En Mésopotamie, les locuteurs de deux langues, sumérienne et akkadienne, ont cohabité pendant plusieurs siècles, ce qui a abouti à une symbiose suméro-akkadienne. Le vocabulaire akkadien s'est également enrichi d'autres langues, sémitiques ou non, comme le hourrite ou l'élamite.
À partir d’une analyse des signes présents sur les roches du mont Bego, le texte présente l'hypothèse d'une parenté entre ces signes et ceux de la symbiose suméro-akkadienne, ce malgré une grande distance géographique entre la Mésopotamie et le massif du Mercantour.
Sumer, Akkad, and the languages of the Navajo, the Hopi, the Zuni, by Michel ...
Recherche de parenté entre les pictogrammes sumériens, les signes cunéiformes akkadiens et les gravures du mont Bego
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SUMER, AKKAD, VALLÉE DES MERVEILLES, MONT BEGO
Par Michel Leygues
Docteur en Sciences Sociales
lemystereduvivant@gmail.com
En Mésopotamie, les locuteurs de deux langues, sumérienne et akkadienne,
ont cohabité pendant plusieurs siècles, ce qui a abouti à une symbiose suméro-
akkadienne. Le vocabulaire akkadien s'est également enrichi d'autres langues,
sémitiques ou non, comme le hourrite ou l'élamite.
À partir d’une analyse des signes présents sur les roches du mont Bego, le
texte présente l'hypothèse d'une parenté entre ces signes et ceux de la symbiose
suméro-akkadienne, ce malgré une grande distance géographique entre la
Mésopotamie et le massif du Mercantour.
Mots-clés
Sumérien, Akkadien, Bego, Mercantour, Sospel, Saorge, chiappe, Bil-Gi, barku,
birku. Valeurs sumériennes GR, HAL, UDU, TÙN, TU-TU, MA, UTU, APIN,
KID, U, GI 6.
Livres
Akkadishes Handwörterbuch, Von Soden, Wiesbaden, Germany.
Manuel d’épigraphie akkadienne, René Labat, Paris, France.
The Assyrian Dictionary, Oriental Institute, Chicago University, USA.
Sumerian Lexicon, John A Halloran, Los Angeles, USA.
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LA VALLÉE DES MERVEILLES ET LE MONT BEGO
Les hautes vallées autour du mont Bego, - Fontanalbe, Gordolasque, Valmasque, Valauretta, la Minière,
l’Authion -, au sud-est du massif du Mercantour, possèdent un patrimoine archéologique exceptionnel qui
peut être qualifié de « merveilleux ». Des dizaines de milliers de gravures rupestres datent du Chalcolithique,
- caractérisé par l’avènement de la métallurgie du cuivre, de l’or, de l’argent, du plomb, apparition de
statues-menhirs, d’hypogées, de dolmens, représentations d’hommes et de femmes aux visages simplifiés et
aux bras stylisés, émergence d’une affirmation religieuse -, et de l’âge du Bronze ancien, - la métallurgie
s’affirme avec la maîtrise de l’alliage du cuivre et de l’étain pour obtenir du bronze -, entre 2900 et 1700
avant notre ère. Elles présentent un témoignage des rites des habitants de ces époques. Donnée importante :
selon les analyses faites en dendrochronologie, - étude des cernes de croissance annuelle des arbres qui
permettent de mettre en évidence l’alternance des saisons et de définir l’âge -, les signes datent
principalement de la période 2400 à 2200. Ce sont environ 40.000 signes qui sont inscrits sur des dalles
polies par les glaciers de la période quaternaire, constituant un langage symbolique en rapport avec les
mythes et les croyances des peuples de cette région.
Le mont Bego culmine à 2.872 mètres d’altitude, c’est le sommet de cette région située le plus souvent
entre 2.000 et 2.700 mètres. L’hiver la zone est couverte de neige, et des névés subsistent en été. Des écarts
de température importants sont relevés entre cette région et le littoral proche, particulièrement en hiver. En
été s’y développent de violents orages. La partie supérieure présente un chaos de blocs erratiques dans les
alpages, de moraines et de lacs mystérieux. Le réchauffement survenu vers 2500 avant notre ère a entraîné un
recul des glaciers et mis à jour de grandes surfaces rocheuses, de vastes dalles qui ont été lissées par ces
glaciers du Würm, nommées maintenant « chiappes ». Ce sont ces « chiappes » qui sont gravées,
particulièrement les schistes verts, oranges, couleur sang ou lie de vin, et les grès violets et roses. C’est
probablement parce que le mont Bego est le sommet avoisinant 3.000 mètres qui est le plus proche du
littoral, qu’il a été choisi par les prêtres de cette époque. De plus, sur ses flancs les schistes et les grès colorés
les séduirent.
Les thèmes iconographiques sont restreints, approximativement :
- corniformes : 72.8 %
- poignards et lames : 12.6 %
- réticulés à case simple ou à cases multiples : 7.7 %
- hallebardes : 2.6 %
- attelages de bovins, avec ou sans araires, chariot, traineau : 2 %
- croix, étoiles : 1.2 %
- figures anthropomorphes : 0.8
- armes diverses : 0.6 %
Toutes les surfaces gravées sont orientées vers le sud et le sud-est, peut-être par vénération d’ancêtres
venus d’Orient qui ont colonisé la région. On pense à Ras Shamra, future Ougarit, au nord de l’actuelle ville
de Lataquié, en Syrie, qui était au 3ème
millénaire sous influence des Akkadiens.
Les nombreux corniformes plaident en faveur d’un culte du taureau fécondant la terre ou de bête à cornes.
Les armes sont autant de métaphores d’un dieu mystérieux, dont on va voir qu’il est celui de l’orage. Un
orant aux bras levés et jambes écartées, pieds tournés vers l’extérieur, est complété d’un zig zag dirigé vers
le bas, vers une alvéole de la roche.
Différentes interprétations ont été faites. Certains chercheurs ont estimé que ces gravures piquetées
étaient des balises qui permettaient aux bergers de trouver leur chemin avec leurs troupeaux. Mais des
empilements pyramidaux de pierres en forme de cairns, comme on en trouve dans la région, auraient étés
plus faciles à réaliser. D’autres pensent que ces gravures étaient des repères topographiques pour les
processions et les cérémonies. D’autres ont estimé que ces gravures sont autant de manifestations de
vénération à l’endroit de dieux : les corniformes, les poignards, les haches et les hallebardes étaient des
figurations du dieu de l’orage ; rouelles, spirales et cornes arrondies dépeignaient un dieu solaire ; réticulés
étaient en relation avec la déesse-terre ; figures anthropomorphes étaient des figurations du dieu-éclair, ou
des personnifications de la bête à cornes. Toutes montrent des rites de fondation, elles étaient liées à des
prières et des sacrifices. Ces signes constituent une proto-écriture, une « écriture idéographique », un langage
symbolique, des idéogrammes polis sur la pierre par des religieux et par imitation par les paysans et bergers
de la région.
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Selon certains experts, le mot bego signifie « taureau », maître de l’orage, dispensateur des pluies
fertilisantes. Il constitue avec la déesse-terre le couple divin primordial. Le taureau est sacrifié avant l’hiver
pour apporter l’abondance dès le retour de la végétation. Il est représenté avec un poignard fiché dans la tête.
Dans l’ancienne Crête Minoéenne, le grand prêtre et roi abat le taureau.
D’autres spécialistes y voient la racine indo-européenne *bʰlēiǵ: briller. Mont Bego serait en raison de
son altitude le lieu des éclairs, des orages méditerranéens violents. Des minerais de fer, uranium et autres y
ont une forte attractivité électrique.
Au mont Bego, il y a des trous, naturels ou non, dans la roche. Sur la gravure de gauche ci-dessous, le
trou tient lieu de tête d’un prêtre ou d’un sorcier invitant le dieu de la foudre à se manifester ; ou bien la
gravure représente le dieu de l’orage lui-même, ce dieu Bego équivalent à dieu sumérien ADAD, la foudre
jaillissant de ses membres inférieurs. Sur la gravure de droite, un prêtre aux bras levés est figuré au-dessus
d’un trou en forme de lance ou de poignard, et de l’orifice du trou jaillit la foudre, en forme de zig-zag :
À Sumer, le point ou le trou est le symbole de HAL: du fondement, désigné ainsi :
de HAL allu : l’entre-jambes de la femme, qui HAL petû : s’ouvre, zāzu : se partage pour donner naissance.
Le devin est lú HAL bārû, qui détient HAL pirištu : le secret, de HAL (-HAL-LA) garāru : ce qui coule, qui
courre dans la matière : l’énergie divine. HAL-HAL-LA : les bienfaits « descendent » du ciel, le ciel les
« distribue » comme il administre les remèdes ou attribue les sanctions. Et ce dieu du fondement est à Sumer
Enki, à Akkad il est Éa, ou dieu Adad des tempêtes, dispensateur des pluies, immense et infiniment petit.
Dieu Adad est dieu Teshoub ou Iskur, métaphore : la timbale, force de l’univers de matière. Le pictogramme
sumérien d’origine est :
Dieu Adad est U Adad, il est à la cime et dans l’abîme, il fait résonner le ciel et la terre, dieu du vent, de
la pluie, de la tempête. Il est le Tout, qui broie, brûle, détruit, conduit ; dieu de l’argile et des tablettes ou
gravures scultées dans la matière. Il est le point de départ, d’ignition, de la combustion, commandement de
toute action, animation du monde manifesté. Pour les Sumériens, l’origine du feu est dans le point,
métaphore : la queue pointue d’un animal, tel que celle du renard, la dernière vertèbre de la queue, le
fondement.
Au Bego, d’autres prêtres et leurs adeptes brandissent des hallebardes vers le ciel, outil de défense mais
aussi instrument cérémoniel. C’est avec ces haches et hallebardes que la bête était tuée. L’enseignement
religieux était transmis au cours de rites, et les messages gravés dans la roche en portent témoignage. Seuls
les prêtres et leurs adeptes étaient autorisés à y assister, à l’issue d’une longue expédition où il fallait faire
preuve de témérité et d’ascétisme pour approcher le dieu d’aussi près. Les autres pélerins était laissés plus
bas dans la vallée, peut-être à Casterino ou même à Tende ou Saorge. En raison du relief, les pèlerins qui
vivaient habituellement sur la côte méditerranéenne avaient accès par les chemins qui empruntaient les
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vallées de Menton à Sospel puis Saorge et Tende ; ou par celui qui menait des lieux aujourd’hui nommés
Vintimille, Roya, Breuil, Saorge, Tende.
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Le mot chiappe a peut-être une origine mésopotamienne de même que le nom « Chiapas » des Mayas :
akkadien saāpu : mettre à terre, produire, faire naître ; ŠÚŠ (-ŠÚŠ) saāpu, dont le signe sumérien
d’origine est :
est surtout de même signe en forme de dalle ou de revêtement que ŠÚŠ (-ŠÚŠ) katāru : couvrir, ( cf. infra :
Mercantour ), comme le dieu ou le prêtre ŠÚŠ (-ŠÚŠ) tabāku : verse. En ce sens, le chiappe est la dalle où
on jette, on fait naître : on grave. C’est là où dieu se manifeste, là où le graveur l’invite à prendre forme, à
sortir du trou BÙRU, de ŠÚ adāru : le lieu sombre, à révéler BUZUR : le mystère de la Totalité, de
l’univers, à montrer ŠÚ : ses bienfaits :
Le prêtre est lú ŠÚ kalû : le chantre, qui invoque dieu ŠÚ : dieu Marduk, mais aussi qui pratique une sorte
d’apophase par respect pour le mystère du divin ineffable.
La racine verbale akkadienne ktr forme katāru I : venir chercher, aide, secours, assistance, = ik-te-ram-
ma : franchir le seuil, s’approcher près de celui qui donne de l’amour ; et katāru II ( araméen : kattar ) : qui
s’occupe de, se fait attendre ( ici : la pluie ? ), repousser la maladie. Et l’akkadien kát exprime l’idée de
marquer de son empreinte, nouer en terre, ont le pictogramme sumérien d’origine est:
Comme l’indique le signe du sumérien classique : une empreinte divine ou en relation avec le dieu :
Les gravures d’attelages de bœufs expriment la conciliation de forces contraires par l’initié qui se dirige
vers l’impersonnel. Les bœufs sont les puissants alliés du conducteur de char. Le joug est une pièce
d’attelage en bois placée sur le cou des animaux pour qu’ils produisent leur force dans une même direction.
Il est aussi le symbole de la contrainte matérielle et morale que subit l’homme, immiscé dans la matière,
assujetti au dieu, qui entrave ou aliène sa liberté.
Joug de tête, d’encolure, de garrot sont autant de pièces qui limitent l’indépendance, comme déjà les
dieux imposent à Gilgamesh un « garrot » : son frère jumeau Enkidu. Le joug est donc un lien ou une
traverse qui contraint, une contrainte morale imposée par les dieux, un assujettissement, mais aussi un devoir
qui libère, délivre, ce qu’exprime en Inde le terme yoga.
Le dieu était vénéré dans ce sanctuaire où ciel et terre se joignent. Pour satisfaire leur religion, les initiés
observaient depuis la côte les orages divins qui frappaient le mont Bego et se développaient alentour.
Ils partaient en pèlerinage depuis le littoral méditerranéen, - aujourd’hui régions de Nice, Menton,
Monaco, Vintimille, San Remo -, et ils marchaient plusieurs jours ( akkadien birku : coureur, acolyte). Le
dieu était assimilé au taureau puissant qui déchire le ciel de ses cornes et fait ruisseler l’eau sur la terre ainsi
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fécondée. Dieu Bego était craint mais apportait réconfort et protection pour les récoltes abondantes et les
troupeaux gras.
Les premiers phonèmes de l’humanité pour désigner le feu étaient be, br, ber, bir. Le nom Bego pourrait
avoir pour origine l’akkadien berqu : éclair, dieu sumérien BIL-GI ; symbole : le cuivre étincelant. En
sémitique bar(a)q : éclair. En akkadien, NIM-GÍR berqu : éclair. L’origine pictographique de la période
d’Ur est :
et désigne aussi les insectes tels qu’abeille et guêpe dont la piquûre brûle.
Ou encore GÍR (-GÍR-RI) berqu : éclair, exprimé au sumérien ancien et au sumérien classique par les
signes :
Ces signes dépeignent aussi les idées de GÍR paru : poignard, glaive ; GÍR-ZAL : lancette ; GÍR
padānu ou GÍR uru : chemin ; GÍR barāqu : foudre qui s’abat, fulgure, dieu ADAD berku ou dieu GIBIL
berku ; GÍR-LAL = GILAL ābiu : tueur, ce qui exprime que dieu du feu GIBIL est GÍR-LAL : il fulgure et
foudroie mais aussi attèle, attache, lie, enchaîne, comme les bœufs attelés symbolisent cette double force
naturelle.
Poignard et bucrane du mont Bego Hallebarde du mont Bego
Poignards de la vallée de l’Ubaye, Alpes de Haute Provence
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À titre de comparaison : géoglyphe nazca
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Le nom « Bego » pourrait donc plutôt être « Begu » ou « Bigu », entendu comme en akkadien berqu,
birqu : l’éclair.
En akkadien, bagurru = dug ba-gur-ru : objet de culte. Le mot réfère à dug : sacoche, sac ; ba : donner,
« cadonner » ; gur : purifier, frotter, prêtre lustrateur, dépeint par ce pictogramme d’origine :
ru : donner, vouer, de même signe que : chute ( de la foudre ?), frapper, destruction, et : fonder ( sur les
ruines de la foudre ?).
Bakurru = giš bá-gur 4/kur : bâton qui frappe, qui donne des coups, celui de UGULA : le chef ou chef des
prêtres qui frappe la terre.
Pakku : recouvrir, garnir, mettre sur, améliorer ; = KA di-im-ma HI : parler, nommer dieu bon, faire des
incantations.
U-GUR namaru : épée de dieu Nergal, signe voisin de celui de la valeur ÁB : taureau. Dieu Nergal est NÈ-
IRI 11-GAL : force du taureau dans le creuset de matière. GÙR : vénérable, juste comme est le prêtre
purificateur qui ÍL nīšu : lève, procède à l’élévation, et GUR 5 : tranche le taureau. C’est aussi avec le feu
que lú-GUR-GUR : le prêtre-artisan travaille le métal ou l’argile :
Les poignards et hallebardes sont faites avec GÌR 4 : le fourneau, GIR 10 : le feu. Et dans GIRAG : l’argile,
se modèle Girin : la fleur, dont le pictogramme sumérien est :
Là où se tient GIR 11 amādu : l’attelage, l’esprit et la matière, dont le pictogramme d’origine est :
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Selon le sumérien et l’akkadien, Bego ou Begu ou Bequ est donc dieu sumérien Bil-Gi, ou akkadien Gibil,
celui qui est selon les phonèmes be 8, be 9 : feu, et kúm : chaud :
Symbole de feu, d’embrasement, de crémation, de restauration sur ce qui a été brûlé. Dieu du renouveau,
de ce qui est frais et neuf dans la Nature :
Différents signes sumériens de Bil-Gi, phonème be 7, bi 5, brûler pour faire renaître, produire sur brûlis
Le signe néo-akkadien indique que ce feu :
est celui du bœuf sauvage vaillant :
Celui qui est be, bi 4 : Seigneur qui apaise, dont les signes sumriiens d’origine sont :
qui permet par DUGUD kabtūtu : sa puissance, et miqtu : sa chute :
qui jette, fonde et provoque la naissance de gi 17 : le grain de céréale, qui donne du froment :
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À propos de qui l’oracle donne ses conclusions après examen des organes du corps du sacrifié :
C’est ge 14, U : dieu Adad du tonnerre, dans ge 6 : lieu obscur, figuré à Sumer d’un trou ou d’un point :
souvent gravé sur les chiappes. Celui qui UGÙN : engendre, procrée ; U-GUR : l’épée divine. Le prêtre-
devin, ou le sorcier ou le chamane, dispose des attributs de la puissance divine, il répond aux peurs et aux
espoirs de la population, intercède et imite dieu, il lève les bras au ciel, et sollicite la foudre de son poignard.
Il provoque le flamboiement et le bûcher, et parfois est fait avec le feu gi 27 : du cuivre. Le prêtre mime le
dieu qui produit la foudre, terrible éclair et détonation, qui éclate, tombe, frappe.
Ce qui est lié dans l’office sur terre par le prêtre est scellé dans le ciel. Ce qui est délié l’est aussi, et c’est
pourquoi il provoque la pluie. Les serviteurs du dieu ont par leur croyance, leur vénération et leur soumission
un pouvoir de scellement ou de libération des énergies divines. Pendant l’office, ils brandissent le couteau,
leurs yeux lancent des éclairs, ils foudroient du regard.
Diorama du Musée des Merveilles de Tende représentant le prêtre et ses acolytes ou assesseurs portant sur
la tête de petites hallebardes
Dans la mythologie méditerranéene, le faisceau enflammé est l’arme et l’attribut de Jupiter. Au temps des
Romains, le temple de Jupiter « Tonnant » a été un temps vénéré par Auguste. Jupiter lance la foudre,
exprime ses reproches et sa condamnation, il terrasse. À Sumer, l’astre Jupiter est mul ŠUL-PA-È, symbole
de ŠUL : du héros qui est sous le joug, qui creuse le trou, le fond, le socle avec une pique :
comme fait le cochon ou le phacochère :
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pour inviter à sortir le dieu, comme l’eau sort de la source, pour qu’il émette du sanctuaire caché dans la
matière comme dieu Utu :
Il frappe avec PA : bâton, rameau, faisceau, pour que se manifeste pa 4 : le père, pour qu’il pa 5 : parle, qu’il
soit pa 9 : bon, bienveillant. DAD ou BIL-GI, Celui qui est vénéré et invoqué sur bir 7 : les pierres de
conception, celles qui enfantent comme l’hématite couleur de sang, ou la bélemnite, en forme de flèche :
C’est pourquoi les prêtres et leurs adeptes du mont Bego auraient gravé leurs signes sur les roches
colorées, en suivant le chemin des pèlerins. En akkadien, GÍR padānu : le chemin des initiés qui partent sur
ordre ou par règlement. Gù-gìr (-ra) : appeler par incantations ou cris ou pleurs, nommer GUD, le taureau :
qui représente le dieu qui KU 5 : tranche comme le silex, juge, coupe comme le moissonneur . C’est le
chemin pour GÌR : solliciter dieu, GÌR-BAL riu : provoquer l’inondation, la pluie de l’orage. Gi-ir/ri =
gír : être en chemin pour être sain et sauf, faire des offrandes régulières :
pour que s’abatte le dieu :
Le chemin est GÍR mālaku : voie, parcours, itinéraire, pèlerinage.
L’akkadien paru = du 8-a = pa-er-tum , ou imtu, exprime l’idée d’être chaussé pour cela de « petites
poches en peau », ce qui était nécéssaire pour protéger les pieds dans ces chemins caillouteux de montagne,
dont les pierres coupaient comme GÍR paru : des poignards. Habitués aux sandales légères sur le littoral, les
initiés suivaient l’itinéraire prescrit en montagne en portant des chaussures protectrices non lacées, comme le
montrent certaines gravures.
Le prêtre utilise GI-DU 8 pairu : une table d’offrandes, autour de laquelle les religieux invoquent, font
des incantations, des antiphons ; pour que gi 5 : la terre :
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soit riche, profitable, grâce à gi 6, ku 10 : ce qui est sombre comme un ciel d’orage qui tombe, promesse
d’abondance :
Gi 6 : pictogramme d’Uruk et signes du sumérien classique, semblables à certaines gravures du Bego
En akkadien, c’était la promesse de pouvoir AKA zaqāpu : planter, par le rituel KÌ(D)-KÌ(D) kikiu,
pictogramme d’origine ::
Les gravures en séries de poignards et hallebardes, laminés ou lamelliformes du mont Bego paraissent
inspirées des signes mésopotamiens du sumérien classique. L’expression « tomber comme des hallebardes »
encore utilisée de nos jours en France qualifie une forte chute de pluie.
Le signe du sumérien gi 6 est inspiré du signe qui dépeint le taureau, la bête à cornes, le bouvier :
Le poignard est comme l’éclair, en akkadien il GÍR paru : perfore, déchire ; le terme akkadien paru =
apin-du 8 = pa-a-ru désigne également la flèche de la charrue tractée par les bœufs :
Uruk : charrue, cultiver Pictogramme du sumérien classique
En sumérien, APIN : charrue, ÚRU : planter, cultiver. DU 8 : ouvrir, libérer la terre avec la force des bœufs,
pour qu’elle soit nourricière et abondante grâce à A : l’eau du divin Père.
Le travail de labour était réalisé avec l’aide d’un attelage de bœufs :
Figure du mont Bego représentant un attelage
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Les réticulés gravés dans la roche du Bego ont une allure voisine des représentations du sumérien
classique qui dépeignent la charrue et l’activité de cultiver. Ils représentent des champs et l’abondance, en
akkadien Ú rītu : pâturage, ou l’inverse : Ú-GUL ušau : famine, sunqu : détresse :
et Ú-DÚL utullu : berger ou chef-pâtre. Le signe est voisin de celui de GA šizbu : lait, nourriture, offrande
que faisait šangamau : le grand prêtre.
Ils expriment aussi les idées d’abondance, de plénitude, d’amphores pleines, ou à l’inverse celles de LA-
RA-AH pušqu : détresse, angoisse, šupšuqu : pénibilité :
ressenties face à l’absence de pluies, aux récoltes mauvaises dans les GÁN eqlu : champs :
dans SA-TU šadû : la montagne :
qui est aussi le repère des lú SA-GAZ abbātu : pillards qui sèment la peur, ou encore là où on contracte SA,
ou LÍL sili’tu : des maladies et déficiences physiques. La montagne est une région où le vent souffle, un lieu
des génies et des démons :
Si le dieu est bienveillant, la récolte sera bonne et il sera possible de préparer ZID qēmu : farine, et de
trouver ainsi HUN (-GÁ ) : la quiétude :
Sinon, il restera à bakû : pleurer celui qui est bag : le Prince, le dieu du ciel enfermé dans la matière et qui
n’a pas daigné se manifester :
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dont le signe est voisin de celui de la force qui foudroie :
pour que le petit bétail UDU immeru : mouton, šu’u : bélier, soit nourri et LU (-LU) duššu : abondant, bien
gras :
que GUR 11 ( signe voisin de celui de UDU : mouton, et de Ú : pâturage ): le lait gras soit abondant :
que GUR 12 : l’orge soit abondante, GUR 15, UR 4 : la récolte, la moisson soit bonne :
Pictogramme GUR 15 , UR 4 : ramasser, récolter, moissonner.
Prêtre incantateur nommé « sorcier » du Bego, au feu ardent assimilé à la foudre. Il gù : crie, GÙ-DÉ (-
DÉ) : crie, hurle le nom de GU 4 : taureau, bœuf, qui gu 5 : fonde, gú : fait souffrir. Dans les mains de
l’orant, les poignards : dieu Bego (ou Bil-Gi) jette la foudre. Il est voisin de celui qui désigne TÙN paštu :
hache, TÙN-SAL ehu: herminette, symbole de ce qui TÙN : vient du fond du ciel, et tranche.
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Le signe UDU est proche de celui de la valeur DIB qui exprime les idées d’obtenir de l’eau : DIB-DIB
titippu : se procurer ou avoir de l’eau, symbole : la clepsydre, antique horloge à eau qui mesure le temps par
un écoulement régulier d’eau. En grec : klepsudra, qui renvoie au temps de l’ancien Ziu-Sudra, - le « Noë »
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sumérien, le Vivant, qui construit l’arche devant le préserver du déluge -, dans la mesure où sudra est
l’abréviation de Sugarduruna. C’est Ziu-Sudra, caché en profondeur. SÙ-UD-RA est la mante religieuse
dévorante à la forme étrange, dont le pictogramme d’origine est ( voir aussi SÙ-UD-ÁG elmešu ) :
proche du pictogramme du serpent et de la valeur MUŠ :
Ziu-Sudra est nommé dans la version babylonienne Ut-Napištim, l’Immortel, le Vivant. Le sumérien ziu :
qui vit dans les profondeurs, force, pouvoir, sagesse, évoque le mandarin zhù : vivre, résider, et : aider,
assister, construire ; zhú : poursuivre, chasser, chasser le daim ( ici : le mouflon ou le chamois ) ; zhū : union
de deux ensembles, perle, lumière ; zhī : pousser, germer, et : rameau, branche ; zhí : plante.
Ces deux pictogrammes sont voisins de celui à l’origine de la valeur šúd et de la valeur BU : brillance,
souffle :
Les trois pictogrammes cités ci-dessus sont formés à partir du pictogramme qui dépeint le grain, la
semence et la jeune tige :
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Dans les vallées avoisinant le mont Bego, les pluies permettront l’élevage du mouton, elles favoriseront la
poussee de SÍG : la laine :
Le pictogramme sumérien qui dépeint à gauche le mouton ou le petit bétail :
est comparable au signe à droite relevé sur le mont Bego. Il désigne aussi UDU-IDIM bibbu : le mouflon,
bête de montagne, puissant et lourd, il était vénéré dans ces hautes montagnes, susceptible de déchirer le ciel
pour provoquer la pluie. Ce signe dépeint également mul « bibbu » : planète, mul UDU-IDIM (-GU4-UD )
bibbu : planète Mercure, comète, météore, mul UDU-IDIM-SA 5 albatānu : planète Mars et SAG-UŠ
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kajjamānū : planète Saturne, dieu Ninurta ; kajjamānū exprime aussi les idées de se tenir debout, lú SAG-UŠ
meš : être tous prêts, disponibles pour l’office, compter sur le dieu en faisant une offrande, par exemple un
agneau, un bélier, un mouflon difficile à chasser comme l’est ailleurs le cerf, ou un taureau.
En akkadien, la force du météore est assimilée à GU 4 alpu : bœuf ; GU 4-DA-ÙR-RA alpu ša (w)arka :
bœuf attelé en queue ; GU 4-ÁB-MURUB-SAG mīru ša pāni : jeune bœuf attelé en flèche, au centre ; GU 4-
NINDÁ bīru : jeune taureau puissant ; mul GU 4-AN-NA kakkab alap šamê : constellation du Taureau,
pierre-taureau, homme-taureau au fond de l’être, comme est le « météore » en l’homme, selon la légende de
Gilgamesh ; SAG-KI-GUD = pūt alpim : constellation du Trapèze ; rī’i-alpūtu = lú SIPA-GUD-ú-tu : étoile
du Bouvier ( SIPA : pasteur, berger, GUD : taureau ).
Il n’est pas surprenant dans ces conditions que le massif entier de la région soit celui des « Alpes » :
akkadien alpatum : vache, alpu I : bœuf, taureau.
La religion invite à e, DA eu : s’approcher de MÚLU-BABBAR : l’astre Jupiter, blanc comme la
foudre :
Lú giš DA a’lu : en troupe, en bande.
Il a été dit que les religieux du mont Bego gravaient sur les roches des signes qui s’apparentent à une
proto-écriture. Ces signes paraissent inspirés de l’écriture suméro-akkadienne. Les signes les plus importants
sont de la même famille que ceux du sumérien classique, vers 2500 à 2300 avant notre ère, certains semblent
dater de la période d’Uruk.
Cette écriture aurait été transmise par les migrants de Mésopotamie qui ont transité par les côtes
méditerranéennes ou par la Crète. Par contre les gravures de spirales pourraient trouver leur origine dans la
civilisation mégalithique occidentale ou celtique.
Certains des pèlerins de la côte suivaient le chemin initiatique qui passait par Sospel, Saorge et Tende.
Ces noms présentent un interêt dans la mesure où ils semblent référer à des mots akkadiens.
Sospel est une ville de villégiature où les habitants venaient se reposer en grand nombre jusqu’à un passé
récent. De nos jours, elle a retrouvé plus de calme. Située à 350 mètres d’altitude, dans la vallée de la
Béréva, à une altitude peu élevée en rapport aux altitudes des sommets du Mercantour, elle n’est qu’à
environ 15 kms de Menton, par un col qu’il faut franchir, suivi d’une descente sur la ville.
On peut imaginer que Sospel constituait il y a quelques millénaires la première étape sur la route du Bego.
En akkadien : pèl : franchir, bélémnite en forme de poignard :
Le signe akkadien est voisin du signe qui désigne le poignard, dont voici le pictogramme sumérien
d’origine, déjà mentionné:
Le nom Sospel pourrait être formé de l’akkadien pil, pil 4 : dieu BIL-GI ; pil 4 : bois de feu :
Par ailleurs, « Sos » pourrait référer à la valeur ŠUŠ : dieu Adad ; ŠÚŠ šapālu : bas, peu élevé ; = bùr ; =
guz ; = tùn : chenal, trou, fontaine, šaplis : bas, šaplu : inférieur, šuplu : profondeur. Ou à ŠÉŠ : oindre,
frotter, onction ; le signe est formé de celui qui désigne la laine, la toison de chèvre, et de celui qui exprime
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l’idée de chêne sacré, symbole de lám : le feu ; ou à ŠÈŠ donne l’idée de se lamenter, de pleurer, et est lié au
cèdre rouge, au sang rouge ou à la toison de la brebis. Enfin ú supalu est le genièvre.
Saorge est une petite ville située à 550 mètres d’altitude, à proximité des gorges de Bergue, nom qui avait
peut-être un rapport avec l’akkadien berqu : poignard, ou qui a été taillé par lui.
Ce qui frappe le voyageur lorsqu’il approche de Saorge par la route du sud, c’est le site du verrou où est
bâtie la ville et son allure en gradins, qui lui donne un air de famille avec les hameaux et monastères
tibétains. L’akkadien za exprime l’idée de quiétude et de repos. Le signe est le même que bil, pil, iza qui
désignent le feu :
ŠÁH: trou, profondeur ; ŠA 17 est de même signe que Ú rītu : pâturage. HAR-GUD : fourrage, URGU :
fourrage, meule, repas, nourriture :
et URGÚ désigne la colère du dieu BIL-GI, forte comme urgulû : celle du lion, constellation du Lion. Sur la
route du Bego, Saorge était peut-être une halte après une étape difficile, à caractère monastique, à l’entrée ou
à la « bouche » du domaine du dieu Bego, ou Begu ou Bil-Gi. Il est possible que des bénévoles ou même des
esclaves aient été en fonction en cet endroit pour aider les voyageurs a reprendre des forces. En akkadien, la
racine verbale šrk : šarāku = rig 7 : verser à boire, donner un cadeau, à titre gracieux, est de même signe que
RIG 7 re’u : régir, paître ; lú RIG 7 širku : esclave d’un temple, oblat, personne qui s’est agrégé à la
communauté religieuse en offrant ce qu’il a.
Près de Saorge se tient le mont Agu. En akkadien, agû : couronne, tiare, agagu : être en colère :
mais aussi : ÁG : qui aime :
signe composé de Bil-Gi : feu de l’amour, ou de AM : bœuf sauvage, puissance du dieu.
Les petites villes de Tende et Saint Dalmas de Tende, situées à une altitude de 730 mètres environ,
n’existaient probablement pas il y a 4000 ans, mais sont situées à proximité du Bego, et ces lieux étaient des
haltes pour les pèlerins, qui poursuivaient leur chemin vers Bego par le lieu désigné de nos jours du nom de
Casterino. La vue de Tende par le sud éveille un sentiment monastique comparable à celui éprouvé à la vue
de Saorge. Un rapprochement du nom Tende au sumérien conduit à TU 6-DUG 4-GA et à LI burāšu :
l’essence ou huile fine de cèdre ou d’autres conifères :
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Signe des phonèmes li, le, gúb ; i 12 : à gauche, pictogramme d’origine, à droite, sumérien classique
Le même signe désigne l’andropogon, et lilissu : la timbale pour rythmer la musique, li’u : la tablette ou
la plaquette à graver, et GÚB ellu : ce qui est pur.
L’orant de Bego :
est peut-être inspiré du pictogramme de la valeur U exprimant dieu Adad, et de celui du sumérien
classique désignant LI et GÚB :
Phonèmes li, le, gúb ; i 12
Le signe de LI et de GÚB est voisin de TU-TU : idée de dieu Marduk qui crée, ensemence, enfante :
Pictogrammes ancien et du sumérien classique : dieu Marduk qui crée ou ensemence
Le signe LI et de GÚB peut être décomposé ainsi :
exprime l’idée de bienfait, d’offrande au dieu, d’odeur de plante, d’arôme, d’encens.
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exprime l’idée d’orant, de membre du clergé, aux bras « tendus », en exhortation, qui sollicite dieu et
présente son offrande : gomme ou résine.
exprime l’idée » de l’Un, le Père, l’océan primordial, de creuset, de brasero, d’ensemencement, ou de A-
GUB 2-BA : dug karpat : bénitier, réceptacle, trou.
Le nom de la ville de Tende pourrait aussi être rapproché de l’akkadien TEN bullû : éteindre, TEN
pašāu : apaiser, en TE eû : s’approchant de GAL : l’esprit ; en faisant sur TEMEN temennu : la dalle, la
terrasse, TEMEN temennu : un document de fondation :
dédié à MÚLU-BABBAR : dieu de la foudre, astre blanc Jupiter.
TU 6-ÉN : formule conjuratoire de TU 6-DUG 4-GA tudukku : l’incantation, accompagnée de
combustion de gommes ou de résines de pin, pour amadouer GIBIL ou provoquer URGÚ : sa colère.
***
Telle est l’histoire du massif du Mercantour où l’orage méditerranéen divin était craint. Le nom
Mercantour lui-même est étrange. Sumérien mèr : vent d’orage, colère de dieu, comme ceux qui expriment
les idées de poignard, foudre et chemin, correspond au signe de GÍR :
Akkadien MER agāgu : être en colère, expression déjà présentée à : Saorge. MIR est le sumérien dialectal
pour GÍR.
Mér : vent violent et nuages, même signe que celui de dieu Adad, IMI : vent, IMI aû : brasero, NI 2 (-
TE) : effroi, NI 2-TUG : respecter, craindre, révérer NI : « Lui », « Elle », comme fait NI 2-ZU : le sage, ou
NI 2- ME : le prêtre, face à NI 2-HUŠ : la spendeur :
« Cantour » pourrait être dérivé de l’akkadien kut : couper, trancher, juger, interdire ( lié à DI-KUD :
moissonner ) ; et de l’évolution de la racine akkadienne ktr : katāru : attendre aide et secours, de ŠU qātu : la
main de dieu, un geste de sa part, son empreinte, qui se fait attendre. Faire le rituel jusqu’à ce qu’il soit qatû :
achevé :
que qītu : on soit quitte.
La montagne du Mercantour est kdr = kudurru : la borne, la limite, la frontière du pèlerinage.
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Les armes héraldiques de Saint Dalmas de Tende comportent deux croix blanches jumelles sur fond
rouge. La ville a retenu pour protecteur St Dalmas, moine bénédictin du XIème siècle. Un prince romain du
IVème siècle portait aussi le nom de Dalmas.
S’il fallait tenter la comparaison, le nom Dalmas évoquerait l’akkadien damāu : qui se mortifie,
s’humilie, damāšu = šu-gan-zá-er : qui est caché, enveloppé dans. Des coïncidences intéréssantes sont à
observer, qui pourraient laisser penser que le choix de St Dalmas a été fait par les religieux au Moyen-Âge
en relation avec les légendes rapportant les rituels anciens des habitants de la région :
. en akkadien, MAŠ-DÀ-NITA daššu : bouquetin, comme est MAŠ : dieu BIL-GI ou GIBIL du feu ( cf.
supra : birqu ) le premier, le pur :
qui est sollicité par lú MAŠ (-MAŠ) māšu māšu : exorciste. MAŠ-MAŠ māšu : jumeaux :
qui est BÁN : ensemencement dans BÁNDA : le cruchon ; dieu du feu dans la matière, qui ensemence :
Gibil a pour racine verbale gbl, qui formera plus tard ange Gabriel des Chrétiens et qui est pour les
Musulmans Jibril, personnage central pour les Ismaéliens et les Soufis, une figure déjà essentielle dans le
mandéisme et le manichéisme en Joël. Il est l’ange qui « descelle la pierre » du tombeau, le « Jibril de ton
être » qui devient lorsqu’il est mis à jour le « compagnon de l’âme pour les éternités ». L’ange Jibril de la
Révélation, l’Esprit Saint.
Le nom Bego évoque par interversion des lettres dieu Gebo de la conception nordique : partenariat, don,
offrande ou sacrifice des dieux ou des chefs aux disciples loyaux :
En akkadien, dieu GIŠ-BAR = GIBIL = MAŠ ; giš gibil = i-u-kab-bu : brûlant, rouge, ardent ; riqqē ka-
bu-ú-te : encenser, brûler des herbes aromatiques, des parfums, des grains ( gubibatu : orge grillée ) ; Gibil
ou Bil-Gi, c’est à dire dieu Marduk ou dieu Šamaš qui ensemence.
Le signe correspondant en sumérien classique et en assyrien :
a pour origine le pictogramme :
Ce qui vient d’être dit peut être relié à l’akkadien gabû : l’alun ( latin : alumen, formé des lettres almn qui
composent l’expression hittite « 2 alam na » ). L’alun est astringent : il resserre les tissus, diminue la
sécrétion ; le symbole est celui des éléments qui se joignent et consolident l’ensemble constitué.
À relier à GÚ-BAR : la nuque ( gubbuu : chauve, pelé ), où est la force, où est GU qû : le cordon qui
relie à l’Autre, où est la « plante » symbole de toutes les espèces ; à GABA-RI : affronter le rival qui est en
l’homme, le « frère » égal et nécéssaire parce que complémentaire ; GABA-RI : les Hommes-scorpions de la
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légende de Gilgamesh, la constellation du Scorpion ; à lú GUB-BA-IGI : le préposé, le « disciple », et à ŠÈR
riksu : les apprêts d’un sacrifice, ŠÈR qû : cordon, lien, attache.
Les signes des valeurs MAŠ et BANDÁ ont une même origine, et ont évolué ainsi :
Les jumeaux, le couple primordial, sont dal : couple, dans dal : le creuset, le vase :
signe qui dépeint RI-RI-GA maqātu : ce qui s’abat, tombe comme fait la foudre, DI 5 nabāu : qui resplendit,
RI-HA-MUN ašamšatu : ouragan, celui qui EŠ11 nadû : jette, fonde.
Et dalla, dál :
donne l’idée de lú GÚ-EN-NA : le haut dignitaire, de GÚ (-GAL) ašarēdu : le premier, du grade le plus
élevé, qui dalālu : glorifie, dim 6 : nomme, crie le nom de dieu ; qui établit le lien avec le dieu en se
substituant à lui, en prenant la même forme, le même aspect en DIM (DÙ-DÙ) arāšu : fichant les pointes,
les lancettes ( la forme est identique aux banderilles actuellement utilisées en tauromachie ) :
dans GÚ kišādu : la nuque de la bête sacrifiée qui est attachée, ou dans GÚ-TÁL kutallu : son dos :
en dim 5 : tranchant, coupant, déchirant :
pendant dím : le rituel ( symbolisé par une machette ou un sabre ), comme fait DÍM : le Créateur :
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NITA est de même signe que GÌŠ berku : pénis qui se tient UŠ (-SA) itu : droit, virilité du dieu de vie,
symbole de GÌŠ ou de NITA zikaru : le mâle qui féconde GÌŠ-NU-ZU : la vierge, de GALA kalû : le prêtre
ou le chantre qui fait cet office :
À Saint Dalmas le Selvage, plus au nord dans les Alpes, la croix est celle du Temple, des Templiers, de
couleur rouge associée aux conifères, - les bourgeons de mélèzes sont rouges -, rappelant que le village fut
crée par eux, et qu’il le vouèrent à cet évangéliste :
Voici les armes de Saint Dalmas de Tende, situé au carrefour qui conduit à la vallée des Merveilles :
Ces croix portées sur les armes pourraient être héritées de la croix sumérienne MAŠ. Il semble que par
des biais différents, d’un côté les religieux de la période chalcolithique arrivés de la Méditerranée orientale,
de l’autre les croyants venus vers l’an 1000 de la même région, pourraient avoir transmis les mêmes
symboles de la science sacrée. La Méditerranée orientale a joué un grand rôle dans la diffusion du cuivre et
de l’étain par les Akkadiens et les Hurrites. L’étain, métal précieux, nécéssaire à la métallurgie du bronze
sacré, a été extrait en premier lieu à Melua en Indus et Gujarat, puis a été recherché ailleurs : en Morbihan,
aux îles Sorlin ( Cornouailles ). Il y avait donc un vaste réseau d’échanges maritimes, de transport de
minerais mais aussi, comme la fouille de l’épave de Kaç uluburun en Turquie l’a révélé, de troncs d’ébènes
en provenance d’Afrique tropicale ou d’ambre jaune d’Europe du nord. C’est peut-être en relation avec ce
trafic que les migrants de Mésopotamie ont installé des bases sur le littoral ligure. En ces lieux, les hommes
arpentaient et sacralisaient le lieu exceptionnel du mont Bego qui relie les fureurs du dieu du ciel et les
bienfaits de la terre. Ils gravaient dans la pierre couleur sang des représentations symboliques comme autant
de prières adressées en cet oratoire à ciel ouvert.
***
La gravure intitulé « La danseuse », présentée sur le relevé du laboratoire de Lazaret à Nice, représente
plus exactement un homme enveloppé d’un halo comme autour d’un astre, d’une auréole ou d’un cercle
lumineux ou d’une sphère auditive pouvant figurer la gloire, le prestige ou le génie d’un prêtre ; ou le
mystique qui comprend le mystère du monde : qui le prend avec lui pour le faire sien au plus intime de lui ;
ou le dieu-soleil, mystère du dieu-énergie immiscé dans la matière, du Vivant qui seul est sacré :
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DOCUMENTS
C’est le laboratoire départemental du Lazaret et le musée de Tende qui nous ont fourni les images et
reproductions.
*Le Bego, montagne sacrée
Henry de Lumley, Annie Echassoux
CNRS Editions
* Moving beyond the Bego God. Some new remarks about the interpretation of the prehistoric engravings of the
Vallée des Merveilles and the Val de Fontanalba (Tende, Alpes-Maritimes, France)
In : Barranella M., Kezich G. (dir.), Shepherds Who Write. Pastoral graffiti in the uplands of Europe from prehistory to
the modern age, Proceedings of the 20th International Rock Art Congress, ‘Standing on the Shoulders of Giants’
(Valcamonica, Darfo Boario Terme, Italy, from 29 August to 2 September 2018), Oxford, British Archaeological
Reports, International Series, S2999, pp. 37-53
*Étude des gravures rupestres de la région du mont Bego (Tende, Alpes- Maritimes). Programme triennal 2012-
2014. Bilan des activités de la campagne d'étude 2012
Henry de Lumley (1) , Nicoletta Bianchi (2) , Laure Chandelier (3) , Delphine Giraud (4) , Graziella Le Breton (2)
, Nathalie Magnardi (5) , Jules Masson Mourey (6, 2) , Philippe Percic (2) , Odile Romain (7) , Gabriel Vatin (3)
, Françoise Villain-Rinieri (7)
*Les gravures rupestres du vallon du Haut-Couletta. Région du mont Bego (Fontanalbe, Alpes-Maritimes)
Jules Masson Mourey, Nicoletta Bianchi
*Tende – Mont Bego (Alpes-Maritimes). Révision des matériels archéologiques dans l'environnement des
gravures (contribution 14)
Nicoletta Bianchi (1) , Didier Binder (2) , Thomas Huet (2, 3) , Cédric Lepère (2) , Sylvia Sandrone , Romuald
Mercurin
*Étude des gravures rupestres de la région du mont Bego (Tende, Alpes- Maritimes). Programme triennal 2012-
2014. Bilan des activités de la campagne d'étude 2013
Henry de Lumley (1) , Nicoletta Bianchi (2) , Delphine Giraud (3) , Graziella Le Breton (2) , Jules Masson Mourey (4,
2) , Philippe Percic (2) , Odile Romain (5) , Françoise Villain-Rinieri (3)
*Les gravures rupestres du vallon du Haut-Couletta. Région du mont Bego (Fontanalbe, Alpes-Maritimes)
Jules Masson Mourey, Nicoletta Bianchi
*Les gravures rupestres de la région du mont Bego (Tende, Alpes-Maritimes), Val de Fontanalba et vallée des
Merveilles, Prospection thématique avec relevés d’art rupestre, Rapport final d’opération SRA Provence-Alpes-
Côte d’Azur
Jules Masson Mourey
*Le concept du corniforme attelé sur le site du mont Bego
par Henri Pellegrini
* Les carrières néolithiques du mont Viso
in : Bulletin d’études préhistoriques et archéologiques alpines, Aoste, 2007
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LIENS
Les signes cunéiformes du vase Fuente Magna, in French : :
https://www.calameo.com/read/00653319091f26dbaa612
https://fr.slideshare.net/slideshow/le-vase-de-fuente-magna-recherche-de-parent-entre-
sumrien-akkadien-quechua-aymara-11424pdf/267224542
Hypothesis de una origen de las lenguas inca y nazca, in spanish :
https://www.calameo.com/read/0065331903bbf50215a27
https://fr.slideshare.net/mysterevivant/akkad-sumer-and-incas-nazcas-languagespdf
Sumer, Akkad, and Navajos Hopi, Zuni languages, in english: :
https://www.calameo.com/read/00653319001e78ef6a4a6
https://fr.slideshare.net/mysterevivant/sumer-akkad-and-the-languages-of-the-navajo-the-
hopi-the-zuni-by-michel-leygues
Sumer, Akkad et la langue des Raramuri, in French:
https://www.calameo.com/read/006533190f7624871d321
Sumer, Akkad and the Raramuri language, in English: :
https://www.calameo.com/read/006533190f5599fd8ee90
https://fr.slideshare.net/mysterevivant/sumer-akkad-and-the-language-of-the-raramuripdf-
5a11
Sumer, Akkad, Babel, de l’origine des langues, in French:
https://www.calameo.com/read/0065331900be9ad99bc87
Sumer, Akkad and Quechua, Aymara langages, in English :
https://fr.slideshare.net/mysterevivant/akkadian-sumerian-and-quechua-aymara-languagespdf
Sumer, Akkad and the Yamato Kotoba, in English:
https://fr.slideshare.net/mysterevivant/sumer-akkad-and-the-yamato-kotoba-by-michel-
leygues