1. 6 avril 201620
Israël-France
Prêt, feu, partez, pour la French Tech Israel
Opération séduction
Likoud/Travaillistes : appel commun pour l’engagement politique
des olim de France
Dans la cour des grands
Joseph Strich
«
N
ous inaugurons ce soir la French Tech Israel,
un hub d’entrepreneurs et d’investisseurs
français et francophiles, qui sous l’impulsion
des “ambassadeurs” du hub, seront le pont entre la Start-up
nation et la French Tech Republic… La France est non
seulement le pays du vin et du fromage, mais aussi celui de
la créativité. Je suis très heureux de vous accueillir à cette
soirée vin, fromage et high-tech ! »
Coup d’envoi. La French Tech Israel, annoncée par le ministre
français de l’Economie Emmanuel Macron lors de sa visite
en septembre, a été officiellement lancée lundi 28 mars à
la Maison de France, la résidence à Jaffa des représentants
officiels de la République, sous la houlette de l’ambassadeur
de France en Israël, Patrick Maisonnave. Objectif : susciter
l’intérêt pour les french tech hubs chez « les Israéliens
qui acceptent de jouer la carte de l’interconnexion entre
nos deux écosystèmes, français et israélien », précise
l’ambassadeur. Et de souligner : Tandis qu’Israël est la Start-
up nation, « la France est elle aussi un grand pays de start-
up, qui en compte 4 000, seulement à Paris. »
Parmi les invités, de hauts représentants des communautés
high-tech française et israélienne : Axel Dauchez (président
de Publicis France et salon Viva Technology à Paris), Maxime
Baffert (Proximedia Europe), Luc Bretones (Orange Vallée-
France) et Anne-Cécile Worms (Art2M), entrepreneur
insatiable d’innovation et de culture, qui a ébloui l’assistance
avec ses démonstrations d’art digital français. Etaient
également présents l’investisseur israélien Yossi Vardi, et les
« ambassadeurs » de French Tech Israel Jérémie Berrebi et
Max Herzberg…
En quoi consiste la French Tech Israel ? En un réseau
d’entrepreneurs et investisseurs français et amis d’Israël, ou
résidents du pays, qui serviront de mentors aux investisseurs
et patrons de sociétés françaises intéressées par la Start-up
nation. Le but étant d’accélérer la pénétration dans l’Etat
juif de start-up françaises et d’y développer leur activité,
tout en renforçant l’éclat de la French Tech auprès de la
communauté d’innovation israélienne, pour aider ses
acteurs à profiter des opportunités que propose l’Hexagone.
Le journal Les Echos titrait la semaine dernière : « La French
Tech drague la Silicon valley israélienne ». Notant que « les
entreprises tricolores sont de plus en plus nombreuses
à miser sur l’écosystème israélien qui se développe aussi
grâce à l’aliya ». Pour le quotidien, les olim sont des
« pionniers partis doper leurs projets en Israël », alors que
les entrepreneurs israéliens, à la recherche « de partenaires
stratégiques pour s’européaniser », sont séduits par
« l’attractivité du marché français ». u
T
el-Aviv. Le Likoud et le Camp sioniste ont fait la
paix, le temps d’une soirée. D’une seule et même
voix, les deux principaux partis du pays à organiser
des primaires ont lancé un appel aux olim de France afin
qu’ils s’engagent politiquement. C’était jeudi 31 mars, lors
d’une soirée conjointe à la ZOA House (Zionist Organization
of America), organisée à l’initiative des militants Likoud
Myriam Shermer et Binyamin Lachkar. La très jeune députée
Likoud Sharren Haskel et le vice-président travailliste du
parlement Hilik Bar ont tous deux pris la parole. La députée
travailliste Michal Biran était également présente.
Myriam Shermer, qui a « troqué la casquette de journaliste
pour celle de militante », explique : « Il y a un élan dans
la communauté française, des initiatives se créent, les
gens en ont marre de raser les murs et de ne pas avoir de
voix. Israël et ses lobbies ne correspondent pas au modèle
républicain des Français, mais ils doivent comprendre : la
seule façon d’influer sur leur vie en Israël est d’entrer dans
les partis politiques comme adhérents en passant par les
primaires. Ce n’est pas tout de voter le jour des élections, il
faut agir en amont. »
S’adressant aux quelques dizaines d’olim présents, Sarah
Blum, qui représente le principal parti d’opposition,
a déploré quant à elle qu’il n’y ait « pas en Israël de député
régional », la représentation se faisant sur des « segments
de population ». Et d’exhorter l’assistance à prendre sa carte
de parti. « Chaque catégorie de population, c’est un nombre
de sièges. Les Français peuvent faire entrer un député à la
Knesset », a-t-elle insisté, invoquant « la nécessité d’agir de
manière individuelle en essayant d’actionner des leviers,
afin d’influer sur la société ».
Les politiciens ont tenu le même langage, désireux
d’ouvrir la porte à qui s’identifie aux partis sionistes, quels
qu’ils soient. « Vous devez accroître votre influence »,
a souligné Hilik Bar. Le député s’est dit « ému » par cette
aliya « forte, pas de détresse ». « Il y a assez de motifs de
discorde droite-gauche, mais il y a encore plus de raisons
de coopérer pour l’aliya de France, une des plus sionistes
et des plus qualifiées qui soient », a-t-il insisté. Même son
de cloche pour Sharren Haskel qui a répété l’intérêt des
partis pour cette immigration « idéologique » et « au capital
humain » unique. Selon elle, les olim français doivent être
plus impliqués dans la vie politique, quelle que soit leur
orientation politique, à l’instar des Russes et des Ethiopiens.
- J.S.
Israël, une nation de start-up,
quelques chiffres :
• L’Etat juif est le 2e
hub d’innovation dans le
monde après la Silicon valley.
• Israël compte le plus grand nombre de start-up
dans le monde par rapport à la population : plus
de 4 500 pour 8,2 millions d’habitants.
• 4,2 % de son produit intérieur brut est consacré
à la recherche et au développement, soit la plus
grande part dans le monde.
• En 2015, Israël a compté 104 cessions (exits)
dans le high-tech, pour une valeur de plus de
9 milliards de dollars.
Quid des primaires
Le système des primaires du Likoud réserve de
nombreuses places aux différents secteurs de la
population (hormis la Liste nationale prioritaire),
explique Binyamin Lachkar. Ainsi, Russes,
anglophones, Ethiopiens, olim, mais aussi chauffeurs
de taxi, kabbalistes, etc. sont représentés. Pour
participer aux primaires, il faut avoir adhéré au parti
depuis 16 mois au moins.
Côté travailliste, Hilik Bar précise qu’il faut six mois
d’adhésion pour participer. « S’il y a une grande force
française au Parti travailliste, alors chez nous aussi il
peut y avoir une révolution française », a-t-il ajouté,
avec une touche d’humour.
Priorité aux équivalences
Principale préoccupation des olim : la question
des équivalences. Porte-drapeau de cette lutte,
David Tibi mène depuis six mois un combat pour la
reconnaissance de son diplôme de dentiste. Grâce à
lui notamment, une réforme de la législation est en
cours à la Knesset, n’en déplaise aux professionnels
du pays qui craignent la concurrence. Egalement en
procédure, sur initiative du député Hilik Bar : une
proposition de loi pour une discrimination favorable
dans la fonction publique des olim de moins de 5 ans,
soutenue tant par la coalition que par l’opposition.
Pour Sharren Haskel, « les changements seront plus
rapides si vous vous unissez au sein des partis ». A
sa sortie de la salle, la députée s’est dite optimiste.
« Ces olim sont chaleureux et pleins de volonté, mais
ils connaissent mal la démocratie israélienne. Il faut
leur expliquer comment elle fonctionne. Il est temps
qu’ils prennent leur avenir en mains. »
Patrick Maisonnave, ambassadeur de France
en Israël (à gauche) et Gilles Pecassou, premier
conseiller. (Ambassade de France en Israël/Marine Crouzet)
De gauche à droite : Sarah Blum, Hilik Bar, Sharren Haskel, Binyamin Lachkar, Julien Bahloul. (Les Olim de France au Likoud)