1. Introduction
Nous nous sommes intéressés au travail d'Evelyne Thommen et Cécilia Suchet
de l'université de Poitiers et de l'université de Fribourg.
Leur recherche, intitulée « humour et intentionnalité chez l'enfant:
incongruités de propriétés entre l'homme et l'animal, » publiée en 1999, porte sur
l'acquisition des théories de l'esprit chez l'enfant. Elles considèrent que la capacité
expliquer des ressorts humoristiques relativement complexes est un indice de l’aptitude
de l'enfant à attribuer des intentions aux autres en fonction, non pas de ce que sait
l'enfant, mais des caractéristiques du personnage et de sa perception de la situation, ce
qu'il sait ou ne sait pas.
De ce fait leurs travaux se sont basés sur l’étude de la compréhension de
l’humour chez l’enfant, et de l’évolution de celle-ci au cours de son développement. A
cette fin elles se sont centrées sur des situations jouant sur les caractéristiques et
distinctions entre homme et animal.
2. Définitions
Ziv et Ziv (2002), nous définissons le sens de l’humour comme étant l’aptitude à
percevoir, à créer et à exprimer (par des mots ou des gestes) des liens originaux entre
des êtres, des objets ou des idées, liens qui font (sou)rire celui à qui on les communique
car il les comprend et les apprécie.
Mc Ghee: L'humour chez l'enfant se partage entre différentes causalités: les incongruités
de formes (caricatures), les juxtapositions incongrues (appeler intentionnellement un
objet de façon inappropriée), les incongruités de concepts (vélo avec des roues carrées)
puis le sens ambigu de mots (blagues carambar). Freud y ajoute le comique naïf (jeux sur
les sons), le comique d'imitation (matérialité d'une métaphore), le comique d'attente
(qui se rapproche du nonsense, basé sur des fautes de raisonnement)
3. Dans notre étude nous avons interroger cinq enfants ( trois filles et deux garçons)
d’âges compris entre cinq ans et demi et neuf ans.
Matériel utilisé:
Nous avons dans un premier temps construit une grille d’observation dans
laquelle nous avons réservé des colonnes spécifiques:
- Une colonne avec les numéros des images
- trois colonnes servant à répertorier
l’expression de l’enfant (un simple sourire,
un grand sourire ou un rire)
- une colonne ou nous avons noté
les images suivant qu’elles étaient
classées par l’enfant sur la pile «drôle »
(codée 1) ou sur la pile « pas drôle » (codée 0)
- une colonne réservée à la notation des commentaires fait par l’enfant a propos de
l’image.
4. Nous avons ensuite du sélectionner les dessins que nous montrerions aux
enfants, au total treize dessins nous ont parus pertinents pour cette recherche, dont:
- 3 dessins représentant des rôles inversés…………
- 2 dessins comprenant une situation absurde………………………………..
- 3 dessins sans ressort comique…………………………
- 3 dessins représentant une mésaventure………………………………………
-2 dessins à propos de l’acquisition
d’une caractéristique qui ne correspond
pas à l’animal représenté……………………………………..
Enfin, nous avions besoin d’un support sur lequel l’enfant pourrait classer les images
suivant s’il les trouve rigolotes ou pas. Nous avons donc créé deux planches:
-l’une avec un smiley qui rigole symbolise les images qu’il jugera comique
-L‘autre avec un smiley qui fait la tête sur laquelle il posera les dessins qu’il ne trouvera pas
drôle.
7. Procédure:
Dans une première phase nous avons présenté tous les dessins un par un à
l'enfant, il les a regardé le temps qu’il voulait et lors de chaque passation d’image nous
notions ses réactions dans notre grille (par exemple si la vue de l'image provoquait chez
lui un sourire, un grand sourire, un rire ou le laissait indifférent.) et nous lui avons
demandé de classer les images en deux piles, symbolisées par les planches de smiley,
l'un souriant, l'autre faisant la tête. L’enfant eu pour consigne de placer les images qu’il
trouvait amusante sur la pile du smiley qui sourit et les autres sur la pile restante.
Puis, une fois ce classement fait, nous lui avons demandé de nous expliquer,
pour chaque image, ce qu'il a trouvé drôle et pourquoi cela était drôle. Nous avons
noté au fur et a mesure ses commentaires dans la case prévue à cet effet.
8. Résultats et conclusion:
Les résultats obtenus lors de cette recherche s’accordent avec ceux obtenus
par Thommen & Suchet. Nos résultats corroborent le fait que plus l’enfant est âgé plus il
est à même de voir, comprendre et expliquer le ressort comique présent dans telle ou
telle image.
Ainsi, Marion, huit ans et demi a bien mieux compris les dessins comprenant les
inversions de rôles (trois dessins sur trois) que Davon, cinq ans et demi ; et a réagit
positivement aux illustrations comportant les situations absurdes en décrivant
précisément le ressort comique comparé à Luc, cinq ans et demi qui ne semble pas avoir
compris le sens des images.
Dans leur étude Thommen & Suchet ont montré que les enfants de cinq ans ont une
appréciation globalement positive des images, indépendamment de la présence ou non
d’un ressort humoristique dans le dessin, ce que nous n’avons pas pu confirmer étant
donné que nous n’avions qu’un seul enfant de cet âge et qu’il ne semble pas avoir suivit
cette optique.
9. Résultats et conclusion:
Elles ont également souligné qu’a partir de sept ans les enfants arrivent à
comprendre le ressort humoristique quand il est présent et arrivent à expliquer ce qui
est comique. Les dessins dans lesquels sont présentés des paires d'actions incongrues
semblent mieux comprises, chacun des personnages renvoyant à l'autre; les ressorts
explicites sont compris.
Sept ans serait donc l’âge pivot dans la compréhension des ressorts
humoristique. En revanche, dans le cas où l'incongruité est liée à la perte d'une
propriété qui n'est pas présentée ailleurs dans l'image, ce n'est qu'aux environs de
douze ans que l'enfant est capable de résoudre l'incongruité en pensée, sans support
visuel qui facilite cette tâche, il serait à même de se représenter les actions possibles.
Pauline, sept ans, a en effet très clairement repéré les inversions de rôle, mais
avait du mal à expliciter les gains de caractéristiques si la source de celle-ci n’était pas
représentée dans l’image.