Interview Les Echos le 4 janv 2014 sur la charte familiale
La SAS, outil de transmission d'entreprise
1. 2. La SAS, outil de transmission d'entreprise ?
La SAS a été créée par le législateur pour favoriser le rapprochement des entreprises. Quatre
ans après son introduction dans notre droit, on constate qu'elle est essentiellement utilisée
comme instrument d'organisation sociale des grands groupes.
Les raisons qui ont guidé les entreprises vers cette utilisation « détournée » de la SAS sont bien
connues : la structure de la SAS permet en effet d'adopter une grande souplesse d'organisation,
d'organiser le contrôle de l'actionnariat, et permet une simplification génératrice d'économies
de gestion. Pour autant, il semble que la pratique, convaincue par ces avantages réels mais
considérés seulement dans la perspective de la mise en place d'une nouvelle structure, se soit
peu préoccupée de l'impact que pourrait avoir le choix de la SAS sur la capacité des
actionnaires initiaux à transmettre l'entreprise, si tel devait un jour devenir leur souhait.
Les questions de l'ouverture du capital à des tiers (investisseurs financiers, cadres... ou autres),
de cession de la structure ou d'implication de la SAS dans un montage financier ont d'autant
plus d'importance que le périmètre des grands groupes a vocation à évoluer avec le temps.
Ainsi, ces questions, qui sont rarement envisagées au stade de la création de la SAS, peuvent
fort bien devenir d'actualité quelques années plus tard.
Quelles conséquences a alors le choix initial de la SAS ?
L'analyse montrera que, loin de ne présenter que des inconvénients comme pourrait le laisser
supposer sa qualité de société « fermée », la SAS peut au contraire offrir certains avantages
dans la perspective d'une cession de l'entreprise. Mieux, on constate qu'elle peut présenter un
intérêt comme technique de transmission d'entreprises et se révéler un instrument utile pour la
mise en œuvre de montages juridiques créatif.
Il n'en reste pas moins que le choix de la SAS induit certains freins qui sont susceptibles de
compliquer la transmission, dans l'hypothèse où celle-ci se révélerait à terme nécessaire.
I - Avantages de la SAS dans la perspective d'une transmission de l'entreprise
A - L'évidence : des formalités allégées
Les opérations d'acquisition sont souvent alourdies par le formalisme induit par le choix de la
SA, et, en particulier, par les contraintes liées au nombre minimum d'actionnaires et à
l'obligation faite aux administrateurs d'être actionnaires. Ces exigences peuvent se révéler
particulièrement gênantes lorsque, comme c'est souvent le cas dans les montages financiers
2. complexes, les actions de la société sont nanties à titre de garantie au profit de banques dont
l'autorisation est requise pour toute cession d'actions, y compris pour les actions
d'administrateur. Dans le cas de filiales de grands groupes, les actionnaires et administrateurs
sont le plus souvent des cadres supérieurs dont la pérennité au sein de l'entreprise n'est pas
assurée, ce qui conduit fréquemment à la signature de lettres de démission et d'ordres de
mouvements « en blanc », dont la validité est douteuse. Ce cas de figure se rencontre
également dans les opérations à effet de levier où plusieurs SA sont constituées pour obtenir le
bénéfice de l'intégration fiscale, dont les administrateurs sont le plus souvent choisis parmi les
salariés de l'investisseur en capital-risque. La SAS permet d'éviter tous ces inconvénients et de
travailler dans un cadre juridique plus sain.
Mais, au-delà de ces considérations de forme quasi « administratives », la SAS offre un cadre
légal particulièrement adapté aux montages juridiques et financiers complexes, en raison de la
dissociation qu'elle permet d'opérer entre le capital et le pouvoir.
B - Les avantages de la dissociation capital-pouvoir
La loi no
94-1 du 3 janvier 1994 ayant exclu l'application de l'article 174 de la loi de 1966 1
, le
droit de vote dans une SAS n'est donc pas nécessairement proportionnel au nombre d'actions
détenues. La SAS sera ainsi particulièrement utile dans toutes les circonstances où un
actionnaire est désireux de détenir le pouvoir de direction de l'entreprise alors qu'il n'est pas
majoritaire.
Nous nous contenterons de décrire ici deux situations où la SAS peut se révéler utile : le cas de
la reprise d'une entreprise par ses salariés ou « LBO », et le cas de la transmission d'une
entreprise familiale aux héritiers du fondateur.
C - Le cas du LBO
Si la SAS ne permet pas l'actionnariat en direct des salariés 2
, elle peut en revanche se révéler
une structure utile lors du montage d'opérations de LBO. Dans ce cas, la SAS offre en effet un
double avantage : d'une part, les statuts peuvent attribuer la présidence à une personne
morale, ce qui n'est pas possible dans une SA classique, et, d'autre part, la possibilité pour la
SAS d'adopter un capital variable peut apporter une flexibilité appréciable en cas de variation
du nombre de salariés admis au LBO.
Le plus souvent, les cadres parties à une opération de LBO se regroupent au sein d'une société
civile ; la SAS permet que la présidence soit directement exercée par cette société civile, sans
qu'il soit besoin de recourir à une holding intermédiaire. Le régime de responsabilité instauré
par la loi de 1994, qui prévoit que les dirigeants de la personne morale président sont
3. responsables comme s'ils étaient dirigeants en leur nom propre (L. no
66-537, art. 262-8),
devrait jouer comme un facteur de responsabilisation des salariés de nature à rassurer les
investisseurs financiers. En outre, le fait que les règles habituelles de cumul mandat
social/contrat de travail ne jouent pas devrait introduire un facteur de souplesse
supplémentaire appréciable.
Notons que la question de savoir si une société civile pouvait ou non participer à une SAS a été
débattue 3
: une partie de la doctrine s'appuyait sur le fait que le législateur a conçu la SAS
comme un instrument de collaboration dans le domaine de l'industrie et du commerce et sur
l'insertion des articles correspondants dans la loi sur les sociétés commerciales pour refuser aux
sociétés civiles le droit d'être associées d'une SAS. Mais l'avis contraire est plus répandu 4
; il n'y
a donc à notre avis pas d'obstacle à ce que la société civile des cadres soit directement
actionnaire de la SAS.
A cet égard, il faut signaler que la SAS peut, à la différence de la SA, avoir un capital variable.
La question a pu être débattue de savoir si l'interdiction de variabilité du capital s'appliquait ou
non à la SAS ; en effet, l'article 48 de la loi de 1867, qui prévoit la possibilité pour une société
de disposer d'un capital variable, exclut explicitement la SA de son champ d'application, ce qui
pouvait introduire un doute, compte tenu de l'application à la SAS des règles concernant les
sociétés anonymes opéré par le renvoi de l'article 262-1, alinéa 2. Deux arguments autorisent
cependant à admettre la variabilité du capital d'une SAS. D'une part, l'article 48 se réfère à la
forme spécifique de la société anonyme et non aux règles régissant le capital social des
sociétés par actions. D'autre part, une comparaison avec le régime de la commandite par
actions plaide en faveur de la possibilité pour la SAS d'avoir un capital variable : l'article 262-1,
alinéa 2, qui renvoie aux règles concernant les sociétés anonymes, a été rédigé sur le modèle
de l'article 251, alinéa 2, introduisant les mêmes dispositions « sur renvoi » pour les SCA 5
. Or,
la plupart des auteurs ont considéré, que malgré ce texte, l'interdiction de variabilité du
capital ne s'appliquait pas à la SCA. En toute logique, l'interdiction de variabilité ne devrait
donc pas s'appliquer à la SAS 6
. De plus, la deuxième directive européenne, à la suite de
laquelle l'article 48 de la loi de 1867 a été modifié, ne vise expressément que la SA française.
On peut en déduire que le législateur européen n'a souhaité interdire la variabilité du capital
que pour les SA, car à défaut il aurait visé les sociétés par actions en général. C'est donc que
l'interdiction ne concerne que la SA et ne s'étend pas à la SCA, ni à la SAS 7
.
Enfin, la SAS permet de confier aux salariés repreneurs les pouvoirs de gestion de la société,
tout en réduisant leurs droits de vote sur les décisions sur lesquelles l'investisseur en capital-
risque souhaite conserver une autonomie de décision absolue.
4. D - Le cas de la transmission d'une entreprise familiale
Cette possibilité de dissocier capital et pouvoir peut également se révéler utile pour planifier à
l'avance la transmission d'une entreprise familiale.
En effet, elle permet au chef d'entreprise de transmettre le capital à ses héritiers tout en
conservant le pouvoir au sein de l'entreprise. Parmi les multiples montages possibles, on peut
citer celui qui consiste à faire apport d'une partie des actifs de la société à transmettre à au
moins deux holdings familiales qui deviendront associées dans des proportions à déterminer de
la société à transmettre ; cette dernière pourra alors être transformée en SAS. Les statuts de la
SAS seront rédigés de manière à attribuer le pouvoir à l'une ou l'autre des holdings, sans pour
autant que la répartition des résultats suive cette répartition des pouvoirs. En nommant l'une
des holdings président statutaire irrévocable de la SAS, le chef d'entreprise peut également
installer au pouvoir un de ses enfants, sans que ce choix puisse être contesté par les autres,
puisque l'unanimité ne sera jamais obtenue au sein de la SAS. De plus, il peut réglementer
d'avance la question de la participation de tiers au capital de son entreprise, en incluant dans
les statuts de la SAS des clauses relatives à la qualité des actionnaires 8
.
Dans la mesure où la SAS peut dégager des dividendes substantiels, il est possible de prévoir
que l'achat par les holdings des actifs ou des actions de l'entreprise objet de la transmission
soit financé en partie par un emprunt, qui sera remboursé grâce aux distributions de dividendes
faites par la SAS. La valeur de la succession se trouvera diminuée du montant des emprunts que
contractera chaque holding, ce qui aura pour effet de diminuer le montant des droits à payer.
Les liquidités dégagées par la cession des actifs ou des titres aux holdings permettront au
dirigeant de payer les droits de succession en cas de donation-partage et l'impôt sur la plus-
value résultant de la cession des titres.
E - Les limites de la souplesse ainsi offerte
Si les statuts peuvent valablement prévoir qu'une personne morale soit nommée président
irrévocable de la SAS pour la durée de la société ou encore prévoir des conditions de prise de
décisions à l'avantage de l'un des actionnaires (L. no
66-537, art. 262-10, al. 1), ils ne peuvent
néanmoins pas valablement réduire les droits des actionnaires (C. civ., art. 1836, art. 1844, al.
1) d'une manière telle que cette réduction porterait une atteinte significative au principe de
l'exercice du droit d'expression collective énoncé par l'article 262-10 9
.
Par ailleurs, il faut garder présent à l'esprit le fait que la SAS est avant tout une société et doit
donc, en tant que telle, répondre à la définition de l'article 1832 du Code civil. Par voie de
conséquence, l'accord entre les associés doit non seulement refléter l'existence d'un véritable
affectio societatis, mais encore impérativement prévoir le partage du bénéfice ou de
5. l'économie résultant de la mise en commun de leurs intérêts. A cet égard, précisons que la
flexibilité introduite par la SAS s'appuie sur la possibilité prévue par le Code civil de déroger au
principe général de répartition des bénéfices en proportion des apports prévu par l'article
1844-1 ; toutefois, ce même article indique où doit se situer la limite qui s'imposera aux
rédacteurs des statuts d'une SAS : seront ainsi prohibées toutes clauses dites « léonines »,
visant à faire bénéficier de 100 % du profit, ou exonérer de l'éventuelle participation aux
pertes, un seul actionnaire ou groupe d'actionnaires.
II - Les inconvénients de la SAS au regard de cet objectif
L'inconvénient majeur de la SAS du point de vue qui nous occupe est l'impossibilité de faire
appel public à l'épargne, énoncée par l'article 262-3 de la loi de 1966 10
.
Signalons tout d'abord, avant d'en examiner les conséquences, que cette interdiction a un
caractère absolu (A).
Ainsi, le choix de la SAS interdit de facto la cession à des investisseurs financiers, dont la
motivation essentielle est la recherche d'une sortie en bourse à terme de 4 ou 5 ans. Ce
faisant, le choix de la SAS pose la question de la transformation en SA et des difficultés qu'elle
soulève (B).
Par ailleurs, les exigences de la loi de 1994 en terme de surface financière des actionnaires de
la SAS peuvent également occasionner des difficultés (C).
A - Caractère absolu de l'interdiction d'appel public à l'épargne
Avant l'abrogation de l'article 72 11
de la loi de 1966 par la loi no
98-546 du 2 juillet 1998, l'ANSA
s'est posée la question de savoir si malgré tout une SAS pouvait émettre des titres de créance
négociables en ayant recours à des établissements de crédit pour leur placement, et y a
répondu par la négative 12
. La question se posait en effet en raison de la définition de l'appel
public à l'épargne donnée par l'article 72, qui semblait viser exclusivement les valeurs
mobilières. Or, les TCN ne sont pas considérés comme des valeurs mobilières. Toutefois, l'ANSA
avait considéré que dans la mesure où, pour pouvoir émettre des TCN, les entreprises non
bancaires doivent remplir les conditions de forme juridique, de capital, de durée, d'existence
et de contrôle des comptes requises lorsqu'elles font appel public à l'épargne, une SAS qui, par
principe ne remplit pas la condition relative à la forme juridique des sociétés faisant appel
public à l'épargne, ne pouvait donc émettre des TCN.
6. Dorénavant, la question ne se pose plus puisque la définition de l'appel public à l'épargne, qui
est donnée par le nouvel article 6 de l'ordonnance no
67-833 du 28 septembre 1967 instituant la
COB, renvoie à la notion d'instrument financier, ce qui inclut les titres de créance 13
.
B - Les difficultés soulevées par la transformation en SA
Plusieurs incertitudes sont susceptibles de faire obstacle à une telle transformation.
1 - Le respect des articles 236, 237 et 72-1 de la loi de 1966
En premier lieu, la question se pose de savoir si, d'une part, les conditions imposées par les
articles 236 et 237 concernant les transformations des SA et, d'autre part, l'article 72-1,
prévoyant la nomination d'un commissaire à la transformation en cas de transformation d'une
société en SA, doivent s'appliquer sur renvoi de l'article 262-1, alinéa 2.
Une réponse ministérielle de 1994 14
estime que seul l'article 72-1, relatif à la nomination d'un
commissaire à la transformation, doit s'appliquer, au motif que toute autre interprétation
conduirait à considérer que la SAS est à la fois une société anonyme et une société d'une autre
forme. Toutefois, la plupart des auteurs pensent que les articles 236 et 237 doivent également
s'appliquer 15
; ils ajoutent, en ce qui concerne l'article 72-1, qu'il ne paraît pas indispensable
que le commissaire à la transformation examine la valeur des biens composant l'actif social et
les avantages particuliers 16
. Leur opinion repose sur la constatation qu'aucun de ces articles
n'est incompatible avec les dispositions propres à la SAS. Quoi qu'il en soit, la prudence nous
incite à conclure qu'une SAS ne peut se transformer en SA que si les conditions suivantes sont
respectées :
– deux années d'existence au moins ;
– approbation des bilans d'au moins deux exercices ;
– nomination d'un commissaire aux comptes attestant que les capitaux propres sont au moins
égaux au capital social ;
– nomination d'un commissaire à la transformation chargé d'apprécier la valeur des biens
composant l'actif social, et les avantages particuliers consentis à des associés ou à des tiers.
2 - Les conditions de la décision de transformation
L'article 262-10 ne vise pas la transformation parmi les décisions qui requièrent une décision
collective des associés, pas plus que l'article 262-20, qui énumère les cas où l'unanimité est
indispensable. Dans ces conditions, il apparaît qu'une transformation peut procéder d'une
7. décision non collective prise aux conditions fixées par les statuts 17
. A cela il faut ajouter deux
réserves :
– d'une part, l'unanimité sera requise dès lors que les statuts contiennent une des clauses visées
à l'article 262-20 ;
– d'autre part, dans le silence des statuts, il conviendrait de faire application de l'article 1836
du Code civil, qui exige l'unanimité des associés pour la modification des statuts ou lorsque la
transformation envisagée est susceptible d'augmenter leurs engagements, ce qui pourrait être
le cas, dans certaines circonstances, de la transformation en SA.
3 - L'exigence de sept actionnaires
Se pose également le problème du nombre d'associés dans la mesure où la transformation est
réalisée à l'issue du vote. A cet égard, la position de la doctrine est unanime. Il convient que la
SAS ait sept actionnaires répondant aux caractéristiques requises pour ce type de société, soit
sept personnes morales dotées chacune d'un capital de 1,5 MF 18
. Pour résoudre les difficultés
pratiques qui peuvent résulter de cette exigence, les praticiens ont imaginé que la décision de
transformation pourrait être adoptée sous la condition suspensive de la réunion de sept
actionnaires. A partir du moment où la régularisation intervient avant l'expiration du délai d'un
an, la difficulté née de l'insuffisance du nombre d'actionnaires n'a aucune conséquence
pratique, puisque, selon l'article 240, le tribunal ne peut prononcer la dissolution de la société
que si le nombre des actionnaires est réduit à moins de sept depuis plus d'un an. De surcroît, la
transformation constituant une simple modification des statuts ne peut être annulée que sur la
base d'une disposition expresse de la loi de 1966 ou de celles qui régissent les contrats (L. no
66-537, art. 360). Or, aucune disposition expresse ne sanctionne par la nullité cette situation.
En ce qui concerne les actions des administrateurs, il faut noter qu'une régularisation devra
également intervenir dans les trois mois à compter de leur nomination, sous peine de nullité de
cette nomination (L. no
66-537, art. 95, al. 2).
C - Les exigences de la loi en termes de surface financière des actionnaires de la SAS
1 - Exigence d'un capital social important
La question se pose de savoir quelles seraient les sanctions dans l'hypothèse où une société
ayant un capital supérieur à 1,5 MF cède les actions qu'elle possède dans une SAS à une autre
société n'ayant pas un capital social au moins égal à ce montant. Selon l'article 262-5, une
société associée d'une SAS qui réduit son capital au-dessous de 1,5 MF dispose d'un délai de six
mois pour le porter à ce montant ou céder ses actions dans les conditions fixées par les statuts
19
. A la lettre, aucune disposition ne prohibe ou ne déclare nulle une cession d'actions de SAS à
8. une société ne disposant pas d'un capital de 1,5 MF, les textes ne visant que la constitution ou
la transformation. Dès lors qu'il ne peut y avoir de nullité sans texte (L. no
66-537, art. 360, al.
2) et que la cession ne viole aucune clause statutaire (L. no
66-537, art. 262-16), rien ne
devrait normalement permettre d'invalider une telle cession, sauf à considérer qu'il y a fraude
à la loi. Néanmoins, le Comité juridique de l'ANSA 20
considère qu'une telle cession reste
inopposable à la société tant que le cessionnaire n'a pas régularisé sa situation. En pratique, les
cocontractants pourront effectuer une vente conditionnelle, i.e. sous condition que le
cessionnaire réalise une augmentation de capital à hauteur de 1,5 MF, l'agrément de la SAS
étant accordé également sous cette condition.
2 - La libération totale du capital de l'associé
L'article 262-1 vise des sociétés ayant chacune un capital entièrement libéré au moins égal au
montant fixé par l'article 71 pour les sociétés faisant publiquement appel à l'épargne. Un
problème peut se poser pour des sociétés susceptibles de rentrer dans le capital de la SAS dont
le capital est bien supérieur au montant de 1,5 MF, mais libéré seulement à cette hauteur.
Bien que le texte ne le précise pas, il semble logique de penser que l'exigence de libération
intégrale du capital social ne vaut qu'à hauteur de 1,5 MF 21
. En conséquence, une société dans
la situation évoquée peut acquérir les actions d'une SAS. De même, une société, associée d'une
SAS avec un capital entièrement libéré de 1,5 MF, pourrait par la suite augmenter son capital
sans avoir l'obligation de le libérer intégralement à chaque émission 22
. Toutefois, dans
l'attente d'une décision jurisprudentielle, il est préférable de s'en tenir à la lettre du texte.
3 - L'impossibilité pour un FCP d'investir dans une SAS
Notons enfin que les fonds communs de placement ne peuvent pas être associés d'une SAS, car
ils n'ont pas la personnalité morale 23
exigée par l'article 262-1.
En conclusion, il apparaît que la SAS est un outil qui favorise les montages ayant pour objet de
transmettre l'entreprise, sous réserve que ces montages ne nécessitent pas l'appel à des
partenaires ou investisseurs financiers. Dans ces conditions, ne pourrait-on pas considérer la
SAS comme un modèle dont pourrait utilement s'inspirer la société fermée européenne en
gestation ?