GEOG0643-1 Observation d'un processus de participation citoyenne - Liege 2015
1. Observation d’un processus de participation
citoyenne
« Liège 2015 »
Dans le cadre du cours de « méthodes et outils de gouvernance »
Christine Partoune
GEOG0643-1
Martin Ledant
2eme Master Géographie Ulg
Année académique 2008-2009
2. -Liège 2015-
-2-
I n t r o d u c t i o n
Tout commença quand deux liégeois -
un plasticien, Alain De Clerck, et un journaliste
philosophe, François Schreuer- ambitionnèrent
de sacrer la Cité Ardente Capitale Européenne
de la Culture en 2015. L’impulsion du sculpteur
conjuguée au charisme du philosophe : l’idée fit
rapidement son chemin et un véritable débat
public fut lancé. Sans doute à ce moment ne se
doutaient ils pas du véritable combat citoyen
qu’ils étaient sur le point d’initier. Pour peu il
aurait suffit de mobiliser les forces vives
liégeoises, les convaincre de construire le
projet qui leur permettrait d’être
sélectionné et d’ainsi faire rayonner
le brasier culturel de la ville
mosane par delà les frontières et
les ans. L’enjeu pour la ville d’avoir
un véritable projet fédérateur
et innovant semblait évident.
Cependant bien plus
qu’à une action citoyenne
mobilisatrice, c’est à un combat de la
démocratie participative au cœur de la
démocratie représentative auquel une poignée
de Liégeois allait devoir s’atteler. En effet, pour
des raisons que nous évoquerons, le droit à
prétendre au titre, ne fut pas respecté, et
bientôt c’est une bataille aux enjeux
démocratiques qui était déclarée. Ces enjeux
étaient principalement des enjeux de bonne
gouvernance, à savoir faire primer l’intérêt de
citoyen sur les intérêts politiciens et la prise en
compte de l’avis et la volonté des citoyens dans
certaines décisions d’intérêt général.
Au long de cet article, nous verrons
comment et grâce à quels procédés, autour du
thème de la capitale européenne de la culture,
les actions de citoyens ont eu un impact sur le
libre cours de la démocratie représentative non
seulement locale mais régionale. Pour
commencer, nous évoquerons le concept de
capitale culturelle et ses implications au niveau
d’une ville telle que Liège. Nous verrons qu’un
tel projet, prôné par l’Europe, sollicite la
participation et le soutien citoyen. En effet, dans
un thème tel que la culture, lié intrinsèquement
aux gens, l’émulation doit à fortiori provenir
« d’en bas ». Des élus communaux, ou des
experts ne peuvent à eux seuls construire
autour d’un concept tel que la culture. Mais que
faire lorsque la voix des citoyens n’est pas
entendue à cause d’intérêts politiciens ? Alors,
le recourt aux outils de la participation
citoyenne, peut se révéler une formidable arme.
Mais comme nous le verrons dans le cas de
Liège, cette arme peut être à double tranchant.
L a C a p i t a l e
E u r o p é e n n e d e
l a C u l t u r e
Le concept de
Capitale Européenne de la
Culture a beaucoup évolué
depuis sa première apparition en 1985 à
Athènes sous l’impulsion de la ministre grecque
de la culture Melina Mercouris. L’idée était que
l’Europe est et a toujours été un bassin fécond
de développement culturel et artistique dans
lequel les villes ont joué un rôle substantiel.
Mais derrière cette impulsion se cachait aussi
l’idée que la culture, l’art et la créativité avait
autant leur place dans l’agenda que économie,
technologie, et commerce. Si la première
désignation était issue d’une initiative
intergouvernementale, aujourd’hui, après
plusieurs révisions des règles, la désignation et
la gestion des Capitales sont devenues des
compétences de l’Union Européenne sous le
statut « d’action communautaire » et formalisés
sous la Décision 1622/2006/CE du parlement
européen d’octobre 2006.
Ce document indique que, depuis
2006, chaque année, deux pays de l’Union sont
amenés à désigner une de leurs villes qui se
seront portées candidates, au titre de Capitale.
La Capitale est dorénavant sélectionnée par un
jury à moitié européen à moitié national pour la
qualité de leur avant-projet et non plus
désignée par l’état comme cela se faisait
auparavant. Une des richesses mais aussi des
3. -Liège 2015-
-3-
défis des Capitales est qu’il n’existe pas de
définitions préétablies du concept de culture ou
de ce que doit englober le projet. Et c’est ici
que les dimensions citoyenne et participative
des projets deviennent fondamentales. Chaque
ville en Europe a son propre background
culturel, historique, social et économique et un
débat doit s’instaurer entre les différents
acteurs culturels afin de réfléchir ensemble et
d’élaborer un projet commun. L’Union précise
simplement deux échelles qui devraient être
intégrées dans la sélection des acteurs et
l’élaboration du projet. La première est « La
dimension européenne » : pour renforcer les
collaborations entre les pays, favoriser les
échanges d’idée et des richesses des différents
pays européen et faire émerger une « culture
européenne ». La seconde échelle se situe au
niveau de « La ville et des citoyens » : là
l’objectif est clairement de faire émerger un
projet dans le sens « bottom-up ». Pour que les
citoyens se sentent concernés, s’impliquent,
créent et enfin contribuent au développement
culturel et social à long terme de la ville.
Dés lors, les objectifs poursuivis par les
villes candidates sont variables et chacune voit
dans le concept de Capitale un outil qui lui
permettra d’atteindre ces différents objectifs.
Comme le souligne le Rapport Palmer qui a
étudié un grand nombre d’expériences
passées, la plupart des villes nourrit des
ambitions telles que « mettre la ville sur la
carte » ou « promouvoir la ville ». Néanmoins,
le titre sert aussi d’outil à d’autres causes telles
que la régénération urbaine, ou comme étant
part d’une stratégie de redressement
économique. Mais avant toute chose, le
concept de Capitale représente potentiellement
un énorme levier pour la démocratie
participative, et pour l’élaboration de projet de
villes présentant de multiples facettes et
intelligences ignorées d’habitude par l’approche
top down.
L i è g e C a p i t a l e e n
2 0 1 5 : d e l a n a i s s a n c e d ’ u n e
i d é e
En 2015 c’est au tour de la Belgique
d’élire une Capitale Européenne de la Culture.
Et à Liège, l’initiative n’est pas venue de la Ville
mais des citoyens. C’est ainsi qu’un sculpteur,
Alain De Clerck, et un journaliste philosophe,
François Schreuer, dans l’effervescence du
sacre de l’équipe de football locale, lancèrent
l’idée que Liège devrait poser sa candidature
au titre. Ils lancèrent le débat sur la place
publique. Est-ce que Liège ferait une bonne
capitale Européenne de la Culture ? Ne doit-
elle pas laisser la place à d’autres villes ayant
plus besoin de subsides ? Quid de la gestion de
la culture à Liège? Liège est elle la capitale
wallonne de la culture ? Quid des institutions
existantes ? Ce débat se répandit tel une
traînée de poudre : de manière totalement
spontanée et non contrôlée. Cet engouement
s’est principalement affiché grâce aux
nouveaux systèmes d’information. Via de
multiples réseaux sociaux d’Internet tels que
Facebook, où des blogs particuliers ayant leurs
propres initiés et tous en lien de proche ou de
loin avec les deux initiateurs. Le débat fut
fortement transmis par la presse (Le Soir, La
Libre, La Meuse). Via leurs versions papiers
mais aussi via leurs versions « en ligne » qui
proposent aujourd’hui des espaces de débat en
lien à chaque article. Pour canaliser la
communication et accroître la sensibilisation un
site web fut créé, consacré entièrement au
mouvement et diffusant des communiqués, des
articles de presse. Ainsi, tout un chacun qui est
assez « connecté » a pu prendre part au débat
en notant cependant que la participation ou non
au débat est restée liée à l’appartenance à
certains réseaux sociaux.
5. -Liège 2015-
-5-
initialement par Alain De Clerck et François
Schreuer s’est vu spontanément rejoindre par
des nombreuses personnes aux personnalités
variées prêtes à dépenser de l’énergie et du
temps pour aider à rassembler des signatures.
Par ailleurs, un « bureau » a été mis sur pied
sensé chapeauter ce groupe de personnes,
pour le dispatching des bénévoles, et
accessoirement comme lieu de débat. Le
fonctionnement même de la participation était
de type spontané. Sur base d’une « mailing
list » reprenant la liste des personnes ayant
témoigné le souhait de s’engager, n’importe qui
pouvait lancer une invitation à l’action. François
Thoreau relativise : si initialement jusqu’à une
soixantaine de personnes se sont dites prêtes à
se mobiliser pour aider, le comité n’a jamais
rassemblé qu’une petite quinzaine de
personnes et les emails envoyés recevaient
très peu de réponses, et quand elles existaient
elles étaient souvent de nature négative.
De même, au sein du groupe de
personnes effectivement présentes,
l’organisation n’était pas clairement définie.
Premièrement, aucune structure
organisationnelle n’existait : tout était plus ou
moins informel, pas de quorum de présence,
pas de système de vote. L’organisation était
basée sur le principe du consensus, et comme
nous le verrons, cela peut déclencher des
polémiques lorsque ce principe n’est pas
respecté. Par ailleurs, le mouvement ne
possédait aucun leadership propre et souffrait
« d’un vide de pouvoir émergent » (FT) tant
personne ne pouvait ou voulait prendre les
rênes du mouvement. Comme nous le verrons,
la conjonction de ces deux carences se
témoignera plus tard lors d’un coup de théâtre
dont le collectif se serait bien passé.
Le soutien populaire
Comme dit précédemment, l’objectif du
collectif était l’organisation d’une consultation
populaire. Pour réaliser cette consultation, ou
en d’autres termes, pour contraindre les
pouvoirs communaux à consulter l’avis de la
population, il fallait rassembler les signatures
de 10% des liégeois. Le cas échéant, le
conseil communal est tenu d’organiser une
consultation, mais n’est pas tenu de tenir
compte de l’avis exprimé. Le principal objectif
du collectif, et en fait sa seule option d’action,
était dés lors de rassembler 19000 signatures
de liégeois soutenant le mouvement et de les
soumettre aux pouvoirs communaux. Outre le
fait que jamais ce processus n’a été mis en
œuvre pour une commune si peuplée, la
collecte des signatures a révélé d’autres enjeux
et ambiguïtés. La collecte s’est opérée de
manière plutôt positive, via des actions
individuelles ou via des stands positionnés aux
endroits clés de la ville où lors d’événements
phare de la culture Liégeoise (i.e. 15 Août, la
nuit des coteaux). La sensibilisation du public a
elle aussi été organisée, via toute une
campagne d’affichage, d’événements festifs et
démonstratifs, ainsi que par le vieux bouche-à-
oreille et les réseaux internet. Cependant, c’est
au niveau de la signification de la signature que
l’ambiguïté est apparue. La ville était tenue te
fournir des formulaires standard pour collecter
6. -Liège 2015-
-6-
les signatures. Ces formulaires indiquaient en
gras : « Souhaitez vous que la Ville de Liège
pose sa candidature au titre de Capitale
Européenne de la Culture en 2015 ? ». Il
indiquait aussi bien évidement que ce
formulaire était destiné à l’organisation d’une
consultation portant sur cette question, mais de
manière peu explicite. Lorsque un liégeois
apposait sa signature au bas du formulaire,
répondait il déjà à la question ? Liait il
moralement la personne collectrice de
signature d’aller porter sa voix à l’hôtel de ville?
Rien n’est moins sûr, beaucoup de signataires
ont certainement juste signé parce que cela
était facile, dans le souci d’aider le collectif
dans son combat mais sans réelle conviction,
alors que d’autres ont pu mettre dans cette
signature une réelle volonté de faire entendre
leurs voix.
Par ailleurs, l’unique manière avec
laquelle le collectif pouvait percevoir
l’engouement de la population à l’organisation
de cette consultation tenait dans la teneur et
l’intensité des débats prenant lieux sur les
différentes plateformes de discussion. Il faut
noter qu’une différence notable existe entre le
citoyen prenant partie intégrante au mouvement
en mobilisant son temps dans le collectif et
celui qui donne juste son approbation. La
majorité des citoyens étaient certainement du
second groupe. Nous verrons que l’importance
de se sentiment de soutien de la part de la
population a joué un rôle fondamental dans la
suite des événements. Malheureusement, au
cours des trois mois de collecte, le débat n’a
pas toujours montré une intensité remarquable
et le sentiment du collectif d’être « seul » face à
la tâche a pu parfois l’emporter.
Le soutien politique
Le soutien politique est finalement
l’objectif premier et final de tout le mouvement.
Pourtant, durant toute la procédure, la relation
entre le conseil communal et le collectif est
restée ambiguë. En effet, si d’un coté le
mouvement avait besoin de ce soutien, d’un
autre coté le mouvement s’élevait contre le
conseil communal et sa décision. Ainsi, durant
la collecte des signatures, les contacts sont
restés tendus et relativement restreints. Le
bourgmestre s’est cependant exprimé dans une
carte blanche du quotidien Lesoir arguant
pourquoi le projet était une « fausse bonne
idée » (Carte Blanche du Soir en Ligne du lundi
20 octobre 2008). Le collectif répondant via le
site pourquoi le projet représentait « une
opportunité démocratique » (liege2015.eu). Au
sein du monde politique il semble que d’intense
discussion aient eu lieu, notamment au sein de
la majorité et de l’opposition.
C’est seulement lorsque le collectif
approcha de son objectifs des 19000 signatures
que de véritables négociations commencèrent
entre le conseil communal et le collectif Liège
2015. C’est à ce moment de l’histoire que les
faiblesses du mouvement se sont fait ressentir
dans une conjonction d’événements dont le
résultat fut un communiqué de presse que
François Thoreau n’hésite pas à qualifier de
« désastreux ».
Les dérives d’un mouvement
spontané
Le 17 décembre 2008, les liégeois
apprennent dans la presse que le collectif Liège
2015 abandonne et troque les signatures pour
un arrangement à l’amiable avec les autorités
publiques. Cet arrangement prévoit le retrait de
la consultation populaire contre un programme
d’investissement dans le secteur culturel à
Liège. Cet événement est révélateur d’une
série de carences au sein du mouvement
citoyen auxquelles nous avons fait allusion
précédemment et peuvent peut-être faire servir
de leçon de bonne gouvernance.
Au début du moi de décembre, le
collectif est « à bout de souffle », il a dépensé
énormément d’énergie dans la collecte de
signatures et les a finalement obtenues. Mais
sur le fond, le collectif a perdu l’optimisme. Si il
est vrai qu’il a en main près de 22000
signatures (cela inclus une marge de 3000
7. -Liège 2015-
-7-
signatures de sécurité), le collectif se sent
désemparé, livré à lui-même. Les débats se
sont éteints sur les plateformes de discussions
et le collectif ne ressent plus l’engouement
populaire. Le collectif déplore aussi de n’avoir
pas reçu plus de soutien de la part des
institutions culturelles liégeoise, à l’image de
l’opinion publique, elles sont dans une logique
attentiste. Par ailleurs, le temps file, et le projet
Liège 2015 semble de plus en plus irréalisable
dans les temps impartis par les règles de la
candidature (le dossier doit être rendu pour le
1er mars) et des délais pour officialiser et
organiser une consultation populaire (trois à
quatre mois). L’envie est forte pour le collectif
de transformer le poids politique du mouvement
en quelque chose de concret plutôt que de se
lancer corps et âmes dans une cause perdue
d’avance. C’est à ce moment que s’engagent
de vives discussions entre d’une part les
membres actifs du collectif et les pouvoirs
publics. Il est clair que les pouvoirs publics
ambitionnaient de pouvoir fondre le mouvement
dans quelque chose de politiquement plus
facile à gérer. La promesse d’un engagement
dans la culture pour l’abandon du projet Liège
2015 : tout le monde y gagne ! Mais au sein du
collectif le débat sur la légitimité d’un tel
compromis fait rage, le groupe est divisé et ne
parvient pas à trouver un consensus. Quid de
l’avis des signataires ? Comment une structure
si informelle, à laquelle on a délégué tant de
poids politique mais si peu de moyen pourrait
prendre en compte tant d’avis ?
C’est alors que le communiqué fut
transmis aux agences de presse… Certains
membres du collectif ont brisé le principe du
consensus et ont négocié l’accord que l’on
connaît et ce (selon François Thoreau) sans
respecter l’avis de la majorité du collectif. Cet
épisode ne va pas sans connaître un
rebondissement. En effet, l’opinion populaire
que l’on croyait « endormie », se réveille
soudainement et inonde les blogs et plates-
formes de débat en criant au scandale.
L’opinion pense que l’on a usurpé son avis au
profit d’accords qui ne profiteront qu’à certains.
Pendant ce temps, au sein du collectif certains
apprennent par la presse l’accord qui a été
passé… vient alors le dernier coup de théâtre :
une nouvelle initiative spontanée de la part de
membres du collectif. Alain De Clerck,
l’initiateur du mouvement, a livré dans une boite
les 22000 signatures contraignant ainsi les
pouvoirs publics à l’action.
L’accord « historique »
C’est en ces termes que certains
qualifièrent la décision qui allait être prise au
sein du conseil communal quelque temps plus
tard. Il le qualifièrent d’historique tellement ils
furent impressionnés par le fait qu’on ne puisse
l’expliquer par des intérêts politiques, mais
uniquement en termes de ce qui est bien pour
la ville, bien pour le peuple. Ce qui est
remarquable c’est que la majorité est à cet
instant maître du calendrier puisqu’elle peut
tout a fait, si elle désire, enterrer la consultation
en demandant le recompte des signatures
avant une éventuelle inscription de la demande.
Le recompte aurait pu prendre jusqu’à deux
mois et la demande n’aurait pu être examinée
que vers le mois de février/mars, alors que le
dossier devait être déposé pour le 1er mars…
Cependant, c’est peut-être ici que la pression
exercée par le mouvement, liée à celle de
l’opposition a porté ses fruits : En premier lieu
elle a permis d’obtenir des concessions du
point de vue du calendrier grâce à la mutation
de la consultation en une initiative communale.
Cela permet de ne plus avoir à compter les
signatures et que la consultation puisse avoir
lieu avant le 1er mars. Mais ce n’est pas tout,
après un vote à l’unanimité, le collectif a aussi
obtenu la mise en place par l’échevin de la
culture d’une équipe de personnes
compétentes pour élaborer un dossier. Et par-
dessus tout, le conseil communal s’engage
politiquement à respecter l’issue de la
consultation si 10% des Liégeois qui se
déplacent votent oui. Cela correspond dans les
fait à un véritable référendum.
8. -Liège 2015-
-8-
Prologue
Enfin, au bout d’un combat mené
depuis en bas, la légitimité du mouvement dont
le collectif recherchait est arrivée d’en haut. Et
le sentiment, que ensemble, les pouvoirs
publics, les institutions culturelles et les liégeois
vont adhérer à ce projet pour de vrai. Il existe
enfin une structure formelle et compétente pour
élaborer un avant projet pour de la candidature.
Elle aura elle-même sa propre organisation de
gouvernance, prendra en compte les différents
acteurs du monde culturels liégeois, et fera
usage des multiples intelligences disponibles
afin d’élaborer un projet de qualité qui
convienne au plus grand nombre. Le délai
avant le 1er mars étant relativement court, les
possibilités d’inclure un grand nombre
d’intervenants reste limité pour l’instant. On ne
peut qu’espérer que ce sera le cas lors de
l’élaboration du projet final. Le collectif, comme
mouvement initiateur a lui aussi son mot à dire,
et c’est à se titre qu’il sera consulté dans
l’élaboration du dossier de candidature. Une
autre mission l’attend cependant, celle de
mobiliser un maximum de Liégeois au jour du
22 février afin d’aller voter « oui » à la
consultation populaire. C’est ainsi qu’il est à
nouveau repartit en campagne, mais, cette fois,
institutionnalisée sous la forme d’une asbl, avec
une structure formelle, un président, un
secrétaire, et la possibilité de recueillir des
subsides.
Conclusions
Les conclusions à tirer de cette
expérience dans le cadre de l’analyse des outils
et méthodes de gouvernance sont multiples.
La première conclusion est partagée
par Francois Thoreau : c’est qu’il suffit de
quelques personnes très motivées pour faire
avancer un débat et faire bouger les choses.
L’expérience nous l’a bien montré, ici dans le
cas d’une commune comme Liège où 22000
signatures ont été récoltées et, contre vents et
marées, ont réussi à influencer le débat
politique.
La deuxième conclusion est que malgré
une motivation certaine, un mouvement citoyen
spontané reste très fragile. Cette expérience
nous démontre que sans un appui financier ou
logistique « d’en haut », le mouvement est resté
cantonner à des démarches spontanées
fondées sur la volonté et l’initiative.
La troisième conclusion est qu’au sein
d’un groupuscule tel que le collectif Liège 2015,
les questions de bonne gouvernance telles que
la représentativité, les systèmes décisionnels,
le leadership sont tout aussi pertinentes et qu’il
est primordial d’en tenir compte. La rupture du
fragile principe du consensus aurait pu donner
un issue tout autrement dramatique au
mouvement.
La quatrième conclusion est que dans
un cas comme celui-ci, regroupant un nombre
tel d’intervenants (si on inclut les 22000
signataires), il devient difficile de sonder l’avis
de tous sans un système institutionnel fort. On
a bien vu comme le collectif pensait que
l’opinion s’était désintéressée de la cause de
Liège 2015 et puis qu’il l’avait retrouvé au
tournant.
Cette conclusion implique la cinquième,
qui concerne le rôle ambigu des nouveaux
modes de communication dans lesquels le
débat peut à la fois toucher un grand nombre
de personnes mais par ailleurs perdre tout
visage et ainsi toute substance. On notera par
ailleurs que le simple fait de débattre sur les
plateformes de discussions pouvait constituer
une forme de soutien au collectif. Une attention
particulière devrait être accordé à cette
problématique.
La sixième conclusion est en forme de
question et concerne un outil à part entière : la
consultation populaire. A ce stade ci de la
procédure elle n’a pas encore été mise en
œuvre mais cela ne nous empêche pas de
nous interroger sur son bon sens. Ne
représente-t-elle pas finalement un outil qui
n’aurait jamais du être mis en œuvre tellement
son procédé est lourd et coûteux en temps ?
Est-il normal de devoir solliciter autant les
9. -Liège 2015-
-9-
citoyens et les initiateurs du mouvement, afin
d’obtenir la simple écoute des politiques ? Cette
question est, bien entendu, au cœur du débat
sur la démocratie participative, qui n’en est elle
même qu’à ses balbutiements. Puisse cette
expérience apporter quelque chose à ce débat.
En guise de conclusion finale
Après un tel parcours au sein de la
démocratie participative pour obtenir la
candidature au titre de Capitale Européenne de
la Culture, Liège a démontré qu’il existe une
vraie assise citoyenne liégeoise en son sein et
qu’à ce titre elle possède tous les mérites pour
représenter une petite mais grande part de la
culture européenne en 2015.
Sources
• Interview personnelle de Francois Thoreau
(8 janvier 2009)
• Site et blog du mouvement :
www.liege2015.eu
• Articles divers sites Internet de presse en
ligne : www.lesoir.be , www.lalibre.be dont la liste
exhaustive est disponible en ligne : http://liege2015.eu/-
Dans-la-presse-
• Conférence de presse du 23 mai 2008 :
http://blog.liege2015.eu/2008/05/23/conference-de-
presse/
• PALMER/RAE ASSOCIATES (2004),
European Cities and Capitals of Culture, Belgium.
• MONITEUR BELGE (10.09.2008), Appel à
candidatures relatif à la manifestation « Capitale
européenne de la Culture 2015 ».
Tous les liens Internet étaient accessibles en date du 19
janvier 2009.