Les Echos - P. GOSSELIN: "Les nouveaux forfaits jours, boulets de la planification ?"
1. Les nouveaux forfaits jours, boulets
de la planification ?
PHILIPPE GOSSELIN / FONDATEUR/DIRIGEANT DE TIMEPLUS | LE 08/10 À 09:58
Comment la chambre sociale, prononçant la nullité de la quasi-totalité
des contrats à "forfait jours", instaure un risque sur le passé, mais
également impose des règles contraignantes pour l’avenir ?
La chambre sociale de la Cour de cassation a statué depuis 2008 sur la grande majorité des contrats à
forfait jours des conventions collectives, elle a prononcé la nullité de la quasitotalité de ces contrats et
redéfinit les frontièrescontours qui doivent être celles d’un contrat au forfait jour acceptable. En 2014,
13,3 % des salariés des entreprises de 10 salariés ou plus du secteur privé non agricole ont leur temps
de travail décompté sous forme d’un forfait annuel en jours, avec une croissance moyenne de leur
nombre de 4 % par an. En restreignant les formes que peuvent prendre ces contrats maintenant ouverts
aux noncadres (200 000 en 2014), la chambre sociale instaure un risque sur le passé, mais également
impose des règles contraignantes pour l’avenir.
Le risque encouru par l’employeur est le paiement rétroactif sur 3 ans de toutes les heures
supplémentaires supposées et surtout la réfection totale des fiches de paye et charges sociales et
DADS, et ce pour toute demande effectuée jusqu’à deux ans après la redéfinition du contrat.
L’employeur a en plus la charge de la preuve des jours et même des horaires pratiqués par ses
employés au "forfait jours". Il n’y a même plus de preuve "équilibrée", puisque les horaires quotidiens et
journaliers ne sont plus ceux fixés préalablement à 2008 par l’article 312145.
Pour contrer la révision par la loi du 20 août 2008 et son article 312148 qui promulgue l’abstraction des
limitations horaires journaliers ou hebdomadaires pour les forfaits jours, la cassation s’est retournée
vers la loi du 9 novembre 2010 qui concernait plus l’aménagement des postes de travail et a publié le
jugement suivant : Le Code du travail, en son article L.41211, impose à l’employeur de prendre " les
mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs".
Il incombe à l’employeur de garantir l’application de ces normes et en cas de litige, d’en démontrer
l’application effective.
Ainsi, la charge de la preuve doit reposer exclusivement sur l’employeur qui doit démontrer qu’il s’est
libéré de son obligation. Un indice de plus pour ceux qui vitupèrent autour de la complexité du Code du
travail. La cassation pousse les cours d’appel à se référer aux articles 3 à 6 b de la directive
européenne de 2003 dont les mini, hors cas particuliers, sont : repos quotidien mini de 11 h, repos
hebdomadaire mini de 24 h, durée moyenne de travail sur 4 semaines de 48h ( seule cette dernière
obligation fait référence à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs).
Deux grands axes se dégagent pour l’avenir des arrêts publiés : d’une part, le suivi des jours travaillés,
de leur amplitude et de la répartition de la charge de travail pour garantir le droit à la santé, la sécurité