1. Luxembourg, le 17 décembre 2018
LE GOUVERNEMENT
DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG
Le Premier ministre
3,
Monsieur le Président de la Commission européenne,
Tout d'abord, je voudrais exprimer ma gratitude pour les efforts que vous et vos
équipes avez déployés dans le difficile processus de négociation et de préparation
relatif au départ du Royaume-Uni de l'Union européenne.
Je vous écris afin d'attirer votre attention sur un aspect particulier qui fera partie des
mesures d'urgence que vous adopterez cette semaine pour gérer une éventuelle
situation de départ du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord. Parmi ce
paquet d'initiatives figureront également des propositions couvrant le secteur de
l'aviation qui est tout particulièrement exposé face au BREXIT.
Sans connaître les contours ni le contenu exact des mesures en cause il nous a
néanmoins été annoncé par vos services que l'aspect « accès au marché de l'aviation »,
et donc les droits de trafic, seraient couverts dans un règlement en procédure
législative ordinaire.
A ce sujet, deux problèmes se posent.
Son Excellence
Monsieur Jean-Claude Juncker
Président de la Commission européenne
Bruxelles
123-000112-20040525-FR
2. Il s'agit d'abord d'assurer les liaisons aériennes entre l'Union et le Royaume-Uni. À
cet égard, j'aimerais souligner la spécificité du secteur du all-cargo. Les besoins des
opérateurs de fret ne sont pas les mêmes que ceux des compagnies de passagers. La
plupart des services passagers entre l'Union européenne et le Royaume-Uni sont
prestés de point A point entre l'UE et le Royaume-Uni (3ème et 4ème libertés de l'air).
La compagnie Cargolux par contre vole sur base de droits plus étendus (5ème liberté)
qui l'autorisent A relier le Royaume-Uni A des pays tiers ou d'autres Etats membres.
Sans ces droits de trafic spécifiques, les opérations de Cargolux avec le Royaume-Uni
ne seraient plus réalisables. Ceci entraînerait une perte substantielle de l'activité de
Cargolux avec toutes ses conséquences sur son bilan.
Il est partant essentiel que les mesures d'urgence n'évincent sous aucune forme les
droits de 5ème liberté en place pour les vols de fret.
Dans tous les scénarios, Brexit avec ou sans accord, un futur accord aérien entre le
Royaume-Uni et l'Union européenne sur le transport aérien devrait comprendre des
droits de 5ème liberté, du moins pour les compagnies de fret.
Dans un courrier du 19 novembre 2018, le Ministre luxembourgeois en charge des
transports avait informé par écrit Monsieur Barnier et Madame Bulc des risques
particuliers encourus par Cargolux.
Nous estimons que l'approche choisie ne résoudra pas le problème des relations
aériennes avec le Royaume-Uni. Un règlement ne peut pas valablement prévoir une
réciprocité avec le Royaume-Uni qui ne serait pas lié par ce règlement. Il serait
impossible de lui imposer les droits et obligations du règlement.
Le deuxième sujet que j'aimerais aborder porte sur les répercussions plus profondes et
durables engendrées par l'approche proposée par la Commission. Celles-ci
dépasseraient nettement le cadre des seules relations avec le Royaume-Uni et
s'imposeraient au-delà de la seule phase transitoire.
3. a ler Bette
Premier ministre
En couvrant les droits de trafic dans la législation européenne nous réaliserions un
transfert de compétences sur ces droits de trafic vers l'Union européenne, ce qui est
inacceptable pour les Etats membres. A mon avis, une telle manoeuvre s'avèrerait
préjudiciable pour les entreprises européennes et mettrait en danger des emplois
européens. Pour l'instant les Etats membres coopèrent parfaitement avec la
Commission tout en disposant des flexibilités utiles et nécessaires pour continuer a
modeler des relations bilatérales A défaut de cadres libéralisés universels ou au niveau
UE. Les modèles économiques des compagnies aériennes varient et produisent donc
des besoins divers dont il faut tenir compte.
Le Brexit impliquera des conséquences négatives pour l'économie européenne qui
sont malheureusement inévitables. Je ne veux cependant pas accepter qu'on mette
inutilement en péril des entreprises européennes et des emplois européens pour des
questions de compétences.
Pour cette raison je suggère que nous adoptions une approche pragmatique et efficace
qui permettra de minimiser les perturbations ainsi que les dommages auxquels seront
exposés nos entreprises et les emplois qui y sont rattachés.
Mon administration se tient a disposition pour discuter de solutions éventuelles.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la Commission européenne, l'expression de
ma très haute considération.