1. Craven, l'homme qui tua « Burness »!
« Il était une fois » un très gros sanglier, du moins pour notre région, qui apparaissait
régulièrement à partir du mois de novembre et ce depuis deux ou trois ans sur notre territoire. La
taille de ses attributs de mâle l'avait fait surnommer « Burness » par référence aux propos de la
marionnette de B.Tapie qui parle souvent de « mec sévèrement burné ».
Ce dimanche 7 novembre est le jour de la deuxième battue sur le territoire des « Clapas »,
bien connu des amateurs d'ariégeois, qu'ils soient de france, d'italie....ou d'outre-mer. A cette
occasion, j'ai plusieurs invités, dont LaurentProvence membre de notre forum. Sur ces battues,
j'officie en tant que « Chef de battue », ce qui occasionne pour moi beaucoup de travail de
préparation, de stress, mais aussi de satisfaction quand tout s'est déroulé parfaitement, en respectant
le timing prévu.
Je dois dire que cette journée démarre mal pour moi. Alors que je roule tranquillement vers
Monieux, (je vous jure que je n'invente rien) un énorme chat noir déboule devant le Defender et
manque de peu de figurer au tableau du jour. Le temps prévu par Météo France varie de pluie
soutenue à averses passagères, en passant par brumes et brouillards épars. Cerise sur le gâteau, un
partenaire m'annonce au téléphone, la défection de trois de ses invités. Super, il va falloir de
nouveau modifier à la volée l'organisation de certaines lignes de postes.
6 heures pétantes, j'arrive au rendez-vous de chasse où je me mets immédiatement au travail
pour réorganiser la battue. Au fur et à mesure de leur arrivée, les participants du jour viennent
signer le carnet de battue, puis ces formalités administratives accomplies, passent au traditionnel
« café-croissant ». Tout le monde est impatient de débuter cette battue car elle génère souvent un
beau tableau et de nombreuses occasions de tir.
7 heures, « le rond » ramène enfin un peu de silence; je rappelle alors les consignes de
sécurité, et énonce le plan de tir du jour.
« Andiamo », les chefs de ligne rassemblent alors leurs ouailles et c'est enfin le départ.
Évidemment, certains, toujours distraits, se trompent de ligne ou déclarent benoîtement, qu'ils
désirent un poste où il n'est pas nécessaire de grimper ou de marcher longuement. Évidemment, ils
ne pouvaient pas le dire avant! Pour la prochaine fois, je me promets de demander, au moment de
l'inscription, les certificats médicaux ou autres exemptions.
Alors que je viens tout juste d'approvisionner la Sauer 303 et d'allumer la Z6, Jean-Luc
m'appelle à la radio pour me demander si tout est OK.
8H30, la chasse débute. Pendant au moins 1h30, nous ne percevrons aucun récris de chien.
Sur la ligne qui se trouve à ma droite, deux coups de feu retentiront dès le commencement de la
battue; un sanglier d'une cinquantaine de kilos qui tentait de se faire la belle, sans être mené par les
chiens, sera blessé au poste 7, puis dagué par un piqueur plus loin dans la traque.
L'attente devient pesante, surtout pour les invités, qui, ne connaissant pas la topographie de
ce territoire, ne peuvent imaginer, à l'écoute des coups de feu qui claquent au loin, le déroulement
de la chasse. Pour ma part, je jubile. Il y a le feu aux « Trois Combes »; 35 coups de feu seront tirés
sur cette ligne. Après un période faste, au point qu'il était devenu très difficile de satisfaire tous les
demandeurs de poste dans cette ligne, depuis trois ans, c'était le désert. Évidemment, beaucoup
faisaient la moue quand ils apprenaient leur affectation à cette ligne. Le sentiment d'avoir à expier
une faute qu'ils n'auraient pas commise leur devenait insupportable.
Je jubilais vous disais-je, car cet été, en préparant ces chasses, j'avais remarqué que les
pentes de ces fameuses combes étaient très fréquentées par les suidés. A l'orée de cette saison, je
soupçonnais fortement un retour en grâce de ce lieu. La première battue n'avait pas confirmé mes
espérances; par contre, celle-ci démontre qu'il ne faut jamais perdre espoir. Le feu nourri déclenché
lors du passage des sangliers en plein travers de combe, outre les victimes qu'il occasionnera
directement, aura le mérite, tout comme autrefois de faire exploser les compagnies et générer des
occasions de tir pour la ligne située en cœur de chasse.
2. Légitimement, vous pensez: que devient « Burness » dans cette histoire? Je vous sens
impatients, aussi j'y viens tout de suite.
Je suis placé au poste 11 tout à coté de mon ami Laurent qui lui est au 10 bis. Rassurez vous,
je ne vais pas faire l'historique du 10 bis et de sa naissance par rapport au 10, si ce n'est que vous
dire que l'an dernier, devant assurer la tenue de deux postes, faute de participants, j'ai tué le même
jour un sanglier à chacun de ces postes. Lors de la première battue de cette année, les deux titulaires
de l'endroit on également fait une pièce chacun.
Il est 10h15, quand pour la première fois, une menée semble se diriger vers nous. Yessss, ça
arrive plein badin droit sur la ligne. Un petit ferme a lieu tout là-bas au fond d'une combe, puis la
course poursuite redémarre. Hélas, elle se dirige vers « Le jardin » sortie archi connue du monde
cynégétique local et de tous les suidés de la contrée. C est sur! Ce ne sera pas pour nous.
Je déteste les chats noirs, qui traversent la nuit, devant le Defender.
Que nenni! Tout à coup, tous les participants de cette course échevelée font demi-tour. La
voix des chiens s'amplifie, devient rageuse. Ils doivent vraiment serrer de près le sanglier qu'ils
poursuivent. J'imagine l'état de tension de tous les gens que j'ai posté sur ma ligne.
Le voilà, énorme, le poil luisant, qui déboule sur la draille sommitale de la petite falaise qui
nous fait face. Il disparaît bientôt, dissimulé par les chênes et les buis. La tension est à son comble.
Quand il va déboucher, est-ce en plein travers sur ma gauche, sur ma droite, face à Laurent?
Non, il a choisi évidemment la meilleure (théoriquement) solution pour lui, emprunter une draille
que je sais courir sous les chênes encore revêtus de leurs feuilles (Grrr) et qui au terme d'une
descente très raide aboutit sur un chemin qui mène à notre rendez-vous. Dans une éclaircie, je
l'aperçois fugitivement, le coup de carabine claque dans l'émotion et la précipitation, et il me semble
accuser l'impact. Sans le voir, je continue d'accompagner sa direction présumée, tout en gardant ma
visée. Il apparaît alors au bas de la draille, j'ai un mètre pour tirer, la Sauer claque de nouveau.
3. Cette fois, aucun doute. La balle qui le cueille entre les omoplates le cloue littéralement sur
place. J'ai le sentiment d'avoir tiré un beau sanglier, mais les exclamations de mes amis piqueurs qui
n'ont pas été longs à arriver, me font bouillir.
Eux:
Tu as tué un « mostre » (non, il n'y a pas de faute d'orthographe, je vous rappelle que nous
sommes en Provence).
Le sanglier de ta vie.
Où est Francine à cette heure?
Que fait elle?
Moi:
J'adore les chats noirs, qui traversent la nuit, devant le Defender.
4. La longue estafilade sur la cuisse droite est l'empreinte laissée par ma première balle.
Seuls le gras et la peau ont été entamés. J'ai été « trop court et pas dans l'axe ». Cette balle
aurai pu être celle de tous les regrets.
Pas très armé. Il ne détronera pas mon meilleur trophée.
5. 130 kg (le sanglier).
Il est le plus gros que j'ai tiré depuis que je chasse.
Le tableau de la journée.
Pour une fois, le soleil n'était pas au rendez-vous.