SlideShare une entreprise Scribd logo
1  sur  1
Télécharger pour lire hors ligne
L
e printemps n’a pas été
riant, on le sait. Y a-t-il
des raisons d’espérer ? La
saison est aux prévisions saison-
nières. Celle de la chaîne fran-
çaise Météo, qui s’appuie sur les
données et les calculs de la socié-
té privée Météo Consult, fait du
bruit. L’augure prédit « un été
frais et humide », scénario pro-
bable à 70 %, des « précipita-
tions excédentaires ». Bref « un
été pourri » sur la France. Le
plus froid depuis 1816… Pour la
petite histoire, la même société
de prévision annonçait le 25 mai
que « l’été pourrait être “stan-
dard” (tendance légèrement plus
fraîche que les moyennes) et sur-
tout très orageux. Le temps serait
un peu plus sec sur les régions at-
lantiques et celles du nord-est.
Cette situation permet de
conclure à un très faible risque
de canicule, mais n’exclut pas
tout de même la possibilité de
quelques pics de chaleur. »
Pour rappel, souligne un mé-
téorologue belge, les prévisions
saisonnières ne s’envisagent
qu’en comparaison avec les
« normales saisonnières ». On
conclut qu’il existe une probabi-
lité donnée de se trouver au-des-
sus ou en dessous de la normale.
Chez nous, les maxima normaux
sont de 17 à 23o
en juin, 18 à 23o
en juillet et août.
1Que disent les modèles pour
juin ? Les professionnels sont
les premiers à le dire, les mo-
dèles de prévision saisonnière ne
fonctionnent pas bien. Il en
existe cependant quelques-uns
de sérieux. Que disent-ils ? Le
CFS Climate Forecast System
des services météorologiques
américains entrevoit des tempé-
ratures au-dessus des moyennes
(+1o
) et des précipitations défici-
taires (-20 %). Un autre modèle
de prévision américain prédit,
pour la façade atlantique de
l’Europe, un mois de juin
« proche de la normale » en
terme de précipitations avec des
« variations locales » et des
« températures proches ou supé-
rieures à la normale ».
Le modèle européen ECMWF,
explique Jean-Marc Linden, pré-
visionniste à l’IRM, entrevoit
« une légère anomalie fraîche »,.
Un autre modèle situe les choses
dans la normale saisonnière.
2Que disent les modèles pour
la suite ? Les exercices sé-
rieux s’étendent sur trois mois et
ne permettent pas d’avoir une
vue mensualisée sur l’évolution
météorologique. CFS voit les
températures et les précipita-
tions dans les moyennes. De juin
à août, l’IRI de l’université de
Columbia situe les températures
au-dessus des moyennes (50 %
de chance, contre 35 % pour des
températures normales), mais
ne voit pas de signal au niveau
des précipitations. Les tempéra-
tures devraient se réchauffer
entre juillet et septembre (sur-
tout en Scandinavie et en
Ecosse). Et davantage encore sur
août-octobre (60 % de chance
au-dessus de la normale), là en-
core sur le Nord, l’Islande et l’Est
de l’Europe. Le MET Office an-
glais suppose quant à lui une pé-
riode juin-août plus froide que la
normale sur la France et plus
chaude sur l’Europe centrale. Et
des précipitations dans la
moyenne. L’ECMWF voit des
températures « probablement
au-dessus de la moyenne et pré-
cipitations probablement dans
la moyenne ».
3De la nuance toujours Le
conditionnel est l’arme pré-
férée de celui qui se lance dans
des prévisions saisonnières. Les
« si » et les « peut-être » ne
manquent pas. La palme à Me-
teo Consult selon qui la prévi-
sion « peut très bien se vérifier ».
Les diseurs de bonne aventure
météorologique glissent toujours
une condition pour que leur
oracle se vérifie ; on ne sait ja-
mais. Plus sobre, un modèle
glisse que « l’indice de confiance
est de 2 sur 5 ». Un autre recon-
naît que « la confiance est faible
à ce stade ». Les prévisions de la
Chaîne Météo et ses hypothèses
de travail (une mer froide amè-
nerait de l’air froid) ont été qua-
lifiées de « sans fondement » par
Météo France.
4Un retour en arrière ? Petit
clin d’œil : à la veille de l’été
2012, Météo Consult prédisait
un « été chaud et orageux » et
décelait des « signes avant-cou-
reurs d’une canicule estivale ».
Juin allait être « chaud et ora-
geux », de « fortes vagues de cha-
leur » allaient sévir avec « des
orages potentiellement vio-
lents ». Le bilan de cet été par
Météo France : un mois de juin
« légèrement plus chaud » que la
moyenne dans le Sud-est et plus
frais dans le Nord-Ouest, un peu
plus pluvieux que la moyenne.
Un mois de juillet « plus frais
sur la majeure partie du terri-
toire » (– 0,9o
). Un mois d’août
marqué par une « vague de cha-
leur » de 6 jours entre le 15 et le
21 août, quoique moins marquée
à l’ouest. La solitude du prévi-
sionniste de fond…
5Pour la bonne bouche Le
présentateur météo (et cli-
matosceptique) français Laurent
Cabrol annonce, sur son blog,
que « l’été sera chaud et même
très chaud » mais déclare sur
Europe 1 que la France est
« dans une mouvance sérieuse
d’une année sans été ». Fin de la
démonstration, retour à la boule
de cristal. ■
MICHEL DE MUELENAERE
Un été calamiteux ?
Ptêt ben qu’oui, ptêt ben qu’non
MÉTÉO Certains prédisent un été pourri. Les autres restent circonspects
Une chaîne météo
française annonce
un été catastrophique.
Sans fondement,
réplique Météo France.
Les prévisions saison-
nières sont hasardeuses.
La chaîne française Météo prédit « un été frais et humide », des « précipitations excédentaires ». Bref « un été pourri »... © D.R.

Contenu connexe

Similaire à Meteo (8)

Note agroclimatique n6 - Novembre 2022
Note agroclimatique n6 - Novembre 2022Note agroclimatique n6 - Novembre 2022
Note agroclimatique n6 - Novembre 2022
 
Note agroclimatique n4 - 2022
Note agroclimatique n4 - 2022Note agroclimatique n4 - 2022
Note agroclimatique n4 - 2022
 
Note agroclimatique n°5 - 2022
Note agroclimatique n°5 - 2022Note agroclimatique n°5 - 2022
Note agroclimatique n°5 - 2022
 
Note agro climatique et prairies n°1 - Avril 2020
Note agro climatique et prairies n°1 - Avril 2020Note agro climatique et prairies n°1 - Avril 2020
Note agro climatique et prairies n°1 - Avril 2020
 
Septembre 2023 : Un très bel été pour les fourrages dans la moitié Nord, un b...
Septembre 2023 : Un très bel été pour les fourrages dans la moitié Nord, un b...Septembre 2023 : Un très bel été pour les fourrages dans la moitié Nord, un b...
Septembre 2023 : Un très bel été pour les fourrages dans la moitié Nord, un b...
 
Note n°4 climat et prairies septembre 2020
Note n°4 climat et prairies septembre 2020Note n°4 climat et prairies septembre 2020
Note n°4 climat et prairies septembre 2020
 
Note agro climatique et prairies n°4
Note agro climatique et prairies n°4 Note agro climatique et prairies n°4
Note agro climatique et prairies n°4
 
Note agro climatique n1 - 2022
Note agro climatique n1 - 2022Note agro climatique n1 - 2022
Note agro climatique n1 - 2022
 

Plus de mdemuelenaere

Plus de mdemuelenaere (20)

Supplementtout
SupplementtoutSupplementtout
Supplementtout
 
éNergie
éNergieéNergie
éNergie
 
Les impacts du changement climatique en graphique
Les impacts du changement climatique en graphiqueLes impacts du changement climatique en graphique
Les impacts du changement climatique en graphique
 
Lettre ouverte d'Alain Hubert
Lettre ouverte d'Alain HubertLettre ouverte d'Alain Hubert
Lettre ouverte d'Alain Hubert
 
La Fondation polaire internationale répond aux critiques dont elle est l'objet
La Fondation polaire internationale répond aux critiques dont elle est l'objetLa Fondation polaire internationale répond aux critiques dont elle est l'objet
La Fondation polaire internationale répond aux critiques dont elle est l'objet
 
Essenscia gds
Essenscia gdsEssenscia gds
Essenscia gds
 
Lettre à la Commission européenne
Lettre à la Commission européenneLettre à la Commission européenne
Lettre à la Commission européenne
 
Cdc
CdcCdc
Cdc
 
Lesoirclimattout
LesoirclimattoutLesoirclimattout
Lesoirclimattout
 
Kronik3
Kronik3Kronik3
Kronik3
 
Climat7
Climat7Climat7
Climat7
 
Climat6
Climat6Climat6
Climat6
 
Climat5
Climat5Climat5
Climat5
 
Climat4
Climat4Climat4
Climat4
 
Climat3
Climat3Climat3
Climat3
 
Climat2
Climat2Climat2
Climat2
 
Climat9
Climat9Climat9
Climat9
 
Climat8
Climat8Climat8
Climat8
 
Climat1
Climat1Climat1
Climat1
 
Le PIB, c'est dépassé
Le PIB, c'est dépasséLe PIB, c'est dépassé
Le PIB, c'est dépassé
 

Meteo

  • 1. L e printemps n’a pas été riant, on le sait. Y a-t-il des raisons d’espérer ? La saison est aux prévisions saison- nières. Celle de la chaîne fran- çaise Météo, qui s’appuie sur les données et les calculs de la socié- té privée Météo Consult, fait du bruit. L’augure prédit « un été frais et humide », scénario pro- bable à 70 %, des « précipita- tions excédentaires ». Bref « un été pourri » sur la France. Le plus froid depuis 1816… Pour la petite histoire, la même société de prévision annonçait le 25 mai que « l’été pourrait être “stan- dard” (tendance légèrement plus fraîche que les moyennes) et sur- tout très orageux. Le temps serait un peu plus sec sur les régions at- lantiques et celles du nord-est. Cette situation permet de conclure à un très faible risque de canicule, mais n’exclut pas tout de même la possibilité de quelques pics de chaleur. » Pour rappel, souligne un mé- téorologue belge, les prévisions saisonnières ne s’envisagent qu’en comparaison avec les « normales saisonnières ». On conclut qu’il existe une probabi- lité donnée de se trouver au-des- sus ou en dessous de la normale. Chez nous, les maxima normaux sont de 17 à 23o en juin, 18 à 23o en juillet et août. 1Que disent les modèles pour juin ? Les professionnels sont les premiers à le dire, les mo- dèles de prévision saisonnière ne fonctionnent pas bien. Il en existe cependant quelques-uns de sérieux. Que disent-ils ? Le CFS Climate Forecast System des services météorologiques américains entrevoit des tempé- ratures au-dessus des moyennes (+1o ) et des précipitations défici- taires (-20 %). Un autre modèle de prévision américain prédit, pour la façade atlantique de l’Europe, un mois de juin « proche de la normale » en terme de précipitations avec des « variations locales » et des « températures proches ou supé- rieures à la normale ». Le modèle européen ECMWF, explique Jean-Marc Linden, pré- visionniste à l’IRM, entrevoit « une légère anomalie fraîche »,. Un autre modèle situe les choses dans la normale saisonnière. 2Que disent les modèles pour la suite ? Les exercices sé- rieux s’étendent sur trois mois et ne permettent pas d’avoir une vue mensualisée sur l’évolution météorologique. CFS voit les températures et les précipita- tions dans les moyennes. De juin à août, l’IRI de l’université de Columbia situe les températures au-dessus des moyennes (50 % de chance, contre 35 % pour des températures normales), mais ne voit pas de signal au niveau des précipitations. Les tempéra- tures devraient se réchauffer entre juillet et septembre (sur- tout en Scandinavie et en Ecosse). Et davantage encore sur août-octobre (60 % de chance au-dessus de la normale), là en- core sur le Nord, l’Islande et l’Est de l’Europe. Le MET Office an- glais suppose quant à lui une pé- riode juin-août plus froide que la normale sur la France et plus chaude sur l’Europe centrale. Et des précipitations dans la moyenne. L’ECMWF voit des températures « probablement au-dessus de la moyenne et pré- cipitations probablement dans la moyenne ». 3De la nuance toujours Le conditionnel est l’arme pré- férée de celui qui se lance dans des prévisions saisonnières. Les « si » et les « peut-être » ne manquent pas. La palme à Me- teo Consult selon qui la prévi- sion « peut très bien se vérifier ». Les diseurs de bonne aventure météorologique glissent toujours une condition pour que leur oracle se vérifie ; on ne sait ja- mais. Plus sobre, un modèle glisse que « l’indice de confiance est de 2 sur 5 ». Un autre recon- naît que « la confiance est faible à ce stade ». Les prévisions de la Chaîne Météo et ses hypothèses de travail (une mer froide amè- nerait de l’air froid) ont été qua- lifiées de « sans fondement » par Météo France. 4Un retour en arrière ? Petit clin d’œil : à la veille de l’été 2012, Météo Consult prédisait un « été chaud et orageux » et décelait des « signes avant-cou- reurs d’une canicule estivale ». Juin allait être « chaud et ora- geux », de « fortes vagues de cha- leur » allaient sévir avec « des orages potentiellement vio- lents ». Le bilan de cet été par Météo France : un mois de juin « légèrement plus chaud » que la moyenne dans le Sud-est et plus frais dans le Nord-Ouest, un peu plus pluvieux que la moyenne. Un mois de juillet « plus frais sur la majeure partie du terri- toire » (– 0,9o ). Un mois d’août marqué par une « vague de cha- leur » de 6 jours entre le 15 et le 21 août, quoique moins marquée à l’ouest. La solitude du prévi- sionniste de fond… 5Pour la bonne bouche Le présentateur météo (et cli- matosceptique) français Laurent Cabrol annonce, sur son blog, que « l’été sera chaud et même très chaud » mais déclare sur Europe 1 que la France est « dans une mouvance sérieuse d’une année sans été ». Fin de la démonstration, retour à la boule de cristal. ■ MICHEL DE MUELENAERE Un été calamiteux ? Ptêt ben qu’oui, ptêt ben qu’non MÉTÉO Certains prédisent un été pourri. Les autres restent circonspects Une chaîne météo française annonce un été catastrophique. Sans fondement, réplique Météo France. Les prévisions saison- nières sont hasardeuses. La chaîne française Météo prédit « un été frais et humide », des « précipitations excédentaires ». Bref « un été pourri »... © D.R.