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L’Éco austral Nº 298 - Juin 201586
MANAGEMENT
Par Bernard Alvin (*)
bernard.alvin.conseil@wanadoo.fr
L’atypie peut trouver sa définition dans
les mathématiques avec notamment la
« loi normale».Enthéoriedesprobabilités
et en statistiques, la loi normale est l’une
des lois de probabilité les plus adaptées
pour modéliser des phénomènes naturels
et notamment humains issus de plusieurs
événements aléatoires. L’atypie peut donc
être vue comme un phénomène naturel
propre au monde vivant et notamment
humain. C’est un peu comme si la nor-
malité s’accompagnait nécessairement et
naturellement de l’anormalité. Il est donc
tout à fait normal qu’il y ait de l’anor-
malité ! La nature reconnaît donc l’atypie
comme l’une de ses réalités. Qu’en est-il
dans le vécu humain ? Est-ce reconnu
comme une réalité naturelle facilement
acceptable ? Le fait d’être « normal » ou
« anormal » est il vécu de façon « nor-
male » selon qu’on appartient à l’un ou
l’autre groupe humain  ? Prenons un
exemple qui ne semble pas trop sensible,
celuidelatailledesfemmesetdeshommes
en France. En 2007, la taille moyenne
des hommes était de 1,79 m et de 1,68 m
pour les femmes contre respectivement
1,66 m et 1,54 m en 1900. Une taille est
dite exceptionnelle ou atypique lorsque
l’écart par rapport à la moyenne se situe
autour de 20%. Pour les hommes, ça
commencera à 1,95 m pour l’écart su-
périeur et à 1,63 m pour l’écart inférieur.
Au-delà d’1,95 m, on pourra commencer
à parler de gigantisme et en deçà
d’1,63 m de nanisme. Ces qualificatifs
ont d’emblée un effet stigmatisant pour
les personnes. Le fait même d’évoquer le
gigantisme ou le nanisme induit déjà
clairementunimpactsocio-psychologique,
et le sentiment d’être atypique qui s’ensuit
n’est pas forcément vécu de façon neutre.
Ajoutons qu’il est reconnu que la taille
(de même que la corpulence) joue un
rôle important dans le développement
de la personnalité des individus.
DES MARQUEURS HÉRITÉS
DU PASSÉ
On peut observer l’influence de la taille
des personnes dans les relations sociales
et dans les comportements individuels.
Les personnes de taille inférieure ou
supérieure à la moyenne peuvent souffrir
d’un complexe psychologique. Dans
l’entreprise, on pourra être atypique pour
bien d’autres raisons que celles liées au
physique. Chaque entreprise est porteuse
d’une culture qui est souvent le produit
de son histoire et des différents dirigeants
qu’elle a pu connaître. Une personne est
elle-même porteuse de sa propre culture,
qui est elle aussi le produit de son histoire
et de sa propre personnalité. Un pays
comme la France y ajoute sa propre
histoire et sa propre culture. Le pays a
ététrèsmarquépardespériodesculturelles
à fort impact comme la Royauté, les Lu-
mières, la Révolution de 1789, le déve-
loppement industriel, les guerres mon-
diales, etc. On retrouve ces « marqueurs »
hérités du passé dans le système scolaire
qui est censé préparer au monde du
travail. Il y a les élèves qui sortent du
système scolaire assez tôt et ceux qui
s’inscrivent dans un parcours plus long.
Celui-ci commence avec le baccalauréat
qui est de moins en moins un élément
différenciantentrelespersonnesàmesure
qu’on se rapproche des 100% de lauréats.
Le clivage se fera plutôt sur les types de
baccalauréat,aveclesacro-saintbacscien-
tifique qui ouvre les portes des meilleures
écoles, et encore plus s’il s’accompagne
de belles mentions.
DES « NORMALITÉS »
QUI S’IMPOSENT AUX
INDIVIDUS
À partir de là, les étudiants choisissent
des formations courtes ou longues, des
formations académiques ou pratiques
(orientéestechniqueoubusiness).S’ajoute
à cela le choix entre une université et
une école. Et dans le monde des écoles
figure « la grande école » tant recherchée
dans le monde du travail.
Les études supérieures créent un véritable
clivage et une véritable hiérarchie qu’on
Sociologiquement, l’atypie se définit comme le
fait de ne pas être conforme à un modèle retenu
comme référence. Une caractéristique qui
représente une richesse et se trouve au fond de
chacun. Mais elle reste difficile à valoriser dans le
monde de l’entreprise.
L’atypie caractérise la différence par
rapport un certain modèle. Mais au bout
du compte, chacun peut se révéler
atypique.
Bienvenue dans le monde de l’atypie !
L’Entreprise
(*) Bernard Alvin
Il est à la tête de son propre cabinet,
Bernard Alvin Conseil, fondé en 1995 et
spécialisé dans l’accompagnement des
hommes dans le domaine du développement des potentiels.
Bernard Alvin a « coaché » ses premiers cadres et dirigeants
dès 1991, faisant figure de pionnier avant que n’arrive la
mode du coaching. Cherchant à aller plus loin, il fera émerger
le concept de « management vocationnel » à partir de 2005. Il
a pratiqué son métier en France métropolitaine, dans les
DOM-TOM et dans plusieurs pays dans le monde, dont le
Brésil. Il intervient en effet en français, en anglais et en
portugais.
Stocklib
L’Éco austral Nº 298 - Juin 2015 87
L’Entreprise
MANAGEMENT
va retrouver un peu plus tard dans les
entreprises. Les diplômes de certaines
écoles dites supérieures se vendent nette-
ment mieux que d’autres. À partir de là
s’installent des « normalités » qui s’impo-
sent aux individus. Par exemple, dans
les grandes entreprises internationales,
les diplômes des grandes écoles les plus
huppées vont faire recette et donner accès
aux postes les plus importants, l’inverse
étant vrai. Tout cela fait que chaque
entreprise est porteuse de modèles types
souvent assez puissants même si ce n’est
pas du tout revendiqué, voire inconscient.
Toute personne décalée par rapport à
ces modèles types aura de véritables
difficultésàs’imposer.Ilarrivenéanmoins
quecertainespersonnespassentautravers
des mailles des filets culturels pourtant
très sélectifs. Souvent, ces personnes sont
porteuses de caractéristiques très per-
sonnelles qui ont amené les recruteurs à
« baisser la garde » du protectionnisme
culturel. Telle personne aura été recrutée
dans une entreprise industrielle parce
qu’elle possède une capacité d’innovation
porteuse de grandes richesses potentielles.
Telle autre personne aura été recrutée
parce qu’elle est porteuse de compétences
à forte valeur ajoutée et absentes dans la
population actuelle de l’entreprise. Pour
ces personnes atypiques, la vie en entre-
prise ne sera pas facile, pour leur envi-
ronnement non plus ! Le système envi-
ronnant fera constamment pression pour
normaliser l’atypique, ce qui est un non-
sens vu que c’est précisément l’atypie de
la personne recrutée qui fait sa richesse !
Mais les phénomènes humains agissent
de façon plus puissante que la logique
des intérêts économiques.
TOUT LE MONDE EST
FINALEMENT ATYPIQUE
Si l’on regarde de plus près les profils des
personnes dans les entreprises au point
d’en analyser les talents, les qualités, les
parcours, les événements subis, les moti-
vations profondes et les vocations, alors
une personne qui a une apparence sociale
« normale » ne l’est plus du tout ! En
effet, en dessous de « la couche culturelle
normalisante » existe une personne qui
apparaît unique en son genre pourvu
qu’on la scrute en profondeur. Les per-
sonnes qui exercent des métiers comme
le coaching vocationnel font apparaître
ces réalités « cachées ». Et dès lors qu’on
se situe à ce niveau de profondeur, on
découvre tout un ensemble d’atypies
qu’on ne voyait pas à la surface des per-
sonnes. On se rend compte alors que ces
personnes « culturellement normales »
souffrentdesmêmesdifficultésàs’imposer
que les personnes dites atypiques dès
lors qu’il s’agit d’exprimer leur véritable
identité. On peut même dire qu’elles en
souffrent encore plus dès lors que les
personnes déclarées atypiques n’ont pas
à franchir cette couche culturelle qui peut
s’avérer un véritable rempart à percer
pour que l’identité de la personne puisse
exister. Les souffrances peuvent même
redoubler d’intensité dès lors que ces
personnes ont de grandes responsabilités
car, très souvent, on leur demandera de
faire preuve de créativité, de motivation
accrue, de talents plus forts… On leur
demandera d’exprimer toute leur
personnalité ! Cette situation peut friser
la schizophrénie dès lors qu’on attend
que ces personnes soient garantes d’un
modèle culturel dominant et, dans le
même temps, qu’elles affichent ce qu’elles
ont de plus personnel. Cela revient ni
plus ni moins à afficher en quoi elles
sont atypiques et souvent différentes ou
décalées par rapport au système ambiant.
Dans ce marécage des contradictions
humaines, certaines personnes peuvent
se perdre. Le «  burnout  » pourra être
l’unedesvoiesdesortiedeproblématiques
insolubles.
COMMENT GÉRER SON
ATYPIE ET EN TIRER
PROFIT
L’atypie serait elle donc porteuse de mal-
être, voire de maladies  ? Afficher une
atypie s’accompagne-t-il systématique-
ment d’une certaine torture mentale ou
psychologique ? Ne voit on pas des êtres
particulièrementatypiquesplutôtheureux
et épanouis,  comme ces entrepreneurs
qui ont fait de leur atypie une force
considérable qui force le respect de tous ?
Existe-t-il une clé précieuse qui ouvre
tantôt la porte de l’atypie sur le ciel bleu
et tantôt sur un ciel plus sombre ? Une
telle clé pourrait bien être le leadership !
Si être leader consiste à affirmer ou
imposer ses propres caractéristiques dans
son environnement humain, alors les
personnes qui y parviennent en sont plus
à forcer l’admiration et l’adhésion de leur
environnement même si elles ont pro-
bablement dû « ferrailler » pour atteindre
ledegréadéquatetdevenirforced’impact.
Commentdéveloppe-t-onsonleadership ?
Est-ce permis à tout le monde de le faire ?
Là encore, il y a des clés et l’une d’entre
elles est la connaissance de soi. À partir
du moment où l’on peut se connaître en
profondeur, on réalise déjà une bonne
partie du chemin. Ensuite, le « jeu » con-
siste à identifier en quoi nos caracté-
ristiques profondes peuvent être utiles à
nos congénères. Il ne reste plus alors
qu’à trouver des opportunités et déceler
les besoins des acteurs économiques sur
lesquels s’appuyer pour dérouler tout
l’écheveau des caractéristiques person-
nellespouvantrendrelesservicesescomp-
tés. Si tout cela est possible et réalisable
pour chacun, il n’empêche que ce chemi-
nement ressemble plus à un parcours du
combattantqu’àunerandonnéetranquille
surunchemindecampagne !Ceparcours
du combattant peut être mené seul, mais
il peut aussi être mené en étant accom-
pagné par des personnes ayant précisé-
ment comme talents d’amener toute per-
sonne à gravir de belles montagnes. Ces
personnes sont en quelque sorte des
guides de haute montagne qui permettent
aux atypies de chacun de former un pay-
sage himalayen de toute beauté !
La réalisation de l’atypie de chacun ne va
pas de soi, mais si l’on s’en donne les
moyens, elle peut conduire à des nirvanas
tant personnels que collectifs. Cette pers-
pective est suffisamment motivante pour
qu’on franchisse le pas et qu’on se décide
à relever le challenge !
« Le système
environnant
fait
constamment
pression pour
normaliser
l’atypique, ce
qui est un
non-sens vu
que c’est
précisément
l’atypie de la
personne
recrutée qui
fait sa
richesse ! »
Stocklib/VladimirsPoplavskis
Exprimer son atypie peut conduire
à un équilibre personnel salutaire.

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  • 1. L’Éco austral Nº 298 - Juin 201586 MANAGEMENT Par Bernard Alvin (*) bernard.alvin.conseil@wanadoo.fr L’atypie peut trouver sa définition dans les mathématiques avec notamment la « loi normale».Enthéoriedesprobabilités et en statistiques, la loi normale est l’une des lois de probabilité les plus adaptées pour modéliser des phénomènes naturels et notamment humains issus de plusieurs événements aléatoires. L’atypie peut donc être vue comme un phénomène naturel propre au monde vivant et notamment humain. C’est un peu comme si la nor- malité s’accompagnait nécessairement et naturellement de l’anormalité. Il est donc tout à fait normal qu’il y ait de l’anor- malité ! La nature reconnaît donc l’atypie comme l’une de ses réalités. Qu’en est-il dans le vécu humain ? Est-ce reconnu comme une réalité naturelle facilement acceptable ? Le fait d’être « normal » ou « anormal » est il vécu de façon « nor- male » selon qu’on appartient à l’un ou l’autre groupe humain  ? Prenons un exemple qui ne semble pas trop sensible, celuidelatailledesfemmesetdeshommes en France. En 2007, la taille moyenne des hommes était de 1,79 m et de 1,68 m pour les femmes contre respectivement 1,66 m et 1,54 m en 1900. Une taille est dite exceptionnelle ou atypique lorsque l’écart par rapport à la moyenne se situe autour de 20%. Pour les hommes, ça commencera à 1,95 m pour l’écart su- périeur et à 1,63 m pour l’écart inférieur. Au-delà d’1,95 m, on pourra commencer à parler de gigantisme et en deçà d’1,63 m de nanisme. Ces qualificatifs ont d’emblée un effet stigmatisant pour les personnes. Le fait même d’évoquer le gigantisme ou le nanisme induit déjà clairementunimpactsocio-psychologique, et le sentiment d’être atypique qui s’ensuit n’est pas forcément vécu de façon neutre. Ajoutons qu’il est reconnu que la taille (de même que la corpulence) joue un rôle important dans le développement de la personnalité des individus. DES MARQUEURS HÉRITÉS DU PASSÉ On peut observer l’influence de la taille des personnes dans les relations sociales et dans les comportements individuels. Les personnes de taille inférieure ou supérieure à la moyenne peuvent souffrir d’un complexe psychologique. Dans l’entreprise, on pourra être atypique pour bien d’autres raisons que celles liées au physique. Chaque entreprise est porteuse d’une culture qui est souvent le produit de son histoire et des différents dirigeants qu’elle a pu connaître. Une personne est elle-même porteuse de sa propre culture, qui est elle aussi le produit de son histoire et de sa propre personnalité. Un pays comme la France y ajoute sa propre histoire et sa propre culture. Le pays a ététrèsmarquépardespériodesculturelles à fort impact comme la Royauté, les Lu- mières, la Révolution de 1789, le déve- loppement industriel, les guerres mon- diales, etc. On retrouve ces « marqueurs » hérités du passé dans le système scolaire qui est censé préparer au monde du travail. Il y a les élèves qui sortent du système scolaire assez tôt et ceux qui s’inscrivent dans un parcours plus long. Celui-ci commence avec le baccalauréat qui est de moins en moins un élément différenciantentrelespersonnesàmesure qu’on se rapproche des 100% de lauréats. Le clivage se fera plutôt sur les types de baccalauréat,aveclesacro-saintbacscien- tifique qui ouvre les portes des meilleures écoles, et encore plus s’il s’accompagne de belles mentions. DES « NORMALITÉS » QUI S’IMPOSENT AUX INDIVIDUS À partir de là, les étudiants choisissent des formations courtes ou longues, des formations académiques ou pratiques (orientéestechniqueoubusiness).S’ajoute à cela le choix entre une université et une école. Et dans le monde des écoles figure « la grande école » tant recherchée dans le monde du travail. Les études supérieures créent un véritable clivage et une véritable hiérarchie qu’on Sociologiquement, l’atypie se définit comme le fait de ne pas être conforme à un modèle retenu comme référence. Une caractéristique qui représente une richesse et se trouve au fond de chacun. Mais elle reste difficile à valoriser dans le monde de l’entreprise. L’atypie caractérise la différence par rapport un certain modèle. Mais au bout du compte, chacun peut se révéler atypique. Bienvenue dans le monde de l’atypie ! L’Entreprise (*) Bernard Alvin Il est à la tête de son propre cabinet, Bernard Alvin Conseil, fondé en 1995 et spécialisé dans l’accompagnement des hommes dans le domaine du développement des potentiels. Bernard Alvin a « coaché » ses premiers cadres et dirigeants dès 1991, faisant figure de pionnier avant que n’arrive la mode du coaching. Cherchant à aller plus loin, il fera émerger le concept de « management vocationnel » à partir de 2005. Il a pratiqué son métier en France métropolitaine, dans les DOM-TOM et dans plusieurs pays dans le monde, dont le Brésil. Il intervient en effet en français, en anglais et en portugais. Stocklib
  • 2. L’Éco austral Nº 298 - Juin 2015 87 L’Entreprise MANAGEMENT va retrouver un peu plus tard dans les entreprises. Les diplômes de certaines écoles dites supérieures se vendent nette- ment mieux que d’autres. À partir de là s’installent des « normalités » qui s’impo- sent aux individus. Par exemple, dans les grandes entreprises internationales, les diplômes des grandes écoles les plus huppées vont faire recette et donner accès aux postes les plus importants, l’inverse étant vrai. Tout cela fait que chaque entreprise est porteuse de modèles types souvent assez puissants même si ce n’est pas du tout revendiqué, voire inconscient. Toute personne décalée par rapport à ces modèles types aura de véritables difficultésàs’imposer.Ilarrivenéanmoins quecertainespersonnespassentautravers des mailles des filets culturels pourtant très sélectifs. Souvent, ces personnes sont porteuses de caractéristiques très per- sonnelles qui ont amené les recruteurs à « baisser la garde » du protectionnisme culturel. Telle personne aura été recrutée dans une entreprise industrielle parce qu’elle possède une capacité d’innovation porteuse de grandes richesses potentielles. Telle autre personne aura été recrutée parce qu’elle est porteuse de compétences à forte valeur ajoutée et absentes dans la population actuelle de l’entreprise. Pour ces personnes atypiques, la vie en entre- prise ne sera pas facile, pour leur envi- ronnement non plus ! Le système envi- ronnant fera constamment pression pour normaliser l’atypique, ce qui est un non- sens vu que c’est précisément l’atypie de la personne recrutée qui fait sa richesse ! Mais les phénomènes humains agissent de façon plus puissante que la logique des intérêts économiques. TOUT LE MONDE EST FINALEMENT ATYPIQUE Si l’on regarde de plus près les profils des personnes dans les entreprises au point d’en analyser les talents, les qualités, les parcours, les événements subis, les moti- vations profondes et les vocations, alors une personne qui a une apparence sociale « normale » ne l’est plus du tout ! En effet, en dessous de « la couche culturelle normalisante » existe une personne qui apparaît unique en son genre pourvu qu’on la scrute en profondeur. Les per- sonnes qui exercent des métiers comme le coaching vocationnel font apparaître ces réalités « cachées ». Et dès lors qu’on se situe à ce niveau de profondeur, on découvre tout un ensemble d’atypies qu’on ne voyait pas à la surface des per- sonnes. On se rend compte alors que ces personnes « culturellement normales » souffrentdesmêmesdifficultésàs’imposer que les personnes dites atypiques dès lors qu’il s’agit d’exprimer leur véritable identité. On peut même dire qu’elles en souffrent encore plus dès lors que les personnes déclarées atypiques n’ont pas à franchir cette couche culturelle qui peut s’avérer un véritable rempart à percer pour que l’identité de la personne puisse exister. Les souffrances peuvent même redoubler d’intensité dès lors que ces personnes ont de grandes responsabilités car, très souvent, on leur demandera de faire preuve de créativité, de motivation accrue, de talents plus forts… On leur demandera d’exprimer toute leur personnalité ! Cette situation peut friser la schizophrénie dès lors qu’on attend que ces personnes soient garantes d’un modèle culturel dominant et, dans le même temps, qu’elles affichent ce qu’elles ont de plus personnel. Cela revient ni plus ni moins à afficher en quoi elles sont atypiques et souvent différentes ou décalées par rapport au système ambiant. Dans ce marécage des contradictions humaines, certaines personnes peuvent se perdre. Le «  burnout  » pourra être l’unedesvoiesdesortiedeproblématiques insolubles. COMMENT GÉRER SON ATYPIE ET EN TIRER PROFIT L’atypie serait elle donc porteuse de mal- être, voire de maladies  ? Afficher une atypie s’accompagne-t-il systématique- ment d’une certaine torture mentale ou psychologique ? Ne voit on pas des êtres particulièrementatypiquesplutôtheureux et épanouis,  comme ces entrepreneurs qui ont fait de leur atypie une force considérable qui force le respect de tous ? Existe-t-il une clé précieuse qui ouvre tantôt la porte de l’atypie sur le ciel bleu et tantôt sur un ciel plus sombre ? Une telle clé pourrait bien être le leadership ! Si être leader consiste à affirmer ou imposer ses propres caractéristiques dans son environnement humain, alors les personnes qui y parviennent en sont plus à forcer l’admiration et l’adhésion de leur environnement même si elles ont pro- bablement dû « ferrailler » pour atteindre ledegréadéquatetdevenirforced’impact. Commentdéveloppe-t-onsonleadership ? Est-ce permis à tout le monde de le faire ? Là encore, il y a des clés et l’une d’entre elles est la connaissance de soi. À partir du moment où l’on peut se connaître en profondeur, on réalise déjà une bonne partie du chemin. Ensuite, le « jeu » con- siste à identifier en quoi nos caracté- ristiques profondes peuvent être utiles à nos congénères. Il ne reste plus alors qu’à trouver des opportunités et déceler les besoins des acteurs économiques sur lesquels s’appuyer pour dérouler tout l’écheveau des caractéristiques person- nellespouvantrendrelesservicesescomp- tés. Si tout cela est possible et réalisable pour chacun, il n’empêche que ce chemi- nement ressemble plus à un parcours du combattantqu’àunerandonnéetranquille surunchemindecampagne !Ceparcours du combattant peut être mené seul, mais il peut aussi être mené en étant accom- pagné par des personnes ayant précisé- ment comme talents d’amener toute per- sonne à gravir de belles montagnes. Ces personnes sont en quelque sorte des guides de haute montagne qui permettent aux atypies de chacun de former un pay- sage himalayen de toute beauté ! La réalisation de l’atypie de chacun ne va pas de soi, mais si l’on s’en donne les moyens, elle peut conduire à des nirvanas tant personnels que collectifs. Cette pers- pective est suffisamment motivante pour qu’on franchisse le pas et qu’on se décide à relever le challenge ! « Le système environnant fait constamment pression pour normaliser l’atypique, ce qui est un non-sens vu que c’est précisément l’atypie de la personne recrutée qui fait sa richesse ! » Stocklib/VladimirsPoplavskis Exprimer son atypie peut conduire à un équilibre personnel salutaire.