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Samedi 26 mars 2011 Economie 15
En hausse En baisse Les cours du jour ( 25/03/11 , 09 h 43 )
Euro 1 euro : 1,4128 dollar (achat)
L’or Les ventes de vin Or Once d’or : 1447,00 dollars
L’once a atteint 1 447,82 dollars, un nouveau Les ventes de vin français dans la grande distri- Pétrole Light sweet crude : 105,40 dollars
niveau historique, jeudi 24 mars, en raison bution ont diminué en volume (– 1,2 %) mais aug-
des tensions persistantes dans le monde arabe menté en valeur (+ 1,2 %) en 2010, selon les chif- Taux d’intérêt France : 3,528 (àdix ans)
et de la crise de la dette souveraine au Portugal. fres publiés, jeudi 24 mars, par FranceAgrimer. Taux d’intérêt Etats-Unis : 3,280 (à dix ans)
A la SNCF, la CGT cède du terrain aux «réformistes»
UNSA et CFDT ont totalisé 35% des voix aux élections du jeudi 24mars. En s’alliant, elles pourront signer des accords
L
es élections professionnelles pas permis de faire avancer les cho- le elle était entraînée depuis près de l’organisation de Bernard Thi-
du jeudi 24 mars à la SNCF ses », assurait, vendredi matin, de dix ans. bault à se faire entendre parmi les L’UNSA grignote encore des voix
marquent sans doute l’amor- Roger Dillenseger, secrétaire géné- La CGT est la grande perdante jeunes cheminots. Mais aussi, et ÉLECTIONS AU COMITÉ D’ÉTABLISSEMENT DE LA SNCF, en %
ce d’un changement de culture ral adjoint de l’UNSA. de ces élections. Bien que sa place peut-être surtout, les conséquen-
dans l’univers cheminot, jusqu’à Ce syndicat, héritier à la SNCF de premier syndicat ne soit pas ces de l’échec de la grève de quinze a 26 mars 2009 a 24 mars 2011
présent dominé par le syndicalis- d’une organisation de cadres et remise en cause, elle ne représente jours lancée en avril 2010 sur des
CGT UNSA CGT UNSA
me de contestation. Vendredi d’agents de maîtrise, a consolidé plus que 37,3 % des voix. Les cégé- revendications imprécises et sans
matin 25 mars, les résultats de ce son implantation dans ses points tistes, dont l’influence reculait que de réels résultats aient été
18,05 21,48
scrutin, qui a permis de désigner forts et gagné du terrain dans les légèrement à chaque scrutin (de engrangés. La CGT, qui pesait 44 %
les représentants aux comités autres catégories. Quant à la 0,8 point en 2009), perdent cette des voix en 2004, a perdu pratique-
39,30 % 37,32 %
d’établissements et les délégués CFDT, alliée à la Fgaac (agents de fois un peu plus de deux points. ment 10 points en sept ans. SUD- SUD-
du personnel, traduisent un recul conduite), elle peut espérer sortir Sans doute faut-il voir dans cette Maigre consolation, son concur- RAIL RAIL
de la CGT et de SUD-Rail au profit de la spirale du déclin dans laquel- contre-performance la difficulté rent SUD-Rail (17,3 % soit un recul 17,67 17,40
des organisations dites « réformis- de 0,2 point) fait du surplace – CGC
tes », l’UNSA et la CFDT. En fran- Le syndicat de Bernard Thibault recule aussi ailleurs contrairement au précédent scru- 0,44
CFDT CFDT
chissant le seuil des 30 % au total, tin – et semble souffrir tout autant
les deux organisations pourront de la perte d’audience du syndica- CFTC FO 11,59 CFTC FO 13,79
La CGT a perdu des voix lors des EDF. C’est la CFE-CGC qui réalise
signer des accords. Et le dialogue élections professionnelles organi- la plus forte poussée (18,02 %, lisme de contestation. L’ensemble 5,4 7,99 1,05 8,52
social à la SNCF s’organisera désor- sées en novembre et en décem- contre 14,33 % en 2007). La des syndicats de cheminots peu- SOURCE : SNCF
mais autour de deux pôles, l’un bre 2010 dans plusieurs entrepri- CFDT améliore son score de vent en tout cas se féliciter du
radical, l’autre plus favorable à la ses publiques. 1 point, à 21,44 %. En revanche, la niveau de participation. Celui-ci la négociation que par la grève re des trois prochaines années sera
négociation. Quant aux autres CGT recule nettement est non seulement élevé (73,8 %) alors que, depuis 2009, aucun la définition de nouvelles règles
organisations (FO, CFE-CGC et RATP. Le syndicat SUD réalise (– 4,5 points), tout en se mainte- mais en hausse. accord de grande envergure du jeu, en matière de durée et de
CFTC), elles disparaissent pratique- une percée spectaculaire en obte- nant largement en tête (41,97 %). n’avait pu être conclu. L’absence, conditions de travail pour l’essen-
ment du paysage syndical. nant 14,09 % des voix, contre Les positions de FO s’effritent Dialogue social depuis un an, de grands conflits tiel, qui permettront à la SNCF d’af-
6,71 % au précédent scrutin de légèrement (12,46 % contre Cette nouvelle donne ouvre lar- fondés sur des revendications fronter la concurrence.
Spirale du déclin décembre 2006. Cette progres- 13,38 % en 2007). gement le dialogue social. Majori- internes à l’entreprise la conforte Pour faire face à l’arrivée de
Après avoir manqué de très peu sion s’effectue au détriment de la taires, avec quelque 55 % des voix, dans cette approche. compagnies privées dans le sec-
(0,3 point) la barre des 30 % en CGT (33,9 % des suffrages, soit ErDF. Malgré 3,83 % de moins CGT et SUD-Rail peuvent solidaire- Au menu des prochaines négo- teur des trains régionaux dès 2013,
2009, le tandem UNSA-CFDT tota- 3 points de moins qu’en 2006), qu’en 2007, la CGT reste hégémo- ment s’opposer à un accord conclu ciations figurent la conclusion la SNCF cherche à négocier une
lise 35 % des voix, soit un bond de mais celle-ci reste néanmoins la nique (56,41 % des voix) au sein contre leur gré, mais ils ne pour- d’un éventuel accord salarial – convention collective qui englobe-
5,6 points, dont 3,4 % pour la seule première organisation de la régie, de la filiale distribution d’EDF. La ront plus bloquer les négociations. aucun compromis n’avait pu être rait l’ensemble des entreprises fer-
UNSA. « Le paysage a changé. Les l’UNSA arrivant en deuxième posi- CFDT conserve sa deuxième posi- Disposant désormais d’interlocu- trouvé en 2010 – ainsi que des dis- roviaires. Un objectif qui lui impo-
cheminots ont choisi de conforter tion (25,73 %). Avec 10 % des tion avec + 1,4 point par rapport à teurs en capacité de conclure des cussions sur la gestion prévision- se de trouver d’abord un terrain
les organisations adeptes de la voix chacune, la CFDT et FO 2007 (16,53 %). FO est stable et compromis, la direction de la nelle de l’emploi, ou encore sur d’entente avec ses propres syndi-
négociation afin de faire contre- conservent de justesse leur sta- la CFE-CGC passe au dessus des SNCF peutespérer faire vivre le cre- l’emploi des handicapés. cats. p
poids à celles qui, jusqu’alors, n’ont tut de syndicat représentatif. 10 %. do selon lequel on obtient plus par Sur le plan social, lagrande affai- J.-M. N.
GuillaumePepy:«AvecnotresystèmeRFF-SNCF,lechemindeferfrançaisvadanslemur»
Entretien C’est comme si on disait que les concessionnaires. Sur la nouvelle
routes vont être financées par les ligne Tours-Bordeaux, les péages
Guillaume Pepy, vous êtes prési- automobilistes. Hors autoroutes, prévus, assez dissuasifs, ne per-
dent de la SNCF. Comment expli- le réseau est largement payé par mettraient pas de faire circuler
quez-vous la dégradation de la la collectivité. Croire que le contri- davantage de trains pour rentabili-
régularité des trains ? buable va se désengager, et que le ser la ligne. On risque d’avoir un
Le réseau ferroviaire s’est voyageur ou le chargeur vont trafic supplémentaire bien plus
dégradé et n’est plus aujourd’hui assurer seuls le coût, n’aboutirait faible qu’espéré.
en situation de supporter correc- qu’à creuser les pertes. Trop ponc- La SNCF n’a-t-elle pas
tement le développement du tra- tionné, le client reviendrait alors à elle-même succombé au
fic. Réseau ferré de France [RFF, la route. L’infrastructure serait tout-TGV dans le passé ?
propriétaire et gestionnaire des étendue mais de moins en moins Le risque est de se retrouver
infrastructures] engage des tra- utilisée. Un non-sens ! avec des lignes à grande vitesse de
vaux – et c’est tant mieux ! – mais La création de transports collec- plus en plus longues et de moins
dans l’immédiat, ils allongent les tifs n’est pas rentable, du moins en moins utilisées. La construc-
parcours ou génèrent des retards. tant que les coûts externes (acci- tion d’un réseau de LGV en Fran-
Se pose également le problème dents, temps perdu dans les ce, c’est l’affaire d’une génération,
des actes de malveillance, des embouteillages, pollution…) ne pas de quelques années. Enfin, le
vols de câbles, des suicides qui sont pas mesurés et intégrés. Il financement des lignes à grande
perturbent lourdement l’exploita- manque de l’ordre de 1 milliard vitesse ne peut se faire au détri-
tion. Nous avons aussi notre pro- d’euros par an dans le finance- ment de celui du réseau existant.
pre responsabilité pour rendre ment du ferroviaire. Il faut avoir Ma priorité – et celle fixée par
plus souple le fonctionnement de le courage de développer une res- le chef de l’Etat dans ma lettre de
l’entreprise et accélérer le renou- source propre au transport dura- mission –, ce sont les trains du
vellement des trains. Nos voya- ble, assise sur des coûts externes : quotidien. La SNCF sait ce qu’elle
geurs sont devenus plus exi- taxe carbone, taxe à l’essieu, euro- doit au TGV, qui est aujourd’hui la
geants et se comportent de plus vignettes, péage urbain ou autre. troisième activité après nos trains
en plus comme des consomma- Il faut développer une fiscalité du quotidien et la logistique de
teurs : c’est un bien. écologique qui profite aux systè- marchandises. Je suis un militant
Je suis frappé par le fait qu’il y a mes de transport vertueux. convaincu du réseau classique.
encore quinze ans, les mots d’or- Que pensez-vous des nouveaux D’autant que certaines lignes
dre étaient « fermez les petites projets de lignes à grande vites- de banlieue sont aussi dans une
lignes » ou « enlevez les rails des Le patron de la SNCF (à d.) avec Hubert du Mesnil, président de Réseau ferré de France (RFF), se prévus par le Grenelle de l’en- impasse. Il est irrationnel, par
centres-villes ». Le débat sur les qui gère les infrastructures. Les deux activités sont séparées depuis 1997. DANIEL JOUBERT/CIT’IMAGES vironnement ? exemple, d’installer des entrepri-
grandes pénétrantes autoroutiè- Le TGV est une fierté française. ses le long des lignes de RER
res dans les villes était encore viva- absurde car cela veut dire que le poussé à cette dissociation au ont gardé une holding commune. C’est très ambitieux de construire aujourd’hui saturées. Cela ne
ce. Avec les crises énergétique et réseau grande vitesse, sans cesse niveau de l’Union, le constate aus- Regardons toutes les solutions. quatre lignes en même temps peut que générer une médiocre
financière, le train retrouve une étendu, sera proportionnelle- si. Si la France a le courage de Nos voisins ont surtout réglé de quand, jusque-là, on les construi- qualité de service. p
pertinence mais les décisions ment de moins en moins utilisé. regarder les choses en face, on va nombreux problèmes : désendet- sait une par une. Ce faisant, le ris- Propos recueillis par
n’ont pas toujours suivi à temps. Les voyageurs se détourneraient peut-être pouvoir inventer le tement total, prise en charge du que est de faire exploser les péa- Benoît Hopquin
Personne, y compris à la SNCF, alors du train pour revenir à la futur de façon cohérente, en surcoût lié au statut des chemi- ges demandés par RFF ou les et Jean-Michel Normand
n’avait anticipé un tel retour en voiture. C’est une vision malthu- accord avec l’Europe. nots par le biais d’une caisse spéci-
grâce du train. sienne. Que vous répondent justement fique, large financement public
Quel bilan tirez-vous de la disso- Si la SNCF devait consacrer une les responsables politiques ? par les Länder.
ciation, en 1997, entre le gestion- part excessive de ses moyens aux Ils sont aujourd’hui réceptifs à Les surplus dégagés en Allema-
naire de l’infrastructure ferro- péages, elle serait conduite à rédui- ce message. Ils disent : « Oui, on en gne par la Deutsche Bahn finan-
viaire et le transporteur ? re les dessertes et ne commande- est conscients. » Mais ils n’ont pas cent par exemple les acquisitions
Nous allons vers une impasse rait plus de nouveaux TGV. Aux encore trouvé la solution. Tra- en Grande-Bretagne. Ce succès
financière. Notre système RFF- bornes de la SNCF, c’est rationnel. vaillons ensemble ! leur permet désormais de conqué-
SNCF n’a pas d’avenir. Ce modèle Aux bornes du système, cela affai- Quel serait le bon modèle ? rir des marchés en Europe. De
n’optimise pas la dépense collecti- blirait dramatiquement l’indus- Les Français sont allés très loin plus en plus se profile le scénario
ve. J’ai tiré le signal d’alarme. Il trie ferroviaire. A raisonner ainsi, dans la séparation de l’infrastruc- d’une Europe du ferroviaire domi-
conduit chaque acteur à agir de chacun pour soi, le chemin de fer ture et du transport. Le duo RFF- née par l’Allemagne. Où est la pla-
manière égoïste. RFF cherche des français va dans le mur. SNCF n’a pas créé les conditions ce de la France ?
ressources en augmentant les péa- Le moment est venu de faire d’un pôle français fort et d’une Le transport ferroviaire peut-il
ges de la grande vitesse. Aux bor- un vrai bilan de la réforme de optimisation de la dépense publi- être rentable ?
nes de RFF, c’est cohérent, mais 1997 qui mérite des ajustements. que. Les Allemands, eux, ont Le système ferroviaire ne
aux bornes du système, c’est La Commission européenne, qui a conservé leur caractère intégré. Ils s’autofinance dans aucun pays.