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UNIVESITE DES SCIENCES SOCIALES
DE TOULOUSE
LE SECTEUR INFORMELET LAFORMATION :
UNE APPLICATION EN CENTRAFRIQUE
T H E S E P O U R L E D O C T O R A T E N S C I E N C E S E C O N O M I Q U E S
Présenté et soutenue le 19 février 1996
Par Prosper Didier GUEDOKO
MEMBRES DU JURY
Président : - Monsieur G. MOLINS-YSAL
Professeur à l’Université des Sciences Sociales de Toulouse.
Suffragants : - Monsieur M. CATIN
Professeur à l’Université de Toulon et du Var.
- Madame M.-P. BRUGNES
Maître de conférences à l’Université de Toulouse
- Monsieur J. BOUOIYOUR
Maître de conférences à l’Université de Pau
PRESIDENT DE LA THESE :
Suffragants
L’Université n’entend pas approuver, ni désapprouver les opinions particulières du candidat.
DEDICACE
A Bétou et Amos
REMERCIEMENTS
Nous tenons à exprimer tout particulièrement notre gratitude à Madame Marie-Paule
BRUGNES d'avoir accepté de diriger cette thèse, de nous encadrer et de suivre l'évolution
jusqu'à sa réalisation. Malgré les multiples difficultés rencontrées au cours de cette recherche,
ses conseils d'ordres conceptuel, méthodologique nous ont été d'une grande utilité.
A Catherine BARON et Jamal BOUOIYOUR dont la lecture critique a été source
d'encouragement, qui ont su nous consacrer le temps et le soutien dont nous avions besoin ;
Nous exprimons également nos remerciements à Messieurs Marc PENOUIL et
Jean-Pierre LACHAUD de l'Université de Bordeaux I qui ont bien voulu nous recevoir pour
des entretiens qui nous ont apporté des éléments importants du sujet.
Nous sommes redevables à l'égard de Fred FLUITMAN, et V. SETHURAMAN du
B.I.T. qui nous ont aidés à élaborer et préciser nos idées lors des entretiens qu'ils nous ont
accordé.
Nousnemanqueronspasde remercierl'équipeduC.E.P.E.D. réunieautourde Monsieur
Georges MOLINS-YSAL, de qui nous avons reçu la collaboration et l'encouragement qui font
du C.E.P.E.D. un endroit stimulant et propice au travail.
A nos parents et amis qui ont joué un rôle capital tant moral que matériel : Emmanuel
OUAÏMON, Darhyo YAMANDJAN, Fidèle KABRAL, Alphonse AMODA, Paul
OUAÏMON, Siméon NGOUMAPE, Jean-Didier KABRAL, Eric DONDON, Jean-Luc
DONDON, Louis RIEU, Firmin KOYESSE, Ignace BANDASSA, Stéphane MAILLARD,
Narcise KEMBY, Dany DIRAND, Bernard DEMARCHI.
A la mémoire de mon oncle David YAMBERE et de mon père Joseph GUEDOKO.
A ma mère Rébecca GUEDOKO...
INTRODUCTION GÉNÉRALE
L'Afrique Sub Sahérienne (ASS) est la région du monde la plus frappée par la récession
économique mondiale actuelle. La détérioration des conditions économiques, d'une part,
l'augmentationdelapopulationactive,d'autrepart,ont conduitàunepression croissantesurle
marché du travail urbain.Mais les possibilités d'emploi décroissent rapidement dans le secteur
moderne.Parallèlement,elleconnaîtunecriseprofondedel'enseignement,àl'heureoùprèsde
50 %1
de sa population totale est encore illettrée. La plupart des bâtiments scolaires sont
délabrés et nécessitent des travaux de remise en état. Étant donné qu'aucune nouvelle école
n'est construite, la situation ne peut qu'empirer au fil des années. La demande de places dans
l'enseignement augmente beaucoup plus rapidement que la capacité. Lorsqu'un enfant a la
chanced'avoiruneplaceàl'école,ilsetrouveconfrontéàunepénuriedematérieldidactiqueet
demanuelsscolaires,àunéquipementinsuffisantetàunpersonnelenseignantmalrémunéréet
profondément démotivé.
Un pays qui n'a pas les moyens de s'assurer une éducation descente et adaptée à ses
besoins, voit ses perspectives de croissance réduites. L'Afrique est un continent riche dont les
populations sont pauvres. Elle détient un certain nombre de records que nul ne lui envie : le
taux le plus élevé de fécondité et de mortalité du monde, et le continent le plus touché par
l'épidémie du SIDA;(sur 100 000 habitants, on compte 15 600 cas de SIDA).2
De façon notoire, la qualité des données macro-économiques est peu satisfaisante en
Afrique au sud du Sahara, mais tous les indicateurs disponibles vont dans le même sens et
permettentdedégagerdestendances:déclindes revenuspartête,baissedesproductionsetdes
exportations...Pourtant,ungrandnombredepersonnestrouventleurs moyensd'existencedans
le S.I. Il s'en suit l'abaissement du niveau de vie (devenu largement inférieur à ce qu'il était
avant l'indépendance) et une augmentation du nombre de gens vivant dans la misère.
L'environnement économique interne :
- La substitution d'une production nationale aux importations présente des limites : les
entreprises étaient subventionnées à partir de prélèvements sur lesecteur exportateur primaire,
bénéficiaient des barrières douanières protectrices et de maintien de taux de changes forts.
Même si leur production manufacturière a augmenté de 8 % par an pendant les années 60, le
développement des industries manufacturières rencontre rapidement une série de limites :
coûts de production élevés etstagnation delaproductivitédu fait des protectionsdouanières et
de la présence fréquentedes monopoles, concurrence desimportations frauduleuses, étroitesse
des marchés nationaux (sauf au Nigeria) et dépendance accrue des biens intermédiaires et des
biens d'équipement sont à l'origine des goulots d'étranglement ;
1
NATIONS UNIES : "Rapport mondial sur le développement humain", Whashington, 1995.
2
NATIONS UNIES : Op.cit.
- les infrastructures insuffisantes : le développement des infrastructures et le degré
d'intégration interne des pays fournissent aussi une indication sur la plus ou moins grande
flexibilité de ces économies. Cette insuffisance des infrastructures se combine souvent avec
leur détérioration. La précarité des infrastructures ne doit pas, toutefois, être généralisée à tous
les pays.
En réalité, comme en témoigne le développement concentré dans les grandes villes,
celui-ci tout en suscitant une croissance urbaine non maîtrisée a augmenté l'écart déjà existant
entre les villes et le monde rural, mais encore a aggravé la baisse du niveau de vie de ces
populations. En somme les politiques économiques se sont révélées peu efficaces et
inappropriées. "L'échec des politiques économiques sera attribué à l'ignorance par les
gouvernements des effets sur l'action de certaines variables qu'ils ne maîtrisent pas".3
La récession des années 80 et la phase d'ajustement structurel qui s'en est suivie ont
contribué à la prolifération des activités informelles. Le secteur informel, durant cette période,
est contraint d'absorber plus de main-d'œuvre que par le passé : partage des emplois, offre de
toutes sortes de biens et de services, développement de la pluriactivité, etc. La restructuration
du secteur public a engendré une mobilité de l'emploi salarial vers le mode d'emploi à propre
compte4
. Il est clair que l'emploi dans le secteur moderne n'a pas connu une expansion
suffisante pour absorber l'excédent de la main-d'œuvre urbaine dans les pays d'Afrique au sud
du Sahara. Par conséquent on peut déduire que c'est le Si. qui absorbe l'essentiel de la
main-d'œuvre. "L'expansion du S.I. ainsi que la contraction des salaires réels dans ce secteur
constituent les principaux moyens qui ont permis au marché du travail de s'adapter à la crise
quifrappe ces pays depuis 1980" 5
. L'emploi dans le S.I. a connu une croissance exponentielle
(6,7%parandurantladernièredécennie)etreprésente60%desemploisdanslesvillesd'ASS,
selon les estimations du PNUD6
. Le problème n'est plus celui du nombre d'emplois mais
devient comment promouvoir la productivité dans le S.I. en améliorant les politiques
d'éducation et de formation.
Désormais, dans les villes d'ASS, ce sont les activités informelles qui du point de vue de
l'emploi sont dominantes. Du fait de cette évolution non prévue, le système d'éducation et de
formation se trouve de plus en plus déconnecté des besoins des sociétés.
3
KOULIBALY (M.) : "Libéralisme..Nouveau départ pour l'Afrique Noire", L'Harmattan, Paris, 1992.
4
LACHAUD (J. P) : "L'ajustement structurel et le marché du travail en Afrique francophone", OIT,Genève,
Discussion Papers n°56,1993.
5
TROTIGNON (J.) : "Pourquoi les politiques d'ajustement ont-elles généralement mieux réussi en Asie du
Sud-Est qu'en Afrique", Economie et statistique, n°264,1993-94.
6
NATIONS UNIES: op. cit. page 5.
Le rapport pourtant ancien de la mission BIT sur le programme d'emploi au
Kenya7
contient la plus grande partie des connaissances sur le secteur informel. Toutefois on a
beaucoup appris depuis lors dans diverses parties du monde en développement8
. Durant les
années 80, dans un contexte de crise économique, les États du Tiers Monde, africain en
particulier, les organisations internationales, les chercheurs d'horizons différents ont focalisé
leurs interrogations sur le secteur informel. Un grand nombre d'auteurs ont utilisé ce concept
ces dernières années en essayant de le définir, mais ils n'ont pu aboutir à une unanimité.
Les caractéristiques du fonctionnement du S.I. telles qu'elles ressortent des définitions
reflètent-elles la réalité de ces activités urbaines et la place qu'elles occupent véritablement
dans ces économies ? Les caractéristiques mises en évidence dans les diverses études
conviennent particulièrement à certains cas mais sont difficiles à généraliser en raison de
l'hétérogénéitédecesactivités.Lapléthoredes définitionssonttoutes calquéessurlecaractère
dual de l'économie urbaine. On substitue à la division ancienne (secteur moderne/secteur
traditionnel)mettantl'accentsurlatechnologie,l'oppositionsecteurmoderne/secteurinformel.
Pour ôter au SI. son image négative, on insiste sur la forme de l'emploi (salarié opposé à
l'auto-emploi).
Quellesquesoientlesvariantesterminologiques(secteurinformel,secteurnonstructuré,
petite production marchande, secteur non réglementé,..), il s'est dégagé au cours des années le
rôle essentiel que peuvent jouer les activités informelles dans le processus de développement.
Durantcettepériode,ledéséquilibreglobals'est accentué dans lamesureoù,comptetenudela
situationéconomique,laprogressiondel'emploipublicaétéquasinulle. Dans cettesituation,
il est souhaitable en vue d'accélérer le développement économique d'utiliser pleinement
toutes les possibilités d'emploi, de production, de formation... que recèle le SX Si
l'importancedes activitésinformelles est reconnueà l'unanimité, lapositionde ce secteur dans
les politiques économiques reste liée aux différents objectifs qui peuvent lui être assignés
(augmenter l'emploi, augmenter la production, jouer un rôle accru et efficace dans le domaine
de la formation, etc....). En effet, le secteur informel se trouve projeté dans l'enjeu du
développement économique et social.Dès lors la question qui se pose est comment le
dynamiser ?
Toutefois, concernant sa dynamisation deux questions peuvent être soulevées.
7
BIT : "Employment,Incomes and Equality. A.Strategy for Increasing Productive Employment in Kenya",
Genève, 1972.
8
TURNHAM (D.), SALOME (B.), SCHWARZ (A.) : " Les nouvelles approches du secteur informel",
OCDE, Paris, 1990.
- comment peut-on mettre en place un système qui permette un apport efficace aux
activités concernées ?
- l'impact ou le rôle potentiel du secteur informel peut-il effectivement modifier, la
nature, l'efficacité et les fonctions du système productif dans les domaines économiques ?
De ces deuxinterrogations, il ressortquepour êtreviable les politiques doivent éviterde
s'intéresser uniquement à ce secteur. Elles doivent intégrer une stratégie de développement
ayant pour objectif l'amélioration des conditions économiques et sociales des pays concernés.
Cette amélioration passe très largement par la formation dont doivent bénéficier les personnes
travaillantdanssecteurinformel.Lespolitiquesd'incitation àlacréation despetites entreprises
devientunmoyenessentieldelagestiondel'emploi.LesentreprisesduS.I.peuventcontribuer
à atténuer la dégradation de l'emploi dans le secteur moderne à condition que des moyens
institutionnelsadaptéssoientmiseenplace(simplificationdelalégislation,allégementdutaux
d'impositionetcontrôleadministratif).Acela,ajoutonsquel'unedes conditionsessentielleàla
création des petites entreprises serait que les pouvoirs publics facilitent vigoureusement la
formation des futurs entrepreneurs des petites firmes9
. Cet argument se justifie à condition que
l'objectif fixé entre autres soit de faire passer une partie des actifs "informels" vers des
entreprises productives.
Les entrepreneurs du S.I. citent souvent comme problèmes : la faiblesse et l'irrégularité
de la demande et le manque de crédit, mais l'analyse économique révèle aussi d'autres
difficultés : niveau d'instruction et de formation peu élevé, absence de méthode de gestion
rigoureuse, concurrence entre les unités. La plupart des politiques de soutien au S.I. ont pris la
forme de programmes d'aide aux entreprises, souvent complétés par une assistance technique
en gestion, de conseil technique et de production ainsi que des aides en formation. Nous
envisageons dans le cadre de cette étude d'analyser la formation dans et pour le secteur
informel.
En effet, poser le problème de la formation dans et pour le secteur informel revient à
s'intéresser d'une part aux échanges d'informations existant dans le S.I. lui-même, donc à
mettre en relief la dynamique de la formation en son sein ; et d'autre part, aux interrelations
avec le système d'éducation et formation professionnelle. Par conséquent, cela revient à nous
demander:quelsystèmedeformationpeutrentrerensymbioseavecletissusocio-économique
de nombreux Etats d'ASS ?
Comme la majorité des États d'ASS, la Centrafrique a vu s'éroder le capital humain
durant ces dernières années, ce qui compromet ses chances de reprise et les perspectives de
développement à long terme. L'enseignement et la formation ont généralement beaucoup
souffert.Lecoûtdumatérieldidactiqueagrimpéenvaleurréelle,lessalairesdesenseignantset
des formateurs ont diminué. La qualité de l'enseignement et de la formation
9
VERNIERES (M.) : "Formation, Emploi, enjeu économique et social", Cujas, Paris, 1993.
s'en est durement ressentie. Les organismes de formation, en particulier, ont eu beaucoup de
mal à entretenir et renouveler le matériel qui leur est indispensable pour l'apprentissage des
différents métiers.
Les organismes de formation sont souvent entièrement tournés vers le secteur moderne
qui constitue pour eux un marché captif, et ont été incapables d'adapter leurs objectifs, leurs
programmes aux besoins du S.I. en pleine expansion.
Pour pouvoir s'imposer sur des marchés où la concurrence est désormais deplus en plus
vive, une entreprise doit être capable de s'adapter. Or sa capacité d'adaptation dépend de la
qualité, c'est-à-dire du degré d'instruction et de formation de ses dirigeants et de son personnel
en général. La mutation technique a fait ressortir que la formation d'une bonne partie de la
main-d'œuvre devient une priorité essentielle. L'enseignement et la formation doivent ajuster
leurs objectifs, programmes et méthodes afin de répondre aux besoins de la main-d'œuvre des
entreprises du S.I. et d'établir des liens accrus avec celle-ci.
Un secteur informel dynamique favorisera le développement et une distribution plus
équitable, plus large des avantages de la croissance parmi la population. Dans le passé, les
politiqueséconomiquesenASSnemettaientl'accentquesurlesecteurmodernedel'économie,
seul capable d'entraînerle développement de ces pays. Plus récemment,l'ajustement structurel
vise à établir un contexte macro-économique favorable au secteur privé et donc au S.I.
Toutefois, des obstacles d'ordre institutionnel et légal subsistent et empêchent souvent une
réaction positive d'offre additionnelle de produits et de services de la part des entreprises du
S.I. Les efforts doivent être axés sur la mise en place d'incitation à la concurrence et à
l'amélioration du contexte juridique et réglementaire.
Nous pouvons probablement affirmer que les capacités sont au cœur même des débats
sur le S.I. La capacité de succès d'une entreprise ou d'un entrepreneur est déterminée par une
multitude d'éléments: l'état des infrastructures, l'accès à des facteurs de production, les
compétences de ceux qui participent au processus (à tous les niveaux). Nous nous tournons
vers l'éducation et la formation en tant que sources probablement majeures de l'acquisition des
capacités. Les relations entre l'éducation et la croissance sont importantes. Dans les domaines
de la formation professionnelle et de l'effort technologique, l'expérience africaine s'est avérée
là aussi décevante.
Confrontés à de multiples problèmes à court terme, la plupart des pays Africains au sud
du Sahara ont tendance à accorder moins de priorité à l'éducation depuis le début des années
80.Maisonconstatequelesrestrictionsbudgétairesontsurtoutfrappél'enseignementprimaire
et relativement peu le supérieur10
. Le contexte de crise amène à s'interroger sur la finalité du
système éducatif. On se demande s'il vaut la peine de consentir
10
BANQUE MONDIALE : "Congrès mondial sur l'éducation pour tous", Thaïlande, 1990.
— Page 10 —
ces sacrifices pour former des chômeurs ou des jeunes gens qui n'auront d'autres issues qu'un
emploi dans le S.I. ne correspondant en rien à la formation qu'ils ont reçue.
A la base des sociétés modernes, l'accroissement de l'efficacité des individus, et pas
seulement de quelques hommes, mais de la grande masse de la population occupe une place
essentielle. Cette réflexion conduit, à donner une priorité à la formation pour le S.I. D'où la
question centrale : quel système de formation, compte tenu de l'organisation
socio-économique en ASS, ou encore, comment utiliser le S.I. et ses potentialités pour
assurer la formation du plus grand nombre si l'on considère que la formation est un
facteur clé du développement ?
Il est une nécessité que la capacité du système de formation dans son ensemble réponde
également aux besoins du S.I. Le système de formation ne doit pas être conçu qu'en fonction
des seuls besoins du secteur moderne. Parallèlement à la crise des structures productives
modernes, a été soulevé le problème de l'inadaptabilité entre les politiques économiques et les
politiques de formationdans les paysd'Afrique auSud du Sahara11
. Les exigences du travail et
de l'emploi mettent encausela visiondualistedela formation (oùl'éducation scolaires'oppose
aux autres types de formation traditionnelle ou extra-scolaire). Ce constat soulève dès lors la
question de revalorisation des potentiels de formation inhérents aux structures
socio-économiques telles que le S.I. L'incapacité des systèmes de formation classique à se
généraliser ou encore leur inefficacité ne posent-elles pas la question de la revalorisation
de la formation sur le tas dans le S.I. ?
Il sera indispensable d'analyser le processus d'acquisition de formation dans le S.I.
Les études12
montrent l'existence au sein du S.I. d'un processus d'apprentissage lié à la
structure de production (donc au niveau technique des entreprises considérées). Face à
l'incapacité de la formation professionnelle, l'apprentissage sur le tas s'est révélé un mode
d'acquisition de compétence, de savoir-faire efficace et très développé dans les pays d'Afrique
subsaharienne."Entoutétatdecause,ilnoussemblecertainquelaconcurrencepouruneplace
d'apprentissagedisponiblenepourraques'accroîtreavecletemps comptetenudunombredes
laissés-pour-compte du système scolaire et des profonds déséquilibres dans l'allocation
globaledelamain-d'œuvre".13
Prèsde88%desentrepreneurs ayantdesapprentisdéclarentles
former et disent que, dans l'ensemble, la formation dispensée est d'un niveau satisfaisant. En
dispensant une formation dans le S.I., les petits entrepreneurs apportent une solution à ce
problème capital et contribuent ainsi à l'effort du développement
11Cf.CONFERENCE DES MINISTRES DE L'EDUCATION: : "Rapport final",Harare, UNESCO, 1982.
12
STACE(B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sousla directionde SALOME (B.) : "Acquisitionde
compétence dans les micro-entreprises: Leçons tirées de l'afrique de l'Ouest", OCDE, Paris, 1994.
13
MALDONADO (C), LE BOTERF (G.) : "Urbanisation, secteur informel et emploi: L'apprentissage et les
apprentis dans les petits méties urbains, le cas de l'afrique francophone", BIT, Genève, 1985.
économique. Pour un nombre croissant des jeunes, les activités informelles représentent une
alternativevalableauproblèmeduchômage,d'autant plusquelaformationassuréepermetune
insertionàunniveauproductif.Endehorsdesactivitéscommerciales,lerôleessentielquejoue
le S.I. en matière de formation est admis par la plupart des études14
. Dans certains cas,
l'apprentissage sur le tas dans le S.I. peut s'analyser comme un investissement en capital
humain.Certainsapprentissevoientobligésdepayerauxpatronsunecertainesomme.Dansla
plupartdesvillesafricainesl'apprentissageconstituelaphaseinitialeettemporairedel'emploi,
et joue un rôle essentiel dans le fonctionnement de ces petites activités informelles. Pour bon
nombre d'entrepreneurs africains, c'est la route qui conduit au succès. Et nous montrerons que
la formation dispensée dans le S.I. répond aux besoins socio-économiques d'une grande partie
des populations.
Parmi les formes d'acquisition de qualification proposées à la main-d'œuvre,
l'apprentissage sur le tas ou la formation donnée sur le heu de travail est celle qui concerne le
plus grand nombre de travailleurs..., dans les ateliers urbains, il constitue évidemment la
modalitélaplusimportantedetransmissiondetechniquesconduisantàuneéventuellemaîtrise
de métier. Cette formation acquise dans le S.I. débouche sur des résultats socio-économiques
satisfaisants à court tenue. Ce qui nous amène à poser la question suivante L'apprentissage
sur le tas ou le mode d'acquisition des qualifications dans le S.I. peut-il être un élément
transformateur ou catalyseur de la formation en Centrafrique ?
La formation dispensée dans le S.I. touche un grand nombre de jeunes. Cette formation
qui présente des aspects extrêmement positifs doit être consolidée par des actions appropriées.
Eneffet,lesrapportsentreleS.I.etlesystèmedeformationpeuventsesituerenamont et
en aval des entreprises considérées. Les travailleurs du S.I. viennent d'horizons différents, soit
des entreprises, soit des centres d'enseignement, etc. Nous nous attacherons à montrer l'intérêt
pour les politiques éducatives et de formation à prendre en compte l'apprentissage sur le tas
dansleursorientationsnouvelles. LesrésultatsdesexpériencesduBIT15
relativesauxvillesde
Bamako, Lomé, etc., mettent en relief les possibilités de formation que recèle le S.I.; il
contribueàladiffusiond'anciennesetdenouvellescompétences.Ilyauralieudepréciserdans
quelle mesure l'apprentissage et la formation générale peuvent conditionner les résultats
obtenusdans laproduction. Les études16
montrentqu'unepartiedestravailleursdu S.I.sont des
analphabètes, cependant on note que
14
MALDONADO (C.) : Op.cit. page 10, STACE (B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sous la
direction de SALOME (B.) : Op.cit. page 10.
15urr: "Les petits producteurs urbains d'Afrique francophone", Genève, 1987.
16
BIT : Op.cit. page 11.
l'expansion courante des activités informelles dans les villes d'ASS s'accompagne d'un
paradoxe : l'arrivée croissante d'un grand nombre de jeunes issus des structures éducatives.
QueltypedeformationpeutstimulerledynamismeduS.I.ouencore,lacirculationentre
les deux secteurs n'est-elle pas favorisée par l'alphabétisation et la montée du niveau
d'éducation ?
Nous nous baserons sur le fait que l'accumulation du capital physique reste insuffisante
pour atteindre une croissance du S.I. et insisterons sur le rôle du capital humain qui s'est avéré
un facteur fondamental de la croissance de la productivité. Il s'agira de mettre en évidence la
contribution qualitative du travail à la croissance du S.I. On a remarqué que ce sont des
combinaisons de formations traditionnelles et modernes qui sont observées dans le S.I.. Des
enquêtes17
montrent que ceux dont le niveau d'instruction est élevé se trouvent généralement
dans les métiers les mieux rémunérés, faisant appel à des connaissances techniques, tandis que
les moins instruits se retrouvent dans les activités marginales.
Pour cette analyse, il convient de souligner que l'idée selon laquelle l'éducation est la clé
de la croissance, celle qui générerait l1
accroissement de la productivité, la modernisation de
l'industrie et l'agriculture, etc. remonte au début des années 60, où plusieurs économistes
(BECKER, SCHULTZ,.. .)18
avaient mis en évidence la contribution qualitative du travail à la
croissance économique. L'éducation augmente la part des gens instruits dans la société et
exerce un effet multiplicateur sur la demande des biens et services ; elle génère ainsi la
croissance économique toujours plus élevée, autrement dit, il existerait un lien direct de
causalitéentrelascolaritéetledéveloppementéconomique.Ildécoulede lathéorieducapital
humainlaconceptionselonlaquellel'éducationetlaformationgénèrent,chezlesbénéficiaires
de ces services, une augmentation de leurs compétences et leurs connaissances entraînant une
amélioration de leur productivité (elle-même source de revenus pour les bénéficiaires). En ce
sens, l'éducation et la formation des acteurs du S.I. doit alors être entendue comme stratégiede
dynamisationdecesecteur.L'accumulationducapitalhumainaincontestablementinfluencéle
renouveau des théories de la croissance endogène, ROMER(1986)19
, LUCAS (1988)20
.
L'accumulation du capital physique reste insuffisante pour atteindre une croissance de long
terme, dans la mesure où la production est selon les néoclassiques soumise à des rendements
marginaux décroissants. Les auteurs insistent sur le
17
STACE (B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sous la direction de SALOME (B.): Op.cit.
18
BECKER (G. S):"Human capital: A theorical and empirical analysis with Special reference to education"
New-York, 2° Edition 1975. SCHULTZ (T.W.):"Investment in human capital", The Free Press, 1971.
19
ROMER (P.M.):"Increasing Returns and Long-Run Growth", Journal of Political Economy, vol.94, n°5,1986.
20
LUCAS, (R.):"On the Mechanics of Economic Development", Journal of Monetary Economics, 22, 1988.
rôle du capital humain sur la croissance de la productivité. L'accumulation du capital humain
implique des effets externes importants et des rendements d'échelle croissants.
En posant comme hypothèse que la scolarité est généralement associée à un meilleur
coefficient de productivité dans la mesure où elle influe sur les attitudes, les motivations, nous
allons montrer que l'éducation favoriserait l'esprit d'entreprise et l'autonomie des artisans en
vue d'une gestion courante de leurs activités. Si les expériences d'appui en formation du BIT
sont globalement satisfaisantes, ne soulèvent-elles pas des limites ? "L'intervention par les
projets et programmes ne créera-t-elle pas les défauts du secteur moderne à la petite
entreprise ?" 21
. Compte tenu de l'hétérogénéité des activités informelles quels types d'actions
peuvent contribuer efficacement à dynamiser le S.I.
La nature de la recherche nous a conduit à une méthode empirique qui passe par les
étapes suivantes:
- Collecte de l'information : globalement, les données que nous utilisons proviennent du
Ministère de l'Économie, du Plan, des Statistiques et de la coopération internationale
Centrafricain, du Centre d'études Africaines (Bordeaux I), des organismes internationaux tels
que le BIT, l'OCDE, et la BANQUE MONDIALE.
- Questionnaire:UneenquêteaétéentreprisedanslavilledeBanguienvuedemettreen
lumière le phénomène de l'apprentissage sur le tas dans le S.I.
- Étude documentaire : celle-ci a permis d'établir une comparaison entre les différentes
notions et perceptionsdusujet. Elle aide à mieux comprendre et bien cernerle concept du S.I.,
afin de mieux orienter notre analyse.
Enfin, l'analyse de l'ensemble de ces données permet de préciser la place qu'occupe le
S.I. dans les stratégies de développement et de proposer des solutions de sa promotion. C'est
dans cette direction que s'inscrit notre recherche.
Ils'agira,danslecasdelavilledeBangui,demontrerquel'apprentissagedoitêtreprisen
comptedansunsystèmedeformationencrise(carencedelaformationtechnique)etdemonter
que les interventions en formation destinées au S.I. doivent tenir compte des facteurs tant
endogènesqu'exogènes.S'ilestprobablequ'unemeilleureconnaissancetechniqueetdegestion
accroîtra l'efficacité des entreprises les plus dynamiques, la question reste difficile à résoudre
en ce qui concerne la totalité du S.I. La Centrafrique n'échappe pas à cette problématique. La
connaissance du S.I. demeure extrêmement floue et a nécessité la
21
ELSENHANS (H.) : "Promotion du secteur informel ou promotion de son environnement en amont ou
en aval ? SFAX, nov.1990.
réalisation d'une investigation empirique (recensement des unités économiques de Bangui,
DSEE, 1990).
La mise en évidence du rôle du S.I. dans les économies d'ASS et de la formation pour ce
secteur renvoie à deux niveaux d'analyse distincts, chacun faisant l'objet d'une partie
spécifique. Étant donné les différentes interprétations théoriques des activités informelles,,
l'évaluation des apports et des limites de celles-ci constituera la première étape. Par la suite,
après avoir situé le contexte économique dans lequel évolue le S.I., nous analyserons le rôle
essentiel que jouent les activités informelles en Afrique subsaharienne, et en particulier son
importance dans la ville de Bangui (première partie).
Dans un premier chapitre, il nous est apparu nécessaire d'évaluer l'approche théorique
du S.I. dans l'analyse du sous-développement. La difficulté que présentent les différentes
approches du S.I. est prouvée par la multiplicité des termes utilisés pour désigner ce secteur
(secteur informel, secteur non structuré, petite production marchande, secteur non
réglementé...) (section I). Il existe plusieurs types de définitions du S.I. (les définitions
multicritères, les définitions fonctionnelles et les définitions statistiques) qui sont rattachées à
des thèses ou écoles de pensée22
(section II).
La mise en évidence du rôle du S.I. dans le processus de développement en ASS
constitueralechapitreII.Uneprofondemisèrerègneaujourd'huienAfriqueausudduSahara,
elle revêt toute les formes: reculde laproduction, famine.... Dans les années 70,l'ASS a mené
un combat pour le développement ; dans les années 80, elle lutte pour sa survie (section I). La
contributionduS.I.àl'économieseraabordéeentermesd'emploi,derevenusetd'accumulation
du capital, cependant la question de la capacité technologique du S.I. a toujours été négligée
(section II).
Le S.I. à Bangui sera abordé dans le chapitre III. Le recensement des unités
économiques de Bangui (1990) a révélé, si besoin était, l'importance du S.I. Seulement 249
établissements sur 19 820 ont déclaré tenir une comptabilité conformément aux conventions
communément admises, en conséquence98 % des unités recensées relèventdu S.I. (section I).
Le recensement a permis de repérer près de 19 570 entreprises employant 30 442 personnes
dans le S.I. à Bangui (section II). Comme nous l'avons souligné dans le chapitre précédent,
l'accumulation du capital dans le S.I. soulève des difficultés dans l'interprétation des résultats.
Onretrouveicil'oppositionentrelesactivitésinformelles évolutives etles activitésinformelles
involutives (section III). On relève plusieurs niveaux d'actifs immobilisés dans le S.I.
L'examen des résultats de l'enquête nous donnera des informations sur l'importance, la
croissance et le financement du capital fixe (section IV).
22
Cf. annexe n° 6 : Les différentes approches du secteur informel en France.
En se situantdans une optique detransition23
, nous montrerons quela dynamique duprocessus
de transition des unités informelles ne dépend pas uniquement du comportement des
entreprises (faiblesse du capital humain), mais qu'elle est étroitementliée àson environnement
socio-économique et politique (sectionV).
Nous concentrerons notre attention dans la seconde partie sur les potentialités de
formation que cettemodalité d'apprentissage recèleen examinantsa contribution àladiffusion
dusavoir-faire.Comptetenudel'importancedesstructuresscolairesetdel'apprentissagesurle
tas comme instruments de qualification, il s' est avéré nécessaire au préalable de dégager les
caractéristiques de leur fonctionnement dans la mesure ou leurs interrelations permettront de
comprendre les déterminants qui ont motivé l'entrée en apprentissage.
La conception selon laquelle l'éducation et la formation peuvent jouer un rôle moteur*
dans le développement trouve son explication dans la théorie du capital humain traitée au
chapitreIV.Lecapitalhumainpeutêtredéfinicommel'ensembledesqualifications,aptitudes
et des connaissances dont bénéficie l'homme et qui améliorent ses revenus monétaires et
psychiques"24
. Le renouveau des théories de la croissance endogène vers les années 80
témoigne de l'intérêt qu'on accorde aux investissements en éducation et formation dans le
processus de développement (section I). Dans les années 70, le taux de scolarisation global a
fait un bon remarquable (2là 38%), tandis que dans la décennie 90, on note une légère
régression (36%). Les efforts entrepris dans les décennies passées ont du mal à suivre la
demande induite par l'accroissement démographique. Le diagnostic du système d'éducation et
de formation en ASS fait apparaître un faible taux de scolarisation technique 6,7%25
. la
situation est d'autant plus dramatique que la crise économique a conduit tous les
gouvernements à adopter des budgets d'austérité (section II). Les efforts massifs en vue de
doter les jeunes centrafricains d'un bagage scolaire minimum sont loin d'atteindre leurs
objectifscarlamoitiédesjeunesdelagénérationresteàl'écartdel'école.Toutefoisces mêmes
effortsontcrééunefortedemandequi,fautedestructuresd'accueilalternatives,atendanceàse
répercuter à tous les niveaux de l'enseignement général (section III).
23
Le processus de transition peut être appréhendé à deux niveaux :
- au niveau micro-économique, la transition est considérée comme le passage d'une entreprise informelle au
secteur moderne. Ces passages sont souvent exceptionnels ; toutefois ces entreprises sont difficilement
discernables des autres entreprises modernes, rien ne permet d'infirmer qu'un nombre d'entreprises modernes
n'aient débuté dans le SI.
- au niveau macro-économique, la transition est considérée comme un changement progressif de la structure des
économies en voie de développement. Cette approche insiste sur le caractère structurel de la transition, en
limitant l'importance des caractères d'accumulation de capital et de gestion pour mieux souligner le poids des
mutations culturelles et sociales dans ce processus.
24
BECKER (G. S): "Human capital: A theorical and empirical analysis with Spécial référence to éducation",
New-York, 2° Edition 1975.
25
NATIONS UNIES : "Rapport mondial sur le développement humain", Whashington, 1995.
Une étude de la dynamique de la formation au sein des unités informelles peut nous
éclairer sur le rôle formateur du S.I. traité au chapitre V. Quoiqu'il en soit, toutes activités
confondues, la tendance est à l'accroissement de la demande de formation ; celle-ci est
nettement plus faible dans les activités de commerce et de l'artisanat traditionnel (section I).
Unautrepointquerévèlel'analyseduS.I.estquelesdemandesd'apprentissagesedirigentvers
les métiers nouveaux. Pour ce faire nous nous proposons de dégager les éléments significatifs
du processus d'acquisition des qualifications pratiques au sein des unités du S.I. (section II).
Lerapportentrelacapacitédes'informeretl'accroissementdelaproductiondansleS.I.a
été établi de façon irréfutable. Seule une action soutenue visant la transmission et le
développement du savoir adapté aux réalités locales nous permettra de mobiliser les
analphabètes du S.I., et pourra développer leur aptitude à affronter l'avenir, cet aspect est
abordé dans le chapitreVI. C'est pourquoi l'apport bénéfique de l'alphabétisation et de
l'éducation de base des acteurs du S.I. peut être des moyen de les munir d'un code de bonne
conduite et de les tourner vers un avenir que seul un apprentissage innovateur peut aider à
maîtriser. L'éducation de base est celle qui fait acquérir à l'individu, dans un contexte
historique, social et linguistique déterminé, un minimum de connaissances, d'aptitudes et
d'attitudeslui permettantde comprendreson environnement,d'interagir avec lui,depoursuivre
son éducation et sa formation au sein de la société et de participer plus efficacement au
développement économique social et culturel de celle-ci (section I). La formation
professionnelle pour le S.I. constitue un volet important de l'aide au S.I. Elle passe par une
organisation des métiers et un regroupement des artisans. Vu les différentes situations, nous
pouvons avancer comme hypothèse que les actions de formation en faveur du S.I. doivent
prendre en compte les intérêts des parties en présence. Il s'agira donc d'une participation
négociée avec les différents acteurs. Les relations entre le système de formation scolaire et la
formation extra-scolaire doivent être prises en compte (section II).
Cette thèse qui s'articule donc en deux parties, l'une conduisant à évaluer le rôle du S.I
dans le développement, et l'autre mettant l'accent sur la nécessité de la formation pour le S.I,
montre le rôle que peuvent jouer les politiques d'éducation et de formation dans l'amélioration
de la productivité du S.I
SOMMAIRE
PARTIE I : LE SECTEUR INFORMEL DANS LE PROCESSUS DE
DEVELOPPEMENT
Chapitre I : Emergence et approfondissement de la notion du secteur
informel dans l'analyse du sous-développement
Section I : Approche théorique de la notion de secteur informel (S.L)
Section II : Contours et définitions du secteur informel
Chapitre II : Rôle du secteur informel en Afrique Subsaharienne (ASS)
Section I : Le contexte économique de TAS S
Section : Contribution du secteur informel au développement de 1ASS
Chapitre LTI : Le secteur informel à Bangui
Section I :Présentation des établissements du secteur informel à Bangui
Section II :La contribution à l'emploi
Section HI :La contribution au revenu
Section IV :La contribution à l'accumulation du capital
Section V :Les obstacles au développement du secteur informel
PARTIE II : LA FORMATION DANS ET POUR LE SECTEUR
INFORMEL
Chapitre IV : Le rôle de l'éducation et de la formation dans le
développement
Section I : Approche théorique du problème éducation-développement
Section II : Les politiques éducatives et de formation en ASS
Section ni : Analyse du système d'éducation et de formation en Centrafrique
Chapitre V : La formation dans le secteur informel
Section I : L'apprentissage sur le tas dans le secteur informel
Section II :Présentation des résultats de l1 enquête personnelle
Chapitre VI : La formation pour le secteur informel
Section I : La formation générale pour le secteur informel
Section II : La formation professionnelle pour le secteur informel
PREMIERE PARTIE : LE SECTEUR
INFORMEL DANS LE PROCESSUS DE
DÉVELOPPEMENT
Chapitre I : Emergence et approfondissement de la notion du secteur informel dans
l'analyse du sous-développement
Chapitre II : Rôle du secteur informel en Afrique Subsaharienne (ASS)
Chapitre III : Le secteur informel à Bangui
INTRODUCTION DE LA PREMIÈRE PARTIE
Telles qu'elles ont été conçues après la deuxième guerre mondiale en ASS, les stratégies
axéessurlacroissancedirigeaientdepréférencelesinvestissementsverslesecteurmodernede
l'économie selon les modèles dualistes (se développer consistait à substituer les activités dites
"modernes" aux activités dites "traditionnelles"). "L'opposition entre ces deux réalités a servi
de fondements aux schémas dualistes, mais même les plus virulents critiques du dualisme ont
été amenés à décrire le développement à partir de la substitution de structures capitalistiques,
techniciennes, organisées, tournées vers le marché et l'accumulation à des structures
caractérisées par la. prédominance du travail, par la lente évolution des technologies de
l'outil,par la prédominance de l'organisationfamiliale etpar autoconsommation"26
. L'opinion
qui prévalait était qu'une croissance rapide et durable réglerait les problèmes de la répartition
des revenus, de la pauvreté... Les pouvoirs publics ne se souciaient pas de redistribuer les
richesses et minimisaient également le rôle de la consommation courante pour encourager le
développement ; cela résulte de l'idée qu'une redistribution du pouvoir d'achat en faveur des
plus défavorisés risque de compromettre la croissance en réduisant l'épargne et
l'investissement.
LeS.I.asansdoutetoujoursexistéenASS.,maiscen'estquedans les années 70qu'ilest
apparu dans la littérature économique , et a été particulièrement vulgarisé par les travaux du
BIT et de la Banque mondiale. Le point de départ est le constat selon lequel le chômage
apparent ne progressait pas en proportion de l'écart croissant entre augmentation de la
population en âge de travailler et les créations d'emplois dans le secteur moderne. Une
multitude de petites activités occupent une place prépondérante dans ces économies en raison
desespotentialités en matièred'emplois,dedistribution de revenus, desatisfaction des besoins
élémentaire, et pourtant elles sont évacuées des statistiques officielles et très peu intégrées aux
politiques de développement économique et social. La diversité des activités a eu comme
corollaire la variété des termes utilisés pour les qualifier (secteur non structuré, secteur non
organisé,petiteproductionmarchande...).Au-delàdesincertitudesconceptuellesquiontabouti
à diverses interprétations, nous tenterons de souligner l'importance tant quantitative que
qualitative du phénomène. D'autres événements plus récents ont accéléré le développement du
secteur informel : la récession des années 80 et les politiques d'ajustement structurel qui s'en
sont suivies en ASS y ont contribué. Les entreprises du secteur moderne, surtout celles du
secteur public furent contraintes de réduire leurs effectifs et salaires.
L'objectif de cette première partie vise à analyser le rôle que joue le S.I. dans le
développement des économies d'Afrique subsaharienne, et plus
26
PENOUIL (M.) : "Les activités informelles : réalités méconnues..., espérances illusoires ?", Problèmes
Economiques, n°2196,1990.
particulièrement dans le cas de la ville de Bangui. Cette analyse est incontournable dans le
cadre de notre travail, car elle nous permettra d'aborder les efforts de recherche et de poser un
diagnostic quant aux résultats des diverses investigations (BIT, CEAN, DSEE 27
). La
dynamisation du S.I. rencontre de nombreux obstacles, à la fois politiques, sociaux et
économiques.
Nous avons choisi d'étudier les activités les plus représentatives du secteur informel
urbain de production et de services c'est à dire celles du secteur informel dit "moderne"28
. Pour
atteindre notre objectif nous allons essayer d'analyser les entreprises, à travers leurs rôles de
création d'emplois, d'accumulation de capital et de distribution de revenu ; ainsi que les
relations qu'elles entretiennent avec le reste de l'économie. Comment les entrepreneurs du
S.I. combinent-ils les facteurs de production ? Quelle est la structure de production de la
main-d'œuvreemployée?Etquellessontl'importanceetl'originedesmoyensfinanciersmisen
œuvre ? La compréhension des activités informelles urbaines ne nécessite-t-elle pas l'examen
approfondi des relations en amont (achats d'équipement...) et en aval (structure de la clientèle)
qu'elles entretiennent avec leur environnement ?
D'autres événements plus récents ont accéléré le développement du secteur informel. La
récession des années 80 et les politiques d'ajustement structurel qui s'en sont suivis en ASS y
ontcontribué.Lesentreprisesdusecteurmoderne,surtoutcellesdupublicfurentcontraintesde
réduire leur effectif et réduire les salaires. En ASS, selon les estimations l'emploi dans le S.I. a
progressé de 6,7% par an de 1980 à 1985 ; durant cette période le secteur moderne n'a absorbé
que 6% des nouveaux venus sur le marché du travail contre 75% pour le S.I.29
Etant donné le vif débat opposant plusieurs auteurs sur l'interprétation des activités
informelles, il serait utile d'exposer ce débat pour dégager les analyses nous semblant
pertinentesàmêmedecomprendrelasituationactuelle.Nous aborderonsdonc,dans chapitreI,
l'émergence et l'approfondissement de la notion du S.I. dans l'analyse du sous-développement.
Danslechapitre H,serontétudiés lesdifférents apportsdu S.I.dans les économies aux niveaux
de l'emploi, de la distribution de revenus, de l'accumulation et de la maîtrise de la technologie,
le chapitre IIIsera consacré à l'analyse du S.I. dans la ville de Bangui à partir des données dont
nous disposons.
27
BIT : "Recensement du secteur informel dans les villes d'Afrique francophone", Genève, 1987. CEAN :
"Recensement du secteur informel à Bangui", 1982.
DSEE : "Recensement des unités et communes de Bangui", 1990.
28
Comme nous l'avions signalé dans l'introduction générale, il existe aussi un S.I. en milieu rural.
29OIT-PECTA: "Rappoit sur l'emploi en Afrique", Adis Abeba, 1989.
CHAPITRE I : EMERGENCE ET APPROFONDISSEMENT DE LA NOTION DE
SECTEUR INFORMEL (S.I.) DANS L'ANALYSE DU SOUS-DÉVELOPPEMENT
INTRODUCTION
Dès son origine, la notion du S.I. s'était prêtée à deux interprétations différentes : au
départ. HART30 situait l'analyse au niveau des ménages et posait le problème du revenu
informel comme un revenu complémentaire devenu nécessaire devant les limites de la
solidarité familiale. En considérant la combinaison des revenus formels et informels, l'auteur
examinait les stratégies des ménages en matière d'emploi et de revenu. Le BIT, quant à lui,
mène l'analyse en terme d'unités de production et tente de mesurer la contribution du S.I. dans
une perspective de réévaluation du PIB, en préconisant des politiques visant à drainer la
composante la plus dynamique vers le stade des petites entreprises.
Trente ans après, c'est l'optique des organismes internationaux (BIT, BIRD) qui est
retenueparlaplupartdesanalysesdu secteurinformel."Iln'apas étérarequedesuniversitaires
ou des chercheurs très opposés politiquement aux institutions internationales adoptent leur
vision (sectorialiste)"31. Il s'agira de cerner la portée économique du S.I., relativement aux
interrogations qui se posent, ainsi que les différentes façons de les aborder. Afin d'atteindre cet
objectif le chapitre sera divisé en deux sections.
Dans la première section, en abordant l'approche théorique, nous retracerons l'évolution
de la notion du S.I., afin de permettre de situer l'intérêt qu'elle suscite; nous analyserons par la
suite les différentes approches (dualiste et de la petite production marchande) du S.I.. La
seconde section donnera un aperçu des principaux problèmes soulevés par la définition du S.I..
En somme la description analytique que nous mènerons vise à vérifier la validité de la
distinction secteur moderne/secteur informel dans les PVD.
30
HART (K) :"Informal incomes oportunities and urban employment in Ghana", présenté à la conférence sur
l'emploi urbain en Afrique, Institute of development Studies, University of Sussex, publié dans le Journal of
Modern African Studies, II, 1, 1973, p.61-89.
31
LAUTIER (B.) : "L'économie informelle dans le tiers monde", La Découverte, Paris, 1994.
SECTION I : APPROCHE THÉORIQUE DE LA NOTION DE SECTEUR
INFORMEL
La difficulté que présentent les différentes approches du S.I. est prouvée par la
multiplicitédestermesutiliséspourdésignercesecteur(secteurinformel,secteurnonstructuré,
petite production marchande, secteur non réglementé...).
Le processus de développement engagé dans les pays d'ASS revêt deux formes :
le "développement transfert" résultant de l'imitation des structures et pratiques des pays
développés dans le domaine économique, ceci en raison de la place du capital étranger et de
l'utilisation de latechnologie. Le "développementtransfert" se retrouve dansd'autres domaines
: structures éducatives, politiques, administratives et juridiques qui sont souvent des mutations
directes d'un modèle occidental.
le "développement spontané" est l'autre forme du processus de développement. Il est le
fait du dynamisme empirique de la base humaine de la société cherchant à s'adapter à ce qui la
séduit dans l'autre forme de civilisation. Les populations ne restent pas figées dans leurs
pratiques ancestrales. Elles évoluent à un rythme différent et selon des modalités différentes.
Cette évolution n'est pas coupée des influences extérieures et ne se fait pas par substitution
d'une structure à une autre, mais par une lente évolution, résultant de multiples adaptations
réalisées.
Tout en acceptant l'essentiel de cette thèse, nous pouvons faire les remarques suivantes :
elle privilégie les problèmes du sous-emploi urbain alors qu'il existe aussi un S.I. rural.
la thèse de développement "spontané" pose comme finalité l'élimination des
déséquilibres concernés, avec l'intégration des activités informelles dans l'économie moderne.
AceproposlesétudesduBITsurleS.I."moderne"sontrévélatrices,danslamesureoùellesne
s'intéressent qu'à des activités pour lesquelles les interventions sont convenables pour faciliter
leur évolution vers des structures modernes.
I.1 - ÉMERGENCE DU CONCEPT DE S.I.
L'utilisationdutermeS.I.danslesPVDrésultedel'appréhensiondecertainsphénomènes
dont la coexistence est à priori paradoxale.
La croissance urbaine s'est réalisée à un rythme accéléré aux cours des trois dernières
décennies:alorsquelacroissancedémographiquedanslaplupartdespaysaétéenmoyennede
2,4%. La population urbaine a augmenté de plus de 6%, tandis que la population des quartiers
populairesacruenmoyennedeplusde12%paran.32 Lacroissanceéconomiquequiaentraîné
une augmentation de revenu par tête a été inférieure à 3%, et s'était réalisée par l'utilisation de
techniques à forte intensité capitalistique. Elle a exercée des effets d'accroissement l'offre de la
capacité de travail plus élevés que les effets d'augmentation de la demande.
32
BANQUE MONDIALE : "Rapport sur le développement dans le monde", Washington, DC, 1978.
En effet, malgré le décalage entre l'offre et la demande du travail, le chômage33
n'a pas
augmenté aussi rapidement que le laisserait supposer le rythme de l'exode rural et les taux de
croissancenaturelenmilieu urbain.Ilfallaitdèslors expliquercommentces"chômeurs"ontpu
subsister en ville ; la mission globale de stratégie de l'emploi (le rapport BIT sur l'emploi au
Kenya)mettaitl'accentsurleS.I.entantquesecteurdestinéàcouvrirles groupesd'activitésoù
"une importante proportion d'adultes qui n'occupent pas des emplois recensés sont occupés à
d'autresactivitésquifournissentdefaçonrentabledesbiensetservicesàlapopulationurbaine
: il s'agit des membres du S.I. "34
La contribution du BIT en cette matière était ainsi de mettre l'accent sur les aspects
positifs de ce secteur qui s'avère "le plus souvent du point de vue économique rentable,
productif et créatif et qui, sur le plan des politiques d'emploi, est loin d'être un piège à
chômeurs’’35
H faut noter que l'analyse théorique du concept s'inscrit dans le cadre d'un débat riche,
certes, mais qui n'échappe pas à des incertitudes et comporte certaines divergences du fait que
les recherches engagées ne procèdent pas des mêmes motivations ni des mêmes objectifs.
Nous analyserons les différentes interprétations du S.I. de l'économie urbaine tout en
mettant l'accent sur les approches dualistes ainsi que sur celle de la petite production
marchande.Nous poserons ensuite, le problème du S.I. sous l'angle de ses relations avec les
autres secteurs. Par la suite, nous présenterons les nouvelles orientations de recherche
concernant le S.I..
33
Dans ces économies le concept de chômage au sens où l'on entend habituellement est peu adéquat.
34
BIT : "Emploi, revenus et égalité. Stratégie pour accroître l'emploi productif au Kenya", Genève 1972, p.61.
35
Ibid
— Page 25 —
I.2 - D'UN DUALISME À UN "AUTRE"
L'approche dualiste est souvent utilisée dans l'explication des disparités caractérisant les
économies en voie de développement. La notion du dualisme signifie absence d'homogénéité.
L'économie des pays en voie de développement est conçue comme une économie au sein de
laquelle se trouvent juxtaposés deux secteurs économiques : secteur moderne et secteur
traditionnel.
Le principal modèled'interprétationest celui de LEWIS36
quiprésentel'avantaged'avoir
fourniuneexplicationdestransformationsintervenantdansces économies.L'approchedualiste
ne peut être comprise que par référence à ces modèles et travaux concernant le problème du
développementdutiers-monde. L'idéecentraledu modèledeLEWIS estque ledéveloppement
induit se caractérise par un processus continu de réaffectation des travailleurs en surnombre de
l'agriculture (secteur traditionnel) vers l'industrie (secteur moderne) créateur d'emplois
productifs. Le surplus croissant réalisé grâce à ce processus est supposé entraîner un processus
de croissance auto-entretenu. Cette analyse suppose tout à la fois un fonctionnement
concurrentiel du marché du travail et la volonté des industriels qui réinvestissent leurs profits.
Les réalités sociales et politiques montrent que de telles conditions ne sont généralement pas
remplies. Les pouvoirs publics doivent aider l'industrie par des moyens d'incitation (politique
fiscale, douanière...).
Les travailleurs du secteur traditionnel sont définis comme des irrationnels, qui n'ont
aucune notion de maximisation de profit et qui ne peuvent évoluer sur le plan technologique
puisque, par définition, les inputs du secteur traditionnel sont la terre et le travail ; le capital
reproductible n'existe pas puisque non monétarisé de par sa nature. Selon les néoclassiques les
travailleurs de ce secteur ont de bas revenus, une faible productivité (très inférieure à celle des
travailleurs du secteur moderne). Il y adoncd'une part un secteur moderne dérivantdes formes
de production capitaliste et, d'autre part, un secteur traditionnel dérivant des formes de
production paysanne.
L'inégalité dans la répartition de revenu, consécutive à l'accumulation du capital, serait
donc en mesure d'entraîner une épargne favorisant l'investissement, qui entraînerait des
créations d'emplois dans le secteur moderne.
La division del'économiedansles PVDen secteurmoderne etsecteurtraditionnel relève
d'une approche qui est sans doute peu réaliste. "Quoique ce schéma soit très attrayant à maints
égards, il semble pastoutà fait rigoureux. L'aspect résiduelduS.I. et lerôled'autosubsistance
que lui prête la thèse dualiste sont sujet à caution""37
. L'analyse de ces
36
LEWIS (W.A.) : "La théorie de la croissance économique", Payot, Paris, 1971.
37 PLASSARD (JM), CHOKRI(A.):‘’Segmentationdumarché dutravail et différentiels de salaires:une analyse
trisectorielle d’une économie en déveoppement’’, CEJE, Université de Toulouse I, 1994.
économies montre, en effet, une diversité de comportements économiques dont les
modèles construits jusqu'à présent ne peuvent que difficilement rendre compte.
En tout état de cause, nous considérons qu'en dépit des différentes descriptions de
l'économie dualiste, ladichotomie est fondée sur la technologie ; cependant les étiquettes telles
que économie du "type bazar" désignant le secteur traditionnel urbain ne font que signaler les
différences dans l'organisation des activités productives.
Toutefois, il s'est avéré que les effets d'entraînement du secteur moderne sur le secteur
traditionnel urbain ou rural se sont montrés illusoires dans la plupart des pays. Le
développement économique ne peut se cantonner dans un secteur moderne urbain et faire fi de
la quasi-totalité de la population. C'est certes devant l'impasse des premiers modèles dualistes
qu'onparlera,dèslors, d'un"nouveau" dualisme:secteur moderne/secteurinformelou encore
secteur structuré / secteur non structuré... Le développement du secteur informel est donc une
réponse aux échecs des politiques d'industrialisation fondées sur ces premiers modèles
dualistes. Comment spécifier de manière adéquate la situation observée dans les PVD où une
partie importante des activités économiques est menée par des petites unités qui ne relèvent ni
du secteur moderne ni de la sous-traitance "stricto sensu".
A - Le "nouveau" dualisme : secteur moderne /secteur informel
Dès 1971, H ART38 a introduit l'idée d'une possibilité de revenus "formels" et
"informels " ; il faisait ainsi la distinction entre les activités formelles impliquant l'emploi
salariéetlesactivitésinformellesrelevantdel'auto-emploi.L'auteurmetenrelieflaquestionde
l'impact des activités informelles sur l'économie. Devant les réalités marquant la nature de la
croissance économique des PVD, il concluait que les activités informelles sont source de
revenusetcontribuentpourunelargepart,àcôtédel'emploisalarié,àencouragerl'exoderural.
Nousretiendronsqu'audépartlanotiondeS.I.aétéadoptéenonseulementpourdésigner
legroupeendirectionduqueldesmesuresdesoutienetd'encouragementdoiventêtreprises, en
vue de promouvoir l'emploi et de lutter contre le chômage et la pauvreté, mais aussi pour
reconnaître la spécificité de cette nouvelle dimension de la réalité dans les PVD. Le dualisme
S.M./S.I. est une" nouvelle" manière de penser l'hétérogénéité des structures des économies en
développement. Le "nouveau" dualisme enrichit le débat théorique sur le caractère dual des
économies en voie de développement, dans la mesure où on reconnaîtra désormais l'originalité
duS.I..Parailleursce"nouveau"dualismesusciteundébatquantàsondegrédepertinence.Au
lieu de considérer que le secteur traditionnel a un rôle passif de fournisseur de main-d'œuvre à
38
HART (K.) :"Informal income oportunilies and urban employment"in Ghana journal of modern Africa
studies, vol. 11, n°l, mars 1973.
A la dichotomie ancienne, certains auteurs substituent :
- secteur formel / secteur informel (HART),
- secteur structuré / secteur non structuré (WEEKS, SETHURAMAN),
- secteur moderne / secteur traditionnel (LACHAUD, PENOUIL, HUGON).
untauxdesalairedéterminéparlerevenudesubsistance,ildevraitêtreanalysédanssonpropre
dynamisme39
.Lesnouveauxmodèlesdualistesprennentcommehypothèsequelesinégalitésde
revenusnesontpasunfacteurdedégagementd'épargne,maisaucontraire,limitentlademande
effective. La question posée au niveau de l'emploi concerne alors le revenu et non le temps de
travail, et le problème économique s'est déplacé de la production vers la demande. Au lieu de
parler de chômage en termes de surplus de main-d'œuvre, on l'appréhende en tenue d'activité
sous-rémunérée.
BERTHOMIEUC.40 regroupelestraitscaractéristiquesdesdeuxsecteursgénéralement
soulignés par les auteurs dans le tableau suivant :
39 HUGON (P.) : ‘’Dualisme sectoriel ou soumission des formes de production. Peut-on dépasser le débat ?’’,
Revue Tiers-Monde, T.XXI, n°82, avril-juin 1986
40
BERTHOMIEU (C.) : "Le système économique de la Médina de Sfax (aspects fonctionnels et structurels)",
Université de Nice, novembre 1986.
"Le dualisme des modes de production, de l'organisation de l'échelle de l'activité semble
être la thèse où se rallient la plupart des travaux, toutefois, il en subsiste deux problèmes : à
savoir le choix de l'unité d'observation, (individu, ménage, établissement) et les mécanismes
qui relient secteur moderne et secteur informel" 41. Le S.I. échappe à l'analyse néoclassique
car son développement n'est pas lié aux opportunités d'investissement, mais à la nécessité de
créer des emplois dans un contexte d'urbanisation et d'industrialisation plus ou moins
accélérées. La diversité des situations observées ne permet
41
SETHURAMAN (S. V.): "The urban sector in developping countries: employment, poverty and environment",
1981.
Variables
caractéristiques Secteur moderne Secteur informel
Forme juridique des
entreprises
Société Entreprise individuelle
Technique utilisée Capitaliste "Labor intensive"
Type d'organisation Bureaucratique Familiale, domestique
Niveau de production Grande échelle Petite échelle
Prix Fixes Négociables
Marché Protégé Ouvert
Capital financier Abondant Rare
Procès du travail Organisation scientifique du travail Artisanat, ateliers autonomes
Division du u-avail Très développée Faible
Durée du travail Régulière Irrégulière
Salaires Mensuels versés régulièrement A la pièce, versements
irréguliers
Crédit Bancaire Personnel
Relations sociales Impersonnelles Personnelles
Coûts fixes Importants Négligeables
Matières premières Importées de l'extérieur Produits localement
Instruction scolaire Élevée Très faible
Modalités d'acquisition des
qualifications
professionnelles
Système éducatif Apprentissage sur le tas
Niveau de qualification Élevé Bas
requis
Caractéristiques des secteurs moderne et informel (tableau n°l)
Source : BERTHOMIEU, 1986.
pas d'apporter une réponse unique. Certaines activités sont complémentaires, d'autres
subordonnées.
LesmotivationsthéoriquesdéterminantlesétudessurleS.I.sontelles-mêmesdifférentes
selon qu'on se trouve du côté de la recherche théorique ou des organismes internationaux : les
premières sont dictées par un souci de connaissance abstraite, alors que les secondes
s'intéressent au S.I.au rôle que l'on veut faire jouer au SI. dans le processus de développement.
On peut citer comme exemple d'analyse dualiste l'approche du BIT(1972)42. Toutefois,
il est à remarquer que le BIT s'écarte des modèles dualistes classiques. Dans les modèles
dualistes "classiques" la dichotomie (traditionnel / moderne) est une phase transitoire qui
s'achève par le développement du secteur moderne (une modernisation de l'économie toute
entière). Cette approche reste cependant assez marquée par l'absence de rapports significatifs
entrelesdeuxsecteurs. C'estpourquoinous pouvons latraiterde"dualiste"pourladifférencier
des approches qui tendent à donner à la fois une explication du fonctionnement spécifique de
chaque secteur et une logique de fonctionnement qui permet de comprendre leur articulation.
SelonlestermesduBIT,le S.I.est ledomaineoùune importanteproportionde gens, qui
n'occupent pas des emplois recensés, sont occupés à d'autres activités qui fournissent de façon
rentable des biens et services à la population urbaine, ou bien, du point de vue opérationnel, le
S.I. comprend les métiers dans lesquels ils trouvent une utilisation de leur travail ; la plupart
sont des travailleurs à leur propre compte, les travailleurs (patrons et personnel) des petites
unités, etc. Comme il n'est pas possible de définir le S.I. seulement par la nature des activités,
on ajoute comme caractéristiques principales la faible intensité capitalistique des unités,
l'existence de marchés concurrentiels, la facilité d'entrée, etc.
La contributionde l'approche dualistedu BIT pourexpliquer les disparités dans les PVD
n'est pas négligeable :
L'introduction de l'hétérogénéité des emplois dans l'économie permet de saisir la
contribution économique des travailleurs qui ne rentrent pas dans les cadres structuraux
préétablis, et qui ont été souvent considérés comme des "chômeurs déguisés" dans les
statistiques.
en rompant avec la vision du dualisme classique, cette approche BIT va permettre
d'étudier les conditions de promotion des autres formes de production.43 Le découpage en
secteur formel et secteur informel est tellement simple qu'il ne permet pas de saisir la richesse
42
BIT :"Employment, incomes and Equality. A strategy for Increasing Productive Employment in Kenya", OIT,
Genève, 1972.
43
MALDONADO (C.) : "Les petits producteurs urbains d'Afrique francophone", BIT, Genève, 1987.
de l'hétérogénéité des statuts socioprofessionnels des individus à l'intérieur du SX. Il ne
permet pas de classer les fractions spécifiques de la main-d'œuvre qui se trouve dans le SX, ou
de connaître de façon concrète leur dynamisme. On a certes tenté de mieux expliciter
l'hétérogénéité des processus productifs au niveau du S.L, mais ces essais ont abouti à de
nouveaux découpages.
B - L'analyse en trois secteurs
STEEL (W. F.)44 scinde l'économie des PVD en trois secteurs : un secteur moderne, un
secteur traditionnel et un secteur intermédiaire ou de transition.
Le secteurmoderneutilise unecombinaison de facteurs deproduction plus capïtalistique
que les deux autres secteurs et produit à grande échelle. La technologie est avancée et souvent
importée. Il existe dans ce secteur des barrières à l'entrée.
Lesecteurintermédiaireestcomposédesunitésdeproductiondepetiteetmoyennetaille.
Ce secteur utilise une technologie moyenne, des équipements fabriqués localement, et il a des
équipements petitsplusfaiblesque ceux du secteur moderne. Sur leplandela rémunérationdu
travail, les salariés du secteur moderne font l'objet de contrat de travail et leur salaires ne
peuvent se fixer en deçà d'un seuil déterminé institutionnellement. A l'inverse, ceux du secteur
intermédiaire se définissent par rapport à la productivité marginale du travail. Les barrières à
l'entrée sont moyennes (barrières à l'entrée liées à l'investissement en capital physique ou
humain).
Enfin, le secteur traditionnel a les caractéristiques suivantes : faible capital fixe, absence
de barrières à l'entrée, financements essentiellement familiaux ; le produit marginal du travail
estnul.Ilyapartageduproduit,celui-cipouvantêtreéventuellementégalautauxdesalairedu
secteur de transition.
L'hétérogénéité des activités du SI., a conduit au développement des modèles trialistes
qui sont une reprise du modèle dualiste de LEWIS.Les analyses en trois secteurs reposent sur
l'existence d'un seuil technologique, conduisant à une rentabilité financière du capital
décroissante.Dans ce schéma, c'est le secteur intermédiaire qui est capable de jouer le rôle que
jouait le secteur traditionnel dans les analyses dualistes. "Le secteur intermédiaire, sous
certaines conditions, pourrait produire autant que le fait le secteur moderne. Ce secteur, en
élargissant le marché intérieur, favorisera la création et le maintien d'une économie
intermédiaire, située entre les activités traditionnelles et le grand secteur moderne. En
définitive, le développement du secteur intermédiaire réconciliera les objectifs d'emploi et de
44
STEEL (W. F.) :"Small-case employment and production in developing countries evidence from Ghana",
New-York, 1977.
LRHOULA (Y.) : "Secteur informel et développement : contribution à l'élude de l'économie urbaine dans les
PVD", Thèse 3e cycle, Aix Marseille 3,1986.
production". 45 L'analyse en trois secteurs présente un intérêt dans la mesure où l'adoption de
l'hypothèse d'hétérogénéité permet de situer le champ des investigations statistiques.
1.3 - L'APPROCHE DE LA PETITE PRODUCTION MARCHANDE
Bienquel'appellationdelapetiteproductionmarchandeaitétéutiliséeparcertainsparla
suite pour désigner les activités informelles, cette seconde approche du S.I est d'inspiration
"marxiste". Elle part de l'idée que la petite production marchande ou les activités informelles
sont un ensemble d'activités qui participent à la reproduction du mode de production
capitaliste46. La participation de celles-ci à la reproduction du système capitaliste dans les
PVD résulte du fait de la soumission du travail au capital. Cette approche considère
l'émergence du S.I. comme une modalité de surexploitation du prolétariat que le capitalisme
périphérique et international ne peut, ou ne veut, salarier. Les analyses se placent dans une
perspective globale, afin d'essayer de comprendre les mécanismes de fonctionnement, de
régulation du système, autant que les logiques des sous-systèmes de production. La petite
production marchande est alors considérée comme une réserve de main-d'œuvre dans laquelle
lesecteurmodernepuiselaforcedetravaildontilabesoinetrejettecelledontiln'apasl'utilité.
Selon les tenants47 de cette approche, la petite production marchande dominée par le
système capitaliste répond à ses lois de fonctionnement par une complémentarité structurelle.
Cette complémentarité relève des modalités essentielles du fonctionnement du secteur
moderne, et est renduepossiblepar d'autres caractéristiques spécifiques du fonctionnement des
secteurs arriérés.
La vision totalisante de cette approche est diamétralement opposée à l'approche dualiste,
au niveau de la signification des rapports entre les secteurs, et du rôle accordé au SX. Les
principaux travaux font ressortir cette opposition autour de l'aspect fonctionnel du rapport
S.M./S.L.
Les analyses retiennent comme activités informelles celles qui correspondent à un mode
de production artisanale et au petit commerce, et acceptent l'existence de flux réels et
monétaires entre les deux secteurs au sein d'une économie.
45
STEEL (W.) : "Intensité du capital, dimension de la firme et choix entre emploi et production. L'importance de
l'analyse multisectorielle", Revue Tiers Monde, tome XXI, n°82, avril-juin 1982.
46
ABADIE (N.), HUGON (Ph.), MORICE (A.): "La petite production marchande et l'emploi dans le "secteur
informel" - Le cas Africain", Édition de L'IEDES, Paris, 1977.
47
LAUTIER B., DE MIRAS Cl. et MORICE A. : "L'Etat et l'informel", L'Harmattan, Paris, 1991.
L'articulation des formes d'activités est envisagée du point de vue des avantages que le
secteur formel tire des activités informelles. Pour certains, les activités du S.I. contribuent à
l'accroissement du taux de profit du S.M. par l'échange inégal. On souligne que le capital a
intérêtàmaintenirleS.I..Lerôledesactivitésinformellesseraitdereleverletauxdeprofit,soit
parlasous-traitancecommerciale,soitparlasous-traitancedirecteaveclesunitésduS.M..Les
flux entre les deux secteurs jouent un rôle dans le cycle de valorisation du capital.
Pour d'autres, le S.I. produit des inputs à bon marché pour l'industrie, ces inputs entrent
dans le cycle de valorisation constant, et en font monter le taux de profit.
Les analyses considèrent que les petits producteurs jouent un rôle d'armée de réserve
permettant au capital d'avoir un taux de rotation élevé de main-d'œuvre, sans qu'il ait à
supporter le coût de l'entretien de la main-d'œuvre rejetée hors de la sphère de la production.
En dépit de cette constatation d'un rôle positif des activités dans la
valorisation-accumulationducapital,lesanalysess'opposententreellesquantàl'avenirdecette
articulation au sein de l'économie des PVD.
Pour certains, le rôle accompli par les activités informelles dans la hausse du taux de
profit est d'une importance fondamentale pour l'accumulation du capital, l'existence des deux
secteursestunélémentpermanentdel'économie.Dans cecadre,ilexiste toujoursunprocessus
de conservation-dissolution : le blocage du développement, dû à l'étroitesse des marchés, rend
le capital incapable de dissoudre le mode de production artisanale, ce qui fait que la stratégie
rentable serait de subordonner les petits producteurs.
D'autres travaux considèrent que les formes de production non capitalistes sont des
survivances du système antérieur et ne jouent qu'un rôle marginal par rapport à l'accumulation
du capital. Les activités informelles doivent disparaître à la suite d'un double processus :
par la transformation progressive des rapports antérieurs en rapports marchands, à
l'intérieur des petites unités ;
du fait d'une plus forte concurrence du développement de l'économie en général.
Pour les auteurs qui soutiennent la thèse de la disparition du SX, et qui négligent leur
importance dans le processus d'accumulation, l'existence des petits métiers dans l'économie ne
peut s'interpréter que comme une survivance. Les petits métiers se trouvent directement
menacés par le courant de la modernisation.
Plus nombreux sont les auteurs qui partent de la permanence de l'articulation des
secteurs, et considèrent que le développement du S.I. ne peut pas se faire dans un modèle
économique dominé par les intérêts d'une minorité locale ou étrangère, par conséquent le
problème du petit producteur fait partie du développement.
Danscetteapprocheonaccordeunrôlepositifàlapetiteproduction,maisétantdonnéesa
dépendance vis-à-vis du S.M., son développement doit être conçu dans le cadre d'une profonde
modification de l'organisation économique et sociale des PVD. Autrement dit, dans la mesure
où les petits entrepreneurs ne peuvent participer à l'économie que de façon dépendante et
subordonnée, toute politique d'aide en leur faveur conduirait à une aggravation de la pauvreté,
sans pour autant bénéficier réellement à ceux qui passeraient sous le contrôle de la grande
industrie.
Les approches dualistes ont le principal mérite d'avoir inauguré la recherche pour
l'appréhension de la complexité du rapport production/emploi dans les PVD. Cette approche
présenteunecertaineoriginalitéquiconfèreàcetypededéveloppementuncaractèrespécifique
et unique.48
L'approche de la petite production marchande part du même univers hétérogène des
activitésurbaines, ettententunearticulationentrelesdeuxsecteurs. Leurs limitesdépendentde
la façon dont ils établissent la complémentarité. Les analyses qui soutiennent la thèse de la
disparition des activités du S.I. par le développement, commettent les mêmes erreurs que les
tenants dudualisme classique (destruction dusecteur traditionnel). "Le secteur informel est fait
pour durer"49
. L'approche de la complémentarité des formes de production dans le cadre de
l'accumulation du capital présente comme limite le fait de privilégier le transfert des valeurs
d'un secteur vers l'autre, et refuse d'étudier d'autres phénomènes tels que la dévalorisation du
travail, le rôle des unités du S.I. dans l'absorption de la main-d'œuvre.
Malgré leurs limites, ces approches fournissent un soubassement analytique qui permet
de saisir les économies en voie de développement (voir Annexe 6). Les deux approches du S.I.
ne s'excluent pas absolument, il semble possible de les combiner dans le cadre de notre
problématique.
1.4 - LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE RECHERCHE
Lors d'un séminaire de l'OCDE sur le S.I., les participants, après avoir fait le tour des
définitions opposées, des conflits et des méthode ont proposé des nouvelles orientations de
recherche sur le S.I. en Afrique.50
48
BARON (C.) : "Autonomie-intégration des espaces urbains Africains", thèse de doctorat d'université, Sciences
Economiques, Bordeaux 1,1994.
49
LUBELL (H.) :"Le secteur informel dans les années 80 et 90", O.C.D.E., Paris, 1991.
50
KING (K.) : "L'émergence des tendances récentes en Afrique. Un schéma pour les nouvelles tendances",
Nouvelles approches du secteur informel, OCDE, Paris, 1990.
— Page 34 —
Au niveau de chaque pays, c'est la prise de conscience par les dirigeants africains du S.I.
et des liens qu'il y a entre lui, l'éducation et la formation. II s'agit de l'attitude des organismes
d'aidevis-à-visdesgouvernementsafricains quiposentcommeuneconditiond'aide,lapriseen
compte dans les décisions politiques des liens entre l'éducation, la formation et le S.I. Les
diplômésdesécolesprofessionnellesutilisentles connaissancesacquisespréalablementdans la
création d'emplois informels, lorsque le secteur formel se trouve dans l'impossibilité de les
intégrer.Deplusenplus,leS.I.devientl'apanagedesscolaires,etladuréedelascolarisationest
ce qui amène des différences quant à la stratification au sein des unités du S.I. En d'autres
tenues, le fait d'être diplômé d'une école professionnelle, ou d'avoir poursuivi des études
primaires, secondaires ou supérieures impliquait des différences de performances, tant au
niveau de l'organisation des entreprises informelles, qu'au niveau du développement et de la
multiplicationdesdites entreprises. Désormais, il s'agit d'analyser quels types d'éducation etde
formation ont aidé les jeunes à accéder à l'activité qu'ils exercent.
L'examen de la littérature récente sur le S.I. montre que les pouvoirs publics, les
institutions internationales s'intéressent de plus en plus au S.I. dans les stratégies
d'augmentation de l'emploi et de revenus. Parmi les tentatives de sortie de la crise structurelle
que traverse l'ASS, les partisans de la déréglementation de l'activité économique et de la
flexibilité de la législation du travail prônent également une intervention dans le S.I. D'un côté,
on estime qu'un contrôle plus strict des conditions d'exercice des activités informelles est
nécessaire afin de garantir les investissements dans le secteur moderne ; de l'autre côté, on
préconise une réforme du secteur institutionnel pour libérer les initiatives et le potentiel que
recèle le S.I. L'impact du cadre institutionnel ouvre une voie de recherche qui doit déboucher
sur d'autres orientations. "Pourquoi ne pas puiser dans "la richesse des alternatives
institutionnelles pour imaginer une réglementation différente pour les secteurs formel et
informel, appropriée à la branche, à la taille et à la logique de gestion des entreprises, en fait
une réglementation qui, tout en maintenant certains avantages du S.I., contribuerait à atténuer
les coûts ?"51 Les pays sous ajustement structurel sont aussi concernés par le renouveau de
l'approche institutionnelle. Par conséquent les approches empiriques sur le cadre institutionnel
dans lequel évolue le S.I. peuvent ouvrir des voies de recherche intéressantes.
Ces approchespartentdel'idée que lespolitiques d'ajustementstructurel rendent difficile
toutepolitiquesociale,parconséquentleS.I.pourraits'ysubstituer,d'oùlathèsederajustement
à visage humain.
Les orientations de recherche concernent le marché du travail urbain dans le contexte
macro-économique d'ajustement structurel. L'idée de base est que l'analyse du marché du
51
FREEMAN (J.R ):"Labor markets and institutions in economic development", The American Review, Mai
1993.(également dans Les problèmes Économiques n°2361, fév.1994).
travail est déterminante pour comprendre le problème de la pauvreté. Il paraît opportun
d'axer prioritairement la recherche sur les thèmes adaptés au développement de politiques en
direction des plus vulnérables52. Les thèmes de recherche concernent :
l'exploration de la liaison entre les mécanismes du marché de travail et la pauvreté ;
la liaison entre l'ajustement structurel et les effets sur le marché du travail.
Les recherche prennent trois directions essentielles : une première nécessité concerne la
disponibilité de l'information statistique sur le marché du travail ; le développement de la
formationpourpermettreauxlocauxd'interpréterlesdonnées ; etledéveloppementde réseaux
de recherche sur la marché du travail en Afrique subsaharienne et au Maghreb.
Des résultats préliminaires obtenus lors d'une enquête pilote sur les ménages en Côte
d'Ivoire53 montrent que les ménages pauvres englobent surtout les travailleurs indépendants ;
l'observationdelastratification dumarchédetravails'écartedesschémasdualistes. Lamiseen
évidenced'uneclassificationhiérarchiquedes chefs deménagesmontreplusieurs catégoriesde
travail homogènes : le salariat protégé, le salariat concurrentiel, le salariat non protégé, le
travailàpropre compte évolutif,letravail à proprecompteinvolutif. Les trois dernières formes
sont la plupart du temps situées chez les ménages pauvres.
SECTION II : CONTOURS ET DÉFINITIONS DU S.I.
Dans les pays sous-développés, l'intention de chercher un emploi ne s'exprime
généralement pas sous une forme institutionnelle. La limite entre "chômeurs" et ceux qui ne
participentpasàlapopulationactiven'estpasnette.LeS.I.permetuneinterprétationvalablede
l'existence et la coexistence des systèmes d'emplois et d'activités. Aucune réflexion sur
l'économie des PVD ne peut se passer de la reconnaissance de certaines catégories de
travailleurs qui appartiennent au S.I.. Les travailleurs de ce secteur sont en majorité des
indépendantsoudesnon-salariés,quiontgénéralementdesniveauxdeproductivitéfaibles.Les
revenus gagnés dans le cadre de ce secteur sont peu élevés et peuvent être assimilés à des
revenus de subsistance D'autres analyses empiriques reconnaissent que certaines activités
informelles dégagent des revenus supérieurs à ceux des ouvriers du secteur moderne (cf.
52
LACHAUD (J.-P.) : "Le secteur informel urbain et le marché du travail en Afrique au sud du Saliara",
séminaire "The informai sector revisited", Centre de développement de l'OCDE, Paris, 1988.
53
LACHAUD (J.-P.).: "L'analyse du marché de travail urbain en Afrique", Institut International d'Études
Sociales Genève, Discussion Papers, DP/2/1987.
— Page 36 —
CHARMES,1987).LesmembresdelafamillequiintègrentleS.I.,sontsouventacceptés
au sein de cette famille parce qu'on espère d'eux une contribution au budget familial.
Toutefois les divergences théoriques que nous avons abordées dans la première section
débouchent sur plusieurs définitions.
II.1 - LES CRITÈRES DE DISTINCTION DU S.I.
IlexisteplusieurstypesdedéfinitionsduS.I.:lesdéfinitionsmulticritères,lesdéfinitions
fonctionnelles et les définitions statistiques. Les définitions multicritères et fonctionnelles sont
plus nettement rattachées à des thèses ou écoles de pensée.54
Les définitions multicritères découlent généralement de la théorie classique de la
concurrence (atomicité et fluidité du marché des produits et des facteurs de production, les
auteurs voient dans le S.I. une illustration de l'économie de marché "pure et parfaite" mais
segmentée c'est-à-dire non directement reliée au marché moderne).
Les définitions fonctionnelles sont inspirées des auteurs de la petite production
marchande. Elles mettentau centredeleurs préoccupationsles relations entre les deux secteurs
(moderne et informel) que l'analyse ne doit pas dissocier. L'aspect principalde l'analyse repose
sur le rôle que joue la petite production marchande dans le développement du capitalisme.
Les définitions empiriques et statistiques partent du fait que pour réaliser les enquêtes, il
faut choisir certains critères.Généralement quatre critères sont retenus (la situation dans la
profession, la situation de non enregistrement, la taille de l'entreprise, le niveau des revenus)
La définition du S.I. semble nécessaire, bien que les critères proposéssoient différents et
renseignent sur des divergences théoriques. La manière la plus simple de définir le S.I. est d'en
énumérer les principales activités et d'en mentionner un certain nombre de caractéristiques. Le
S.I. se caractérise par des activités à faible productivité et dotation en capital et sans structures
définies. Les entreprises ont essentiellement recours aux ressources locales et sont de caractère
familialavecuneorganisationrudimentaireouinexistante.Lesunitésdeproductionopèrentsur
une petite échelle et ont une capacité d'adaptation plus grande. Le marché échappe à tout
règlement et est ouvert à la concurrence. Les qualifications s'acquièrent en dehors du système
éducatif officiel et les sources de revenus sont essentiellement informelles. Telles sont les
principales caractéristiques qui ressortent à travers les études.
54
Cf. annexe 6 : Les différentes approches du S.I. en France.
Le rapport Kenya55 qui anotammentdonnéla notoriété auterme, analysele rôledu S.I.
dans le processus de développement et suggère une politique de promotion de ces activités.
Toutefois le rapport se refuse à définir le S.I. et l'appelle tout simplement "a way of doing
things" caractérisé comme suit : /
- facilité d'accès pour l'utilisateur ;
- utilisation de ressources locales ;
- propriété familiale ;
- échelle très réduite de la production ;
- technique à forte intensité de main-d'œuvre ;
- qualification acquise en dehors du système scolaire ;
- marchés échappant à toute réglementation et ouverts à la concurrence totale.
Par rapport à l'opposition moderne/traditionnel, les différences se situant au niveau de
l'organisation des activités et non de la technologie sur laquelle est fondée la division entre le
"moderne" et le "traditionnel".
On peut reprocher à cette définition du S.I. d'avoir des caractéristiques peu
opérationnelles.Les caractéristiques citées sontdifficilementutilisables pour les investigateurs
qui doivent pouvoir identifier les activités du dit secteur en tant que telles. De plus, des
difficultés d'analyse surgissent dans la mesure où certaines caractéristiques sont valables et
d'autres non. Pourtant la définition des caractéristiques utilisables sur le terrain s'avère
nécessaire. Empiriquement, la détermination des activités informelles implique une
observationdirecte,notammentunrecensementaucoursduqueluncritèresignificatifpeutêtre
utilisé.
C'est ainsi que la plupart des travaux en ASS utilisent le critère de mode de gestion, en
particulier la tenue d'une comptabilité. Là aussi il y a problème car le critère de distinction
purement administratif permet de confondre les entreprises fonctionnant dans des structures
quasi-modernes et ne tenant pas de comptabilité avec des entreprises du S.I.
Decefait,procéderpardéductionetdirequeleS.I.estcomposédel'ensembledes unités
deproductionetservicesquinetiennentpascomptedelacomptabilité,c'estmasquerlaréalité.
Les caractéristiques du S.I. mises en évidence dans les diverses études réalisées
conviennent particulièrement à certains cas mais sont difficiles à généraliser en raison de la
spécificité de ces activités, aboutissant à une multitude de définitions calquées sur la dualité de
l'économie. La multiplicité des définitions du S.I. s'explique par l'insistance mise surtelle ou
telle caractéristique de son fonctionnement. Mais ces caractéristiques mises en avant dans
toutes les études reflètent-elles la réalité ?
Au terme de cette analyse, il n'est pas facile de trouver une définition universelle du S.I..
Sur le plan statistique, une définition universelle a été adoptée, mais le S.I. est un secteur
55
BIT : "Emploi, revenus et égalité. Stratégie pour accroître l'emploi productif au Kenya", Genève 1972, p.61.
dynamique, non figé et lié au développement des pays concernés. Par conséquent la définition
donnée doit être modifiée à chaque étape de développement. La nature hétérogène des
activités fait qu'il n'est pas possible d'établir des frontières précises, ou de définir ces activités
à partir des critères universels. L'utilisation de vocabulaires différents (secteur informel ou
secteur non structuré,..) pour parler des mêmes réalités relève tout simplement d'une
différence d'interprétation.
P. HUGON56
présente un éventail de critères proposés pour définir le S.I.. Ces critères
peuvent se placer à plusieurs niveaux :
repérage statistique : le S.I. échappe aux moyens d'investigations habituels (producteurs
travaillant sans emplacement fixe, ne payant pas de patente ou d'impôt, n'ayant pas de
comptabilité, etc..) ;
caractères de l'unité de production : depuis le rapport KENYA, on retient les critères de la
facilité d'accès aux activités, l'échelle restreinte des opérations, la propriété familiale des
entreprises, les qualifications qui s'acquièrent en dehors du système scolaire officiel, des
marchés échappant à toute réglementation et ouverts à la concurrence ;
revenus : à ce niveau on distingue les possibilités de revenus "structurés" et "non structurés"
selon le critère de salaire et l'auto-emploi.
En effet certains auteurs utilisent le critère de l'intensité capitalistique, qui est en
corrélation avec la dimension de la firme. Le critère de l'intensité capitalistique permet de lier
la question des barrières à l'entrée, pour les producteurs, avec celle de l'accès aux marchés
financiers. Le critère de l'organisation sociale et juridique est utilisé pour définir un marché du
travail non protégé, sans système d'assurance sociale et non réglementé, qui délimite le champ
d'activités informelles.57
Par ailleurs, la dichotomie S.I./S.M. est fondée sur les caractéristiques des rapports
d'échange et la position économique par rapport à l'État. D'autres travaux ont essayé de
subdiviser le S.I. pour délimiter son champ et aboutir ainsi à une meilleure appréhension de
son degré de pertinence. Tout en prenant en compte l'hétérogénéité du secteur, ces travaux
56
HUGON (P.) :"SNS ou hétérogénéité des formes de production urbaine. Dualisme sectoriel ou soumission des
formes de production au capital. Peut-on dépasser le débat ?", in Revue Tiers Monde, T.XXI, n°82, avril-juin
1980.
57
MAZUMDAR (D.) : "Microeconomic Issues of Labor Market in development countries: Analysis and Policy
Implications", The World Bank, Washington D.C., 1989.
distinguent un S.I. traditionnel et un S.I. moderne. En effet, pour NIHAN58
, les activités du
bois, du métal, de la réparation électrique et mécanique et de la construction sont des activités
produisant des biens et services parallèles à ceux du secteur moderne et s'inscrivent par
conséquent dans le cadre d'un S.I. "moderne". Cependant ces subdivisions si simples
soient-elles ne sont pas négligeables, dans la mesure où le débat sur le degré de pertinence
portera désormais sur les activités du S.I. "moderne".
Les critères proposés sont descriptifs et, nous renseignent peu sur le caractère
dynamique du S.I.. Ce dynamisme ne peut être décelé que dans une perspective de recherche
globale qui tient compte des rapports qui pourraient exister entre le Si. et les autres secteurs de
l'économie.
Le rapport à la loi est le plus souvent utilisé comme critère pour repérer les activités
informelles. Toutefois il convient de distinguer dans le S.I. les activités illicites, telles que la
drogue, la criminalité... de celles qui sont licites. Dans le cas de l'ASS, on cite le critère de
l'inexistence de la comptabilité pour définir le S.I., sans pour autant se demander ce qui
poussent la plupart des entreprises à agir dans l'illégalité. Le prix de la légalité est inaccessible
pour la plupart des actifs évoluant dans le S.I. "Ce sont les régulations institutionnelles
perverses qui entravent la croissance de l'économie, inhibent l'esprit d'entreprise, interdisent
l'émergence d'une économie de marché réelle, postulée comme optimum"59
. "L'illégalité" dont
traite les auteurs n'a rien à voir avoir les activités répréhensibles. Si en effet ce secteur présente
des aspects "illégaux", c'est parce que les activités qui s'y déroulent ne peuvent observer la
réglementation en vigueur. De plus certaines dispositions législatives et réglementaires sont
totalement étrangères à la situation de ceux qui vivent exclusivement du S.I. "Autrement dit,
on se trouve dans de nombreux pays en voie de développent, dans une phase où
l'administration est en train d'asseoir son emprise, avec des faibles moyens et l'on ne saurait
donc considérer comme illégales les activités économiques qui, en elles-mêmes, n'ont rien de
répréhensible"60
.
Les critères purement quantitatifs tels que le nombre d'emplois, le niveau du chiffre
d'affaires, ne suffisent pas pour qualifier une activité de formelle ou d'informelle, nous
souligne FERCHIOU 61
. D'autres critères d'ordre qualitatif, parmi lesquels le degré
d'observation des législations fiscale, sociale du pays vient en premier lieu. Le degré
58
NIHAN (G.) : "Le secteur non structuré, signification, aire d'extension du concept et applications
expérimentales", in Revue Tiers Monde, T.XXII, n°82, avril-juin 1980.
59
DO SOTO (H.): "L'autre Sentier. La révolution informelle", La Découverte, Paris, 1994.
60
CHARMES (J.) : "Approche comptable, statistique et économique du secteur informel". Brochure AMIRA
n°61, 1991.
61
FERCHIOU (R.): "Micro-entreprises du secteur informel à Tunis, obstacles de caractère légal et institutionnel", BIT, Genève, 1990.
d'observation des différentes réglementations dépend du degré de contrôle que les entreprises
du S.I. escomptent subir de la part des différentes administrations. Quand l'activité informelle
n'est pas localisée, son contrôle devient difficile, par conséquent son degré d'observation
devient faible. Par contre le degré d'observation des textes réglementaires s'accroît quand
l'entreprise informelle est localisée. Dans la plupart des cas les entreprises essayent de
régulariser leur situation, dans la mesure où elles ne peuvent pas échapper au contrôle
municipal quand elles sont localisées.
II.2 - LA TYPOLOGIE DES ACTIVITÉS
L'importance des petits métiers et notamment de l'artisanat en ASS est une réalité qui a
marqué et ne cesse de marquer, jusqu'à nos jours, la vie économique.
En effet, pendant les années 60, le planificateur a négligé le secteur informel, considéré
comme un secteur à disparaître. Toutefois, il va connaître un essor avec les nouvelles
politiques de libéralisation économique : l'intérêt nouveau accordé au S.I. est l'envers de la
déception occasionnée par l'incapacité du secteur industriel à absorber les nouvelles
générations de travailleurs de plus en plus nombreux à se présenter sur le marché du travail62
.
Depuis quelques années, des expériences pilotes tendent à lever le voile sur l'importance
réelle jouée par le S.I. dans le fonctionnement des économies en voie de développement. La
démarche a été ainsi empirique, visant à situer le S.I. dans l'ensemble des branches
économiques.
Dans le cadre de cette démarche, ledit secteur est défini comme suit : "Le S.I. est constitué par
l'ensemble des activités monétaires non prises en compte par les statistiques classiques et la
comptabilité nationale"63
.
Notons que J. CHARMES considère cette définition comme étant une simple
constatation d'une démarche empirique, mais elle est d'une importance non négligeable dans la
mesure où elle permet de procéder à une analyse typologique et descriptive du S.I. (voir
tableau ci-dessous).
62
CHARMES (J.) : "Méthodes et résultats d'une meilleure évaluation des ressources humaines dans le SNS d'une
économie en voie de développement" in "Tunisie, quelles technologies, quel développement ?", G.R.E.D.E.T.,
éditions Salammbô, Tunis, 1983, page 163.
63
CHARMES (J.) : "Le secteur non structuré et l'économie du développement. Nécessité de sa prise en compte et
d'une reconsidération subséquente des théories et politiques de développement", in Séminaire sur l'économie du
développement, analyse en termes réels et monétaires, F.S.E.G., 27/28 avril 1983, page 118.
X : Existence de la catégorie.
O : Non existence de la catégorie.
: Correspondance entre deux catégories.
Source : "L'évaluation du SNS : méthodes, résultats, analyses, l'exemple de la
Tunisie", J. CHARMES, AMIRA brochure n°37, Paris, sept. 1982.
On distingue sept formes d'activités informelles en milieu urbain et rural non agricole,
réparties en deux secteurs selon leurs modalités d'exercice. Selon qu'elles s'exercent dans un
local, le S.I. "localisé", ou dans des locaux multiples, dans la rue ou à domicile, c'est le S.I.
"non-localisé".
Cette typologie, bien qu'elle soit descriptive, nous renseigne sur une difficulté
d'investigation qui prend une dimension différente du haut en bas de l'échelle des 7 catégories.
En effet, au fur et à mesure que s'accroît le degré de non structuration, et que baisse le niveau de
revenu retiré des activités concernées (passage de la catégorie 1 à la catégorie 7), s'accroît
parallèlement la difficulté d'appréhension des phénomènes d'où la nécessité de passer à des
techniques d'enquêtes quantitatives classiques portant sur les
SECTEURS D'ACTIVITÉ
Modalités FORMES Production Services Commerce
d'exercice D'ACTIVITE
Bois, métal,
cuir, textile,
habillement,
pain,
Mécanique,
électricité,
plomberie,
cordonnerie,
De détail, des
produits
alimentaires et
non
pâtisserie, services alimentaires
BTP personnels,
transport
1) Petites entreprises X X X
Secteur 2) Artisanat ou
non commerces
traditionnels
X X X
structuré 3) "Lustres",
localisé "amateurs", "casseurs"
et concurrents X X o
clandestins de toutes
sortes
4) Tâcherons et
Secteur travailleurs à façon
hors domicile
x
o
X
o
non
structuré
5) Marchands
ambulants X
X
non 6) Tâcherons et
localisé travailleurs à façon à
domicile (travail au
noir)
X X O
7) Travail à domicile X X O
Champ d'investigation pour les enquêtes sur le SNS au sens large (tableau n°2)
t
Secteur
Secteur
non
non
Structuré
Structuré
au sens au sens
strict
Large
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  • 1. UNIVESITE DES SCIENCES SOCIALES DE TOULOUSE LE SECTEUR INFORMELET LAFORMATION : UNE APPLICATION EN CENTRAFRIQUE T H E S E P O U R L E D O C T O R A T E N S C I E N C E S E C O N O M I Q U E S Présenté et soutenue le 19 février 1996 Par Prosper Didier GUEDOKO MEMBRES DU JURY Président : - Monsieur G. MOLINS-YSAL Professeur à l’Université des Sciences Sociales de Toulouse. Suffragants : - Monsieur M. CATIN Professeur à l’Université de Toulon et du Var. - Madame M.-P. BRUGNES Maître de conférences à l’Université de Toulouse - Monsieur J. BOUOIYOUR Maître de conférences à l’Université de Pau PRESIDENT DE LA THESE : Suffragants L’Université n’entend pas approuver, ni désapprouver les opinions particulières du candidat.
  • 3. REMERCIEMENTS Nous tenons à exprimer tout particulièrement notre gratitude à Madame Marie-Paule BRUGNES d'avoir accepté de diriger cette thèse, de nous encadrer et de suivre l'évolution jusqu'à sa réalisation. Malgré les multiples difficultés rencontrées au cours de cette recherche, ses conseils d'ordres conceptuel, méthodologique nous ont été d'une grande utilité. A Catherine BARON et Jamal BOUOIYOUR dont la lecture critique a été source d'encouragement, qui ont su nous consacrer le temps et le soutien dont nous avions besoin ; Nous exprimons également nos remerciements à Messieurs Marc PENOUIL et Jean-Pierre LACHAUD de l'Université de Bordeaux I qui ont bien voulu nous recevoir pour des entretiens qui nous ont apporté des éléments importants du sujet. Nous sommes redevables à l'égard de Fred FLUITMAN, et V. SETHURAMAN du B.I.T. qui nous ont aidés à élaborer et préciser nos idées lors des entretiens qu'ils nous ont accordé. Nousnemanqueronspasde remercierl'équipeduC.E.P.E.D. réunieautourde Monsieur Georges MOLINS-YSAL, de qui nous avons reçu la collaboration et l'encouragement qui font du C.E.P.E.D. un endroit stimulant et propice au travail. A nos parents et amis qui ont joué un rôle capital tant moral que matériel : Emmanuel OUAÏMON, Darhyo YAMANDJAN, Fidèle KABRAL, Alphonse AMODA, Paul OUAÏMON, Siméon NGOUMAPE, Jean-Didier KABRAL, Eric DONDON, Jean-Luc DONDON, Louis RIEU, Firmin KOYESSE, Ignace BANDASSA, Stéphane MAILLARD, Narcise KEMBY, Dany DIRAND, Bernard DEMARCHI. A la mémoire de mon oncle David YAMBERE et de mon père Joseph GUEDOKO. A ma mère Rébecca GUEDOKO...
  • 5. L'Afrique Sub Sahérienne (ASS) est la région du monde la plus frappée par la récession économique mondiale actuelle. La détérioration des conditions économiques, d'une part, l'augmentationdelapopulationactive,d'autrepart,ont conduitàunepression croissantesurle marché du travail urbain.Mais les possibilités d'emploi décroissent rapidement dans le secteur moderne.Parallèlement,elleconnaîtunecriseprofondedel'enseignement,àl'heureoùprèsde 50 %1 de sa population totale est encore illettrée. La plupart des bâtiments scolaires sont délabrés et nécessitent des travaux de remise en état. Étant donné qu'aucune nouvelle école n'est construite, la situation ne peut qu'empirer au fil des années. La demande de places dans l'enseignement augmente beaucoup plus rapidement que la capacité. Lorsqu'un enfant a la chanced'avoiruneplaceàl'école,ilsetrouveconfrontéàunepénuriedematérieldidactiqueet demanuelsscolaires,àunéquipementinsuffisantetàunpersonnelenseignantmalrémunéréet profondément démotivé. Un pays qui n'a pas les moyens de s'assurer une éducation descente et adaptée à ses besoins, voit ses perspectives de croissance réduites. L'Afrique est un continent riche dont les populations sont pauvres. Elle détient un certain nombre de records que nul ne lui envie : le taux le plus élevé de fécondité et de mortalité du monde, et le continent le plus touché par l'épidémie du SIDA;(sur 100 000 habitants, on compte 15 600 cas de SIDA).2 De façon notoire, la qualité des données macro-économiques est peu satisfaisante en Afrique au sud du Sahara, mais tous les indicateurs disponibles vont dans le même sens et permettentdedégagerdestendances:déclindes revenuspartête,baissedesproductionsetdes exportations...Pourtant,ungrandnombredepersonnestrouventleurs moyensd'existencedans le S.I. Il s'en suit l'abaissement du niveau de vie (devenu largement inférieur à ce qu'il était avant l'indépendance) et une augmentation du nombre de gens vivant dans la misère. L'environnement économique interne : - La substitution d'une production nationale aux importations présente des limites : les entreprises étaient subventionnées à partir de prélèvements sur lesecteur exportateur primaire, bénéficiaient des barrières douanières protectrices et de maintien de taux de changes forts. Même si leur production manufacturière a augmenté de 8 % par an pendant les années 60, le développement des industries manufacturières rencontre rapidement une série de limites : coûts de production élevés etstagnation delaproductivitédu fait des protectionsdouanières et de la présence fréquentedes monopoles, concurrence desimportations frauduleuses, étroitesse des marchés nationaux (sauf au Nigeria) et dépendance accrue des biens intermédiaires et des biens d'équipement sont à l'origine des goulots d'étranglement ; 1 NATIONS UNIES : "Rapport mondial sur le développement humain", Whashington, 1995. 2 NATIONS UNIES : Op.cit.
  • 6. - les infrastructures insuffisantes : le développement des infrastructures et le degré d'intégration interne des pays fournissent aussi une indication sur la plus ou moins grande flexibilité de ces économies. Cette insuffisance des infrastructures se combine souvent avec leur détérioration. La précarité des infrastructures ne doit pas, toutefois, être généralisée à tous les pays. En réalité, comme en témoigne le développement concentré dans les grandes villes, celui-ci tout en suscitant une croissance urbaine non maîtrisée a augmenté l'écart déjà existant entre les villes et le monde rural, mais encore a aggravé la baisse du niveau de vie de ces populations. En somme les politiques économiques se sont révélées peu efficaces et inappropriées. "L'échec des politiques économiques sera attribué à l'ignorance par les gouvernements des effets sur l'action de certaines variables qu'ils ne maîtrisent pas".3 La récession des années 80 et la phase d'ajustement structurel qui s'en est suivie ont contribué à la prolifération des activités informelles. Le secteur informel, durant cette période, est contraint d'absorber plus de main-d'œuvre que par le passé : partage des emplois, offre de toutes sortes de biens et de services, développement de la pluriactivité, etc. La restructuration du secteur public a engendré une mobilité de l'emploi salarial vers le mode d'emploi à propre compte4 . Il est clair que l'emploi dans le secteur moderne n'a pas connu une expansion suffisante pour absorber l'excédent de la main-d'œuvre urbaine dans les pays d'Afrique au sud du Sahara. Par conséquent on peut déduire que c'est le Si. qui absorbe l'essentiel de la main-d'œuvre. "L'expansion du S.I. ainsi que la contraction des salaires réels dans ce secteur constituent les principaux moyens qui ont permis au marché du travail de s'adapter à la crise quifrappe ces pays depuis 1980" 5 . L'emploi dans le S.I. a connu une croissance exponentielle (6,7%parandurantladernièredécennie)etreprésente60%desemploisdanslesvillesd'ASS, selon les estimations du PNUD6 . Le problème n'est plus celui du nombre d'emplois mais devient comment promouvoir la productivité dans le S.I. en améliorant les politiques d'éducation et de formation. Désormais, dans les villes d'ASS, ce sont les activités informelles qui du point de vue de l'emploi sont dominantes. Du fait de cette évolution non prévue, le système d'éducation et de formation se trouve de plus en plus déconnecté des besoins des sociétés. 3 KOULIBALY (M.) : "Libéralisme..Nouveau départ pour l'Afrique Noire", L'Harmattan, Paris, 1992. 4 LACHAUD (J. P) : "L'ajustement structurel et le marché du travail en Afrique francophone", OIT,Genève, Discussion Papers n°56,1993. 5 TROTIGNON (J.) : "Pourquoi les politiques d'ajustement ont-elles généralement mieux réussi en Asie du Sud-Est qu'en Afrique", Economie et statistique, n°264,1993-94. 6 NATIONS UNIES: op. cit. page 5.
  • 7. Le rapport pourtant ancien de la mission BIT sur le programme d'emploi au Kenya7 contient la plus grande partie des connaissances sur le secteur informel. Toutefois on a beaucoup appris depuis lors dans diverses parties du monde en développement8 . Durant les années 80, dans un contexte de crise économique, les États du Tiers Monde, africain en particulier, les organisations internationales, les chercheurs d'horizons différents ont focalisé leurs interrogations sur le secteur informel. Un grand nombre d'auteurs ont utilisé ce concept ces dernières années en essayant de le définir, mais ils n'ont pu aboutir à une unanimité. Les caractéristiques du fonctionnement du S.I. telles qu'elles ressortent des définitions reflètent-elles la réalité de ces activités urbaines et la place qu'elles occupent véritablement dans ces économies ? Les caractéristiques mises en évidence dans les diverses études conviennent particulièrement à certains cas mais sont difficiles à généraliser en raison de l'hétérogénéitédecesactivités.Lapléthoredes définitionssonttoutes calquéessurlecaractère dual de l'économie urbaine. On substitue à la division ancienne (secteur moderne/secteur traditionnel)mettantl'accentsurlatechnologie,l'oppositionsecteurmoderne/secteurinformel. Pour ôter au SI. son image négative, on insiste sur la forme de l'emploi (salarié opposé à l'auto-emploi). Quellesquesoientlesvariantesterminologiques(secteurinformel,secteurnonstructuré, petite production marchande, secteur non réglementé,..), il s'est dégagé au cours des années le rôle essentiel que peuvent jouer les activités informelles dans le processus de développement. Durantcettepériode,ledéséquilibreglobals'est accentué dans lamesureoù,comptetenudela situationéconomique,laprogressiondel'emploipublicaétéquasinulle. Dans cettesituation, il est souhaitable en vue d'accélérer le développement économique d'utiliser pleinement toutes les possibilités d'emploi, de production, de formation... que recèle le SX Si l'importancedes activitésinformelles est reconnueà l'unanimité, lapositionde ce secteur dans les politiques économiques reste liée aux différents objectifs qui peuvent lui être assignés (augmenter l'emploi, augmenter la production, jouer un rôle accru et efficace dans le domaine de la formation, etc....). En effet, le secteur informel se trouve projeté dans l'enjeu du développement économique et social.Dès lors la question qui se pose est comment le dynamiser ? Toutefois, concernant sa dynamisation deux questions peuvent être soulevées. 7 BIT : "Employment,Incomes and Equality. A.Strategy for Increasing Productive Employment in Kenya", Genève, 1972. 8 TURNHAM (D.), SALOME (B.), SCHWARZ (A.) : " Les nouvelles approches du secteur informel", OCDE, Paris, 1990.
  • 8. - comment peut-on mettre en place un système qui permette un apport efficace aux activités concernées ? - l'impact ou le rôle potentiel du secteur informel peut-il effectivement modifier, la nature, l'efficacité et les fonctions du système productif dans les domaines économiques ? De ces deuxinterrogations, il ressortquepour êtreviable les politiques doivent éviterde s'intéresser uniquement à ce secteur. Elles doivent intégrer une stratégie de développement ayant pour objectif l'amélioration des conditions économiques et sociales des pays concernés. Cette amélioration passe très largement par la formation dont doivent bénéficier les personnes travaillantdanssecteurinformel.Lespolitiquesd'incitation àlacréation despetites entreprises devientunmoyenessentieldelagestiondel'emploi.LesentreprisesduS.I.peuventcontribuer à atténuer la dégradation de l'emploi dans le secteur moderne à condition que des moyens institutionnelsadaptéssoientmiseenplace(simplificationdelalégislation,allégementdutaux d'impositionetcontrôleadministratif).Acela,ajoutonsquel'unedes conditionsessentielleàla création des petites entreprises serait que les pouvoirs publics facilitent vigoureusement la formation des futurs entrepreneurs des petites firmes9 . Cet argument se justifie à condition que l'objectif fixé entre autres soit de faire passer une partie des actifs "informels" vers des entreprises productives. Les entrepreneurs du S.I. citent souvent comme problèmes : la faiblesse et l'irrégularité de la demande et le manque de crédit, mais l'analyse économique révèle aussi d'autres difficultés : niveau d'instruction et de formation peu élevé, absence de méthode de gestion rigoureuse, concurrence entre les unités. La plupart des politiques de soutien au S.I. ont pris la forme de programmes d'aide aux entreprises, souvent complétés par une assistance technique en gestion, de conseil technique et de production ainsi que des aides en formation. Nous envisageons dans le cadre de cette étude d'analyser la formation dans et pour le secteur informel. En effet, poser le problème de la formation dans et pour le secteur informel revient à s'intéresser d'une part aux échanges d'informations existant dans le S.I. lui-même, donc à mettre en relief la dynamique de la formation en son sein ; et d'autre part, aux interrelations avec le système d'éducation et formation professionnelle. Par conséquent, cela revient à nous demander:quelsystèmedeformationpeutrentrerensymbioseavecletissusocio-économique de nombreux Etats d'ASS ? Comme la majorité des États d'ASS, la Centrafrique a vu s'éroder le capital humain durant ces dernières années, ce qui compromet ses chances de reprise et les perspectives de développement à long terme. L'enseignement et la formation ont généralement beaucoup souffert.Lecoûtdumatérieldidactiqueagrimpéenvaleurréelle,lessalairesdesenseignantset des formateurs ont diminué. La qualité de l'enseignement et de la formation 9 VERNIERES (M.) : "Formation, Emploi, enjeu économique et social", Cujas, Paris, 1993.
  • 9. s'en est durement ressentie. Les organismes de formation, en particulier, ont eu beaucoup de mal à entretenir et renouveler le matériel qui leur est indispensable pour l'apprentissage des différents métiers. Les organismes de formation sont souvent entièrement tournés vers le secteur moderne qui constitue pour eux un marché captif, et ont été incapables d'adapter leurs objectifs, leurs programmes aux besoins du S.I. en pleine expansion. Pour pouvoir s'imposer sur des marchés où la concurrence est désormais deplus en plus vive, une entreprise doit être capable de s'adapter. Or sa capacité d'adaptation dépend de la qualité, c'est-à-dire du degré d'instruction et de formation de ses dirigeants et de son personnel en général. La mutation technique a fait ressortir que la formation d'une bonne partie de la main-d'œuvre devient une priorité essentielle. L'enseignement et la formation doivent ajuster leurs objectifs, programmes et méthodes afin de répondre aux besoins de la main-d'œuvre des entreprises du S.I. et d'établir des liens accrus avec celle-ci. Un secteur informel dynamique favorisera le développement et une distribution plus équitable, plus large des avantages de la croissance parmi la population. Dans le passé, les politiqueséconomiquesenASSnemettaientl'accentquesurlesecteurmodernedel'économie, seul capable d'entraînerle développement de ces pays. Plus récemment,l'ajustement structurel vise à établir un contexte macro-économique favorable au secteur privé et donc au S.I. Toutefois, des obstacles d'ordre institutionnel et légal subsistent et empêchent souvent une réaction positive d'offre additionnelle de produits et de services de la part des entreprises du S.I. Les efforts doivent être axés sur la mise en place d'incitation à la concurrence et à l'amélioration du contexte juridique et réglementaire. Nous pouvons probablement affirmer que les capacités sont au cœur même des débats sur le S.I. La capacité de succès d'une entreprise ou d'un entrepreneur est déterminée par une multitude d'éléments: l'état des infrastructures, l'accès à des facteurs de production, les compétences de ceux qui participent au processus (à tous les niveaux). Nous nous tournons vers l'éducation et la formation en tant que sources probablement majeures de l'acquisition des capacités. Les relations entre l'éducation et la croissance sont importantes. Dans les domaines de la formation professionnelle et de l'effort technologique, l'expérience africaine s'est avérée là aussi décevante. Confrontés à de multiples problèmes à court terme, la plupart des pays Africains au sud du Sahara ont tendance à accorder moins de priorité à l'éducation depuis le début des années 80.Maisonconstatequelesrestrictionsbudgétairesontsurtoutfrappél'enseignementprimaire et relativement peu le supérieur10 . Le contexte de crise amène à s'interroger sur la finalité du système éducatif. On se demande s'il vaut la peine de consentir 10 BANQUE MONDIALE : "Congrès mondial sur l'éducation pour tous", Thaïlande, 1990.
  • 10. — Page 10 — ces sacrifices pour former des chômeurs ou des jeunes gens qui n'auront d'autres issues qu'un emploi dans le S.I. ne correspondant en rien à la formation qu'ils ont reçue. A la base des sociétés modernes, l'accroissement de l'efficacité des individus, et pas seulement de quelques hommes, mais de la grande masse de la population occupe une place essentielle. Cette réflexion conduit, à donner une priorité à la formation pour le S.I. D'où la question centrale : quel système de formation, compte tenu de l'organisation socio-économique en ASS, ou encore, comment utiliser le S.I. et ses potentialités pour assurer la formation du plus grand nombre si l'on considère que la formation est un facteur clé du développement ? Il est une nécessité que la capacité du système de formation dans son ensemble réponde également aux besoins du S.I. Le système de formation ne doit pas être conçu qu'en fonction des seuls besoins du secteur moderne. Parallèlement à la crise des structures productives modernes, a été soulevé le problème de l'inadaptabilité entre les politiques économiques et les politiques de formationdans les paysd'Afrique auSud du Sahara11 . Les exigences du travail et de l'emploi mettent encausela visiondualistedela formation (oùl'éducation scolaires'oppose aux autres types de formation traditionnelle ou extra-scolaire). Ce constat soulève dès lors la question de revalorisation des potentiels de formation inhérents aux structures socio-économiques telles que le S.I. L'incapacité des systèmes de formation classique à se généraliser ou encore leur inefficacité ne posent-elles pas la question de la revalorisation de la formation sur le tas dans le S.I. ? Il sera indispensable d'analyser le processus d'acquisition de formation dans le S.I. Les études12 montrent l'existence au sein du S.I. d'un processus d'apprentissage lié à la structure de production (donc au niveau technique des entreprises considérées). Face à l'incapacité de la formation professionnelle, l'apprentissage sur le tas s'est révélé un mode d'acquisition de compétence, de savoir-faire efficace et très développé dans les pays d'Afrique subsaharienne."Entoutétatdecause,ilnoussemblecertainquelaconcurrencepouruneplace d'apprentissagedisponiblenepourraques'accroîtreavecletemps comptetenudunombredes laissés-pour-compte du système scolaire et des profonds déséquilibres dans l'allocation globaledelamain-d'œuvre".13 Prèsde88%desentrepreneurs ayantdesapprentisdéclarentles former et disent que, dans l'ensemble, la formation dispensée est d'un niveau satisfaisant. En dispensant une formation dans le S.I., les petits entrepreneurs apportent une solution à ce problème capital et contribuent ainsi à l'effort du développement 11Cf.CONFERENCE DES MINISTRES DE L'EDUCATION: : "Rapport final",Harare, UNESCO, 1982. 12 STACE(B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sousla directionde SALOME (B.) : "Acquisitionde compétence dans les micro-entreprises: Leçons tirées de l'afrique de l'Ouest", OCDE, Paris, 1994. 13 MALDONADO (C), LE BOTERF (G.) : "Urbanisation, secteur informel et emploi: L'apprentissage et les apprentis dans les petits méties urbains, le cas de l'afrique francophone", BIT, Genève, 1985.
  • 11. économique. Pour un nombre croissant des jeunes, les activités informelles représentent une alternativevalableauproblèmeduchômage,d'autant plusquelaformationassuréepermetune insertionàunniveauproductif.Endehorsdesactivitéscommerciales,lerôleessentielquejoue le S.I. en matière de formation est admis par la plupart des études14 . Dans certains cas, l'apprentissage sur le tas dans le S.I. peut s'analyser comme un investissement en capital humain.Certainsapprentissevoientobligésdepayerauxpatronsunecertainesomme.Dansla plupartdesvillesafricainesl'apprentissageconstituelaphaseinitialeettemporairedel'emploi, et joue un rôle essentiel dans le fonctionnement de ces petites activités informelles. Pour bon nombre d'entrepreneurs africains, c'est la route qui conduit au succès. Et nous montrerons que la formation dispensée dans le S.I. répond aux besoins socio-économiques d'une grande partie des populations. Parmi les formes d'acquisition de qualification proposées à la main-d'œuvre, l'apprentissage sur le tas ou la formation donnée sur le heu de travail est celle qui concerne le plus grand nombre de travailleurs..., dans les ateliers urbains, il constitue évidemment la modalitélaplusimportantedetransmissiondetechniquesconduisantàuneéventuellemaîtrise de métier. Cette formation acquise dans le S.I. débouche sur des résultats socio-économiques satisfaisants à court tenue. Ce qui nous amène à poser la question suivante L'apprentissage sur le tas ou le mode d'acquisition des qualifications dans le S.I. peut-il être un élément transformateur ou catalyseur de la formation en Centrafrique ? La formation dispensée dans le S.I. touche un grand nombre de jeunes. Cette formation qui présente des aspects extrêmement positifs doit être consolidée par des actions appropriées. Eneffet,lesrapportsentreleS.I.etlesystèmedeformationpeuventsesituerenamont et en aval des entreprises considérées. Les travailleurs du S.I. viennent d'horizons différents, soit des entreprises, soit des centres d'enseignement, etc. Nous nous attacherons à montrer l'intérêt pour les politiques éducatives et de formation à prendre en compte l'apprentissage sur le tas dansleursorientationsnouvelles. LesrésultatsdesexpériencesduBIT15 relativesauxvillesde Bamako, Lomé, etc., mettent en relief les possibilités de formation que recèle le S.I.; il contribueàladiffusiond'anciennesetdenouvellescompétences.Ilyauralieudepréciserdans quelle mesure l'apprentissage et la formation générale peuvent conditionner les résultats obtenusdans laproduction. Les études16 montrentqu'unepartiedestravailleursdu S.I.sont des analphabètes, cependant on note que 14 MALDONADO (C.) : Op.cit. page 10, STACE (B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sous la direction de SALOME (B.) : Op.cit. page 10. 15urr: "Les petits producteurs urbains d'Afrique francophone", Genève, 1987. 16 BIT : Op.cit. page 11.
  • 12. l'expansion courante des activités informelles dans les villes d'ASS s'accompagne d'un paradoxe : l'arrivée croissante d'un grand nombre de jeunes issus des structures éducatives. QueltypedeformationpeutstimulerledynamismeduS.I.ouencore,lacirculationentre les deux secteurs n'est-elle pas favorisée par l'alphabétisation et la montée du niveau d'éducation ? Nous nous baserons sur le fait que l'accumulation du capital physique reste insuffisante pour atteindre une croissance du S.I. et insisterons sur le rôle du capital humain qui s'est avéré un facteur fondamental de la croissance de la productivité. Il s'agira de mettre en évidence la contribution qualitative du travail à la croissance du S.I. On a remarqué que ce sont des combinaisons de formations traditionnelles et modernes qui sont observées dans le S.I.. Des enquêtes17 montrent que ceux dont le niveau d'instruction est élevé se trouvent généralement dans les métiers les mieux rémunérés, faisant appel à des connaissances techniques, tandis que les moins instruits se retrouvent dans les activités marginales. Pour cette analyse, il convient de souligner que l'idée selon laquelle l'éducation est la clé de la croissance, celle qui générerait l1 accroissement de la productivité, la modernisation de l'industrie et l'agriculture, etc. remonte au début des années 60, où plusieurs économistes (BECKER, SCHULTZ,.. .)18 avaient mis en évidence la contribution qualitative du travail à la croissance économique. L'éducation augmente la part des gens instruits dans la société et exerce un effet multiplicateur sur la demande des biens et services ; elle génère ainsi la croissance économique toujours plus élevée, autrement dit, il existerait un lien direct de causalitéentrelascolaritéetledéveloppementéconomique.Ildécoulede lathéorieducapital humainlaconceptionselonlaquellel'éducationetlaformationgénèrent,chezlesbénéficiaires de ces services, une augmentation de leurs compétences et leurs connaissances entraînant une amélioration de leur productivité (elle-même source de revenus pour les bénéficiaires). En ce sens, l'éducation et la formation des acteurs du S.I. doit alors être entendue comme stratégiede dynamisationdecesecteur.L'accumulationducapitalhumainaincontestablementinfluencéle renouveau des théories de la croissance endogène, ROMER(1986)19 , LUCAS (1988)20 . L'accumulation du capital physique reste insuffisante pour atteindre une croissance de long terme, dans la mesure où la production est selon les néoclassiques soumise à des rendements marginaux décroissants. Les auteurs insistent sur le 17 STACE (B.), FLUITMAN (F.), OUDIN (X.), CLIVE (S.), sous la direction de SALOME (B.): Op.cit. 18 BECKER (G. S):"Human capital: A theorical and empirical analysis with Special reference to education" New-York, 2° Edition 1975. SCHULTZ (T.W.):"Investment in human capital", The Free Press, 1971. 19 ROMER (P.M.):"Increasing Returns and Long-Run Growth", Journal of Political Economy, vol.94, n°5,1986. 20 LUCAS, (R.):"On the Mechanics of Economic Development", Journal of Monetary Economics, 22, 1988.
  • 13. rôle du capital humain sur la croissance de la productivité. L'accumulation du capital humain implique des effets externes importants et des rendements d'échelle croissants. En posant comme hypothèse que la scolarité est généralement associée à un meilleur coefficient de productivité dans la mesure où elle influe sur les attitudes, les motivations, nous allons montrer que l'éducation favoriserait l'esprit d'entreprise et l'autonomie des artisans en vue d'une gestion courante de leurs activités. Si les expériences d'appui en formation du BIT sont globalement satisfaisantes, ne soulèvent-elles pas des limites ? "L'intervention par les projets et programmes ne créera-t-elle pas les défauts du secteur moderne à la petite entreprise ?" 21 . Compte tenu de l'hétérogénéité des activités informelles quels types d'actions peuvent contribuer efficacement à dynamiser le S.I. La nature de la recherche nous a conduit à une méthode empirique qui passe par les étapes suivantes: - Collecte de l'information : globalement, les données que nous utilisons proviennent du Ministère de l'Économie, du Plan, des Statistiques et de la coopération internationale Centrafricain, du Centre d'études Africaines (Bordeaux I), des organismes internationaux tels que le BIT, l'OCDE, et la BANQUE MONDIALE. - Questionnaire:UneenquêteaétéentreprisedanslavilledeBanguienvuedemettreen lumière le phénomène de l'apprentissage sur le tas dans le S.I. - Étude documentaire : celle-ci a permis d'établir une comparaison entre les différentes notions et perceptionsdusujet. Elle aide à mieux comprendre et bien cernerle concept du S.I., afin de mieux orienter notre analyse. Enfin, l'analyse de l'ensemble de ces données permet de préciser la place qu'occupe le S.I. dans les stratégies de développement et de proposer des solutions de sa promotion. C'est dans cette direction que s'inscrit notre recherche. Ils'agira,danslecasdelavilledeBangui,demontrerquel'apprentissagedoitêtreprisen comptedansunsystèmedeformationencrise(carencedelaformationtechnique)etdemonter que les interventions en formation destinées au S.I. doivent tenir compte des facteurs tant endogènesqu'exogènes.S'ilestprobablequ'unemeilleureconnaissancetechniqueetdegestion accroîtra l'efficacité des entreprises les plus dynamiques, la question reste difficile à résoudre en ce qui concerne la totalité du S.I. La Centrafrique n'échappe pas à cette problématique. La connaissance du S.I. demeure extrêmement floue et a nécessité la 21 ELSENHANS (H.) : "Promotion du secteur informel ou promotion de son environnement en amont ou en aval ? SFAX, nov.1990.
  • 14. réalisation d'une investigation empirique (recensement des unités économiques de Bangui, DSEE, 1990). La mise en évidence du rôle du S.I. dans les économies d'ASS et de la formation pour ce secteur renvoie à deux niveaux d'analyse distincts, chacun faisant l'objet d'une partie spécifique. Étant donné les différentes interprétations théoriques des activités informelles,, l'évaluation des apports et des limites de celles-ci constituera la première étape. Par la suite, après avoir situé le contexte économique dans lequel évolue le S.I., nous analyserons le rôle essentiel que jouent les activités informelles en Afrique subsaharienne, et en particulier son importance dans la ville de Bangui (première partie). Dans un premier chapitre, il nous est apparu nécessaire d'évaluer l'approche théorique du S.I. dans l'analyse du sous-développement. La difficulté que présentent les différentes approches du S.I. est prouvée par la multiplicité des termes utilisés pour désigner ce secteur (secteur informel, secteur non structuré, petite production marchande, secteur non réglementé...) (section I). Il existe plusieurs types de définitions du S.I. (les définitions multicritères, les définitions fonctionnelles et les définitions statistiques) qui sont rattachées à des thèses ou écoles de pensée22 (section II). La mise en évidence du rôle du S.I. dans le processus de développement en ASS constitueralechapitreII.Uneprofondemisèrerègneaujourd'huienAfriqueausudduSahara, elle revêt toute les formes: reculde laproduction, famine.... Dans les années 70,l'ASS a mené un combat pour le développement ; dans les années 80, elle lutte pour sa survie (section I). La contributionduS.I.àl'économieseraabordéeentermesd'emploi,derevenusetd'accumulation du capital, cependant la question de la capacité technologique du S.I. a toujours été négligée (section II). Le S.I. à Bangui sera abordé dans le chapitre III. Le recensement des unités économiques de Bangui (1990) a révélé, si besoin était, l'importance du S.I. Seulement 249 établissements sur 19 820 ont déclaré tenir une comptabilité conformément aux conventions communément admises, en conséquence98 % des unités recensées relèventdu S.I. (section I). Le recensement a permis de repérer près de 19 570 entreprises employant 30 442 personnes dans le S.I. à Bangui (section II). Comme nous l'avons souligné dans le chapitre précédent, l'accumulation du capital dans le S.I. soulève des difficultés dans l'interprétation des résultats. Onretrouveicil'oppositionentrelesactivitésinformelles évolutives etles activitésinformelles involutives (section III). On relève plusieurs niveaux d'actifs immobilisés dans le S.I. L'examen des résultats de l'enquête nous donnera des informations sur l'importance, la croissance et le financement du capital fixe (section IV). 22 Cf. annexe n° 6 : Les différentes approches du secteur informel en France.
  • 15. En se situantdans une optique detransition23 , nous montrerons quela dynamique duprocessus de transition des unités informelles ne dépend pas uniquement du comportement des entreprises (faiblesse du capital humain), mais qu'elle est étroitementliée àson environnement socio-économique et politique (sectionV). Nous concentrerons notre attention dans la seconde partie sur les potentialités de formation que cettemodalité d'apprentissage recèleen examinantsa contribution àladiffusion dusavoir-faire.Comptetenudel'importancedesstructuresscolairesetdel'apprentissagesurle tas comme instruments de qualification, il s' est avéré nécessaire au préalable de dégager les caractéristiques de leur fonctionnement dans la mesure ou leurs interrelations permettront de comprendre les déterminants qui ont motivé l'entrée en apprentissage. La conception selon laquelle l'éducation et la formation peuvent jouer un rôle moteur* dans le développement trouve son explication dans la théorie du capital humain traitée au chapitreIV.Lecapitalhumainpeutêtredéfinicommel'ensembledesqualifications,aptitudes et des connaissances dont bénéficie l'homme et qui améliorent ses revenus monétaires et psychiques"24 . Le renouveau des théories de la croissance endogène vers les années 80 témoigne de l'intérêt qu'on accorde aux investissements en éducation et formation dans le processus de développement (section I). Dans les années 70, le taux de scolarisation global a fait un bon remarquable (2là 38%), tandis que dans la décennie 90, on note une légère régression (36%). Les efforts entrepris dans les décennies passées ont du mal à suivre la demande induite par l'accroissement démographique. Le diagnostic du système d'éducation et de formation en ASS fait apparaître un faible taux de scolarisation technique 6,7%25 . la situation est d'autant plus dramatique que la crise économique a conduit tous les gouvernements à adopter des budgets d'austérité (section II). Les efforts massifs en vue de doter les jeunes centrafricains d'un bagage scolaire minimum sont loin d'atteindre leurs objectifscarlamoitiédesjeunesdelagénérationresteàl'écartdel'école.Toutefoisces mêmes effortsontcrééunefortedemandequi,fautedestructuresd'accueilalternatives,atendanceàse répercuter à tous les niveaux de l'enseignement général (section III). 23 Le processus de transition peut être appréhendé à deux niveaux : - au niveau micro-économique, la transition est considérée comme le passage d'une entreprise informelle au secteur moderne. Ces passages sont souvent exceptionnels ; toutefois ces entreprises sont difficilement discernables des autres entreprises modernes, rien ne permet d'infirmer qu'un nombre d'entreprises modernes n'aient débuté dans le SI. - au niveau macro-économique, la transition est considérée comme un changement progressif de la structure des économies en voie de développement. Cette approche insiste sur le caractère structurel de la transition, en limitant l'importance des caractères d'accumulation de capital et de gestion pour mieux souligner le poids des mutations culturelles et sociales dans ce processus. 24 BECKER (G. S): "Human capital: A theorical and empirical analysis with Spécial référence to éducation", New-York, 2° Edition 1975. 25 NATIONS UNIES : "Rapport mondial sur le développement humain", Whashington, 1995.
  • 16. Une étude de la dynamique de la formation au sein des unités informelles peut nous éclairer sur le rôle formateur du S.I. traité au chapitre V. Quoiqu'il en soit, toutes activités confondues, la tendance est à l'accroissement de la demande de formation ; celle-ci est nettement plus faible dans les activités de commerce et de l'artisanat traditionnel (section I). Unautrepointquerévèlel'analyseduS.I.estquelesdemandesd'apprentissagesedirigentvers les métiers nouveaux. Pour ce faire nous nous proposons de dégager les éléments significatifs du processus d'acquisition des qualifications pratiques au sein des unités du S.I. (section II). Lerapportentrelacapacitédes'informeretl'accroissementdelaproductiondansleS.I.a été établi de façon irréfutable. Seule une action soutenue visant la transmission et le développement du savoir adapté aux réalités locales nous permettra de mobiliser les analphabètes du S.I., et pourra développer leur aptitude à affronter l'avenir, cet aspect est abordé dans le chapitreVI. C'est pourquoi l'apport bénéfique de l'alphabétisation et de l'éducation de base des acteurs du S.I. peut être des moyen de les munir d'un code de bonne conduite et de les tourner vers un avenir que seul un apprentissage innovateur peut aider à maîtriser. L'éducation de base est celle qui fait acquérir à l'individu, dans un contexte historique, social et linguistique déterminé, un minimum de connaissances, d'aptitudes et d'attitudeslui permettantde comprendreson environnement,d'interagir avec lui,depoursuivre son éducation et sa formation au sein de la société et de participer plus efficacement au développement économique social et culturel de celle-ci (section I). La formation professionnelle pour le S.I. constitue un volet important de l'aide au S.I. Elle passe par une organisation des métiers et un regroupement des artisans. Vu les différentes situations, nous pouvons avancer comme hypothèse que les actions de formation en faveur du S.I. doivent prendre en compte les intérêts des parties en présence. Il s'agira donc d'une participation négociée avec les différents acteurs. Les relations entre le système de formation scolaire et la formation extra-scolaire doivent être prises en compte (section II). Cette thèse qui s'articule donc en deux parties, l'une conduisant à évaluer le rôle du S.I dans le développement, et l'autre mettant l'accent sur la nécessité de la formation pour le S.I, montre le rôle que peuvent jouer les politiques d'éducation et de formation dans l'amélioration de la productivité du S.I
  • 17. SOMMAIRE PARTIE I : LE SECTEUR INFORMEL DANS LE PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT Chapitre I : Emergence et approfondissement de la notion du secteur informel dans l'analyse du sous-développement Section I : Approche théorique de la notion de secteur informel (S.L) Section II : Contours et définitions du secteur informel Chapitre II : Rôle du secteur informel en Afrique Subsaharienne (ASS) Section I : Le contexte économique de TAS S Section : Contribution du secteur informel au développement de 1ASS Chapitre LTI : Le secteur informel à Bangui Section I :Présentation des établissements du secteur informel à Bangui Section II :La contribution à l'emploi Section HI :La contribution au revenu Section IV :La contribution à l'accumulation du capital Section V :Les obstacles au développement du secteur informel
  • 18. PARTIE II : LA FORMATION DANS ET POUR LE SECTEUR INFORMEL Chapitre IV : Le rôle de l'éducation et de la formation dans le développement Section I : Approche théorique du problème éducation-développement Section II : Les politiques éducatives et de formation en ASS Section ni : Analyse du système d'éducation et de formation en Centrafrique Chapitre V : La formation dans le secteur informel Section I : L'apprentissage sur le tas dans le secteur informel Section II :Présentation des résultats de l1 enquête personnelle Chapitre VI : La formation pour le secteur informel Section I : La formation générale pour le secteur informel Section II : La formation professionnelle pour le secteur informel
  • 19. PREMIERE PARTIE : LE SECTEUR INFORMEL DANS LE PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT Chapitre I : Emergence et approfondissement de la notion du secteur informel dans l'analyse du sous-développement Chapitre II : Rôle du secteur informel en Afrique Subsaharienne (ASS) Chapitre III : Le secteur informel à Bangui
  • 20. INTRODUCTION DE LA PREMIÈRE PARTIE Telles qu'elles ont été conçues après la deuxième guerre mondiale en ASS, les stratégies axéessurlacroissancedirigeaientdepréférencelesinvestissementsverslesecteurmodernede l'économie selon les modèles dualistes (se développer consistait à substituer les activités dites "modernes" aux activités dites "traditionnelles"). "L'opposition entre ces deux réalités a servi de fondements aux schémas dualistes, mais même les plus virulents critiques du dualisme ont été amenés à décrire le développement à partir de la substitution de structures capitalistiques, techniciennes, organisées, tournées vers le marché et l'accumulation à des structures caractérisées par la. prédominance du travail, par la lente évolution des technologies de l'outil,par la prédominance de l'organisationfamiliale etpar autoconsommation"26 . L'opinion qui prévalait était qu'une croissance rapide et durable réglerait les problèmes de la répartition des revenus, de la pauvreté... Les pouvoirs publics ne se souciaient pas de redistribuer les richesses et minimisaient également le rôle de la consommation courante pour encourager le développement ; cela résulte de l'idée qu'une redistribution du pouvoir d'achat en faveur des plus défavorisés risque de compromettre la croissance en réduisant l'épargne et l'investissement. LeS.I.asansdoutetoujoursexistéenASS.,maiscen'estquedans les années 70qu'ilest apparu dans la littérature économique , et a été particulièrement vulgarisé par les travaux du BIT et de la Banque mondiale. Le point de départ est le constat selon lequel le chômage apparent ne progressait pas en proportion de l'écart croissant entre augmentation de la population en âge de travailler et les créations d'emplois dans le secteur moderne. Une multitude de petites activités occupent une place prépondérante dans ces économies en raison desespotentialités en matièred'emplois,dedistribution de revenus, desatisfaction des besoins élémentaire, et pourtant elles sont évacuées des statistiques officielles et très peu intégrées aux politiques de développement économique et social. La diversité des activités a eu comme corollaire la variété des termes utilisés pour les qualifier (secteur non structuré, secteur non organisé,petiteproductionmarchande...).Au-delàdesincertitudesconceptuellesquiontabouti à diverses interprétations, nous tenterons de souligner l'importance tant quantitative que qualitative du phénomène. D'autres événements plus récents ont accéléré le développement du secteur informel : la récession des années 80 et les politiques d'ajustement structurel qui s'en sont suivies en ASS y ont contribué. Les entreprises du secteur moderne, surtout celles du secteur public furent contraintes de réduire leurs effectifs et salaires. L'objectif de cette première partie vise à analyser le rôle que joue le S.I. dans le développement des économies d'Afrique subsaharienne, et plus 26 PENOUIL (M.) : "Les activités informelles : réalités méconnues..., espérances illusoires ?", Problèmes Economiques, n°2196,1990.
  • 21. particulièrement dans le cas de la ville de Bangui. Cette analyse est incontournable dans le cadre de notre travail, car elle nous permettra d'aborder les efforts de recherche et de poser un diagnostic quant aux résultats des diverses investigations (BIT, CEAN, DSEE 27 ). La dynamisation du S.I. rencontre de nombreux obstacles, à la fois politiques, sociaux et économiques. Nous avons choisi d'étudier les activités les plus représentatives du secteur informel urbain de production et de services c'est à dire celles du secteur informel dit "moderne"28 . Pour atteindre notre objectif nous allons essayer d'analyser les entreprises, à travers leurs rôles de création d'emplois, d'accumulation de capital et de distribution de revenu ; ainsi que les relations qu'elles entretiennent avec le reste de l'économie. Comment les entrepreneurs du S.I. combinent-ils les facteurs de production ? Quelle est la structure de production de la main-d'œuvreemployée?Etquellessontl'importanceetl'originedesmoyensfinanciersmisen œuvre ? La compréhension des activités informelles urbaines ne nécessite-t-elle pas l'examen approfondi des relations en amont (achats d'équipement...) et en aval (structure de la clientèle) qu'elles entretiennent avec leur environnement ? D'autres événements plus récents ont accéléré le développement du secteur informel. La récession des années 80 et les politiques d'ajustement structurel qui s'en sont suivis en ASS y ontcontribué.Lesentreprisesdusecteurmoderne,surtoutcellesdupublicfurentcontraintesde réduire leur effectif et réduire les salaires. En ASS, selon les estimations l'emploi dans le S.I. a progressé de 6,7% par an de 1980 à 1985 ; durant cette période le secteur moderne n'a absorbé que 6% des nouveaux venus sur le marché du travail contre 75% pour le S.I.29 Etant donné le vif débat opposant plusieurs auteurs sur l'interprétation des activités informelles, il serait utile d'exposer ce débat pour dégager les analyses nous semblant pertinentesàmêmedecomprendrelasituationactuelle.Nous aborderonsdonc,dans chapitreI, l'émergence et l'approfondissement de la notion du S.I. dans l'analyse du sous-développement. Danslechapitre H,serontétudiés lesdifférents apportsdu S.I.dans les économies aux niveaux de l'emploi, de la distribution de revenus, de l'accumulation et de la maîtrise de la technologie, le chapitre IIIsera consacré à l'analyse du S.I. dans la ville de Bangui à partir des données dont nous disposons. 27 BIT : "Recensement du secteur informel dans les villes d'Afrique francophone", Genève, 1987. CEAN : "Recensement du secteur informel à Bangui", 1982. DSEE : "Recensement des unités et communes de Bangui", 1990. 28 Comme nous l'avions signalé dans l'introduction générale, il existe aussi un S.I. en milieu rural. 29OIT-PECTA: "Rappoit sur l'emploi en Afrique", Adis Abeba, 1989.
  • 22. CHAPITRE I : EMERGENCE ET APPROFONDISSEMENT DE LA NOTION DE SECTEUR INFORMEL (S.I.) DANS L'ANALYSE DU SOUS-DÉVELOPPEMENT INTRODUCTION Dès son origine, la notion du S.I. s'était prêtée à deux interprétations différentes : au départ. HART30 situait l'analyse au niveau des ménages et posait le problème du revenu informel comme un revenu complémentaire devenu nécessaire devant les limites de la solidarité familiale. En considérant la combinaison des revenus formels et informels, l'auteur examinait les stratégies des ménages en matière d'emploi et de revenu. Le BIT, quant à lui, mène l'analyse en terme d'unités de production et tente de mesurer la contribution du S.I. dans une perspective de réévaluation du PIB, en préconisant des politiques visant à drainer la composante la plus dynamique vers le stade des petites entreprises. Trente ans après, c'est l'optique des organismes internationaux (BIT, BIRD) qui est retenueparlaplupartdesanalysesdu secteurinformel."Iln'apas étérarequedesuniversitaires ou des chercheurs très opposés politiquement aux institutions internationales adoptent leur vision (sectorialiste)"31. Il s'agira de cerner la portée économique du S.I., relativement aux interrogations qui se posent, ainsi que les différentes façons de les aborder. Afin d'atteindre cet objectif le chapitre sera divisé en deux sections. Dans la première section, en abordant l'approche théorique, nous retracerons l'évolution de la notion du S.I., afin de permettre de situer l'intérêt qu'elle suscite; nous analyserons par la suite les différentes approches (dualiste et de la petite production marchande) du S.I.. La seconde section donnera un aperçu des principaux problèmes soulevés par la définition du S.I.. En somme la description analytique que nous mènerons vise à vérifier la validité de la distinction secteur moderne/secteur informel dans les PVD. 30 HART (K) :"Informal incomes oportunities and urban employment in Ghana", présenté à la conférence sur l'emploi urbain en Afrique, Institute of development Studies, University of Sussex, publié dans le Journal of Modern African Studies, II, 1, 1973, p.61-89. 31 LAUTIER (B.) : "L'économie informelle dans le tiers monde", La Découverte, Paris, 1994.
  • 23. SECTION I : APPROCHE THÉORIQUE DE LA NOTION DE SECTEUR INFORMEL La difficulté que présentent les différentes approches du S.I. est prouvée par la multiplicitédestermesutiliséspourdésignercesecteur(secteurinformel,secteurnonstructuré, petite production marchande, secteur non réglementé...). Le processus de développement engagé dans les pays d'ASS revêt deux formes : le "développement transfert" résultant de l'imitation des structures et pratiques des pays développés dans le domaine économique, ceci en raison de la place du capital étranger et de l'utilisation de latechnologie. Le "développementtransfert" se retrouve dansd'autres domaines : structures éducatives, politiques, administratives et juridiques qui sont souvent des mutations directes d'un modèle occidental. le "développement spontané" est l'autre forme du processus de développement. Il est le fait du dynamisme empirique de la base humaine de la société cherchant à s'adapter à ce qui la séduit dans l'autre forme de civilisation. Les populations ne restent pas figées dans leurs pratiques ancestrales. Elles évoluent à un rythme différent et selon des modalités différentes. Cette évolution n'est pas coupée des influences extérieures et ne se fait pas par substitution d'une structure à une autre, mais par une lente évolution, résultant de multiples adaptations réalisées. Tout en acceptant l'essentiel de cette thèse, nous pouvons faire les remarques suivantes : elle privilégie les problèmes du sous-emploi urbain alors qu'il existe aussi un S.I. rural. la thèse de développement "spontané" pose comme finalité l'élimination des déséquilibres concernés, avec l'intégration des activités informelles dans l'économie moderne. AceproposlesétudesduBITsurleS.I."moderne"sontrévélatrices,danslamesureoùellesne s'intéressent qu'à des activités pour lesquelles les interventions sont convenables pour faciliter leur évolution vers des structures modernes. I.1 - ÉMERGENCE DU CONCEPT DE S.I. L'utilisationdutermeS.I.danslesPVDrésultedel'appréhensiondecertainsphénomènes dont la coexistence est à priori paradoxale. La croissance urbaine s'est réalisée à un rythme accéléré aux cours des trois dernières décennies:alorsquelacroissancedémographiquedanslaplupartdespaysaétéenmoyennede 2,4%. La population urbaine a augmenté de plus de 6%, tandis que la population des quartiers populairesacruenmoyennedeplusde12%paran.32 Lacroissanceéconomiquequiaentraîné une augmentation de revenu par tête a été inférieure à 3%, et s'était réalisée par l'utilisation de techniques à forte intensité capitalistique. Elle a exercée des effets d'accroissement l'offre de la capacité de travail plus élevés que les effets d'augmentation de la demande. 32 BANQUE MONDIALE : "Rapport sur le développement dans le monde", Washington, DC, 1978.
  • 24. En effet, malgré le décalage entre l'offre et la demande du travail, le chômage33 n'a pas augmenté aussi rapidement que le laisserait supposer le rythme de l'exode rural et les taux de croissancenaturelenmilieu urbain.Ilfallaitdèslors expliquercommentces"chômeurs"ontpu subsister en ville ; la mission globale de stratégie de l'emploi (le rapport BIT sur l'emploi au Kenya)mettaitl'accentsurleS.I.entantquesecteurdestinéàcouvrirles groupesd'activitésoù "une importante proportion d'adultes qui n'occupent pas des emplois recensés sont occupés à d'autresactivitésquifournissentdefaçonrentabledesbiensetservicesàlapopulationurbaine : il s'agit des membres du S.I. "34 La contribution du BIT en cette matière était ainsi de mettre l'accent sur les aspects positifs de ce secteur qui s'avère "le plus souvent du point de vue économique rentable, productif et créatif et qui, sur le plan des politiques d'emploi, est loin d'être un piège à chômeurs’’35 H faut noter que l'analyse théorique du concept s'inscrit dans le cadre d'un débat riche, certes, mais qui n'échappe pas à des incertitudes et comporte certaines divergences du fait que les recherches engagées ne procèdent pas des mêmes motivations ni des mêmes objectifs. Nous analyserons les différentes interprétations du S.I. de l'économie urbaine tout en mettant l'accent sur les approches dualistes ainsi que sur celle de la petite production marchande.Nous poserons ensuite, le problème du S.I. sous l'angle de ses relations avec les autres secteurs. Par la suite, nous présenterons les nouvelles orientations de recherche concernant le S.I.. 33 Dans ces économies le concept de chômage au sens où l'on entend habituellement est peu adéquat. 34 BIT : "Emploi, revenus et égalité. Stratégie pour accroître l'emploi productif au Kenya", Genève 1972, p.61. 35 Ibid
  • 25. — Page 25 — I.2 - D'UN DUALISME À UN "AUTRE" L'approche dualiste est souvent utilisée dans l'explication des disparités caractérisant les économies en voie de développement. La notion du dualisme signifie absence d'homogénéité. L'économie des pays en voie de développement est conçue comme une économie au sein de laquelle se trouvent juxtaposés deux secteurs économiques : secteur moderne et secteur traditionnel. Le principal modèled'interprétationest celui de LEWIS36 quiprésentel'avantaged'avoir fourniuneexplicationdestransformationsintervenantdansces économies.L'approchedualiste ne peut être comprise que par référence à ces modèles et travaux concernant le problème du développementdutiers-monde. L'idéecentraledu modèledeLEWIS estque ledéveloppement induit se caractérise par un processus continu de réaffectation des travailleurs en surnombre de l'agriculture (secteur traditionnel) vers l'industrie (secteur moderne) créateur d'emplois productifs. Le surplus croissant réalisé grâce à ce processus est supposé entraîner un processus de croissance auto-entretenu. Cette analyse suppose tout à la fois un fonctionnement concurrentiel du marché du travail et la volonté des industriels qui réinvestissent leurs profits. Les réalités sociales et politiques montrent que de telles conditions ne sont généralement pas remplies. Les pouvoirs publics doivent aider l'industrie par des moyens d'incitation (politique fiscale, douanière...). Les travailleurs du secteur traditionnel sont définis comme des irrationnels, qui n'ont aucune notion de maximisation de profit et qui ne peuvent évoluer sur le plan technologique puisque, par définition, les inputs du secteur traditionnel sont la terre et le travail ; le capital reproductible n'existe pas puisque non monétarisé de par sa nature. Selon les néoclassiques les travailleurs de ce secteur ont de bas revenus, une faible productivité (très inférieure à celle des travailleurs du secteur moderne). Il y adoncd'une part un secteur moderne dérivantdes formes de production capitaliste et, d'autre part, un secteur traditionnel dérivant des formes de production paysanne. L'inégalité dans la répartition de revenu, consécutive à l'accumulation du capital, serait donc en mesure d'entraîner une épargne favorisant l'investissement, qui entraînerait des créations d'emplois dans le secteur moderne. La division del'économiedansles PVDen secteurmoderne etsecteurtraditionnel relève d'une approche qui est sans doute peu réaliste. "Quoique ce schéma soit très attrayant à maints égards, il semble pastoutà fait rigoureux. L'aspect résiduelduS.I. et lerôled'autosubsistance que lui prête la thèse dualiste sont sujet à caution""37 . L'analyse de ces 36 LEWIS (W.A.) : "La théorie de la croissance économique", Payot, Paris, 1971. 37 PLASSARD (JM), CHOKRI(A.):‘’Segmentationdumarché dutravail et différentiels de salaires:une analyse trisectorielle d’une économie en déveoppement’’, CEJE, Université de Toulouse I, 1994.
  • 26. économies montre, en effet, une diversité de comportements économiques dont les modèles construits jusqu'à présent ne peuvent que difficilement rendre compte. En tout état de cause, nous considérons qu'en dépit des différentes descriptions de l'économie dualiste, ladichotomie est fondée sur la technologie ; cependant les étiquettes telles que économie du "type bazar" désignant le secteur traditionnel urbain ne font que signaler les différences dans l'organisation des activités productives. Toutefois, il s'est avéré que les effets d'entraînement du secteur moderne sur le secteur traditionnel urbain ou rural se sont montrés illusoires dans la plupart des pays. Le développement économique ne peut se cantonner dans un secteur moderne urbain et faire fi de la quasi-totalité de la population. C'est certes devant l'impasse des premiers modèles dualistes qu'onparlera,dèslors, d'un"nouveau" dualisme:secteur moderne/secteurinformelou encore secteur structuré / secteur non structuré... Le développement du secteur informel est donc une réponse aux échecs des politiques d'industrialisation fondées sur ces premiers modèles dualistes. Comment spécifier de manière adéquate la situation observée dans les PVD où une partie importante des activités économiques est menée par des petites unités qui ne relèvent ni du secteur moderne ni de la sous-traitance "stricto sensu". A - Le "nouveau" dualisme : secteur moderne /secteur informel Dès 1971, H ART38 a introduit l'idée d'une possibilité de revenus "formels" et "informels " ; il faisait ainsi la distinction entre les activités formelles impliquant l'emploi salariéetlesactivitésinformellesrelevantdel'auto-emploi.L'auteurmetenrelieflaquestionde l'impact des activités informelles sur l'économie. Devant les réalités marquant la nature de la croissance économique des PVD, il concluait que les activités informelles sont source de revenusetcontribuentpourunelargepart,àcôtédel'emploisalarié,àencouragerl'exoderural. Nousretiendronsqu'audépartlanotiondeS.I.aétéadoptéenonseulementpourdésigner legroupeendirectionduqueldesmesuresdesoutienetd'encouragementdoiventêtreprises, en vue de promouvoir l'emploi et de lutter contre le chômage et la pauvreté, mais aussi pour reconnaître la spécificité de cette nouvelle dimension de la réalité dans les PVD. Le dualisme S.M./S.I. est une" nouvelle" manière de penser l'hétérogénéité des structures des économies en développement. Le "nouveau" dualisme enrichit le débat théorique sur le caractère dual des économies en voie de développement, dans la mesure où on reconnaîtra désormais l'originalité duS.I..Parailleursce"nouveau"dualismesusciteundébatquantàsondegrédepertinence.Au lieu de considérer que le secteur traditionnel a un rôle passif de fournisseur de main-d'œuvre à 38 HART (K.) :"Informal income oportunilies and urban employment"in Ghana journal of modern Africa studies, vol. 11, n°l, mars 1973. A la dichotomie ancienne, certains auteurs substituent : - secteur formel / secteur informel (HART), - secteur structuré / secteur non structuré (WEEKS, SETHURAMAN), - secteur moderne / secteur traditionnel (LACHAUD, PENOUIL, HUGON).
  • 27. untauxdesalairedéterminéparlerevenudesubsistance,ildevraitêtreanalysédanssonpropre dynamisme39 .Lesnouveauxmodèlesdualistesprennentcommehypothèsequelesinégalitésde revenusnesontpasunfacteurdedégagementd'épargne,maisaucontraire,limitentlademande effective. La question posée au niveau de l'emploi concerne alors le revenu et non le temps de travail, et le problème économique s'est déplacé de la production vers la demande. Au lieu de parler de chômage en termes de surplus de main-d'œuvre, on l'appréhende en tenue d'activité sous-rémunérée. BERTHOMIEUC.40 regroupelestraitscaractéristiquesdesdeuxsecteursgénéralement soulignés par les auteurs dans le tableau suivant : 39 HUGON (P.) : ‘’Dualisme sectoriel ou soumission des formes de production. Peut-on dépasser le débat ?’’, Revue Tiers-Monde, T.XXI, n°82, avril-juin 1986 40 BERTHOMIEU (C.) : "Le système économique de la Médina de Sfax (aspects fonctionnels et structurels)", Université de Nice, novembre 1986.
  • 28. "Le dualisme des modes de production, de l'organisation de l'échelle de l'activité semble être la thèse où se rallient la plupart des travaux, toutefois, il en subsiste deux problèmes : à savoir le choix de l'unité d'observation, (individu, ménage, établissement) et les mécanismes qui relient secteur moderne et secteur informel" 41. Le S.I. échappe à l'analyse néoclassique car son développement n'est pas lié aux opportunités d'investissement, mais à la nécessité de créer des emplois dans un contexte d'urbanisation et d'industrialisation plus ou moins accélérées. La diversité des situations observées ne permet 41 SETHURAMAN (S. V.): "The urban sector in developping countries: employment, poverty and environment", 1981. Variables caractéristiques Secteur moderne Secteur informel Forme juridique des entreprises Société Entreprise individuelle Technique utilisée Capitaliste "Labor intensive" Type d'organisation Bureaucratique Familiale, domestique Niveau de production Grande échelle Petite échelle Prix Fixes Négociables Marché Protégé Ouvert Capital financier Abondant Rare Procès du travail Organisation scientifique du travail Artisanat, ateliers autonomes Division du u-avail Très développée Faible Durée du travail Régulière Irrégulière Salaires Mensuels versés régulièrement A la pièce, versements irréguliers Crédit Bancaire Personnel Relations sociales Impersonnelles Personnelles Coûts fixes Importants Négligeables Matières premières Importées de l'extérieur Produits localement Instruction scolaire Élevée Très faible Modalités d'acquisition des qualifications professionnelles Système éducatif Apprentissage sur le tas Niveau de qualification Élevé Bas requis Caractéristiques des secteurs moderne et informel (tableau n°l) Source : BERTHOMIEU, 1986.
  • 29. pas d'apporter une réponse unique. Certaines activités sont complémentaires, d'autres subordonnées. LesmotivationsthéoriquesdéterminantlesétudessurleS.I.sontelles-mêmesdifférentes selon qu'on se trouve du côté de la recherche théorique ou des organismes internationaux : les premières sont dictées par un souci de connaissance abstraite, alors que les secondes s'intéressent au S.I.au rôle que l'on veut faire jouer au SI. dans le processus de développement. On peut citer comme exemple d'analyse dualiste l'approche du BIT(1972)42. Toutefois, il est à remarquer que le BIT s'écarte des modèles dualistes classiques. Dans les modèles dualistes "classiques" la dichotomie (traditionnel / moderne) est une phase transitoire qui s'achève par le développement du secteur moderne (une modernisation de l'économie toute entière). Cette approche reste cependant assez marquée par l'absence de rapports significatifs entrelesdeuxsecteurs. C'estpourquoinous pouvons latraiterde"dualiste"pourladifférencier des approches qui tendent à donner à la fois une explication du fonctionnement spécifique de chaque secteur et une logique de fonctionnement qui permet de comprendre leur articulation. SelonlestermesduBIT,le S.I.est ledomaineoùune importanteproportionde gens, qui n'occupent pas des emplois recensés, sont occupés à d'autres activités qui fournissent de façon rentable des biens et services à la population urbaine, ou bien, du point de vue opérationnel, le S.I. comprend les métiers dans lesquels ils trouvent une utilisation de leur travail ; la plupart sont des travailleurs à leur propre compte, les travailleurs (patrons et personnel) des petites unités, etc. Comme il n'est pas possible de définir le S.I. seulement par la nature des activités, on ajoute comme caractéristiques principales la faible intensité capitalistique des unités, l'existence de marchés concurrentiels, la facilité d'entrée, etc. La contributionde l'approche dualistedu BIT pourexpliquer les disparités dans les PVD n'est pas négligeable : L'introduction de l'hétérogénéité des emplois dans l'économie permet de saisir la contribution économique des travailleurs qui ne rentrent pas dans les cadres structuraux préétablis, et qui ont été souvent considérés comme des "chômeurs déguisés" dans les statistiques. en rompant avec la vision du dualisme classique, cette approche BIT va permettre d'étudier les conditions de promotion des autres formes de production.43 Le découpage en secteur formel et secteur informel est tellement simple qu'il ne permet pas de saisir la richesse 42 BIT :"Employment, incomes and Equality. A strategy for Increasing Productive Employment in Kenya", OIT, Genève, 1972. 43 MALDONADO (C.) : "Les petits producteurs urbains d'Afrique francophone", BIT, Genève, 1987.
  • 30. de l'hétérogénéité des statuts socioprofessionnels des individus à l'intérieur du SX. Il ne permet pas de classer les fractions spécifiques de la main-d'œuvre qui se trouve dans le SX, ou de connaître de façon concrète leur dynamisme. On a certes tenté de mieux expliciter l'hétérogénéité des processus productifs au niveau du S.L, mais ces essais ont abouti à de nouveaux découpages. B - L'analyse en trois secteurs STEEL (W. F.)44 scinde l'économie des PVD en trois secteurs : un secteur moderne, un secteur traditionnel et un secteur intermédiaire ou de transition. Le secteurmoderneutilise unecombinaison de facteurs deproduction plus capïtalistique que les deux autres secteurs et produit à grande échelle. La technologie est avancée et souvent importée. Il existe dans ce secteur des barrières à l'entrée. Lesecteurintermédiaireestcomposédesunitésdeproductiondepetiteetmoyennetaille. Ce secteur utilise une technologie moyenne, des équipements fabriqués localement, et il a des équipements petitsplusfaiblesque ceux du secteur moderne. Sur leplandela rémunérationdu travail, les salariés du secteur moderne font l'objet de contrat de travail et leur salaires ne peuvent se fixer en deçà d'un seuil déterminé institutionnellement. A l'inverse, ceux du secteur intermédiaire se définissent par rapport à la productivité marginale du travail. Les barrières à l'entrée sont moyennes (barrières à l'entrée liées à l'investissement en capital physique ou humain). Enfin, le secteur traditionnel a les caractéristiques suivantes : faible capital fixe, absence de barrières à l'entrée, financements essentiellement familiaux ; le produit marginal du travail estnul.Ilyapartageduproduit,celui-cipouvantêtreéventuellementégalautauxdesalairedu secteur de transition. L'hétérogénéité des activités du SI., a conduit au développement des modèles trialistes qui sont une reprise du modèle dualiste de LEWIS.Les analyses en trois secteurs reposent sur l'existence d'un seuil technologique, conduisant à une rentabilité financière du capital décroissante.Dans ce schéma, c'est le secteur intermédiaire qui est capable de jouer le rôle que jouait le secteur traditionnel dans les analyses dualistes. "Le secteur intermédiaire, sous certaines conditions, pourrait produire autant que le fait le secteur moderne. Ce secteur, en élargissant le marché intérieur, favorisera la création et le maintien d'une économie intermédiaire, située entre les activités traditionnelles et le grand secteur moderne. En définitive, le développement du secteur intermédiaire réconciliera les objectifs d'emploi et de 44 STEEL (W. F.) :"Small-case employment and production in developing countries evidence from Ghana", New-York, 1977. LRHOULA (Y.) : "Secteur informel et développement : contribution à l'élude de l'économie urbaine dans les PVD", Thèse 3e cycle, Aix Marseille 3,1986.
  • 31. production". 45 L'analyse en trois secteurs présente un intérêt dans la mesure où l'adoption de l'hypothèse d'hétérogénéité permet de situer le champ des investigations statistiques. 1.3 - L'APPROCHE DE LA PETITE PRODUCTION MARCHANDE Bienquel'appellationdelapetiteproductionmarchandeaitétéutiliséeparcertainsparla suite pour désigner les activités informelles, cette seconde approche du S.I est d'inspiration "marxiste". Elle part de l'idée que la petite production marchande ou les activités informelles sont un ensemble d'activités qui participent à la reproduction du mode de production capitaliste46. La participation de celles-ci à la reproduction du système capitaliste dans les PVD résulte du fait de la soumission du travail au capital. Cette approche considère l'émergence du S.I. comme une modalité de surexploitation du prolétariat que le capitalisme périphérique et international ne peut, ou ne veut, salarier. Les analyses se placent dans une perspective globale, afin d'essayer de comprendre les mécanismes de fonctionnement, de régulation du système, autant que les logiques des sous-systèmes de production. La petite production marchande est alors considérée comme une réserve de main-d'œuvre dans laquelle lesecteurmodernepuiselaforcedetravaildontilabesoinetrejettecelledontiln'apasl'utilité. Selon les tenants47 de cette approche, la petite production marchande dominée par le système capitaliste répond à ses lois de fonctionnement par une complémentarité structurelle. Cette complémentarité relève des modalités essentielles du fonctionnement du secteur moderne, et est renduepossiblepar d'autres caractéristiques spécifiques du fonctionnement des secteurs arriérés. La vision totalisante de cette approche est diamétralement opposée à l'approche dualiste, au niveau de la signification des rapports entre les secteurs, et du rôle accordé au SX. Les principaux travaux font ressortir cette opposition autour de l'aspect fonctionnel du rapport S.M./S.L. Les analyses retiennent comme activités informelles celles qui correspondent à un mode de production artisanale et au petit commerce, et acceptent l'existence de flux réels et monétaires entre les deux secteurs au sein d'une économie. 45 STEEL (W.) : "Intensité du capital, dimension de la firme et choix entre emploi et production. L'importance de l'analyse multisectorielle", Revue Tiers Monde, tome XXI, n°82, avril-juin 1982. 46 ABADIE (N.), HUGON (Ph.), MORICE (A.): "La petite production marchande et l'emploi dans le "secteur informel" - Le cas Africain", Édition de L'IEDES, Paris, 1977. 47 LAUTIER B., DE MIRAS Cl. et MORICE A. : "L'Etat et l'informel", L'Harmattan, Paris, 1991.
  • 32. L'articulation des formes d'activités est envisagée du point de vue des avantages que le secteur formel tire des activités informelles. Pour certains, les activités du S.I. contribuent à l'accroissement du taux de profit du S.M. par l'échange inégal. On souligne que le capital a intérêtàmaintenirleS.I..Lerôledesactivitésinformellesseraitdereleverletauxdeprofit,soit parlasous-traitancecommerciale,soitparlasous-traitancedirecteaveclesunitésduS.M..Les flux entre les deux secteurs jouent un rôle dans le cycle de valorisation du capital. Pour d'autres, le S.I. produit des inputs à bon marché pour l'industrie, ces inputs entrent dans le cycle de valorisation constant, et en font monter le taux de profit. Les analyses considèrent que les petits producteurs jouent un rôle d'armée de réserve permettant au capital d'avoir un taux de rotation élevé de main-d'œuvre, sans qu'il ait à supporter le coût de l'entretien de la main-d'œuvre rejetée hors de la sphère de la production. En dépit de cette constatation d'un rôle positif des activités dans la valorisation-accumulationducapital,lesanalysess'opposententreellesquantàl'avenirdecette articulation au sein de l'économie des PVD. Pour certains, le rôle accompli par les activités informelles dans la hausse du taux de profit est d'une importance fondamentale pour l'accumulation du capital, l'existence des deux secteursestunélémentpermanentdel'économie.Dans cecadre,ilexiste toujoursunprocessus de conservation-dissolution : le blocage du développement, dû à l'étroitesse des marchés, rend le capital incapable de dissoudre le mode de production artisanale, ce qui fait que la stratégie rentable serait de subordonner les petits producteurs. D'autres travaux considèrent que les formes de production non capitalistes sont des survivances du système antérieur et ne jouent qu'un rôle marginal par rapport à l'accumulation du capital. Les activités informelles doivent disparaître à la suite d'un double processus : par la transformation progressive des rapports antérieurs en rapports marchands, à l'intérieur des petites unités ; du fait d'une plus forte concurrence du développement de l'économie en général. Pour les auteurs qui soutiennent la thèse de la disparition du SX, et qui négligent leur importance dans le processus d'accumulation, l'existence des petits métiers dans l'économie ne peut s'interpréter que comme une survivance. Les petits métiers se trouvent directement menacés par le courant de la modernisation. Plus nombreux sont les auteurs qui partent de la permanence de l'articulation des secteurs, et considèrent que le développement du S.I. ne peut pas se faire dans un modèle économique dominé par les intérêts d'une minorité locale ou étrangère, par conséquent le problème du petit producteur fait partie du développement.
  • 33. Danscetteapprocheonaccordeunrôlepositifàlapetiteproduction,maisétantdonnéesa dépendance vis-à-vis du S.M., son développement doit être conçu dans le cadre d'une profonde modification de l'organisation économique et sociale des PVD. Autrement dit, dans la mesure où les petits entrepreneurs ne peuvent participer à l'économie que de façon dépendante et subordonnée, toute politique d'aide en leur faveur conduirait à une aggravation de la pauvreté, sans pour autant bénéficier réellement à ceux qui passeraient sous le contrôle de la grande industrie. Les approches dualistes ont le principal mérite d'avoir inauguré la recherche pour l'appréhension de la complexité du rapport production/emploi dans les PVD. Cette approche présenteunecertaineoriginalitéquiconfèreàcetypededéveloppementuncaractèrespécifique et unique.48 L'approche de la petite production marchande part du même univers hétérogène des activitésurbaines, ettententunearticulationentrelesdeuxsecteurs. Leurs limitesdépendentde la façon dont ils établissent la complémentarité. Les analyses qui soutiennent la thèse de la disparition des activités du S.I. par le développement, commettent les mêmes erreurs que les tenants dudualisme classique (destruction dusecteur traditionnel). "Le secteur informel est fait pour durer"49 . L'approche de la complémentarité des formes de production dans le cadre de l'accumulation du capital présente comme limite le fait de privilégier le transfert des valeurs d'un secteur vers l'autre, et refuse d'étudier d'autres phénomènes tels que la dévalorisation du travail, le rôle des unités du S.I. dans l'absorption de la main-d'œuvre. Malgré leurs limites, ces approches fournissent un soubassement analytique qui permet de saisir les économies en voie de développement (voir Annexe 6). Les deux approches du S.I. ne s'excluent pas absolument, il semble possible de les combiner dans le cadre de notre problématique. 1.4 - LES NOUVELLES ORIENTATIONS DE RECHERCHE Lors d'un séminaire de l'OCDE sur le S.I., les participants, après avoir fait le tour des définitions opposées, des conflits et des méthode ont proposé des nouvelles orientations de recherche sur le S.I. en Afrique.50 48 BARON (C.) : "Autonomie-intégration des espaces urbains Africains", thèse de doctorat d'université, Sciences Economiques, Bordeaux 1,1994. 49 LUBELL (H.) :"Le secteur informel dans les années 80 et 90", O.C.D.E., Paris, 1991. 50 KING (K.) : "L'émergence des tendances récentes en Afrique. Un schéma pour les nouvelles tendances", Nouvelles approches du secteur informel, OCDE, Paris, 1990.
  • 34. — Page 34 — Au niveau de chaque pays, c'est la prise de conscience par les dirigeants africains du S.I. et des liens qu'il y a entre lui, l'éducation et la formation. II s'agit de l'attitude des organismes d'aidevis-à-visdesgouvernementsafricains quiposentcommeuneconditiond'aide,lapriseen compte dans les décisions politiques des liens entre l'éducation, la formation et le S.I. Les diplômésdesécolesprofessionnellesutilisentles connaissancesacquisespréalablementdans la création d'emplois informels, lorsque le secteur formel se trouve dans l'impossibilité de les intégrer.Deplusenplus,leS.I.devientl'apanagedesscolaires,etladuréedelascolarisationest ce qui amène des différences quant à la stratification au sein des unités du S.I. En d'autres tenues, le fait d'être diplômé d'une école professionnelle, ou d'avoir poursuivi des études primaires, secondaires ou supérieures impliquait des différences de performances, tant au niveau de l'organisation des entreprises informelles, qu'au niveau du développement et de la multiplicationdesdites entreprises. Désormais, il s'agit d'analyser quels types d'éducation etde formation ont aidé les jeunes à accéder à l'activité qu'ils exercent. L'examen de la littérature récente sur le S.I. montre que les pouvoirs publics, les institutions internationales s'intéressent de plus en plus au S.I. dans les stratégies d'augmentation de l'emploi et de revenus. Parmi les tentatives de sortie de la crise structurelle que traverse l'ASS, les partisans de la déréglementation de l'activité économique et de la flexibilité de la législation du travail prônent également une intervention dans le S.I. D'un côté, on estime qu'un contrôle plus strict des conditions d'exercice des activités informelles est nécessaire afin de garantir les investissements dans le secteur moderne ; de l'autre côté, on préconise une réforme du secteur institutionnel pour libérer les initiatives et le potentiel que recèle le S.I. L'impact du cadre institutionnel ouvre une voie de recherche qui doit déboucher sur d'autres orientations. "Pourquoi ne pas puiser dans "la richesse des alternatives institutionnelles pour imaginer une réglementation différente pour les secteurs formel et informel, appropriée à la branche, à la taille et à la logique de gestion des entreprises, en fait une réglementation qui, tout en maintenant certains avantages du S.I., contribuerait à atténuer les coûts ?"51 Les pays sous ajustement structurel sont aussi concernés par le renouveau de l'approche institutionnelle. Par conséquent les approches empiriques sur le cadre institutionnel dans lequel évolue le S.I. peuvent ouvrir des voies de recherche intéressantes. Ces approchespartentdel'idée que lespolitiques d'ajustementstructurel rendent difficile toutepolitiquesociale,parconséquentleS.I.pourraits'ysubstituer,d'oùlathèsederajustement à visage humain. Les orientations de recherche concernent le marché du travail urbain dans le contexte macro-économique d'ajustement structurel. L'idée de base est que l'analyse du marché du 51 FREEMAN (J.R ):"Labor markets and institutions in economic development", The American Review, Mai 1993.(également dans Les problèmes Économiques n°2361, fév.1994).
  • 35. travail est déterminante pour comprendre le problème de la pauvreté. Il paraît opportun d'axer prioritairement la recherche sur les thèmes adaptés au développement de politiques en direction des plus vulnérables52. Les thèmes de recherche concernent : l'exploration de la liaison entre les mécanismes du marché de travail et la pauvreté ; la liaison entre l'ajustement structurel et les effets sur le marché du travail. Les recherche prennent trois directions essentielles : une première nécessité concerne la disponibilité de l'information statistique sur le marché du travail ; le développement de la formationpourpermettreauxlocauxd'interpréterlesdonnées ; etledéveloppementde réseaux de recherche sur la marché du travail en Afrique subsaharienne et au Maghreb. Des résultats préliminaires obtenus lors d'une enquête pilote sur les ménages en Côte d'Ivoire53 montrent que les ménages pauvres englobent surtout les travailleurs indépendants ; l'observationdelastratification dumarchédetravails'écartedesschémasdualistes. Lamiseen évidenced'uneclassificationhiérarchiquedes chefs deménagesmontreplusieurs catégoriesde travail homogènes : le salariat protégé, le salariat concurrentiel, le salariat non protégé, le travailàpropre compte évolutif,letravail à proprecompteinvolutif. Les trois dernières formes sont la plupart du temps situées chez les ménages pauvres. SECTION II : CONTOURS ET DÉFINITIONS DU S.I. Dans les pays sous-développés, l'intention de chercher un emploi ne s'exprime généralement pas sous une forme institutionnelle. La limite entre "chômeurs" et ceux qui ne participentpasàlapopulationactiven'estpasnette.LeS.I.permetuneinterprétationvalablede l'existence et la coexistence des systèmes d'emplois et d'activités. Aucune réflexion sur l'économie des PVD ne peut se passer de la reconnaissance de certaines catégories de travailleurs qui appartiennent au S.I.. Les travailleurs de ce secteur sont en majorité des indépendantsoudesnon-salariés,quiontgénéralementdesniveauxdeproductivitéfaibles.Les revenus gagnés dans le cadre de ce secteur sont peu élevés et peuvent être assimilés à des revenus de subsistance D'autres analyses empiriques reconnaissent que certaines activités informelles dégagent des revenus supérieurs à ceux des ouvriers du secteur moderne (cf. 52 LACHAUD (J.-P.) : "Le secteur informel urbain et le marché du travail en Afrique au sud du Saliara", séminaire "The informai sector revisited", Centre de développement de l'OCDE, Paris, 1988. 53 LACHAUD (J.-P.).: "L'analyse du marché de travail urbain en Afrique", Institut International d'Études Sociales Genève, Discussion Papers, DP/2/1987.
  • 36. — Page 36 — CHARMES,1987).LesmembresdelafamillequiintègrentleS.I.,sontsouventacceptés au sein de cette famille parce qu'on espère d'eux une contribution au budget familial. Toutefois les divergences théoriques que nous avons abordées dans la première section débouchent sur plusieurs définitions. II.1 - LES CRITÈRES DE DISTINCTION DU S.I. IlexisteplusieurstypesdedéfinitionsduS.I.:lesdéfinitionsmulticritères,lesdéfinitions fonctionnelles et les définitions statistiques. Les définitions multicritères et fonctionnelles sont plus nettement rattachées à des thèses ou écoles de pensée.54 Les définitions multicritères découlent généralement de la théorie classique de la concurrence (atomicité et fluidité du marché des produits et des facteurs de production, les auteurs voient dans le S.I. une illustration de l'économie de marché "pure et parfaite" mais segmentée c'est-à-dire non directement reliée au marché moderne). Les définitions fonctionnelles sont inspirées des auteurs de la petite production marchande. Elles mettentau centredeleurs préoccupationsles relations entre les deux secteurs (moderne et informel) que l'analyse ne doit pas dissocier. L'aspect principalde l'analyse repose sur le rôle que joue la petite production marchande dans le développement du capitalisme. Les définitions empiriques et statistiques partent du fait que pour réaliser les enquêtes, il faut choisir certains critères.Généralement quatre critères sont retenus (la situation dans la profession, la situation de non enregistrement, la taille de l'entreprise, le niveau des revenus) La définition du S.I. semble nécessaire, bien que les critères proposéssoient différents et renseignent sur des divergences théoriques. La manière la plus simple de définir le S.I. est d'en énumérer les principales activités et d'en mentionner un certain nombre de caractéristiques. Le S.I. se caractérise par des activités à faible productivité et dotation en capital et sans structures définies. Les entreprises ont essentiellement recours aux ressources locales et sont de caractère familialavecuneorganisationrudimentaireouinexistante.Lesunitésdeproductionopèrentsur une petite échelle et ont une capacité d'adaptation plus grande. Le marché échappe à tout règlement et est ouvert à la concurrence. Les qualifications s'acquièrent en dehors du système éducatif officiel et les sources de revenus sont essentiellement informelles. Telles sont les principales caractéristiques qui ressortent à travers les études. 54 Cf. annexe 6 : Les différentes approches du S.I. en France.
  • 37. Le rapport Kenya55 qui anotammentdonnéla notoriété auterme, analysele rôledu S.I. dans le processus de développement et suggère une politique de promotion de ces activités. Toutefois le rapport se refuse à définir le S.I. et l'appelle tout simplement "a way of doing things" caractérisé comme suit : / - facilité d'accès pour l'utilisateur ; - utilisation de ressources locales ; - propriété familiale ; - échelle très réduite de la production ; - technique à forte intensité de main-d'œuvre ; - qualification acquise en dehors du système scolaire ; - marchés échappant à toute réglementation et ouverts à la concurrence totale. Par rapport à l'opposition moderne/traditionnel, les différences se situant au niveau de l'organisation des activités et non de la technologie sur laquelle est fondée la division entre le "moderne" et le "traditionnel". On peut reprocher à cette définition du S.I. d'avoir des caractéristiques peu opérationnelles.Les caractéristiques citées sontdifficilementutilisables pour les investigateurs qui doivent pouvoir identifier les activités du dit secteur en tant que telles. De plus, des difficultés d'analyse surgissent dans la mesure où certaines caractéristiques sont valables et d'autres non. Pourtant la définition des caractéristiques utilisables sur le terrain s'avère nécessaire. Empiriquement, la détermination des activités informelles implique une observationdirecte,notammentunrecensementaucoursduqueluncritèresignificatifpeutêtre utilisé. C'est ainsi que la plupart des travaux en ASS utilisent le critère de mode de gestion, en particulier la tenue d'une comptabilité. Là aussi il y a problème car le critère de distinction purement administratif permet de confondre les entreprises fonctionnant dans des structures quasi-modernes et ne tenant pas de comptabilité avec des entreprises du S.I. Decefait,procéderpardéductionetdirequeleS.I.estcomposédel'ensembledes unités deproductionetservicesquinetiennentpascomptedelacomptabilité,c'estmasquerlaréalité. Les caractéristiques du S.I. mises en évidence dans les diverses études réalisées conviennent particulièrement à certains cas mais sont difficiles à généraliser en raison de la spécificité de ces activités, aboutissant à une multitude de définitions calquées sur la dualité de l'économie. La multiplicité des définitions du S.I. s'explique par l'insistance mise surtelle ou telle caractéristique de son fonctionnement. Mais ces caractéristiques mises en avant dans toutes les études reflètent-elles la réalité ? Au terme de cette analyse, il n'est pas facile de trouver une définition universelle du S.I.. Sur le plan statistique, une définition universelle a été adoptée, mais le S.I. est un secteur 55 BIT : "Emploi, revenus et égalité. Stratégie pour accroître l'emploi productif au Kenya", Genève 1972, p.61.
  • 38. dynamique, non figé et lié au développement des pays concernés. Par conséquent la définition donnée doit être modifiée à chaque étape de développement. La nature hétérogène des activités fait qu'il n'est pas possible d'établir des frontières précises, ou de définir ces activités à partir des critères universels. L'utilisation de vocabulaires différents (secteur informel ou secteur non structuré,..) pour parler des mêmes réalités relève tout simplement d'une différence d'interprétation. P. HUGON56 présente un éventail de critères proposés pour définir le S.I.. Ces critères peuvent se placer à plusieurs niveaux : repérage statistique : le S.I. échappe aux moyens d'investigations habituels (producteurs travaillant sans emplacement fixe, ne payant pas de patente ou d'impôt, n'ayant pas de comptabilité, etc..) ; caractères de l'unité de production : depuis le rapport KENYA, on retient les critères de la facilité d'accès aux activités, l'échelle restreinte des opérations, la propriété familiale des entreprises, les qualifications qui s'acquièrent en dehors du système scolaire officiel, des marchés échappant à toute réglementation et ouverts à la concurrence ; revenus : à ce niveau on distingue les possibilités de revenus "structurés" et "non structurés" selon le critère de salaire et l'auto-emploi. En effet certains auteurs utilisent le critère de l'intensité capitalistique, qui est en corrélation avec la dimension de la firme. Le critère de l'intensité capitalistique permet de lier la question des barrières à l'entrée, pour les producteurs, avec celle de l'accès aux marchés financiers. Le critère de l'organisation sociale et juridique est utilisé pour définir un marché du travail non protégé, sans système d'assurance sociale et non réglementé, qui délimite le champ d'activités informelles.57 Par ailleurs, la dichotomie S.I./S.M. est fondée sur les caractéristiques des rapports d'échange et la position économique par rapport à l'État. D'autres travaux ont essayé de subdiviser le S.I. pour délimiter son champ et aboutir ainsi à une meilleure appréhension de son degré de pertinence. Tout en prenant en compte l'hétérogénéité du secteur, ces travaux 56 HUGON (P.) :"SNS ou hétérogénéité des formes de production urbaine. Dualisme sectoriel ou soumission des formes de production au capital. Peut-on dépasser le débat ?", in Revue Tiers Monde, T.XXI, n°82, avril-juin 1980. 57 MAZUMDAR (D.) : "Microeconomic Issues of Labor Market in development countries: Analysis and Policy Implications", The World Bank, Washington D.C., 1989.
  • 39. distinguent un S.I. traditionnel et un S.I. moderne. En effet, pour NIHAN58 , les activités du bois, du métal, de la réparation électrique et mécanique et de la construction sont des activités produisant des biens et services parallèles à ceux du secteur moderne et s'inscrivent par conséquent dans le cadre d'un S.I. "moderne". Cependant ces subdivisions si simples soient-elles ne sont pas négligeables, dans la mesure où le débat sur le degré de pertinence portera désormais sur les activités du S.I. "moderne". Les critères proposés sont descriptifs et, nous renseignent peu sur le caractère dynamique du S.I.. Ce dynamisme ne peut être décelé que dans une perspective de recherche globale qui tient compte des rapports qui pourraient exister entre le Si. et les autres secteurs de l'économie. Le rapport à la loi est le plus souvent utilisé comme critère pour repérer les activités informelles. Toutefois il convient de distinguer dans le S.I. les activités illicites, telles que la drogue, la criminalité... de celles qui sont licites. Dans le cas de l'ASS, on cite le critère de l'inexistence de la comptabilité pour définir le S.I., sans pour autant se demander ce qui poussent la plupart des entreprises à agir dans l'illégalité. Le prix de la légalité est inaccessible pour la plupart des actifs évoluant dans le S.I. "Ce sont les régulations institutionnelles perverses qui entravent la croissance de l'économie, inhibent l'esprit d'entreprise, interdisent l'émergence d'une économie de marché réelle, postulée comme optimum"59 . "L'illégalité" dont traite les auteurs n'a rien à voir avoir les activités répréhensibles. Si en effet ce secteur présente des aspects "illégaux", c'est parce que les activités qui s'y déroulent ne peuvent observer la réglementation en vigueur. De plus certaines dispositions législatives et réglementaires sont totalement étrangères à la situation de ceux qui vivent exclusivement du S.I. "Autrement dit, on se trouve dans de nombreux pays en voie de développent, dans une phase où l'administration est en train d'asseoir son emprise, avec des faibles moyens et l'on ne saurait donc considérer comme illégales les activités économiques qui, en elles-mêmes, n'ont rien de répréhensible"60 . Les critères purement quantitatifs tels que le nombre d'emplois, le niveau du chiffre d'affaires, ne suffisent pas pour qualifier une activité de formelle ou d'informelle, nous souligne FERCHIOU 61 . D'autres critères d'ordre qualitatif, parmi lesquels le degré d'observation des législations fiscale, sociale du pays vient en premier lieu. Le degré 58 NIHAN (G.) : "Le secteur non structuré, signification, aire d'extension du concept et applications expérimentales", in Revue Tiers Monde, T.XXII, n°82, avril-juin 1980. 59 DO SOTO (H.): "L'autre Sentier. La révolution informelle", La Découverte, Paris, 1994. 60 CHARMES (J.) : "Approche comptable, statistique et économique du secteur informel". Brochure AMIRA n°61, 1991. 61 FERCHIOU (R.): "Micro-entreprises du secteur informel à Tunis, obstacles de caractère légal et institutionnel", BIT, Genève, 1990.
  • 40. d'observation des différentes réglementations dépend du degré de contrôle que les entreprises du S.I. escomptent subir de la part des différentes administrations. Quand l'activité informelle n'est pas localisée, son contrôle devient difficile, par conséquent son degré d'observation devient faible. Par contre le degré d'observation des textes réglementaires s'accroît quand l'entreprise informelle est localisée. Dans la plupart des cas les entreprises essayent de régulariser leur situation, dans la mesure où elles ne peuvent pas échapper au contrôle municipal quand elles sont localisées. II.2 - LA TYPOLOGIE DES ACTIVITÉS L'importance des petits métiers et notamment de l'artisanat en ASS est une réalité qui a marqué et ne cesse de marquer, jusqu'à nos jours, la vie économique. En effet, pendant les années 60, le planificateur a négligé le secteur informel, considéré comme un secteur à disparaître. Toutefois, il va connaître un essor avec les nouvelles politiques de libéralisation économique : l'intérêt nouveau accordé au S.I. est l'envers de la déception occasionnée par l'incapacité du secteur industriel à absorber les nouvelles générations de travailleurs de plus en plus nombreux à se présenter sur le marché du travail62 . Depuis quelques années, des expériences pilotes tendent à lever le voile sur l'importance réelle jouée par le S.I. dans le fonctionnement des économies en voie de développement. La démarche a été ainsi empirique, visant à situer le S.I. dans l'ensemble des branches économiques. Dans le cadre de cette démarche, ledit secteur est défini comme suit : "Le S.I. est constitué par l'ensemble des activités monétaires non prises en compte par les statistiques classiques et la comptabilité nationale"63 . Notons que J. CHARMES considère cette définition comme étant une simple constatation d'une démarche empirique, mais elle est d'une importance non négligeable dans la mesure où elle permet de procéder à une analyse typologique et descriptive du S.I. (voir tableau ci-dessous). 62 CHARMES (J.) : "Méthodes et résultats d'une meilleure évaluation des ressources humaines dans le SNS d'une économie en voie de développement" in "Tunisie, quelles technologies, quel développement ?", G.R.E.D.E.T., éditions Salammbô, Tunis, 1983, page 163. 63 CHARMES (J.) : "Le secteur non structuré et l'économie du développement. Nécessité de sa prise en compte et d'une reconsidération subséquente des théories et politiques de développement", in Séminaire sur l'économie du développement, analyse en termes réels et monétaires, F.S.E.G., 27/28 avril 1983, page 118.
  • 41. X : Existence de la catégorie. O : Non existence de la catégorie. : Correspondance entre deux catégories. Source : "L'évaluation du SNS : méthodes, résultats, analyses, l'exemple de la Tunisie", J. CHARMES, AMIRA brochure n°37, Paris, sept. 1982. On distingue sept formes d'activités informelles en milieu urbain et rural non agricole, réparties en deux secteurs selon leurs modalités d'exercice. Selon qu'elles s'exercent dans un local, le S.I. "localisé", ou dans des locaux multiples, dans la rue ou à domicile, c'est le S.I. "non-localisé". Cette typologie, bien qu'elle soit descriptive, nous renseigne sur une difficulté d'investigation qui prend une dimension différente du haut en bas de l'échelle des 7 catégories. En effet, au fur et à mesure que s'accroît le degré de non structuration, et que baisse le niveau de revenu retiré des activités concernées (passage de la catégorie 1 à la catégorie 7), s'accroît parallèlement la difficulté d'appréhension des phénomènes d'où la nécessité de passer à des techniques d'enquêtes quantitatives classiques portant sur les SECTEURS D'ACTIVITÉ Modalités FORMES Production Services Commerce d'exercice D'ACTIVITE Bois, métal, cuir, textile, habillement, pain, Mécanique, électricité, plomberie, cordonnerie, De détail, des produits alimentaires et non pâtisserie, services alimentaires BTP personnels, transport 1) Petites entreprises X X X Secteur 2) Artisanat ou non commerces traditionnels X X X structuré 3) "Lustres", localisé "amateurs", "casseurs" et concurrents X X o clandestins de toutes sortes 4) Tâcherons et Secteur travailleurs à façon hors domicile x o X o non structuré 5) Marchands ambulants X X non 6) Tâcherons et localisé travailleurs à façon à domicile (travail au noir) X X O 7) Travail à domicile X X O Champ d'investigation pour les enquêtes sur le SNS au sens large (tableau n°2) t Secteur Secteur non non Structuré Structuré au sens au sens strict Large