1. ETUDE PORTANT SUR L’INTERET D’UTILISER
UN MODELE DE BSC POUR EVALUER LE
SECTEUR ASSOCIATIF
Jury :
Promoteur :
Mertens S.
Lecteurs :
Chanteux A.
Delforge S.
Mémoire présenté par
Jérôme REIP
En vue de l’obtention du diplôme de
master en ingénieur de gestion.
Année académique 2008/2009
2.
3. Remerciements
Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué, directement ou indirectement, à la
réalisation de ce mémoire. En premier lieu, mon Jury, Mmes Sybille Mertens, Sandra
Delforge et Anne Chanteux pour le temps qu’elles ont consacré à ce mémoire.
Ensuite, je voudrais remercier M. Didier Van Caillie pour avoir éveillé en moi un grand
intérêt pour la performance à travers ses différents cours.
Enfin, last but not least, je remercie mes parents pour le soutien apporté tout au long de mes
études, et plus particulièrement lors de la réalisation de ce mémoire.
4. Résumé
Dans cette étude, nous tenterons de démontrer qu’un outil prévu initialement pour les
entreprises du secteur privé et à but lucratif, la balanced scorecard (BSC), peut être adapté au
contexte des ASBL afin d’en évaluer la performance.
Nous exposerons la difficulté d’évaluation de la production de ces entités en abordant le
concept de bien collectif et des impacts qu’elles génèrent. Ensuite, nous présenterons en
détails le modèle de la BSC. Nous mettrons en avant les quatre axes qui le composent, les
relations qui s’y intègrent ainsi que la notion stratégique qui le caractérise. Nous étudierons sa
mise en place, les critiques de la littérature à son égard et la possibilité de l’adapter aux
ASBL.
Puis, nous aborderons des modèles pouvant apporter des pistes supplémentaires au modèle du
TBP. Ainsi, les démarches de bilan social, bilan sociétal et les modèles de Paton et de
l’EFQM seront mises en avant. Enfin, nous tenterons de discuter de l’utilité et de
l’applicabilité de la BSC au secteur associatif et lancerons quelques pistes de réflexion.
5. Abstract
In this study, we attempt to demonstrate that a tool originally intended for businesses and
private profit sector, the balanced scorecard (BSC) may be adapted to the context of non-
profit organizations to assess performance.
We will discuss the difficulty of measuring the output of those entities in addressing the
concept of collective good and the impacts it generates. Then we will present in details the
model of the BSC. We will forward the four areas that compose it, the relationships between
them and the strategic concept that characterizes it. We will study its implementation,
literature reviews about it and the possibility of adapting it to non-profit organizations.
Then we will expose models which can give trails to the model of the BSC. Thus, approaches
like social reporting, societal reporting and Paton and EFQM models will be put forward.
Finally, we will discuss about the usefulness and applicability of the BSC to the sector and
introduce some reflections.
6. Table des matières
Remerciements........................................................................................................................
Résumé ...................................................................................................................................
Abstract...................................................................................................................................
Table des matières...................................................................................................................
Table des illustrations..............................................................................................................
Table des abréviations .............................................................................................................
1 Introduction ................................................................................................................1
1.1 Question de recherche...........................................................................................1
1.1.1 Les ASBL......................................................................................................1
1.1.2 La performance : Concepts ............................................................................5
1.2 Pertinence scientifique et managériale...................................................................7
1.3 Démarche .............................................................................................................8
2 Revue de littérature.....................................................................................................9
2.1 Evaluation de la performance et secteur associatif.................................................9
2.1.1 Difficulté de l’évaluation ...............................................................................9
2.1.2 Méthodes d’évaluation des biens collectifs...................................................13
2.2 Balanced Scorecard.............................................................................................15
2.2.1 Le contexte..................................................................................................15
2.2.2 Le concept ...................................................................................................17
2.2.3 La BSC au service de la stratégie.................................................................19
2.2.4 Mise en place d’une BSC « stratégique » .....................................................26
8. Table des illustrations
Figure 1 Répartition par type d'activités de l'emploi salarié dans les ASBL en 2005 (en ETP)
(Marée, Gijselinckx, Loose, Rijpens, & Franchois, 2008).......................................................2
Figure 2 Concepts d'efficacité et d'efficience (Rousselot)........................................................7
Figure 3 Exemple d'objectifs et d'impacts (Marée, 2006) ......................................................10
Figure 4 Exemple de produits pour une entreprise d'insertion (Marée, 2006) ........................12
Figure 5 Indicateurs du modèle Aimes (Henderson, Chase, & Woodson, 2002)....................12
Figure 6 Les 4 axes de la BSC au service de la stratégie (Kaplan & Norton, 1996) ...............18
Figure 7 La BSC comme cadre stratégique (Kaplan & Norton, 2008) ...................................19
Figure 8 La BSC au service de la stratégie (SPF - Personnel et Organisation, 2006) .............21
Figure 9 Les indicateurs clés de l'axe Clients (Kaplan & Norton, 2008)................................23
Figure 10 Axe Clients : Exemple de la Metro Bank (Kaplan & Norton, 2008) ......................24
Figure 11 La Chaîne de création de valeur (Kaplan & Norton, 2008)....................................24
Figure 12 La mise en place d'une BSC (SPF - Personnel et Organisation, 2006) ...................27
Figure 13 La BSC dans l'EMS Suisse LB (Aymard-Martinot, Huber Swinarski, & Morard,
2002)....................................................................................................................................32
Figure 14 Les quatre types d'indicateurs requis (Paton, 2003) ...............................................33
Figure 15 Modèle de tableau de bord pour ASBL (Paton, 2003) ...........................................34
Figure 16 "Program Revision Information Matrix" (Paton, 2003) .........................................35
Figure 17 Processus du bilan sociétal (Bodet & Picard, 2006)...............................................40
Figure 18 Le modèle EFQM (EFQM, 2009) .........................................................................42
Figure 19 Les 8 principes du modèle EFQM (Diakite, 2007) ................................................43
Figure 20 Identification des objectifs spécifiques (Kaplan & Norton, 2008)..........................60
9. Table des abréviations
ASBL : Association sans but lucratif
BSC : Balanced Scorecard
CA : Chiffre d’affaires
EFT : Entreprise de formation par le travail
EMS : Etablissement médico-social
ETP : Equivalent temps plein
FCS : Facteur clé de succès
KPI : Key Performance Indicator ou indicateur clé de performance
R&D : Recherche & Développement
RSE : Responsabilité sociale de l’entreprise
SAV : Service après vente
TBP : Tableau de bord prospectif
10.
11. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
1
1 Introduction
1.1 Question de recherche
Au cours de cette étude, nous tenterons de mettre en évidence les avantages et les
inconvénients d’évaluer la performance pour une Association Sans But Lucratif (ASBL) en
utilisant une Balanced ScoreCard (BSC) ou, en français, un Tableau de Bord Prospectif
(TBP). Nous mettrons aussi en avant les difficultés de l’évaluation propres au secteur
associatif. Nous venons d’introduire deux concepts qu’il est nécessaire d’éclaircir dès à
présent : Les ASBL et la performance.
1.1.1 Les ASBL
1.1.1.1 Niveau Juridique
Les ASBL sont réglementées par la Loi du 27 Juin 1921 sur les ASBL modifiée par la Loi du
2 Mai 2002 sur les ASBL, les AISBL et les fondations. Elles nous donnent la définition
suivante : « L’association sans but lucratif est celle qui ne se livre pas à des activités
industrielles ou commerciales, et qui ne cherche pas à procurer à ses membres un gain
matériel ». Ces lois règlementent par ailleurs les dispositions statutaires spécifiques aux
ASBL.
En effet, contrairement aux entreprises commerciales qui sont gérées par un conseil
d’administration et des actionnaires, les ASBL comptent un conseil d’administration et des
membres effectifs et/ou adhérents. Ces derniers peuvent payer une cotisation annuelle fixée
dans les statuts. De plus, pour la tenue des divers documents, les ASBL doivent tenir un
registre des membres et tiennent une comptabilité simple (sauf si deux des trois seuils
suivants sont dépassés: plus de 5 travailleurs en moyenne annuelle exprimés en ETP, plus de
250.000€ de recettes autres qu’exceptionnelles et HTVA ou plus de 1.000.000€ pour le total
du bilan).
De même, les associations sont tenues de faire appel à un ou plusieurs commissaires pour le
contrôle de la situation financière si plus de 100 travailleurs ETP sont inscrits au registre du
personnel ou si deux des trois seuils suivants sont dépassés : plus de 50 travailleurs en
12. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
2
moyenne annuelle exprimés en ETP, plus de 6.250.000€ de recettes autres qu’exceptionnelles
et HTVA ou plus de 3.125.000€ pour le total du bilan.
1.1.1.2 Niveau Statistique
Au niveau statistique, la revue de la Fondation Roi Baudouin (Marée, Gijselinckx, Loose,
Rijpens, & Franchois, 2008) nous donne des chiffres intéressants. Les ASBL représentent,
selon que les emplois subventionnés de l’enseignement libre soient pris en compte ou non,
respectivement 14,5% et 9,2% de l’emploi total en Belgique. Ceci représente au total
427.859,1 ETP répartis ci-dessous (Cfr. Figure 1) selon le domaine d’activité.
Nous pouvons directement remarquer la dominance des secteurs de l’éducation et de la
recherche, de l’action sociale et de la santé qui occupent respectivement 38,2%, 28,9% et
19,8% de l’emploi au sein des ASBL. Le poids du secteur associatif, et en particulier des
ASBL, n’est plus à démontrer. L’étudier de manière approfondie nous semble essentiel.
Figure 1 Répartition par type d'activités de l'emploi salarié dans les ASBL en 2005 (en ETP) (Marée, Gijselinckx,
Loose, Rijpens, & Franchois, 2008)
1.1.1.3 Rôle et Spécificités
Dans son article, Mertens (2008) définit un bien collectif comme étant un bien pouvant être
consommé par un individu supplémentaire sans engendrer un coût important et sans que ce
dernier ne soit dans l’obligation de s’acquitter d’un prix afin d’en jouir. L’auteur explique que
les entreprises lucratives n’ont pas d’intérêt à offrir des biens collectifs (Cfr. Annexe 1.
Problème du passager clandestin) et ne fournissent pas toujours une information parfaitement
13. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
3
fiable. L’Etat doit donc intervenir pour réguler le marché et défendre le consommateur-
citoyen.
Au niveau de la production publique, grâce à la possibilité de lever des taxes, l’Etat peut
éviter le problème du passager clandestin dans la production de biens collectifs. Toutefois, il
existe plusieurs limites à l’intervention de l’Etat :
- Elle est considérée comme génératrice d’inefficacité ;
- Elle est dépendante de l’électeur médian (voir Annexe 2. L’électeur médian) ;
- Elle doit être déontologiquement correcte (organisation du paysage politique, etc.).
Au niveau de la régulation publique, l’Etat peut établir certaines normes (prix, qualité,
quantité, etc.) afin de limiter les abus et de défendre le consommateur-citoyen. Il existe, là
aussi, certaines limites :
- La régulation ne peut tenir que sur des aspects tangibles et vérifiables, ignorant de
nombreuses dimensions de la vente de produits ou de services (degré d’attention,
etc.) ;
- S’il y a régulation, il est nécessaire de l’accompagner d’un contrôle souvent coûteux
pour la collectivité ;
- La normalisation peut conduire à une standardisation affaiblissant la diversité de
l’offre.
C’est face à ces diverses limites que le secteur associatif peut tenter d’intervenir. L’auteur
rappelle deux caractéristiques essentielles des ASBL :
- Il n’existe aucune redistribution des revenus résiduels (ou du profit) aux dirigeants de
l’association ;
- Le pouvoir de décision est centralisé chez les membres de l’ASBL. Il peut s’agir des
bénéficiaires des services, mais aussi des pouvoirs publics, des bénévoles, des
donateurs, etc.
Ces caractéristiques donnent aux associations des avantages sur le secteur privé lucratif et sur
le secteur public, leur permettant ainsi de réaliser trois types de production : production de
biens de confiance, production complémentaire de biens collectifs et production déléguée de
biens collectifs.
14. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
4
En effet, dans le premier cas, de par sa nature non-lucrative, l’association peut sembler plus
digne de confiance qu’une entreprise qui vise à maximiser son profit. Elle est censée être
dénuée de comportements opportunistes profitables et par conséquent, le risque de voir la
qualité de la production réduite et de constater un abus d’information est plus faible. L’auteur
souligne l’importante activité des associations dans des domaines tels que la santé, l’éducation
ou encore le commerce équitable et l’agriculture.
Deuxièmement, les ASBL peuvent offrir un complément à l’action de l’Etat en produisant les
biens collectifs qui n’ont pas été offerts suite à la dépendance de l’électeur médian. De plus,
l’auteur cite Gilain et Nyssens (1999) qui notent que « les associations ont souvent joué un
rôle de pionnières en défrichant des demandes non solvables sur le marché et en ouvrant, de la
sorte, la voie à une action subséquente de l'Etat ».
Enfin, l’Etat peut déléguer une partie de la production des biens collectifs aux associations. Et
ceci principalement pour trois raisons :
- Les associations sont plus empruntes à collecter des fonds (les donateurs préférant
placer leur argent au sein d’ASBL plutôt que de l’offrir à l’Etat) ;
- Les coûts de production sont généralement plus faibles pour les associations que pour
l’Etat (dépendant notamment de barèmes) ;
- Les ASBL ne sont pas tenues d’offrir des biens dits « universels ». En effet,
contrairement à l’Etat, elles peuvent avoir une offre beaucoup plus hétérogène et
ciblée.
1.1.1.4 Synthèse et But de la recherche
En résumé, si nous associons le secteur des ASBL (belge) au non-profit sector (international)
qui sont deux concepts semblables, nous pouvons citer :
The non-profit sector exists because it can better provide, relative to the business and
public sectors, goods, and services that: (1) have a significant degree of non-rivalry, and
(2) are difficult to charge an economically appropriate price. (Ben-Ner, 2002) Hence, non-
profits are most appropriate to provide needed societal services when traditional market
mechanism fail. (Sargeant, Foreman, & Liao, 2002)
(Barrett, Balloun, & Weinstein, 2005)
15. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
5
En effet, les ASBL ont un certain poids dans l’économie et peuvent répondre, grâce à leurs
spécificités, à certains échecs du marché. Toutefois, il existe certaines critiques qu’il est
nécessaire de mentionner (Pour plus de détails, voir Mertens, 2008) :
- Certaines redistributions abusives des ressources, à travers des avantages en nature
notamment, peuvent être constatées dans les associations, ce qui met en péril la
confiance qui leur est allouée. Il est cependant possible d’y remédier à l’aide, par
exemple, de labels de qualité ou de code déontologique (médecins, avocat, etc.), mais
aussi par l’établissement de normes ou la prise en charge de la production par l’Etat.
- L’intervention de l’Etat dans le secteur associatif reste indispensable pour trois
raisons. D’abord, parce que le financement des ASBL reste notamment aléatoire selon
la conjoncture. Les subsides permettent alors un financement stable de long terme.
Ensuite, l’Etat doit éviter que les ASBL tombent dans le particularisme, n’étant pas
tenues d’offrir des biens universels. Enfin, l’Etat intervient afin d’éviter les risques de
paternalisme et d’amateurisme encourus par les associations.
- Le caractère non-lucratif et la non-distribution des profits n’engendrent pas que des
avantages. Effectivement, les incitants à produire de manière efficiente y sont moins
nombreux, là où le secteur privé lucratif cherche à diminuer ses coûts pour augmenter
ses profits.
C’est principalement pour cette dernière remarque que les outils d’évaluation de la
performance nous semblent essentiels pour les ASBL. Ils pourront mettre en évidence les
problèmes de coûts mais aussi traiter d’autres composantes telles que la satisfaction des
bénéficiaires, etc. Dans le cadre de cette étude, nous nous attarderons sur un modèle en
particulier : la BSC. Nous justifierons ce choix dans les sections suivantes. Nous verrons aussi
plus en détail l’utilité d’une démarche d’évaluation de la performance.
1.1.2 La performance : Concepts
« L’évaluation d’une performance est un jugement porté par une partie prenante légitime sur
une entité, une unité active ou le résultat de son action, un individu ou une organisation. »
(Veran). Autrement dit, pour une organisation, évaluer sa performance se résume à constater
les résultats obtenus lors de son activité. Mais quels résultats ? De plus, qu’est-ce qu’une
entreprise performante ?
Il existe différentes définitions de l’entreprise performante (Van Caillie D. , 2009) :
16. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
6
- Celle qui atteint ses objectifs financiers ;
- Celle qui atteint ses objectifs sociaux, financiers, économiques, etc. ;
- Etc.
L’auteur signale que la définition traditionnelle de la performance concerne « [l’] entreprise
qui atteint ses objectifs financiers, qui dégage un bénéfice (à court terme) ». Il la considère
comme la performance relative de l’entreprise à cause de la dimension ponctuelle des résultats
(« une année, mais pas l’autre »). Il définit dès lors la performance absolue théorique d’une
entreprise comme étant celle « qui crée de la valeur de manière durable, de part son
alignement interne et externe ». Pour ce faire, elle doit être efficiente et efficace. Définissons
dès à présent ces deux concepts.
Selon le dictionnaire (Larousse, 1994), est efficace celui qui produit l’effet attendu et est
efficient celui qui aboutit à de bons résultats. En termes de gestion, nous pouvons utiliser les
définitions suivantes : L’efficacité correspond à la relation objectifs-résultats. L’entreprise a-t-
elle atteint les résultats escomptés (financiers, opérationnels, etc.)? Si oui, elle est dite
efficace. Elle produit l’effet attendu. L’efficience met en exergue la relation activités-
résultats. L’entreprise peut-elle utiliser d’autres techniques moins coûteuses tout en atteignant
les mêmes résultats ou des résultats semblables ? Si non, elle est dite efficiente, elle maximise
l’utilisation de ses ressources (Daviron, Thirion, & Vergriette, 2002). La figure 2 ci-dessous
symbolise ces deux concepts.
Nous venons de définir les concepts qui seront utiles au cours de notre étude. En évaluant sa
performance à l’aide d’indicateurs, une entreprise peut connaître son niveau d’efficacité et
d’efficience. Elle peut ainsi cibler de nouveaux objectifs à atteindre afin d’améliorer sa
performance générale et tenter de se rapprocher d’une performance absolue. Nous verrons en
détail lors de la revue de la littérature pourquoi l’évaluation de la performance est intéressante
pour toute organisation et quelle forme elle peut adopter.
17. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
7
Figure 2 Concepts d'efficacité et d'efficience (Rousselot)
1.2 Pertinence scientifique et managériale
Face aux problèmes environnementaux croissants, aux manques de soins de santé, à la
recrudescence des interventions de l’État, les ASBL sont en plein développement et sont plus
que jamais présentes dans notre environnement. Leurs spécificités citées ci-dessus (Cfr.
1.1.1.3. Rôle et Spécificités) démontrent les difficultés de financement qui leur sont propres :
absence d’appel à augmentation de capital, absence de but de lucre, etc. De plus, dans le
contexte actuel de la crise financière, nous pouvons facilement supposer que les donateurs et
autres sponsors se font plus prudents et donc, plus rares.
Il parait dès lors évident qu’une amélioration de la performance aiderait les ASBL. En effet, si
nous pouvons supposer (ou du moins espérer) que les associations atteignent leurs objectifs,
du moins en partie, et qu’elles sont par conséquent plus ou moins efficaces, elles peuvent sans
nul doute améliorer leur efficience. Ceci donnerait plus de moyens à la poursuite des missions
sociales qu’elles se sont fixées. La réduction des coûts, l’amélioration des prestations mais
aussi la diminution du coût par prestation sont des exemples concrets d’amélioration.
Et pour améliorer la performance, il s’agit d’abord de la mesurer. En effet, nous ne pouvons
pas gérer ce que nous ne pouvons pas mesurer (Stockmal, 2005). C’est pourquoi il nous
semble opportun d’analyser un outil d’évaluation en particulier. Nous avons choisi la BSC
parce qu’elle est largement vantée dans la littérature scientifique tout autant que critiquée.
18. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
8
Ainsi, elle est sujette à débat. Nous voulons donc en vérifier la pertinence au niveau du
secteur associatif. Micheli et Kennerley (2005) citent par ailleurs de nombreuses études
exploratoires à ce propos. La BSC est aussi largement présente dans les institutions fédérales
belges (SPF - Personnel et Organisation, 2006).
1.3 Démarche
Nous allons tenter, à l’aide d’une revue de la littérature existante, de cerner les difficultés
d’évaluation dues aux caractéristiques propres des ASBL. Quels indicateurs utiliser ? Quelle
en est la pertinence ? Nous y présenterons ensuite le modèle de la BSC de manière détaillée.
Qu’est-ce que c’est ? Comment l’implémenter ? Quel rapport avec les ASBL ? Nous pourrons
nous inspirer d’autres modèles existants afin d’en améliorer sa critique (EFQM, bilan social,
etc.).
Ensuite, nous vérifierons et discuterons son utilité et son applicabilité pour le secteur
associatif. Qu’est-ce que les ASBL doivent mettre en avant ? Comment doivent-elles agir
pour rendre la BSC utile pour l’organisation ? Enfin, nous résumerons notre étude et
identifierons des pistes de réflexion pour les recherches futures.
19. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
9
2 Revue de littérature
2.1 Evaluation de la performance et secteur associatif
2.1.1 Difficulté de l’évaluation
Avant d’introduire un outil d’évaluation de la performance d’une ASBL, nous allons nous
attarder sur les difficultés de cette démarche liées à la finalité même de ce type de structure
spécifique.
Tout d’abord, lorsque l’on compare l’output d’une entreprise commerciale à celui d’une
ASBL, nous pouvons mettre en avant le premier inconvénient à l’utilisation d’outils
d’évaluation « standards » utilisés dans le secteur lucratif. Puisque le but d’une ASBL n’est
pas de rémunérer ses membres mais bien de les aider (à trouver un emploi, un logement, à
s’exprimer, à s’intégrer dans la société, à être soignés, etc.) contrairement aux actionnaires
habituels, il est fréquent que cette dernière crée des impacts indirects dans la société qui
l’accueille.
Dès lors, il faut distinguer les impacts collectifs envisagés (qui bénéficient aux destinataires
directs) des impacts collectifs considérés (qui bénéficient à d’autres personnes ou organismes
que les destinataires directs). Marée (2006) différencie ces deux types d’impacts par ce qu’il
appelle les biens collectifs (impacts directs) et les impacts macroéconomiques (impacts
indirects). Pour bien clarifier cette distinction, nous pouvons penser à une ASBL qui formerait
des chômeurs pour les aider à trouver un emploi (bien collectif) et qui offrirait indirectement
de la main d’œuvre de qualité à des entreprises qui manqueraient de travailleurs qualifiés
(impact macroéconomique). Une première question découle dès lors de cette analyse : lorsque
nous voulons évaluer la performance d’une ASBL, devons-nous nous concentrer sur les
impacts directs qu’elle crée ou doit-on également considérer les impacts indirects qui
bénéficient à l’entièreté de la société ?
Nous venons d’aborder les conséquences des actions entreprises par les ASBL. Nous pouvons
également considérer les objectifs que celles-ci peuvent se fixer pour chaque projet qu’elles
entreprennent. Contrairement aux entreprises à but de lucre qui ont la possibilité de se fixer
des objectifs précis et chiffrés (en se basant sur des quantités de production, un chiffre
d’affaire à atteindre, un nombre de salariés supplémentaires à employer, etc.), une ASBL doit
20. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
10
se focaliser sur le calcul de l’efficacité et de l’efficience qu’elle aura atteint sur un projet en
fonction des objectifs préalablement fixés. La littérature distincte les objectifs opérationnels
(ce qui a été réalisé), les objectifs spécifiques (les résultats atteints) et les objectifs globaux
(impacts des projets). La Figure 3 ci-dessous en donne un exemple concret dans le cas d’une
Entreprise de Formation par le travail (EFT).
Type d’objectifs Type d’effets Exemples (cas d’une EFT)
Objectifs opérationnels Réalisations : prestations
effectuées dans le cadre du
projet
Nombre d’heures de formation
et d’encadrement
Objectifs spécifiques Résultats : avantages immédiats
pour les destinataires directs
Qualification accrue des
stagiaires
Objectifs globaux Impacts : conséquences des
résultats engendrés par le projet
Directs : employabilité accrue
des stagiaires
Indirects : Amélioration du
marché du travail
Figure 3 Exemple d'objectifs et d'impacts (Marée, 2006)
Inévitablement, un critère de subjectivité apparait et rend l’évaluation de la performance bien
plus complexe. Les outils et techniques d’évaluation employés dans le secteur lucratif
fonctionnant avec des données chiffrées seront dès lors difficilement applicables pour mesurer
ne fut-ce que l’atteinte de ces objectifs subjectifs. A titre d’exemple, nous pouvons penser à
une ASBL qui a pour finalité sociale de former des personnes au travail. Comment cette
dernière pourrait mesurer l’accomplissement de ses objectifs ? Comment mesurer la qualité
du service offert par l’ASBL ? Comment définir si la formation est pertinente pour que la
personne puisse trouver du travail à long terme ? Ceci constitue la deuxième difficulté de
l’évaluation de la performance d’une ASBL : comment mesurer la réussite de ses objectifs et
comment intégrer cette mesure dans des outils qui se basent sur des données chiffrées ?
Afin de mesurer cette atteinte d’objectifs préalablement fixés et les impacts qui en découlent,
il nous faut également définir une base solide et structurée sur laquelle nous pourrons nous
fier afin d’évaluer la performance d’une ASBL. Comme expliqué précédemment, une
entreprise à but non-lucratif ne peut pas être aisément évaluée à partir de données chiffrées
mais bien à partir de l’accomplissement des objectifs qu’elle s’est fixés et de l’efficience,
souvent subjective, de la structure.
21. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
11
Henderson, Chase et Woodson (2002) proposent dès lors quatre types de mesure à
considérer : l’input, l’output, l’outcome et l’efficiency. L’input mesure les efforts entrepris
dans un projet (que ce soit au niveau financier, en termes d’heures prestées, de biens alloués,
etc.). En quelque sorte, il mesure la poursuite des objectifs opérationnels. L’output mesure le
niveau de service fourni (autrement dit, ce dont le destinataire va bénéficier, donc une mesure
des objectifs spécifiques et globaux directs). L’outcome, quant à lui, mesure les effets d’un
programme sur les objectifs globaux indirects. Ce dernier considère donc un niveau plus
général que l’output. Enfin, en comparant soit un input avec un output, soit un input avec un
outcome, nous pouvons définir un niveau d’efficience de la structure. Cette mesure forme un
indicateur de type efficiency.
Néanmoins, pour appliquer ce système de mesure, il faut que les dirigeants des ASBL aient la
possibilité de les mettre en œuvre. Si l’input est relativement simple à calculer, notamment à
partir de la comptabilité, l’output et l’outcome le sont beaucoup moins. Pour mesurer l’output,
les ASBL doivent quantifier les services rendus à leurs destinataires. Un premier problème
apparaît lorsque nous considérons les ASBL qui allouent une partie de leurs ressources à
d’autres activités que leur produit principal.
Dans son étude, Marée (2006) avait défini trois types de produits en ce qui concerne les
entreprises sociales d’insertion : le produit principal (finalité de l’entreprise), le produit-
support (ventes de biens/services ou fournitures de services collectifs/quasi-collectifs) et le
produit dérivé (par exemple, amélioration et innovation au niveau du système de production
ou de gestion) (Cfr. Figure 4).
Nature du produit Exemples Destinataires directs
Produit principal
(finalité de
l’entreprise)
Insertion de publics
défavorisés
Formation-
accompagnement,
création d’emplois, etc.
Stagiaires
Produit-support Vente de biens ou
services
Travaux de bâtiment,
restauration, vente de
produits récupérés,
commerce équitable,
etc.
Clients
Fournitures de services
collectifs ou quasi-
collectifs
Formation-
sensibilisation, services
sociaux ou culturels,
collecte de déchets, etc.
Clients, stagiaires,
ménages, collectivité,
etc.
22. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
12
Produit dérivé Méthodes innovantes
de production et
d’organisation
Modes de production
« propres », gestion
démocratique,
meilleures conditions
de travail, etc.
Travailleurs et
stagiaires de
l’entreprise, membres
de l’association
Figure 4 Exemple de produits pour une entreprise d'insertion (Marée, 2006)
Dès lors, pour quantifier l’output d’une ASBL, il faut encore savoir si nous ne prenons en
compte que le produit principal ou si nous intégrons également les actions entreprises pour le
produit-support et le produit dérivé.
Ensuite, le calcul de l’outcome vient ajouter une difficulté supplémentaire. En effet, si une
ASBL se fixe l’objectif de, par exemple, diminuer de 5% le nombre d’analphabètes en
Belgique, il lui faudra non seulement avoir accès à des statistiques mises à jour sur la question
mais également être le seul acteur en Belgique ayant un impact sur ce taux. Effectivement, si
une autre ASBL ou une autre entreprise a la même finalité qu’elle, les effets combinés seront
difficilement dissociables et le calcul de l’outcome impossible.
Par conséquent, il devient évident que le calcul de l’efficience d’une ASBL qui se base
obligatoirement sur l’output ou l’outcome de ses activités devient difficilement réalisable.
Toutefois, certains organismes arrivent à utiliser des données concrètes dans leur système de
mesure. Voici un exemple des mesures que l’outil Aimes de la Christian Children’s Fund
(Henderson, Chase, & Woodson, 2002) utilise :
Figure 5 Indicateurs du modèle Aimes (Henderson, Chase, & Woodson, 2002)
23. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
13
Dans son livre, Paton (2003) nous propose diverses solutions controversées que des ASBL
utilisent pour améliorer leur performance et montrer aux autres acteurs leurs améliorations.
Parmi ces solutions, nous pouvons retrouver des améliorations de mesure de performance
(essentiellement pour l’outcome, comme expliqué ci-dessus, et les impacts), une meilleure
comptabilité, des comparaisons et des échanges de connaissances avec d’autres organisations,
une mesure de la qualité, la considération du capital humain comme une ressource essentielle
et la BSC.
Malgré ces différentes solutions, l’analyse de la performance est confrontée à des problèmes
pratiques l’empêchant de s’effectuer de manière optimale : méthodes inappropriées avec la
manière dont les structures travaillent, méthodes coûteuses, implémentations trop
administratives et non pertinentes par rapport au secteur social.
Dès lors, une réelle opposition se fait ressentir par certains managers d’ASBL qui empêchent
une mise en place standardisée de ce type d’évaluation. Nous analyserons plus loin le modèle
que l’auteur propose afin de le confronter à la BSC.
2.1.2 Méthodes d’évaluation des biens collectifs
Dans son article, Marée (2006) identifie des techniques de mesure des impacts qu’ont les
ASBL sur la collectivité. Le but est donc ici de quantifier ces impacts à l’aide d’indicateurs. Il
faut avant toute chose distinguer les impacts qui pourront être valorisés monétairement (que
l’auteur appelle « valeur monétaire ») et ceux auxquels nous ne pourrons donner de valeur
monétaire (que l’auteur appelle « indicateur » au sens restrictif). La mesure des impacts
collectifs sera appliquée pour les biens collectifs et pour les impacts macroéconomiques. Il est
nécessaire de préciser également les différents impacts auxquels nous serons confrontés. Il
convient dès lors de distinguer les impacts réels (mesure quantifiée du résultat des actions de
l’ASBL) des impacts potentiels (qui auraient lieu si l’aide publique était plus marquée) ainsi
que les impacts bruts (changements observés) des impacts nets (changements effectivement
dus à l’ASBL).
Considérons tout d’abord les impacts macroéconomiques. Afin de mesurer l’effet des actions
entreprises par les structures sociales, il faut avant tout parvenir à quantifier celui-ci. C’est de
la problématique liée à cette quantification que découle le nœud du problème. Certains
aspects (tels que l’augmentation du bien-être de la population) sont extrêmement difficiles à
24. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
14
mesurer. Dans la pratique, des indicateurs chiffrés tel que l’effet sur le budget public sont plus
souvent utilisés bien que ceux-ci ignorent toute une série de facteurs ayant pourtant un réel
effet au niveau macroéconomique. De plus, les structures qui bénéficient d’aides du pouvoir
public sont obligées de rendre des comptes à ceux-ci lors de l’octroi de subsides et utilisent
dès lors cet indicateur d’effet sur le budget pour justifier leurs dépenses de manière plus aisée
et plus concrète.
Intéressons nous maintenant à la production des biens collectifs : les ASBL produisent
généralement des biens ou des services non-marchand (contrairement aux entreprises privées)
qui ne pourront pas par conséquent être évalués par leur valeur sur le marché. Il existe deux
techniques d’évaluation : par la mesure comptable (qui se base sur les ressources mobilisées)
et par la mesure économique (qui va, quant à elle, calculer un optimum entre les ressources
mobilisées et la production d’autre part).
Au niveau de la mesure comptable, il existe deux types d’évaluation: une évaluation par les
coûts et une autre par les financements. En effet, la plupart des ASBL sont confrontées à des
coûts liés à la mobilisation de ressources productives (salaires, etc.) et à des financements
(subsides, dons, etc.). Puisque le premier type d’évaluation a tendance à sous-évaluer les biens
collectifs (puisqu’elle ne comptabilise que les coûts de fonctionnement de l’ASBL), l’auteur
préfèrera utiliser l’évaluation par le financement. De plus, cette mesure est censée refléter les
préférences des financeurs (les contribuables, à travers l’Etat et ses organes ainsi que par leurs
dons) en termes de valorisation des biens collectifs produits. Néanmoins, la mesure comptable
présente le défaut de considérer les coûts ou les financements séparément et il serait dès lors
plus pertinent de se tourner vers une mesure qui considère à la fois les ressources et la
production des entreprises sociales.
Nous allons tenter d’approcher ce concept par la mesure économique. Le but ici est de
rationaliser les choix lors de l’affectation des ressources disponibles et de maximiser la
production. Pour ce faire, deux types d’analyses s’offrent à nous : l’analyse coûts-bénéfices
(ACB) et l’analyse coûts-efficacité (ACE).
L’analyse coûts-efficacité ne considère qu’un type de production (réalisations, résultats,
impacts directs et impacts indirects) et compare cette dernière au coût qui y est lié. La formule
de l’ACE est donc la suivante :
25. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
15
Ratio ACE =
û ( )
( ℎ )
La limite de ce ratio est de toute évidence liée au choix du type de production choisi. De plus,
il peut arriver qu’une structure propose plusieurs types de biens collectifs dont les ratios
coût/type de production seront très différents de l’un à l’autre.
L’analyse coûts-bénéfices examine quant à elle tous les types de production d’une ASBL en
donnant une valeur monétaire à chacun d’entre eux. Ainsi, pour chaque projet, nous
calculerons la valeur actuelle nette par la formule suivante :
= ∑
( − )
(1 + )
pour i = 0, … , n,
Où Bi est le bénéfice de l’année i, Ci le coût de cette même année et r le taux d’actualisation.
Dès lors, un projet pourra être préféré à un autre si la VAN qui lui est attribuée est plus
élevée. L’ACB se base sur trois hypothèses :
Chaque individu agit de manière économiquement rationnelle en cherchant à maximiser son
bien-être (de telle sorte que la mise en œuvre d’un projet fera varier l’utilité de l’individu de
manière rationnelle et pourra donc être quantifiée).
De cette hypothèse découle une autre hypothèse plus générale : il existerait alors une fonction
d’utilité collective (W) qui dépendrait des utilités de chacun.
La dernière hypothèse se base sur un principe de compensation. Si un projet n’est réalisé qu’à
condition que sa valeur actuelle nette soit positive (VAN > 0) pour la collectivité, alors cela
signifie que même si le projet diminue un peu l’utilité de certains agents, il augmentera celle
d’autres agents de telle sorte qu’au total, l’utilité collective ait été augmentée.
L’analyse coûts-bénéfices est toutefois fortement critiquée, notamment à cause de ses
hypothèses bien qu’elle fasse l’objet de nombreuses recherches théoriques.
2.2 Balanced Scorecard
2.2.1 Le contexte
Depuis les années 70, notre économie s’est tournée peu à peu de l’ère industrielle vers l’ère de
l’information. Cela découle de certains changements majeurs qui ont pu modifier la vision de
26. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
16
l’entreprise. En effet, Curien et Muet (2004) expliquent dans leur rapport qu’il existe plusieurs
tournants importants :
- Les entreprises ont tendance à externaliser certaines de leurs activités et à travailler en
réseau, ceci notamment grâce aux technologies d’information (informatisation des
procédures, contact permanent avec le client grâce à l’internet, processus de
production et d’information permanente avec les fournisseurs, etc.) ;
- L’organisation du travail est repensée : « d’une part, le retour vers une plus grande
autonomie, après la bureaucratisation de l’ère industrielle ; d’autre part, la
réintégration dans la pratique professionnelle d’un savoir et d’une culture acquis dans
la sphère de vie quotidienne » ;
- L’évolution et l’implémentation des TIC ont un impact direct sur la croissance des
entreprises ;
- La fin des « quasi-monopoles » et la déréglementation des marchés ouvrent la porte à
de nouveaux concurrents et de nouvelles possibilités d’investissement ;
- L’instabilité de l’économie : suite à la mondialisation des marchés, les anciennes
dynasties économiques sont ébranlées et « le pouvoir économique devient plus mobile
et les cartes [sont] rebattues en permanence » ;
- Etc.
Cette nouvelle ère a largement modifié les principes de la concurrence. Lors de l’ère
industrielle, « les entreprises capables d’intégrer les progrès techniques dans un appareil de
production permettant de fabriquer en masse des produits standards étaient assurées de
réussir » (Kaplan & Norton, 2008). Les entreprises (GM, General Electric, etc.) développaient
généralement des systèmes de contrôle de gestion afin de vérifier l’allocation des ressources
financières et des actifs physiques à l’aide d’indicateur financier tel que le retour sur
investissement. Ce dernier permettait notamment de « choisir la meilleure utilisation pour le
capital et à suivre l’usage fait par les services opérationnels des ressources financières et
matérielles […] en vue de répondre aux attentes des actionnaires » (Kaplan & Norton, 2008).
Les auteurs expliquent que dorénavant, la gestion des actifs intangibles sera bien plus cruciale
que celle des investissements et des actifs physiques. Effectivement, les actifs intangibles
permettront entre autre :
27. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
17
- de développer des relations durables avec les clients et de répondre au mieux à la
demande de nouveaux marchés ;
- d’innover afin de répondre à certains segments de marché ;
- d’offrir des produits et services de qualité rapidement et à un prix acceptable ;
- d’intégrer les compétences des employés en vue de l’amélioration continue de la
qualité, des processus et des capacités ;
- de créer des systèmes d’informations.
C’est dans ce contexte que les auteurs ont créé la BSC. Elle a pour but d’analyser les
performances financières passées de l’entreprise, mais aussi d’évaluer les performances
futures en tenant compte des composantes tangibles et intangibles, internes et externes, de
court et de long terme de l’entreprise. Les seuls indicateurs financiers ne suffisant plus, il était
nécessaire d’y inclure d’autres dimensions. Nous allons détailler le modèle dans les sections
suivantes.
2.2.2 Le concept
Van Caillie (2009) nous enseigne qu’une stratégie définie ne suffit pas. Pour vérifier son
efficacité, il est nécessaire d’en assurer le pilotage quotidien. A cette fin, l’auteur nous
propose les étapes suivantes :
- Avoir des objectifs mesurables à atteindre à des horizons de temps précis A chaque
objectif doit être assigné un indicateur réellement calculable et pertinent.
- Mesurer à intervalles réguliers la valeur prise par ces indicateurs.
- Intégrer ces indicateurs en un tableau de bord pertinent, analysé à intervalles réguliers
par les responsables de l'organisme.
Il ajoute que la BSC est le tableau de bord le plus utile à cette fin.
La BSC est, comme l’indique ses créateurs (Kaplan & Norton, 2008), non seulement un outil
de mesure de la performance, mais aussi un instrument de gestion visant à mettre en œuvre
une stratégie à l’aide d’une batterie de 20 à 25 indicateurs cohérents. Ces derniers sont
disposés selon quatre axes (Résultats financiers, Clients, Processus interne et Apprentissage
organisationnel) qui, grâce aux diverses corrélations, permettent de décrire la trajectoire
stratégique de l’entreprise (Cfr. Figure 3).
28. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
18
Les auteurs ajoutent que, de nos jours, les entreprises peuvent avoir des activités très
diversifiées qui les poussent à développer une BSC par unité opérationnelle. En effet, chaque
activité peut nécessiter une stratégie différente et par conséquent, imposer le même type de
mesure et d’objectif à l’ensemble de l’organisation semble insensé et inapproprié.
Figure 6 Les 4 axes de la BSC au service de la stratégie (Kaplan & Norton, 1996)
La finalité du modèle est de « donner une vision synthétique de la performance globale de
l’organisation dans une perspective multidimensionnelle et en prenant en compte les
interrelations qui lient les différentes composantes de l’organisation » ainsi que de « permettre
de facto de comprendre d’où vient la performance de l’organisation, et donc d’agir sur ses
causes » (Van Caillie D. , 2009).
La BSC fixe des objectifs concrets aux buts de la société. De plus, elle instaure une vision in
(Processus interne)/out (Clients) ainsi qu’une vision court terme (Résultats financiers)/long
terme (Apprentissage organisationnel). Cela permet donc, comme dit ci-dessus, d’avoir une
vision parfaitement synthétique et, comme son nom l’indique, balancée.
La BSC permet, selon Kaplan et Norton (2008), de (Cfr. Figure 4):
- Clarifier le projet et la stratégie et les traduire en objectifs ;
- Communiquer les objectifs et les indicateurs stratégiques, et les articuler ;
- Planifier, fixer des objectifs et harmoniser les initiatives stratégiques ;
- Renforcer le retour d’expérience et le suivi stratégique.
29. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
19
Figure 7 La BSC comme cadre stratégique (Kaplan & Norton, 2008)
La BSC était appliquée à l’origine exclusivement aux entreprises lucratives, mais elle a
évolué afin de rencontrer les besoins du secteur public (Etat) et du secteur non-lucratif (ASBL
notamment) (Stockmal, 2005). Avant d’approfondir cette adaptation, commençons par décrire
en détail le modèle original.
2.2.3 La BSC au service de la stratégie
Avant toute chose, définissons les concepts suivants (SPF - Personnel et Organisation, 2006) :
- Mission : La mission représente ce que l’entreprise veut réaliser. Elle définit la
raison d’être de l’organisation aux yeux de ses parties prenantes. C’est le fil rouge
des dirigeants et des salariés.
- Vision : La vision est la manière dont la société doit se comporter en vue de
réaliser sa mission.
- Objectifs stratégiques (OS) : Les OS définissent les étapes à suivre afin d’atteindre
les buts de l’entreprise en réalisant sa vision.
- Objectifs opérationnels (OO) : Les OO concrétisent les OS à court terme à travers
un nombre réduit de champs d’action.
Clarifier et traduire le projet et la stratégie
- Clarifier la stratégie
- Réunir un consensus
Communiquer et articuler
- Communiquer et éduquer
- Fixer des objectifs
- Relier récompenses et indicateurs de
performance
Planifier et définir des objectifs quantitatifs
- Définir des objectifs quantitatifs
- Harmoniser les initiatives stratégiques
- Allouer les ressources
- Fixer des jalons
Retour d'expérience et suivi stratégique
- Définir le projet d'entreprise
- Assurer le retour d'expérience
- Mettre en place le suivi stratégique
BSC
30. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
20
- Facteurs clé de succès : Les FCS sont « Les conditions nécessaires du succès
traduites en éléments concrets. Il peut s’agir de faiblesses importantes, de
préoccupations auxquelles il faut remédier afin de pouvoir atteindre les objectifs.
Les FCS mettent en évidence la manière dont s’articule la stratégie ».
- Key performance indicator : Les KPI sont des indicateurs qui ont pour but de
mesurer les FCS.
Comme nous l’avons abordé ci-dessus, la BSC est au service de la stratégie de l’entreprise. En
effet, lorsque cette dernière a fixé ses objectifs stratégiques, elle les traduit en objectifs
opérationnels à plusieurs niveaux. Dans notre cas, nous considérons qu’ils sont distribués en
quatre composantes. Ces composantes possèdent chacune des facteurs clés de succès qui
peuvent donner un avantage concurrentiel à l’organisation. En les mesurant à l’aide de KPI,
nous pouvons les présenter dans un tableau récapitulatif : la BSC. Celle-ci permet donc de
vérifier l’atteinte des objectifs stratégiques et d’assurer le pilotage quotidien de la stratégie de
l’entreprise (Cfr. Figure 8).
De plus, Kaplan et Norton (2008) indiquent que « la stratégie est un ensemble d’hypothèses
sur des causes et leurs effets ». La BSC met en avant ce genre de relations. En effet, nous
pouvons identifier un fil conducteur entre les quatre axes du TBP. Ainsi, la compétence des
salariés permet notamment d’améliorer la qualité des processus. Cela induit par exemple un
meilleur délai des livraisons des clients ce qui pourra augmenter leur fidélité. L’entreprise
verra dès lors un meilleur retour sur le capital engagé et aura l’occasion de réinvestir dans
l’expertise de son personnel, etc. Attardons-nous dès à présent sur les quatre dimensions du
TBP.
2.2.3.1 L’axe financier
Dans son article, Errami (2004) rappelle que les objectifs financiers restent au cœur de la
BSC. En effet, la rémunération des actionnaires est l’objectif principal de toute organisation
lucrative. Les trois autres axes assurant des fonctions de soutien à cet aspect vital de toute
entreprise, rappelons que l’accroissement du chiffre d’affaires, la meilleure utilisation de
l’actif, la réduction des coûts et l’amélioration de la productivité peuvent offrir des liens
indispensables entre les quatre axes de la BSC (Kaplan & Norton, 2008).
31. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
21
Figure 8 La BSC au service de la stratégie (SPF - Personnel et Organisation, 2006)
Les auteurs remarquent la nécessité pour l’entreprise (ou l’unité opérationnelle) de se situer
dans son cycle de vie. Effectivement, les objectifs seront très différents selon que la société se
trouve dans une phase de croissance, de maintien de l’activité ou de maturité (ou « récolte »)
avant de passer au déclin total de l’activité.
Dans la phase de croissance, de larges investissements seront effectués afin de développer
l’activité. Il s’agira de créer de nouveaux produits, d’élargir la clientèle ou encore d’agrandir
la zone de production et d’augmenter le savoir-faire opérationnel des salariés. Les managers
s’attendent, lors de cette étape, à de nombreux flux de trésorerie négatifs et des retours sur
32. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
22
investissements faibles. L’objectif financier principal sera dès lors d’augmenter le chiffre
d’affaires et les ventes sur certains marchés spécifiques favorisant la croissance.
La seconde étape est la phase de maintien de l’activité. A ce niveau, l’entreprise tentera de
stabiliser et d’améliorer de quelques points sa part de marché. Elle se devra de continuer à
investir et réinvestir afin de soutenir des buts d’accroissement de la production et de
renforcement des efforts d’amélioration continue. Son objectif financier sera donc la
rentabilité avec des indicateurs de type « marge brute » ou encore « résultat d’exploitation ».
Enfin, la dernière phase prise en compte par les auteurs concerne la maturité de l’activité.
L’objectif principal à ce stade est de profiter des investissements réalisés durant les deux
premières phases et, par conséquent, de maximiser la trésorerie avant le déclin total et de
réduire le besoin en fonds de roulement avec très peu de dépenses en Recherche &
Développement.
Il est donc nécessaire pour l’organisation de se situer stratégiquement par rapport à son cycle
de vie. De plus, le mot cycle prend tout son sens car l’enchaînement des trois phases n’est pas
obligatoire. En effet, une brusque évolution de la technologie peut par exemple ramener une
activité de stade de la maturité au stade de la croissance en ouvrant des possibilités nouvelles.
Les objectifs financiers devront donc être réévaluer au moins une fois par an afin de les
confronter à la réalité du cycle de vie de la société.
Kaplan et Norton (2008) ajoutent que chaque phase peut être décomposée selon trois objectifs
spécifiques :
- Croissance et diversification du CA ;
- Réduction des coûts et amélioration de la productivité ;
- Stratégie d’utilisation des investissements et de l’actif.
La Figure 20 reprend les principaux déterminants des objectifs spécifiques selon la phase dans
laquelle l’entreprise se trouve (Cfr. Annexe 3. Identification des objectifs financiers
spécifiques).
2.2.3.2 L’axe clients
Errami (2004) nous introduit l’axe clients comme étant la préoccupation d’attirer de nouveaux
clients. Dans leur ouvrage, Kaplan et Norton (2008) le définissent comme étant
33. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
23
l’identification des segments de marché permettant de générer le chiffre d’affaires nécessaire
à la réalisation des objectifs financiers. Ceci représente une relation forte entre les deux axes.
La stratégie d’une entreprise ne peut pas être d’exceller en toutes matières, au risque d’être
inefficiente dans chacune d’entre elles. Ainsi, il est nécessaire d’effectuer une segmentation
de la clientèle afin d’en assurer entre autre la satisfaction et la fidélité. Le marketing
stratégique aidera donc les managers à développer l’axe Clients de leur BSC. Dès que cette
étape est réalisée, les auteurs préconisent la mise en place d’indicateurs de deux types. Les
premiers sont appelés indicateurs clés et rassemblent des mesures que presque chaque
entreprise utilise. Ils sont repris dans la Figure 9 ci-dessous.
Part de marché Indique la part (exprimée en nombre de clients, en chiffre
d’affaires ou en volume d’achat) d’un certain marché
revenant à une entreprise
Acquisition de nouveaux clients Mesure, en termes absolus ou relatifs, le nombre de clients
attirés ou gagnés
Conservation des clients Indique, en termes absolus ou relatifs, si une entreprise
entretient des relations durables avec ses clients
Satisfaction des clients Evalue le niveau de satisfaction des clients en fonction de
critères de performance liés à leurs attentes
Rentabilité par segment Mesure le bénéfice net généré par un client ou une catégorie
de clients, déduction faite des coûts correspondants
Figure 9 Les indicateurs clés de l'axe Clients (Kaplan & Norton, 2008)
Ces mesures sont un contrôle a posteriori de la performance, ce qui exclut une réactivité afin
d’influencer le résultat. Les seconds, appelés indicateurs stratégiques, concernent les
déterminants de la performance et représentent les facteurs de différenciation de l’entreprise.
Ils permettent aux managers de piloter leurs actions dans le but d’offrir des prestations
supérieures à leurs clients. Ils prennent en compte trois facteurs qui ajouteront de la valeur à
l’offre de la société:
- La relation avec le client ;
- L’image de marque ;
- Les attributs des produits/services (fonctionnalité, qualité, prix et délais).
La Figure 10 reprise ci-dessous donne l’exemple de la Metro Bank.
34. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
24
Offre à valeur ajoutée
Attributs des produits/services Image Relations
Diversité
de l'offre
Zéro défaut
Services
étendus
Compétence Amabilité
Conseil
personnalisé
Réactivité
Indicateurs stratégiques
- Indices des lacunes dans le service - Temps de réponse aux demandes
Indicateurs clés
- Satisfaction (enquête)
- Part de
marché
- Acquisition de nouveaux
clients
- Conservation de la
clientèle existante
Figure 10 Axe Clients : Exemple de la Metro Bank (Kaplan & Norton, 2008)
2.2.3.3 L’axe processus internes
C’est au sein de cet axe qu’il s’agira par exemple d’améliorer les délais de fabrication et la
qualité des produits, d’augmenter le nombre de brevets déposés ou encore d’améliorer le SAV
(Errami, 2004). Les processus internes comprennent en effet non seulement la production des
produits, mais aussi le SAV et avant tout, l’innovation. En effet, afin d’assurer la satisfaction
des clients et par là même celle des actionnaires, Kaplan et Norton (2008) explique qu’une
fois le besoin identifié, il est nécessaire de cerner le marché et de créer le produit (innovation),
ensuite de le fabriquer et de le livrer (production) et enfin d’assurer le service nécessaire au
client (SAV). Cela permet ainsi de satisfaire le besoin identifié (Cfr. Figure 11). C’est la
chaîne de création de valeur de l’entreprise.
Figure 11 La Chaîne de création de valeur (Kaplan & Norton, 2008)
Innovation
•Cerner le marché
•Créer le
produit/service
Production
•Fabriquer le
produit/service
•Livrer le
produit/service
SAV
•Assurer un service au
client
Besoin
identifié
Besoin
satisfait
35. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
25
En suivant ce schéma, l’entreprise se doit de promouvoir la R&D afin de satisfaire de
nouveaux clients en créant de nouveaux produits. Elle pourra par exemple mesurer la part du
chiffre d’affaires ou le cycle de développement des nouveaux produits. Dans l’étape de
production, des indicateurs de qualité (zéro défaut), de délais ou encore de coûts prendront
toute leur signification. Quant au SAV, la société peut mesurer le temps de réponse au client
ou encore le temps de résolution de son problème. Les auteurs nous montrent une fois de plus
les relations qui existent entre les différents axes du TBP.
2.2.3.4 L’axe apprentissage organisationnel
Errami (2004) présente l’axe Apprentissage organisationnel comme étant celui qui mesure les
performances du travail à travers la productivité des employés, leurs motivations et la
communication au sein de l’entreprise.
Dans leur ouvrage, Kaplan et Norton (2008) expliquent que cet axe donnera les moyens
d’atteindre les objectifs des trois autres. Ils insistent sur l’importance de diversifier
l’investissement au sein de l’organisation, notamment en termes de ressources humaines, de
systèmes et de procédures, et non pas uniquement en équipements et R&D.
Les auteurs dégagent trois composantes sur cet axe :
- Le potentiel des salariés ;
- Les capacités des systèmes d’information ;
- La motivation, la responsabilisation et l’alignement des objectifs de l’entreprise et
des salariés.
Dans la première composante, nous pouvons retrouver trois éléments que sont la satisfaction
des salariés, leur fidélité et leur productivité, la satisfaction déterminant généralement les
deux autres éléments. En effet, afin d’obtenir entre autre une qualité des prestations (d’autant
plus dans les entreprises de services) et une amélioration de la productivité, il est essentiel de
permettre aux salariés d’évoluer dans un environnement qui les satisfait amplement. Cette
mesure pourra par exemple être prise à l’aide d’une enquête annuelle donnant un niveau de
satisfaction générale que les managers pourront intégrer à la BSC.
Concernant la fidélité des salariés, elle se justifie par le coût d’investissement en savoir-faire
des salariés. Effectivement, en fidélisant le personnel à l’entreprise, l’organisation peut ainsi
profiter plus longuement de ses dépenses en formation. Un turnover des employés sera un bon
36. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
26
indicateur de cette composante. Enfin, évaluer la productivité des salariés permet de constater
les résultats engendrés grâce aux investissements réalisés afin de former, motiver et satisfaire
le personnel. Le CA par salarié est un indicateur fortement utilisé à cette fin.
La seconde composante concerne les systèmes d’information. En ayant un système
d’information développé, l’entreprise pourra être performante dans un environnement
concurrentiel dynamique. En reprenant l’exemple de la Metro Bank, un salarié ayant un accès
rapide aux informations telles que le segment auquel appartient un client, la nature et la
rentabilité de ses comptes lui permettront de répondre aux attentes spécifiques de ce dernier
de manière plus pertinente. Kaplan et Norton (2008) donnent comme exemple d’indicateur le
cas d’entreprises qui ont développé des ratios de couverture de l’information.
Enfin, dans la dernière composante (motivation et responsabilisation des salariés), les auteurs
rappellent qu’il est nécessaire de motiver et de donner une certaine marge de manœuvres aux
employés afin de leur offrir la possibilité de contribuer positivement à la réalisation des
objectifs de l’entreprise. Le TBP peut intégrer par exemple des indicateurs de suggestion. Le
nombre de suggestions émises démontre l’implication du personnel et le taux d’application
des suggestions en affiche la qualité.
2.2.4 Mise en place d’une BSC « stratégique »
Pour construire un TBP au service de la stratégie, Kaplan et Norton (2008) mettent en avant
trois éléments qu’il est nécessaire de prendre en considération :
- Les relations de cause à effet ;
- Les déterminants de la performance ;
- L’articulation aux résultats financiers.
Une stratégie étant fondée sur un ensemble d’hypothèses de relations de cause à effet (« un
vendeur mieux formé rapporte plus de CA »), la BSC doit traduire à l’aide de ses quatre axes,
de leurs objectifs et indicateurs respectifs, cette chaîne de relations afin d’exprimer clairement
l’orientation stratégique de l’organisation.
De plus, une BSC bien réalisée doit inclure deux types de mesures : des mesures de résultats
(indicateurs à postériori) et des déterminants de la performance (indicateurs avancés). Les
premiers sont le reflet d’objectifs et les seconds de la performance. Effectivement, en
mesurant la part de marché ou la satisfaction des clients, l’entreprise connaîtra ses résultats
37. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
27
mais non la manière dont ils ont été obtenus. Ce type de mesure est commun à de nombreuses
sociétés. Les déterminants de la performance, quant à eux, sont plus personnalisés et
permettent de visualiser les sources d’amélioration à l’aide de mesures telles que le taux de
défauts de la production ou encore la durée des cycles de production.
Enfin, les auteurs du modèle soulignent l’importance de relier directement ou indirectement
toutes les relations entre les indicateurs aux objectifs financiers et de satisfaction des clients.
En effet, ils considèrent qu’il est essentiel de pouvoir visualiser les apports réels de la
démarche au service des actionnaires et des clients, là où certaines entreprises se focalisent sur
des démarches Qualité Totale ou autres techniques d’améliorations ciblées prises comme une
fin en soi, ne permettant pas toujours de mettre en avant des résultats tangibles.
Le gouvernement fédéral belge (SPF - Personnel et Organisation, 2006) a décrit la mise en
place d’une BSC en sept étapes décrites dans la Figure 12 ci-dessous.
Figure 12 La mise en place d'une BSC (SPF - Personnel et Organisation, 2006)
Lors des deux premières phases, l’organisation devra (re)définir sa stratégie et établir un
cahier des charges pour l’implémentation de la BSC. Elle élaborera un plan de tous les
processus qui la constituent, construira un diagramme reprenant les différentes relations de
cause à effet entre les quatre axes et définira ses facteurs clés de succès. Ensuite, pendant la
troisième phase, il faudra définir les indicateurs utiles à la stratégie et en définir les seuils de
valeurs.
38. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
28
Enfin, les quatre dernières phases concernent l’implémentation du TBP. En premier lieu, il
s’agira de l’implémenter et de créer un prototype (sous forme d’un ficher Excel par exemple).
Si cela est nécessaire, les processus de mesure seront ensuite améliorés et la BSC deviendra
opérationnelle après une mesure « zéro ». Il sera par la suite nécessaire d’évaluer
qualitativement l’outil, de l’améliorer, puis de le rendre parfaitement opérationnel sur un point
de vue technique.
Un exemple de BSC réalisée lors d’une étude est donné dans les annexes (Cfr. Annexe – 4.
Exemple de BSC).
2.2.5 Critiques
Bien que le TBP nous semble être un outil utile et intéressant, de nombreuses critiques ont été
émises à son égard. Ainsi, certains auteurs ont remarqué que la BSC n’apporterait rien de
nouveau par rapport aux tableaux de bords français, qui existaient une vingtaine d’années
auparavant et qui utilisaient déjà des indicateurs de type financier et non-financier.
(Bourguinion, Malleret, & Norreklit, 2002). Kaplan et Norton (2008) s’en défendent en
comparant le TBP à un simulateur de vol. Offrant plus de synergies entre les différentes
dimensions de l’entreprise, il offrirait plus qu’ « une simple collection d’indicateurs clés ».
Van Caillie (2009) relève certaines limites conceptuelles de la BSC :
- Elle ne met pas clairement en évidence les apports des différents acteurs ;
- Elle omet l’impact que peuvent avoir les fournisseurs dans l’amélioration de la
performance ;
- Il y a une absence d’analyse de la concurrence ;
- Les effets du temps ne sont pas relatés, la BSC offrant une photo de l’entreprise à
l’instant t ;
- Les liens entre les différents composants restent linéaires, ce qui est trop simple
pour relater réellement la complexité de l’organisation.
De plus, l’auteur y ajoute des limites techniques :
- Les indicateurs, non-financiers notamment, restent réducteurs de la réalité d’un
phénomène (par exemple la satisfaction des clients) ;
- Un indicateur n’a aucune utilité s’il est impossible d’agir sur ce qu’il représente ;
39. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
29
- Il est nécessaire de pouvoir comparer les indicateurs afin d’en vérifier la pertinence
(techniques de benchmarking).
Toutefois, il souligne certains apports non-négligeables :
- La BSC intègre des indicateurs financiers et non-financiers ce qui implique une
vision multidimensionnelle de la performance ;
- Le futur peut être mieux anticipé grâce à des indicateurs d’alerte et de résultats ;
- Suite aux interrelations entre les différents indicateurs, la BSC permet d’identifier
plus aisément la source de la performance de l’entreprise et d’ainsi entreprendre
plus facilement des actions correctrices.
La littérature confirmera certaines de ces critiques, notamment le manque de considération
allouée aux stakeholders : « Employees, suppliers and the community have no seat at the
table » (Kaplan & Atkinson, 1998). Paton (2003) ajoute qu’il existe certaines difficultés dans
l’application de la BSC aux ASBL, notamment le manque de représentation de la double
bottom line de ces entités composée à la fois d’une dimension financière et d’une autre
sociale. En effet, seule la dimension financière domine dans ce modèle. Il précise que la
dimension Clients doit prendre en compte non seulement les bénéficiaires mais aussi les
donateurs. Ensuite il trouve que la BSC, malgré sa simplicité, demande beaucoup d’efforts de
mise en place par les managers. Il conclut cependant que ces obstacles ne sont pas
insurmontables et cite Kaplan (2001) qui observe que la BSC peut s’adapter à toutes les
situations.
Notons encore les principaux obstacles et avantages de la BSC identifiés par les services du
gouvernement fédéral belge (SPF - Personnel et Organisation, 2006). D’une part, le TBP peut
sembler trop confus et l’analyse peut se trouver paralysée par un trop grand nombre de
données. C’est pourquoi il est essentiel d’utiliser des indicateurs pertinents et en nombre
restreint afin qu’ils restent gérables et au service de la stratégie. Ensuite, les moyens engagés
dans la réalisation d’une BSC peuvent sembler exagérés en comparaison au résultat final
obtenu, parfois décevant. De plus, des systèmes d’information déficients retarderont la mise
en place d’une BSC, les données devant être parfois récoltées manuellement. Par ailleurs, la
simplicité du TBP est trompeuse : bien qu’une formation solide semble superflue, un mauvais
choix dans les KPI rendrait l’outil inefficace, or la recherche de ceux-ci et de leur pertinence
40. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
30
peut s’avérer délicate. Enfin, une perte d’intérêt du top management peut diminuer la
motivation des salariés à la poursuite et la mesure des KPI.
Toutefois, l’organisme relève certains avantages non-négligeables :
- La BSC structure la mesure et établit des liens entre les indicateurs ;
- Elle traduit la stratégie et les objectifs de l’entreprise en critères de performance
concrets pour les différents niveaux ;
- Elle souligne tant le développement des futures performances que les
performances actuelles ;
- Elle fournit un rapport spécifique sur les améliorations réalisées ;
- La stratégie visée peut être contrôlée périodiquement afin de savoir si elle a été
réalisée pas à pas ;
- Le TBP trace la carte des relations causales au sein de l’organisation ;
- C’est un moyen de clarifier les responsabilités pour atteindre des objectifs
spécifiques ;
- L’analyse de l’information s’en retrouve meilleure ;
- La prestation de services internes et externes s’améliore ;
- Les lignes de communication au sein de l’organisme sont plus claires.
Certains auteurs, dont Paton (2003), reprochent à la BSC de ne pas prendre en compte toutes
les composantes de l’entreprise et d’ignorer certaines dimensions. Signalons que Kaplan et
Norton (2008) insistent sur le fait qu’il est tout à fait possible d’étendre le modèle afin de
prendre en compte les fournisseurs ou encore la responsabilité sociétale de l’entreprise.
Enfin, Otley (1998) critique et juge discutable la logique du TBP, selon laquelle des employés
bien formés provoquent la création de processus plus performants, ce qui induit des clients
plus satisfaits et, pour terminer, amène des actionnaires plus heureux. Lorino (2001) estime ce
type de raisonnement standard quelque peu stéréotypé, notant le fait que le modèle causes-
effets présidant à l’élaboration d’un système de pilotage est spécifique à l’environnement et à
la stratégie de chaque organisation, et que de plus sa construction survient à la suite d’une
analyse du système d’activités de cette dernière.
41. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
31
2.2.6 BSC et ASBL
Comme nous avons pu le constater, la BSC est un outil centré principalement sur les résultats
financiers afin d’atteindre la plus grande satisfaction des actionnaires. Dès lors, comment
adapter le modèle du secteur privé lucratif aux ASBL qui, elles, n’ont pas les mêmes
missions ?
Dans leur ouvrage, Kaplan et Norton (2008) nous expliquent que l’axe financier reste pour les
organisations sans but lucratif un stimulant ou une contrainte, mais n’est pas l’objectif
principal. En effet, les budgets sont stricts et doivent être gardés à l’œil, mais ce n’est pas
parce qu’une ASBL aura économisé dix pourcents des dépenses prévues qu’elle aura pour
autant rempli sa mission. Et sa mission, précisément, est de satisfaire les bénéficiaires des
services qu’elle offre. C’est pourquoi cette dimension occupera une place prédominante dans
le TBP de l’organisation.
Cet outil a pour but de guider les projets de l’ASBL et pourra non seulement permettre une
évaluation interne souvent absente, mais aussi justifier les actions entreprises auprès du
pouvoir subsidiant, des éventuels donateurs/sponsors et du grand public. Les auteurs citent à
titre d’exemple la BSC qui a été mise en place lors de l’organisation des jeux olympiques
handisports.
Aymard-Martinot, Huber Swinarski et Morard (2002) ont réalisé une étude portant sur un
établissement médico-social (EMS) basé en Suisse. L’EMS LB est une maison de retraite
offrant aux personnes âgées des soins réguliers selon trois formules : à la journée, courte et
longue durée. Face à la contrainte financière, l’organisation a demandé aux chercheurs de
réaliser une étude des coûts subis afin de les réduire. La BSC, outil plus large qu’une structure
de coûts et permettant une évaluation permanente, fut proposée et implémentée.
Tout d’abord, la stratégie a été identifiée. Elle est de satisfaire au mieux les patients. En
considérant la contrainte financière, les auteurs l’ont énoncée comme suit : c’est
« l'optimisation des dépenses pour satisfaire le maximum de patients ou, en d'autre mots, fournir à
tous les patients un panier de services, en tenant compte des contraintes financières liées au
système de prix et à la structure légale de l'organisation ». A partir de ce point, ils ont fixé les
objectifs pour les quatre dimensions de la BSC :
- Patients (Clients) : satisfaction, disponibilité, information, réception, sécurité ;
42. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
32
- Résultats financiers : respecter les budgets, utilisation efficace des ressources ;
- Processus internes : chaînes efficaces de soins ;
- Employés (Apprentissage organisationnel) : formation, satisfaction du travail.
Ensuite, les chercheurs ont pu réaliser un TBP composé de seize indicateurs permettant à
l’EMS de surveiller la satisfaction de ses patients tout en gérant la contrainte financière.
L’outil est repris dans la Figure 13 ci-dessous. La classification PLAISIR est un système
d’information sur les patients et leurs données cliniques permettant d’évaluer leur état de
santé, le temps nécessaire à la remise en forme, etc.
Patients Résultats financiers Processus Employés
Durée moyenne de
séjour
Taux de mortalité
Taux d’insatisfaction
(satisfaction)
Activités sociales par
patient
Importance des soins
infirmiers (salaires
du personnel
infirmier / total des
salaires)
Taux d’impotence
(nombre d’impotents
/ total patients)
Coût moyen par
catégorie de patient
(PLAISIR) / jour
Valeur ajoutée par
patient
Valeur ajoutée par
employé
Ratio valeur ajoutée /
CA
Temps infirmier
consacré à chaque
catégorie de patient
Application des
directives PLAISIR
Taux d’absentéisme
Taux de rotation du
personnel
Formation (Coût de
formation / coût
total)
Ratio du nombre
d’infirmières /
personnel
Figure 13 La BSC dans l'EMS Suisse LB (Aymard-Martinot, Huber Swinarski, & Morard, 2002)
De plus, Micheli et Kennerley (2005) affirment que la BSC est le modèle le plus populaire
dans le secteur lucratif privé. De ce fait de nombreux auteurs s’intéressent au modèle pour
l’adapter au monde sans but lucratif. Ils citent, entre autres, les études suivantes :
Adaptation de la BSC dans les organisations de soins médicaux (Oliveira, 2001 ;
Inamdar, Kaplan, Bower, & Reynolds, 2002) ;
Construction d’une BSC dans un centre de grands brulés. (Wachtel, Hartford, &
Hughes, 1999) ;
43. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
33
Création d’une BSC pour un système hospitalier. (Pink, McKillop, Schraa, Preyra,
Montgomery, & Baker, 2001) ;
Application d’une BSC au conseil communal de Charlotte en Caroline du nord (Syfert,
Elliott, & Schumacher, 1998).
2.3 Autres pistes
A côté de la BSC, d’autres auteurs ont réalisé des outils permettant d’améliorer la
performance, tant dans le secteur privé que public et non lucratif. Nous allons en analyser
certains d’entre eux afin d’apporter des pistes de réflexions et des critiques supplémentaires à
notre étude.
2.3.1 Modèle de Paton (2003)
Suite aux imperfections de la BSC qu’il identifie (Cfr. 2.2.5. Critiques), Paton (2003) décide
d’élaborer un tableau de bord spécifique aux ASBL. Il propose donc deux questions
fondamentales: « does it work ? » et « is it well run? ». Des outils du type de AIMES (Cfr.
2.1.1. Difficulté de l’évaluation) répondent à la première question en affichant les progrès
effectués grâce aux projets développés (taux d’alphabétisation, taux de mortalité infantile, ...).
L’auteur ajoute la dimension d’utilisation efficiente des ressources et des relations. Il affirme
que les tableaux de bord pour ASBL doivent contenir un minimum de quatre types
d’indicateurs. De fait, au travers des deux questions fondamentales, il faut répondre aux deux
aspects de la gestion journalière opérationnelle et de la gestion stratégique à long terme (Cfr
Figure 14).
Niveau Court terme /
Contexte opérationnel
Long terme /
Contexte stratégique
Activité / Projet
Ce que nous faisons (« Is it
working? »)
Indicateurs de l’état
d’avancement
« Are we doing what we said
we would do? »
Indicateurs de performance
sous-jacente
« Is it worth it, and what else
should we be doing as well
or instead? »
Organisationnel
Ce que nous sommes (« Is it
well run?»)
Indicateurs de santé
financière et administrative
« Is there any risk? »
Indicateurs de renouveau ou
de déclin
« Are we building up our
capabilities or at least
sustaining them – or are they
wasting away? »
Figure 14 Les quatre types d'indicateurs requis (Paton, 2003)
44. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
34
Le modèle est composé de cinq dimensions (Cfr. Figure 15) :
- Résultats courants ;
- Performances sous-jacentes ;
- Risques ;
- Actifs et capacités ;
- Evolution des projets.
1. Résultats courants 2. Performances sous-jacentes
Vérifications mensuelles des progrès à
l'aide d'indicateurs clés:
- Résumé des avancements
- Rapports financiers
- …
Revue annuelle de la bonne gestion, des
fonctions supports et de l'affectation des
différentes ressources allouées aux
projets:
- Résultats des services
- Tendances générales et comparaisons
- …
5. Évolution des projets
Rapports réguliers sur les initiatives des
membres de l'ASBL gestionnaires de
projets.
3. Risques 4. Actifs et capacités
Contrôle des risques encourus:
- Liquidités
- Non conformités des procédures
- Pertes de partenaires
- …
Revue annuelle des capacités à fournir
des performances futures:
- Actifs financiers et corporels
- Réputation et relations
- Savoir faire
- …
Figure 15 Modèle de tableau de bord pour ASBL (Paton, 2003)
2.3.1.1 Cadre 1 : Résultats courants
Les informations de ce type ne posent généralement pas de problème. Nous y parlerons de
budgets, de prévisions, de rapports de dépenses, de volume d’activités, donc de matières
plutôt classiques en gestion. Cela permet de comprendre l’évolution des projets en cours.
Dans les faits, dans certaines associations, nous constatons que si l’information fournie peut
45. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
35
être exacte, elle n’en révèle pas pour autant les indicateurs clés nécessaires au management. Il
est donc nécessaire d’en vérifier la pertinence. D’autre part, il est nécessaire d’incorporer des
indicateurs de résultats sociaux face aux batteries d’indicateurs de performance financière ou
commerciale. Ces données sont souvent disponibles mais rarement intégrées dans le tableau
de bord.
2.3.1.2 Cadre 2 : Performances sous-jacentes
L’analyse stratégique annuelle des différents projets en cours est fondamentale. L’auteur
propose d’y inclure des informations multidimensionnelles. Chaque projet doit être évalué
sous l’aspect social d’une part et de l’autre sous l’angle de la rentabilité. De plus, il faut
distinguer les informations internes, spécifiques à l’ASBL, des informations externes,
relatives au secteur d’activité. Nous pourrions dresser le tableau suivant (Figure 16) :
Performances sociales Performances commerciales
Informations internes
Taux d’avancement, réclamations
recensées, …
(output)
Coûts des activités, marges
réalisées, …
Informations externes
Études universitaires, nouveaux
modèles sociaux, …
(outcome)
Parts de marché, analyse des
concurrents (d’où viennent
leurs fonds), …
Figure 16 "Program Revision Information Matrix" (Paton, 2003)
2.3.1.3 Cadre 3 : Risques
Les situations de sous-financement, les problèmes de non-conformité des contrats ou des
procédures, la perte de partenaires et autres sont des risques inhérents aux ASBL. Ces risques
peuvent notamment entacher leur réputation. La question posée par Paton (2003) est la
suivante : Comment les membres de ces entités peuvent-ils être alertés de la présence de ces
risques et mettre en place un système pour les reconnaître ?
Dans ce cadre, il faut inclure tous les risques d’exposition et l’auteur cite des exemples
concrets :
Pour une association des soins de l’enfance il est nécessaire de connaitre les
procédures de protection de l’enfant ;
L’association Groundwork a placé une batterie de ratios financiers qui identifient si les
difficultés viennent du secteur d’activité ou de l’association elle-même ;
46. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
36
L’approche de PHS inclut dans ce cadre les erreurs de production des produits
manufacturés.
De manière générale, ce cadre est prévu pour anticiper tous les dangers, assurer le respect des
procédures, éviter la rétention des mauvaises nouvelles, etc.
2.3.1.4 Cadre 4 : Actifs et capacités
Dans le monde associatif, les biens incorporels font partie de la richesse des associations. Ces
biens comprennent notamment le savoir faire, la confiance du public, la qualité des relations,
les listes de donateurs et de supporters, etc. En termes commerciaux, ils sont considérés
comme de la valeur ajoutée à la marque ou comme du capital intellectuel.
Les indicateurs repris dans ce cadre ne peuvent pas négliger l’évolution de ces biens. Ils
peuvent par exemple mesurer l’évolution de l’expérience des membres du personnel, l’entrée
ou la sortie de donateurs, le développement d’un réseau de partenaires, etc.
2.3.1.5 Cadre 5 : Évolution des projets
Lors des fusions et restructurations qui sont des stimulants pour l’organisation, l’auteur
constate que les changements sont souvent simples à superviser (en termes de rapports). Par
contre, les bénéfices de telles opérations restent beaucoup plus difficiles à évaluer. Ce cadre
doit donc reprendre des informations en ce sens.
2.3.1.6 Critiques
Ce modèle semble être fort différent de la BSC. En réalité, nous pouvons remarquer que c’est
principalement au niveau de la présentation que ces deux outils diffèrent. En effet, nous
pouvons retrouver dans chacun d’eux des indicateurs portant sur la composante financière
(qui est une contrainte pour les ASBL, bien représentée chez Paton dans le cadre « Risques »),
les capacités de l’organisation (partiellement « Apprentissage organisationnel » et « Actifs et
capacités »), etc.
Nous observons que Paton met en avant certains éléments appropriés pour les ASBL (notons
à nouveau le risque financier à titre d’exemple, mais aussi les résultats courants des projets
sociaux en cours), mais nous pouvons lui reprocher un manque de liaisons entre les différents
cadres, contrairement à la BSC qui tend à favoriser les relations logiques et stratégiques.
47. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
37
2.3.2 Le bilan social
2.3.2.1 Modèle
Selon Fontaine-Gavino et Zambeaux (2005), le bilan social se définit comme « un outil
contributif au dialogue social interne [qui donne] un état des lieux de la situation du personnel
dans une collectivité. Il apporte une vue d’ensemble des caractéristiques du personnel et de
leurs conditions de travail. Il permet ensuite de repérer les problèmes et dysfonctionnements
pour y remédier et d’anticiper une politique de gestion des ressources humaines ».
Suite à la publication, en 1993, du livre blanc de la Commission Européenne sur la croissance
de la compétitivité et de l’emploi, et poussé par la volonté de réduction drastique du chômage,
le gouvernement belge et les organisations représentatives des travailleurs ont initié la mise en
place du bilan social. Son objectif fondamental est d’augmenter la visibilité de l’offre de
travail et de donner une indication sur l’efficacité des mesures prises en faveur de l’emploi en
Belgique.
Depuis le 1er décembre 2008, le bilan social se constitue de 3 parties :
- L’état des personnes occupées ;
- Le mouvement du personnel en cours d’exercice ;
- Les initiatives en matière de formation.
Il se base sur l’arrêté royal du 10 février 2008 modifiant l’arrêté royal du 30 janvier 2001
portant exécution du code des sociétés. Il s’applique à toutes les entreprises tenues d’établir et
de publier des comptes annuels. Il fait partie intégrante de ceux-ci et fait l’objet d’un contrôle
externe par un commissaire-réviseur.
Ce bilan permet de mieux appréhender la réalité interne de l’entreprise en mettant en évidence
les déterminants sociaux de l’équilibre financier. Il peut, de ce fait, expliquer en partie les
performances économiques de l’entreprise. Dans ses recherches en manière de gestion des
ressources humaines, D’Arcimoles (1995) démontre l’existence d’une relation forte entre
performance économique et performance sociale de l’entreprise.
Malheureusement, selon Comhaire et Dendauw (1998) le bilan social reste un document sous-
exploité qui présente des informations qui manquent quelques fois de pertinence. Ce qui a
tendance à le faire rejoindre la masse de connaissances inutiles que possède une entreprise.
52. L’intérêt d’utiliser un modèle de BSC pour évaluer le secteur associatif
42
Figure 18 Le modèle EFQM (EFQM, 2009)
Le site de la fondation donne les détails du modèle. Il est basé sur 9 paramètres : 5 Facteurs et
4 Résultats.
Les cinq facteurs ou moyens sont appelés :
- Leadership ;
- Personnel, c'est-à-dire la gestion du personnel ;
- Politique et Stratégie ;
- Partenariats et Ressources ;
- Processus.
Ces facteurs servent à analyser la façon dont l’organisation gère ses activités clés sous tous
ses angles.
Les quatre résultats sont les résultats pour
- Le Personnel et les Clients c'est-à-dire leur satisfaction ;
- La Collectivité c'est-à-dire l’intégration à la collectivité ;
- Les Performances clés c'est-à-dire les résultats opérationnels.
Ces paramètres permettent quant à eux d’analyser la manière dont l’organisation a obtenu ses
résultats. « Des résultats excellents dans les domaines de la Performance, des Clients, des
Collaborateurs et de la Collectivité sont obtenus grâce au Leadership, qui maîtrise la Stratégie