La Banlieue est au coeur du débat politique depuis plus de 30 ans et ne l'a jamais quitté.
Elle constitue l'une de ces passions françaises alors pour que la réalité affleure et que d'autres voix imposent leur avis, leurs humeurs ou leur accent, celles des habitants des banlieues.
Militantisme, Indignation,Actions collectives,Graffitis,Humour sont quelques-unes de ces prises de parole.
La Banlieue est au coeur du débat politique depuis plus de 30 ans et ne l'a jamais quitté.
Elle constitue l'une de ces passions françaises alors pour que la réalité affleure et que d'autres voix imposent leur avis, leurs humeurs ou leur accent, celles des habitants des banlieues.
Militantisme, Indignation,Actions collectives,Graffitis,Humour sont quelques-unes de ces prises de parole.
1. 1 euro
Le Progressiste
Mercredi 16 décembre 2009 - N° 2112
“La chance de la Martinique
c’est le travail des Martiniquais” Hebdomadaire du PPM - Fondateur : Aimé Césaire
- Aimé CESAIRE
DÉSANM 59, 50 ans après :
« Notre malheureux
pays se meurt de
haines stériles… »
SPÉCIAL 16 PAGES
(Aimé CESAIRE)
À tous et à chacun, au Parti et à ses militants,
bonnes fêtes 2009, bonne année 2010 pour les défis à relever
AU SOMMAIRE Prochaine parution le mercredi 6 janvier 2010
- DOSSIER « Désamn 59 » (pp. 5 à 10 )
- Le chômage dans la Caraïbe (p. 15)
- Ce 22 décembre, Serge LETCHIMY a reçu à l'Hôtel de Ville MM. Alain et
Edwy PLENEL. Visite symbolique d'une grande portée. (p.16)
LE 10 (DIX) JANVIER, LE PPM DIT NON ! LE 24 JANVIER, OUI !
2. EDITORIAL
« LE PROGRESSISTE », TOUJOURS AU COMBAT !
Eh bien, voilà ! Notre numéro 2112 marque la fin de nos
parutions…en 2009 ! Nous revenons le mercredi 6 janvier 2010, à
quatre jours de cette consultation de notre peuple si importante pour
son avenir. Notre position est connue, expliquée, explicitée, décorti-
quée… souvent déformée par des adversaires sans beaucoup de
scrupules : NON le 10 janvier, OUI le 24 ! Pour ne pas se tromper,
rien de mieux que de se référer aux originaux des positionnements
du PPM : écrits de notre président Serge LETCHIMY, éditoriaux de
notre Secrétaire général Didier LAGUERRE, animations de débats
par nos Secrétaires adjoints Alain ALFRED ou Daniel CHOMET, « pa-
piers » dʼambiance de notre rédacteur Serge SOUFFLEUR… Tout
démocrate, martiniquais et/ou issu de lʼHexagone (nous nʼaimons
guère le terme « métropolitain » qui rappelle trop la colonie) a ainsi à
la disposition de sa réflexion personnelle la quintessence de la pen-
sée PPM.
Laquelle sʼinscrit sans conteste
dans la continuité historique de ce
même peuple. Dʼoù la célébration,
dans ce numéro du 23 décembre, des tragiques évènements des
« trois glorieuses » de « désanm 59 », sans esprit de récupération
(voir dans notre Dossier central ce quʼen disait CESAIRE dans le nu-
méro du jeudi 7 janvier 1960) mais sans renoncement à la moindre
parcelle de ce que fut lʼattitude digne de nos dirigeants dʼalors, en
tête desquels CESAIRE et ALIKER.
47 parutions durant lʼannée 2009 ! Les (quelques) bénévoles de notre
journal ont- comme on dit- assuré ! Ils y ont été bien aidés par nos
maquettistes et notre imprimeur, à qui je tiens à rendre ici hommage.
Ce petit groupe sera encore présent en 2010 et est disposé à sʼamé-
liorer : plus de place à ceux qui entreprennent, aux jeunes créateurs,
aux animateurs de nos nombreux Balisiers ; plus dʼattention à nos
voisins caribéens, à nos émigrés
en Europe, aux Guadeloupéens et Guyanais si proches (mais parfois
si lointains) des Martiniquais.
« Au rendez-vous du donner et du recevoir » (Césaire), il y a place
pour les militants, les adhérents,les sympathisants… à qui nous fai-
sons sans cesse appel en dernière page du « Progressiste ». Dans
le « rubricage » que nous avons instauré, VIE DU PARTI et « PA-
ROLES CITOYENNES » leur sont notamment ouvertes.
Joyeux Noël et fructueuse année 2010 !
Daniel COMPERE
Le Progressiste - Page 2 - Mercredi 23 décembre 2009
3. POLITIQUE
20 DÉCEMBRE :
LE M.A.P. DIT NON AU « 74 » !
dans sa sagesse et sa perspica-
cité, a fait le bon choix.
Lamentin, Rivière-Salée, Fort-
de-France, Schoelcher, Carbet,
Marin, Macouba, Trinité, Fran-
çois… Toujours cette pertinence
dans les questionnements, ce
besoin dʼexplications, cette né-
cessité dʼargumentaires char-
pentés. Et Félix ISMAIN, maire
de Bellefontaine et conseiller gé-
néral de Case-Pilote-
Bellefontaine, avance « Avec le
73, vous savez où vous êtes ;
avec le 74, vous ne savez pas
où vous allez ! Les résolutions
du Congrès ne sont que des
vœux. Le 74 rompt lʼidentité lé-
gislative ». Hector BONNAIRE
au Marin demande « de ne pas
travestir la vérité quand il y a une
véritable psychose anti-PPM,
anti-Letchimy. En sʼacharnant
sur le PPMP, ils pensent sʼexo-
nérer de leurs propres turpi-
tudes. Ce qui effraie, cʼest leur
autisme, leur refus dʼentendre
les autres. Ce sont des hommes
qui ne maîtrisent pas leurs nerfs.
Notre conviction partagée avec
les Martiniquais, cʼest de voter
NON à la proposition de lʼarticle
74 le 10 janvier. Nous voulons à
partir dʼu projet solide créer, re-
lancer lʼéconomie, relancer la
ors de sa rentrée au Grand dʼannonce intempestif, en toute
L Carbet du Parc Aimé Cé- simplicité, humblement, que le
saire, le Mouvement des message est passé, que les
commande publique. Nous de-
vons nous retrouver solidaire-
ment, fraternellement et avancer
Autonomistes et Progressistes Martiniquais lʼont bien reçu, bien
les uns avec les autres et non
avait utilisé une formule qui fit pesé, bien soupesé, bien ana-
florès : MAP paré ! Plus dʼun lysé en leur âme et conscience. les uns contre les autres. Ce
nʼest pas lʼarticle qui change les
mois plus tard, après avoir- au Et entendu ce cri qui sʼélève de
cours de rencontres, réunions, centaines de poitrines en ce di-choses ! Cʼest une volonté, cʼest
forums, échanges, concerta- manche 20 décembre du restau- un projet ! »
tions- expliqué clairement notre rant « Les Brisants » au
position, aujourdʼhui nous pou- François, scandant « MAP dit
vons dire sans forfanterie au- NON au 74 » ! Nul doute que Danièle CARNINOT, métropoli-
cune, sans prétention, sans effet comme dʼhabitude, le peuple taine, technicienne à la Météo,
Le Progressiste - Page 3 - Mercredi 23 décembre 2009
4. POLITIQUE
servir, cʼest insensé ! ». Maurice peuple. A ceux qui, quand ils
ANTISTE, maire et conseiller du sont en panne dʼarguments, dé-
François, dʼenfoncer le clou :
placent les problèmes, quʼils sa-
« Les jours avancent, lʼéchéance
approche, alors lʼinquiétude est chent que je ne lâcherai jamais,
ailleurs, sinon en face ! La voie je ne céderai jamais ! A ceux
que nous avons choisie est as- dont le choix est de durer, ils doi-
surément la bonne ! Nous ne vent savoir que ce nʼest pas le
menons pas de combat dʼar-
rière-garde. Lʼélu doit toujours se choix que jʼai fait. On ne peut
retourner pour avoir lʼavis de son prétendre entrer dans le 74 et ne
peuple. Ceux qui nous condui- demander aucune compétence
sent sont des malhonnêtes ; ce propre ! Par peu, les indépen-
Serge SOUFFLEUR
sont des gens qui ne pensent
dantistes néo-sarkozystes ne
témoigne : « Je travaille depuis quʼà eux-mêmes ! Nous avons
17 ans en Martinique ; je diffuse peur de leurs méthodes ; nous veulent pas prendre leurs res-
la culture scientifique à travers le craignons leurs desseins ! Nous ponsabilités ! Ils savent quʼen
ʻCarbet des Sciencesʼ. Nous de- avons un projet et il nʼest pas passant de lʼarticle 73 à lʼarticle
vons prendre en compte notre basé sur la peur. Serge, nous
74, on rompt lʼégalité des droits.
métissage, notre multiculturalité serons 73 à te protéger contre
et travailler ensemble pour tous ceux qui te veulent du La troisième voie que nous pré-
construire ce pays ». Serge mal ! » Et Jean-Claude WIL- conisons, cette collectivité
LARCHER, sénateur, assène : LIAM, président du MAP, de ré- unique sui generis que nous
« Nous devons faire des efforts péter : « MAP dit NON au 74 car
souhaitons, nous la voulons
sur nous-mêmes ! Ce pays ne MAP ne signe pas de chèques
peut avancer sans projet. Ceux en blanc. Etre Martiniquais, cʼest dans sa forme constituante avec
qui ont la gestion ont failli ! Il être poreux à tous les souffles un maximum dʼhabilitations,
nʼest pas admissible de stigmati- du monde ». Alors Serge LET- dʼexpérimentations. Nous de-
ser des hommes à cause de leur CHIMY termine : « Je remercie
vons préparer des lendemains
couleur de peau ! Toutes ces rai- M. et Mme MARIE-LOUISE pour
sons nous amènent à voter la qualité de leur accueil, je porteurs dʼespérance à notre
NON à lʼarticle 74 le 10 janvier ». salue la présence des frères jeunesse ».
Et Christian VALARD, du Mou- PASTEL, le courage de M. CHE-
vement Progressiste Spiritain, RUBIN qui a fait un choix de vie Applaudissements nourris, une
de préciser : « Je ne suis ni pour difficile. Je ne me marierai pas salle debout. Tous les jours,
le 73, ni pour le 74. Mais je vote- avec les populistes, avec ceux nous sommes plus nombreux,
rai contre lʼ article 74 tel quʼil qui cohabitent avec la violence
nous est présenté. Aujourdʼhui, et la xénophobie ! Je demande plus décidés, plus conquérants.
la peur a changé de camp ! A aux Martiniquais de garder leur Le peuple nous dit que nous ne
partir du moment où un individu sang-froid. Jʼappelle tous au sommes pas seuls et quʼil nous
associe son nom à une institu- calme ! Nous ne sommes pas en accompagne, nous guide et
tion, cela porte un nom : la dic- guerre ! Nous devons nous unir
tature ! Nous respectons les et nous mettre ensemble si nous nous fait confiance !
hommes porteurs de lʼarticle voulons construire ce pays.
74 ». Nous le devons quels que soient
les résultats qui sortiront des
urnes. Si nous voulons relever
Et M. CHERUBIN, ancien agent les grands défis de notre siècle, Serge SOUFFLEUR
des Douanes, agriculteur au nous devons être unis et soli-
Morne Rouge, de vitupérer : « Je daires. Cʼest ça la responsabi-
suis un patriote sans étiquette. lité ! Nous devons faire preuve
Une boîte à outils, cela nʼa pas de maîtrise afin dʼéviter tout af-
de sens ; et quans ceux qui nous frontement. Il importe que ce
la proposent ne savent pas sʼen pays soit en symbiose avec son
Le Progressiste - Page 4 - Mercredi 23 décembre 2009
5. DOSSIER
DÉSANM 1959
QUE SʼEST-IL PASSÉ LES 20, 21, 22 DÉCEMBRE 59 ?
- Par Camille Chauvet
Sur ces trois journées de décembre peut que constater lʼinutilité de sa pré- sont sur le terrain. Casqués, armés,
59, la reconstitution des faits n’est sence. Tout semble rentrer dans lʼor- les Policiers Martiniquais intervien-
possible qu’à partir de la lecture des dre. Tout à coup, un groupe de nent contre les mécontents.
différents journaux locaux et fran- badauds sʼécarte aux pas de course à
çais, paraissant lors des évène- la vue dʼun groupe de C.R.S. armés Les manifestants reviennent vers «
ments. Egalement par le de matraques et de lances grenades lʼHôtel de lʼEurope » et détruisent tout.
témoignage de certains acteurs di- lacrymogènes, qui fonce pour charger « LʼHôtel de lʼEurope », siège de lʼami-
rects des faits. Témoignages de po- la foule. En caserne au Fort Saint cale des Anciens dʼAfrique du Nord de-
liciers et de manifestants. Louis, ils avaient été appelés pour dis- venait une cible suite à lʼinformation
concernant lʼorigine ethnique de lʼau-
perser les badauds.
DIMANCHE 20 DECEMBRE 59 teur du coup de téléphone.
Lʼauteur du coup de téléphone, le Se-
Côté rue Victor Hugo du Central Hôtel, La colère aidant, les magasins voisins
crétaire de lʼAmicale des Anciens
(Bâtiment mitoyen au Musée Départe- subissaient le même sort. Plusieurs vi-
dʼAfrique du Nord, dont le siège social
mental actuel) Frantz Moffat, revenant trines volèrent en éclats. Une voiture
se trouve à « lʼhôtel de lʼEurope », est
du stade Louis Achille, gare sa vespa. désignée comme appartenant à lʼun
pris à partie par un consommateur.
(Scooter). Frantz Moffat descend, des membres de lʼA.A.F.N. est renver-
Lʼintervention des C.R.S. dégénère,
sʼinstalle en compagnie de ses amis sée.
les C.R.S débordés ne peuvent que
dockers pour discuter et commenter battre en retraite. Lʼun dʼentre eux tire Les policiers nʼinterviennent toujours
un match du Club Colonial qui venait un coup de feu qui atteint et blesse un pas. Le Directeur de la Police de-
de sʼachever. Dehors, le véhicule consommateur paisiblement installé mande aux C.R.S. de ne pas interve-
conduit par un Français fait une mau- au deuxième étage dʼun hôtel de la nir, alors que ces derniers
vaise manœuvre et renverse la Savane. Le climat se détériore. Re- sʼapprêtaient à le faire. Les mécon-
vespa. Lʼautomobiliste sʼapprête à par- tournés au Fort Saint Louis les C.R.S. tents occupent la rue. Sʼy sont joints
tir. Moffat sort précipitamment et tirent plusieurs coups de feu en lʼair quelques marginaux sociaux, « rois de
constate que lʼautomobiliste ne sʼar- dans le but dʼeffrayer la foule, mais le la savane ». Cʼest une colère qui prend
rête donc pas. Sans hésiter, il retient résultat escompté est lʼinverse. Car la rapidement les proportions dʼune
lʼhomme au volant du véhicule et foule, apprenant que quʼun homme émeute.
cʼest une altercation entre les deux avait été blessé, traverse lʼallée du
hommes. Selon Frantz Moffat, « nous Monument aux Morts et se dirige vers Ces marginaux prennent immédiate-
avons décidé de prendre un pot, car lʼentrée de la caserne des C.R.S. ment la direction des opérations. Très
je souhaitais avant tout obtenir une tard dans la nuit, lʼagitation continue,
déclaration dʼassurances. » et Frantz Le mécontentement gagne ses mani- disons plutôt jusquʼà deux heures du
Moffat nous rapporte : « Nous étions à festants, auxquels viennent sʼajouter matin. Les « jules bonda mésanmi »,
lʼintérieur quand le propriétaire ferma de nombreux passants. La décision de « bec en or » et « diab en personne »
ses portes. Jʼappris quʼune bagarre disperser la foule est ordonnée. Un conduisent une partie des émeutiers.
avait éclaté entre les militaires et les ordre de rappel est envoyé à tous les Le nombre de manifestants augmenta
C.R.S… ». Entre temps le car de Po- policiers du corps urbain et dans rapidement avec lʼarrivée des jeunes
lice Secours arrive sur les lieux et ne lʼheure, deux cars de Police Secours des quartiers populaires qui ceinturent
Le Progressiste - Page 5 - Mercredi 23 décembre 2009
6. DOSSIER
Fort-de-France et aussi des et les émeutiers qui laisse de nom- Les objectifs attaqués symbolisaient
militants anticolonialistes venant breux blessés des deux côtés. Le toujours le pouvoir en place. Les tech-
du Parti Communiste Martiniquais commandant du Corps Urbain, M. niques dʼattaque nʼétaient pas modi-
mais aussi des jeunes enragés de la NOGIG, le commissaire GILET et fiées : bouteilles enflammées et jets de
situation sociale. aussi trois agents de police doivent se pierres. Certains participants de cette
faire soigner. Les armes à feu appa- nuit dʼémeute appartenaient à des or-
LUNDI 21 DECEMBRE 59 raissent ce soir là et non pas pour dis- ganisations politiques ou syndicales.
suader. Il faut dire que lʼon comptait Ce qui donne à la nuit du dimanche
Dans la matinée, deux C.R.S. à moto,
deux victimes par balle de calibre une autre signification. Une nouvelle
leur mitraillette en bandoulière, sont
9mm, les jeunes ROSILE, 21 ans et victime, la troisième, le jeune BETZI,
hués face à la Poste et dans les rues
MARAJO, 16 ans. Julien, âgé de 19 ans, qui se trouvait
de Fort-de-France un nombre inhabi-
tuel de jeeps de C.R.S. circulent. Me- au bas de lʼescalier du Morne Piche-
Ces deux assassinats eurent pour vin, est atteint. Gravissant quelques
sures dʼintimidation ou attitude effet de déchaîner les émeutiers, dʼau-
préventive ? marches, il sʼécroule aux dernières
tant que de fortes présomptions pe- marches, au pied dʼun Christ. Les
saient sur la police urbaine. Les émeutiers nʼabandonnent pas la rue
Une nouvelle fois, lʼeffet souhaité nʼar-
commissariats de différents quartiers aux forces de police et les attaques re-
rive pas. Dans lʼaprès midi, sous les
subirent lʼassaut des plus décidés. Les prennent sur le même mode et tou-
manguiers face au « Cercle Martini-
postes de police installés dans les
quais », les marginaux sociaux et deux jours les cibles symboliques, à la
hommes connus pour leur apparte- quartiers populaires sont attaqués.
tombée de la nuit.
nance au syndicat C.G.T. discutent Cette journée du 21 décembre est
des évènements et dénoncent le ra- marquée par la déclaration du Bureau Le Commissariat Central subissait une
cisme des CRS. Politique du Parti Communiste Marti- deuxième fois les assauts dʼun groupe
niquais qui accuse les C.R.S, gen- tandis que celui de Rive droite était la
Lʼun dʼentre eux évoque lʼagression de darmes et policiers dʼêtre les proie des flammes.
jeunes antillais à la Gare du Nord en responsables de lʼassassinat de
France. jeunes Martiniquais et de nombreux La perception du Jardin Desclieux et
blessés. celle de la rue Victor Hugo connaissent
Rien ne semble présager dʼune inter- un début dʼincendie, maîtrisé par les
vention quelconque et aux environs MARDI 22 DECEMBRE 59 : LA MA- pompiers.
de vingt heures, un jet de projectiles TINEE DES APPELS AU CALME
de toutes sortes atteint… « lʼhôtel de Et comme le lundi à la tombée du jour
lʼEurope », décidément devenu lʼobjet Le mardi dans la matinée, toutes les tout rentrait dans lʼordre.
de la rancœur populaire. Le « kiosque forces sociales et les groupes de
pression, jusque là fort discrets, mani- MERCREDI 23 DECEMBRE 59 :
» ouvert aux clients habituels se vide
festèrent leur présence par des ap- COUVRE-FEU
très rapidement, les serveuses lʼaban-
donnent aux manifestants révoltés. pels au calme. Il est vrai que deux
jeunes Martiniquais avaient été assas- Le mercredi matin, les autorités déci-
sinés le lundi soir. dent dʼagir. Dès trois heures, une di-
Ces derniers sʼemparent des chaises
zaine dʼarrestations a été opérée par
et es tables qui leur serviront de « bé-
Cʼest le temps des Appels au calme la police. Le couvre-feu est décrété à
lier » pour enfoncer les portes de «
des autorités civiles politiques et reli- partir de 20 heures pour ce même
lʼhôtel ». Les manifestants, surtout des
jeunes, augmentent en nombre et gieuses. Appel de lʼévêque Varin de la mercredi. Les militaires martiniquais
sʼattaquent à « lʼHôtel Glaudon ». Brunelière , supporter du régime de consignés depuis le dimanche ne
lʼAmiral Robert, de Guy Beck repré- peuvent toujours pas sortir. Le Parti
Aux environs de 20 heures trente, sentant du préfet , du Docteur Pierre Communiste organise une conférence
selon certains acteurs directs que Aliker en lʼabsence du Député Maire au Morne Pichevin dans la soirée du
nous avons interrogés, la police inter- Aimé Césaire. (A. Césaire lors des mardi chez Doré à 18H.
vint, appuyée par les forces de Gen- troubles siégeait à lʼAssemblée Natio-
darmerie. Un dispositif de ceinture est nale), du Dr. Camille Petit. Conseiller La décision du Parti Communiste a été
mis en place. Lʼaccès de la Savane général du Centre Ville de Fort- de- prise lors dʼun bureau qui sʼétait tenu
est bloqué du côté de lʼOlympia et France. dans lʼaprès midi. Dans lʼaprès-midi du
vers le front de mer, plusieurs véhi- mercredi, les rues de Fort-de-France
cules militaires obstruent le passage. Dans la nuit de mardi à mercredi, les nʼeurent pas leur coutumière anima-
manifestants se constituèrent en petits tion à la veille des fêtes de fin dʼannée.
Cʼest lʼaffrontement entre les policiers groupes comme les nuits précédentes. Et plusieurs commerçants baissèrent
Le Progressiste - Page 6 - Mercredi 23 décembre 2009
7. DOSSIER
jeudi, sinon les prises de position poli- gnement surtout) de la Guade-
tiques qui remirent en question les ap- loupe, de la Guyane, de la Mar-
pels au calme signés par tous dans le tinique et de la Réunion (septembre
feu des événements. 1961). Expulsion de la Guadeloupe de
lʼécrivain Edouard GLISSANT (sep-
LES LENDEMAINS DE DECEMBRE tembre 1961).Révocation de trois diri-
59 : LA REPRESSION geants du Parti Communiste
martiniquais, fonctionnaires, qui
A partir de 1959, lʼhistoire de la répres-
avaient refusé leur mutation dʼoffice
sion coloniale qui suivra sʼexplique par
D. Laguerre et C. Chauvet (octobre 1961).Condamnation de
lʼirruption de la situation internationale
lʼavocat Georges GRATIANT à trois
tiers mondiste dans la vie quotidienne
leurs rideaux, dʼautres moins effrayés mois de prison avec sursis et une
martiniquaise et ce malgré tout le bar-
conservaient une porte ouverte aux peine dʼamende pour outrage à lʼar-
rage efficace jusquʼalors placé par les
clients ; par contre les grands maga- mée (discours prononcé sur la tombe
élites. Une véritable politique de ré-
sins dʼobjets de luxe, fermés depuis des victimes de la répression du La-
pression est mise en place. Nous ne
lundi, nʼavaient pas ouvert. La popula- mentin (décembre 1961).Interpellation
citons que les faits en rapport direct
tion foyalaise a les yeux braqués sur à Marseille et refoulement sur Paris
avec la lutte anti- colonialiste.
la conférence du soir. dʼE. Glissant qui se rendait à Lagos
Dans cette énumération, nous retrou- (Nigeria) pour assister à une réunion
Non loin, dʼimportantes forces de po- vons avec comme point de départ de la Société africaine de culture (19
lice et de gendarmerie veillent sans lʼévénement Décembre 59 : Marajo, janvier 1962).Interpellation à Marseille
discrétion aucune. Ce meeting Betzi, Rosile, Nouvet, Jovignac, Chloé, et refoulement sur Paris de lʼavocat
sʼachève sans incident notoire. Lacrampe. Et sʼy ajoutent les faits de Marcel MANVILLE qui se rendait à
répression : Ordonnance du 15 octo- Bangui (République Centrafricaine)
Dès 20 heures, les forces de gendar-
bre 1960 permettant aux Préfets dʼex- pour y défendre un client (23 janvier
merie et les C.R.S. en armes contrô-
pulser de leur pays les fonctionnaires 1962).Saisies répétées de journaux à
lent la ville et tirent des rafales de
dont le comportement « est de nature la Guadeloupe et à la Martinique. In-
mitraillette dans les rues, lʼobjectif
à troubler lʼordre public ». Les déci- terdiction des manifestations commé-
étant dʼintimider la population.
sions des Préfets ne sont pas moti- moratives organisées par le Parti
Les forces de gendarmerie circulent vées et sont sans appel. Trois ouvriers Communiste Guadeloupéen (manifes-
en convoi de cinq véhicules. Le quar- agricoles tués au cours dʼune grève au tations qui se sont tout de même te-
tier Bôkannal est quadrillé à la hauteur Lamentin en mars en 1961. nues à Pointe à Pitre) (11 janvier
du poste de police brûlé, et elles pa- 1962). Interdiction dʼun meeting des
trouillent dans la zone dʼhabitation si- Dissolution le 22 juillet du « Front des Antillais, Guyanais, Réunionnais orga-
tuée le long de la route conduisant au Antillais et Guyanais pour lʼautonomie nisé « en salle » à Paris pour protester
lycée Schoelcher. Le périmètre du » fondé le 23 avril 1961. Saisie de la contre lʼO.A.S. après un attentat de
Commissariat Central à la hauteur du brochure Les Antilles et la Guyane à lʼorganisation subversive contre M.
Cimetière est également sous la sur- lʼheure de la décolonisation (juillet Marcel Manville.
veillance de plusieurs escadrons de 1961). Condamnation de deux diri-
geants du Parti communiste martini- Contre des enseignants : Placoly, Ber-
gendarmes. ( ) Les émeutiers ont
quais à un an de prison avec sursis, à nabé, Oscar. Contre tous ceux qui se
abandonné la ville. Plusieurs interpel-
1 500 000 francs dʼamende et à la dressent face aux Français, ano-
lations sans importance clôturent cette
perte des droits civiques et politiques nymes. Nous reviendrons sur cette
nuit du 23.
à vie. Rétrogradation dʼun haut fonc- question.
JEUDI 24 DECEMBRE 59 : LE tionnaire guadeloupéen autonomiste
CONSEIL GENERAL EST travaillant en Afrique (septembre
CONVOQUE 1961).Révocation à la Guadeloupe
dʼun fonctionnaire guadeloupéen auto-
Le lendemain jeudi, le Conseil Général nomiste (octobre 1961). Interdiction à
est convoqué, une motion est prise et la Guadeloupe et à la Martinique des
votée à lʼunanimité. (Motion proposée Conférences de la Jeunesse et de Extrait de lʼouvrage à paraître en Janvier
par le Groupe Communiste). Les fêtes toutes les manifestations publiques 2010. Décembre 59 : éléments pour une his-
de fin dʼannée se dérouleront bien sûr partout et « quel quʼen soit lʼobjet » toire de la répression aux Antilles par Camille
dans lʼinquiétude, mais aucun évène- (août-septembre 1961). Expulsion de Chauvet.
ment majeur ne sera à signaler, le vingt et un fonctionnaires (de lʼEnsei-
Le Progressiste - Page 7 - Mercredi 23 décembre 2009
8. DOSSIER
INAUGURATION DE LA PLAQUE COMMÉMORATIVE À LA MÉMOIRE DE
CHRISTIAN MARAJO, JULIEN BETZI ET DE EDMOND-ELOI VERONIQUE DIT « ROSILE »
Je veux rappeler ici que le 1er centre de lʼhistoire de la Martinique.
culturel de la Ville a été baptisé en
1974 du nom de Christian Marajo dont Un coup de tonnerre dans un ciel qui
le 1er directeur était Daniel Bétis, ici se voulait serein !
présent, et quʼà lʼoccasion du 20e an-
niversaire de ces événements, en Une alerte gravissime qui se traduira
1979, la Ville décidait dʼassocier le par une formidable prise de
nom des trois victimes à des dénomi- conscience de la nécessaire remise en
nations déjà existantes de la rue cause dʼune politique qui renonçait à
Ledru-Rollin-Betzi, de la place Volny- ses promesses, dʼune politique qui tra-
S. Letchimy sur la Savane Marajo et de la place Fabien-Véro- hissait ses idéaux et dʼune politique qui
nique. En 2007, une soirée du se faisait sourde aux appels répétés
Mes chers amis, tant sur place quʼà Paris.
Cénacle a été dédiée aux événements
Il y a 50 ans tombaient trois jeunes de Décembre 59 lors du Festival cul-
Aimé Césaire, multipliant les interven-
martiniquais sous les balles de la ré- turel. Je voudrais remercier Lydie
Bétis, Maître Marceline, le SERMAC tions à lʼAssemblée nationale, déclarait
pression coloniale dʼune rare violence un mois avant les événements :
et dʼune rare puissance. …
Pendant trois jours et trois nuits, les « Les Antilles ne sont pas des terres
Trois jeunes étaient sacrifiés lors des de violence, ce ne sont pas des terres
trois nuits d ʻémeute foyalaise à la 20, 21 et 22 décembre 1959, une «
émeute puissante et spontanée, de rupture. Ce quʼelles demandent
veille de Noël comme pour rappeler le mais alors passionnément, cʼest quʼà
goût amer de lʼabondance dans cette quelque chose comme le coup de
sang de la colère et la réaction dʼune leur attachement, il ne soit pas ré-
île soumise au joug de la domination pondu par lʼindifférence, cʼest quʼà leur
éculée et de la nostalgie coloniale. dignité blessée », comme la qualifiait
Aimé Césaire, a éclaté à Fort-de- angoisse, il ne soit pas répondu par le
France après ce qui sʼapparente à un silence et que leur fidélité nʼapparaisse
· Christian Marajo, 15 ans, tué à lʼan-
banal incident entre un automobiliste pas au Gouvernement comme le signe
gle de la rue de la République et Er-
français et un « scootériste martini- quʼon peut les négliger impunément ».
nest Renan
quais », ici même, à lʼangle de la rue
Victor Hugo et de la rue de la Liberté. Les « événements de Décembre 59 »,
· Julien Betzi, 19 ans, tué au Pont Dé-
comme la tradition aime pudiquement
mosthène
Banal incident de la circulation mais à les nommer, vont devenir un mo-
· Edmond-Eloi Véronique dit « Rosile qui va se révéler être lʼétincelle qui va ment fondateur de la prise de
», 20 ans, tué rue Villaret-Joyeuse enflammer la ville et mettre à jour les conscience nationale, un moment dé-
affres de la colonisation qui se voulait cisif, dans le contexte international de
Leurs noms résonnent encore dans réussie. la décolonisation et de la guerre dʼAl-
nos têtes et dans nos coeurs et lʼémo- gérie, de la dénonciation des pro-
tion nous étreint tant il est vrai que ces Pendant ces jours et ces nuits, la po- messes de la départementalisation, de
jeunes, encore enfants, innocents et pulation souffrante, venue en grande la désillusion et du désenchantement.
confiants, ne méritaient pas un tel sort, partie des quartiers populaires de la
ne méritaient pas de mourir quelque ville, va affronter les mains nues les Déjà en 1958, lors de la création du
soit la cause. forces de lʼordre et la répression colo- PPM, le parti, par la voix dʼAimé Cé-
niale qui tire à balles réelles, va crier saire, avait affirmé, dans lʼarticle 3 de
Je veux saluer ici leur mémoire et leur sa colère et son indignation contre les ses statuts, sa volonté de faire évoluer
courage et témoigner à leurs familles agressions dʼune société raciste, pro- le statut de la Martinique en une « ré-
ici présentes toute notre compassion fondément injuste et inégalitaire qui ne gion française dans le cadre dʼune
et notre bienveillance. Nous savons lui laisse à peine que les miettes du union française fédérée ».
leur émotion intacte et nous parta- festin partagé entre quelques familles
geons leur blessure toujours béante et bien en vue et avec la complicité pro- Le sénateur socialiste Paul Symphor
douloureuse. tectrice des autorités. avait réclamé au Sénat le 12 décem-
bre 1959 « une extension des pouvoirs
Je veux aussi saluer la mémoire de Ces « Trois Glorieuses » comme lʼa si des conseillers généraux ». Il avait
Camille Darsières, alors jeune et bril- justement nommé Alain Plénel, vice- précisé même quʼil ne sʼagissait pas «
lant avocat, pour qui ces événements Recteur de lʼépoque, en référence aux dʼaccorder une priorité quelconque,
furent déterminants et qui décida de trois journées révolutionnaires pari- mais de faire participer dans une plus
rejoindre le PPM afin dʼépauler Aimé siennes de juillet 1830, vont mettre la large mesure, les représentants de
Césaire et le Dr Aliker dans la tâche ville à feu et à sang et marquer un tour- ces populations à lʼapplication des lois
colossale quʼils avaient à édifier. nant profond dans le nouvel épisode et à la gestion de leurs propres af-
Le Progressiste - Page 8 - Mercredi 23 décembre 2009
9. DOSSIER
usines à sucre qui descendent en ville tions réclament une réforme
pour manifester leur colère et reven- du statut des Départements
diquer leurs droits. dʼOutre-mer et proclament « le droit
des Martiniquais à diriger leurs propres
Ce ne sont plus les marches de la affaires ». LʼOJAM appelle particuliè-
faim de 1935. rement « les jeunes de la Martinique
(…) à sʼunir pour lʼécrasement définitif
Ce sont des formes dʼexpression puis- du colonialisme dans la lutte de libéra-
santes et spontanées, brutales et im- tion nationale ».
prévues, de la misère et du chômage,
C. Conconne,R. St Louis, G. Des- de la désespérance et de lʼangoisse, Cʼest dire combien ces événements
portes, E. Landi, D. Marceline, portées par les nouveaux habitants de ont été importants pour les
S. Letchimy la migration des mornes vers la ville, consciences. Ils ont marqué un pays,
quʼAimé Césaire et le Dr Aliker ont ac- un peuple, une ville. Ils ont mis en évi-
faires ». Il avait même ajouté « Nʼest- cueillis à bras ouverts. dence quʼil « existait un problème an-
ce pas le sens de lʼarticle 73 de la tillais », que « ce problème ne pouvait
Constitution ? » Ce sont les cris de détresse dʼune jeu- plus attendre, quʼil fallait le prendre à
nesse désemparée, exclue des « bras le corps sous peine de courir très
Les événements de décembre 59, Trente Glorieuses », qui sʼentasse vite désormais à la catastrophe ».
lʼémotion suscitée par la mort des trois dans les méandres de la mangrove de
jeunes, le caractère quasi insurrection- lʼentre-deux-mers, sur les mornes dé- Alors, 50 ans plus tard, dirons-nous
nel de ces journées vont faire monter chiquetés des 44 marches ou encore que cette émeute nʼa pas servi de
lʼétiage de la revendication à un niveau dans les entrelacs de la ville plate et leçon ?
plus élevé. étalée.
Dirons-nous quʼelle nʼa pas servi de
En présence dʼune foule nombreuse et Désormais, la lutte pour les droits hu- leçon « à un gouvernement blasé sur
revendicative, massée à lʼintérieur mains devient surtout une « guérilla » les souffrances dʼune population loin-
comme à lʼextérieur du bâtiment, les urbaine avec ses rituels, ses barri- taine ? » quʼelle nʼa pas servi « à une
Conseillers généraux vont faire preuve cades, ses slogans, ses affrontements opinion publique anesthésiée à lʼégard
dʼune audace et dʼune unanimité ex- nocturnes, ses gaz lacrymogènes, ses des Antilles ? »
ceptionnelle en adoptant une motion
demandant la modification du statut de Dirons-nous quʼelle ne nous a pas per-
la Martinique, je cite la résolution finale mis de penser lʼapprofondissement de
: notre démarche pour une plus grande
autonomie et une responsabilité ac-
« Que des conversations soient enta- crue dans la gestion de nos af-
mées immédiatement entre les repré- faires ? » Je ne le crois pas.
sentants qualifiés des Martiniquais et
Et sʼil est difficile de faire évoluer un
le Gouvernement pour modifier le sta-
vieil Etat-nation, perclus de certitudes
tut de la Martinique, en vue dʼobtenir
sur lʼuniversalité de son modèle poli-
une plus grande participation à la ges- E. Landi, chargée du patrimoine tique, refusant de faire sien la richesse
tion des affaires martiniquaises ».
partagée des identités particulières et
Unanimité éphémère dont lʼhistoire blessés, ses morts, ses martyrs. Et il y des peuples des lointains horizons
connaît les secrets et les ruses qui en aura bien dʼautres ! dans le cadre de la République, il nʼen
hantent nos consciences aujourdʼhui est pas de même de notre propre re-
encore. Ces événements ont enfin sonné gard et de notre propre exigence sur
comme lʼacte de naissance des nou- nous-mêmes.
Ces émeutes sont aussi un événe- velles organisations de la jeunesse mi-
litante anticolonialiste et nationaliste, Le PPM, en 1967, adoptait lors de son
ment majeur dans notre histoire des
dans la migration Outre-mer et ici 3e Congrès la résolution de « LʼAuto-
luttes sociales et politiques.
même : Le front Antillo-Guyanais pour nomie pour la Nation Martiniquaise ».
Car elles marquent désormais lʼirrup- lʼAutonomie (FAGA), le Front de Dé-
fense des Libertés Publiques (FDLP), On ne peut faire silence sur la carrière
tion brutale des nouvelles formes de la
le Comité de Coordination de la Jeu- dʼAimé Césaire inlassablement mar-
revendication et de la révolte popu-
nesse Anticolonialiste Martiniquaise quée du sceau « de la recherche têtue
laire. Elles signent de manière irrévo-
(CCJAM), lʼAssociation Générale des de nouvelles voies pour de nouveaux
cable lʼentrée en scène de la jeunesse
Etudiants Martiniquais (AGEM) et lʼOr- rapports avec la France ». Il nʼa eu de
et des masses populaires urbaines. cesse de promouvoir un « statut poli-
ganisation de la Jeunesse Anticolonia-
Ce ne sont pas des travailleurs des liste (OJAM) pour ne citer que tique sur-mesure » pour la Martinique,
quelques unes. Toutes ces organisa- appelé à évoluer en fonction des cir-
campagnes, des habitations et des
Le Progressiste - Page 9 - Mercredi 23 décembre 2009
10. DOSSIER
lidarité et de vérité envers ce peuple à personne sinon au peuple Martini-
martiniquais, je reprendrai à mon quais out entier. Cette émeute doit ser-
compte ces mots dʼAimé Césaire que vir, oui. Mais au pays. Et elle ne servira
nous avons voulu graver ici pour la au pays que si elle sert à lʼunion raison-
postérité : nable, à lʼunion loyale de tous les Mar-
tiniquais, de tous les démocrates contre
« Notre malheureux pays se meurt de lʼinjustice et le racisme, contre lʼoppres-
haines stériles, de polémiques idiotes, sion et la tyrannie. »
de divisions stupides. Ces morts de Dé-
cembre ne doivent pas être, ne peuvent Je vous remercie.
Georges DESPORTES pas devenir une cause supplémentaire (Lundi 21 Décembre 2009, La Savane)
et S. LETCHIMY de division. Ces morts nʼappartiennent
constances et des contin-
gences de lʼhistoire ce qui lui
vaudra des critiques répétées.
Il nʼest pas sans intérêt de rap-
peler un extrait de son inter-
vention à lʼoccasion du débat
budgétaire en 1960 : « Ce quʼil
faut, cʼest créer quelque chose
de neuf, non une adaptation de
la loi française à nos départe-
ments, mais quelque chose qui
réponde à notre situation éco-
nomique vraie. Et cela, seuls,
en définitive, les habitants des dépar-
tements dʼoutre-mer peuvent le faire.
»
Aujourdʼhui, nous sommes ici réunis
pour commémorer la mort de ces trois
jeunes Martiniquais.
Nous nous souvenons également du
rôle fondateur de ces événements
dans la prise de conscience décisive
que « lʼheure de nous-mêmes » était
désormais au rendez-vous de lʼhis-
toire.
Cependant si nous devons être au
rendez-vous de lʼhistoire, nous devons
lʼassumer · sans aucun renoncement
à notre conception de la responsabi-
lité,
· sans aucune abdication devant les
choix imposés dʼune binarité obsolète
et dépassée à ranger aux placards
des vieilleries coloniales,
· sans aucune reculade face à nos
conquêtes passées et à venir et face
aux défis de la complexité qui nous im-
posent de toujours inventer, de tou-
jours nous dépasser.
Et si les ruses de lʼhistoire devaient
nous rappeler à notre exigence de so-
Le Progressiste - Page 10 - Mercredi 23 décembre 2009
11. POLITIQUE
COMMUNIQUÉ PPM
Le PARTI PROGRESSISTE MARTINIQUAIS rappelle De fait, le PPM nʼest impliqué dans aucun autre front,
que dans le cadre de la campagne sur lʼévolution ins- rassemblement ou collectif existant à ce jour.
titutionnelle et statutaire de la Martinique, il a choisi
dʼadhérer à la démarche initiée par le Mouvement des Fort-de-France, le 20 décembre 2009
Autonomistes et Progressistes (MAP) et milite de ce
Didier LAGUERRE
fait pour une autonomie pleinement et collectivement
assumée à travers « la Troisième Voie ». Secrétaire Général du PPM
JUSQU’OÙ IRA LA COLERE DES 74SISTES ???
Leur arrogance du moment est la avaient voté à main levée contre les Général et de la Région. Mais cela
preuve de leur faiblesse et surtout propositions de Serge LETCHIMY, ne doit pas servir dʼalibi à leur res-
de leur complète responsabilité puis défendu bec et ongles le 74, ponsabilité dans le déclin du pays.
dans le tableau sombre de tous les jʼespère quʼil leur reste un peu Nous nʼattendons ni commiséra-
pans de notre économie. Dans le dʼéthique et de morale pour DE- tion, ni démagogie de leur part. Je
désarroi qui sʼest emparé du plus il- MISSIONNER de leur mandat de pense ne pas être le seul à attendre
lustre des leurs, je souhaite quʼil Maire ou de Conseiller en faillite. cela dʼeux : un peu de respect pour
leur reste un peu dʼélévation dʼâme la population qui nʼa besoin ni de
et de dignité pour ne pas participer Je doute quʼils le fassent. Aux yeux confessions, ni de repentir venant
à la mise en place de lʼassemblée de lʼopinion, ils seront frappés de de leurs rangs. La troisième voie
unique dans le cadre du 73. Après lʼINDIGNITE POPULAIRE. Mar- sʼattèlera à combler les béances et
tous les dénigrements distillés en qués du sceau de cette indignité, ils les horreurs de leur gestion. Une
direction du MAP et du PPM, jʼose devront sʼécarter, pour sortir la Mar- ambition plus large attend la Marti-
espérer quʼils auront la décence de tinique de la léthargie quʼils ont nique.
ne pas se présenter au suffrage du créée. Certains diront quʼils avaient
peuple. Quant aux maires qui besoin des subventions du Conseil Banann
RFO, LE DOUZIÈME JOUEUR.
On connaissait lʼentraineur-
joueur, aujourdʼhui, le joueur arbi-
tre fait son palmarès sur RFO.
Débat sur lʼévolution institution-
nelle, Mme LEOTIN M CAROLE
pour le 74 ; Mme ROSE RO-
SETTE et M CHOMET pour le 73
et, en douzième joueur- arbitre du 74, Mme MARRE.
La technique est subtile : deux types dʼinterruptions des
intervenants. Interruptions dʼobstruction si lʼintervenant
est pour le 73 ou interruption dʼadjonction au profit des
partisans du 74. Dʼun côté, on met en doute la position
du partisan du 73, de lʼautre, on précise celle du dé-
fenseur du 74. Nous avons aujourdʼhui un média pu-
blic qui devrait être le premier à respecter les règles de
déontologie et les prescriptions du CSA mais qui sʼoc-
troie la possibilité de choisir son parti et même de dé-
laisser les arènes où les combattants ne sont pas
conformes au modèle proposé. Tous les citoyens doi-
vent lire attentivement la décision du CSA et porter sys-
tématiquement plainte contre toute émission
tendancieuse ou déséquilibrée au cours de cette pé-
riode cruciale.
Le Progressiste - Page 11 - Mercredi 23 décembre 2009
12. PAROLES CITOYENNES
Pourquoi un autonomiste peut-il refuser l’article 74 ?
La Constitution française af- SMDE ou lʼAgenda 21 – cata- « bâtisseurs » afin dʼorganiser
firme le droit pour tout peuple logues dʼintentions – qui peuvent cette assemblée unique qui
à lʼautodétermination. La Mar- représenter ce projet indispen- devra devenir une véritable as-
tinique, fille de la République, sable. Il faut, en amont, une semblée « instituante » permet-
a donc le droit de décider concertation avec les forces tant lʼengagement vers une
sous quel article de la Consti- vives représentant la population évolution institutionnelle dans de
tution elle souhaite gérer ses de ce pays : agriculteurs, socio-
meilleures conditions.
affaires, avec plus ou moins professionnels (patrons – syndi-
de responsabilité selon lʼarti- cats), associations (sociales, Alors, et alors seulement, sera
cle. Son éloignement avec la culturelles , sportives…) artistes choisi le cadre institutionnel et la
métropole, sa spécificité his- divers… afin que chacun ap- population pourra être de nou-
torique et culturelle peuvent porte sa pierre. La population se veau consultée sur des bases
expliquer aisément quʼelle trouve ainsi impliquée dans un
claires , un projet lisible parce
puisse vouloir bénéficier de vrai projet.
que mieux connu par elle et
plus dʼautonomie pour mieux
Les politiques peuvent alors tra- dans lequel elle aura été impli-
répondre à ses besoins.
duire en termes institutionnels le quée.
Dans ce cadre, lʼarticle 74 per- cadre permettant la meilleure
met une ouverture vers plus gestion pour aboutir à ce projet. Je viens de tracer ici le chemi-
dʼautonomie toutefois encadrée Ce cadre devient un outil et non nement dʼune troisième voie
par une loi organique qui est dé- une fin en soi! Nos politiques existante entre lʼaventure avec
cidée par les parlementaires. peuvent aussi négocier avec trop dʼincertitudes dʼun 74 mal
Bien entendu, cet article nʼest lʼÉtat français « a priori » et non préparé et lʼimmobilisme ina-
pas lʼindépendance. Dans ce plus « a posteriori » , en ayant dapté du 73 tel quel.
cas, tous les hommes de pro- une lisibilité plus précise de lʼho-
grès, humanistes et de gauche rizon choisi! Cette troisième voie, en fait me
devraient accepter ce cadre ins- Aujourdʼhui, on nous demande semble être la seule à sʼimposer
titutionnel ! de voter pour une « coquille à tout homme de gauche, huma-
vide ». Tout le sens de lʼarticle niste et soucieux du bien-être
Je me considère appartenir à 74 ainsi proposé ne sera donné dʼun peuple, soucieux de lʼintérêt
ce groupe humaniste, pro- quʼultérieurement par la fa- général et non de soifs particu-
gressiste et pourtant je serai meuse « loi organique » votée lières de pouvoir pour le pouvoir,
de ceux qui voteront Non au par les députés, dont nul au- soucieux du développement cul-
74 tel quʼil est présenté et jourdʼhui ne peut dire sérieuse-
turel , social et économique dʼun
rédigé, le 10 janvier 2010 ment et avec certitude ce quʼelle
prochain! Pourquoi ? peuple impliqué davantage dans
contiendra! Et le 73 ?
son avenir et surtout ainsi récon-
Besoin dʼun projet préalable Je voterai Oui le 24 janvier cilié avec la « chose politique » .
prochain pour lʼinstauration
Mon « Non » ne sera pas un dʼune assemblée unique dans Cette troisième voie, enfin, me
non à lʼautonomie! Bien au le cadre de lʼarticle 73. paraît être la seule à nous
contraire! mener sereinement vers une
Mon Oui ne sera pas un Oui au autonomie pleinement et col-
La première raison de mon refus « statu quo » identique à celui de
réside dans le manque de projet la droite. lectivement assumée.
et de démocratie. Comment
peut-on décider dʼun cadre insti- Ce choix ne prend son sens que
Daniel BULLET 02.12.2009
tutionnel avant de décider et dans la perspective des régio-
dʼélaborer ensemble un projet nales toutes proches (mars
de société et économique pour 2010). Nous devrons alors met-
la Martinique ? Ce ne sont ni le tre en place enfin des politiciens
Le Progressiste - Page 12 - Mercredi 23 décembre 2009
13. ECONOMIE
LE CHÔMAGE DANS LA CARAÏBE : LES RÉALITÉS
Les plus petits pays par contre
ont des taux de chômage remar-
quablement bas : ainsi les Iles
Vierges britanniques ont un
taux de chômage de 3,6 % en
2004, les Iles Cayman 3,6% en
2003, Saint-Kitts et Nevis 4,5%
(mais en 1995 !) les Iles
Vierges Américaines ont un
taux de chômage de 6,2 % en
2008 et les Iles Turks et
Caïques en sont à 5,4% en
2007. Tous ces pays ont une po-
pulation inférieure à 100 000 ha-
bitants si on excepte les Iles
Vierges Américaines (108 291
habitants) et même inférieures à
50 000 habitants si on excepte
les Iles Cayman ( 54 243 habi-
tants).Notons quʼà part Saint-
Les taux de chômage de la pendant le festival de musique kitts et Nevis ces pays ne sont
Martinique (et de la Guade- créole) pour mesurer lʼampleur pas indépendants mais auto-
loupe) sont élevés, scandaleu- du phénomène. De même nomes.
sement élevés peut-on dire, Sainte-Lucie a publié un seul
mais qu’en est-il de celui de chiffre durant ces dernières an-
nos voisins caribéens ? nées : 17% en 2005 et ce nʼétait
pas le plus mauvais chiffre de la Ceux qui ont des taux de chô-
période ( 21,6 % en 1998) La mage acceptables
Banque Caraïbe de Développe-
Peu ou pas de chiffres publiés
ment qui anciennement faisait
une présentation détaillée des Nous mentionnons pour mé-
différents pays dans son rapport moire Cuba qui annonce un taux
Le Guyana, Saint-Vincent ne de chômage de 2% en 2008
annuel ne fait plus quʼun résumé
publient pas de chiffres du chô- mais tous les observateurs, éco-
mage et on peut en imaginer la succinct abordant tous les as-
pects économiques ( agriculture, nomistes ou non, sʼaccordent à
raison : ces chiffres sont très éle- reconnaître quʼil y a dans ce
vés, probablement autour de tourisme, construction, industrie,
pays un chômage déguisé et
20% ! La Dominique a publié un secteur minier, transports et
quʼon y multiplie les emplois
seul chiffre durant ces dernières communications, activités offs-
pour donner une occupation aux
années, cʼétait en 1997 ( !) et il hore etc.. ;) mais plus rien sur le
Cubains, mais avec quels sa-
était de 23,1% ! Depuis lors les chômage !
laires !
chiffres ne sont plus communi- Plus sérieux sont les cas de
Haïti a également renoncé à
qués. Notons que la Dominique Porto Rico, de la Barbade, des
fait partie des (rares ?) pays au faire paraître ses chiffres du chô- Bahamas et de Trinidad.
monde qui perd ses habitants : mage tant ils sont élevés….
nous nous souvenons que dans A propos de Porto Rico, lʼéco-
les années 1980 ce pays comp- nomie la plus puissante de la
tait plus de 80 000 habitants et il Caraïbe insulaire avec ses 4 mil-
Les meilleurs chiffres : les
en a 71 000 aujourdʼhui ! Il suffit lions dʼhabitants et un PNB de
de discuter avec des jeunes plus petits pays 60 milliards de dollars ( devant
dans les rues de Roseau (pas Cuba qui a un PNB de 54 mil-
Le Progressiste - Page 13 - Mercredi 23 décembre 2009
14. ECONOMIE
liards de dollars pour une popu- activité offshore de banque et rente : ce pays de près de 10
lation de 11 millions dʼhabitants) dʼassurance notamment ; le tou- millions dʼhabitants et de 48 730
nous rappellerons les données risme représente 75% du PIB de
km2, le plus grand de la Caraïbe
suivantes : Porto Rico est un la Barbade dont le taux de chô-
« Etat Libre Associé « ( en fait mage était de 10,7% en 2007. insulaire après Cuba, a connu
autonome et ceci depuis 1952) La population barbadienne, bien durant ces dernières années des
qui a bénéficié des mesures de formée, émigre facilement taux de croissance importants (
développement particulières du quand les circonstances lʼexi-
plus de 6% par an ) mais de-
gouvernement des Etats-Unis, gent. La population du pays, res-
mesures conçues par lʼéquipe tée stable durant de meure un pays pauvre ( PNB de
du gouverneur élu de lʼépoque nombreuses années, a ten- 4558 dollars par habitant) et les
Luis Muñoz Marin . Ces mesures dance à augmenter depuis peu. Dominicains émigrent en masse.
ont permis lʼindustrialisation de Le PIB par habitant est de 12500
Le taux de chômage actuel est
lʼîle : les matières premières ve- dollars et lʼIDH de ce pays le
nant de lʼextérieur sont transfor- place au 38 ème rang mondial de 15,4 % en 2008 mais ce pays
mées à Porto Rico du fait de selon le rapport de lʼannée 2009. a lʼéconomie la plus promet-
salaires plus bas quʼaux Etats- teuse car très diversifiée, mais à
Unis et la production est ensuite
condition quʼil soit mieux géré….
exportée vers les Etats-Unis,
Les Bahamas ont des activités
son principal marché, mais éga-
économiques qui se rapprochent
lement vers le monde entier.
de celles de la Barbade ( tou-
Lʼindustrie représente 43% du
risme, activités offshore ) le PIB En conclusion, aucun pays
PNB de lʼîle. Cette industrie est
des Bahamas est de 22 276 dol- dʼune certaine dimension nʼa
compétitive et elle emploie
lars par habitant et le taux de résorbé complètement son
18,8% de la population active
chômage de 7,9% en 2007.
qui travaille surtout dans les ser- chômage et les chiffres obte-
Lʼémigration des Bahaméens
vices et dans le tourisme, ce
est un phénomène ancien et sert nus par les pays les mieux
pays étant lʼune des plus
de soupape de sûreté. lotis reposent sur le dyna-
grosses destinations touristiques
de la Caraïbe insulaire . Le taux misme économique, la créa-
de chômage de Porto Rico est tion dʼentreprises, des lois
de 10,9 % en 2007. Ce taux est La République de Trinidad et sociales et des salaires adap-
relativement stable car les Porto Tobago a du pétrole, du gaz na-
Ricains nʼhésitent pas à aller sur tés à leurs situations, la trans-
turel et ….une démocratie qui
le « mainland » quand la situa- fonctionne plutôt bien et des diri- parence des procédures, la
tion est difficile car en tant que geants plutôt compétents ! Elle démocratie….tout ceci nʼex-
citoyens américains ils prennent bénéficie donc vraiment de la cluant pas lʼémigration quand
lʼavion pour aller aux Etats-Unis manne pétrolière et des prix du
sans problème Le PIB par habi- la conjoncture lʼexige …
brut sur le marché mondial : son
tant était de 15 535 dollars en PNB par habitant est de 17 046
2008.
dollars en 2008 et son taux de
chômage est de 7,3% la même
année.
La Barbade, petit pays au sud Max AUGUIAC
Le rôle de lʼagriculture est négli-
de la Martinique bien connu de
geable dans ces trois pays mais
nos compatriotes, est sans Membre du MAP
il ne faudrait pas en tirer de
doute le pays le mieux dirigé de-
conclusions.
puis son indépendance en 1966.
Ce pays, après avoir été un pays
agricole comme toutes les au-
tres colonies de la région, sʼest La République Dominicaine
orienté vers le tourisme puis les est dans une situation diffé-
Le Progressiste - Page 14 - Mercredi 23 décembre 2009
15. HOMMAGE
EN SOUVENIR DE CAMILLE
’actualité du lycée Schœl- passé le voir après le baccalauréat 1er mai où je lʼai revu, sʼamusant à
L cher ne mʼa pas permis de
faire ce mot de commémo-
ration non de la mort de Camille Dar-
dans la maison que mon père louait
sur lʼancienne route de Schœlcher,
un peu avant le Séminaire Collège en
imiter Roselyne Bachelot en me res-
tituant la réponse quʼelle lui avait faite
lorsquʼil lʼavait saluée à lʼAssemblée
sières mais de sa vie dans le cœur venant du canal. Et, manifestement,
de ma part.
de la grande majorité des Martini- se mêlaient en lui lʼaffection pour son
quais. Je ne sais pas réellement si professeur et lʼamour du droit et de Gai, affectueux, redoutable en
Camille aurait soutenu notre action son métier. politique, Camille était aussi étonnant
pour la sauvegarde du lycée Schœl- par sa faculté à trouver encore du
Il mʼarrivait souvent de lui deman-
cher, mais de nombreux éléments me
der de remercier les anciens élèves temps pour écrire cette somme que
laissent penser que oui.
de mon père de lʼaffection quʼils lui sont ses trois tomes sur Lagrosillière.
Avant tout, il était un homme ou- ont porté et quʼils continuent de lui Discret, serviable, attentif aux autres,
vert, attentif à lʼautre et il savait perti- porter. Car, en réalité, cʼest la force Camille Darsières reste dans le cœur
nemment que la jeunesse et sa de cette affection admirative qui me de ses amis par la place quʼil a occu-
formation sont les pierres angulaires semble témoigner dʼindividus hors pée, même pour ceux qui, comme
de la vie dʼun pays. Un pays dont le normes en la personnalité de ces moi, ne lʼont pas connu sur une
monde politique renie sa jeunesse élèves. Ces élèves admiraient –
longue durée. Il importe par les
parce quʼil ne la comprend pas, parce parce quʼils aimaient la pensée,
temps qui courent de disposer de tels
que – plus grave – il lui impose une parce quʼils appréciaient la rigueur et
lʼhonnêteté – le maître qui les guidait repères qui permettent justement de
vision que cette jeunesse ne partage
avec sagesse et bienveillance. Quel faire le tri entre ceux qui mentent
pas, est un pays atteint de gangrène.
quʼait été le devenir de ces élèves, éhontément en politique et qui ne sa-
Mais aussi Camille était un quʼils se nomment Pierre Petit, Félix vent que menacer pour convaincre.
homme moderne, tourné résolument Amar, Camille Darsières, Edouard de Ils trompent peut-être une certaine
et démocratiquement vers le futur et Lépine et tant dʼautres, ils aimaient frange du peuple mais sans doute
le bien du peuple. Je me souviens alors déjà penser, réfléchir, et ils ont pas tout le peuple, et encore moins
que lors de son refus de voter le 74 formé une élite martiniquaise. notre jeunesse qui, au lycée Schœl-
de son vivant au congrès, il répétait
Camille faisait partie de cette cher, sʼest réveillée au son des éclats
que le peuple ne le comprendrait pas.
élite, même si, en véritable huma- de voix quʼun Camille Darsières nʼau-
Seul un vrai démocrate peut se plier
niste, il préférait se tourner vers les rait pas manqué de réprouver, lui qui,
à la discipline de ce que veulent ceux
quʼil représente et non à son propre autres plutôt que vers son nombril. pourtant, avait lʼhabitude des pré-
jugement. Est-ce parce que penser juste nʼa toires.
plus été à la mode ? Est-ce parce
Car, même si je ne connaissais quʼil fallait démagogiquement parler Yvon JOSEPH-HENRI
pas intimement Camille, il a été pour creux et donner aux gens ce qui les
flattait ? Toujours est-il que Camille a P.S. : Certains diront que jʼai, à nʼen pas
moi un politique honnête, qui ne se
contentait pas de défendre une poli- été battu aux élections législatives et douter, une carte du PPM dans ma poche.
tique, mais de faire partager son quʼil a dû en être malheureux, non Que ceux-là se rassurent : mon père, so-
point de vue, de ne jamais lʼimposer, pas par orgueil mais par humilité, cialiste, était le concurrent direct dʼAimé Cé-
et dʼessayer de comprendre ce quʼon parce quʼil devait sʼinterroger sur ce saire, en 1945 si je ne me trompe, à la
pouvait lui dire. Est-il besoin de dire quʼil nʼavait pas dit ou fait pour obtenir mairie de Fort-de-France. Cela ne lʼa pas
quʼil était un véritable intellectuel, au lʼadhésion du plus grand nombre à empêché dʼêtre aimé de ses élèves mili-
sens humaniste que devrait com- ses idées. En tout cas, il nʼétait pas
tants communistes ou futurs compagnons
prendre le terme intellectuel. dans sa nature dʼaccuser dʼautres
de route de Césaire, voire futures figures de
que lui. Il avait, en effet, le sens de la
proue de la droite martiniquaise ; tout
Camille mʼa accueilli en 2000 responsabilité que beaucoup nʼont
comme un fils, par affection pour son semble-t-il jamais eu. La preuve que comme personne ne mʼempêchera de leur
vieux professeur de philosophie, mon ce nʼest pas la défaite même qui le rendre, à mon tour, un hommage vibrant
père. Il disait que cʼest Gros Jo qui lui minait est quʼil nʼa jamais cessé de se dès lors quʼils le méritent, parce que je suis
avait dit de faire du droit, lorsquʼil était battre. Je le revois encore le dernier libre dans mon cœur et dans ma tête...
Le Progressiste - Page 15 - Mercredi 23 décembre 2009
16. Ce 22 décembre, Serge LETCHIMY a reçu à l'Hôtel
de Ville MM. Alain et Edwy PLENEL.
Visite symbolique d'une grande portée.
La maire et ses collaborateurs
reçoivent les Plénel
Edwy PLENEL, journaliste, Alain PLENEL, vice-recteur
mediapart en 1959
MM. Plénel père et fils Alain PLENEL et Serge Les PLENEL, S. LETCHIMY, E. LANDI
LETCHIMY
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