Interventions de M. Ahmed GALAI, vice-président de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l'Homme
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Interventions de M. Ahmed GALAI,vice-président de la Ligue tunisienne pour la défense des
droits de l'Homme (LTDH) sur la participation de la société civile organisée aux processus
de transition vers la démocratie dans les pays du Sud de la Méditerranée devant de la 20e
réunion du Groupe de Liaison avec les organisations et réseaux européens de la société
civile tenue à Bruxelles, au siège du Comité, le 27 juin 2011
La 20e
réunion du Groupe de Liaison avec les organisations et réseaux européens de la société civile
s'est tenue à Bruxelles, le 27 juin 2011, sous la présidence des deux Co-présidents, Staffan NILSSON,
Président du CESE, et Jean-Marc ROIRANT, Président du Forum Civique Européen (FCE). La
réunion a débuté à 14 heures 30 et s'est achevée à 17 heures 30.
Jean-Marc ROIRANT introduit ce point de l'ordre du jour en rappelant qu'il s'inscrit dans le cadre
des priorités politiques du Président NILSSON,sous le thème "Solidarité et développement" et évoque
la résolution adoptée par le Comité en mars de cette année sur "La situation dans les pays du sud de la
Méditerranée".
Il présente ensuite les deux intervenants et les invite à décrire la situation dans leurs pays respectifs et
à faire part de leur expérience personnelle.
Ahmed GALAI rappelle l'immolation de Mohamed Bouazizi le 17 décembre 2010 qui a constitué
l'événement déclencheur des protestations contre le régime en place en Tunisie du fait de
l'accumulation des violations des droits de l'homme et des droits économiques et sociaux, ainsi que de
l'enrichissement illégal de la classe politique par des détournements de fonds publics, la corruption et
l'affairisme, protestations qui ont conduit à la révolution tunisienne.
En tant que Vice-président de la Ligue pour la défense des droits de l'Homme en Tunisie,
Ahmed GALAI décrit les conditions particulièrement difficiles dans lesquelles son organisation a dû
opérer durant des années en raison du harcèlement policier dont elle était, comme tant d'autres
organisations, la victime. Malgré cela, ces organisations ont poursuivi inlassablement leur lutte pour le
changement. Dans ce contexte, il exprime des regrets en ce qui concerne le double langage pratiqué, y
compris au sein de l'Union européenne, par certains pays et forces politiques qui, après avoir tenu des
discours conciliants à l'égard du régime Ben Ali et entretenu avec lui des relations parfois très étroites,
se précipitent maintenant pour saluer les évolutions démocratiques en cours.
Ahmed GALAI évoque ensuite le rôle des organisations de la société civile tunisienne dans le
processus de transition vers la démocratie, organisations dont la tâche se trouve actuellement
compliquée du fait de leur morcellement qui est le résultat de l'interdiction d'activités formelles dont
elles ont victimes sous le régime précédent. Il y a donc, après ces années de répression, une nécessité
de réorganisation et de structuration de la société civile. De plus, il faut également que les
organisations de la société civile s'ouvrent aux nouvelles forces qui ont émergé avec la révolution: les
jeunes, les femmes et les classes laborieuses en particulier. Cependant, il souligne aussi les acquis
considérables qui ont déjà été engrangés depuis la chute de l'ancien régime, notamment l'amnistie
générale des prisonniers politiques, la dissolution du parti au pouvoir et la fin des persécutions
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policières. Mais seule une nouvelle Constitution, demande clef de la société civile au gouvernement
transitoire, pourra assurer la rupture totale avec l'ancien régime.
La société civile, poursuit-il, est en outre confrontée à de nombreux défis tant en matière de
développement économique et social qu'en ce qui concerne en particulier la question de l'émigration
économique vers l'Europe. Il est primordial dans ce contexte que les organisations de la société civile
participent activement au débat sociétal sur les réformes à entreprendre et ainsi à la définition du type
de société dans laquelle les citoyens veulent vivre.
Ahmed GALAI souligne que les défis auxquels est confrontée la société tunisienne demandent
l'établissement d'un nouveau rapport entre les deux rives de Méditerranée. L'Europe a besoin d'avoir
des pays stables, démocratiques et prospères à sa frontière sud ce qui demande un effort important en
termes de collaborations concrètes et de développement des échanges, dans le cadre d'un nouveau
partenariat. À cet égard, il se montre particulièrement choqué par la réponse européenne sur la
question migratoire, réponse qui, selon lui, ne devrait pas être exclusivement sécuritaire.
Ahmed GALAI conclut son intervention en évoquant l'importance pour les organisations de la société
civile tunisiennes de développer leurs relations avec celles des pays voisins, comme le Maroc,
l'Algérie et l'Egypte.
Jean-Marc ROIRANT remercie Ahmed GALAI et, en référence à certains de ses propos, constate
que la crainte d'une montée de l'islamisme a souvent été utilisée pour justifier le soutien européen à
des régimes autocratiques ou dictatoriaux, mais considérés comme politiquement stables.
Ahmed GALAI s'associe à ce constat et évoque plusieurs exemples du double langage de l'Europe en
matière de droits de l'homme. Il regrette ainsi particulièrement le silence des européens à l'égard du
blocage par le gouvernement Ben Ali des fonds européens destinés à soutenir les organisations de la
société civile tunisiennes.