ. Comme
cette opinion ne repose que sur la prétendue impossibilité théo-
rique d'une représentation du Coeur divin au début du XIVe
siècle, elle se modifiera d'elle-même, je l'espère, quand Regnabit
aura donné la preuve facile qu'une indiscutable inocographie du
Coeur de Jésus a vraiment précédé, de bien plus d'un siècle,
s«n culte
liturgique.
H n'y a pas du reste, ce me semble, d'impossibilité chrono-
}°gique qui puisse tenir devant ces faits d'une réalité matérielle
wd'éii-iabte.:
29. 372 Doctrine
a) que le Coeur de Chinon est le centre d'une gloire rayonnante;
ce qui dansTensemble d'une composition où tout est prière
ardente, supplication et réparation, lui donne une importance
tellement supérieure à celle des autres figures qu'elle ne sau-
rait convenir à aucun coeur humain. *
b) qu'en traçant son ouvrage le graveur pensait certainement
à la plaie du Côté divin puisqu'en deux endroits la lance y
paraît appointée à la place qu'occupait sur la Croix le flanc
du Sauveur crucifié.
e) que ce Coeur rayonnant de gloire est contemplé par un per-
sonnage dont le caractère de sainteté est indiscutablement
affirmé par le nimbe qui l'entoure et que, partant, ce coeur
ne peut être que Celui du Sauveur.
Un autre correspondant me dit : si l'objet représenté est
bien un coeur, ce ne peut être assurément que le Coeur divin,
mais n'est-ce point plutôt un bouclier, un écu de chevalier ?
Non, très certainement. Un bouclier rayonnant et sur lequel
ne paraît aucune figure de blason — car la surface excavée a
été lissée avec un soin extrême — n'aurait aucun sens possible;
puis, un bouclier représenté en creux n'aurait pas, ne pourrait
pas avoir, cette forme extraordinairement concave. Qu'on rap-
proche la coupe horizontale ci-contre :
de la coupe verticale donnée en
janvier et l'on verra combien l'hypo-
thèse du bouclier est inacceptable.
Je sais bien que ce même contour
fut donné quelquefois aux écus héral-
diques des XIIIe et XIVe siècles :
dans l'ébrasement des archères de ce donjon de Chinon,
dans la salle même où nous sommes, des chevaliers de cette
époque ont gravé leurs armoiries et, l'un d'eux a donné
à son écusson le pourtour cordiforme ; le Voici :
Là, pas de doute, c'est un blason, et rien de plus ;
les trois chevrons du champ et le lys du chef en
font foi; le trait creusé de ce dessin n'a pas quatre
millimètres de profondeur, et c'est normal. Dans
le grand graffite pas de doute non plus :
çest un coeur; la forme de la concavité et sa profondeur,
qui atteint 38 millimètres, interdisent de songer à autre chose. Là
ce n'est plus simplement de la gravure, c'est de la sculpture en
creux. Seuls la croix placée au-dessus et le nimbe qui entoure la
tête en profil du saint ont une profondeur quasi égale. Ces trois
figures ont donc bien été regardées par le graveur comme les
plus importantes de son travail.
Deux autres correspondants, tout en acceptant le coeur de
Chinon comme l'image du Coeur de Jésus, portent la question
30. te Sacré-Coeur du Donjon de Chinon 373
sur un autre terrain et me disent : Mais vous n'avez pas la preuve
certaine que la tradition chinonaise qui attribue cette gravure
à l'un des Templiers captifs du Coudray, est bien fondée !
La preuve certaine ? Non, assurément je ne l'ai pas.
Et j'ajoute qu'il ne me paraît pas nécessaire que ce soit un
Templier qui l'ait tracé pour que le coeur de Chinon soit l'image
de Celui du Sauveur Jésus.
Je ne fais pas l'iconographie de l'Ordre du Temple, ni celle
du château de Chinon, mais celle du Coeur sacré de Jésus-Christ.
Si le coeur au divin rayonnement est l'oeuvre de l'un des Templiers
qui furent incarcérés dans la tour où il se trouve, nous avons sa
date précise : 1308. Si, au contraire, il est dû au couteau d'un
prisonnier quelconque, nous devons chercher sa date ailleurs ;
et mieux que toute autre particularité du graffite, la paléogra-
phie des inscriptions qui s'y trouvent peut nous la donner
approximativement.
Il y en a deux : IE REQUIER A DIEU PARDON, puis une signa-
ture : IEHAN DUGUA... (au nouvel examen, j'ai relevé ce même
nom répété plus lisiblement, en petite écriture de même forme,
plus haut sur le mur : J. Duguabil ou Duguahel). J'ai consulté
autsujet de ces inscriptions de savants confrères en archéologie,
plus qualifiés épigraphistes que moi ; l'un d'eux estime que la
signature pourrait être un peu moins ancienne que l'inscription,
repentante ; elle ne donnerait donc pas le nom du graveur,
comme il paraissait d'abord naturel de le supposer.
jriw Mais la phrase ie requier à Dieu pdon fait bien, elle, partie
intégrante et inséparable du sujet, Or, la forme de ses lettres ne
défend nullement de l'attribuer à la première partie du XIVe
siècle.
La voici, gravée sur calque direct.
La date du graffite ne serait donc pas sensiblement déplacée
Par le fait qu'il ne serait pas dû à l'un des Maîtres du Temple.
Et mon correspondant ajoute :
..„ ( H- s'est créé de toutes pièces, tant de traditions au XV«
Slec'e !.. » _ A la vérité, cette époque fut assez imàginative,
mais 'elle n'aurait
pu appliquer au graffite de Chinon une origine
31. 374 Doctrine
Partie centrale du gragîtedu Donjonde Chinon,attribué aux Templiers
gravure sur bois, au canif, par l'auteur.
(Le visage du personnagea été règrettablementmutilé)
32. Le Sacré-Coeur du Donjon de Chinon 375
fantaisite, même vraisemblable, que si la gravure à laquelle cette
fantaisie s'appliquait avait été, dès lors, assez ancienne pour qu'on
ait oublié son véritable auteur ; et voilà qui nous renvoie vers Te
—
XIVe siècle.
Assurément d'autres prisonniers que les chefs du Temple ont
habité la tour du Coudray ; deux ans avant qu'ils y fussent
enfermés le même gouverneur qui les y eut en garde, Jean de
jeanvelle, y détenait encore, au nom du roi, et depuis quatre ans,
Robert, fils de Guy, comte de Flandre ; et nombre de chevaliers
français ou anglais y furent aussi gardés durant la guerre de
Cent-Ans. Mais ni Robert de Flandre, ni les chevaliers prison-
niers de guerre n'étaient vraisemblablement menacés de mort,
et vraiment —encore que tout homme en ait besoin— ne
semblent avoir eu de particulières raisons d'implorer si ostensi-
blement le pardon divin : celles qu'avaient les Templiers étaient,
on l'avouera, bien autrement fondées !
En quittant le graffite de Chinon, Mr de Noaillat m'en
écrivait : « Quel appel pressant à la miséricorde !.. » et devant
ma gravure, un excellent artiste peintre, assurément physiolo-
giste, mais point mystique, disait récemment : « toute cette
composition. sue l'angoisse et crie le repentir». Et les deux pa-
roles, en se faisant écho, donnent la note juste.
En fait, nous sommes en possession d'une tradition locale
encore indiscutée. Que vaut-elle au regard de la critique ?
Ce que vaut toute tradition qui concerne l'origine d'une
oeuvredont l'auteur n'est pas désigné par des documents positifs
et probants ; c'est dire qu'on ne peut la rejeter comme fausse
que sur des documents contraires également explicites et probants.
En l'absence des uns et des autres, avant d'accepter en fait
la tradition chinonaise, — jusqu'à meilleure information et sous
les réserves que mon titre comporte : « Le Sacré-Coeur du donjon
de Chinon attribué aux Chevaliers du Temple»,— j'ai cherché
sans parti pris, dans la composition même du sujet :
'° — Ce qui pourrait l'infirmer ?
Et je n'y trouve rien : — Car on ne saurait faire état de
l'étonnement que cause toujours l'arrivée d'un document
authentique de date insoupçonnée; cet étonnement ne;
relevant que de notre préalable insuffisance de docu-
mentation. —
20 Ce
qui pourrait au contraire s'y trouver de propre à faire
accorder la tradition avec la vraisemblance ?
Et sous ce rapport, au risque de .me redire, je note :
")' Que la composition tout entière possède un caractère très
particulier de piété chrétienne et mystique, un « style », si.
j'ose dire, autant hermétique qu'hiératique, et dénonce
chez son auteur une habitude visuelle des représentations
33. 376 -.-..'..' Doctrine
de l'iconographie sacrée. Et tout cela semble plus naturel
dans l'esprit et sous la main d'une Moinè-Chevalier du
Temple que sous le heaume séculier et sous le couteau d'un
de ces héroïques ferrailleurs que furent les barons féodaux
de la guerre de Cent-Ans.
b) Que l'épigraphie de la phrase : le requier à Dieu pdon n'est
pas en contradiction avec la date donnée par la tradition.
c) Que ce que l'on sent bien avoir été l'état d'âme des chefs
du Temple, relativement au sort de leur Ordre et de leurs
personnes, en leur situation particulièrement grave et
au château de Chinon, 1 s'accorde
inquiétante pleinement
avec l'impression que produit « le cri de repentir » et « l'appel
pressant à la miséricorde» de cette composition «qui sue
l'angoisse ».
d) Que je retrouve, dans le graffite de Chinon, des figures
héraldiques, relevées sur des sculptures lapidaires non dou-
teuses des Commanderies du Temple de Roche (Vienne) et
du Temple de Mauléon (Deux Sèvres).
e) Et, Dieu me pardonne, j'ose ajouter ceci : On m'assure que
certaine branche de la Franc-Maçonnerie se targue d'avoir
conservé dans ses rites, ses titres et ses symboles, des parti-
cularités qui lui viendraient d'un groupe d'anciens Templiers
qui se serait constitué clandestinement en société secrète,
après dissolution officielle de l'Ordre, puis fondu dans la
Maçonnerie (?).. Si cela est, les groupes de trois points,
répétés, non trois, mais en réalité quatre fois, sur les gradins
de la croix centrale du graffite, donneraient une apparence
de consistance au moins bizarre, tout à la fois aux préten-
tions historiques des Maçons et, ce qui nous intéresse un
peu plus ici, à la tradition chinonaise.
Voilà pourquoi, jusqu'à preuves contraires naturellement,
je regarde comme devant être plutôt acceptée que rejetée l'opinion
qui attribue à la main d'un Templier la gravure qui nous occupe,
et que l'historien chinonais Gabriel Richard fait sienne, sans
ambages ni réserves, dans le passage de son Histoire de Chinon
que j'ai cité en janvier.
C'est aussi l'avis général, à trois exceptions près, des nom-
breux lecteurs de Regnabit qui ont bien voulu nous manifester
leur pensée.
L'un d'eux, un érudit doublé d'un bon artiste, nous écrit
en substance : Qu'il verrait volontiers, dans les personnages
énigmatiques figurés au graffite, des Saints de l'Ordre de Citeaux,
frères spirituels des Templiers. Et c'est un fait que tous portent
le nimbe caractéristique des saints, Le principal d'entre eux,en
34. La Sacré-Coeur du Donjon de Chinon 377
l'hypothèse exposée, serait saint Bernard qui fut de son vivant,
le législateur et le grand ami de l'Ordre du Temple, alors tant
idéalement beau ! L'Ordre en effet conserva ensuite pour le
saint fondateur de Citeaux un culte particulier et une ostensible
reconnaissance. Officiellement, cette gratitude se traduisait par
ce passage du serment que les Grands-Maîtres prononçaient à
leur élection : « Je ne refuserai pas... principalement aux Moines
de Citeaux et à leurs Abbés comme étant nos frères et nos com-
pagnons, aucun secours..»
Et ce serait en raison de ce patronnât réel de saint Bernard
sur l'Ordre des Templiers que l'auteur de la gravure l'y aurait
figuré contemplant le Coeur de Jésus, comme pour demander
au saint Abbé de présenter au Coeur miséricordieux du Sauveur
son repentir et sa grande espérance du pardon, le sort aussi de
son Ordre et de lui-même. (1)
— Cette interprétation peut en effet s'appliquer avec vrai-
semblance aux saints du graffitte de Chinon, sauf toutefois à
celui qui semble agenouillé et porte à son bras l'écu armorié,
car celui là s'affirme moins comme un cistercien que comme un
guerrier de noble rang.
Peut-être, pourrait-on voir en lui le fondateur même de
l'Ordre des Templiers Hugues de Payens, qui, à la vérité, ne fut
jamais canonisé officiellement, mais qui devait jouir alors, au
titre de vénérable serviteur de Dieu, d'un culte restreint à son
Ordre, comme il en a été pour le bienheureux Gérard Tune dé .
Martigues, fondateur des Chevaliers de S* Jean de Malte, et pour
le bienheureux Robert d'Arbrissel, fondateur des Bénédictines
de Fontevrault, avant que leurs cultes ,ne fussent autorisés, à
titre public, par l'Église.
Quant au sens intrinsèque que le graveur attachait à chacune
des diverses autres figures plus ou moins hiéroglyphiques du
graffitte de Chinon : mains coupées et ouvertes, sigle en tau
surmonté d'un cercle, blasons gironnés, etc.. je n'espère guère
qu'on en pénètre jamais l'énigme. Mais peut-être des recherches
dans ce qui reste d'anciennes commanderies du Temple abou-
tiraient-elles à la découverte de ces mêmes figures et donneraient
ainsi à la gravure entière de Chinon une attribution d'origine
Plus affirmée.
(1) On sait que saint Bernard et son pieux ami Guillaume de saint Thierry,
(mortvers 1150),furent des premiers-à célébrer le Coeurdivin et à le désigner à
|a piété'médiévale, non maisseulement en tant que partie corporelle atteinte par
la Lance, au Calvaire, pas comme centre et foyer de l'Amour rédempteur ; à
tel point qu'on crut longtemps pouvoir attribuer au saint abbé de Citeaux le bel
nymne«Summi régis Cor aveto» et qu'on le regarde comme la principale source
w culte florissant qu'eurent, dans la seconde partie du Moyen-Age, les Cinq
Jyjaies t le Coeursacré, notamment en Rhénanie où ses ouvrages furent particu-
e
iSment en faveur. — Cf. Bainvel, La dévotion S. C. de Jésus. Paris Beauchesne
au
i921, p. 205 et Regnabit, janv. 1922, p. 211.
35. 378 Doctrine
En résumé, et derechef, la tradition Chinonaise relative aux
Templiers est la seule base qui permette de risquer une interpré-
tation générale du sujet gravé au Cbudray, et c'est elle seule qui
permet aussi de dater de 1308 le Coeur de Jésus qui s'y trouve
figuré ; mais sans elle il est quand même permis de l'attribuer au
XIVe siècle.
Un souvenir historique en terminant : Un autre personnage,
bien autrement illustre que Robert de Flandre, Jacques Molay
et les autres Maîtres du Temple habita jadis le donjon du Coudray;
Jeanne d'Arc en effet, à quelque vingt pas du logis royal qu'oc-
cupait alors Charles VII, demeura dans cette tour, du 8 mars
1429 jusqu'au 20 avril, jour où elle quitta Chinon. Il est bien
absolument impossible que, passant à toute heure, devant le
Coeur rayonnant de cette étrange gravure, devant ce coeur qui
s'impose aux regards, et qui ne devait pas être pour elle un
incompréhensible mystère, la sainte Libératrice ne se soit pas
arrêtée devant lui pour le contempler, comme le saint de pierre
auréolé, et pour recommander à sa compatissante bonté la royale
Fleur de France qui transparait en sa glorieuse irradiation —
Et par là encore, l'humble graffitte chinonais allie, dans la pensée
du croyant, le plus divin Objet delà Piété chrétienne à la plus
grande Histoire.
NOTE ADDITIONNELLE.— Au moment de mettre sous presse
je reçois d'un érudit médiéviste parisien une lettre flatteuse que
je voudrais pouvoir donner ici en entier.
J'en veux au moins citer la partie générale :
« A défaut de documents historiques positifs concernant ce
graffitte, force est de s'en tenir à ses éléments constituants et
aux données convergentes de l'érudition qui l'expliquent.
« La mentalité médiévale toute nourrie de symbolisme —
en poésie, en littérature profane et religieuse, en architecture,
peinture et sculpture, en héraldique, etc, s'y reflète d'une façon
saisissante.
« Tel qu'il se présente -r et sauf interprétation cabalistique,
ici invraisemblable '— il est, dans tous ses détails strictement
religieux et conforme à la tradition qui le concerne.
« OEuvre de fantaisie, conçue sans doute progressivement,
au fur et à mesure de l'exécution, nous ne pouvons exiger une
unité, une symétrie matérielle absolue comme devant une « oeuvre
d'art » entreprise selon ses règles techniques propres. Pourtant,
et malgré cela, pour la signification il y a le un symbolisme
complet très harmonieux, bien dans la note allégorique des
XIIIe et XIVe siècles. Les moines ou gens d'église en étaient
imprégnés alors... »
36. Le Sacré-Coeur du Donjon de Chinon 379
— Et ces lignes sont en accord parfait avec ce que j'exposais
dans les pages précédentes. Dans leur contexte elles regardent
comme possible l'attribution du graffitte de Chinon au|XIVe
siècle, même indépendamment de la tradition qui l'attribuera
l'un des Chevaliers du Temple. Et c'est de cela surtout^que^ je
prends acte.
Loudun (Vienne)
L. CHARBONNEAU-LASSAY.
Bois graveau canif par L. Charbonneau-Lassay
37. 380 Doctrine
La Société du Règne Social de Jésus-Christ
à pctray-le-jvtonial
APOSTOLAT ACTUEL : Visites expliquées du Hiêron
SALLE CENTRALE (ANCIENNEMENT AULA FASTORUM)
Avais-je besoin de vous dire que cette salle surpassait les
autres ? Oui, puisque vous n'en aviez pas encore franchi le seuil.
Vous une fois entrés, c'eut été un pléonasme de ma part. Vous
vous en apercevez aussitôt. L'architecte a merveilleusement
adapté la construction aux idées si élevées que la société voulait
mettre en valeur. L'art ici est bien le sensible au service du supra-
sensible. Inspiré par la vérité, il la met en relief, l'impose à l'in-
telligence, la grave dans la mémoire. Pas un blason, pas une
fresque, une statue, un moindre signe pictural qui ne se rapporte
directement au Règne social de J. C.
Tout d'abord le regard est attiré par 4 grandes inscriptions (l)
qui formulent en bon latin épigraphique, clair et précis, les 4
idées maîtresses de la société et résument la doctrine théorique
et pratique du règne social de j. C.
En face de la grande entrée on lit, en lettres capitales :
A'GNO DIVINO, IN HOSTIA PRESSENTI
JURE SUO
IMPERIUM COMPETIT IN GENTES UNIVERSAS,
, A l'Agneau divin présent dans l'Hostie
DE
DROIT
Appartient l'empire sur toutes les Nations
Telle est l'inscription qui résume la Salle du Droit, et dont
on trouve un commentaire éloquent dans les cinq écussons
qu'elle domine; ces cinq écussons sontxeux des cinq rites Eucha-
ristiques : les rites grec, arménien, latin, syro-chaldéen et mozarabe.
Aussi bien c'est dans la Sainte Hostie que les diverses liturgies
consacrent la présence réelle de Jésus-Christ sur la-terre, avec
toutes ses prérogatives royales. N'est-il pas, selon le canon de la
liturgie de S* Basile, le TOxjjt.j3aa-t.Xcuc, Chef universel de tous
le
les Maîtres du monde?
Et sur quoi reposé notre foi inébranlable dans les Droits
souverains de Jésus-Christ, Victime universelle ? Les chapiteaux
des pilastres massifs abandonnent ici leurs vains ornements et
(1) Dues au R. P. Zelle précité.
38. Le Hiéron .'""' ,-.. 381
dans leurs cartouches accolés ils. nous crient : (1) Sur l'Écriture
Sainte, Sacra Scriptura, sur la traditio christïana, la Tradition
chrétienne, (2) sur les S .S. Doctores, les saints Docteurs et Eccle-
siae Magisterium, et le Magistère de l'Église.
Appuyé sur ces solides fondements, le Christianisme affronte
les siècles. Et les siècles viennent un à un apporter au Droit la
confirmation des Faits, ainsi que nous l'affirme la seconde ins-
cription latine (3).
PER ;EVA, INTER POPULOS, HOSTLE DEVINCTOS
FACTUM EST
AUDIRE CHRISTUM VINCIT, REGNAT, IMPERAT
A travers les âges, parmi les peuples voués à l'Hostie,
c'est un fait
Qu'on entendait : le Christ est vainqueur, Il règne, Il commande.
Cinq grandes nations dressent leurs blasons en signe de
témoignage des hauts faits que signale leur histoire : ce sont la
France, le S1 Empire, la Confédération italienne sous la Tiare
papale, l'Angleterre (avant son hérésie), l'Espagne. Ces nations
faisant partie de la chrétienté, reconnaissaient la royauté de
Jésus-Christ au point qu'empereurs et rois affirmaient tenir leur'
puissance de la Miséricorde ou de la Grâce de Dieu « Dei gratia
Rex » et l'exercer sous la dépendance du Christ « Christo Jesu
régnante ».
Les cartouches accolés au-dessus des pilastres nous indiquent
que pour tous les savants sans parti pris les preuves de ce fait
se trouvent partout : Dans l'Histoire, Historia, Artes, les Arts,
Legès, la Législation, Politica, la Politique.
En se retournant, face à l'entrée principale'on lit la 3e ins-
cription :
HISCE IN OEDIBUS STUDIOSIS SERVATUR ILLUSTRATUR
ARS SEU NORMA
OPTIMI SUE CHRISTO-HOSTIA SOCIETATUM REQIMIN.IS"
La synthèse du Musée se développe dans une rigueur logique.
Si Jésus-Christ est Roi de droit, Roi de fait, cette affirma-;
tion est normale :
'
Dans cet édifice, des hommes instruits trouvent prouvés
L'art ou la règle
du meilleur gouvernement : les sociétés soumises au Christ-Hostie (4)
(1) Sur lès 2 premiers cartouches de gauche*
(2) Sur les 2 cartouches dé droite. ,
(3) A droite en tournant le dos à la porte d'entrée;
(4) Cette affirmation opposée directement à. l'hérésie actuelle du rationa-
lisée sembleun résumé des notables paroles de Léon XIII : « SH'on fait;dépendre
?" jugement de la seule et unique raison humaine le bien et le mal, on supprime
'« différencepropre entre lebien et le mal ; le honteux
e{ l'honnête ne diffèrent
39. 382 Doctrine
Cinq puissances secondaires : la Suisse, la Belgique, k
Portugal, le Danemark, et la Hollande dressent leurs 5 blasons,
accolés à celui d'un ordre chevaleresque confédéré pour affirmer
qu'elles ont du leur prospérité à cette heureuse soumission.
L'« Ars magna » du vrai gouvernement consiste à grouper
autour du Christ vivant dans l'Hostie par Amour tous les hommes
ses sujets, depuis les individus jusqu'aux multitudes constituées
en nations. Les cartouches correspondants nous révèlent les
moyens d'arriver à ce but enviable par quatre échelons progres-
sifs : « Juramenta individua, les serments ou consécrations indi-
viduelles, les Pacta Familiarum, les Pactes des Familles, les
Foedera Socialia, les Alliances des Sociétés et les Obsequia Na-
tionum, Hommages des Nations (1).
PACIS RESTAURANDJE PARODII CIVITATIBUS REGNIS
DATUM EST PROMISSUM
SI IN CHRISTUM HOSTIAM (SUB SIGNO SS. CORDIS)
OBSEQUIUM JURETUR
Une Promesse a été faite à Paray, aux cités et aux Etats, que
la Paix serait restaurée si l'on jurait hommage au Christ-Hostie,
(sous le symbole du Sacré-Coeur).
Et les divines exigences dont Marguerite-Marie a été la
confidente et la propagatrice nous sont rappelées en un texte
abrégé par les cartouches et que nous donnons intégralement :
« Imago Colatur S.S. Cordis ». Que l'image du Sacré-Coeur soit
vénérée. « Vexilla Régis prodeant Christi Hostiae S. S. C. ».
Déploiement des étendards du Christ-Hostie Roi (sous le symbole
de son Coeur). « Reparatio socialis in Hostlam ». Réparation
sociale envers l'Hostie. « Jèsus-Hostia Rex reclametur ». Nouvelle
proclamation de la Royauté sociale de Jésus-Hostie sous le
symbole de son Sacré-Coeur.
Ici le visiteur qui a suivi le magnifique développement du
plus en réalité mais seulement dans l'opinion et le jugement de chacun ; ce qui
plàit sera permis... Dans les affairespubliques,le pouvoir de commanderse sépare
du principe vrai ou naturel auquel il emprunte toutesa puissancepour procurerle
bien commun; la loi qui détermine ce qu'il faut faire et éviter est abandonnée
aux caprices de la multitude plus nombreuse:.. Dès que l'on répudie le pouvoir
de Dieu sur l'homme et sur les sociétéshumaines, la multitude se laissera facile-
ment aller à la sédition et aux troubles. Et le frein du devoir et de la conscience
n'existant plus, il neresteplus rien que la force qui est bien faible à elletouteseule...
Qu'on juge donc et qu'on prononce si de telles doctrines (celles du rationalisme)
profitent à la liberté vraie et digne de l'homme, ou si elles n'en sont pas plutôt
le renversement et la destruction ? (Libertas t. II, p. 189, Léon XIII.)
(1) Nous ferons remarquer que la Société R. S. J. C. faisait parler le ciseau
de ses artistes 20 ans avant la grande campagne du P. Matthéo pour l'Introni-
sation du Sacré-Coeurdans les Foyers qui, dépassant le but de la Consécration,
doit un jour pleinement réaliser le Pacte des Familles; 10 et 20 ans également
avant les magnifiques et officielshommages de la Colombie,de l'Espagne et de
la Belgique au Sacré-CoeurRoi.