1. Je suis convaincuequele « lâcher prise » est l’attitude fondamentalequi
mèneau bonheur.
Je parledu bonheur « vieintérieure » sorte de corset de velourspour
envelopper l’âme.
Alorsje m’y exerce, depuisun boutde temps….
Mais, n’empêche, j’ai la plusgrandeadmiration pour ceuxqui lâchent
pas, qui s’obstinent, résistent enverset contre tout.
Ce qui illustre le mieux pour moi cette attitude : unehistoire étonnante.
Que j’ai découverteau coursd’un voyage…
2003. Aïgues-Mortes. En Camargue. D’où nousviennentlaplupartde
nos« fleursdesel ».
Au milieu dela glaise, donc : uneforteresse, qui jaillit denulle part. On
dirait qu’elle a été déposéelà par des extraterrestres.
2. Au sein de la forteresse : la Tour de Constance. Les murs y sont d’une
épaisseur incroyable. De la pierre. Dela pierre. Quede la pierre. Le
genre d’endroitoù il fait toujourssombre, humide. Mêmeen été. Que
direde l’hiver…Les fenêtres, rares, sontsi étroites… en vuede se
protéger desflèches d’éventuelsintrus. Alorson entrevoit, on devine
presque, le paysage deglaise. Desoiseaux planentparfois.
Au sommet dela tour, unepièce circulaire (ben quin ). Au centre, un
puitset sa margelle.
3. C’est là qu’en a été enfermée, à partir de 1730, pendant38 ans, Marie
Durand, avecses compagnes. Huguenotte, elle avait refuséde renier sa
foi alors qu’il était interdit d’être protestanten France durantcette
période. Toutau long desa captivité, elle a été l’inspiratrice de ces gens
qui refusaientde se soumettre. Dansdes conditionspathétiques.
Écrivantet recevantdes tas delettres. S’imaginant perpétuellement
sans doutepouvoir faireunedifférence. Tousces complots sontperdus
depuisbelle lurette dansl’univers.
Sur la margelle du puits, ce mot est gravé: REGISTER, ce qui veutdire
RESISTER en Occitant. On se plait à croire qu’il est l’œuvredeMarie.
J’ai ressenti unetrès forteimpression en visitant ces lieux.
J’admirecette force et cette faiblesse tout à la fois. Cette naïveté et cette
foi complètementfolle en ses convictions. C’est si humain.
Commeon n’a jamais qu’unevieà vivre, elle aurait dû sansdoute faire
un autre choix. Et pourtant…
Qu’est-ce qu’on serait tous devenus, sitous les hommes et toutes les
femmesqui nousontprécédés avaientpas mal tout le temps « lâcher
prise » ?
Je suis reconnaissanteà ceux qui nel’on pas fait.
Et je leur rendshommagetout bonnement.
DominiqueGagné, CO