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Note pe´dagogique
Veille sanitaire : outils, fonctions, processus
‘‘Veille sanitaire’’: Tools, functions, process of healthcare monitoring in France
D. Eilstein *, G. Salines, J.-C. Desenclos
Institut de veille sanitaire, 12, rue du Val-d’Osne, 94415 Saint-Maurice, France
Rec¸u le 28 novembre 2011 ; accepte´ le 6 mars 2012
Abstract
In France, the term ‘‘veille sanitaire’’ is widely used to designate healthcare monitoring. It contains, however, a set of concepts that are not
shared equally by the entire scientific community. The same is true for activities that are part of it, even if some (surveillance for example) are
already well defined. Concepts such as ‘‘observation’’, ‘‘vigilance’’, ‘‘alert’’ for example are not always clear. Furthermore, the use of these words
in everyday language maintains this ambiguity. Thus, it seemed necessary to recall these definitions as already used in the literature or legislation
texts and to make alternative suggestions. This formalization cannot be carried out without thinking about the structure of ‘‘veille sanitaire’’ and its
components. Proposals are provided bringing out concepts of formated ‘‘veille’’ (monitoring) and non-formatted ‘‘veille’’ (monitoring).
Definitions, functions, (methods and tools, processes) of these two components are outlined here as well as the cooperative relationship they
sustain. The authors have attempted to provide the scientific community with a reference framework useful for exchanging information to promote
research and methodological development dedicated to this public health application of epidemiology.
# 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Epidemiologic surveillance; Vigilance; Epidemic intelligence; Concepts
Re´sume´
Aujourd’hui, en France, le terme « veille sanitaire » est largement utilise´. Il recouvre, cependant, un ensemble de notions qui ne font pas toujours
consensus. Il en va de meˆme pour les activite´s qui lui sont rattache´es, meˆme si certaines comme la surveillance font de´ja` l’objet de de´finitions
accepte´es par tous. Les concepts d’observation, de vigilance, d’alerte, par exemple, n’ont pas toujours e´te´ bien cerne´s. Par ailleurs, l’utilisation de
ces mots dans le langage courant entretient cette ambiguı¨te´. Aussi, nous a-t-il paru ne´cessaire de rappeler ces de´finitions lorsqu’elles existaient dans
la litte´rature ou les textes le´gislatifs et de faire des suggestions dans le cas contraire. Cet effort de formalisation ne pouvait eˆtre mene´ a` bien sans une
re´flexion sur la structuration de la veille sanitaire et de ses composantes. La` aussi, des propositions sont faites, faisant e´merger les notions de veilles
« pre´formate´e » et « non pre´formate´e » : des de´finitions, des fonctions et des composantes de fonctionnement (me´thodes et outils, processus) de ces
deux modalite´s de la veille sanitaire sont propose´es ici ainsi que les rapports de coope´ration qu’elles entretiennent. L’intention est de fournir a` la
communaute´ scientifique un cadre de re´fe´rence permettant d’e´changer les informations tire´es de l’activite´ de veille, mais aussi de promouvoir des
travaux de recherche et de de´veloppement me´thodologiques de´die´s a` cette application de l’e´pide´miologie en sante´ publique.
# 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
Mots cle´s : Surveillance e´pide´miologique ; Vigilance ; Veille sanitaire ; Concepts
1. Introduction
En France, les notions de surveillance, de veille, de
vigilance, d’observation ne font pas, ou du moins pas toutes,
l’objet d’un consensus quant a` leur de´finition et leur champ. De
plus, elles n’ont pas e´merge´ de la meˆme fac¸on. La surveillance
dite e´pide´miologique ou de sante´ publique, est, en effet, la
seule qui dispose d’une de´finition fonde´e sur une approche
conceptuelle [1,2]. La vigilance, quant a` elle, a e´te´ spe´cifie´e
d’un point de vue re´glementaire et a suscite´ une tentative
de de´finition e´pide´miologique [3] ; dans l’un et l’autre cas,
cette de´finition n’e´puise pas le contenu de cette activite´ [1]. Ces
Disponible en ligne sur
www.sciencedirect.com
Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : d.eilstein@invs.sante.fr (D. Eilstein).
0398-7620/$ – see front matter # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2012.03.005
notions sont, de plus, au cœur d’enjeux de territoires impliquant
les diffe´rentes agences de se´curite´ sanitaires. Ces enjeux
pourraient eˆtre aussi au cœur de rapports de force
professionnels : la vigilance, s’appuyant sur la notification
spontane´e, sans « regard » sur la population et privile´giant
l’utilisation de crite`res d’imputabilite´ individuels, serait ainsi
l’outil du clinicien alors que la surveillance, fonde´e sur la
dimension populationnelle de l’observation et de l’analyse des
risques, appartiendrait en propre a` l’e´pide´miologiste. Ainsi,
selon certains, la vigilance est incluse dans la surveillance, pour
d’autres, c’est l’inverse (la vigilance serait un compose´ de
« veille » et de surveillance applique´e a` un domaine particulier),
d’autres, enfin, pensent qu’elles sont juxtapose´es, voire ont une
partie commune. . . Les E´tats-Unis, en revanche, ne font pas la
diffe´rence entre ces deux notions (on parle de surveillance of
adverse effects). L’observation est encore plus mal de´finie,
d’autant plus que la confusion est, en apparence, entretenue
institutionnellement depuis l’e´mergence des observatoires de
sante´ dont l’activite´ serait proche de la surveillance e´pide´mio-
logique [4]. Quant a` la veille sanitaire qui s’est construite plus
re´cemment [5], elle est tout naturellement contrainte de voir son
objet et son pe´rime`tre flous et variables selon les e´poques et les
e´ve´nements. Ainsi, sans eˆtre confondues, ces notions n’en sont-
elles pas moins souvent difficiles a` se´parer (l’observation et la
surveillance, la veille et l’alerte, la veille et la vigilance, par
exemple) et a` situer pre´cise´ment dans le champ de la sante´
publique et dans celui de la se´curite´ sanitaire [5,6].
Le recours au(x) dictionnaire(s) n’aide pas vraiment,
beaucoup de de´finitions se renvoyant l’une a` l’autre : la
surveillance, comme « ensemble des actes par lesquels on
exerce un controˆle suivi. . . », impliquerait « une observation de
la part de celui qui observe et une visibilite´ de la part de celui
qui est surveille´ ». Surveiller serait «. . . veiller particulie`rement
et avec autorite´ sur une personne ou sur une chose. . . observer
attentivement. . . ». L’observation se confondrait avec « l’acti-
vite´ de celui qui. . . examine des faits et les mesure ». La veille
correspondrait a` un « moment sans sommeil » et veiller serait
eˆtre vigilant. Quant a` la vigilance, elle serait une « surveillance
attentive sans de´faillance. . . »1
. Cela n’est pas surprenant car
les mots sont tre`s proches voire emboıˆte´s : ainsi, par exemple,
« surveiller » veut-il dire « sur-veiller » au sens de veiller
intense´ment ou « veiller sur » ?
La sante´ publique n’est pas le seul champ ayant recours a` la
veille. Cette dernie`re peut eˆtre technologique, environnemen-
tale, juridique ou re´glementaire, commerciale ou concurren-
tielle, strate´gique, me´diatique, entre autres. La fac¸on dont ces
autres disciplines la conc¸oivent est, d’ailleurs, assez proche,
dans le principe, de ce qu’est la veille sanitaire. Sont ainsi
retrouve´s les attributs « organise´ », « inte´gre´ », les composantes
« collecte », « traitement », « diffusion », « exploitation » de
l’information ainsi que la vocation a` re´agir face a` une (ou des)
menace(s), d’« explorer les possibles » et d’« anticiper ». En
matie`re d’acce`s a` l’information, certains utilisent l’image
« technique de commando » pour la veille versus l’activite´
d’« arme´e re´gulie`re » a` laquelle correspondrait le travail de
documentation [7] qui pourrait correspondre a` ce que nous
appelons la surveillance e´pide´miologique : cette dernie`re utilise
des techniques syste´matiques et me´thodiques alors que les
me´thodes de la veille se doivent d’eˆtre souples et diversifie´es.
Le langage courant fait largement usage de ces notions.
Surveiller le lait en train de bouillir s’adresserait a` l’e´ve´nement
« de´bordement » (variable valant 0 ou 1) ou au niveau du lait
(variable continue), par exemple. La vigie sur un bateau, exerce
une. . . vigilance : ce n’est pas de la surveillance car elle ne se
focalise pas sur un type d’e´ve´nement, mais elle se veut sensible
a` tout ce qui peut arriver, a` tous les e´ve´nements surgissant dans
un « champ » particulier, en l’occurrence l’horizon (la vigie ne
s’occupe pas de ce qui se passe sur le bateau car il y a, pour cela,
de´ja` un homme de quart a` la barre, de´ja` quelqu’un a` la chambre
des machines etc.). La vigilance serait ainsi une activite´ de
veille « ouverte ». La marche du randonneur alterne activite´s de
vigilance (la plupart du temps, l’e´tat d’attention n’est pas
focalise´) et de surveillance s’il aborde un terrain plus difficile.
Le meilleur exemple de la notion de veille dans la vie courante
est celui du veilleur de nuit. Ce dernier fait sa ronde a` intervalle
re´gulier, passe par des endroits donne´s et effectue des
ve´rifications programme´es et, ainsi, effectue une activite´ de
surveillance. Mais, de fac¸on continue, il est attentif a` tout ce qui
peut survenir a` l’inte´rieur du pe´rime`tre dont il a la
responsabilite´ et, en cela, exerce une vigilance. La veille est
alors la combinaison des deux activite´s. Au bout du compte, le
langage courant semble opposer une activite´ de veille cible´e, la
surveillance, a` une activite´ de veille non cible´e a priori, la
vigilance.
Face a` ces difficulte´s, cet article a pour objectif de proposer
un cadre conceptuel relatif a` la veille sanitaire, de de´crire
l’organisation de celle-ci et d’identifier ses composantes, de
donner les de´finitions des diffe´rentes entite´s mentionne´es ci-
dessus. Cette approche doit aider a` dissiper la confusion qui
caracte´rise ces notions et, par-la`, rationaliser la mise en place
des syste`mes de veille et de surveillance et leurs sous-
ensembles ainsi que leur analyse et leur e´valuation.
Avant de proposer un cadre conceptuel de la veille sanitaire
proprement dite, les notions d’observation, de surveillance et de
vigilance telles qu’on les entend aujourd’hui seront aborde´es
car elles sont des composantes de la veille. Le cadre conceptuel,
outre des propositions de structuration de ces notions, pre´cisera
les outils de la veille sanitaire.
2. Observation, surveillance, vigilance, veille
2.1. Observation
L’observation prend diffe´rents sens selon les auteurs :
« recueil d’information. . . ayant pour objectif la gestion du
syste`me de sante´ et son ame´lioration re´gulie`re, a` travers l’e´tude
de phe´nome`nes de sante´ a` moyen et long terme » pour le Haut
comite´ de sante´ publique [1]. Elle peut eˆtre, selon d’autres, une
1
Ces de´finitions sont extraites de trois sources : le dictionnaire encyclope´-
dique Quillet, e´dition 1977, le Petit Robert, e´dition 2004 et l’encyclope´die
philosophique universelle. Les notions philosophiques. Dictionnaire 2. PUF, 1e
e´d. 1990.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411402
activite´ de recueil, d’agre´gation, d’analyse de donne´es
sanitaires et de synthe`se et, parfois, de projection dans le
futur [4] et, donc, recouvrir la notion de surveillance. Les
meˆmes auteurs e´crivent que les observatoires produisent une
information re´gionale pertinente sur des temps tre`s courts,
permettant de donner des re´ponses rapides a` une e´chelle locale.
Elle pourrait eˆtre, aussi, un recueil « tous azimuts »
d’informations utiles a` la gestion du syste`me de sante´ sans
ne´cessite´ d’action imme´diate, comme, par exemple, la
mortalite´ par tumeurs de 1995 a` 1997 ou la proportion de
fumeurs dans une classe d’aˆge donne´e [2]. Si la surveillance,
comme on le verra dans le paragraphe suivant, diffe`re
sensiblement de l’observation, les statistiques de sante´ – et
donc l’observation – peuvent eˆtre la base d’un syste`me de
surveillance de`s lors qu’elles sont suivies de manie`re
syste´matique et continue dans une perspective d’action de
sante´ publique [2]. L’observation, finalement, est aussi un outil
qui contribue a` la surveillance en ce qu’elle met en place des
outils comme l’extraction de donne´es a` partir des bases de´ja`
constitue´es ou comme les enqueˆtes afin de re´pondre a` des
questions ou des demandes pre´cises concernant la distribu-
tion – dans le temps et l’espace, et selon la nature de la
population – des faits sanitaires (pathologies et exposition a` des
facteurs de risque).
2.2. Surveillance e´pide´miologique
Stephen B. Thacker, en 1996, de´finit la surveillance de sante´
publique (ou surveillance e´pide´miologique) de la fac¸on
suivante : Public health surveillance (sometimes called
epidemiologic surveillance) is the ongoing and systematic
collection, analysis, and interpretation of outcome-specific
data essential to the planning, implementation, and evaluation
of public health practice closely integrated with the timely
dissemination of these data to those who need to know. The final
link of the surveillance chain is the application of these data to
the control and prevention of human disease and injury [8].
Cela peut se traduire, de fac¸on plus concise : « processus
continu et syste´matique de collecte, d’analyse et d’interpre´ta-
tion de donne´es pertinentes, diffuse´es en temps opportun a` ceux
qui en ont besoin, en vue d’une action de sante´ publique ». Cette
de´finition est tre`s proche de celle adopte´e par les Centers for
Disease Control and Prevention (CDC), huit ans plus toˆt. Elle
ge´ne´ralise la notion de donne´es au-dela` du champ purement
sanitaire et pre´cise l’utilisation par « ceux qui en ont besoin »
des informations issues de la surveillance. Cette de´finition
rajoute, enfin, a` celle de Benenson [9] qui e´tait de´ja`
relativement comple`te, la notion d’information ne´cessaire a`
la pre´vention.
Il est possible de structurer cette de´finition en la pre´cisant, de
la fac¸on suivante :
 processus permanent et organise´ :
 de collecte des donne´es pertinentes relatives aux :
– expositions aux facteurs dont les effets sanitaires
de´le´te`res ou protecteurs, sont suspecte´s ou reconnus,
– e´ve´nements de sante´,
– caracte´ristiques des populations a` risque,
– donne´es de susceptibilite´ ou de vulne´rabilite´ individuel-
les ou collectives aux facteurs cite´s plus haut,
– interventions ;
Cette collecte peut eˆtre soutenue si besoin est par des
enqueˆtes ou des e´tudes ponctuelles ou re´pe´te´es.
 de fabrication d’indicateurs a` partir de ces donne´es puis a`
partir des relations entre ces indicateurs dans le cas ou` ces
relations existent et sont e´tablies2
,
 d’analyse, de suivi et d’interpre´tation de ces indicateurs,
 de diffusion des re´sultats des analyses et de leur
interpre´tation en temps opportun a` ceux qui en ont besoin ;
 en vue :
 d’une information, de la de´tection ou de l’anticipation de
modification de l’e´tat de sante´ des populations (risques ou
be´ne´fices),
 d’une action de sante´ publique :
– de controˆle,
– de pre´vention des expositions et/ou des maladies et de
l’e´valuation de ces actions.
La surveillance des maladies est, ainsi, un cas particulier
focalise´ sur la dynamique des maladies, de la surveillance
e´pide´miologique.
Rappelons, comme dit plus haut, qu’il existe deux grands
types de surveillance, selon le niveau d’agre´gation de
l’information dont on veut disposer : la surveillance spe´cifique
comme, par exemple, la surveillance des intoxications
oxycarbone´es [10], des effets sanitaires de la pollution
atmosphe´rique [11], des infections nosocomiales [12]3
, de la
consommation hospitalie`re d’antibiotiques [13]4
, des cancers,
entre autres, et la surveillance non spe´cifique ou surveillance
syndromique, comme le syste`me Sursaud1
[14,15].
2.3. Vigilances
Nous employons le pluriel « vigilances » a` dessein car il
n’existe pas de de´finition de la vigilance en sante´ publique a`
proprement parler. Les diffe´rentes activite´s relevant de la
vigilance ont e´te´, sinon de´finies, plutoˆt encadre´es par le Code de
la sante´ publique, au fur et a` mesure des besoins. En France, les
dispositifs de vigilance incluent la pharmacovigilance (articles
R. 5121-150, R. 5121-159. . .), l’he´movigilance (articles L.
1221-13, R. 1221-22. . .), la biovigilance (article R. 1211-29), la
mate´riovigilance (articles L. 5212-1, R. 5212-1), la re´actovi-
gilance (article R. 5222-1), la cosme´tovigilance (article L.
5131-9), la toxicovigilance (article R. 1341-12), l’addictovi-
gilance, la vigilance alimentaire (article R. 1323-1, article R.
1323-2), la vigilance relative a` l’assistance me´dicale a` la
procre´ation (article R. 2142-40), la vigilance exerce´e sur les
produits de tatouage (article R. 513-10-9), la radiovigilance. . .
2
Cette phase n’est pas implicitement contenue dans la de´finition de Thacker,
mais nous donnons cette pre´cision car elle nous semble fortement caracte´riser la
notion de surveillance.
3
Rapport disponible a` http://www.invs.sante.fr.
4
Rapport disponible a` http://www.invs.sante.fr.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 403
Ainsi, aujourd’hui, l’usage du terme « vigilance » est re´serve´
a` une fonction de vigilance tourne´e vers des produits ou des
agents issus des activite´s humaines : les me´dicaments, le sang,
les cosme´tiques, des toxiques, des rayonnements ionisants. . .
L’attention est porte´e sur les effets potentiellement de´le´te`res de
ces produits sur la sante´ humaine. La toxicovigilance occupe
une place un peu particulie`re car elle s’inte´resse a` tout
e´ve´nement de sante´ connu ou nouveau, meˆme s’il n’est pas
rattache´ a priori a` une substance ou une composition de
substances toxiques. En fait, elle ope`re, en partant du point de
vue que toute manifestation pathologique non directement
identifie´e comme d’origine infectieuse ou comme e´tant
rattache´e a` une autre vigilance peut eˆtre d’origine toxique
(cf. l’augmentation des malformations conge´nitales de
l’appareil uroge´nital masculin chez les fils d’agriculteurs
[16,17]).
Notons que, souvent, l’usage du terme vigilance est plus
restrictif car resserrant le pe´rime`tre de cette spe´cialite´ autour
des seules activite´s du syste`me de soins (« effets inattendus ou
inde´sirables re´sultant de l’activite´ me´dicale ») et s’approche du
concept de surveillance (« syste`me », « standardise´s », « il
s’agit d’un syste`me de surveillance e´pide´miologique des effets
inattendus ou inde´sirables re´sultant de l’activite´ me´dicale »,
etc.) [3,18]5
.
2.4. Veille sanitaire
De meˆme que pour la vigilance et contrairement a` la
surveillance, il n’existe pas de de´finition largement admise de la
veille sanitaire, bien que ce terme soit souvent utilise´, comme,
par exemple, dans le nom de l’institut auquel a e´te´ confie´e la
mission e´ponyme. Cependant une de´finition de la veille
sanitaire a e´te´ propose´e re´cemment en re´fe´rence a` l’e´mergence
du concept de se´curite´ sanitaire dans les pays de´veloppe´s
(France, Europe, Ame´rique du Nord) puis au niveau mondial
[5]. Le contenu de la veille s’est de´termine´ progressivement par
enrichissement de la surveillance e´pide´miologique (adjonction
des notions de vigilance, d’alerte. . .), enrichissement voulu en
re´ponse aux proble`mes de sante´ publique des anne´es 1990 [5].
Cette e´volution, relativement complexe, n’a pas toujours
permis de faire la part des choses entre les notions de
surveillance et d’alerte [19].
La traduction anglo-saxonne du mot « veille » n’existe pas.
Une notion approchante sinon identique est l’epidemic
intelligence. Le concept a e´te´ e´labore´ par Joseph W. Mountin
et mis en œuvre par Alexander D. Langmuir [20]. Les CDC ont
repris cette approche a` leur compte en cre´ant l’epidemic
intelligence service qui est a` la fois une activite´ et une
formation d’e´pide´miologie applique´e (a` la sante´ publique). La
de´finition de l’epidemic intelligence selon l’European Centre
for Disease Prevention and Control est the process to detect,
verify, analyze, assess and investigate public health events that
may represent a threat to public health. Providing early
warning signals is a main objective of public health
surveillance systems6
. Cela peut eˆtre traduit comme « le
processus de de´tection, de ve´rification, d’analyse, d’e´valuation
et d’investigation de tout e´ve´nement qui pourrait repre´senter un
risque pour la sante´ publique ». Cette fonction qui de´passe la
notion de surveillance, est organise´e en syste`me, ciblant une
question de sante´ relativement de´finie (les maladies infectieu-
ses) et a pour objectif quasi-unique de produire des alertes le
plus toˆt possible.
2.4.1. L’epidemic intelligence
La notion d’epidemic intelligence ou de global public health
intelligence recouvre l’ensemble des activite´s permettant
d’identifier pre´cocement des risques sanitaires potentiels, de
ve´rifier leur re´alite´, de les e´valuer et de re´aliser les
investigations ne´cessaires pour les documenter [21,22]. Elle
repose sur deux me´canismes distincts, l’un fonde´ sur le
traitement d’indicateurs, l’autre sur la prise en compte
d’e´ve´nements et chacun d’eux se de´roule en cinq e´tapes
(Fig. 1). Les sources d’information alimentant ces deux
composantes sont de natures diverses, allant des bases de
donne´es sanitaires classiques (mortalite´, par exemple) a` la
veille scientifique et me´diatique en passant par la consomma-
tion de me´dicaments, les signalements par les personnels de
sante´ d’e´ve´nements inhabituels, la surveillance non spe´cifique
ou syndromique et la veille internationale [23]. Cette activite´
qui fait l’objet, depuis une soixantaine d’anne´es de´ja`, d’une
formation par les CDC [20], est proche de l’activite´ de veille
sanitaire (voir ci-dessous, « La veille sanitaire proprement
dite »), mais est fortement oriente´e vers l’alerte [24,25].
Systèmes de
surveillance basés sur
des indicateurs
Systèmes de
surveillance basés sur
des événements
Données Événements
Signal
Alerte
Action
Évaluation
Réception
Filtrage
Validation
Investigation
Collecte
Analyse
Interprétation
Communication
PUBLIC GÉNÉRAL OU
CIBLÉ
Fig. 1. Cadre conceptuel de l’epidemic intelligence.
(Extrait et traduit de [21]).
5
La toxicovigilance, l’addictovigilance, la cosme´tovigilance ne re´pondent
pas a` cette de´finition restrictive.
6
http://www.ecdc.europa.eu/en/activities/epidemicintelligence/Pages/Acti-
vities_EpidemicIntelligence.aspx.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411404
2.4.2. La veille sanitaire proprement dite
Meˆme si l’on ne dispose pas, a` proprement parler, d’une
de´finition acade´mique de la veille, il est possible, ne´anmoins,
de dire qu’aujourd’hui, elle peut eˆtre conside´re´e comme une
activite´ visant a` rassembler et a` analyser de manie`re pre´coce et
permanente, dans une perspective d’action de sante´ publique,
un ensemble d’informations sur les risques sanitaires connus ou
inconnus [5,23]. On peut, ainsi e´voquer l’augmentation brusque
de la fre´quence du cancer de la thyroı¨de depuis les anne´es 1980
[26] et le syndrome he´molytique et ure´mique (SHU) lie´ a` un
sous type inhabituel d’Escherichia coli ente´rohe´morragique,
plus re´cemment. Pour cela, elle doit :
 repe´rer et/ou suivre des e´ve´nements sanitaires ou
« environnementaux » (exposition a` des facteurs de risque)
connus dans une population (modification de tendance dans
le temps et dans l’espace), notamment par le biais des
syste`mes de surveillance ;
 faciliter, organiser le signalement d’e´ve´nements sanitaires ou
environnementaux inhabituels voire inconnus et proce´der a`
leur analyse syste´matique afin d’identifier les menaces
sanitaires au plus toˆt ;
 de´tecter toute menace e´mergente pour la sante´ en se fondant
sur des syste`mes de surveillance non spe´cifique ;
 s’inte´resser aux menaces pour la sante´ qui surviennent dans
l’espace international (veille internationale).
Sa finalite´ est d’informer les de´cideurs sur l’occurrence de
ces menaces et de produire des recommandations d’action ou
de gestion envisageables pour les maıˆtriser. La communication
au public et aux professionnels sur ces menaces incombe aux
autorite´s ministe´rielles. La veille sanitaire, ne se re´duit pas a` un
(ou des) syste`me(s) de surveillance, mais a` une gestion de
l’information sanitaire par de multiples approches, dans une
perspective de gestion et de maıˆtrise, par le de´cideur, des
risques pour la sante´, lie´s l’activite´ humaine [5,23].
3. Approche conceptuelle de la veille sanitaire :
propositions
Certains me´canismes neurosensoriels ou` l’on trouve les
contrastes « perception passive »/« perception active » et
perception non spe´cifique/perception spe´cifique peuvent eˆtre
utilise´s ici comme mode`les : le « voir » des baˆtonnets de la
re´tine et le « regarder » (les coˆnes), l’« entendre » et
l’« e´couter » (l’attention flottante des analystes entre dans la
cate´gorie de perception passive, graˆce a` laquelle le the´rapeute
« peut conserver dans sa me´moire une multitude d’e´le´ments en
apparence insignifiants dont les corre´lations ne ressortiront
qu’ulte´rieurement » [27]). Cela permet de laisser se de´gager,
finalement, ce qui est important, une extraction du signal, en
quelque sorte. Sur la base de ce mode`le, il est possible de
conside´rer que la « perception » de l’e´tat de sante´ de la
population ainsi que de ses de´terminants repose sur deux
me´canismes, l’un relativement peu contraint ou « non
pre´formate´ », l’autre fortement structure´. On retrouve, ici,
l’opposition des concepts de « rhizome » et de « racine » – ou
d’« arbre » – propose´e par Gilles Deleuze et Fe´lix Guattari [28].
La veille sanitaire utilise ces deux approches perceptives.
Classiquement, la notion de veille sanitaire repose sur la
de´tection et l’analyse d’un signal pouvant repre´senter une
menace pour la sante´ publique. L’objectif est d’anticiper les
conse´quences du danger pressenti afin d’alerter et d’aider a` la
de´cision [5,29]. Certains outils sont emprunte´s a` la surveillance
e´pide´miologique, d’autres a` la vigilance au sens commun. La
surveillance peut eˆtre spe´cifique ou non spe´cifique. La
premie`re, surveillance spe´cifique, est fonde´e sur des
indicateurs : mortalite´, incidence, admissions hospitalie`res,
consommation me´dicamenteuse, etc. Elle est tre`s focalise´s,
c’est-a`-dire correspondant a` des pathologies pre´cises [30–33].
La seconde, appele´e surveillance syndromique, repose sur des
indicateurs de meˆme nature a priori, mais non spe´cifiques,
notamment : mortalite´, passages aux urgences toutes causes
confondues, selon l’aˆge, par exemple [34]. Remarquons qu’il
n’y a pas de saut qualitatif entre ces deux types de surveillance,
mais, plutoˆt, un « gradient de pre´cision » allant du moins au
plus spe´cifique, ce qui fait que, parfois, la distinction entre ces
deux modalite´s n’est pas dichotomique. Quant a` la vigilance,
elle ne se focalise pas, a` proprement parler, sur des indicateurs
(outils pre´formate´s), mais repe`re des e´ve´nements (ou des
donne´es) « anormaux » ou plutoˆt perc¸us comme tels. Si la
difficulte´, dans ce cas, porte sur ce que l’on entend par
« e´ve´nement anormal », un ensemble de crite`res permet,
toutefois, d’en faire l’analyse : caracte`re inhabituel, se´ve´rite´,
tendance a` diffuser, absence de re´ponse aux mesures de prise en
charge habituelles.. [23].
3.1. Processus
3.1.1. Formalisation de la veille sanitaire
La veille se construit donc sur un triptyque (Fig. 2) :
 un me´canisme re´cepteur : la perception des signaux ;
 un me´canisme inte´grateur : l’analyse et l’interpre´tation ;
 un me´canisme effecteur : l’information et l’alerte.
La partie effectrice est relativement monolithique ; les
processus d’information et d’alerte sont assez reproductibles
d’un exemple a` l’autre et suivent, dans tous les cas, a` peu de
choses pre`s, la meˆme voie. Le contenu de l’information peut
varier selon l’interlocuteur, mais son me´canisme, lui, varie peu ;
celui de l’alerte est constant, a` la dimension temporelle pre`s :
alerte « imme´diate » ou alerte « pre´visionnelle ».
Il n’en est pas de meˆme pour la partie re´ceptrice qui pre´sente
plusieurs aspects que l’on peut classer selon deux axes :
 la nature des sources d’information qui peut eˆtre
« organisationnelle » ou « non organisationnelle » ;
 le me´canisme de re´ception de l’information qui peut eˆtre
« pre´formate´ » (« fortement structure´ ») ou « non
pre´formate´ ».
Par sources « organisationnelles », nous entendons les
organisations de´die´es a` la veille : agences re´gionales de sante´,
Direction ge´ne´rale de la sante´, re´seaux de surveillance (re´seau
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 405
de me´decins, de laboratoires. . .), hoˆpitaux, centres anti-
poison. . . Par sources « non organisationnelles », nous
entendons les signalements sur des e´ve´nements de sante´ par
les professionnels de sante´ et les individus de manie`re plus large
et la masse des productions d’informations textuelles d’origine
scientifique (les revues scientifiques ou la presse profession-
nelle, les congre`s, les se´minaires. . .), me´diatique (la presse
ge´ne´raliste) ou populationnelle (les associations de de´fense des
consommateurs, les associations de de´fense des patients. . .).
La notion de me´canisme « pre´formate´ » fait re´fe´rence a` la
surveillancee´pide´miologique (l’objet de la surveillance est lecas
pre´de´fini ou, plus exactement son substitut : l’indicateur ; les
me´thodes permettant d’analyser ce dernier sont pre´de´termine´es),
que la surveillance soit spe´cifique (intoxications oxycarbone´es,
effets sanitaires de la pollution de l’air, infections nosocomiales,
cancer de la thyroı¨de, par exemple) ou non spe´cifique comme le
syste`meSurSaUD1
.Lanotiondeme´canisme«nonpre´formate´ »
fait re´fe´rence a` la veille non structure´e comme pour les
malformations uroge´nitales du garc¸on ou le SHU, en tout cas, au
de´but du de´veloppement de ces deux alertes. Il est possible ainsi
de dire que le langage courant pousse a` appeler ce type de veille
« vigilance » ou « vigilance e´pide´miologique » ou « vigilance de
sante´ publique » (l’objet de la vigilance est le cas non pre´de´fini et
le me´canisme est la re´ception de signaux et la de´tection de
signaux anormaux7
),maiscettede´nomination est,de´ja` re´serve´e a`
la vigilance sur les produits issus des activite´s humaines
(pharmacovigilance, etc.). Aussi, garderons-nous le terme de
veille « non pre´formate´e ».
La veille sanitaire s’exerce sur des faits sanitaires (au sens
large : e´ve´nement de sante´, effets des de´terminants –
de´mographiques, e´conomiques, technologiques – de la sante´,
« e´tats de l’environnement de´terminants » pour la sante´,
facteurs de risque, expositions, offre de soins, comportements,
actions de sante´ publique) transmis et/ou re´ve´le´s par les sources
vues ci-dessus. Ces faits sanitaires sont issus des sources
organisationnelles (la veille est « casuistique ») ou de sources
non organisationnelles et rapporte´s au syste`me de veille
(Tableau 1). Dans ce dernier cas, comme vu plus haut, la veille
sanitaire se pre´sente sous plusieurs formes : veille scientifique
(veille documentaire scientifique, lecture d’articles et de
rapports scientifiques, fre´quentation des congre`s. . .), me´dia-
tique (suivi de la presse d’information e´crite ou parle´e,
ge´ne´raliste ou professionnelle de sante´ spe´cialise´e comme la
presse me´dicale)8
, populationnelle ou « vernaculaire » (enre-
gistrement et analyse des questions/demandes de la population
ou de ses repre´sentants, associations ou de´cideurs, etc.)9
.
Notons que la veille prospective, veille sur des signes
pre´sents aujourd’hui qui annoncent des faits futurs, et la veille
internationale, veille sur des signes pre´sents aujourd’hui et
ailleurs qui annoncent des faits potentiels ici, aujourd’hui ou
demain, ne sont pas des entite´s a` part. Elles sont, respective-
ment une de´clinaison temporelle et une de´clinaison spatio-
temporelle de la veille sanitaire pre´formate´e ou non
pre´formate´e sur des faits issus des sources organisationnelles
ou non organisationnelles. La veille prospective, comporte
Analyse du signal
quantitative et/ou
qualitative
Analyse statistique
(modélisation tendance,
analyse signal)
Interprétation
et production
scientifique
Communication à
destination de la
société civile
(associations, etc.)
Communication à
destination de la
tutelle, des
décideurs…
Événements
pré-définis ,
concernant la
santé (entités
pathologiques
ou facteurs de
risque idéntifiés
à priori)
Événements
non définis à
priori,
concernant la
santé (faits
subits ou
signalements
relatifs à des
entités
pathologiques
ou des facteurs
de risque)
Données
Données
Indicateurs
Résultats
Résultats
interprétés
(information)
- Connaissance OU/ET
- Alerte (CT, LT) OU/ET
- Contribution à la
gestion des crises) OU/ET
- Aide à la décision
- Connaissance OU/ET
- Alerte
VEILLE NON PRÉ-FORMATÉE : VIGILANCES, ETC.
VEILLE PRÉ-FORMATÉE : SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE
Construction
des indicateurs
Collecte
structurée
et
préétablie
de données
Collecte non
préétablie
et/ou non
structurée de
données
- Connaissance OU/ET
- Alerte (CT, LT)
- Connaissance OU/ET
- Alerte
Communication à
destination des
professionnels de
santé
Communication à
destination de la
presseDonnées validées
Vérification et
validation
Fig. 2. Architecture de la veille sanitaire.
7
La re´ception de signaux avec de´tection d’anomalies est encore appele´e de
fac¸on synthe´tique, la « remonte´e de cas » ou « signalement ».
8
Les « objets » de veille me´diatique sont les articles de presse, l’information
radiophonique, te´le´visuelle ou produite par Internet. . .
9
Notons que la « veille sur la communication » est une veille et, a` ce titre,
posse`de une dimension « surveillance » et une dimension « vigilance ».
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411406
comme la veille de fac¸on ge´ne´rale, une composante pre´-
formate´e qui permet de de´terminer (i.e. de mode´liser et
projeter) des tendances « lourdes » et une composante non
pre´formate´e qui, a` l’aide de me´thodes qualitatives, est apte a`
« sentir » des tendances a` plus court terme.
Ainsi, que cela concerne les faits issus des sources
organisationnelles ou rapporte´s, que le me´canisme soit de
type non pre´formate´ (re´ception de signalements scientifiques,
me´diatiques. . .) ou de type pre´formate´ (surveillance), la
relation temporelle a` l’e´ve´nement qui motive l’information
et/ou l’alerte peut aboutir a` une information a` finalite´
imme´diate, concernant un e´ve´nement qui a lieu, mais elle
peut aussi aboutir a` une information a` finalite´ retarde´e
pre´voyant des phe´nome`nes e´mergents (veille prospective,
voire internationale si l’e´loignement implique un de´lai pour
voir arriver les phe´nome`nes sanitaires).
Les veilles pre´formate´e et non pre´formate´e sont donc deux
activite´s diffe´rentes, comple´mentaires et indispensables. Elles
fonctionnent en paralle`le pour ce qui est du segment re´cepteur,
mais se rejoignent dans le segment effecteur (Fig. 2) et cre´ent,
le cas e´che´ant, les conditions de l’alerte.
3.1.2. Formalisation de la surveillance e´pide´miologique ou
veille pre´formate´e
La de´finition e´tablie par les CDC [8] vaut toujours. Elle sera
donc conserve´e ici. Elle se structure en une succession d’e´tapes
ou processus : conception/protocole, collecte des donne´es
brutes, construction du tableau de donne´es a` analyser, analyse
des indicateurs, interpre´tation des re´sultats de l’analyse,
diffusion des re´sultats et de leur interpre´tation.
3.1.3. Formalisation de la veille non pre´formate´e :
signalements, signaux scientifiques, me´diatiques. . .
Une activite´ (un dispositif ?) de veille non pre´formate´e n’est
pas exactement une surveillance e´pide´miologique, meˆme si elle
en reveˆt parfois la forme (voir la description du processus, ci-
dessous). En fait, elle n’est pas organise´e comme telle. Ce type
de veille perc¸oit ou produit, une « remonte´e de signaux a` partir
d’e´ve´nements de sante´ pouvant repre´senter une menace pour la
sante´ » [23].
Le champ the´matique et ope´rationnel de cette activite´ est :
 de s’inte´resser a` des faits sanitaires et a` des expositions a` des
facteurs de risque, ave´re´s ou potentiels, naturels ou d’origine
anthropique ;
 d’inclure obligatoirement, parmi ses objectifs, l’identifica-
tion d’effets jusqu’alors inconnus ;
 d’ope´rer par un processus de repe´rage et de signalement de
phe´nome`nes anormaux ; ce signalement est produit par le
suivi non pre´formate´ (parfois non structure´10
) ou non
pre´e´tabli de faits (de sante´) rapporte´s ou par le suivi non
pre´formate´ de l’e´volution de donne´es, traduisant la survenue
d’e´ve´nements de sante´.
Comme pour la surveillance, il est possible de de´crire ce
type de veille sous la forme d’un processus re´pondant a` la
de´finition suivante [5,23] :
 processus permanent et organise´ :
 de re´ception des signaux et des donne´es pertinentes
relatives :
– aux expositions aux facteurs dont les effets sanitaires
(de´le´te`res ou protecteurs) sont suspecte´s, reconnus ou
inconnus,
– aux e´ve´nements de sante´ connus ou inconnus ;
 d’analyse et d’interpre´tation de ces donne´es,
 de diffusion des re´sultats des analyses et de leur
interpre´tation en temps opportun a` ceux qui en ont
besoin ;
 en vue :
 de la de´tection ou de l’anticipation de modification de
l’e´tat de sante´ des populations (risques),
 d’une action de sante´ publique :
– de controˆle,
– de pre´vention des expositions et/ou des maladies.
3.1.4. « Remarque »
Cette modalite´ peut se fonder sur l’existence d’un re´seau de
professionnels (centres antipoison et de toxicovigilance, re´seau
de me´decins sentinelle. . .), organe de l’observation qui, lui en
revanche, peut eˆtre fortement structure´.
Le processus est compose´ des e´tapes suivantes : conception,
collecte des donne´es brutes ou re´ception du signal, analyse du
signal, interpre´tation des re´sultats de l’analyse, diffusion des
re´sultats et de leur interpre´tation.
Les notions de surveillance et de veille non pre´formate´e ne
sont donc pas similaires, mais ont des champs communs :
l’objet lui-meˆme, mais aussi certains outils telles que les bases
Tableau 1
Veille sanitaire et ses composantes.
Veille non pre´formate´e Veille pre´formate´e (ou fortement structure´e)
Faits issus des sources
organisationnelles
Vigilances classiques (i.e. sur les produits), toxicovigilance
« vigilance sur les e´ve´nements pathologiques »
Surveillance e´pide´miologique
Faits issus des sources
non organisationnelles
« Vigilances » scientifique, me´diatique, populationnellea
Surveillances scientifique,
me´diatique, populationnelle
a
Ces termes ne sont pas officiels et pourraient eˆtre interpre´te´s dans un sens tout diffe´rent. Le terme vigilance n’est, bien e´videmment, pas utilise´, ici, dans le sens qui
lui est attribue´ dans des expressions du type « comite´ de vigilance » ou`, au sens que nous donnons a` ce mot, est adjoint celui d’action (contre, en ge´ne´ral). Cette
dernie`re dimension est, d’ailleurs, plus conforme a` la de´finition institutionnelle de la vigilance, de´finition que nous ne retenons pas.
10
« Non structure´ » voulant dire qu’il n’y a pas d’indicateur de´fini et encore
moins d’indicateur quantitatif de´fini.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 407
de donne´es. Elles recouvrent des concepts et des activite´s
diffe´rentes mais comple´mentaires. Elles occupent l’espace de
de´finition de la veille sanitaire. Remarquons, a` cette occasion,
que le de´bat concernant le statut de la toxicovigilance entre
vigilance et surveillance des intoxications semble inopportun :
les deux approches ont une utilite´ et se renforcent lorsqu’elles
sont conjointement ope´re´es. Logiquement, a` la lueur de ce qui
vient d’eˆtre dit, cela pourrait s’appeler toxico-veille !
3.2. L’articulation des composantes de la veille et des
activite´s voisines
Vigilance, surveillance, recherche sont des activite´s qui se
retrouvent souvent sur le meˆme terrain et, si elles ne sont pas
comple`tement contemporaines, s’enchaıˆnent ou interagissent
fortement. Cet entrecroisement est, la` encore, inspire´ de notre
re´action en tant qu’individu, face aux e´ve´nements qui arrivent a`
notre conscience : on pourrait meˆme dire que ceux-la` doublent
ceux-ci (Encadre´ 1).
3.3. Les outils de la veille
La veille, comme conjonction de deux me´canismes
comple´mentaires, veilles pre´formate´e et non pre´formate´e,
dispose d’outils propres a` chacune des e´tapes de son processus
(Tableau 2).
Les donne´es sont collecte´es de fac¸on fortement structure´e
dans les syste`mes de surveillance (bases de donne´es alimente´es
en routine, souvent) [35], de fac¸on « non force´ment » structure´e
dans les dispositifs de veille non pre´formate´e (re´seaux de
professionnels de sante´11
, souvent), mais aussi a` partir des
interpellations issues des lanceurs d’alerte, de la presse. . ..
Les indicateurs, propres a` l’activite´ de surveillance, sont
construits par transformation des donne´es brutes (combinaisons
d’une ou plusieurs donne´es telles que moyennes, fonctions,
etc.).
En ce qui concerne l’analyse, l’approche est de deux types. Il
s’agit :
 d’une analyse de tendance (description et mode´lisation de
type re´gression) qui permet de dire comment se comporte le
phe´nome`ne (il augmente, diminue ou reste stable, varie de
fac¸on saisonnie`re, etc.) et de dire ce qu’il deviendra
(projection dans le futur) ;
 d’une analyse du signal qui permet d’enregistrer le flux des
donne´es et de de´tecter un e´ventuel accident au cours de son
e´volution temporelle.
La veille non pre´formate´e met en œuvre le second
me´canisme, la surveillance ope`re les deux me´canismes.
Remarquons, a` ce sujet, que l’utilisation du mot « signal »
preˆte souvent a` confusion. Ici, nous convenons que le signal est
ce qui est analyse´ (au sens de ce qui est suivi, interpre´te´ :
indicateur pour la surveillance, donne´es valide´es pour la veille
non pre´formate´e) et non pas, comme on le voit parfois [21], ce
qui est re´ve´le´ comme e´tant anormal par l’analyse. Nous
conside`rerons, alors, que cet e´ve´nement, re´ve´le´ comme
anormal, est une alerte ou un signal d’alerte.
Les outils utilise´s pour l’analyse de tendance (donc au sein
de la surveillance) sont des re´gressions utilisant des fonctions
explicites du temps comme variables explicatives ou utilisant
d’autres variables comme celles repre´sentant les facteurs de
risque, eux-meˆmes de´pendant du temps. Ces re´gressions
prennent en ge´ne´ral la forme de se´ries temporelles [36–38].
Ces dernie`res notamment quand les indicateurs de la
surveillance sont non spe´cifiques, permettent aussi de de´tecter
des variations anormales de l’indicateur suivi et donc de
ge´ne´rer un signalement [24,39]. Les se´ries temporelles se
preˆtent aussi a` l’analyse du signal avec de´tection d’anomalie
comme ope´re´e par la veille non pre´formate´e (la survenue d’un
brusque accident de tendance peut donner lieu a` un me´canisme
de perception non pre´formate´). Cette dernie`re peut utiliser
e´galement des outils quantitatifs ou semi-quantitatifs tels que
les re´seaux de neurones [40,41] ou la fouille de donne´es (data
mining), souvent utilise´s par la pharmacovigilance [42–46].
Encadre´ 1. Veille, alerte, surveillance, vigilance, dans
quel ordre ? Le processus mental.
D’abord nous « veillons » de fac¸on spontane´e, « non
active », diffuse, non focalise´e. C’est la « vigilance » au
sens commun ou, plus ge´ne´ralement, « la veille non
pre´formate´e » et nous de´couvrons une irre´gularite´ tem-
porelle et/ou spatiale. Comme nous « attendions » la
continuite´ de ce qui est observable, nous sommes
« alerte´s » par le phe´nome`ne et nous nous y inte´ressons
en tentant de trouver une raison a` ce changement. Nous
recherchons une cause : c’est le stade de´volu a` la
« recherche » (de la cause). Souvent, nous n’arrivons
qu’a` e´tablir une relation statistique sans mise en e´vi-
dence de la causalite´. Puis, que nous ayons ou non
de´couvert une cause, nous proposons des recomman-
dations pour l’action de sante´ publique et mettons en
place une « surveillance » (veiller sur) dont le roˆ le est
de´sormais d’enregistrer en continu ce qui a change´ et en
« fabriquant » (en estimant) l’attendu a` partir de ces
observations (mode`le = projection, « fabrication » de
l’attendu). Nous pouvons aussi comple´ter notre surveil-
lance cible´e par un e´tat de « vigilance » (au sens com-
mun) qui correspond a` la « veille non pre´formate´e » et
qui sera suffisant pour que nous puissions remarquer
activement des phe´nome`nes non pre´vus. La veille con-
siste, ainsi, a` « s’attendre a` l’attendu » et de voir quand il
y a diffe´rence entre l’attendu et l’observe´ (l’attendu peut
eˆtre l’absence d’e´ve´nement inconnu). La veille corre-
spond donc bien a` l’e´tat de vigilance. L’attendu/observe´
peut eˆtre une valeur, une pente (une tendance). La
surveillance et la vigilance peuvent, a` leur tour, eˆtre
suivies d’une activite´ de « recherche » ciblant des e´ve´-
nements mis en e´vidence par ces activite´s de veille et
ainsi de suite. . ..
11
Les re´seaux de me´decins sentinelles, en de´pit de leur de´nomination, sont
plutoˆt consacre´s a` la surveillance qu’a` la vigilance.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411408
Elle peut aussi mettre a` contribution des outils qualitatifs
comme l’analyse d’une information rapportant la survenue
d’un e´ve´nement et la validation du signalement, fonde´e sur
l’expe´rience. Elle peut, enfin, de fac¸on ge´ne´rale, avoir recours a`
un ensemble de me´thodes propres aux sciences humaines et
sociales. Ici il sera fait appel a` la notion de jugement plutoˆt qu’a`
la « me´canique » quantitative [47].
L’interpre´tation de l’analyse et la production scientifique
(rapports, articles) se font de fac¸on colle´giale avec l’ensemble
des participants a` l’activite´ de veille pre´formate´e et/ou non
pre´formate´e.
Quant a` la communication, prote´iforme et destine´e a` des
interlocuteurs de natures diffe´rentes, elle utilise les outils
classiques qui lui sont propres : la diffusion des rapports et
articles scientifiques e´labore´s a` l’e´tape pre´ce´dente, les
communique´s de presse, etc.
L’interpre´tation des analyses et la communication servent, in
fine, a` la connaissance et a` l’alerte [48] ainsi qu’a` la gestion des
crises et a` la de´cision.
3.4. Strate´gie de coope´ration entre les diffe´rentes
composantes de la veille
Les veilles pre´formate´es et non pre´formate´es se comple`tent
et coope`rent dans leurs productions, la connaissance, l’alerte et
dans leur mission ultime d’aide a` la gestion (Fig. 3).
4. Conclusion
Les propositions, e´nonce´es ici, ont tente´ de clarifier un
certain nombre de concepts qui re´pondent a` des activite´s
mene´es quotidiennement dans le champ de la sante´ publique.
Elles tentent de concilier le sens que les mots « surveillance »,
« vigilance », « observation » et « veille » ont acquis dans le
langage courant et le contenu des activite´s auxquelles renvoie
l’usage des meˆmes mots en sante´ publique. La « tentative de
conciliation » n’est pas toujours couronne´e de succe`s car les
termes analyse´s sont tre`s proches quant a` leur signification et
donc quant a` leur emploi dans le langage tant courant que
professionnel avec, comme corollaire, une confusion fre´quente
dans la perception des frontie`res entre les activite´s de sante´
publique concerne´es. La « vigilance », comme l’usage l’a fixe´e
dans la sphe`re sanitaire officielle n’est qu’une partie de la
« vigilance » au sens commun du terme. Aussi, avons-nous opte´
Tableau 2
Outils de la veille.
Veille pre´formate´e (surveillance e´pide´miologique) Veille non pre´formate´e (vigilances, etc.)
Donne´es Bases de donne´es alimente´es en routine Re´seaux de professionnels de sante´, interpellations
issues des lanceurs d’alerte, de la presse. . .
Donne´es pre´de´finies Souvent, donne´es multimodales (nature prote´iforme)
Indicateurs Transformation des donne´es brutes (combinaisons
d’une ou plusieurs donne´es telles que moyennes,
fonctions, etc.)
8C/8
Analyse
Tendance et projection Se´ries temporelles Analyse d’e´ve´nements au cas par cas sur la base de
crite`res qualitatifs (fait appel au jugement et a` la
colle´gialite´)
De´tection anomalies Se´ries temporelles Me´thodes qualitatives des sciences humaines et sociales,
fouille de donne´es, re´seaux de neurones, jugement
Interpre´tation De´termination de l’importance du phe´nome`ne surveille´
pour la sante´ publique
De´cision d’alerter le de´cideur
Analyse des options de gestion – de´cision d’alerter
le de´cideur
Analyse des options de gestion
Communication Rapports et articles scientifiques Bulletin
Notes aux de´cideurs Notes aux de´cideurs
Communique´s de presse Dans certains cas, rapports, articles scientifiques
8/8 : sans objet.
Observation non structurée Observation structurée
Veille non
pré-formatée :
vigilances, etc.
Veille pré-
formatée :
surveillance
Connaissance Alerte
Aide à la gestion
Évaluation
Action
Fig. 3. Coope´ration de la surveillance et de la veille non pre´formate´e pour
l’action.
D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 409
pour une de´nomination diffe´rente, celle de « veille non
pre´formate´e » qui s’oppose a` la « veille pre´formate´e » ou
« surveillance » et la comple`te. La notion de « pre´formatage »
(ou de pre´de´termination) traverse l’ensemble des activite´s de
veille, qu’elles portent sur des objets « directement » sanitaires
(maladies, symptoˆmes, syndromes, de´terminants de sante´. . .)
ou « indirectement » sanitaires (signaux bibliographiques,
me´diatiques. . .). Cette opposition et cette coope´ration entre le
pre´formatage et l’absence de pre´formatage est fortement
inscrite dans le cerveau humain, dans tous ses champs d’activite´
et dans toutes ses productions (art, musique, biologie. . .) et,
donc dans la perception des dangers sanitaires. Il est ne´cessaire
de pre´server ces deux polarite´s et de les exercer conjointement
car, sinon, on s’expose au risque de rester aveugle a` des signaux
te´moins ou annonciateurs d’e´ve´nements favorables ou de´fa-
vorables. Nous insistons sur l’inte´reˆt qu’il y aurait de partager
ces de´finitions, voire de les normaliser. Pour ce faire, il faut
de´composer le contenu des activite´s de la veille, raison pour
laquelle nous avons trouve´ utile de sche´matiser ces processus.
De´claration d’inte´reˆts
Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en
relation avec cet article.
Remerciements
A` Caroline Semaille (InVS) pour sa participation aux
re´flexions sur les concepts pre´sente´s dans cet article, a` Sophie
Martinon (InVS) pour ses recherches sur les textes le´gislatifs
de´finissant ces notions ainsi qu’aux relecteurs pour ses
remarques et suggestions.
Re´fe´rences
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Veille sanitaire

  • 1. Note pe´dagogique Veille sanitaire : outils, fonctions, processus ‘‘Veille sanitaire’’: Tools, functions, process of healthcare monitoring in France D. Eilstein *, G. Salines, J.-C. Desenclos Institut de veille sanitaire, 12, rue du Val-d’Osne, 94415 Saint-Maurice, France Rec¸u le 28 novembre 2011 ; accepte´ le 6 mars 2012 Abstract In France, the term ‘‘veille sanitaire’’ is widely used to designate healthcare monitoring. It contains, however, a set of concepts that are not shared equally by the entire scientific community. The same is true for activities that are part of it, even if some (surveillance for example) are already well defined. Concepts such as ‘‘observation’’, ‘‘vigilance’’, ‘‘alert’’ for example are not always clear. Furthermore, the use of these words in everyday language maintains this ambiguity. Thus, it seemed necessary to recall these definitions as already used in the literature or legislation texts and to make alternative suggestions. This formalization cannot be carried out without thinking about the structure of ‘‘veille sanitaire’’ and its components. Proposals are provided bringing out concepts of formated ‘‘veille’’ (monitoring) and non-formatted ‘‘veille’’ (monitoring). Definitions, functions, (methods and tools, processes) of these two components are outlined here as well as the cooperative relationship they sustain. The authors have attempted to provide the scientific community with a reference framework useful for exchanging information to promote research and methodological development dedicated to this public health application of epidemiology. # 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Epidemiologic surveillance; Vigilance; Epidemic intelligence; Concepts Re´sume´ Aujourd’hui, en France, le terme « veille sanitaire » est largement utilise´. Il recouvre, cependant, un ensemble de notions qui ne font pas toujours consensus. Il en va de meˆme pour les activite´s qui lui sont rattache´es, meˆme si certaines comme la surveillance font de´ja` l’objet de de´finitions accepte´es par tous. Les concepts d’observation, de vigilance, d’alerte, par exemple, n’ont pas toujours e´te´ bien cerne´s. Par ailleurs, l’utilisation de ces mots dans le langage courant entretient cette ambiguı¨te´. Aussi, nous a-t-il paru ne´cessaire de rappeler ces de´finitions lorsqu’elles existaient dans la litte´rature ou les textes le´gislatifs et de faire des suggestions dans le cas contraire. Cet effort de formalisation ne pouvait eˆtre mene´ a` bien sans une re´flexion sur la structuration de la veille sanitaire et de ses composantes. La` aussi, des propositions sont faites, faisant e´merger les notions de veilles « pre´formate´e » et « non pre´formate´e » : des de´finitions, des fonctions et des composantes de fonctionnement (me´thodes et outils, processus) de ces deux modalite´s de la veille sanitaire sont propose´es ici ainsi que les rapports de coope´ration qu’elles entretiennent. L’intention est de fournir a` la communaute´ scientifique un cadre de re´fe´rence permettant d’e´changer les informations tire´es de l’activite´ de veille, mais aussi de promouvoir des travaux de recherche et de de´veloppement me´thodologiques de´die´s a` cette application de l’e´pide´miologie en sante´ publique. # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. Mots cle´s : Surveillance e´pide´miologique ; Vigilance ; Veille sanitaire ; Concepts 1. Introduction En France, les notions de surveillance, de veille, de vigilance, d’observation ne font pas, ou du moins pas toutes, l’objet d’un consensus quant a` leur de´finition et leur champ. De plus, elles n’ont pas e´merge´ de la meˆme fac¸on. La surveillance dite e´pide´miologique ou de sante´ publique, est, en effet, la seule qui dispose d’une de´finition fonde´e sur une approche conceptuelle [1,2]. La vigilance, quant a` elle, a e´te´ spe´cifie´e d’un point de vue re´glementaire et a suscite´ une tentative de de´finition e´pide´miologique [3] ; dans l’un et l’autre cas, cette de´finition n’e´puise pas le contenu de cette activite´ [1]. Ces Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : d.eilstein@invs.sante.fr (D. Eilstein). 0398-7620/$ – see front matter # 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.respe.2012.03.005
  • 2. notions sont, de plus, au cœur d’enjeux de territoires impliquant les diffe´rentes agences de se´curite´ sanitaires. Ces enjeux pourraient eˆtre aussi au cœur de rapports de force professionnels : la vigilance, s’appuyant sur la notification spontane´e, sans « regard » sur la population et privile´giant l’utilisation de crite`res d’imputabilite´ individuels, serait ainsi l’outil du clinicien alors que la surveillance, fonde´e sur la dimension populationnelle de l’observation et de l’analyse des risques, appartiendrait en propre a` l’e´pide´miologiste. Ainsi, selon certains, la vigilance est incluse dans la surveillance, pour d’autres, c’est l’inverse (la vigilance serait un compose´ de « veille » et de surveillance applique´e a` un domaine particulier), d’autres, enfin, pensent qu’elles sont juxtapose´es, voire ont une partie commune. . . Les E´tats-Unis, en revanche, ne font pas la diffe´rence entre ces deux notions (on parle de surveillance of adverse effects). L’observation est encore plus mal de´finie, d’autant plus que la confusion est, en apparence, entretenue institutionnellement depuis l’e´mergence des observatoires de sante´ dont l’activite´ serait proche de la surveillance e´pide´mio- logique [4]. Quant a` la veille sanitaire qui s’est construite plus re´cemment [5], elle est tout naturellement contrainte de voir son objet et son pe´rime`tre flous et variables selon les e´poques et les e´ve´nements. Ainsi, sans eˆtre confondues, ces notions n’en sont- elles pas moins souvent difficiles a` se´parer (l’observation et la surveillance, la veille et l’alerte, la veille et la vigilance, par exemple) et a` situer pre´cise´ment dans le champ de la sante´ publique et dans celui de la se´curite´ sanitaire [5,6]. Le recours au(x) dictionnaire(s) n’aide pas vraiment, beaucoup de de´finitions se renvoyant l’une a` l’autre : la surveillance, comme « ensemble des actes par lesquels on exerce un controˆle suivi. . . », impliquerait « une observation de la part de celui qui observe et une visibilite´ de la part de celui qui est surveille´ ». Surveiller serait «. . . veiller particulie`rement et avec autorite´ sur une personne ou sur une chose. . . observer attentivement. . . ». L’observation se confondrait avec « l’acti- vite´ de celui qui. . . examine des faits et les mesure ». La veille correspondrait a` un « moment sans sommeil » et veiller serait eˆtre vigilant. Quant a` la vigilance, elle serait une « surveillance attentive sans de´faillance. . . »1 . Cela n’est pas surprenant car les mots sont tre`s proches voire emboıˆte´s : ainsi, par exemple, « surveiller » veut-il dire « sur-veiller » au sens de veiller intense´ment ou « veiller sur » ? La sante´ publique n’est pas le seul champ ayant recours a` la veille. Cette dernie`re peut eˆtre technologique, environnemen- tale, juridique ou re´glementaire, commerciale ou concurren- tielle, strate´gique, me´diatique, entre autres. La fac¸on dont ces autres disciplines la conc¸oivent est, d’ailleurs, assez proche, dans le principe, de ce qu’est la veille sanitaire. Sont ainsi retrouve´s les attributs « organise´ », « inte´gre´ », les composantes « collecte », « traitement », « diffusion », « exploitation » de l’information ainsi que la vocation a` re´agir face a` une (ou des) menace(s), d’« explorer les possibles » et d’« anticiper ». En matie`re d’acce`s a` l’information, certains utilisent l’image « technique de commando » pour la veille versus l’activite´ d’« arme´e re´gulie`re » a` laquelle correspondrait le travail de documentation [7] qui pourrait correspondre a` ce que nous appelons la surveillance e´pide´miologique : cette dernie`re utilise des techniques syste´matiques et me´thodiques alors que les me´thodes de la veille se doivent d’eˆtre souples et diversifie´es. Le langage courant fait largement usage de ces notions. Surveiller le lait en train de bouillir s’adresserait a` l’e´ve´nement « de´bordement » (variable valant 0 ou 1) ou au niveau du lait (variable continue), par exemple. La vigie sur un bateau, exerce une. . . vigilance : ce n’est pas de la surveillance car elle ne se focalise pas sur un type d’e´ve´nement, mais elle se veut sensible a` tout ce qui peut arriver, a` tous les e´ve´nements surgissant dans un « champ » particulier, en l’occurrence l’horizon (la vigie ne s’occupe pas de ce qui se passe sur le bateau car il y a, pour cela, de´ja` un homme de quart a` la barre, de´ja` quelqu’un a` la chambre des machines etc.). La vigilance serait ainsi une activite´ de veille « ouverte ». La marche du randonneur alterne activite´s de vigilance (la plupart du temps, l’e´tat d’attention n’est pas focalise´) et de surveillance s’il aborde un terrain plus difficile. Le meilleur exemple de la notion de veille dans la vie courante est celui du veilleur de nuit. Ce dernier fait sa ronde a` intervalle re´gulier, passe par des endroits donne´s et effectue des ve´rifications programme´es et, ainsi, effectue une activite´ de surveillance. Mais, de fac¸on continue, il est attentif a` tout ce qui peut survenir a` l’inte´rieur du pe´rime`tre dont il a la responsabilite´ et, en cela, exerce une vigilance. La veille est alors la combinaison des deux activite´s. Au bout du compte, le langage courant semble opposer une activite´ de veille cible´e, la surveillance, a` une activite´ de veille non cible´e a priori, la vigilance. Face a` ces difficulte´s, cet article a pour objectif de proposer un cadre conceptuel relatif a` la veille sanitaire, de de´crire l’organisation de celle-ci et d’identifier ses composantes, de donner les de´finitions des diffe´rentes entite´s mentionne´es ci- dessus. Cette approche doit aider a` dissiper la confusion qui caracte´rise ces notions et, par-la`, rationaliser la mise en place des syste`mes de veille et de surveillance et leurs sous- ensembles ainsi que leur analyse et leur e´valuation. Avant de proposer un cadre conceptuel de la veille sanitaire proprement dite, les notions d’observation, de surveillance et de vigilance telles qu’on les entend aujourd’hui seront aborde´es car elles sont des composantes de la veille. Le cadre conceptuel, outre des propositions de structuration de ces notions, pre´cisera les outils de la veille sanitaire. 2. Observation, surveillance, vigilance, veille 2.1. Observation L’observation prend diffe´rents sens selon les auteurs : « recueil d’information. . . ayant pour objectif la gestion du syste`me de sante´ et son ame´lioration re´gulie`re, a` travers l’e´tude de phe´nome`nes de sante´ a` moyen et long terme » pour le Haut comite´ de sante´ publique [1]. Elle peut eˆtre, selon d’autres, une 1 Ces de´finitions sont extraites de trois sources : le dictionnaire encyclope´- dique Quillet, e´dition 1977, le Petit Robert, e´dition 2004 et l’encyclope´die philosophique universelle. Les notions philosophiques. Dictionnaire 2. PUF, 1e e´d. 1990. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411402
  • 3. activite´ de recueil, d’agre´gation, d’analyse de donne´es sanitaires et de synthe`se et, parfois, de projection dans le futur [4] et, donc, recouvrir la notion de surveillance. Les meˆmes auteurs e´crivent que les observatoires produisent une information re´gionale pertinente sur des temps tre`s courts, permettant de donner des re´ponses rapides a` une e´chelle locale. Elle pourrait eˆtre, aussi, un recueil « tous azimuts » d’informations utiles a` la gestion du syste`me de sante´ sans ne´cessite´ d’action imme´diate, comme, par exemple, la mortalite´ par tumeurs de 1995 a` 1997 ou la proportion de fumeurs dans une classe d’aˆge donne´e [2]. Si la surveillance, comme on le verra dans le paragraphe suivant, diffe`re sensiblement de l’observation, les statistiques de sante´ – et donc l’observation – peuvent eˆtre la base d’un syste`me de surveillance de`s lors qu’elles sont suivies de manie`re syste´matique et continue dans une perspective d’action de sante´ publique [2]. L’observation, finalement, est aussi un outil qui contribue a` la surveillance en ce qu’elle met en place des outils comme l’extraction de donne´es a` partir des bases de´ja` constitue´es ou comme les enqueˆtes afin de re´pondre a` des questions ou des demandes pre´cises concernant la distribu- tion – dans le temps et l’espace, et selon la nature de la population – des faits sanitaires (pathologies et exposition a` des facteurs de risque). 2.2. Surveillance e´pide´miologique Stephen B. Thacker, en 1996, de´finit la surveillance de sante´ publique (ou surveillance e´pide´miologique) de la fac¸on suivante : Public health surveillance (sometimes called epidemiologic surveillance) is the ongoing and systematic collection, analysis, and interpretation of outcome-specific data essential to the planning, implementation, and evaluation of public health practice closely integrated with the timely dissemination of these data to those who need to know. The final link of the surveillance chain is the application of these data to the control and prevention of human disease and injury [8]. Cela peut se traduire, de fac¸on plus concise : « processus continu et syste´matique de collecte, d’analyse et d’interpre´ta- tion de donne´es pertinentes, diffuse´es en temps opportun a` ceux qui en ont besoin, en vue d’une action de sante´ publique ». Cette de´finition est tre`s proche de celle adopte´e par les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), huit ans plus toˆt. Elle ge´ne´ralise la notion de donne´es au-dela` du champ purement sanitaire et pre´cise l’utilisation par « ceux qui en ont besoin » des informations issues de la surveillance. Cette de´finition rajoute, enfin, a` celle de Benenson [9] qui e´tait de´ja` relativement comple`te, la notion d’information ne´cessaire a` la pre´vention. Il est possible de structurer cette de´finition en la pre´cisant, de la fac¸on suivante : processus permanent et organise´ : de collecte des donne´es pertinentes relatives aux : – expositions aux facteurs dont les effets sanitaires de´le´te`res ou protecteurs, sont suspecte´s ou reconnus, – e´ve´nements de sante´, – caracte´ristiques des populations a` risque, – donne´es de susceptibilite´ ou de vulne´rabilite´ individuel- les ou collectives aux facteurs cite´s plus haut, – interventions ; Cette collecte peut eˆtre soutenue si besoin est par des enqueˆtes ou des e´tudes ponctuelles ou re´pe´te´es. de fabrication d’indicateurs a` partir de ces donne´es puis a` partir des relations entre ces indicateurs dans le cas ou` ces relations existent et sont e´tablies2 , d’analyse, de suivi et d’interpre´tation de ces indicateurs, de diffusion des re´sultats des analyses et de leur interpre´tation en temps opportun a` ceux qui en ont besoin ; en vue : d’une information, de la de´tection ou de l’anticipation de modification de l’e´tat de sante´ des populations (risques ou be´ne´fices), d’une action de sante´ publique : – de controˆle, – de pre´vention des expositions et/ou des maladies et de l’e´valuation de ces actions. La surveillance des maladies est, ainsi, un cas particulier focalise´ sur la dynamique des maladies, de la surveillance e´pide´miologique. Rappelons, comme dit plus haut, qu’il existe deux grands types de surveillance, selon le niveau d’agre´gation de l’information dont on veut disposer : la surveillance spe´cifique comme, par exemple, la surveillance des intoxications oxycarbone´es [10], des effets sanitaires de la pollution atmosphe´rique [11], des infections nosocomiales [12]3 , de la consommation hospitalie`re d’antibiotiques [13]4 , des cancers, entre autres, et la surveillance non spe´cifique ou surveillance syndromique, comme le syste`me Sursaud1 [14,15]. 2.3. Vigilances Nous employons le pluriel « vigilances » a` dessein car il n’existe pas de de´finition de la vigilance en sante´ publique a` proprement parler. Les diffe´rentes activite´s relevant de la vigilance ont e´te´, sinon de´finies, plutoˆt encadre´es par le Code de la sante´ publique, au fur et a` mesure des besoins. En France, les dispositifs de vigilance incluent la pharmacovigilance (articles R. 5121-150, R. 5121-159. . .), l’he´movigilance (articles L. 1221-13, R. 1221-22. . .), la biovigilance (article R. 1211-29), la mate´riovigilance (articles L. 5212-1, R. 5212-1), la re´actovi- gilance (article R. 5222-1), la cosme´tovigilance (article L. 5131-9), la toxicovigilance (article R. 1341-12), l’addictovi- gilance, la vigilance alimentaire (article R. 1323-1, article R. 1323-2), la vigilance relative a` l’assistance me´dicale a` la procre´ation (article R. 2142-40), la vigilance exerce´e sur les produits de tatouage (article R. 513-10-9), la radiovigilance. . . 2 Cette phase n’est pas implicitement contenue dans la de´finition de Thacker, mais nous donnons cette pre´cision car elle nous semble fortement caracte´riser la notion de surveillance. 3 Rapport disponible a` http://www.invs.sante.fr. 4 Rapport disponible a` http://www.invs.sante.fr. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 403
  • 4. Ainsi, aujourd’hui, l’usage du terme « vigilance » est re´serve´ a` une fonction de vigilance tourne´e vers des produits ou des agents issus des activite´s humaines : les me´dicaments, le sang, les cosme´tiques, des toxiques, des rayonnements ionisants. . . L’attention est porte´e sur les effets potentiellement de´le´te`res de ces produits sur la sante´ humaine. La toxicovigilance occupe une place un peu particulie`re car elle s’inte´resse a` tout e´ve´nement de sante´ connu ou nouveau, meˆme s’il n’est pas rattache´ a priori a` une substance ou une composition de substances toxiques. En fait, elle ope`re, en partant du point de vue que toute manifestation pathologique non directement identifie´e comme d’origine infectieuse ou comme e´tant rattache´e a` une autre vigilance peut eˆtre d’origine toxique (cf. l’augmentation des malformations conge´nitales de l’appareil uroge´nital masculin chez les fils d’agriculteurs [16,17]). Notons que, souvent, l’usage du terme vigilance est plus restrictif car resserrant le pe´rime`tre de cette spe´cialite´ autour des seules activite´s du syste`me de soins (« effets inattendus ou inde´sirables re´sultant de l’activite´ me´dicale ») et s’approche du concept de surveillance (« syste`me », « standardise´s », « il s’agit d’un syste`me de surveillance e´pide´miologique des effets inattendus ou inde´sirables re´sultant de l’activite´ me´dicale », etc.) [3,18]5 . 2.4. Veille sanitaire De meˆme que pour la vigilance et contrairement a` la surveillance, il n’existe pas de de´finition largement admise de la veille sanitaire, bien que ce terme soit souvent utilise´, comme, par exemple, dans le nom de l’institut auquel a e´te´ confie´e la mission e´ponyme. Cependant une de´finition de la veille sanitaire a e´te´ propose´e re´cemment en re´fe´rence a` l’e´mergence du concept de se´curite´ sanitaire dans les pays de´veloppe´s (France, Europe, Ame´rique du Nord) puis au niveau mondial [5]. Le contenu de la veille s’est de´termine´ progressivement par enrichissement de la surveillance e´pide´miologique (adjonction des notions de vigilance, d’alerte. . .), enrichissement voulu en re´ponse aux proble`mes de sante´ publique des anne´es 1990 [5]. Cette e´volution, relativement complexe, n’a pas toujours permis de faire la part des choses entre les notions de surveillance et d’alerte [19]. La traduction anglo-saxonne du mot « veille » n’existe pas. Une notion approchante sinon identique est l’epidemic intelligence. Le concept a e´te´ e´labore´ par Joseph W. Mountin et mis en œuvre par Alexander D. Langmuir [20]. Les CDC ont repris cette approche a` leur compte en cre´ant l’epidemic intelligence service qui est a` la fois une activite´ et une formation d’e´pide´miologie applique´e (a` la sante´ publique). La de´finition de l’epidemic intelligence selon l’European Centre for Disease Prevention and Control est the process to detect, verify, analyze, assess and investigate public health events that may represent a threat to public health. Providing early warning signals is a main objective of public health surveillance systems6 . Cela peut eˆtre traduit comme « le processus de de´tection, de ve´rification, d’analyse, d’e´valuation et d’investigation de tout e´ve´nement qui pourrait repre´senter un risque pour la sante´ publique ». Cette fonction qui de´passe la notion de surveillance, est organise´e en syste`me, ciblant une question de sante´ relativement de´finie (les maladies infectieu- ses) et a pour objectif quasi-unique de produire des alertes le plus toˆt possible. 2.4.1. L’epidemic intelligence La notion d’epidemic intelligence ou de global public health intelligence recouvre l’ensemble des activite´s permettant d’identifier pre´cocement des risques sanitaires potentiels, de ve´rifier leur re´alite´, de les e´valuer et de re´aliser les investigations ne´cessaires pour les documenter [21,22]. Elle repose sur deux me´canismes distincts, l’un fonde´ sur le traitement d’indicateurs, l’autre sur la prise en compte d’e´ve´nements et chacun d’eux se de´roule en cinq e´tapes (Fig. 1). Les sources d’information alimentant ces deux composantes sont de natures diverses, allant des bases de donne´es sanitaires classiques (mortalite´, par exemple) a` la veille scientifique et me´diatique en passant par la consomma- tion de me´dicaments, les signalements par les personnels de sante´ d’e´ve´nements inhabituels, la surveillance non spe´cifique ou syndromique et la veille internationale [23]. Cette activite´ qui fait l’objet, depuis une soixantaine d’anne´es de´ja`, d’une formation par les CDC [20], est proche de l’activite´ de veille sanitaire (voir ci-dessous, « La veille sanitaire proprement dite »), mais est fortement oriente´e vers l’alerte [24,25]. Systèmes de surveillance basés sur des indicateurs Systèmes de surveillance basés sur des événements Données Événements Signal Alerte Action Évaluation Réception Filtrage Validation Investigation Collecte Analyse Interprétation Communication PUBLIC GÉNÉRAL OU CIBLÉ Fig. 1. Cadre conceptuel de l’epidemic intelligence. (Extrait et traduit de [21]). 5 La toxicovigilance, l’addictovigilance, la cosme´tovigilance ne re´pondent pas a` cette de´finition restrictive. 6 http://www.ecdc.europa.eu/en/activities/epidemicintelligence/Pages/Acti- vities_EpidemicIntelligence.aspx. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411404
  • 5. 2.4.2. La veille sanitaire proprement dite Meˆme si l’on ne dispose pas, a` proprement parler, d’une de´finition acade´mique de la veille, il est possible, ne´anmoins, de dire qu’aujourd’hui, elle peut eˆtre conside´re´e comme une activite´ visant a` rassembler et a` analyser de manie`re pre´coce et permanente, dans une perspective d’action de sante´ publique, un ensemble d’informations sur les risques sanitaires connus ou inconnus [5,23]. On peut, ainsi e´voquer l’augmentation brusque de la fre´quence du cancer de la thyroı¨de depuis les anne´es 1980 [26] et le syndrome he´molytique et ure´mique (SHU) lie´ a` un sous type inhabituel d’Escherichia coli ente´rohe´morragique, plus re´cemment. Pour cela, elle doit : repe´rer et/ou suivre des e´ve´nements sanitaires ou « environnementaux » (exposition a` des facteurs de risque) connus dans une population (modification de tendance dans le temps et dans l’espace), notamment par le biais des syste`mes de surveillance ; faciliter, organiser le signalement d’e´ve´nements sanitaires ou environnementaux inhabituels voire inconnus et proce´der a` leur analyse syste´matique afin d’identifier les menaces sanitaires au plus toˆt ; de´tecter toute menace e´mergente pour la sante´ en se fondant sur des syste`mes de surveillance non spe´cifique ; s’inte´resser aux menaces pour la sante´ qui surviennent dans l’espace international (veille internationale). Sa finalite´ est d’informer les de´cideurs sur l’occurrence de ces menaces et de produire des recommandations d’action ou de gestion envisageables pour les maıˆtriser. La communication au public et aux professionnels sur ces menaces incombe aux autorite´s ministe´rielles. La veille sanitaire, ne se re´duit pas a` un (ou des) syste`me(s) de surveillance, mais a` une gestion de l’information sanitaire par de multiples approches, dans une perspective de gestion et de maıˆtrise, par le de´cideur, des risques pour la sante´, lie´s l’activite´ humaine [5,23]. 3. Approche conceptuelle de la veille sanitaire : propositions Certains me´canismes neurosensoriels ou` l’on trouve les contrastes « perception passive »/« perception active » et perception non spe´cifique/perception spe´cifique peuvent eˆtre utilise´s ici comme mode`les : le « voir » des baˆtonnets de la re´tine et le « regarder » (les coˆnes), l’« entendre » et l’« e´couter » (l’attention flottante des analystes entre dans la cate´gorie de perception passive, graˆce a` laquelle le the´rapeute « peut conserver dans sa me´moire une multitude d’e´le´ments en apparence insignifiants dont les corre´lations ne ressortiront qu’ulte´rieurement » [27]). Cela permet de laisser se de´gager, finalement, ce qui est important, une extraction du signal, en quelque sorte. Sur la base de ce mode`le, il est possible de conside´rer que la « perception » de l’e´tat de sante´ de la population ainsi que de ses de´terminants repose sur deux me´canismes, l’un relativement peu contraint ou « non pre´formate´ », l’autre fortement structure´. On retrouve, ici, l’opposition des concepts de « rhizome » et de « racine » – ou d’« arbre » – propose´e par Gilles Deleuze et Fe´lix Guattari [28]. La veille sanitaire utilise ces deux approches perceptives. Classiquement, la notion de veille sanitaire repose sur la de´tection et l’analyse d’un signal pouvant repre´senter une menace pour la sante´ publique. L’objectif est d’anticiper les conse´quences du danger pressenti afin d’alerter et d’aider a` la de´cision [5,29]. Certains outils sont emprunte´s a` la surveillance e´pide´miologique, d’autres a` la vigilance au sens commun. La surveillance peut eˆtre spe´cifique ou non spe´cifique. La premie`re, surveillance spe´cifique, est fonde´e sur des indicateurs : mortalite´, incidence, admissions hospitalie`res, consommation me´dicamenteuse, etc. Elle est tre`s focalise´s, c’est-a`-dire correspondant a` des pathologies pre´cises [30–33]. La seconde, appele´e surveillance syndromique, repose sur des indicateurs de meˆme nature a priori, mais non spe´cifiques, notamment : mortalite´, passages aux urgences toutes causes confondues, selon l’aˆge, par exemple [34]. Remarquons qu’il n’y a pas de saut qualitatif entre ces deux types de surveillance, mais, plutoˆt, un « gradient de pre´cision » allant du moins au plus spe´cifique, ce qui fait que, parfois, la distinction entre ces deux modalite´s n’est pas dichotomique. Quant a` la vigilance, elle ne se focalise pas, a` proprement parler, sur des indicateurs (outils pre´formate´s), mais repe`re des e´ve´nements (ou des donne´es) « anormaux » ou plutoˆt perc¸us comme tels. Si la difficulte´, dans ce cas, porte sur ce que l’on entend par « e´ve´nement anormal », un ensemble de crite`res permet, toutefois, d’en faire l’analyse : caracte`re inhabituel, se´ve´rite´, tendance a` diffuser, absence de re´ponse aux mesures de prise en charge habituelles.. [23]. 3.1. Processus 3.1.1. Formalisation de la veille sanitaire La veille se construit donc sur un triptyque (Fig. 2) : un me´canisme re´cepteur : la perception des signaux ; un me´canisme inte´grateur : l’analyse et l’interpre´tation ; un me´canisme effecteur : l’information et l’alerte. La partie effectrice est relativement monolithique ; les processus d’information et d’alerte sont assez reproductibles d’un exemple a` l’autre et suivent, dans tous les cas, a` peu de choses pre`s, la meˆme voie. Le contenu de l’information peut varier selon l’interlocuteur, mais son me´canisme, lui, varie peu ; celui de l’alerte est constant, a` la dimension temporelle pre`s : alerte « imme´diate » ou alerte « pre´visionnelle ». Il n’en est pas de meˆme pour la partie re´ceptrice qui pre´sente plusieurs aspects que l’on peut classer selon deux axes : la nature des sources d’information qui peut eˆtre « organisationnelle » ou « non organisationnelle » ; le me´canisme de re´ception de l’information qui peut eˆtre « pre´formate´ » (« fortement structure´ ») ou « non pre´formate´ ». Par sources « organisationnelles », nous entendons les organisations de´die´es a` la veille : agences re´gionales de sante´, Direction ge´ne´rale de la sante´, re´seaux de surveillance (re´seau D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 405
  • 6. de me´decins, de laboratoires. . .), hoˆpitaux, centres anti- poison. . . Par sources « non organisationnelles », nous entendons les signalements sur des e´ve´nements de sante´ par les professionnels de sante´ et les individus de manie`re plus large et la masse des productions d’informations textuelles d’origine scientifique (les revues scientifiques ou la presse profession- nelle, les congre`s, les se´minaires. . .), me´diatique (la presse ge´ne´raliste) ou populationnelle (les associations de de´fense des consommateurs, les associations de de´fense des patients. . .). La notion de me´canisme « pre´formate´ » fait re´fe´rence a` la surveillancee´pide´miologique (l’objet de la surveillance est lecas pre´de´fini ou, plus exactement son substitut : l’indicateur ; les me´thodes permettant d’analyser ce dernier sont pre´de´termine´es), que la surveillance soit spe´cifique (intoxications oxycarbone´es, effets sanitaires de la pollution de l’air, infections nosocomiales, cancer de la thyroı¨de, par exemple) ou non spe´cifique comme le syste`meSurSaUD1 .Lanotiondeme´canisme«nonpre´formate´ » fait re´fe´rence a` la veille non structure´e comme pour les malformations uroge´nitales du garc¸on ou le SHU, en tout cas, au de´but du de´veloppement de ces deux alertes. Il est possible ainsi de dire que le langage courant pousse a` appeler ce type de veille « vigilance » ou « vigilance e´pide´miologique » ou « vigilance de sante´ publique » (l’objet de la vigilance est le cas non pre´de´fini et le me´canisme est la re´ception de signaux et la de´tection de signaux anormaux7 ),maiscettede´nomination est,de´ja` re´serve´e a` la vigilance sur les produits issus des activite´s humaines (pharmacovigilance, etc.). Aussi, garderons-nous le terme de veille « non pre´formate´e ». La veille sanitaire s’exerce sur des faits sanitaires (au sens large : e´ve´nement de sante´, effets des de´terminants – de´mographiques, e´conomiques, technologiques – de la sante´, « e´tats de l’environnement de´terminants » pour la sante´, facteurs de risque, expositions, offre de soins, comportements, actions de sante´ publique) transmis et/ou re´ve´le´s par les sources vues ci-dessus. Ces faits sanitaires sont issus des sources organisationnelles (la veille est « casuistique ») ou de sources non organisationnelles et rapporte´s au syste`me de veille (Tableau 1). Dans ce dernier cas, comme vu plus haut, la veille sanitaire se pre´sente sous plusieurs formes : veille scientifique (veille documentaire scientifique, lecture d’articles et de rapports scientifiques, fre´quentation des congre`s. . .), me´dia- tique (suivi de la presse d’information e´crite ou parle´e, ge´ne´raliste ou professionnelle de sante´ spe´cialise´e comme la presse me´dicale)8 , populationnelle ou « vernaculaire » (enre- gistrement et analyse des questions/demandes de la population ou de ses repre´sentants, associations ou de´cideurs, etc.)9 . Notons que la veille prospective, veille sur des signes pre´sents aujourd’hui qui annoncent des faits futurs, et la veille internationale, veille sur des signes pre´sents aujourd’hui et ailleurs qui annoncent des faits potentiels ici, aujourd’hui ou demain, ne sont pas des entite´s a` part. Elles sont, respective- ment une de´clinaison temporelle et une de´clinaison spatio- temporelle de la veille sanitaire pre´formate´e ou non pre´formate´e sur des faits issus des sources organisationnelles ou non organisationnelles. La veille prospective, comporte Analyse du signal quantitative et/ou qualitative Analyse statistique (modélisation tendance, analyse signal) Interprétation et production scientifique Communication à destination de la société civile (associations, etc.) Communication à destination de la tutelle, des décideurs… Événements pré-définis , concernant la santé (entités pathologiques ou facteurs de risque idéntifiés à priori) Événements non définis à priori, concernant la santé (faits subits ou signalements relatifs à des entités pathologiques ou des facteurs de risque) Données Données Indicateurs Résultats Résultats interprétés (information) - Connaissance OU/ET - Alerte (CT, LT) OU/ET - Contribution à la gestion des crises) OU/ET - Aide à la décision - Connaissance OU/ET - Alerte VEILLE NON PRÉ-FORMATÉE : VIGILANCES, ETC. VEILLE PRÉ-FORMATÉE : SURVEILLANCE ÉPIDÉMIOLOGIQUE Construction des indicateurs Collecte structurée et préétablie de données Collecte non préétablie et/ou non structurée de données - Connaissance OU/ET - Alerte (CT, LT) - Connaissance OU/ET - Alerte Communication à destination des professionnels de santé Communication à destination de la presseDonnées validées Vérification et validation Fig. 2. Architecture de la veille sanitaire. 7 La re´ception de signaux avec de´tection d’anomalies est encore appele´e de fac¸on synthe´tique, la « remonte´e de cas » ou « signalement ». 8 Les « objets » de veille me´diatique sont les articles de presse, l’information radiophonique, te´le´visuelle ou produite par Internet. . . 9 Notons que la « veille sur la communication » est une veille et, a` ce titre, posse`de une dimension « surveillance » et une dimension « vigilance ». D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411406
  • 7. comme la veille de fac¸on ge´ne´rale, une composante pre´- formate´e qui permet de de´terminer (i.e. de mode´liser et projeter) des tendances « lourdes » et une composante non pre´formate´e qui, a` l’aide de me´thodes qualitatives, est apte a` « sentir » des tendances a` plus court terme. Ainsi, que cela concerne les faits issus des sources organisationnelles ou rapporte´s, que le me´canisme soit de type non pre´formate´ (re´ception de signalements scientifiques, me´diatiques. . .) ou de type pre´formate´ (surveillance), la relation temporelle a` l’e´ve´nement qui motive l’information et/ou l’alerte peut aboutir a` une information a` finalite´ imme´diate, concernant un e´ve´nement qui a lieu, mais elle peut aussi aboutir a` une information a` finalite´ retarde´e pre´voyant des phe´nome`nes e´mergents (veille prospective, voire internationale si l’e´loignement implique un de´lai pour voir arriver les phe´nome`nes sanitaires). Les veilles pre´formate´e et non pre´formate´e sont donc deux activite´s diffe´rentes, comple´mentaires et indispensables. Elles fonctionnent en paralle`le pour ce qui est du segment re´cepteur, mais se rejoignent dans le segment effecteur (Fig. 2) et cre´ent, le cas e´che´ant, les conditions de l’alerte. 3.1.2. Formalisation de la surveillance e´pide´miologique ou veille pre´formate´e La de´finition e´tablie par les CDC [8] vaut toujours. Elle sera donc conserve´e ici. Elle se structure en une succession d’e´tapes ou processus : conception/protocole, collecte des donne´es brutes, construction du tableau de donne´es a` analyser, analyse des indicateurs, interpre´tation des re´sultats de l’analyse, diffusion des re´sultats et de leur interpre´tation. 3.1.3. Formalisation de la veille non pre´formate´e : signalements, signaux scientifiques, me´diatiques. . . Une activite´ (un dispositif ?) de veille non pre´formate´e n’est pas exactement une surveillance e´pide´miologique, meˆme si elle en reveˆt parfois la forme (voir la description du processus, ci- dessous). En fait, elle n’est pas organise´e comme telle. Ce type de veille perc¸oit ou produit, une « remonte´e de signaux a` partir d’e´ve´nements de sante´ pouvant repre´senter une menace pour la sante´ » [23]. Le champ the´matique et ope´rationnel de cette activite´ est : de s’inte´resser a` des faits sanitaires et a` des expositions a` des facteurs de risque, ave´re´s ou potentiels, naturels ou d’origine anthropique ; d’inclure obligatoirement, parmi ses objectifs, l’identifica- tion d’effets jusqu’alors inconnus ; d’ope´rer par un processus de repe´rage et de signalement de phe´nome`nes anormaux ; ce signalement est produit par le suivi non pre´formate´ (parfois non structure´10 ) ou non pre´e´tabli de faits (de sante´) rapporte´s ou par le suivi non pre´formate´ de l’e´volution de donne´es, traduisant la survenue d’e´ve´nements de sante´. Comme pour la surveillance, il est possible de de´crire ce type de veille sous la forme d’un processus re´pondant a` la de´finition suivante [5,23] : processus permanent et organise´ : de re´ception des signaux et des donne´es pertinentes relatives : – aux expositions aux facteurs dont les effets sanitaires (de´le´te`res ou protecteurs) sont suspecte´s, reconnus ou inconnus, – aux e´ve´nements de sante´ connus ou inconnus ; d’analyse et d’interpre´tation de ces donne´es, de diffusion des re´sultats des analyses et de leur interpre´tation en temps opportun a` ceux qui en ont besoin ; en vue : de la de´tection ou de l’anticipation de modification de l’e´tat de sante´ des populations (risques), d’une action de sante´ publique : – de controˆle, – de pre´vention des expositions et/ou des maladies. 3.1.4. « Remarque » Cette modalite´ peut se fonder sur l’existence d’un re´seau de professionnels (centres antipoison et de toxicovigilance, re´seau de me´decins sentinelle. . .), organe de l’observation qui, lui en revanche, peut eˆtre fortement structure´. Le processus est compose´ des e´tapes suivantes : conception, collecte des donne´es brutes ou re´ception du signal, analyse du signal, interpre´tation des re´sultats de l’analyse, diffusion des re´sultats et de leur interpre´tation. Les notions de surveillance et de veille non pre´formate´e ne sont donc pas similaires, mais ont des champs communs : l’objet lui-meˆme, mais aussi certains outils telles que les bases Tableau 1 Veille sanitaire et ses composantes. Veille non pre´formate´e Veille pre´formate´e (ou fortement structure´e) Faits issus des sources organisationnelles Vigilances classiques (i.e. sur les produits), toxicovigilance « vigilance sur les e´ve´nements pathologiques » Surveillance e´pide´miologique Faits issus des sources non organisationnelles « Vigilances » scientifique, me´diatique, populationnellea Surveillances scientifique, me´diatique, populationnelle a Ces termes ne sont pas officiels et pourraient eˆtre interpre´te´s dans un sens tout diffe´rent. Le terme vigilance n’est, bien e´videmment, pas utilise´, ici, dans le sens qui lui est attribue´ dans des expressions du type « comite´ de vigilance » ou`, au sens que nous donnons a` ce mot, est adjoint celui d’action (contre, en ge´ne´ral). Cette dernie`re dimension est, d’ailleurs, plus conforme a` la de´finition institutionnelle de la vigilance, de´finition que nous ne retenons pas. 10 « Non structure´ » voulant dire qu’il n’y a pas d’indicateur de´fini et encore moins d’indicateur quantitatif de´fini. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 407
  • 8. de donne´es. Elles recouvrent des concepts et des activite´s diffe´rentes mais comple´mentaires. Elles occupent l’espace de de´finition de la veille sanitaire. Remarquons, a` cette occasion, que le de´bat concernant le statut de la toxicovigilance entre vigilance et surveillance des intoxications semble inopportun : les deux approches ont une utilite´ et se renforcent lorsqu’elles sont conjointement ope´re´es. Logiquement, a` la lueur de ce qui vient d’eˆtre dit, cela pourrait s’appeler toxico-veille ! 3.2. L’articulation des composantes de la veille et des activite´s voisines Vigilance, surveillance, recherche sont des activite´s qui se retrouvent souvent sur le meˆme terrain et, si elles ne sont pas comple`tement contemporaines, s’enchaıˆnent ou interagissent fortement. Cet entrecroisement est, la` encore, inspire´ de notre re´action en tant qu’individu, face aux e´ve´nements qui arrivent a` notre conscience : on pourrait meˆme dire que ceux-la` doublent ceux-ci (Encadre´ 1). 3.3. Les outils de la veille La veille, comme conjonction de deux me´canismes comple´mentaires, veilles pre´formate´e et non pre´formate´e, dispose d’outils propres a` chacune des e´tapes de son processus (Tableau 2). Les donne´es sont collecte´es de fac¸on fortement structure´e dans les syste`mes de surveillance (bases de donne´es alimente´es en routine, souvent) [35], de fac¸on « non force´ment » structure´e dans les dispositifs de veille non pre´formate´e (re´seaux de professionnels de sante´11 , souvent), mais aussi a` partir des interpellations issues des lanceurs d’alerte, de la presse. . .. Les indicateurs, propres a` l’activite´ de surveillance, sont construits par transformation des donne´es brutes (combinaisons d’une ou plusieurs donne´es telles que moyennes, fonctions, etc.). En ce qui concerne l’analyse, l’approche est de deux types. Il s’agit : d’une analyse de tendance (description et mode´lisation de type re´gression) qui permet de dire comment se comporte le phe´nome`ne (il augmente, diminue ou reste stable, varie de fac¸on saisonnie`re, etc.) et de dire ce qu’il deviendra (projection dans le futur) ; d’une analyse du signal qui permet d’enregistrer le flux des donne´es et de de´tecter un e´ventuel accident au cours de son e´volution temporelle. La veille non pre´formate´e met en œuvre le second me´canisme, la surveillance ope`re les deux me´canismes. Remarquons, a` ce sujet, que l’utilisation du mot « signal » preˆte souvent a` confusion. Ici, nous convenons que le signal est ce qui est analyse´ (au sens de ce qui est suivi, interpre´te´ : indicateur pour la surveillance, donne´es valide´es pour la veille non pre´formate´e) et non pas, comme on le voit parfois [21], ce qui est re´ve´le´ comme e´tant anormal par l’analyse. Nous conside`rerons, alors, que cet e´ve´nement, re´ve´le´ comme anormal, est une alerte ou un signal d’alerte. Les outils utilise´s pour l’analyse de tendance (donc au sein de la surveillance) sont des re´gressions utilisant des fonctions explicites du temps comme variables explicatives ou utilisant d’autres variables comme celles repre´sentant les facteurs de risque, eux-meˆmes de´pendant du temps. Ces re´gressions prennent en ge´ne´ral la forme de se´ries temporelles [36–38]. Ces dernie`res notamment quand les indicateurs de la surveillance sont non spe´cifiques, permettent aussi de de´tecter des variations anormales de l’indicateur suivi et donc de ge´ne´rer un signalement [24,39]. Les se´ries temporelles se preˆtent aussi a` l’analyse du signal avec de´tection d’anomalie comme ope´re´e par la veille non pre´formate´e (la survenue d’un brusque accident de tendance peut donner lieu a` un me´canisme de perception non pre´formate´). Cette dernie`re peut utiliser e´galement des outils quantitatifs ou semi-quantitatifs tels que les re´seaux de neurones [40,41] ou la fouille de donne´es (data mining), souvent utilise´s par la pharmacovigilance [42–46]. Encadre´ 1. Veille, alerte, surveillance, vigilance, dans quel ordre ? Le processus mental. D’abord nous « veillons » de fac¸on spontane´e, « non active », diffuse, non focalise´e. C’est la « vigilance » au sens commun ou, plus ge´ne´ralement, « la veille non pre´formate´e » et nous de´couvrons une irre´gularite´ tem- porelle et/ou spatiale. Comme nous « attendions » la continuite´ de ce qui est observable, nous sommes « alerte´s » par le phe´nome`ne et nous nous y inte´ressons en tentant de trouver une raison a` ce changement. Nous recherchons une cause : c’est le stade de´volu a` la « recherche » (de la cause). Souvent, nous n’arrivons qu’a` e´tablir une relation statistique sans mise en e´vi- dence de la causalite´. Puis, que nous ayons ou non de´couvert une cause, nous proposons des recomman- dations pour l’action de sante´ publique et mettons en place une « surveillance » (veiller sur) dont le roˆ le est de´sormais d’enregistrer en continu ce qui a change´ et en « fabriquant » (en estimant) l’attendu a` partir de ces observations (mode`le = projection, « fabrication » de l’attendu). Nous pouvons aussi comple´ter notre surveil- lance cible´e par un e´tat de « vigilance » (au sens com- mun) qui correspond a` la « veille non pre´formate´e » et qui sera suffisant pour que nous puissions remarquer activement des phe´nome`nes non pre´vus. La veille con- siste, ainsi, a` « s’attendre a` l’attendu » et de voir quand il y a diffe´rence entre l’attendu et l’observe´ (l’attendu peut eˆtre l’absence d’e´ve´nement inconnu). La veille corre- spond donc bien a` l’e´tat de vigilance. L’attendu/observe´ peut eˆtre une valeur, une pente (une tendance). La surveillance et la vigilance peuvent, a` leur tour, eˆtre suivies d’une activite´ de « recherche » ciblant des e´ve´- nements mis en e´vidence par ces activite´s de veille et ainsi de suite. . .. 11 Les re´seaux de me´decins sentinelles, en de´pit de leur de´nomination, sont plutoˆt consacre´s a` la surveillance qu’a` la vigilance. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411408
  • 9. Elle peut aussi mettre a` contribution des outils qualitatifs comme l’analyse d’une information rapportant la survenue d’un e´ve´nement et la validation du signalement, fonde´e sur l’expe´rience. Elle peut, enfin, de fac¸on ge´ne´rale, avoir recours a` un ensemble de me´thodes propres aux sciences humaines et sociales. Ici il sera fait appel a` la notion de jugement plutoˆt qu’a` la « me´canique » quantitative [47]. L’interpre´tation de l’analyse et la production scientifique (rapports, articles) se font de fac¸on colle´giale avec l’ensemble des participants a` l’activite´ de veille pre´formate´e et/ou non pre´formate´e. Quant a` la communication, prote´iforme et destine´e a` des interlocuteurs de natures diffe´rentes, elle utilise les outils classiques qui lui sont propres : la diffusion des rapports et articles scientifiques e´labore´s a` l’e´tape pre´ce´dente, les communique´s de presse, etc. L’interpre´tation des analyses et la communication servent, in fine, a` la connaissance et a` l’alerte [48] ainsi qu’a` la gestion des crises et a` la de´cision. 3.4. Strate´gie de coope´ration entre les diffe´rentes composantes de la veille Les veilles pre´formate´es et non pre´formate´es se comple`tent et coope`rent dans leurs productions, la connaissance, l’alerte et dans leur mission ultime d’aide a` la gestion (Fig. 3). 4. Conclusion Les propositions, e´nonce´es ici, ont tente´ de clarifier un certain nombre de concepts qui re´pondent a` des activite´s mene´es quotidiennement dans le champ de la sante´ publique. Elles tentent de concilier le sens que les mots « surveillance », « vigilance », « observation » et « veille » ont acquis dans le langage courant et le contenu des activite´s auxquelles renvoie l’usage des meˆmes mots en sante´ publique. La « tentative de conciliation » n’est pas toujours couronne´e de succe`s car les termes analyse´s sont tre`s proches quant a` leur signification et donc quant a` leur emploi dans le langage tant courant que professionnel avec, comme corollaire, une confusion fre´quente dans la perception des frontie`res entre les activite´s de sante´ publique concerne´es. La « vigilance », comme l’usage l’a fixe´e dans la sphe`re sanitaire officielle n’est qu’une partie de la « vigilance » au sens commun du terme. Aussi, avons-nous opte´ Tableau 2 Outils de la veille. Veille pre´formate´e (surveillance e´pide´miologique) Veille non pre´formate´e (vigilances, etc.) Donne´es Bases de donne´es alimente´es en routine Re´seaux de professionnels de sante´, interpellations issues des lanceurs d’alerte, de la presse. . . Donne´es pre´de´finies Souvent, donne´es multimodales (nature prote´iforme) Indicateurs Transformation des donne´es brutes (combinaisons d’une ou plusieurs donne´es telles que moyennes, fonctions, etc.) 8C/8 Analyse Tendance et projection Se´ries temporelles Analyse d’e´ve´nements au cas par cas sur la base de crite`res qualitatifs (fait appel au jugement et a` la colle´gialite´) De´tection anomalies Se´ries temporelles Me´thodes qualitatives des sciences humaines et sociales, fouille de donne´es, re´seaux de neurones, jugement Interpre´tation De´termination de l’importance du phe´nome`ne surveille´ pour la sante´ publique De´cision d’alerter le de´cideur Analyse des options de gestion – de´cision d’alerter le de´cideur Analyse des options de gestion Communication Rapports et articles scientifiques Bulletin Notes aux de´cideurs Notes aux de´cideurs Communique´s de presse Dans certains cas, rapports, articles scientifiques 8/8 : sans objet. Observation non structurée Observation structurée Veille non pré-formatée : vigilances, etc. Veille pré- formatée : surveillance Connaissance Alerte Aide à la gestion Évaluation Action Fig. 3. Coope´ration de la surveillance et de la veille non pre´formate´e pour l’action. D. Eilstein et al. / Revue d’E´pide´miologie et de Sante´ Publique 60 (2012) 401–411 409
  • 10. pour une de´nomination diffe´rente, celle de « veille non pre´formate´e » qui s’oppose a` la « veille pre´formate´e » ou « surveillance » et la comple`te. La notion de « pre´formatage » (ou de pre´de´termination) traverse l’ensemble des activite´s de veille, qu’elles portent sur des objets « directement » sanitaires (maladies, symptoˆmes, syndromes, de´terminants de sante´. . .) ou « indirectement » sanitaires (signaux bibliographiques, me´diatiques. . .). Cette opposition et cette coope´ration entre le pre´formatage et l’absence de pre´formatage est fortement inscrite dans le cerveau humain, dans tous ses champs d’activite´ et dans toutes ses productions (art, musique, biologie. . .) et, donc dans la perception des dangers sanitaires. Il est ne´cessaire de pre´server ces deux polarite´s et de les exercer conjointement car, sinon, on s’expose au risque de rester aveugle a` des signaux te´moins ou annonciateurs d’e´ve´nements favorables ou de´fa- vorables. Nous insistons sur l’inte´reˆt qu’il y aurait de partager ces de´finitions, voire de les normaliser. Pour ce faire, il faut de´composer le contenu des activite´s de la veille, raison pour laquelle nous avons trouve´ utile de sche´matiser ces processus. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Remerciements A` Caroline Semaille (InVS) pour sa participation aux re´flexions sur les concepts pre´sente´s dans cet article, a` Sophie Martinon (InVS) pour ses recherches sur les textes le´gislatifs de´finissant ces notions ainsi qu’aux relecteurs pour ses remarques et suggestions. Re´fe´rences [1] Salines G. Surveillance, observation, veille, vigilance. Environ Health 2006;5:329–30. [2] Eilstein D, Le Moal J, Lim TA. Les concepts de surveillance en sante´ environnementale. Epidemiol Bull 2009;27–28:283–6. [3] Salmi LR, Lawson-Ayayi S, Hajjar M, Salamon R, Gre´my F. Les syste`mes de vigilance. 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