C’est une première victoire. Katia a été libérée le 10 octobre, mais deux Pussy Riot restent en prison. Comment continuer le combat ? Enquête par Nathalie Dolivo
Charlotte et bernard cassez : la fin d'un cauchemar
Pussy riot les dessous d'une libération
1. Pussy Riot, les dessous d'une libération
C’est une première victoire. Katia a été libérée le 10 octobre, mais deux Pussy Riot restent en
prison. Comment continuer le combat ? Enquête par Nathalie Dolivo
Par Nathalie Dolivo - Le 11/10/2012
Dans l’affaire Pussy Riot, le procès en appel qui s’est tenu le 10 octobre dernier a livré
un épilogue inattendu : Ekaterina Samutsevitch, 30 ans, a été libérée sur le champ.
Tandis que les deux autres jeunes femmes, Nadejda Tolokonnikova, 22 ans et Maria
Alekhina, 24 ans, voyaient leur peine de deux ans d’emprisonnement confirmée.
Comment comprendre ce dénouement ? Interview de Zoïa Svetova*, journaliste
indépendante, figure des droits de l’homme en Russie. Elle et Nathalie Dolivo a suivi de
près le procès et a pu, à plusieurs reprises, visiter les trois punkettes en prison à Moscou.
Nathalie Dolivo. Pourquoi Katia a-t-elle été libérée ?
Zoïa Svetova. Katia Samutsevitch a changé sa ligne de défense. Son avocate a plaidé le fait
qu’elle n’avait pu participer à l’action pusiqu’elle avait été évacuée de la Cathédrale avant
même le début de la prière punk. Katia a pris ses distances même si, une fois sortie du
tribunal, elle affirmait que la solidarité entre elles trois était sans faille. Mais pendant sept
mois, la stratégie du pool d’avocats, c’était « les trois filles sont innocentes toutes les trois.
C’est un procès purement politique, car elles ont critiqué le pouvoir ». Avec le changement
d’avocat, Katia s’est nettement distinguée de leur position. Bien sûr, il est réjouissant qu’elle
ait été libérée. Mais anormal que les deux autres, Nadia et Macha, soient encore en prison,
d’autant qu’elles ont des enfants en bas âge.
Nathalie Dolivo. Peut-on parler d’une rupture entre elles ? Sont-elles divisées ?
Zoïa Svetova. Non, elles disent que non. Mais je ne crois pas en une justice indépendante en
Russie. Je pense que cette libération, c’est une décision à destination de l’Occident : pour faire
croire que la justice est indépendante. Ce qui est sûr, c’est que les familles des Pussy Riot sont
divisées. Hier j’ai eu la mère de Macha Alekhina au téléphone. Elle disait : « il faut changer
les avocats, ils ne parlent que de politique, ils n’ont pas la bonne stratégie ». Je ne sais pas si
les filles sont divisées, mais leur entourage l’est.
Nathalie Dolivo. Où vont être affectées Nadejda et Maria ?
Zoïa Svetova. On ne le sait pas encore. C’est un secret. On le saura uniquement quand elles
seront effectivement mutées dans les colonies pénitentiaires, à priori dans dix jours, peut-être
trois semaines. Comme le veut la loi, les familles seront prévenues par lettres ou recevront un
coup de fil quand les prisonnières seront arrivées sur place. Il y a 64 colonies pénitentiaires en
Russie. Selon la loi, elles doivent être envoyées au maximum à une nuit de train de Moscou.
* auteure de « Les innocents seront coupables », édition Bourin.