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enquête16
N° 3633 du 27 mars 2015
F
évrier 2015 : et le vainqueur du film le
plus piraté au monde est… American
Sniper ! Deux jours avant les Oscars,
la société Irdeto qui a surveillé les
­téléchargements illégaux dans plus
de 200 pays entre le 1er janvier et le
15 février, dévoile ses résultats. Bilan :
les films nommés à la cérémonie amé-
ricaine ont été massivement téléchargés durant ce laps
de temps. Le film de Clint Eastwood a ainsi enregistré
une progression de téléchargements de +230%, et Selma,
nommé dans la catégorie meilleur film, de +1 033% ! Si
la France ne fait pas partie du top 10 des pays ayant le
©WarnerBros.Pictures
250 millions de films et 400 millions
d’épisodes de séries piratés
Pour autant, chiffrer les impacts réels du téléchargement
ou du visionnage illégal sur l’économie du secteur s’avère
compliqué. Les entrées du cinéma en salle se portent
bien, affichant même une santé florissante avec une aug-
mentation de 7,7% en 2014 selon le CNC, pour dépasser
les 200 millions d’entrées. A contrario, le marché de la
vidéo physique a vu son chiffre d’affaires diminuer de
moitié en l’espace de dix ans, comme le note le CNC
dans son rapport sur le marché de la vidéo publié en mars
2014. Le chiffre des ventes de DVD et blu-ray est même
passé pour la première fois sous la barre du ­milliard d’eu-
plus téléchargé les films en lice aux Oscars, elle n’est
pourtant pas en reste en ce qui concerne le piratage des
œuvres sur internet. Selon la dernière étude publiée par
l’association de lutte contre le piratage audiovisuel (Alpa)
et Médiamétrie*, 13,2 millions d’individus ont consulté
chaque mois au moins un site dédié à la contrefaçon
audiovisuelle en 2013, soit 15,8% de plus qu’en 2009. Le
nombre d’internautes ayant fortement augmenté depuis
cette période, passant de 33,6 à 46,5 millions, la pro-
portion d’internautes “pirates” reste stable. “Mais cela
fait tout de même 2 millions d’individus supplémentaires
qui consomment des films illégalement…”, note Frédéric
Delacroix, délégué général de l’Alpa.
Piratage
de lutte
des séances
audiovisuel  :
Un sur trois :
c’est la proportion
d’internautes
qui téléchargent
ou regardent illégalement
des films ou des séries
sur internet. Face à l’ampleur
du phénomène, les ayants droit
ont mis en place des solutions
pour lutter au quotidien
contre les diverses formes
du piratage.
■ Cécile Blanchard
American Sniper de Clint Eastwood,
l’un des films les plus piratés au monde.
enquête 17
N° 3633 du 27 mars 2015
©Ufodistribution
creditphoto
ros en 2013, et la dépense des ménages en la matière est
en constante diminution depuis trois ans. De son côté,
l’usage de la VàD continue à croître doucement (31,5%
d’internautes ont déjà payé pour des programmes en VàD
en 2013, contre 28,9% en 2012), pour un chiffre d’affaires
total évalué à 245 M€. “L’économie du cinéma s’appuie
sur trois piliers : l’exploitation en salle, la ­diffusion à
la télévision, et enfin, celle en DVD, blu-ray, et VàD. Si
deux piliers sur trois sont déstabilisés, l’économie du
secteur est forcément extrêmement fragilisée”, rappelle
éric Walter, secrétaire général de la Haute Autorité pour
la diffusion des œuvres et la protection des droits sur
internet (Hadopi).
“On sait qu’en France, chaque année, 250 millions de
films et 400 millions d’épisodes de séries sont piratés.
C’est plus que le marché des films en salle et de la vidéo
réunis”, renchérit Dominique Masseran, directeur général
de Fox Pathé Europa et président du Syndicat de l’édition
vidéo numérique (SEVN). Un marché parallèle accessible
à un nombre grandissant de personnes contre lequel il est
difficile de lutter. Car il y a de multiples façons de pirater
des contenus, et elles ne cessent de se renouveler. D’un
côté, le peer to peer (P2P), réseau de partage de fichiers
qui met en liaison, grâce à un logiciel, un utilisateur avec
un autre possédant le fichier convoité, voit sa pratique
diminuer au fil des ans. Mais cette relative diminution se
fait au profit de deux autres méthodes de consommation
de contenu illégal : le téléchargement direct (qui consiste
à mettre à disposition des fichiers téléchargeables sur un
serveur), et le streaming. Et, depuis le printemps 2014,
avec le lancement du site Popcorn Time, une nouvelle
technique a vu le jour : le “streaming en peer to peer”,
qui permet de commencer à visionner un contenu tout
en le téléchargeant, combinant ainsi la facilité d’utilisa-
tion du streaming avec la qualité d’image et de son du
téléchargement.
Des films piratés
directement sur l’écran Télé…
“Popcorn Time, c’est un Netflix gratuit, sans chronologie
des médias”, résume Nils Hoffet, directeur du manage-
ment et des médias du groupe TF1. Et, bien entendu, sans
respect ni rémunération du droit d’auteur. ­Ergonomique,
sans publicité, ce logiciel ne fait rien ­d’illégal aux yeux
de la loi, puisqu’il se contente d’agréger des fichiers
bit-torrent. “De plus en plus, les offres légales sont
en ­concurrence frontale avec des offres illégales qui
­proposent des contenus et une expérience client de
qualité. Mais ce qui nous inquiète par-dessus tout, c’est
qu’une application comme Popcorn Time est désormais
disponible sur Play Store, le magasin d’applications de
Google. Et que Google investit de plus en plus les écrans
TV, que ce soit avec sa clé Chromecast, ou avec Android
TV”, renchérit Tristan Du Laz, directeur général adjoint
de TF1 Vidéo. Avec l’équipement nécessaire, tous les
contenus illégaux accessibles sur Popcorn Time peuvent
donc être visibles sur un écran de téléviseur. Autre raison
d’inquiétude : le logiciel, développé par “une bande de
geeks venant du monde entier”, comme l’indique son
site internet, est open source. Il peut donc être dupliqué
à l’infini. Fermé par ses tout premiers créateurs échaudés
par les risques de poursuites judiciaires, il a d’ailleurs
immédiatement été relancé par d’autres développeurs.
25 000 procès-verbaux et des
actions judiciaires qui marquent
En France, la première pierre pour lutter contre le P2P (et
donc contre Popcorn Time), est encore la réponse gra-
duée, lancée en 2009 par la Hadopi. Le principe ? Une
première lettre est envoyée à l’internaute qui s’est rendu
coupable de contrefaçon sur un réseau P2P. S’il récidive,
il reçoit un second avertissement. La troisième infraction
constatée mène à une action judiciaire. “à l’Alpa, nous
disposons d’agents assermentés qui peuvent constater
par des procès-verbaux les faits de contrefaçons. Nous
transmettons ensuite ces PV à l’Hadopi pour déclen-
cher l’action publique. Nous agissons pour le compte de
nos membres qui se portent partie civile dans le cadre
­d’actions judiciaires. En moyenne, nous transmettons
chaque jour 25 000 procès-verbaux”, précise Frédéric
Delacroix, délégué général de l’Alpa. En juillet 2014, la
Commission a déclaré avoir presque doublé le nombre
de recommandations envoyées (plus de 300 000 premiers
avertissements et près de 150 000 deuxièmes) au cours
de l’année écoulée. 116 dossiers ont été transmis aux
procureurs de la République pour faire l’objet de pour-
suites. Mais le temps judiciaire est long : certains procès,
entamés il y a plusieurs années, aboutissent seulement
aujourd’hui. C’est le cas du site eMule Paradise, qui réper-
toriait des liens de téléchargement eMule (célèbre logiciel
de peer to peer), dont le procès a eu lieu début février
après une procédure enclenchée… il y a huit ans. Verdict
en mai. Idem pour le procès “Allostreaming”, opposant
les ayants droit aux fournisseurs d’accès à internet et aux
moteurs de recherche. La justice a ordonné le blocage
d’accès des sites de streaming incriminés par les FAI et
leur déréférencement des moteurs de recherche en 2013,
mais l’affaire est aujourd’hui portée en appel, empêchant
toute jurisprudence**. “Cette mesure a démontré son
efficacité car les sites ont disparu des écrans radars et
ont cessé d’être fréquentés par les internautes français”,
rappelle Frédéric Delacroix.
Car, au grand désespoir des ayants droit, l’offre illégale
est souvent très bien référencée et apparaît même bien
avant l’offre légale dans les pages de recherche. Plus
rapide que le recours judiciaire, le nettoyage des moteurs
de recherche est alors une solution qui permet de faire
disparaître les sites illicites des premiers résultats. Mais,
pour être efficace, il doit être effectué quasi quotidien-
nement ! “Nous militons d’ailleurs pour une responsa-
bilisation des FAI et des moteurs de recherche”, indique
Dominique Masseran.
Innovation et imagination en tête
C’est surtout du côté des sociétés privées de protec-
tion des œuvres sur internet que se situe l’innovation
en matière de lutte contre le piratage. Elles s’appellent
Blue Efficience, Tetra Media Guard, ou Leak ID et les
ayants droit font désormais appel à leurs services pour
protéger leurs œuvres sur le web. “Des agences comme
la nôtre mènent des initiatives de recherche et de déve-
loppement dont le but est de ralentir ou bloquer les télé-
chargements. Concrètement, cela empêche l’internaute
de télécharger son film jusqu’au bout. Le but est de rendre
l’expérience utilisateur négative. Ce sont des technolo-
gies très fines, extrêmement coûteuses à développer,
mais qui peuvent apporter une réponse efficace
Quelles mesures
gouvernementales ?
Outre la signature des chartes
avec les publicitaires et les acteurs
du paiement en ligne, deux autres
mesures phares ont été annoncées
par la ministre de la Culture
et de la Communication.
D’une part, la simplification
des procédures judiciaires,
avec notamment la nomination
de magistrats référents d’ici la fin juin.
Enfin, l’ouverture d’une “réflexion
sur la responsabilité de certaines
plateformes de partage de vidéos
qui, non seulement, hébergent
mais assurent également un rôle
de distribution voire d’éditorialisation
des œuvres.” Il s’agira ici de déterminer
si le statut d’hébergeur
est toujours adapté aux plateformes.
Wrong Cops
de Quentin Dupieux.
Popcorn Time
héberge films et séries
en toute légalité.
©dr
enquête18
N° 3633 du 27 mars 2015
à des logiciels de streaming en peer to peer par
exemple.” Autre technique utilisée qui, si elle ne néces-
site pas de recherche et développement, a le mérite de
l’originalité : la diffusion de fichiers promotionnels. “Il ne
s’agit pas vraiment de diffuser de faux fichiers, comme
c’était le cas il y a quelques années, mais de mettre à
disposition un film promotionnel en faisant croire que
c’est peut-être le vrai. C’est une initiative que nous avons
menée pour protéger le film Wrong Cops de Quentin
Dupieux par exemple. Nous nous sommes servis d’un
court métrage tourné deux ans auparavant par l’équipe
du film et baptisé Wrong Cops Chapter One, et l’avons
proposé en téléchargement, et sur les plateformes vidéo
comme YouTube. Sur celle-ci, la vidéo promotionnelle
a atteint les 100 000 vues, et elle apparaissait en ­tête de
liste dans les moteurs de recherche. C’est un moyen de
­réorientation et de valorisation de l’offre légale mais qui
ne peut marcher que si elle propose un contenu original”,
souligne Thierry Chevillard.
Des utilisateurs
et acteurs parfois retors
Plus classiques, les empreintes sont des mesures
­techniques de protection, proposées par les plateformes
de partages vidéo. Qu’elles s’appellent Signature (déve-
loppée par l’INA et adoptée par Dailymotion), ou Content
ID (la solution proposée par YouTube), elles ont pour but
d’empêcher l’upload d’un film. Concrètement, lorsqu’un
internaute veut poster un film marqué d’une empreinte,
la plateforme le reconnaît et le refuse. “Nous en créons
sur la totalité de nos programmes, ainsi que sur l’en-
semble de nos nouveautés cinéma, sorties chez TF1, TF1
Vidéo et en VàD. Au total, nous comptabilisons plus de
100 000 empreintes actives sur tous les genres (longs
métrages, séries françaises et étrangères, jeunesse…)”,
explique Nils Hoffet.
Un système facile à mettre en place et relativement
­efficace qui gagnerait à être plus utilisé, “par les ayants
Selma
d’ Ava
DuVernay
enregistre
des télé-
chargements
illégaux
records.
L’Allemagne et
le Royaume Uni :
des exemples
à suivre ?
En Allemagne, la législation
est très répressive. Là-bas,
c’est sans avertissement
que l’internaute contrevenant
reçoit, directement d’un avocat,
une mise en demeure de payer
une somme, qui peut aller
jusqu’à 1 00 €. L’observatoire
de la consommation en Europe
note que ce système
est “tellement rentable
pour certains avocats allemands
que les tribunaux commencent
à poser des limites : le tribunal
de Nuremberg a, par exemple,
jugé abusif les 199 mises
en demeure envoyées
par un cabinet d’avocats
en une semaine”.
Au Royaume-Uni, le système
de la riposte graduée est similaire
à celui de la Hadopi. La loi prévoit
également le blocage des sites
internet qui ne respectent
pas les droits d’auteur.
En novembre 2014, 53 d’entre eux
ont ainsi été censurés,
selon la BBC, ce qui porte
le total des sites bloqués
à 93 depuis 2012.
Google”, indique la Société des auteurs dans une lettre
adressée à la ministre, soulignant ainsi la nécessité de
repenser “la question du respect de l’exploitation perma-
nente et suivie des œuvres”. Une demande qui nécessi-
terait de modifier le code de la propriété intellectuelle.
Autant de mesures, forcément contournables plus ou
moins facilement, qui remettent la question du piratage
audiovisuel sous le feu des projecteurs, tout en réaf-
firmant l’importance de proposer une offre légale à la
hauteur. Car, comme le souligne Dominique Masseran :
“Notre concurrent principal aujourd’hui, c’est le pira-
tage. Il faut que l’on arrive à offrir mieux, en termes de
contenus, de qualité, de bonus, d’accessibilité sur tous
les écrans”. Avec un objectif : réinventer l’équilibre avec
le numérique. ❖
droit comme par les acteurs du Net. Depuis quelque
temps, Facebook se développe sur la vidéo, mais il ne
propose aucun système de protection des contenus. C’est
aussi un sujet préoccupant…” ajoute-t-il. Pour autant,
les empreintes ne résolvent pas tout. Car, comme tout
système de protection, elles sont de plus en plus ­souvent
altérées par les utilisateurs, ce qui leur permet de les
contourner. “Pour lutter contre cela, notre prestataire,
Leak ID, effectue une recherche par mots-clés sur les
plateformes YouTube et Dailymotion afin de retrouver
les programmes qui ont réussi à passer entre les mailles
du filet, et demander leur retrait”, poursuit Nils Hoffet.
Une méthode de la notification et du retrait qui a fait
ses preuves. “Les plateformes vidéos et les sites qui
recensent des liens de téléchargement accèdent à 95% de
nos demandes, confirme Thierry Chevillard. Mais depuis
deux ans, nous sommes face à une montée en puissance
de nouveaux opérateurs qui se sont créés pour faire du
profit grâce au piratage. Eux résistent à tout prix à nos
notifications.” La seule solution est alors de se tourner
vers la justice, une fois encore, pour engager des procé-
dures à l’encontre des sites pirates ou de leurs hébergeurs
de serveurs.
Les sites pirates,
ces concurrents très réactifs
Des sites illicites qui sont désormais dans le viseur
du gouvernement. La ministre de la Culture et de la
­Communication, Fleur Pellerin, a en effet annoncé, le
11 mars dernier, une série de mesures contre le piratage
(cf. encadré) qui s’appuie sur deux piliers : la lutte contre
les sites illicites et l’encouragement au développement
de l’offre légale. Au programme donc, la signature d’une
charte, le 23 mars, avec les acteurs de la publicité, suivie
par une autre (prévue pour juin) avec les acteurs du paie-
ment en ligne. Deux mesures “follow the money” ayant
pour objectif de les affaiblir en asséchant leurs ressources
financières, qui semblent être déjà suivies d’effets, et qui
montrent surtout leur réactivité.
Certains sites de téléchargement direct, comme Upto-
Box, déclarent avoir subi “des pressions de la part des
acteurs CB” et proposent donc le paiement par SMS ou
en Bitcoins (une monnaie virtuelle) ! Parallèlement, le
CNC a lancé un site de référencement de l’offre légale,
vad.cnc.fr. Une initiative saluée, mais qui souffre encore
de certaines insuffisances, comme l’a noté la SACD qui
y a vérifié la disponibilité des œuvres des membres de
son conseil d’administration (Bertrand Tavernier, Jean
­Becker, Jean Marbœuf et Laurent Heynemann). Bilan :
une grande ­partie de leur filmographie n’apparaît pas
dans le moteur de référencement. Et, parmi les films
effectivement présents, certains ne sont disponibles sur
aucune des ­plateformes de vidéo à la demande existantes,
alors qu’ils sont ­proposés “de manière illicite sur des sites
de ­streaming ­accessibles par une simple recherche sur
©AtsushiNishijima
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les films marqués d’une empreinte.

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e-cinéma : des débuts prometteurs
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Analyse de la présence en ligne des salles de cinéma indépendantes et d'art e...
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Piratage audiovisuel : des séances de lutte

  • 1. enquête16 N° 3633 du 27 mars 2015 F évrier 2015 : et le vainqueur du film le plus piraté au monde est… American Sniper ! Deux jours avant les Oscars, la société Irdeto qui a surveillé les ­téléchargements illégaux dans plus de 200 pays entre le 1er janvier et le 15 février, dévoile ses résultats. Bilan : les films nommés à la cérémonie amé- ricaine ont été massivement téléchargés durant ce laps de temps. Le film de Clint Eastwood a ainsi enregistré une progression de téléchargements de +230%, et Selma, nommé dans la catégorie meilleur film, de +1 033% ! Si la France ne fait pas partie du top 10 des pays ayant le ©WarnerBros.Pictures 250 millions de films et 400 millions d’épisodes de séries piratés Pour autant, chiffrer les impacts réels du téléchargement ou du visionnage illégal sur l’économie du secteur s’avère compliqué. Les entrées du cinéma en salle se portent bien, affichant même une santé florissante avec une aug- mentation de 7,7% en 2014 selon le CNC, pour dépasser les 200 millions d’entrées. A contrario, le marché de la vidéo physique a vu son chiffre d’affaires diminuer de moitié en l’espace de dix ans, comme le note le CNC dans son rapport sur le marché de la vidéo publié en mars 2014. Le chiffre des ventes de DVD et blu-ray est même passé pour la première fois sous la barre du ­milliard d’eu- plus téléchargé les films en lice aux Oscars, elle n’est pourtant pas en reste en ce qui concerne le piratage des œuvres sur internet. Selon la dernière étude publiée par l’association de lutte contre le piratage audiovisuel (Alpa) et Médiamétrie*, 13,2 millions d’individus ont consulté chaque mois au moins un site dédié à la contrefaçon audiovisuelle en 2013, soit 15,8% de plus qu’en 2009. Le nombre d’internautes ayant fortement augmenté depuis cette période, passant de 33,6 à 46,5 millions, la pro- portion d’internautes “pirates” reste stable. “Mais cela fait tout de même 2 millions d’individus supplémentaires qui consomment des films illégalement…”, note Frédéric Delacroix, délégué général de l’Alpa. Piratage de lutte des séances audiovisuel  : Un sur trois : c’est la proportion d’internautes qui téléchargent ou regardent illégalement des films ou des séries sur internet. Face à l’ampleur du phénomène, les ayants droit ont mis en place des solutions pour lutter au quotidien contre les diverses formes du piratage. ■ Cécile Blanchard American Sniper de Clint Eastwood, l’un des films les plus piratés au monde.
  • 2. enquête 17 N° 3633 du 27 mars 2015 ©Ufodistribution creditphoto ros en 2013, et la dépense des ménages en la matière est en constante diminution depuis trois ans. De son côté, l’usage de la VàD continue à croître doucement (31,5% d’internautes ont déjà payé pour des programmes en VàD en 2013, contre 28,9% en 2012), pour un chiffre d’affaires total évalué à 245 M€. “L’économie du cinéma s’appuie sur trois piliers : l’exploitation en salle, la ­diffusion à la télévision, et enfin, celle en DVD, blu-ray, et VàD. Si deux piliers sur trois sont déstabilisés, l’économie du secteur est forcément extrêmement fragilisée”, rappelle éric Walter, secrétaire général de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi). “On sait qu’en France, chaque année, 250 millions de films et 400 millions d’épisodes de séries sont piratés. C’est plus que le marché des films en salle et de la vidéo réunis”, renchérit Dominique Masseran, directeur général de Fox Pathé Europa et président du Syndicat de l’édition vidéo numérique (SEVN). Un marché parallèle accessible à un nombre grandissant de personnes contre lequel il est difficile de lutter. Car il y a de multiples façons de pirater des contenus, et elles ne cessent de se renouveler. D’un côté, le peer to peer (P2P), réseau de partage de fichiers qui met en liaison, grâce à un logiciel, un utilisateur avec un autre possédant le fichier convoité, voit sa pratique diminuer au fil des ans. Mais cette relative diminution se fait au profit de deux autres méthodes de consommation de contenu illégal : le téléchargement direct (qui consiste à mettre à disposition des fichiers téléchargeables sur un serveur), et le streaming. Et, depuis le printemps 2014, avec le lancement du site Popcorn Time, une nouvelle technique a vu le jour : le “streaming en peer to peer”, qui permet de commencer à visionner un contenu tout en le téléchargeant, combinant ainsi la facilité d’utilisa- tion du streaming avec la qualité d’image et de son du téléchargement. Des films piratés directement sur l’écran Télé… “Popcorn Time, c’est un Netflix gratuit, sans chronologie des médias”, résume Nils Hoffet, directeur du manage- ment et des médias du groupe TF1. Et, bien entendu, sans respect ni rémunération du droit d’auteur. ­Ergonomique, sans publicité, ce logiciel ne fait rien ­d’illégal aux yeux de la loi, puisqu’il se contente d’agréger des fichiers bit-torrent. “De plus en plus, les offres légales sont en ­concurrence frontale avec des offres illégales qui ­proposent des contenus et une expérience client de qualité. Mais ce qui nous inquiète par-dessus tout, c’est qu’une application comme Popcorn Time est désormais disponible sur Play Store, le magasin d’applications de Google. Et que Google investit de plus en plus les écrans TV, que ce soit avec sa clé Chromecast, ou avec Android TV”, renchérit Tristan Du Laz, directeur général adjoint de TF1 Vidéo. Avec l’équipement nécessaire, tous les contenus illégaux accessibles sur Popcorn Time peuvent donc être visibles sur un écran de téléviseur. Autre raison d’inquiétude : le logiciel, développé par “une bande de geeks venant du monde entier”, comme l’indique son site internet, est open source. Il peut donc être dupliqué à l’infini. Fermé par ses tout premiers créateurs échaudés par les risques de poursuites judiciaires, il a d’ailleurs immédiatement été relancé par d’autres développeurs. 25 000 procès-verbaux et des actions judiciaires qui marquent En France, la première pierre pour lutter contre le P2P (et donc contre Popcorn Time), est encore la réponse gra- duée, lancée en 2009 par la Hadopi. Le principe ? Une première lettre est envoyée à l’internaute qui s’est rendu coupable de contrefaçon sur un réseau P2P. S’il récidive, il reçoit un second avertissement. La troisième infraction constatée mène à une action judiciaire. “à l’Alpa, nous disposons d’agents assermentés qui peuvent constater par des procès-verbaux les faits de contrefaçons. Nous transmettons ensuite ces PV à l’Hadopi pour déclen- cher l’action publique. Nous agissons pour le compte de nos membres qui se portent partie civile dans le cadre ­d’actions judiciaires. En moyenne, nous transmettons chaque jour 25 000 procès-verbaux”, précise Frédéric Delacroix, délégué général de l’Alpa. En juillet 2014, la Commission a déclaré avoir presque doublé le nombre de recommandations envoyées (plus de 300 000 premiers avertissements et près de 150 000 deuxièmes) au cours de l’année écoulée. 116 dossiers ont été transmis aux procureurs de la République pour faire l’objet de pour- suites. Mais le temps judiciaire est long : certains procès, entamés il y a plusieurs années, aboutissent seulement aujourd’hui. C’est le cas du site eMule Paradise, qui réper- toriait des liens de téléchargement eMule (célèbre logiciel de peer to peer), dont le procès a eu lieu début février après une procédure enclenchée… il y a huit ans. Verdict en mai. Idem pour le procès “Allostreaming”, opposant les ayants droit aux fournisseurs d’accès à internet et aux moteurs de recherche. La justice a ordonné le blocage d’accès des sites de streaming incriminés par les FAI et leur déréférencement des moteurs de recherche en 2013, mais l’affaire est aujourd’hui portée en appel, empêchant toute jurisprudence**. “Cette mesure a démontré son efficacité car les sites ont disparu des écrans radars et ont cessé d’être fréquentés par les internautes français”, rappelle Frédéric Delacroix. Car, au grand désespoir des ayants droit, l’offre illégale est souvent très bien référencée et apparaît même bien avant l’offre légale dans les pages de recherche. Plus rapide que le recours judiciaire, le nettoyage des moteurs de recherche est alors une solution qui permet de faire disparaître les sites illicites des premiers résultats. Mais, pour être efficace, il doit être effectué quasi quotidien- nement ! “Nous militons d’ailleurs pour une responsa- bilisation des FAI et des moteurs de recherche”, indique Dominique Masseran. Innovation et imagination en tête C’est surtout du côté des sociétés privées de protec- tion des œuvres sur internet que se situe l’innovation en matière de lutte contre le piratage. Elles s’appellent Blue Efficience, Tetra Media Guard, ou Leak ID et les ayants droit font désormais appel à leurs services pour protéger leurs œuvres sur le web. “Des agences comme la nôtre mènent des initiatives de recherche et de déve- loppement dont le but est de ralentir ou bloquer les télé- chargements. Concrètement, cela empêche l’internaute de télécharger son film jusqu’au bout. Le but est de rendre l’expérience utilisateur négative. Ce sont des technolo- gies très fines, extrêmement coûteuses à développer, mais qui peuvent apporter une réponse efficace Quelles mesures gouvernementales ? Outre la signature des chartes avec les publicitaires et les acteurs du paiement en ligne, deux autres mesures phares ont été annoncées par la ministre de la Culture et de la Communication. D’une part, la simplification des procédures judiciaires, avec notamment la nomination de magistrats référents d’ici la fin juin. Enfin, l’ouverture d’une “réflexion sur la responsabilité de certaines plateformes de partage de vidéos qui, non seulement, hébergent mais assurent également un rôle de distribution voire d’éditorialisation des œuvres.” Il s’agira ici de déterminer si le statut d’hébergeur est toujours adapté aux plateformes. Wrong Cops de Quentin Dupieux. Popcorn Time héberge films et séries en toute légalité. ©dr
  • 3. enquête18 N° 3633 du 27 mars 2015 à des logiciels de streaming en peer to peer par exemple.” Autre technique utilisée qui, si elle ne néces- site pas de recherche et développement, a le mérite de l’originalité : la diffusion de fichiers promotionnels. “Il ne s’agit pas vraiment de diffuser de faux fichiers, comme c’était le cas il y a quelques années, mais de mettre à disposition un film promotionnel en faisant croire que c’est peut-être le vrai. C’est une initiative que nous avons menée pour protéger le film Wrong Cops de Quentin Dupieux par exemple. Nous nous sommes servis d’un court métrage tourné deux ans auparavant par l’équipe du film et baptisé Wrong Cops Chapter One, et l’avons proposé en téléchargement, et sur les plateformes vidéo comme YouTube. Sur celle-ci, la vidéo promotionnelle a atteint les 100 000 vues, et elle apparaissait en ­tête de liste dans les moteurs de recherche. C’est un moyen de ­réorientation et de valorisation de l’offre légale mais qui ne peut marcher que si elle propose un contenu original”, souligne Thierry Chevillard. Des utilisateurs et acteurs parfois retors Plus classiques, les empreintes sont des mesures ­techniques de protection, proposées par les plateformes de partages vidéo. Qu’elles s’appellent Signature (déve- loppée par l’INA et adoptée par Dailymotion), ou Content ID (la solution proposée par YouTube), elles ont pour but d’empêcher l’upload d’un film. Concrètement, lorsqu’un internaute veut poster un film marqué d’une empreinte, la plateforme le reconnaît et le refuse. “Nous en créons sur la totalité de nos programmes, ainsi que sur l’en- semble de nos nouveautés cinéma, sorties chez TF1, TF1 Vidéo et en VàD. Au total, nous comptabilisons plus de 100 000 empreintes actives sur tous les genres (longs métrages, séries françaises et étrangères, jeunesse…)”, explique Nils Hoffet. Un système facile à mettre en place et relativement ­efficace qui gagnerait à être plus utilisé, “par les ayants Selma d’ Ava DuVernay enregistre des télé- chargements illégaux records. L’Allemagne et le Royaume Uni : des exemples à suivre ? En Allemagne, la législation est très répressive. Là-bas, c’est sans avertissement que l’internaute contrevenant reçoit, directement d’un avocat, une mise en demeure de payer une somme, qui peut aller jusqu’à 1 00 €. L’observatoire de la consommation en Europe note que ce système est “tellement rentable pour certains avocats allemands que les tribunaux commencent à poser des limites : le tribunal de Nuremberg a, par exemple, jugé abusif les 199 mises en demeure envoyées par un cabinet d’avocats en une semaine”. Au Royaume-Uni, le système de la riposte graduée est similaire à celui de la Hadopi. La loi prévoit également le blocage des sites internet qui ne respectent pas les droits d’auteur. En novembre 2014, 53 d’entre eux ont ainsi été censurés, selon la BBC, ce qui porte le total des sites bloqués à 93 depuis 2012. Google”, indique la Société des auteurs dans une lettre adressée à la ministre, soulignant ainsi la nécessité de repenser “la question du respect de l’exploitation perma- nente et suivie des œuvres”. Une demande qui nécessi- terait de modifier le code de la propriété intellectuelle. Autant de mesures, forcément contournables plus ou moins facilement, qui remettent la question du piratage audiovisuel sous le feu des projecteurs, tout en réaf- firmant l’importance de proposer une offre légale à la hauteur. Car, comme le souligne Dominique Masseran : “Notre concurrent principal aujourd’hui, c’est le pira- tage. Il faut que l’on arrive à offrir mieux, en termes de contenus, de qualité, de bonus, d’accessibilité sur tous les écrans”. Avec un objectif : réinventer l’équilibre avec le numérique. ❖ droit comme par les acteurs du Net. Depuis quelque temps, Facebook se développe sur la vidéo, mais il ne propose aucun système de protection des contenus. C’est aussi un sujet préoccupant…” ajoute-t-il. Pour autant, les empreintes ne résolvent pas tout. Car, comme tout système de protection, elles sont de plus en plus ­souvent altérées par les utilisateurs, ce qui leur permet de les contourner. “Pour lutter contre cela, notre prestataire, Leak ID, effectue une recherche par mots-clés sur les plateformes YouTube et Dailymotion afin de retrouver les programmes qui ont réussi à passer entre les mailles du filet, et demander leur retrait”, poursuit Nils Hoffet. Une méthode de la notification et du retrait qui a fait ses preuves. “Les plateformes vidéos et les sites qui recensent des liens de téléchargement accèdent à 95% de nos demandes, confirme Thierry Chevillard. Mais depuis deux ans, nous sommes face à une montée en puissance de nouveaux opérateurs qui se sont créés pour faire du profit grâce au piratage. Eux résistent à tout prix à nos notifications.” La seule solution est alors de se tourner vers la justice, une fois encore, pour engager des procé- dures à l’encontre des sites pirates ou de leurs hébergeurs de serveurs. Les sites pirates, ces concurrents très réactifs Des sites illicites qui sont désormais dans le viseur du gouvernement. La ministre de la Culture et de la ­Communication, Fleur Pellerin, a en effet annoncé, le 11 mars dernier, une série de mesures contre le piratage (cf. encadré) qui s’appuie sur deux piliers : la lutte contre les sites illicites et l’encouragement au développement de l’offre légale. Au programme donc, la signature d’une charte, le 23 mars, avec les acteurs de la publicité, suivie par une autre (prévue pour juin) avec les acteurs du paie- ment en ligne. Deux mesures “follow the money” ayant pour objectif de les affaiblir en asséchant leurs ressources financières, qui semblent être déjà suivies d’effets, et qui montrent surtout leur réactivité. Certains sites de téléchargement direct, comme Upto- Box, déclarent avoir subi “des pressions de la part des acteurs CB” et proposent donc le paiement par SMS ou en Bitcoins (une monnaie virtuelle) ! Parallèlement, le CNC a lancé un site de référencement de l’offre légale, vad.cnc.fr. Une initiative saluée, mais qui souffre encore de certaines insuffisances, comme l’a noté la SACD qui y a vérifié la disponibilité des œuvres des membres de son conseil d’administration (Bertrand Tavernier, Jean ­Becker, Jean Marbœuf et Laurent Heynemann). Bilan : une grande ­partie de leur filmographie n’apparaît pas dans le moteur de référencement. Et, parmi les films effectivement présents, certains ne sont disponibles sur aucune des ­plateformes de vidéo à la demande existantes, alors qu’ils sont ­proposés “de manière illicite sur des sites de ­streaming ­accessibles par une simple recherche sur ©AtsushiNishijima ©tf1 ©dr©dr Le site MyTFIVOD. Des plateformes qui refusent les films marqués d’une empreinte.