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Qlm10
1. A
ux confins du Plateau et du Mile-End, le Petit-Portugal
n’a pas toujours été le quartier le plus branché de
Montréal. Après-guerre, ses habitants québécois dé-
laissent ce qu’on appelle alors St-Louis-du-Mile-End, quartier
ouvrier aux logements délabrés, pour aller chercher leur rêve
américain en banlieue. En 1953, un accord est signé entre
le Canada et le Portugal. Le chemin de fer et les fermes ont
besoin de main-d’œuvre, or nombreux sont les candidats à
l’émigration dans un pays sinistré économiquement, sous
le joug de la dictature de Salazar. « Les services d’immi-
gration regardaient davantage les mains des Portugais que
leurs papiers, raconte Joaquina Pires, une citoyenne très
impliquée dans la communauté lusitanienne. On voulait des
mains usées par le travail ! » Venant de toutes les régions du
Portugal, ces migrants choisissent le Plateau pour sa posi-
tion centrale et ses loyers abordables. Mme Pires, elle, est
arrivée en 1966, à l’âge de 10 ans. « Mon frère est venu le
premier à Montréal, puis il a parrainé toute la famille. Nous
avons d’abord vécu dans une ancienne synagogue de la rue
Duluth, reconvertie en appartements. » En effet, avant d’être
portugais, le quartier avait été juif.
La rénovation des logements
Locataires à leur arrivée, les Portugais deviennent propriétaires.
« Posséder son logement est important dans notre culture », ex-
plique Mme Pires. Pour parvenir à cette fin, la Caisse d’économie
des Portugais, créée en 1969, prête de l’argent. Mais des problèmes
demeurent : les bâtisses tombent en ruine, les incendies sont mon-
naie courante. Les nouveaux résidents mettent alors à profit leurs
habiletés ouvrières et échangent des services pour retaper les mai-
sons. Et y ajouter une touche bien de chez eux : la morne brique
montréalaise se pare de couleurs vives et la céramique fait son
apparition. « Peindre les façades ne plaisait pas à tout le monde,
selon Annick Germain, sociologue urbaine qui étudie les questions
d’immigration. Des architectes disaient que c’était mauvais pour la
brique. Mais il y a là une volonté de la part des Portugais d’imposer
leur marque, compréhensible quand on a tant travaillé et investi. »
Joaquina Pires ne la contredit pas : « Beaucoup de libertés ont été
prises, car il n’y avait pas vraiment de législation. Toutefois, en
1975, l’Ordre des architectes a reconnu l’apport de la communauté
à l’esthétisme de Montréal. »
le cahier Culture / gros plan
Le Petit-Portugal
De Porto
au PlateauVille d’immigration par excellence,
Montréal voit son histoire se confondre
avec celle des communautés culturelles
qui la composent. La preuve en couleurs
et en saveurs dans le quartier portugais.
20 Québec le mag’ 21 Québec le mag’
TEXTES RÉMY BOURDILLON - PHOTOS DAVID NATHAN
Sur le Plateau
Mont-Royal,
les façades et
les commerces
colorés signalent
l’empreinte de
la communauté
portugaise.