Beginners Guide to TikTok for Search - Rachel Pearson - We are Tilt __ Bright...
uni_05_Ardennais_20_03_15_03
1. LE FAIT DU JOURVENDREDI 20 MARS 2015
3
« Mon client n’est pas foncièrement malhonnête.
Il s’est essayé au métier de trader. Dans la première
année, ça a fonctionné. Il y a plus de personnes
qui se sont enrichies que de victimes déclarées. »
Me
Harir, avocat du mis en cause
LA PHRASE
5ans La peine de prison
maximale encourue
pour ce délit, ainsi que
375 000 € d’amende et
la confiscation de droits.
LE CHIFFRE
▶ En 1920, cet Italien propose
des taux d’intérêt délirants
à tout Boston et devient
millionnaire en six mois. Mais
parmi les 30 000 épargnants
séduits, la rumeur circule vite
que son montage financier
est truqué. Sur les 15 millions
de dollars investis, un tiers
seulement fut redistribué.
CHARLES PONZI, PIONNIER DE LA FRAUDE
A
u départ, il y eut le soupçon
d’un banquier face à des flux fi-
nanciers suspects. Ceux-ci
concernaient des transferts de fonds
entre plusieurs entreprises déte-
nues par un même homme. L’em-
ployé de banque alerta sa hiérarchie,
laquelle, conformément à la loi, fit
part de ces découvertes à Tracfin,
l’organisme du ministère de l’Éco-
nomie et des Finances chargé de la
lutte contre le blanchiment d’ar-
gent.
Des investigations furent ainsi ini-
tiées à l’encontre de Lionel Louis,
natif des Ardennes et issu d’une « fa-
mille honorable et assez riche », selon
le procureur des Ardennes, Daniel
Bouriaud. Parmi les nombreuses en-
treprises gérées par cet homme,
deux se trouvent au cœur du centre-
ville carolomacérien, dans la rue du
Moulin : une galerie d’art à l’exis-
tence éphémère et un magasin de
vêtements de femme. Lionel Louis
détenait une autre affaire à Sedan.
« C’est quelqu’un qui montait dans le
patronat local », ajoute le procureur.
Spécialisé dans
les « conseils de gestion »
Ce sont deux autres Eurl (entre-
prise unipersonnelle à responsabili-
té limitée) qui vont concentrer l’at-
tention des enquêteurs de la divi-
sion financière du service régional
de police judiciaire (SRPJ) de Reims :
la Louis Scalping et la Compagnie fi-
nancière Brogniart. Celle-ci, selon
societe.com, était « spécialisée dans
le secteur d’activité du conseil pour les
affaires et autres conseils de gestion ».
Elle n’avait jamais obtenu l’agré-
ment nécessaire de la part des auto-
rités financières.
« C’est quelqu’un qui a joué à l’entre-
preneur qui réussit et qui a fini par se
prendre les pieds dans le tapis. Lors-
qu’il a eu des problèmes de trésorerie,
il a trouvé une solution qui était plutôt
commode au départ avant d’être pris
dans un engrenage », commentait le
procureur. « La solution plutôt com-
mode » ? Aller démarcher, grâce à
son entregent et ses relations, des
particuliers généralement fortunés
et les persuader qu’il pouvait les en-
richir grâce à son expertise finan-
cière.
« Il garantissait des rendements su-
périeurs à ce que pouvaient proposer
les autres banques, de l’ordre de 10 %
ou plus, précisait une source proche
de ce dossier. C’est toujours surpre-
nant que des gens puissent encore
croire à de telles choses… »
Le mode opératoire de cette escro-
querie – présumée – n’avait rien de
révolutionnaire : depuis les années
1920, ce type de montage fraudu-
leux a même un nom, le « système
de Ponzi » – du nom de celui qui,
dans les années 1920, mit au point la
première pyramide financière de
l’histoire. La viabilité du système
consiste à rémunérer les investisse-
ments des clients par les fonds pro-
curés par les nouveaux entrants.
« Au bout d’un moment, ce système
devient impossible à tenir », expli-
quait, hier, le procureur Bouriaud.
« Son mode de fonctionnement a duré
une dizaine d’années, ce n’est que sur
les trois dernières que la machine s’est
enrayée, rappelait Me
Ahmed Harir,
l’avocat de Lionel Louis. C’est quel-
qu’un qui n’a pas voulu affronter
l’échec. »
Des victimes issues
de la « sphère familiale »
Plusieurs plaintes ont déjà été re-
cueillies par les enquêteurs au cours
des derniers mois. La plupart pro-
viennent de la « sphère familiale » du
mis en cause, lequel aurait donc
profité de son patronyme « hono-
rable » afin de tenter de camoufler
ses tracas d’autoentrepreneur. Si le
nombre de victimes déclarées de-
meure peu important, les montants
évoqués par ces dernières sont à
chaque fois élevés – jusqu’à
700 000 euros. Le préjudice global
est estimé à deux millions d’euros,
somme qui, sous réserve de nou-
velles plaintes (lire par ailleurs), est
encore considéré comme « la partie
émergée de l’iceberg », par les enquê-
teurs.
Mardi 10 mars, Lionel Louis a été
interpellé et placé en garde à vue
durant 48 heures dans les locaux de
la PJ rémoise. Il aurait reconnu les
faits reprochés. Laissé libre et placé
sous contrôle judiciaire à l’issue de
ses auditions, il est poursuivi des
délits d’escroquerie et de banque-
route. Ses sociétés sont en cours de
liquidation judiciaire. Son procès se
tiendra le 13 avril devant le tribunal
correctionnel de Charleville-Mé-
zières.
MATHIEU LIVOREIL
ARDENNES
Une escroquerie à deux millions
Le mis en cause devra faire face aux juges du tribunal de Charleville-Mézières. Aurélien Laudy
Près de 370 000 euros de préjudice. C’est la somme
dont Thierry et Christophe, deux Parisiens travaillant
dans les télécommunications, estiment avoir perdu à
cause de Lionel Louis. Les deux hommes avaient fait le dé-
placement à Sedan, hier, pour déposer plainte à la gendar-
merie contre ce « Madoff à l’ardennaise ». « C’est un voisin
de palier, un trader, qui me l’a présenté, il y a dix ans », ra-
conte Thierry. Ils se seraient rencontrés une vingtaine de
fois durant cette période. Souvent à Paris, sur les Champs
Élysées, où l’escroc présumé avait un bureau. Parfois à Se-
dan, où Thierry se souvient l’avoir vu au volant d’une voi-
ture de luxe. « Il avait réussi à me mettre en confiance. Il uti-
lisait l’actualité pour justifier son modèle financier. Il a at-
tendu dix ans pour me coincer. L’année dernière, il a réussi à
me soutirer de l’argent de la vente d’un appartement. Il vou-
lait du liquide pour le mettre à l’abri dans le coffre d’une
banque Suisse. » Lorsque, sur les recommandations de son
conseiller fiscal, Thierry demande à Lionel Louis de fer-
mer son compte, ce dernier aurait essayé de l’en dissua-
der. « Il m’a incité à frauder le fisc. Comme ça, je me retrou-
vais en situation illégale et j’aurais été dans l’impossibilité de
porter plainte contre lui », estime Thierry. Lionel Louis au-
rait ensuite organisé son indisponibilité prétextant des
problèmes de santé, un déménagement… En parallèle, la
banque suisse assure n’avoir aucune trace de lui. « C’est
vraiment le profil de l’escroc. Il utilisait même sa famille
comme bouclier pour faire croire à son honnêteté. » Si Thier-
ry et Christophe ont peu d’espoir de récupérer leur ar-
gent, ils espèrent au moins que les plaintes en cours per-
mettront de confondre celui qu’ils considèrent comme un
escroc et d’éviter à d’autres victimes de se faire avoir.
LÆTITIA VENANCIO
Deux autres plaintes déposées hier à Sedan
Interpellé par la PJ rémoise, cet entrepreneur aurait abusé de la crédulité de personnes
fortunées en promettant des taux d’intérêt faramineux. Son procès est fixé au 13 avril.
▶ Mardi dernier, Lionel Louis,
sans antécédent judiciaire, était
interpellé par le SRPJ de Reims.
▶ Le mis en cause, jugé
le 13 avril prochain, est poursuivi
des délits d’escroquerie
et banqueroute.
▶ Pour masquer ses difficultés
d’autoentrepreneur, il aurait
convaincu des particuliers,
souvent proches de sa famille,
de lui confier la gestion de leur
patrimoine.
LES FAITS Le système aurait consisté
à rémunérer les investissements
des clients par les fonds
procurés par les entrants