Concours des offices créés difficultés pratiques par me benoît morel notaire
1. cas pratique LA PROFESSION
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NOTAIRE
Concours des offices créés : difficultés
pratiques d'une vente d'immeuble
Nous publions ci-après le sujet pratique proposé au concours des offices créés en 2012, tel
que libellé par le Centre national de l’enseignement professionnel notarial, avec la solution
proposée par Me
Benoît Morel, notaire à Lyon et candidat reçu premier à l’examen (pour les
sujets des précédentes sessions, V. JCP N 2012, n° 21, 1232).
Rappelons que les conditions du concours sont fixées par arrêté et que la gestion et l’organi-
sation sont assurées par le CNEPN (V. JCP N 2013, n° 20, act. 569).
ÉPREUVE ÉCRITE
VENDREDI 13 JUILLET 2012
SUJET PRATIQUE
➜ ÉNONCÉ DU SUJET
M. Alain Berget, médecin rhumatologue, est marié avec Érika Wolff, de
nationalité néerlandaise, qu’il a rencontrée lorsqu’il faisait son service
national comme médecin coopérant au Maroc. Ils se sont mariés sans
contrat de mariage préalable à la mairie d’Agadir en mars 1978, un
mois avant la fin de ce service, puis ont « bourlingué » six mois sur le
continent africain avant de s’installer en France.
M. Berget a acquis seul en janvier 1980 un immeuble au prix de
1 500 000 F dans une banlieue résidentielle de Nancy, financé pour les
trois quarts avec des deniers lui provenant d’une succession, ce que l’acte
précise et ce qu’a reconnu son épouse, intervenante, mais sans toute-
fois mentionner que l’acquisition était faite pour tenir lieu d’emploi à
l’acquéreur. Il s’agit d’une grande maison bourgeoise qu’il occupe avec
son épouse, avec une ancienne maison de gardien dans laquelle il avait
installé son cabinet. Les deux bâtiments et le terrain attenant forment
une parcelle de 2 800 m².
M. Berget est atteint d’une maladie neurodégénérative grave qui altère
grandement et de façon permanente ses facultés mentales. M. Berget n’a
engagé à ce jour aucune démarche pour solliciter une mesure juridique
de protection.
M. Berget a cessé d’exercer comme médecin libéral en décembre 2010,
mais a conservé une activité d’expert judiciaire et d’enseignant à la fa-
culté de médecine. Il compte continuer ces activités encore pendant deux
ans, avant de s’installer définitivement avec son épouse dans l’apparte-
ment dont ils sont propriétaires à Nice.
M. Berget a rencontré M. et Mme
Masson, qui sont intéressés par l’achat
de la partie bâtie de la propriété et 1 000 m² de terrain, au prix de
750 000 €. Il est disposé à leur vendre.
M. Berget tient absolument à contracter une promesse unilatérale de
vente. Il ne veut en effet pas - comme cela lui est arrivé dans le passé
à l’occasion de la vente d’un studio - être obligé de devoir engager une
procédure judiciaire, longue et coûteuse, pour se libérer d’une promesse
réciproque en cas de défaillance de l’acquéreur.
Les intéressés ont convenu que M. et Mme
Masson, s’ils décidaient d’ac-
quérir, pourraient lever l’option à partir du vingtième mois suivant la
promesse, et que la réalisation de la vente interviendrait dans les deux
mois de cette levée d’option et au plus tard dans le délai de deux ans.
Ce long délai, quoique inhabituel, convient à M. et Mme
Masson, car
M. Masson, commandant du corps de sapeurs pompiers, a des obliga-
tions d’astreinte qui l’empêchent de quitter son logement de fonction
jusqu’à son départ en retraite, prévu précisément à cette échéance.
M. et Mme
Masson disposent de 350 000 € d’économies, doivent dans
un mois régulariser la vente d’un appartement de 200 000 € et envi-
sagent d’emprunter le complément de prix et le montant des frais et
droits. Les parties n’ont pour l’instant pas défini exactement le montant
de la somme d’argent que le bénéficiaire verserait lors de la signature
de la promesse ; M. et Mme
Masson souhaitent limiter ce versement à
35 000 €, somme disponible, le surplus de leurs économies étant placé
sur des comptes d’épargne à terme, non parvenus à échéance, et dont la
résiliation anticipée leur serait financièrement préjudiciable.
Cas pratique rédigé par :
Benoît Morel, notaire à Lyon
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1 Cass. 1re
civ., 12 nov. 2009, n° 08-18.343, F-P+B+I : JurisData n° 2009-050243 ;
Dr. famille 2009, comm. 165, obs. M. Farge.
2 Cass. 1re
civ., 12 mai 2010, n° 09-65.524, F-D : JurisData n° 2010-006120 ; Dr.
famille 2010, n° 9, comm. 136.
M. et Mme
Masson, s’ils sont d’accord sur le délai de réalisation de la pro-
messe, vous ont exprimé une inquiétude. Que se passerait-il si M. Ber-
get changeait d’avis, ou si par exemple M. et Mme
Berget vendaient à
d’autres personnes leur proposant un prix plus avantageux ? Ils se sont
renseignés sur Internet et ont lu que le promettant pouvait se rétracter
avec ce type de promesse. Ils vous demandent de leur apporter le maxi-
mum de garanties sur ce point par une rédaction appropriée de la pro-
messe.
M. et Mme
Berget conserveraient le surplus de terrain de 1 800 m², qui
a un large accès direct à la voie publique, et qu’ils vendraient, selon les
opportunités qui se présenteraient, soit sans attendre la vente des bâti-
ments, soit ultérieurement.
M. Berget s’est renseigné en mairie : le terrain est constructible depuis
une modification du plan d’occupation des sols intervenue en février
1997 et conservée dans le plan local urbain actuellement applicable. Les
seules particularités sont sa situation dans un secteur sauvegardé et dans
le périmètre d’un monument historique.
M. Berget avait inscrit la partie professionnelle de l’immeuble à son bilan
en janvier 1985 pour une valeur de 600 000 F, et l’a réintégrée dans son
patrimoine privé lorsqu’il a cessé d’exercer comme médecin. Cette par-
tie, représentant un tiers de l’immeuble, a été évaluée 150 000 € pour le
calcul de la plus-value professionnelle qu’il a acquittée à cette occasion.
Il vous est demandé :
- d’établir une note synthétique sur les particularités du thème, les for-
malités à effectuer pour régulariser cette promesse et les informations
qu’il vous apparaît nécessaire ou utile de délivrer aux parties ;
- de rédiger complètement deux clauses : celle de levée d’option, et celle
ayant pour objet d’éviter ou de réduire le risque de défaillance du pro-
mettant ;
- de déterminer les frais et les droits fiscaux liés tant à la promesse qu’à la
vente à intervenir pour le promettant et pour le bénéficiaire.
Vous éviterez de reformuler les données du thème. Il est demandé de ne
pas détailler les diagnostics techniques requis.
➜ CORRECTION PROPOSÉE
La situation des époux Berget, sans être complexe, laisse transpa-
raître une partie importante des domaines d’intervention de la pro-
fession notariale. Pour conseiller au mieux les parties, il conviendra
ainsi d’aborder notamment le droit international privé, le droit des
régimes matrimoniaux, la protection des personnes vulnérables, le
droit des obligations au regard de la vente immobilière et de l’effi-
cacité des avant-contrats, le droit bancaire, le droit de l’urbanisme et
enfin le droit fiscal.
Il conviendra tout d’abord d’évoquer les particularités du thème et
d’informer les parties (1) puis de définir les formalités à exécuter (2)
avant de proposer la rédaction de la clause de levée d’option et de la
clause visant à limiter le risque de défaillance du promettant (3) puis
de déterminer les frais et droits fiscaux exigibles (4).
1. Les particularités du thème et les
informations utiles
Les particularités du thème relèvent tout d’abord du droit interna-
tional privé et de la détermination du régime matrimonial des époux
Berget (A). Il conviendra ensuite de définir les effets de leur régime
matrimonial notamment quant à la qualification de la propriété de
Nancy (B) et de conseiller M. Berget vis-à-vis de la capacité de son
épouse (C).
Dans un second temps, se poseront la question du choix de la forme
de la promesse de vente (D) et celle du montant à verser lors de la si-
gnature de l’avant-contrat (E). Il faudra ensuite s’intéresser au finan-
cement de leur acquisition par les époux Masson (F) et aux modalités
de vente du terrain à bâtir de M. et Mme
Berget (G).
A. - La détermination du régime matrimonial de M. et
Mme
Berget
Les époux Berget relèvent du droit international privé en raison de
différents éléments d’extranéité tel que le lieu de célébration de leur
union et telle que la nationalité de Madame Berget.
Enpratique,laconventiondeLaHayedu14mars1978surlesrégimes
matrimoniaux, malgré son caractère universel1, n’est pas applicable
temporellement à la détermination du régime matrimonial compte
tenu du fait que les époux Berget ont célébré leur union en mars 1978
soit antérieurement à la date d’entrée en vigueur de ladite convention
fixée au 1er
septembre 1992.
Si les époux bénéficient de la permanence de la loi applicable2 en
échappant à l’article 7 de la convention et à la mutabilité automa-
tique, ils peuvent cependant user de la faculté offerte par l’article 6 de
la convention pour définir un nouveau régime matrimonial3.
Corrélativement, l’ancien système jurisprudentiel4, également fondé
sur le principe d’autonomie de la volonté, est applicable en l’espèce5.
Conformément aux règles établies antérieurement par la jurispru-
dence, et à défaut de choix exprimé par les époux Berget, il convient
de rechercher leur volonté implicite, voire hypothétique, et de déter-
miner, d’après les circonstances concomitantes ou postérieures au
mariage, la localisation des intérêts des époux.
La prise en compte du lieu de fixation de leur premier domicile conju-
gale stable constitue un indice déterminant. Un délai minimum est
alors à rechercher si les époux ont « voyagé » avant de se sédentariser.
En pratique,il semble très probable qu’il convienne de considérer que
les époux Berget ont établi leur premier domicile matrimonial stable
en France.
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3 Fl. Brulé-Gadioux et É. Lamothe, La convention de La Haye du 14 mars 1978 et la
mise en œuvre de l’article 6 de cette convention : JCP N 2005, n° 15, 1220.
4 M. Farge, La détermination du régime matrimonial des époux mariés avant
l’entrée en vigueur de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 : la Cour de
cassation restaure-t-elle la prévisibilité de la règle de conflit de lois ? : Dr. famille
2009, étude 21. - J.-Gr. Mahinga, La détermination de la loi applicable au régime
matrimonial des époux mariés sans contrat : JCP N 2008, n° 14, 1168.
5 Cass. 1re
civ., 28 mars 2012, n° 11-12.940 et 11-12.995, F-D : JurisData n° 2012-
012165 ; Dr. famille 2012, comm. 129, obs. M. Farge.
6 M. Dagot, L’origine des deniers : JCP N 1989, I, p. 169.
7 Cass. 1re
civ., 28 nov. 2006, n° 05-17.757 : JurisData n° 2006-036180 ; Dr. famille
2007, comm. 16, obs. B. Beignier.
8 I. Barrière Brousse, Le nouveau droit international privé des incapacités et la loi du
5 mars 2007 : Dr. famille 2009, étude 14.
9 J.-M. Plazy, Le logement de la personne vulnérable : JCP N 2012, n° 17, 1193.
Ils seront par conséquent soumis au régime légal prévu par le droit
français ; mariés postérieurement au 1er
février 1966, les époux Berget
relèvent de la communauté de biens réduite aux acquêts définie par
les articles 1400 et suivants du Code civil.
B. - Les incidences de la communauté de biens
réduite aux acquêts pour M. et Mme
Berget
Les époux Berget ont acquis pendant leur union un bien immobilier
financé majoritairement par des fonds successoraux de M. Berget. Il
convient de qualifier le bien immobilier (1°) et de définir les pouvoirs
respectifs des époux (2°).
1° La qualification de l’immeuble de Nancy
En application de l’article 1405 du Code civil, les biens hérités par
les époux leur demeurent propres. En pratique, les trois quarts de
l’immeuble de Nancy ont donc été financés par des biens propres de
M. Berget comme constituant des biens à venir compte tenu de leur
origine.
Conformémentauxarticles1406et1436duCodecivil,l’emploid’une
contribution majoritairement propre implique que le bien subrogé a
itégalement la qualification de bien propre si la double formalité de
la déclaration d’origine et de la déclaration d’emploi est respectée6.
Cependant, M. Berget n’a pas indiqué dans l’acte d’acquisition qu’il
souhaitait procéder à l’emploi de ces sommes conformément à l’ar-
ticle 1434 du Code civil. L’immeuble de Nancy constitue donc un
bien commun à charge de récompense. En application de l’article
1433 du Code civil ; la communauté a en effet tiré profit de deniers
propres de M. Berget ce que l’acte d’acquisition explicite clairement
avec l’intervention de Mme
Berget.
Le montant de la récompense sera déterminé lors de la liquidation du
régime matrimonial en application de l’article 1469 du Code civil. En
principe, les trois quarts de la valeur de la propriété de Nancy consti-
tueront l’étalon permettant de fixer le montant de la récompense due
par la communauté à M. Berget. Il faudra le cas échéant tenir compte
du devenir du prix de vente de la propriété de Nancy qui pourra être
subrogé dans d’autres biens en application du mécanisme de la dette
de valeur.
En application de l’article 1436 du Code civil, si les formalités de
l’emploi avaient été effectuées, la propriété de Nancy aurait constitué
un bien propre pour M. Berget à charge pour ce dernier de récom-
penser la communauté pour le financement d’un quart apporté.
Au-delà de la qualification de propre ou de commune de la propriété
de Nancy, M. Berget ne pourra pas agir sans l’accord de son épouse.
2° Les pouvoirs des époux sur la propriété de Nancy
Tout d’abord, si l’on part de la qualification de bien commun de la
propriété de Nancy, l’article 1422 du Code civil impose l’accord des
deux époux pour la vente.
Une solution pourrait consister à établir un acte pour procéder à un
remploi a posteriori permettant de modifier la qualification de la pro-
priété. Cependant un tel acte se heurtera également à la vulnérabilité
de Mme
Berget.
Bien plus, l’article 215 alinéa 3 continuera à imposer le consentement
de Mme
Berget pour procéder à la vente de la résidence principale des
époux qui relève de la protection due au logement de la famille7. De
même, l’éventualité d’une vente préalable d’un terrain à bâtir impose
la question de la vulnérabilité de Mme
Berget.
C. - La protection de Mme
Berget compte tenu de sa
vulnérabilité
En droit international privé, le droit des incapacités est régi par la
Convention de La Haye du 13 Janvier 2000 sur la protection inter-
nationale des adultes8. L’article 5 de la convention donne en prin-
cipe compétence aux juridictions du lieu de résidence habituelle de
l’adulte concerné. La règle de conflit de lois, dont le siège est à l’article
13 de ladite convention, désigne la loi de la juridiction compétente.
L’objectif de simplicité autorise le magistrat à appliquer une loi qu’il
connaît bien : sa loi nationale. La compétence traditionnelle de la loi
nationale pour l’état et la capacité des personnes qui résulte de l’ar-
ticle 3 alinéa 3 du Code civil n’est nullement préservée.
En pratique, les mesures de protection de la vulnérabilité de Mme
Ber-
get, qui réside habituellement en France, relèveront de l’ordre juri-
dique français. L’état de santé de Mme
Berget semble indiquer qu’elle
devrait être représentée de manière continue dans les actes de la vie
civile. La loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juri-
dique des majeurs est entrée en vigueur le 1er
janvier 2009.Les articles
425 et 440 du Code civil plaident pour un placement sous un régime
de tutelle et pour la désignation de M. Berget en qualité de tuteur. M.
Berget, après avoir été désigné tuteur, aura alors la faculté de se faire
autoriser par requête à procéder à la vente de la propriété de Nancy9.
Pour éviter de recourir à l’application d’une mesure de protection
permanente, il est possible de suivre l’indication de l’article 428 du
Code civil et d’invoquer les règles du régime matrimonial des époux10
qui doivent prévaloir sur celles des incapacités.
L’article 217 du Code civil, qui relève du statut matrimonial pri-
maire auquel la jurisprudence reconnaît une application territoriale,
est applicable à tous les époux sans tenir compte de leur nationalité.
M. Berget dispose ainsi de la faculté de se faire autoriser par justice
à passer seul un acte pour lequel le consentement de son conjoint
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10 Cass. 1re
civ., 1er
févr. 2012, n° 11-11.346, P+B+I : JurisData n° 2012-001235 ;
JCP N 2012, n° 15, 1183, note J. Massip ; Dr. famille 2012, comm. 53, obs. I.
Maria.
11 J. Klein et Fl. Gemignani, La vente d’immeuble appartenant à une personne vul-
nérable : JCP N 2006, n° 19, 1189.
12 CA Paris, pôle 4 ch. 1, 11 juin 2009 : JurisData n° 2009-378022 ; Constr.-Urb.
2009, comm. 134, obs. Ch. Sizaire. - Cass. 3e
civ., 24 sept. 2008, n° 07-13.989, FS-
P+B : JurisData n° 2008-045080 ; Constr.-Urb.2008,comm.174,obs.Ch.Sizaire.
13 C. Sévely-Fournié, Le sort de la promesse synallagmatique de vente à l’échéance du
terme convenu pour la signature de l’acte authentique : JCP N 2009, n° 25, 1209.
est nécessaire. La demande d’autorisation prévue par l’article 217 du
Code civil est présentée au juge des tutelles lorsque l’un des conjoints
est hors d’état de manifester sa volonté et elle doit être accompagnée
d’un certificat médical.
L’autorisation judiciaire étant afférente au consentement même de
l’un des époux propriétaire du bien vendu, il conviendra d’obtenir
l’accord du magistrat avant de régulariser une promesse de vente
unilatérale ou synallagmatique11. Il n’est pas envisageable d’ériger
en condition suspensive un élément essentiel au contrat comme le
consentement de l’une des parties.
D. - Le choix de la forme de la promesse de vente
Le recours à un avant-contrat de vente est indispensable dans l’op-
tique de figer les accords des parties sur une durée aussi longue et
pour permettre de procéder aux formalités préalables à la vente.
En pratique, deux principales catégories d’avant-contrats sont envi-
sageables :
- une promesse synallagmatique de vente manifestant la rencontre
d’un vendeur et d’un acquéreur sur le principe d’une vente soumise
à certaines conditions suspensives et pour laquelle une inexécution
se verra opposer une demande d’exécution forcée en nature et de
réitération judiciaire. Aucun refus de réitérer n’est admissible face à
la rencontre de la volonté commune de vendre et d’acheter ;
- ou une promesse unilatérale de vente par laquelle le promettant
réservera au bénéficiaire une faculté exclusive d’acquérir ; l’enga-
gement consenti par le propriétaire trouve alors sa contrepartie
dans l’indemnité d’immobilisation versée par le bénéficiaire. En
l’absence de levée d’option,le bénéficiaire paiera uniquement ce qui
était convenu à savoir le prix de l’attente. La prospérité et l’efficacité
d’un tel avant-contrat résident dans la sanction qui sera apportée
à l’inexécution par le promettant de son obligation. Si la nature de
son engagement plaide pour une indemnisation financière, l’équité
prescrirait plutôt pour la possibilité d’obtenir une réitération judi-
ciaire.
En pratique, le choix des parties doit corrélativement intervenir entre
une promesse synallagmatique de vente autorisant l’exécution forcée
(1°) et une promesse unilatérale de vente dont l’efficacité est à définir
(2°).
1° L’attrait contraignant de l’exécution forcée d’une pro-
messe synallagmatique de vente
L’article 1589 du Code civil précise que la promesse de vente vaut
vente lorsqu’il y a consentement réciproque des deux parties sur la
chose et sur le prix. L’avantage d’une promesse synallagmatique de
vente valant vente réside dans la faculté de demander la réalisation
forcée de la vente par un magistrat si l’une des parties venant à la
refuser.
Un tel avant contrat prévoira également d’éventuelles pénalités finan-
cières : une clause pénale peut en effet contraindre le vendeur refusant
de s’exécuter ou peut, à l’inverse, assurer l’indemnisation dudit ven-
deur. En application de l’article 1152 alinéa 2 du Code civil, le juge
dispose de la faculté de modérer ou d’augmenter le montant de la
clause pénale. En pratique, le versement d’un dépôt de garantie com-
plète la stipulation d’une clause pénale12.
La vente pouvant être prononcée judiciairement, le vendeur qui se
considère libéré de son engagement de vendre se trouve dans une
situation délicate même au-delà du terme convenu pour la signature
de l’acte authentique13.À défaut de résiliation amiable de la promesse
ou de la constatation amiable de sa caducité ; le vendeur s’expose à
une action de l’acquéreur en réalisation forcée. Un débat judiciaire
peut alors s’engager entre les parties sur la réalisation des conditions
suspensives ou sur leur défaillance ainsi que sur le respect de leurs
obligations par chacune des parties.
Au niveau de la publicité foncière, l’article 37-2 du décret du 4 jan-
vier 1955 autorise l’acquéreur potentiel à requérir la publication de
la demande en justice tendant à obtenir la réitération en la forme au-
thentique de la vente ou le procès-verbal notarié constatant le défaut
ou le refus du vendeur de procéder à la réitération par acte notarié
de la vente. Si l’assignation en réitération forcée délivrée par un huis-
sier de justice ou un procès-verbal de carence notarié est publié à la
conservation des hypothèques, la demande de l’acquéreur potentiel
va prendre date et limiter considérablement la faculté de vendre du
propriétaire. En cas de litige et de « double chaîne de propriété », le
conflit entre les acquéreurs potentiels sera réglé en fonction de la date
de publication de leur droit respectif. Il en ressort que le premier ac-
quéreur potentiel qui procède à une publication rend opposable son
droit à l’autre acquéreur potentiel.Dans l’hypothèse d’une telle « pré-
notation » par un acquéreur potentiel,il faudra souvent attendre la fin
de l’éventuel contentieux avant de pouvoir procéder à la vente du bien
immobilier dont la propriété est contestée.
M. Berget ayant déjà été obligé d’agir en justice dans le cadre d’une
telle promesse il ne conviendra pas d’insister sur la régularisation
d’une promesse synallagmatique.
2° L’efficacité originale d’une promesse unilatérale de vente
L’avantage de la promesse unilatérale de vente pour le vendeur réside
dans le fait qu’il ne souscrit qu’à une obligation de faire : il doit main-
tenir son consentement à la vente et procéder à la régularisation de la
vente si le bénéficiaire décide d’acquérir dans le délai prévu.
En application de l’article 1142 du Code civil, l’inexécution de son
obligation par le promettant se résout en dommages et intérêts. Une
rédaction efficace de la promesse de vente permettra ainsi au pro-
mettant de pouvoir procéder à une nouvelle démarche de vente si le
bénéficiaire n’a pas levé l’option dans le délai prévu.
Ainsi le promettant ne pourra pas être bloqué par une instance judi-
ciaire l’empêchant de vendre sa propriété après le dépassement du
délai contractuellement fixé.
En cas d’inexécution fautive du promettant, il faut impérativement
distinguer l’hypothèse d’un refus de réitérer postérieur à la levée
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cas pratique LA PROFESSION 1178
14 G. Rouzet, Promesse unilatérale de vente. Rétractation du promettant avant la
levée d’option par le bénéficiaire : JCP N 2011, n° 20, 1163.
15 G. Pillet, L’efficacité des clauses prévoyant l’exécution forcée en nature des pro-
messes unilatérales de vente : JCP N 2008, n° 40, 1299.
d’option, qui sera inopérant pour le propriétaire s’exposant à une
demande de réitération forcée selon le formalisme de l’article 37-2
du décret du 4 janvier 1955, de l’hypothèse d’un refus de maintenir
la promesse de vente intervenant avant toute levée d’option14. Dans
ce dernier cas, la Cour de cassation, depuis le célèbre arrêt de la troi-
sième chambre civile du 15 décembre 1993, applique strictement
les conséquences de la qualification d’obligation de faire prévue par
l’article 1142 du Code civil. La jurisprudence refuse de sanctionner le
promettant qui rétracterait son consentement avant la levée d’option
par une réalisation forcée de la vente. Le bénéficiaire de bonne foi
peut ainsi se retrouver dans l’impossibilité d’acquérir et il ne pourra
prétendre qu’à des dommages et intérêts.
Il semble que malgré les conséquences de cette analyse juridique, la
jurisprudence soit fondée en ce qu’il existe une réelle différence sur les
engagements du vendeur dans le cadre d’une promesse unilatérale et
dans le cadre d’une promesse synallagmatique. La pratique a cherché
à sécuriser les deux parties en gardant le principe de la levée d’op-
tion qui sécurise le vendeur-promettant tout en cherchant à protéger
l’acquéreur-bénéficiaire d’un risque de rétractation et d’inexécution
préalable à la levée d’option.
La solution consiste à prévoir une dérogation à l’article 1142 du Code
civil et à convenir que le défaut d’exécution par le promettant de son
engagement de vendre peut se résoudre par une exécution en nature
consistant en la constatation judiciaire de la vente15. Une telle solu-
tion semble être idéale et a été avalisée par la Cour de cassation. Un
arrêt récent rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassa-
tion le 13 septembre 2011, sous le visa non de l’article 1142 du Code
civil mais sous le visa de l’article 1134 du Code civil, peut cependant
laisser craindre un éventuel revirement de jurisprudence.
Les parties seront néanmoins orientées vers cette solution consistant
en la rédaction d’une promesse de vente unilatérale prévoyant une
dérogation conventionnelle à l’article 1142 du Code civil.
E. - Le montant à verser lors de la signature de
l’avant-contrat
En pratique, si le bénéficiaire ne lève pas l’option dans le délai alors
que les conditions suspensives sont réalisées, il est redevable au pro-
mettant d’une indemnité d’immobilisation. Le montant de cette
indemnité est important car il s’agit du prix de l’immobilisation que
percevra le promettant en cas de non levée de l’option après la réali-
sation des conditions suspensives. L’indemnité d’immobilisation ne
constitue pas une clause pénale puisque le bénéficiaire ne s’est pas
engagé à acquérir : il a uniquement immobilisé un bien immobilier
en se réservant la faculté de l’acquérir.
L’usage fixe le montant de l’indemnité d’immobilisation à un pour-
centage du prix de vente fixé entre 5 et 10 % soit en pratique entre
37 500 € et 75 000 €.
Contrairement à la clause pénale, l’indemnité d’immobilisation, sti-
pulée comme acquise au promettant en cas de non-réalisation de la
promesse,constitue le prix de l’exclusivité consentie au bénéficiaire et
n’est pas révisable par le magistrat.
La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement
et la lutte contre l’exclusion dite loi Molle a introduit dans le Code
de la construction et de l’habitation, l’article L. 290-1 qui impose ad
validitatem un avant-contrat notarié lorsqu’une personne physique
consent une promesse de vente valable plus de dix-huit mois dans
l’optique de protéger le vendeur immobilier d’engagements excessifs
sans réelle contrepartie. De manière complémentaire, l’article L. 290-
2 prévoit, également à peine de nullité, une indemnité d’immobili-
sation d’un montant minimal de 5 % du prix de vente faisant l’objet
d’un versement ou d’une caution déposés entre les mains du notaire.
La loi ne distinguant pas en fonction de la qualité ou non de profes-
sionnel de l’acquéreur, ladite réglementation impose corrélativement
de recourir à un avant-contrat notarié et de prévoir le versement en
numéraire d’une indemnité d’immobilisation ou la production d’un
cautionnement représentant 5 % du prix de vente même lorsque les
acquéreurs sont des particuliers comme dans notre cas d’espèce.
Au regard de la durée envisagée de la promesse de vente,il conviendra
par conséquent de respecter ces obligations : les candidats acquéreurs
seront dans l’obligation de procéder à un versement correspondant
au minimum à 5 % du prix de vente même si ce montant est supé-
rieur à ce qu’ils avaient envisagé. Le recours à un cautionnement se
révélera inadapté en présence d’acquéreurs ayant la qualité de par-
ticuliers.
Le choix de la promesse pourra également être utilisé dans le cadre de
la vente du terrain à bâtir.
F. - Le financement de leur acquisition par les époux
Masson
Le financement des époux Masson présente un double aléa ; l’obten-
tion d’un financement bancaire (1°) et la vente préalable de leur bien
immobilier (2°).
1° La condition suspensive de l’obtention d’un financement
bancaire
Lorsqu’un avant-contrat de vente porte sur un immeuble à usage
d’habitation, il doit indiquer si le prix sera payé au moyen d’un ou
de plusieurs prêts qui seront demandés à un prêteur professionnel
conformément à l’article 312-15 du Code de la consommation.Le cas
échéant, l’avant-contrat est légalement soumis à la condition suspen-
sive de l’obtention du financement nécessaire.
Les époux Masson vont bénéficier en application de la loi Scrivener
d’une condition suspensive de l’obtention d’un crédit bancaire. Il
conviendra d’aménager dans la promesse de vente les modalités de
dépôt et de justification de l’obtention de leur financement.
La problématique va résider dans la durée de validité de l’offre de prêt
qui est normalement de quatre mois à compter de son acceptation.
En effet, le prêteur est tenu de formuler par écrit une offre de prêt im-
6. Page 6 La Semaine Juridique - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 27 - 5 JUILLET 2013
1178
16 X. Chabran, Condition suspensive de la vente d’un immeuble : JCP N 2000, n° 25,
p. 1027. - L. Leveneur, Vente sous condition suspensive de la vente d’un autre bien :
le danger n’est pas là où on le croit … : JCP N 2000, n° 9, p. 400.
17 D. Dutrieux, La pratique notariale et le « nouveau » lotissement : JCP N 2012,
n° 11, 1131. - X. Couton, Corrections apportées au régime des lotissements : la
réforme enfin réformée ! : Constr.-Urb. 2012, comm. 81, obs. X. Couton. - D.
Dutrieux, Décret n° 2012-974 du 28 février 2012 relatif à certaines corrections à
apporter au régime des autorisations d’urbanisme : JCP N 2012, n° 10, act. 304.
mobilier et de l’adresser gratuitement par courrier à l’emprunteur. Il
doit ensuite maintenir les conditions de son offre pendant une durée
minimale de 30 jours à compter de sa réception par l’emprunteur. Si
l’acceptation ne peut intervenir qu’à la fin du délai de réflexion de
10 jours qui débute le lendemain du jour de la réception de l’offre ;
elle peut également intervenir plus tardivement. L’article L. 312-12
du Code de la consommation prévoit ainsi que l’offre est toujours
acceptée sous la condition résolutoire de la non-conclusion, dans un
délai de quatre mois à compter de son acceptation, du contrat pour
lequel le prêt est demandé.Prêteur et emprunteur peuvent cependant
convenir d’un délai plus long.
Compte tenu de la durée évoquée entre la signature de l’avant-contrat
et la réitération de la vente, la gestion de la validité de l’offre de prêt
constitue une problématique déterminante pour les parties. Il est fort
probable que les établissements bancaires refuseront de conclure une
offre de prêt stipulant un délai d’environ deux années en raison des
imprévisions économiques inhérentes à une telle durée.
Le risque devra peut-être alors être assuré par les vendeurs, lesquels
devront accepter que la demande de financement soit déposée plus
tardivement ce qui ne manquera pas de les exposer à un éventuel refus
tardif de financement ainsi qu’à l’obligation de rechercher de nou-
veaux acquéreurs.
Les stipulations de l’avant-contrat devront donc équilibrer les accords
contractuels des parties entre le risque d’un refus tardif de finance-
ment et le risque de la caducité d’une offre de financement acceptée
trop prématurément. La lettre de l’article L. 312-16 du Code de la
consommation autorise légitiment les parties à s’accorder sur la durée
de validité de la condition suspensive de financement pourvu qu’elle
ne soit pas inférieur à un mois.
2° La condition suspensive de la vente préalable d’un bien
immobilier
En parallèle, le prix de vente d’une maison participant au finance-
ment des acquéreurs, il conviendra éventuellement de prévoir une
condition suspensive de la réitération de cette vente en fonction de
l’avancement du dossier16. Si une telle condition suspensive se révèle
potestative, l’obligation et le contrat lui-même pourront être annulés
en application de l’article 1174 du Code civil qui précise que toute
obligation est nulle lorsqu’elle a été contractée sous une condition
potestative de la part de celui qui s’oblige. Pour éviter cet écueil, il
convient de l’encadrer particulièrement en déterminant le prix de
vente envisagé, la durée maximale pour la réalisation de la vente et
en explicitant les démarches nécessaires effectuées pour la vente. Il
est ainsi déterminant que le propriétaire fasse appel à un tiers objectif
pour vendre le bien immobilier. Il conviendra le cas échéant d’an-
nexer le mandat de vente conféré à une agence immobilière. En tout
état de cause, l’arbitraire et la potestativité sont à exclure contractuel-
lement pour sécuriser la convention.
G. - Les modalités de vente du terrain à bâtir des
époux Berget
La vente d’un terrain à bâtir issu d’une division foncière implique né-
cessairement l’application de la réglementation sur les lotissements.
Depuis le 1er
mars 2012, l’article L. 442-1 du Code de l’urbanisme
définit le lotissement comme la division en propriété ou en jouis-
sance d’une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës
ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis.
Les procédures applicables aux lotissements sont ci-après rappelées
de manière synthétique17 :
Division en vue de bâtir Procédure applicable
Détachement d'un seul terrain ;
Détachement de deux terrains ou plus sans
création ou aménagement de voie,espace ou
équipement commun
Si l'assiette du lotissement est située en dehors
d'un secteur sauvegardé ou d'un site classé :
Déclarationpréalable
Si l'assiette du lotissement est située dans un
secteur sauvegardé ou dans un site classé :
Permisd'aménager
Détachement de deux terrains et plus avec
création ou aménagement de voie,espace ou
équipement commun
Permisd'aménager
En pratique, un seul lot sera créé et aucune partie commune ne sera
réalisée. Une simple déclaration préalable devrait normalement être
satisfaisante. Cependant, le terrain est situé dans un secteur sauve-
gardé et les époux Berget seront soumis à l'obligation de déposer une
demande de permis d'aménager conformément aux articles L. 442-1
et L. 442-3 du Code de l'urbanisme tels qu'ils sont désormais appli-
cables depuis le 1er
mars 2012 et l’entrée en vigueur de l’ordonnance
du 22 décembre 2011.
Compte tenu du fait que le terrain à bâtir se trouve dans le périmètre
d’un monument historique, le délai d’instruction sera prolongé pour
permettre l’obtention de l’accord de l’architecte des bâtiments de
France en application de l’article L. 621-31 du Code du patrimoine.
7. Page 7La Semaine Juridique - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 27 - 5 JUILLET 2013
cas pratique LA PROFESSION 1178
En pratique,le délai d’instruction de la demande de permis d’aména-
ger oscillera entre quatre et six mois selon le secteur précis où se situe
le terrain à bâtir.
Une réflexion devra être initiée avec les vendeurs concernant l’assiette
de la demande de permis d’aménager en fonction de l’éventuelle
constructibilité résiduelle qui pourrait être prélevée sur la propriété
bâtie au profit du terrain à bâtir.En effet,l’article R. 441-1 du Code de
l’urbanisme prévoit expressément que la demande de permis d’amé-
nager peut ne porter que sur une partie d’une unité foncière.
Conformément à l’article L. 442-8 du Code de l’urbanisme, la signa-
ture de la promesse de vente de la propriété devra intervenir posté-
rieurement à la délivrance du permis d’aménager.
2. Les formalités à exécuter préalablement à la
promesse
Les époux Berget devront transmettre leur titre de propriété ainsi que
le dossier des diagnostics techniques requis.
M. Berget devra saisir le magistrat par une requête sur la base de l’ar-
ticle 217 du Code civil pour être autorisé à vendre.Il peut être utile de
joindre à la demande un avis de valeur.
Une recherche hypothécaire permettra de vérifier qu’aucune servi-
tude n’existe.
Un document d’arpentage devra être préparé par un géomètre.
Compte tenu des délais impartis, le même géomètre pourra procéder
au dépôt de la demande de permis d’aménager et réaliser le bornage
contradictoire du lot en application de l’article 111-5-3 du Code de
l’urbanisme.
3. La rédaction de la clause de levée d’option
prévoyant une dérogation à l’article 1142 du
Code civil
Le PROMETTANT promet de vendre au BÉNÉFICIAIRE, selon les
modalités ci-après définies, le bien ci-après désigné, jusqu’à la date du …
En contrepartie, de l’engagement du PROMETTANT, le BÉNÉFI-
CIAIRE verse entre les mains du séquestre une indemnité d’immobilisa-
tion correspondant à 5 % du prix de vente. Les parties conviennent que
le régime juridique de cette somme sera le suivant :
1° En cas de réitération authentique de la présente vente, l’indemnité
d’immobilisation sera versée au PROMETTANT et s’imputera sur le
prix de vente exigible.
2° En cas de défaillance de l’une des conditions suspensives, l’indemnité
d’immobilisation sera restituée au BÉNÉFICIAIRE.
3° En cas de non levée de l’option, l’indemnité d’immobilisation sera
acquise au PROMETTANT si toutes les conditions suspensives ont été
réalisées.
Le PROMETTANT s’engage de manière ferme et définitive de sorte que
s’il venait à refuser d’exécuter son obligation et à refuser de maintenir sa
promesse de vente jusqu’à la date convenue, il s’exposerait, par déroga-
tion expresse à l’article 1142 du Code civil, à une exécution en nature
consistant en la réalisation forcée et judiciaire de la vente promise.
Ainsi, toute rétractation unilatérale du PROMETTANT sera sans effet
sur la faculté laissée au BÉNÉFICIAIRE de lever l’option jusqu’à la date
convenue.
Si le bénéficiaire lève l’option et fait connaître au PROMETTANT sa
volonté d’acquérir, par lettre recommandée avec accusé de réception,
dans le délai imparti, les parties devront régulariser l’acte de vente dans
le délai de deux mois à compter de la levée d’option.
À défaut d’option dans le délai imparti, les parties ne pourront plus de-
mander la réalisation de la vente et la présente promesse unilatérale sera
caduque sous réserve des dispositions afférentes à l’indemnité d’immo-
bilisation.
4. Les frais et droits fiscaux exigibles par les
parties
Si l’imposition du vendeur a tendance à augmenter (A), les frais et
droits fiscaux supportés par l’acquéreur (B) se révèlent relativement
constants.
A. - La fiscalité du vendeur
Après avoir exclu l’assujettissement du vendeur à la TVA (1°), nous
évoquerons les nouvelles taxes afférentes aux terrains à bâtir (2°)
avant de déterminer le montant de la plus-value immobilière exigible
(3°).
1° Le non-assujettissement du vendeur à la TVA
Conformément aux dispositions de la directive européenne du
28 novembre 2006,l’assujetti est défini comme la personne effectuant
une activité économique de manière indépendante. Ne relèvent cor-
rélativement pas du champ d’application de la TVA immobilière les
personnes qui réalisent la vente d’un élément de leur patrimoine en
dehors d’un objectif d’entreprise ou d’un but commercial. Le ven-
deur ne sera corrélativement pas redevable de la TVA et il ne pourra
pas non plus se soumettre volontairement à l’application de la TVA.
2° Les nouvelles taxes afférentes aux terrains à bâtir
Le vendeur peut être potentiellement redevable de deux taxes dis-
tinctes :
La taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus qui ont
été rendus constructibles du fait de leur classement par un document
d’urbanisme dans une zone urbaine ou à urbaniser ouverte à l’urba-
nisation ou constructible instituée par l’article 1529 du Code général
des impôts.
La taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus construc-
tibles du fait de leur classement postérieurement au 13 janvier 2010
par un document d’urbanisme dans une zone urbaine ou à urbaniser
ouverte à l’urbanisation ou constructible instituée par l’article 1605
nonies du Code général des impôts.
Pour le plus grand bonheur des vendeurs et dans l’optique du redres-
sement budgétaire national, les deux taxes peuvent être exigibles
concomitamment et cette double imposition peut se cumuler avec
l’imposition de la plus-value immobilière.
En pratique, le terrain vendu est constructible depuis une modifi-
cation du plan d’occupation des sols intervenue en février 1997 et
conservée dans le plan local urbain actuellement applicable.
Corrélativement, le vendeur aurait pu être redevable uniquement de
la taxe instituée par l’article 1529 du Code général des impôts si la col-
8. Page 8 La Semaine Juridique - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 27 - 5 JUILLET 2013
1178
18 Instr. 14 janv. 2004 : BOI 8 M-1-04, n° 7 ; JCP N 2004, n° 6, 1083. 19 BOI-RFPI-PVI-10-20-20120912 - Plus-values immobilières - Biens impo-
sables ; Permalien sur le BOFiP : http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/6229-PGP.
html?identifiant=BOI-RFPI-PVI-10-20-20120912.
lectivité locale avait voté l’instauration de cette taxe. Or, la commune
de Nancy n’a pas délibéré en ce sens.
La taxe nationale, instituée par l’article 1605 nonies du Code général
des impôts n’est pas temporellement applicable au regard de la date à
laquelle le terrain est devenu constructible.
3° La taxation de la plus-value immobilière
En pratique, il y a lieu de s’interroger sur les modalités de taxation de
la résidence principale des époux (a) et de s’intéresser aux particu-
larités de la taxation du bien immobilier « migrant » que constitue
la maison de gardien (b) avant d’évoquer la nouvelle surtaxe sur les
plus-values importante à compter du 1er
janvier 2013 (c).
a) La taxation de la plus-value afférente à la résidence principale
Concernant la plus-value immobilière, la vente de la résidence prin-
cipale des époux sera exonérée de plus-value immobilière en appli-
cation de l’article 150 U du Code général des impôts qui exonère de
plus-value les biens qui constituent l’habitation principale du ven-
deur au jour de la vente. Cette exonération s’applique également aux
dépendances immédiates et nécessaires. En pratique, la propriété de
Nancy constitue la résidence habituelle et effective des vendeurs.
La particularité réside dans le fait que M. Berget conserve une activité
professionnelle. Cependant, la maison de gardien semble ne plus être
affectée à aucune activité. Si les époux utilisent désormais cette partie
de la propriété pour leur résidence principale,elle sera également exo-
nérée de plus-value immobilière.
Lorsque l’immeuble est vendu comme terrain à bâtir au sens de la régle-
mentation sur la TVA immobilière, les dépendances immédiates et né-
cessaires s’entendent uniquement des aires de stationnement et des ter-
rainsservantdevoiesd’accès.Enpratique,lefaitqueleterrainpuisseêtre
détaché et puisse faire l’objet d’une construction indépendante de celles
existantes,impliquequeleterrainàbâtirseraentoutétatdecausesoumis
à la plus-value immobilière en ce qu’il ne constitue pas une dépendance
immédiate et nécessaire de la résidence principale.
Lebienayantétéacquisdepuisplusdetrenteannées,ildevraitêtrecepen-
dant exonéré de plus-value immobilière en raison de la durée de déten-
tion en application de l’article 150 U du Code général des impôts.
b) La taxation de la plus-value afférente à un bien « migrant »
Si la maison de gardien ne relève pas de l’exonération afférente à la
résidence principale, il convient de déterminer la plus-value immo-
bilière alors imposable.
L’instruction fiscale du 14 janvier 200418 évoquait les conséquences
de la réforme des plus-values immobilières de la loi de finances pour
2004. Le BOFiP19 a repris les solutions qui y étaient développées
concernant les biens immobiliers « migrants » d’un patrimoine pro-
fessionnel vers un patrimoine privé.
Compte tenu de l’affectation professionnelle qui est intervenue anté-
rieurement, la maison de gardien a figuré à l’actif d’une entreprise et
a été soumise à l’imposition des plus-values professionnelles.En effet,
le régime d’imposition des plus-values immobilières des particuliers
ne s’applique pas lors de la vente d’un immeuble affecté à l’exercice
d’une profession.
La plus-value constatée entre l’affectation du bien immobilier à l’ac-
tivité professionnelle en janvier 1985 et son retrait de ladite activité
en décembre 2010 constitue une plus-value professionnelle qui a été
imposée à ce titre.Pour éviter une double imposition,il convient d’en
tirer toutes les conséquences dans le cadre de l’imposition de la plus-
value immobilière des particuliers générée par la vente envisagée.
Lorsque le bien immobilier a fait partie du patrimoine privé du
contribuable avant d’être inscrit à l’actif d’une entreprise puis d’être
repris dans le patrimoine privé, il y a lieu de distinguer trois plus-
values distinctes : une plus-value professionnelle pour la période
d’inscription au bilan et deux plus-values privées pour les périodes de
détention dans le patrimoine privé du contribuable. Pour le calcul de
la durée de détention, les deux plus-values privées sont à considérer
ensemble en excluant la période au titre de laquelle le bien était inscrit
au bilan de l’entreprise. Le BOFiP précise ainsi que « pour le calcul de
l’abattement pour durée de détention, les deux plus-values privées sont
à considérer ensemble ; la période au titre de laquelle la plus-value est
professionnelle n’est pas prise en compte ».
La maison de gardien est considérée comme ayant réintégré le patri-
moine privé des époux en décembre 2010.Il convient de tenir compte
également de la période préalable à l’affectation professionnelle de
janvier 1980 à janvier 1985. Les délais de possession doivent être cal-
culés par périodes de douze mois. La maison a ainsi été détenue cinq
années dans le patrimoine privé des époux auxquelles il faut ajouter
l’année entière échue depuis décembre 2010 ainsi que les deux années
à venir pendant la durée de la promesse de vente soit au total huit
années.
De manière classique,l’article 150V du Code général des impôts pré-
voit que le calcul de la plus-value brute est égal à la différence entre le
prix de vente et le prix d’acquisition.
Patrimoine privé
Acquisition
Janvier 1980
Inscription à l'actif
Janvier 1985
Absence de fait
générateur de
plus-value
Retrait d'actif
Imposition de
la plus-value
professionnelle
Décembre 2010
Vente
Imposition de
plus-values
immobilières privées
Patrimoine privéPatrimoine professionnel
9. Page 9La Semaine Juridique - NOTARIALE ET IMMOBILIÈRE - N° 27 - 5 JUILLET 2013
cas pratique LA PROFESSION 1178
20 En principe les frais et droits doivent être justifiés ; il est également possible de
les fixer forfaitairement à 7,5% du prix d’acquisition.
21 En principe les dépense de construction, de reconstruction, d’agrandisse-
ment, de rénovation ou d’amélioration sont retenus pour leur montant réel
et doivent être justifiées ; il est également possible de les fixer forfaitairement à
15 % du prix d’acquisition à la condition que le contribuable vende l’immeuble
plus de cinq années après son acquisition. Le contribuable n’a pas à établir la
preuve de la réalité des travaux pour bénéficier dudit forfait.
En principe, le prix de vente correspond au prix réel tel qu’il est sti-
pulé à l’acte de vente ; au jour de la vente, la maison de gardien repré-
sentera une valeur de 250 000 €.
Cependant, il convient de tenir compte de l’affectation profession-
nelle qui est intervenue. La méthodologie retenue ne ventile pas le
calcul entre les deux plus-values privées compte tenu du fait qu’au
regard des données du thème le résultat serait identique.
En cas de vente portant sur une partie d’un bien immobilier, la plus-
value est déterminée en tenant compte de la fraction du prix afférente
à la seule partie vendue. La maison de gardien représente un tiers de
l’immeuble. En janvier 1980, la maison de gardien représentait par
conséquent environ une valeur de 76 219 € et en janvier 1985, la
maison de gardien représentait environ une valeur de 91 463 €. En
2010, la maison de gardien représentait une valeur de 150 000 €. Cor-
rélativement, la différence entre la valeur de janvier 1985 et de 2010
qui a été soumise à la plus-value professionnelle est de : 150 000 € -
91 463 € = 58 537 €
Le prix de vente correspond : au prix de vente convenu minoré de
la plus-value professionnelle qui a déjà été fiscalisée : 250 000 € -
58 537 € = 191 463 €
Le prix d’acquisition,qui constitue le deuxième terme de la différence
pour calculer la plus-value brute, correspond au prix acquitté par le
vendeur lors de son acquisition.
Le prix d’acquisition ainsi déterminé doit être majoré des frais et des
travaux, limitativement énumérés par la loi, de la manière suivante :
Estimation du prix d’acquisition en janvier 1980. . . . . . . . . 76 219 €
Majoré des frais d’acquisition à titre onéreux pour 7,5 %20. 5 716 €
Majoré de l’estimation des travaux pour 15 %21 . . . . . . . . . 11 433 €
Soit un total de . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 368 €
La plus-value est égale à la différence entre le prix de vente recalculé et
le prix d’acquisition revalorisé : 191 463 € - 93 368 € = 98 095 €
La plus-value brute réalisée est réduite d’un abattement de 2 % pour
chaque année de détention au-delà de la cinquième. Les délais de
possession doivent être calculés par périodes de douze mois depuis
la date d’acquisition jusqu’à la date de vente. En pratique, il convient
corrélativement d’appliquer un abattement pour durée de détention
de 6 % : 98 095 € - 5 886 € = 92 209 €.
Le montant taxable doit être multiplié au taux d’imposition en vi-
gueur ; la plus-value est imposable à l’impôt sur le revenu au taux pro-
portionnel (19 %), à la CSG (8,2 %), à la CRDS (0,5 %), au prélève-
ment social (4,5 %),à la contribution additionnelle (0,3 %) ainsi qu’au
prélèvement de solidarité (2 %) pour un montant total de 34,5 %.
92 209 € x 34,5 % = 31 812 € ;
Le montant de l’imposition sera donc de 31 812 €.
L’imposition afférente à la plus-value immobilière sera déclarée sur
un imprimé n° 2048 IMM et payée lors de la publication de la vente.
c) La nouvelle surtaxe sur les plus-values importantes à compter
du 1er
janvier 2013
La loi de finances du 29 décembre 2012 a introduit l’article 1609
nonies G dans le Code général des impôts. À compter du 1er
janvier
2013,les plus-values imposables supérieures à 50 000 € sont soumises
à la surtaxe sur les plus-values dont le taux s’échelonne de 2 % à 6 %
en fonction du montant imposable.
Dans le cas présent, les époux ne seront pas soumis temporellement
à cette nouvelle imposition en application des dispositions transi-
toires ; l’article 70 C de la loi de finances exclut les plus-values réali-
sées lors d’une vente ayant fait l’objet d’une promesse de vente ayant
acquis date certaine avant le 7 décembre 2012.
En pratique,grâce à cette opportune disposition transitoire,les époux
économiseront le montant de cette nouvelle surtaxe qui aurait été,
dans notre hypothèse, de 2 % de la plus-value imposable correspon-
dant à un montant de 1 844 € (2 % x 92 209 €).
B. - Les frais et la fiscalité de l’acquéreur
L’acquéreur d’une propriété bâtie depuis plus de cinq années qui n’a
pas la qualité d’assujetti à la TVA est obligatoirement soumis aux
droits d’enregistrement au taux de 5,09 % (soit 38 175 € en pratique)
en application de l’article 1594 D du Code général des impôts.
Le salaire du conservateur des hypothèques, auquel se substitue la
contribution pour la sécurité foncière à compter du 1er
janvier 2013
sera exigible au taux de 0,1 % sur le prix de vente (soit 750 € en pra-
tique) et au taux de 0,05 % sur le montant garanti par une inscription
hypothécaire.
Compte tenu du montant emprunté, les époux Masson pourront
faire inscrire un privilège de prêteur de deniers qui ne rend pas exi-
gible la taxe de publicité foncière.
Les honoraires du notaire sur la base S1 coefficient 1 seront également
à la charge des acquéreurs ainsi que les honoraires afférents au prêt
notarié.