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Mémoire présenté à la Commission parlementaire sur la réglementation du prix du livre au
public des livres neufs imprimés et numériques
Par François Colbert et André Courchesne
Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi-Marcoux, HEC Montréal
Identifier le problème
Que signifie une réglementation du prix du livre neuf? Comment cette réglementation s’inscrit-
elle dans les trois grands objectifs que s’est donnés le Québec par sa Politique culturelle (1992) :
cette réglementation renforcera-t-elle l’identité québécoise? Soutiendra-t-elle mieux les
créateurs québécois, dont les auteurs de chez nous? Facilitera-t-elle l’accès aux œuvres
québécoises et à la participation à la vie culturelle? Le texte qui suit illustre que la
réglementation à l’étude sur le prix du livre neuf aura des effets au mieux incertains, comme
l’ont illustré les études menées il y a une quinzaine d’années, tout en étant difficile à appliquer.
Nous croyons que la volonté gouvernementale devrait s’appuyer sur l’ensemble des objectifs de
sa Politique culturelle et considérer la problématique du lectorat dans son ensemble, au lieu de
se concentrer seulement sur le prix des livres neufs.
Toutefois, nous comprenons les enjeux légitimes des associations du livre qui visent à préserver
la bibliodiversité dans les régions du Québec en protégeant le libraire indépendant, car ce
dernier permet de tenir en inventaire une profondeur que la grande surface ne fait pas, et ainsi
permettre aux lecteurs un plus grand choix d’œuvres. Cette préoccupation est légitime, mais la
réglementation projetée est-elle la meilleure façon d’agir? Résoudra-t-elle les problèmes
identifiés dans le document de consultation? Nous n’en sommes pas certains. La solution passe
plus probablement par la stimulation de la demande (la lecture de livres) et un soutien ciblé aux
libraires indépendants, entre autres par l’assujettissement du livre électronique à la Loi du livre
concernant les clients institutionnels.
Contexte
Plusieurs facteurs structurels viennent empêcher une action efficace du gouvernement pour
stimuler le marché de l’achat du livre (en général et pour les œuvres des écrivains québécois en
particulier1
) et protéger le libraire indépendant : la saturation du marché, la concentration
verticale issue de la convergence, la délocalisation de la distribution et la dématérialisation du
livre.
Le marché des arts, tout type d’art confondu, est saturé et parfois en décroissance. Au Québec,
selon l’analyse des pratiques culturelles, la moyenne d’achat de livres de toute provenance et de
1
Le marché de la littérature générale de livres neufs représentait 66 millions de dollars au Québec en
2012 (Optique Culture, no. 27, Observatoire de la culture et des communications du Québec, juillet
2013); la part québécoise de la littérature générale étant à 36%, le marché des œuvres québécoises est
estimé à 23,8 millions de dollars; comme les auteurs touchent en moyenne 10% du prix de vente final,
ces facteurs pourraient expliquer pourquoi 65% des écrivains québécois gagnent moins de 5 000$ par
année de leur création littéraire, 22% entre 5 000 et 20 000$ et 13% plus de 20 000$ (Observatoire de la
culture et des communications du Québec, 2008). Si l’on désirait augmenter le revenu moyen des 1 510
écrivains québécois (Optique culture no. 3, mai 2011) à 20 000$ par année, leurs droits d’auteurs
devraient atteindre 19,7 millions de dollars, représentant des ventes supplémentaires de près de 200
millions de dollars, soit huit fois le marché actuel de 23,8 millions de dollars.
CCE – 004M
C.P. – Livres
neufs imprimés
et numériques
tout type, est de 19 livres par année pour les femmes et de 15 livres pour les hommes en 2009,
une baisse d’un livre par année en moyenne depuis 2004 (Survol no. 24, Ministère de la Culture
et des Communications, décembre 2012). Il faut aussi noter que le citoyen québécois consomme
déjà beaucoup de produits culturels. De fait, tous consomment à des degrés divers des
téléromans ou des téléséries, 65% d’entre eux vont aussi au cinéma, presque tous regardent des
films à la télévision, presque tous écoutent de la musique, une forte proportion lit des livres,
certains vont au concert, au théâtre, au musée, au spectacle populaire. Invariablement, des
mesures de stimulation de la demande pour un secteur en particulier se font au détriment des
autres, car la demande totale pour le loisir n’augmente pas ou si peu. Pour faire lire un plus
grand nombre de livres, il faudrait aussi que le consommateur utilise une plus grande partie de
son temps libre à la lecture plutôt qu’à d’autres formes de loisirs, car, en ces temps où la
conciliation travail-famille est si difficile à réaliser, il est un peu utopique de vouloir ajouter une
activité supplémentaire.
Le goût de la lecture s’acquiert quand on est jeune, comme le goût du théâtre ou de la musique
classique, ou encore la volonté de poursuivre des études supérieures. Dans une société où 25%
des gens ne savent pas lire, où les maîtres formés à l’université peinent à maitriser le français,
où, à l’école, il n’y a que dans les cours de français où il faut savoir écrire sans fautes, où la
culture de l’effort et de l’excellence s’est perdue graduellement. Dans une situation comme
celle-là, il devient difficile d’encourager la lecture, sans travailler d’abord auprès de la jeunesse,
comme l’a reconnu dernièrement le rapport Bourgie sur le financement privé des arts et de la
culture, ainsi que le rapport sur le développement des pratiques culturelles chez les enfants
(Optique culture no. 26, Observatoire de la culture et des communications du Québec, juillet
2013).
Si le Ministère est sérieux dans sa démarche, il devrait d’abord cibler les mesures incitatives à la
lecture dans la famille et à l’école. À cet égard, la campagne La lecture en cadeau de la
Fondation Lucie et André Chagnon est un modèle de marketing social visant à stimuler la
demande et à changer des comportements à long terme. Cette stimulation de la demande
n’aurait probablement pas d’effet à court terme sur les libraires indépendants, mais elle
contribuerait à l’objectif général d’augmenter le lectorat au Québec. Pour répondre aux défis
particuliers des libraires indépendants, le Ministère pourrait considérer un appui ciblé aux
libraires isolés géographiquement, ce qui répondrait davantage à l’objectif d’assurer
l’accessibilité des œuvres à l’ensemble des Québécois.
Un deuxième facteur qui influence le marché du livre est la concentration verticale de la chaîne
du livre, de l’éditeur jusqu’au libraire, comme le notait l’analyse du Modèle québécois des
industries culturelles (Martin, Claude et collègues, FQRSC-OCCQ, 2010). Cette étude démontrait
que l’intégration verticale permettait aux joueurs convergents, dont les librairies à succursales,
de disposer d’informations très précises et constamment à jour sur la demande, leur permettant
d’ajuster les prix de vente en fonction des reportages, articles, émissions des autres membres
du groupe. Le document de consultation de la Commission établit qu’entre 2008 et 2012, on a
assisté à un transfert des parts de marché des librairies indépendantes vers les librairies à
succursales, reflétant les mouvements migratoires de la population vers les banlieues et régions
périphériques où sont plus présentes les librairies à succursales; nous croyons de plus qu’elle
pourrait résulter d’un effet de synergie de l’intégration verticale. Ce transfert de parts de
marché vers les librairies à succursales avait été déjà identifié dans l’analyse de Benoît Allaire
dès 2009 (Statistiques en bref, no. 49, Observatoire de la culture et des communications du
Québec, juin 2009).
Un troisième facteur à considérer est la délocalisation de la distribution des livres. Comme l’a
noté l’étude de Martin et de ses collègues (2010), de plus en plus de livres imprimés sont vendus
sur internet et ce nouveau mécanisme de distribution a entraîné l’essor de la vente des livres
déjà lus directement entre consommateurs ou via des sites commerciaux; ceci a sans doute
contribué à la fermeture de plusieurs librairies indépendantes de livres usagés, cet
accroissement de l’offre pourrait aussi expliquer la baisse des parts de marché de certains des
joueurs.
Enfin, le dernier facteur que le rapport de consultation cite sans pouvoir le chiffrer est la
dématérialisation du livre par un transfert de l’imprimé vers le numérique. Selon plusieurs
indicateurs, le livre numérique gagne de l’importance au Québec, comme il le fait à l’étranger,
alors que le nombre de possesseurs de tablettes et de liseuses est en progression constante. Le
livre numérique a aussi l’avantage d’éliminer tous les coûts liés aux « retours » tout en
favorisant l’exportation du livre québécois à moindres frais (Martin, Claude et collègues, FQRSC-
OCCQ, 2010).
Une réglementation sur le prix du livre
Une réglementation sur le prix du livre n’est pas la solution au problème du libraire
indépendant. Celui-ci est déjà soutenu par la politique de la librairie agréée. Rappelons que le
modèle des librairies agréées vise à maintenir en région des libraires grâce aux achats garantis
des clients institutionnels comme les commissions scolaires et les bibliothèques publiques. Or, la
baisse des ventes de livres constatée en 2012 provient essentiellement de la chute des ventes
de manuels scolaires, suite à la réforme de l’éducation, telle que l’a diagnostiqué le récent
rapport de l’Observatoire de la culture et des communications du Québec (Optique Culture, no.
27, juillet 2013).
Réglementer le prix du livre n’empêchera pas le consommateur de choisir les grandes surfaces
pour s’approvisionner en lecture, car celui-ci est de plus en plus conscient de la variable
« temps » dans ses habitudes de consommation : pourquoi ferait-il un trajet supplémentaire
pour se rendre chez un libraire indépendant? Avec la réglementation proposée, la grande
surface ne vendra pas moins de livres (mais elle fera plus d’argent) et, en bout de piste, c’est le
consommateur qui va devoir assumer l‘accroissement de la facture. Et le libraire indépendant
risque de ne pas voir un changement important dans ses ventes puisque le facteur « temps » est
au moins aussi important que le prix dans la décision d’achat. Rappelons aussi que la
réglementation proposée vise d’abord les bestsellers qui sont souvent la porte d’entrée des
nouveaux lecteurs ou des lecteurs occasionnels. Une politique de réglementation du prix du livre
correspond en fait à pénaliser ces acheteurs à revenus souvent plus modestes ou à l’intérêt
moins affirmé pour la lecture; cette réglementation découragera donc les achats des lecteurs
occasionnels et rendra moins facile leur accès à la littérature québécoise et étrangère.
Pour toutes ces raisons, nous croyons que l'instauration d’une réglementation du prix des
nouveaux livres sera probablement un coup d'épée dans l'eau : cette mesure sera sans doute
sans grand effet et difficile à appliquer, à la fois au niveau des mécanismes de surveillance au
Québec et ceux qui seront nécessaires sur les livres qui sont distribués de l’extérieur du Québec,
qui demanderont en plus une révision des accords internationaux de commerce. Par ailleurs,
quand on constate la facilité avec laquelle les internautes peuvent actuellement déjouer les
verrous informatiques sur la musique, les films et les livres, on ne peut instaurer une barrière de
plus à l’accessibilité sans craindre une hémorragie encore plus grande vers le téléchargement
illégal.
Des pistes de solution
À notre avis, la réglementation du prix de vente des livres neufs doit s’intégrer dans l’objectif
plus vaste d’augmenter le lectorat au Québec, comme le suggère le document de consultation
en conclusion, en s’appuyant sur les grands objectifs de la Politique culturelle du Québec (1992).
Comme le souligne le document de consultation de la Commission, il serait donc pertinent
d’intégrer le livre numérique à la réflexion sur le livre imprimé. En effet, même si le livre
électronique ne remplacera probablement jamais tout à fait le livre imprimé, il pourrait être
souhaitable que le gouvernement du Québec soutienne l’inclusion du format électronique dans
sa Loi du livre concernant les clients institutionnels. Ceci aurait deux avantages indéniables.
D’une part, on rend le livre plus accessible en termes de facilité à l’emprunter en bibliothèque et
dans les écoles et, d’autre part, on consolide les revenus des libraires indépendants, en
encourageant l’achat regroupé (imprimé + électronique).
De plus, dans le cadre de la révision de sa Politique culturelle, le gouvernement devrait cibler les
problèmes de fond touchant la pratique de la lecture en étudiant les solutions suivantes :
- Combattre l’analphabétisme en utilisant tous les moyens offerts par la technologie
- Promouvoir par des mesures incitatives la lecture dans la famille et à l’école
- Équiper les bibliothèques publiques et scolaires de copies électroniques des œuvres
québécoises et les rendre disponibles sur internet
- Ne pas pénaliser les lecteurs occasionnels, mais favoriser l’acquisition à long terme
d’habitudes de lecture, quelle que soit la plateforme de lecture qu’ils choisissent
- Favoriser l’exportation du livre québécois dont le succès à l’étranger rejaillit sur sa vente
et sa distribution chez nous.
Quant à la survie des librairies indépendantes, la meilleure solution serait probablement de
soutenir directement celles qui sont les plus fragiles. De la sorte, on ne créerait pas une mesure
artificielle susceptible de pénaliser tous les lecteurs, dont l’impact sur les librairies
indépendantes reste incertain.
Le Ministère pourrait aussi inciter les libraires indépendants à se constituer en coopérative
d’achat comme l’on fait tant de commerçants dans d’autres secteurs du commerce de détail.
Créer une bannière du « libraire indépendant » et regrouper les achats pour avoir accès aux
ristournes de volume permettraient aux libraires d’améliorer leur marge bénéficiaire.
Conclusion
Nous ne pensons pas que la réglementation sur le prix du livre neuf soit la solution au problème
des libraires indépendants et nous croyons que, par une telle politique, c’est le consommateur
le moins fortuné ou le lecteur occasionnel qui risque de faire les frais de cette politique. La
solution réside plutôt dans des efforts pour donner le goût de la lecture aux enfants, de doter
les bibliothèques publiques et scolaires de fonds suffisants pour accroître leur inventaire de
livres électroniques, de favoriser un regroupement des libraires indépendants et de promouvoir
le livre électronique québécois, ici et à l’étranger.
15 août 2013

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Prix unique du livre - Mémoire de la Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi-Marcoux, HEC Montréal

  • 1. Mémoire présenté à la Commission parlementaire sur la réglementation du prix du livre au public des livres neufs imprimés et numériques Par François Colbert et André Courchesne Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi-Marcoux, HEC Montréal Identifier le problème Que signifie une réglementation du prix du livre neuf? Comment cette réglementation s’inscrit- elle dans les trois grands objectifs que s’est donnés le Québec par sa Politique culturelle (1992) : cette réglementation renforcera-t-elle l’identité québécoise? Soutiendra-t-elle mieux les créateurs québécois, dont les auteurs de chez nous? Facilitera-t-elle l’accès aux œuvres québécoises et à la participation à la vie culturelle? Le texte qui suit illustre que la réglementation à l’étude sur le prix du livre neuf aura des effets au mieux incertains, comme l’ont illustré les études menées il y a une quinzaine d’années, tout en étant difficile à appliquer. Nous croyons que la volonté gouvernementale devrait s’appuyer sur l’ensemble des objectifs de sa Politique culturelle et considérer la problématique du lectorat dans son ensemble, au lieu de se concentrer seulement sur le prix des livres neufs. Toutefois, nous comprenons les enjeux légitimes des associations du livre qui visent à préserver la bibliodiversité dans les régions du Québec en protégeant le libraire indépendant, car ce dernier permet de tenir en inventaire une profondeur que la grande surface ne fait pas, et ainsi permettre aux lecteurs un plus grand choix d’œuvres. Cette préoccupation est légitime, mais la réglementation projetée est-elle la meilleure façon d’agir? Résoudra-t-elle les problèmes identifiés dans le document de consultation? Nous n’en sommes pas certains. La solution passe plus probablement par la stimulation de la demande (la lecture de livres) et un soutien ciblé aux libraires indépendants, entre autres par l’assujettissement du livre électronique à la Loi du livre concernant les clients institutionnels. Contexte Plusieurs facteurs structurels viennent empêcher une action efficace du gouvernement pour stimuler le marché de l’achat du livre (en général et pour les œuvres des écrivains québécois en particulier1 ) et protéger le libraire indépendant : la saturation du marché, la concentration verticale issue de la convergence, la délocalisation de la distribution et la dématérialisation du livre. Le marché des arts, tout type d’art confondu, est saturé et parfois en décroissance. Au Québec, selon l’analyse des pratiques culturelles, la moyenne d’achat de livres de toute provenance et de 1 Le marché de la littérature générale de livres neufs représentait 66 millions de dollars au Québec en 2012 (Optique Culture, no. 27, Observatoire de la culture et des communications du Québec, juillet 2013); la part québécoise de la littérature générale étant à 36%, le marché des œuvres québécoises est estimé à 23,8 millions de dollars; comme les auteurs touchent en moyenne 10% du prix de vente final, ces facteurs pourraient expliquer pourquoi 65% des écrivains québécois gagnent moins de 5 000$ par année de leur création littéraire, 22% entre 5 000 et 20 000$ et 13% plus de 20 000$ (Observatoire de la culture et des communications du Québec, 2008). Si l’on désirait augmenter le revenu moyen des 1 510 écrivains québécois (Optique culture no. 3, mai 2011) à 20 000$ par année, leurs droits d’auteurs devraient atteindre 19,7 millions de dollars, représentant des ventes supplémentaires de près de 200 millions de dollars, soit huit fois le marché actuel de 23,8 millions de dollars. CCE – 004M C.P. – Livres neufs imprimés et numériques
  • 2. tout type, est de 19 livres par année pour les femmes et de 15 livres pour les hommes en 2009, une baisse d’un livre par année en moyenne depuis 2004 (Survol no. 24, Ministère de la Culture et des Communications, décembre 2012). Il faut aussi noter que le citoyen québécois consomme déjà beaucoup de produits culturels. De fait, tous consomment à des degrés divers des téléromans ou des téléséries, 65% d’entre eux vont aussi au cinéma, presque tous regardent des films à la télévision, presque tous écoutent de la musique, une forte proportion lit des livres, certains vont au concert, au théâtre, au musée, au spectacle populaire. Invariablement, des mesures de stimulation de la demande pour un secteur en particulier se font au détriment des autres, car la demande totale pour le loisir n’augmente pas ou si peu. Pour faire lire un plus grand nombre de livres, il faudrait aussi que le consommateur utilise une plus grande partie de son temps libre à la lecture plutôt qu’à d’autres formes de loisirs, car, en ces temps où la conciliation travail-famille est si difficile à réaliser, il est un peu utopique de vouloir ajouter une activité supplémentaire. Le goût de la lecture s’acquiert quand on est jeune, comme le goût du théâtre ou de la musique classique, ou encore la volonté de poursuivre des études supérieures. Dans une société où 25% des gens ne savent pas lire, où les maîtres formés à l’université peinent à maitriser le français, où, à l’école, il n’y a que dans les cours de français où il faut savoir écrire sans fautes, où la culture de l’effort et de l’excellence s’est perdue graduellement. Dans une situation comme celle-là, il devient difficile d’encourager la lecture, sans travailler d’abord auprès de la jeunesse, comme l’a reconnu dernièrement le rapport Bourgie sur le financement privé des arts et de la culture, ainsi que le rapport sur le développement des pratiques culturelles chez les enfants (Optique culture no. 26, Observatoire de la culture et des communications du Québec, juillet 2013). Si le Ministère est sérieux dans sa démarche, il devrait d’abord cibler les mesures incitatives à la lecture dans la famille et à l’école. À cet égard, la campagne La lecture en cadeau de la Fondation Lucie et André Chagnon est un modèle de marketing social visant à stimuler la demande et à changer des comportements à long terme. Cette stimulation de la demande n’aurait probablement pas d’effet à court terme sur les libraires indépendants, mais elle contribuerait à l’objectif général d’augmenter le lectorat au Québec. Pour répondre aux défis particuliers des libraires indépendants, le Ministère pourrait considérer un appui ciblé aux libraires isolés géographiquement, ce qui répondrait davantage à l’objectif d’assurer l’accessibilité des œuvres à l’ensemble des Québécois. Un deuxième facteur qui influence le marché du livre est la concentration verticale de la chaîne du livre, de l’éditeur jusqu’au libraire, comme le notait l’analyse du Modèle québécois des industries culturelles (Martin, Claude et collègues, FQRSC-OCCQ, 2010). Cette étude démontrait que l’intégration verticale permettait aux joueurs convergents, dont les librairies à succursales, de disposer d’informations très précises et constamment à jour sur la demande, leur permettant d’ajuster les prix de vente en fonction des reportages, articles, émissions des autres membres du groupe. Le document de consultation de la Commission établit qu’entre 2008 et 2012, on a assisté à un transfert des parts de marché des librairies indépendantes vers les librairies à succursales, reflétant les mouvements migratoires de la population vers les banlieues et régions périphériques où sont plus présentes les librairies à succursales; nous croyons de plus qu’elle pourrait résulter d’un effet de synergie de l’intégration verticale. Ce transfert de parts de marché vers les librairies à succursales avait été déjà identifié dans l’analyse de Benoît Allaire dès 2009 (Statistiques en bref, no. 49, Observatoire de la culture et des communications du Québec, juin 2009).
  • 3. Un troisième facteur à considérer est la délocalisation de la distribution des livres. Comme l’a noté l’étude de Martin et de ses collègues (2010), de plus en plus de livres imprimés sont vendus sur internet et ce nouveau mécanisme de distribution a entraîné l’essor de la vente des livres déjà lus directement entre consommateurs ou via des sites commerciaux; ceci a sans doute contribué à la fermeture de plusieurs librairies indépendantes de livres usagés, cet accroissement de l’offre pourrait aussi expliquer la baisse des parts de marché de certains des joueurs. Enfin, le dernier facteur que le rapport de consultation cite sans pouvoir le chiffrer est la dématérialisation du livre par un transfert de l’imprimé vers le numérique. Selon plusieurs indicateurs, le livre numérique gagne de l’importance au Québec, comme il le fait à l’étranger, alors que le nombre de possesseurs de tablettes et de liseuses est en progression constante. Le livre numérique a aussi l’avantage d’éliminer tous les coûts liés aux « retours » tout en favorisant l’exportation du livre québécois à moindres frais (Martin, Claude et collègues, FQRSC- OCCQ, 2010). Une réglementation sur le prix du livre Une réglementation sur le prix du livre n’est pas la solution au problème du libraire indépendant. Celui-ci est déjà soutenu par la politique de la librairie agréée. Rappelons que le modèle des librairies agréées vise à maintenir en région des libraires grâce aux achats garantis des clients institutionnels comme les commissions scolaires et les bibliothèques publiques. Or, la baisse des ventes de livres constatée en 2012 provient essentiellement de la chute des ventes de manuels scolaires, suite à la réforme de l’éducation, telle que l’a diagnostiqué le récent rapport de l’Observatoire de la culture et des communications du Québec (Optique Culture, no. 27, juillet 2013). Réglementer le prix du livre n’empêchera pas le consommateur de choisir les grandes surfaces pour s’approvisionner en lecture, car celui-ci est de plus en plus conscient de la variable « temps » dans ses habitudes de consommation : pourquoi ferait-il un trajet supplémentaire pour se rendre chez un libraire indépendant? Avec la réglementation proposée, la grande surface ne vendra pas moins de livres (mais elle fera plus d’argent) et, en bout de piste, c’est le consommateur qui va devoir assumer l‘accroissement de la facture. Et le libraire indépendant risque de ne pas voir un changement important dans ses ventes puisque le facteur « temps » est au moins aussi important que le prix dans la décision d’achat. Rappelons aussi que la réglementation proposée vise d’abord les bestsellers qui sont souvent la porte d’entrée des nouveaux lecteurs ou des lecteurs occasionnels. Une politique de réglementation du prix du livre correspond en fait à pénaliser ces acheteurs à revenus souvent plus modestes ou à l’intérêt moins affirmé pour la lecture; cette réglementation découragera donc les achats des lecteurs occasionnels et rendra moins facile leur accès à la littérature québécoise et étrangère. Pour toutes ces raisons, nous croyons que l'instauration d’une réglementation du prix des nouveaux livres sera probablement un coup d'épée dans l'eau : cette mesure sera sans doute sans grand effet et difficile à appliquer, à la fois au niveau des mécanismes de surveillance au Québec et ceux qui seront nécessaires sur les livres qui sont distribués de l’extérieur du Québec, qui demanderont en plus une révision des accords internationaux de commerce. Par ailleurs, quand on constate la facilité avec laquelle les internautes peuvent actuellement déjouer les verrous informatiques sur la musique, les films et les livres, on ne peut instaurer une barrière de
  • 4. plus à l’accessibilité sans craindre une hémorragie encore plus grande vers le téléchargement illégal. Des pistes de solution À notre avis, la réglementation du prix de vente des livres neufs doit s’intégrer dans l’objectif plus vaste d’augmenter le lectorat au Québec, comme le suggère le document de consultation en conclusion, en s’appuyant sur les grands objectifs de la Politique culturelle du Québec (1992). Comme le souligne le document de consultation de la Commission, il serait donc pertinent d’intégrer le livre numérique à la réflexion sur le livre imprimé. En effet, même si le livre électronique ne remplacera probablement jamais tout à fait le livre imprimé, il pourrait être souhaitable que le gouvernement du Québec soutienne l’inclusion du format électronique dans sa Loi du livre concernant les clients institutionnels. Ceci aurait deux avantages indéniables. D’une part, on rend le livre plus accessible en termes de facilité à l’emprunter en bibliothèque et dans les écoles et, d’autre part, on consolide les revenus des libraires indépendants, en encourageant l’achat regroupé (imprimé + électronique). De plus, dans le cadre de la révision de sa Politique culturelle, le gouvernement devrait cibler les problèmes de fond touchant la pratique de la lecture en étudiant les solutions suivantes : - Combattre l’analphabétisme en utilisant tous les moyens offerts par la technologie - Promouvoir par des mesures incitatives la lecture dans la famille et à l’école - Équiper les bibliothèques publiques et scolaires de copies électroniques des œuvres québécoises et les rendre disponibles sur internet - Ne pas pénaliser les lecteurs occasionnels, mais favoriser l’acquisition à long terme d’habitudes de lecture, quelle que soit la plateforme de lecture qu’ils choisissent - Favoriser l’exportation du livre québécois dont le succès à l’étranger rejaillit sur sa vente et sa distribution chez nous. Quant à la survie des librairies indépendantes, la meilleure solution serait probablement de soutenir directement celles qui sont les plus fragiles. De la sorte, on ne créerait pas une mesure artificielle susceptible de pénaliser tous les lecteurs, dont l’impact sur les librairies indépendantes reste incertain. Le Ministère pourrait aussi inciter les libraires indépendants à se constituer en coopérative d’achat comme l’on fait tant de commerçants dans d’autres secteurs du commerce de détail. Créer une bannière du « libraire indépendant » et regrouper les achats pour avoir accès aux ristournes de volume permettraient aux libraires d’améliorer leur marge bénéficiaire. Conclusion Nous ne pensons pas que la réglementation sur le prix du livre neuf soit la solution au problème des libraires indépendants et nous croyons que, par une telle politique, c’est le consommateur le moins fortuné ou le lecteur occasionnel qui risque de faire les frais de cette politique. La solution réside plutôt dans des efforts pour donner le goût de la lecture aux enfants, de doter les bibliothèques publiques et scolaires de fonds suffisants pour accroître leur inventaire de livres électroniques, de favoriser un regroupement des libraires indépendants et de promouvoir le livre électronique québécois, ici et à l’étranger. 15 août 2013