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binjo05@live.fr ; 47052246
Sous la direction de :
Dr KOUADIO NEE ODOUNFA ALICE, ENSEIGNANT
CHERCHEUR, UFR SED
UNIVERSITE ALLASSANE OUATTARA BOUAKE
(RCI)
Présenté par:
SILUE NONTONHOUA BINJAMIN
NCE : CI0310001412
Université Alassane Ouattara
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Niveau : MASTER 1
Option : ÉTHIQUE ECONOMIQUE FONDAMENTALE
Thème :
ÉTHIQUE PROTESTANTE ET L'ESPRIT DU CAPITALISME
République de Côte d’Ivoire
Union - Discipline - Travail
Ministère de l’Enseignement
Supérieur et de la
Recherche Scientifique
Année Académique
2014 - 2015
U.F.R. : Sciences économiques et développement
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Département d’économie
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Éthique protestante et l'esprit du capitalisme, l'ouvrage de Max Weber
publié en 1904-1905, dans lequel il établit une corrélation entre le calvinisme
et le développement du capitalisme moderne.
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Un grand nombre de philosophes ont cherché à définir la valeur positive ou
négative de la conduite humaine en se rapportant à deux principes majeurs : ils ont
considéré certains types de conduite comme bons en soi ou bons parce que
conformes à une norme morale particulière. Le premier type de conduite est choisi
en vertu d’une valeur fondamentale, c’est-à-dire désirable en soi.
Dans l’histoire de l’éthique, on trouve trois critères de conduite du second type qui
ont été tenus chacun pour le souverain bien par différents groupes ou individus : le
bonheur ou le plaisir ; le devoir, la vertu ou l’obligation ; la perfection, le
développement le plus parfaitement harmonieux du potentiel humain.
Au travers de cette nuée de philosophes nous identifions Max Weber (1864-1920),
sociologue allemand dont sa pensée semble établir une corrélation entre le
calvinisme1
et le développement du capitalisme moderne. Ainsi, Max Weber écrit
un ouvrage, ῾῾Éthique protestante et l'esprit du capitalisme’’, publié en 1904-1905.
LE PROBLÈME
Le lien entre protestantisme et capitalisme a été objet de plusieurs débats. Sont-ce les
balbutiements du capitalisme naissant en Angleterre et en Allemagne au 16e
siècle y
ont favorisé le développement du protestantisme ou est-ce l’inverse ? En tout état de
cause, il semble bien que les deux se soient développés de pair, et le capitalisme
moderne s’est bien plus vite développé dans les régions où le protestantisme est
majoritaire que dans les régions à majorité catholique ou orthodoxe Il est toutefois
pour Weber hors de question de faire du capitalisme une création de la Réforme : la
genèse du capitalisme est antérieure à l’apparition de la Réforme, mais, et c’est sa
thèse centrale, la Réforme a accéléré les processus liés au capitalisme2
.
1
-Doctrine chrétienne, dont le nom provient de Jean Calvin, réformateur de l'Église française.
Ces principes sont la croyance en l'absolue souveraineté de Dieu et la justification de l'existence par la foi, reposant
sur les traditions théologiques paulinienne et augustinienne.
2
Tire de la page 103 de ’’ Éthique protestante et l'esprit du capitalisme’’
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Pour comprendre cette évolution, il faut donc se pencher sur l’émergence de la
Réforme au sein de la communauté chrétienne. Le catholicisme, s’il se montrait d’une
sévérité extrême avec l’hérétique, accordait une grande indulgence au pêcheur. Au
contraire, la Réforme s’avère bien plus exigeante avec l’individu en pénétrant tous les
domaines de la vie publique et de la vie privée, le calvinisme en étant la forme la plus
extrême et la plus autoritaire vis-à-vis de l’individu.
Or, si l’on admet que l’éducation reçue exerce une forte influence sur la tournure que
l’on donne à sa carrière professionnelle, il s’avère que les Protestants ont montré une
forte disposition pour suivre des carrières tournée vers le rationalisme économique.
Il est vrai que comme dans les premiers temps de la Réforme, les Protestants ont été
exclu des affaires publiques et politiques, ils se sont tout naturellement tournés vers
les milieux d’affaires et d’industries. Mais cette affinité contrainte a également été
confortée par une éducation plus matérialiste chez les Protestants, tandis que les
Catholiques ont une vision plus ascétique et détachée de la vie (dans le catholicisme
tout le monde peut avoir sa place au Paradis, ce qui, comme cela sera vu plus loin,
n’est pas forcément le cas dans le protestantisme), et donc moins intéressée aux bien
matériels. Néanmoins, ces « idées vagues » sur le protestantisme et le catholicisme sont
largement insuffisantes selon Weber pour expliquer le développement accru du
capitalisme au sein de la sphère protestante. Selon lui ce lien à un caractère plus
purement religieux et culturel que dans une espèce d’atavisme3
.
Un sermon de Benjamin Franklin4
illustre parfaitement le rapport décomplexé à
l’argent (sans qu’il y soit toutefois fait un lien direct avec la religion). On y retrouve
ainsi : « souviens-toi que le temps c’est de l’argent », « le crédit c’est de l’argent » et « l’argent est
par nature générateur et prolifique ». Aussi, pour Max Weber « le propre de cette philosophie
3 Atavisme : Ensemble de caractères et de comportements communs qui perdurent dans une société
4
Franklin, Benjamin (1706-1790), savant et homme politique américain, qui joua un rôle déterminant dans la
naissance des États-Unis.
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de l’avarice semble être l’idéal de l’homme d’honneur dont le crédit est reconnu et, par-dessus tout,
l’idée que le devoir de chacun est d’augmenter son capital, ceci étant supposé une fin en soi ».
Toutefois, plus loin, Weber dément que l’avidité soit la marque intrinsèque de l’esprit
du capitalisme, tout simplement parce que ça n’est pas le propre de l’homme. Il
appuie cet argument sur l’exemple du travail comportant un prime à la pièce pour
lequel il constate que les ouvriers n’en profitent pas pour maximiser leur profit mais
pour trouver un équilibre entre gains financiers et gains en temps de loisir :
« l’homme de désire pas « par nature » gagner de plus en plus d’argent, mais
il désire, tout simplement, vivre selon son habitude et gagner autant d’argent
qu’il lui en faut pour cela. Partout où le capitalisme a entrepris son œuvre
d’augmentation de la productivité du travail humain par l’accroissement de
son intensité, il s’est heurté à la résistance obstinée de ce leitmotiv du travail
de l’économie précapitaliste »5
. Avec l’échec de cette incitation à la productivité
par la hausse du salaire, il ne reste alors que la solution inverse : abaisser le salaire
pour obtenir un rendement accru. Et pour mettre en place cette politique salariale, il
est nécessaire de disposer d’un surplus de population sans emploi tirant les salaires
vers le bas.
Après cette légère digression, Max Weber prend une approche étymologique des
écrits calvinistes et luthériens. Il constate ainsi que ceux-ci fusionnent les notions de
vocation et de profession dans le terme « beruf », ce que l’on ne retrouve nullement
dans le catholicisme. Ce fusionnement est ô combien révélateur : l’exercice de son
métier (la profession) relève alors d’une sorte de prédestination divine (la vocation).
Par ailleurs, il relève que le fonctionnement même du capitalisme exige une
rationalisation de la production et des coûts dans le but de réinvestir les bénéfices et
d’accumuler du capital. Si on allie ceci avec la notion de beruf, l’accumulation du
capital devient alors, pour le chef d’entreprise, une fin en soi, le but de sa vie. Il
5
Page 61 de son ouvrage ‘’ Éthique protestante et l'esprit du capitalisme
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tourne ainsi le dos à l’eudémonisme. Weber relève alors combien cette déclinaison
est finalement irrationnelle : l’homme existe alors pour son entreprise, et non
l’inverse. La rationalité occidentale, en tant que concept historique referme donc de
profondes contradictions.
À contrario, de par sa condamnation de l’usure et du profit, l’Église catholique
prend l’exact contre-pied. C’est ainsi qu’au Moyen-âge, à la mort des riches, des
sommes considérables étaient reversées aux œuvres religieuses pour alléger leurs
consciences.
Pour Max Weber, cette notion de « beruf » provient d’une interprétation de la Bible
qui révèle l’esprit du traducteur, en l’occurrence Luther. Celui-ci en arrive alors à la
conclusion logique que le devoir du croyant ne réside pas dans le comportement
ascétique mais dans l’accomplissement de la volonté de Dieu via la vocation qu’Il a
transmise. La vie monastique (propre au catholicisme) est alors un moyen égoïste de
fuir le monde, et ce faisant ses obligations vis-à-vis de Dieu, à l’opposé de la vie
laborieuse qui relie les hommes entre eux, justifiant ainsi le concept de division du
travail. La notion de Beruf est ainsi traditionaliste : « l’homme est tenu d’accepter sa besogne
comme lui étant donnée par décret divin ».
1. DES « AFFINITÉS ÉLECTIVES » ENTRE PROTESTANTISME ET
CAPITALISME
S’appuyant sur des données statistiques, le sociologue allemand Max Weber observe
que ses compatriotes de confession protestante sont surreprésentés à la tête des
entreprises et dans le milieu des affaires, tandis que les catholiques y sont à l’inverse
moins nombreux et manifestent un intérêt plus faible pour les professions de
l’industrie et du commerce. Il entreprend dès lors de rechercher les raisons de ces
attitudes différenciées vis-à-vis du monde de l’entreprise dans les « particularités
mentales » forgées par le milieu familial et par la pratique religieuse. Il se donne plus
précisément pour objectif de dégager les éléments spécifiques de la religion
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protestante susceptibles de favoriser les « affinités électives » expression empruntée
à Goethe que celle-ci entretient avec le capitalisme.
2. MÉTHODOLOGIE DE MAX WEBER
Dans un premier temps, Max Weber élabore une définition du capitalisme moderne
sous la forme d’un idéaltype, c’est-à-dire en dégageant ses traits les plus significatifs :
une recherche systématique, rationnelle et déculpabilisée du profit ; une grande
sobriété face aux plaisirs de la vie ; un souci constant d’épargne. Concernant le
protestantisme, Max Weber met en valeur la notion luthérienne6
de Beruf, qui signifie
« métier » ou « vocation ». Surtout, il met en évidence le rôle central du dogme
calviniste de la prédestination. Pour atténuer la rigueur d’une théologie affirmant que
chaque homme est irrévocablement élu ou réprouvé par Dieu au moment de sa
naissance, les pasteurs sont conduits à valoriser le travail comme dérivatif aux
tourments des fidèles et comme moyen d’« accroître sur terre la gloire de Dieu ».
Pour Max Weber, cette forme d’« ascétisme séculier » rejoint les principes du
capitalisme moderne. Mieux, elle s’est révélé historiquement une condition favorable
à son développement.
6
-Conforme à la doctrine de Luther.
Réforme, mouvement religieux du XVIe siècle dans l’Église chrétienne d’Occident, qui a mis fin à la suprématie
ecclésiastique de la papauté romaine et a abouti à la création des Églises protestantes.
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3. UNE ŒUVRE ABONDAMMENT COMMENTÉE
Dès sa parution, l’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme (Die Protestantische Ethik und
der Geist des Kapitalismus) a suscité de nombreuses polémiques. On a notamment fait
observer que dans certaines régions la naissance du capitalisme était antérieure à la
Réforme, alors que dans d’autres il n’était apparu que bien après. Le sociologue
Werner Sombart7
, pour sa part, a attaqué la thèse de Weber en faisant du judaïsme et
non pas du protestantisme le rôle de moteur du développement du capitalisme.
Quant à la notion d’« esprit » du capitalisme, elle reste aux yeux de beaucoup
insuffisamment définie : s’agit-il d’un comportement social, d’une disposition
mentale ? Il faut toutefois nuancer ces critiques en soulignant que jamais Max Weber
ne fait de l’élément religieux une condition sine qua non 8
du fonctionnement du
capitalisme moderne, pas plus qu’il n’attribue au capitalisme une seule origine. Face
à la proposition marxiste d’une causalité exclusivement matérialiste, il préfère lui
donner des causes multiples comme la religion, et plus encore l’éthique.
7 Historien, sociologue et économiste allemand qui mit en évidence l'esprit d'économie et de rationalité qui président
à la mentalité bourgeoise.
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Se dit d'une condition indispensable.