1. Henri Vigneron 2e
National à Tulle
Jour de gloire pour le colombophile de Ham-sur-Sambre
« On a fêté ça pendant trois jours ! » C’est Henri Vigneron lui-même qui le dit en parlant de lui, de son épouse,
Jocelyne et de ses nombreux amis. C’était donc la fête à Ham-sur-Sambre (commune de Jemeppe-sur-Sambre)
où subsiste un trio de colombophiles alors que le village en recensait dix fois plus à l’aube des années 70. Et
fêté quoi ? Une deuxième place Nationale sur le concours de Tulle, pardi !
Amateur jouant avec une colonie réduite, Henri Vigneron élève plutôt des pigeons de fond. Un adepte de
Narbonne, de Montélimar ou de Barcelone quand cela est possible. C’est après un Montélimar qu’il qualifie de
« catastrophique » qu’Henri Vigneron a été contraint de revoir le programme de ses quelques protégés et
d’aligner ainsi une petite équipe sur le Tulle du 29 juillet. Sur les six pigeons enlogés, cinq sont rentrés au
bercail, un seul yearling se faisant la malle. Mais dans la masse des 18148 pigeons, un mâle de deux ans réalise
l’exploit en raflant la 2e
place. C’est passé près de la victoire, très près !
Mais cela n’enlève rien à son bonheur. Le mâle en question est un pigeon de deux ans qu’il a dénommé « Le
Rapide ». « Je dois être sincère : je misais davantage sur sa sœur. Dans sa première année, elle avait déjà bien
donné sur des concours difficiles en assurant plus de 1200 mètres/minute. Lui aussi avait déjà bien fait sur des
distances similaires mais je l’attendais sur plus long. Pour l’équipe concoctée, on avait choisi Montélimar mais
ce fut une cata ce concours. J’étais déjà content que mes pigeons en reviennent. Alors, je les ai mis sur Gien
histoire de voir leur état de forme. On les a ensuite alignés sur Tulle. J’étais obligé de m’adapter. »
2. Et ce 29 juillet, oh divine surprise, le petit mâle bleu file comme le vent à du 1597 mètres/minute. Lorsqu’il
pointe comme une fusée dans le petit colombier, coincé dans le fond du jardin, revenant plein sud, Henri ne
sait pas encore à quoi s’attendre. « Je l’annonce en téléphonant à madame Cécile Dethier, du local de Pont-à-
Celles. C’est elle qui me dit qu’il n’y a rien devant lui à ce moment-là. Lorsque j’annonce mon deuxième arrivé,
quarante minutes plus tard, elle me dit que l’autre devrait finir 2e
ou 3e
vu que les annonces commencent à
tomber sur les plus longs points et qu’il n’y a qu’un vieux devant lui. » Et effectivement, ce sera la 2e
place sur
8020 vieux et la 4e
générale sur 18148 pigeons.
LA « JARNAC » DANS LE SANG
D’où est issu « Le Rapide » ? La mère est une descendante de la « Jarnac » de feu Charly Etienne croisée avec As
Pigeon de Grand Fond. Un couple qui a donné une lignée de très bons pigeons qui ont fait le bonheur de
quelques colombophiles namurois et hennuyers. « Une lignée qui a du mordant », explique Henri. « Ce pigeon
s’était déjà classé sur le Tulle en yearling. Logiquement, ces pigeons donnent bien sur ces concours à deux ans
et sur plus long à partir de leur troisième année. Mais je me devais d’être prudent cette saison car il me restait
très peu de veufs et je n’avais que quelques yearlings. Je ne pouvais pas les jouer tout le temps et n’importe où.
En plus, comme je l’ai expliqué, j’ai dû revoir leur programme après le Montélimar. »
S’il est épargné depuis son exploit, « Le Rapide » et sa sœur sont des pigeons d’un gabarit plutôt petit, comme
taillé pour les longs raids. « La Jarnac était exactement comme cela. Plutôt petite, très musclée, et elle aussi on
l’entendait voler quand elle passait au-dessus du jardin. C’est pareil pour ce mâle et sa sœur. En pleine forme,
ça fait un de ces bruits quand ils passent au-dessus, même très haut. »
Le concours de Tulle, ce mâle l’a fait après avoir lâché sa deuxième plume. « Juste après », confirme Henri.
« Mais il a de la force dans les bras, une aile puissante et un gros caractère. Je sais ce qu’on va me dire : ce jour-
là, il y avait le vent poussant et donc c’était plus facile. D’accord, mais c’était plus facile pour tout le monde
dans notre ligne, non ? »
Henri Vigneron a raison. Pour faire de telles vitesses, pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que le
vent était favorable. Mais comme il le dit avec sagesse, il était favorable pour une kyrielle de colombophiles. Et
au final, avec ce résultat, il devance une floppée de 18000 pigeons venus des lofts les plus prestigieux.
3. Dans la région, ils étaient d’ailleurs nombreux à féliciter Henri pour ce résultat. Tous savent qu’il s’agit d’un
amateur qui se donne à passion avec une petite colonie. On est loin des grands lofts des professionnels. Au
fond du jardin, à Ham, à part la volière des reproducteurs, deux petits pigeonniers se jouxtent pour abriter au
maximum une quarantaine de pigeons en comptant les pigeonneaux. Ces derniers sont encore au nombre de
23 actuellement. Un tri sera évidemment opéré. Et les neuf couples de reproducteurs vont s’atteler à la tâche
en vue de la prochaine saison.
« Je commencerai la prochaine saison avec aussi peu de pigeons que celle-ci. En plus, je ne joue pas mes
femelles. Je n’ai pas les pigeonniers qu’il faut pour ça. Si je pouvais tout changer et les jouer, je le ferais. Je sais
que c’est un autre jeu et que cela implique d’autres méthodes de préparation et de motivation mais je
remarque que ceux qui savent les jouer obtiennent de bons résultats avec leurs femelles. Moi, je dégrossis les
pigeonneaux dans leur première année et ils vont sur des concours de demi-fond et grand demi-fond comme
yearling. Veuvage classique et dès leur deuxième année, on allonge sur le fond. »
NARBONNE, SA PREFERENCE
Quand il parle d’allonger le tir, Henri Vigneron pèse ses mots. Sa préférence, elle est pour les concours de fond.
Et il aime aussi tâter la ligne du Rhône. « Comme tout le monde, j’ai commencé par jouer sur la vitesse et
rapidement sur le petit demi-fond. Mais j’ai vite été attiré par le fond. Mon père, mon parrain, mes oncles, il y
avait pas mal de colombophiles dans la famille. Mais c’est lorsque j’ai connu Charly Etienne, de Floreffe, que j’ai
beaucoup appris. Ma colonie a évolué grâce à lui. Il était devenu ami. J’écoutais et appliquais ses conseils. »
Avec des résultats significatifs. Au palmarès d’Henri Vigneron, épinglons ceux-ci :
1998 Barcelone 523e
Int. et 1er
Prov. Namur
2000 Marseille 25e
et 180e
Nat.
2002 Cahors 48e
et 64 Nat.
2010 Barcelone 68e
Int.
2012 Narbonne 72e
Int.
Des concours sur lesquels il enlogeait de 2 à 6 pigeons ! « Barcelone, c’est la référence ultime. Je ne contredis
pas. Mais dans mon cas, c’est quasiment impossible de le jouer chaque année. Il faut les pigeons pour le faire.
Et le faire bien sinon ça ne sert à rien. Mettre des pigeons pour les perdre ou en étant quasiment certains qu’ils
n’y feront rien de valable, ce n’est pas mon genre. Une impasse est préférable. Mon préféré, c’est Narbonne.
J’aurais vraiment aimé le jouer cette saison. Mais cela a été impossible après le Montélimar. J’aime bien ce
concours. J’espère que j’aurai les pigeons pour le faire la saison prochaine. La ligne du Rhône, c’est bien aussi.
Complètement différent de la ligne de l’ouest. C’est dur, il faut les pigeons pour le faire. La masse est moins
importante, la capacité du pigeon à faire les bons choix est primordiale. Il faut des pigeons costauds et malins.
Et un peu de chance aussi étant donné le nombre de rapaces qui traînent partout désormais. »
LA SURVIE DE LA SOCIETE
S’il est vrai que ces rapaces sont plus nombreux sur les flancs du massif central, il ne faut pas aller aussi loin
pour désormais les retrouver aux aguets près des pigeonniers. De nombreux colombophiles wallons sont
désormais confrontés à ce problème. Cela revient dans la majorité des interviews. Celle-ci n’échappe pas à la
règle. « Il y a un de ces cocos qui règne sur le bois près de chez moi. Je le vois mais il ne s’approche jamais du
pigeonnier. Il attaque en vol, pas sur mon toit. Je remarque tout de même que le nombre d’oiseaux a
considérablement diminué derrière chez moi. C’est fou ce qu’un seul de ces spécimens peut faire comme
dégât. D’autant que s’il rate son coup en ne laissant tout de même filer sa proie, il la blesse si sauvagement que
celle-ci ne s’en remet pas. »
4. D’ailleurs, si « Le Rapide », qui a brillé sur Tulle, est actuellement privé de sortie, c’est pour le préserver de ce
rapace. Il est dès lors actuellement occupé à une autre activité, plus récréative. Du cocooning avec madame…
Pas désagréable non plus comme vie.
Reste l’avenir même de la colombophilie, en grand danger dans les contrées sambrio -namuroises. « J’enloge à
Falisolle. On me dit que suite aux problèmes privés de Michel Albert, Emile Camus a promis de tout faire pour
préserver la société et son organisation. Si elle devait disparaître, je ne sais pas si je continuerais la
colombophilie. Il me faudrait faire 70 à 80 kilomètres quatre fois par semaine, en plus des entraînements des
pigeons, c’est trop pour moi. Sauf si une bonne âme propose de l’entraide mais ça n’est plus guère courant par
ici. Il faut dire qu’on est de moins en moins à jouer aux pigeons. Arrêter, ça me fendrait le cœur mais je s’y
serais quasiment obligé si Falisolle venait à disparaitre ou à ne plus pouvoir enloger tous les concours. »
HUPEZ