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[1]
Esclavage
et
Traite des Esclaves
chez les Arabo-Musulmans
Compilation d’articles divers
[2]
Les Négriers en Terre d’Islam
Jacques Heers. Professeur honoraire d'histoire à l'Université Paris
IV-Sorbonne.
Auteur de nombreux ouvrages, dont, notamment, Christophe Colomb,
Hachette, Paris, 1981 ; Marco Polo, Fayard, Paris, 1983 ; Machiavel,
Fayard, Paris, 1985 ; Gilles de Rais, Perrin, Paris, 1994 ; Jacques Coeur,
Perrin, Paris, 1997 ; Les Barbaresques, Perrin, Paris, 2001 ; Les négriers
en terre d'Islam, Perrin, Paris, 2001.
1
Les blancs, captifs et esclaves
La guerre pourvoyeuse de captifs (VIIe-Xe
siècle)
Les conquêtes musulmanes, du VIIe au VIIIe
siècle, si brutales et d'une telle ampleur que le
monde méditerranéen n'avait jamais rien connu
de tel, provoquèrent un nombre considérable de
captures et, aussitôt, un très important trafic
d'hommes et de femmes, conduits en troupes sur
les marchés des grandes cités.
L'esclavage devint alors un phénomène de
masse affectant tous les rouages sociaux, hors de
proportion avec ce qu'il avait été dans l'Empire
byzantin.
Dans les tout premiers temps de l'islam, les es-
claves étaient, comme dans l'Antiquité romaine
ou du temps de Byzance, essentiellement des
Blancs, raflés lors des expéditions ou exposés sur
les marchés par des trafiquants qui allaient les
acheter en de lointains pays, très loin même des
terres d'Islam.
Les négriers en terres d'Islam, p. 11
2
En Orient : captifs grecs et perses
La flotte du calife de Bagdad assiège Constantinople en 673. Elle trouve les murailles
de la ville renforcées par d'impressionnants fortins et les redoutables vaisseaux grecs
siphonophores, capables de lancer le terrible feu grégeois, prêts au combat. Cette résis-
tance byzantine ruine l'enthousiasme des assaillants qui se replient et ne tentent plus de
fortes attaques avant plusieurs décennies. En 716, ils mènent leurs troupes à travers
l'Anatolie, passent les Détroits et pénètrent jusqu'en Thrace tandis qu'une flotte de mille
vaisseaux cerne de nouveau Constantinople. Mais, attaqués par les Bulgares au nord,
[3]
décimés sur mer par le feu grégeois, les musulmans abandonnent, cette fois encore, le
siège après un an de durs combats. Ces premiers élans brisés, la guerre ne fut plus dès
lors que raids de cavalerie, raids sauvages, inopinés, non pour conquérir ou établir des
colonies militaires, centres de garnisons pour d'autres offensives, mais simplement pour
le butin et la chasse aux esclaves. Chez les chrétiens, les populations se réfugiaient dans
des camps fortifiés, à Dorylée, à Smyrne, à Milet. Sur ce front mouvant et incertain, har-
diment défendu par les colonies des acrites, soldats et paysans, les chefs guerriers se
retranchaient, sentinelles hasardées, dans leurs palais ceints de hautes murailles. Les
poèmes épiques, souvent d'origine populaire, modèles peut-être de nos chansons de
geste, content les hauts faits d'armes des héros, capitaines des châteaux dressés sur les
rives de l'Euphrate, mais disent aussi, en d'autres accents, les angoisses et les peines des
petites gens, paysans, villageois, surpris au travail, incapables de fuir assez tôt, emmenés
captifs pour servir en des terres lointaines d'Arabie ou d'Irak.
Ibidem, pp. 15-16
3
Les premiers grands marchés d'esclaves (IXe-Xe siècle)
Esclaves saxons, marchands juifs et chrétiens
Pendant longtemps, les géographes, les voyageurs et les marchands musulmans te-
naient pour «Slaves» tous les hommes qui vivaient hors de leurs Etats, de l'Espagne aux
steppes de la Russie et de l'Asie centrale et, plus loin encore, sur les terres inconnues,
contrées réputées rebelles de Gog et Magog.
Les conquérants musulmans n'ont tenté que très rarement des raids aussi loin de
leurs bases et les esclaves slaves ne pouvaient être qu'objets de traite. Ceux de Bohême
étaient régulièrement conduits à Prague, centre de castration pour les hommes, puis à
Ratisbonne. Ceux des pays plus au nord, avec les Saxons faits prisonniers lors des cam-
pagnes de Charlemagne des années 780, furent expédiés vers les gros bourgs fortifiés de
la route germanique pour finir sur le marché de Verdun. De là, on les menait à Lyon,
autre grand carrefour pour ce négoce des captifs, puis à Arles et Narbonne et, enfin, vers
les ports d'Espagne, du Maghreb ou, directement, de l'Orient.
Ce n'était ni affaires de peu ni d'un court moment: au xe siècle encore, Liutprand,
évêque de Crémone (920-972), ne cessait de dénoncer et de condamner les profits
énormes, proprement scandaleux, que réalisaient les marchands de Verdun. A la même
époque, les recensements des Slaves amenés sur le marché musulman de Cordoue don-
nent un chiffre de plus de dix mille en l'espace de cinquante années, de 912 à 961. Ils ont
très vite formé, comme les Turcs en Orient, peuple non encore islamisé, une part impor-
tante des troupes et du corps des officiers au service du calife.
Au temps de la décadence de ce califat de Cordoue et de l'éparpillement des pouvoirs,
dans les années 1000, plusieurs d'entre eux, notamment dans le Levant ibérique, prirent
la tête d'un petit royaume, alors complètement indépendant.
Les marchands des pays d'islam, eux non plus, ne se risquaient pas volontiers hors du
monde méditerranéen et répugnaient à se rendre en Gaule où ils ne rencontraient que
des populations hostiles. On ne les y voyait pas fréquenter les marchés d'esclaves alors
que les Juifs étaient, eux, communément montrés comme les maîtres de ce malheureux
commerce.
[4]
Certains n'étaient que de petites gens, colporteurs errants, vendeurs de bibelots et de
pacotille qui ne prenaient à leur suite qu'un ou deux captifs. D'autres, au contraire, bien
en place auprès des palais des rois francs, maîtres d'entreprises implantées dans tout le
pays, convoyaient vers les ports de la Méditerranée de nombreuses troupes de prison-
niers, embarquées vers l'Orient.
« Ils rapportent d'Occident des eunuques, des esclaves des deux sexes, du brocart, des
peaux de castor, des pelisses de martre et des autres fourrures et des armes.»
Nos auteurs, musulmans et chrétiens, insistent particulièrement sur le rôle des Juifs
qui, dans l'Espagne musulmane, formaient souvent la majorité de la population dans les
grandes villes, notamment à Grenade, appelée communément, au VIIIe siècle, la « ville
des Juifs».
Négociants en produits de luxe, métaux, bijoux et soieries, plus rarement prêteurs sur
gages, ils se groupaient en petites sociétés de parents et d'amis, les uns établis dans une
des cités proches de la frontière castillane, les autres dans les ports d'Ibérie et d'Afrique
du Nord, et prenaient à leur compte certainement une bonne part des transactions entre
les deux mondes. On assurait aussi que, les musulmans s'y refusant, ces trafiquants
israélites veillaient à la bonne tenue des centres de castration.
Cependant, des marchands gaulois et chrétiens, de Verdun surtout, allaient eux aussi
régulièrement commercer à Saragosse et dans les autres cités musulmanes d'Espagne
pour y présenter et y vendre des captifs.
L'abbé Jean de Gorze, chargé de mission par l'empereur germanique Otton 1er auprès
du calife de Cordoue, se fit accompagner par un de ces négociants chrétiens de Verdun
qui connaissait bien l'Espagne.
Les Mozarabes, chrétiens demeurés en Espagne sous la domination musulmane, ne
demeuraient pas inactifs; ils passaient les Pyrénées, fréquentaient les marchés, à Verdun
bien sûr et jusque dans les cités des rives du Rhin.
Pour l'Italie, les mêmes auteurs parlent beaucoup moins des Juifs mais plus souvent
des marchands chrétiens, hommes de vilaines mains, pillards et complices, meneurs de
raids au-delà des Alpes ou sur l'autre rive de l' Adriatique, tous trafiquants d'esclaves,
capables de faire prisonniers et de ramener hommes et femmes sans regarder à leurs
origines ou à leur religion.
Les hommes d'affaires vénitiens, ceux-ci mieux organisés et plus honorablement con-
nus, armant des navires à leurs noms, y prenaient part. Soumise alors à Byzance, Venise
bravait les empereurs de Constantinople qui avaient formellement condamné cette
traite et menacé les coupables de dures sanctions.
Pour mettre un terme à ces sinistres négoces ou, du moins, en limiter les profits, Léon
V l'Arménien, empereur (813820), interdit à tous ses sujets, plus particulièrement aux
Vénitiens, de commercer dans les ports d'Egypte et de Syrie. L'on vit pourtant d'auda-
cieux trafiquants traquer des esclaves dans les Abruzzes et le Latium pour les revendre
dans le Maghreb.
Ibidem, pp. 16-18
4
[5]
Les Russes et les Bulgares de la Volga
Le Livre sur la clairvoyance en matière commerciale, attribué à l'écrivain al-Djahiz (d.
669), faisait déjà mention d'esclaves des deux sexes importés du pays des Khazares sur
les rives de la Volga, près de son embouchure.
Cependant, les trafics marchands avec les villes de Russie ne prirent un bel essor que
plus tard, au temps où la dynastie des Sassanides puis celle des Bouyides, toutes deux
originaires de Perse, régnèrent à Bagdad.
Le célèbre lettré athTha' alibi imagine une conversation entre deux courtisans du roi
bouyide Adud al-Dawla (977-983) et les fait parler de jeunes esclaves turcs, de concu-
bines de Boukhara et de servantes de Samarkand.
Sur les lointains marchés de Kiev et de Bulghar, la capitale des Bulgares, les mar-
chands musulmans étaient presque tous originaires ou de la Transoxiane ou du Kharas-
san, au nord-est de l'Iran.
Les trafiquants de la ville de Mechhed venaient, chaque saison, au retour de leurs ex-
péditions dans le Nord et les pays des steppes, vendre à Bagdad diverses sortes de four-
rures, les moutons et les bœufs, le miel, la cire et les cuirs, les cuirasses et, surtout, les
esclaves.
Pour se procurer ces hommes et ces femmes, de plus en plus nombreux et d'origines
de plus en plus lointaines, les musulmans de Perse traitaient avec les Bulgares ou avec
les Russes, intermédiaires obligés, convoyeurs de captifs.
L'année 921, le calife abbasside de Bagdad, Muqtadir, envoya une ambassade au roi
des Bulgares de la Volga. Le secrétaire de l'expédition, Ahmed ibn Fodlan, tenait, au jour
le jour, registre des marches de la caravane et des étapes, jusque très loin dans des pays
jusqu'alors inconnus; il s'attarde longuement { décrire les mœurs et les usages poli-
tiques de ces peuples, si différents de ceux de son monde.
« La coutume est que le roi des Khazares ait vingtcinq femmes dont chacune est la fille
d'un des rois des pays voisins. Il les prend de gré ou de force. Il a aussi des esclaves con-
cubines pour sa couche au nombre de soixante qui sont toutes d'une extrême beauté.
Toutes ces femmes, libres ou esclaves, sont dans un château isolé dans lequel chacune a
un pavillon à coupole recouvert de bois de teck. Chacune d'elles a un eunuque qui la
soustrait aux regards. » Et encore : « Quand un grand personnage meurt, les gens de sa
famille disent à ses filles esclaves et à ses garçons esclaves: " Qui d'entre vous mourra
avec lui? " » Pour eux, c'est un honneur que de se sacrifier.
Ibn Fodlan voit aussi, à leur campement au bord du fleuve, des Russes, « les plus mal-
propres des créatures de Dieu », qui ancrent leurs bateaux sur les berges et construisent
de grandes maisons de bois. Dans chacune de ces maisons, sont réunies de dix à vingt
personnes. « Avec eux sont de belles jeunes filles esclaves destinées aux marchands.
Chacun d'entre eux, sous les yeux de son compagnon, a des rapports sexuels avec une
esclave. Parfois tout un groupe d'entre eux s'unissent de cette manière, les uns en face
des autres. Si un marchand entre à ce moment, pour acheter à l'un d'eux une jeune fille
et le trouve en train de cohabiter avec elle, l'homme ne se détache pas d'elle avant
d'avoir satisfait son besoin. »
Ce fut, au long des temps, un négoce tout ordinaire, quasi routinier, soumis aux cou-
tumes, aux règles et aux taxes. «Quand les Russes ou les gens d'autres races arrivent
[6]
dans le pays des Bulgares avec des esclaves, le roi a le droit de choisir pour lui un esclave
sur dix. »
Les Russes s'aventuraient très loin et, des régions les plus éloignées du « pays des
Slaves », ramenaient des captifs, hommes et femmes des deux sexes, et des fourrures
précieuses, peaux de castor et de renard noir.
Deux cents ans après Ibn Fodlan, Abu Hamid de Grenade, lors d'un long et pénible
voyage en Europe de l'Est, trouve les Russes partout sur son chemin. Ils lui parlent des
Wisu, peuple de la région du lac Ladoga où les hommes chassent le castor, et des Arw du
pays des grands fleuves qui, eux, chassent 1 'hermine et le petit-gris.
Au-delà des Wisu, près de la mer Arctique, «la mer des ténèbres », vit un peuple de
nomades, les Yura, qui, contre des épées, livrent aux Russes des peaux de zibeline et des
esclaves. Ces deux négoces, peaux de bêtes et bétail humain, allaient partout de pair.
Là aussi, les Juifs assuraient certainement une part importante des échanges, en par-
ticulier à l'est, pour les produits de la lointaine Asie ou des steppes et déserts des hauts
plateaux. L'historien et géographe Ibn Khurdadhbeth consacre un long passage de sa
description du monde à ces Juifs Radhanites et décrit, noms de nombreux fleuves, de
villes et de peuples à l'appui, quatre de leurs grands itinéraires : l'un arrivant de l'ouest,
par mer, vers Antioche, un autre le long de la côte méridionale de la Perse, un autre en-
core par la mer Rouge et la mer d'Oman jusqu'en Inde, et le dernier, le plus important,
vers l'Europe centrale et les pays du Nord.
Ibidem, pp. 18-21
5
La ruée des Ottomans (XIIe-XVIe siècle)
En pays d'islam, principalement en Orient, les esclaves ne fondaient pas de familles et
n'avaient pas ou peu d'enfants. Le nombre relativement important d'eunuques, l'inter-
diction faite, bien souvent, aux femmes de se marier, les mortalités terriblement élevées
du fait des conditions de travail sur les grands domaines et dans les mines, des guerres
entre souverains, peuples et factions, des maladies et des épidémies, firent que les
maîtres voyaient leur cheptel humain sans cesse s'affaiblir et devaient le renouveler.
Cependant, dès le IXe siècle, les conquêtes se sont essoufflées et les peuples déjà
soumis et convertis n'étaient plus territoires de chasse. Pendant plusieurs siècles, les
musulmans ont cessé de lancer leurs troupes loin de leurs Etats et la traite fournit alors,
de très loin sans doute, le plus grand nombre de captifs.
Les grandes offensives n'ont repris que quelque trois cents ans après celles des pre-
miers conquérants lorsque les Turcs ottomans venus d'Asie centrale, convertis à l'islam,
lancèrent de nouvelles attaques contre les chrétiens en Anatolie : sur Erzeroum dès
1048, sur Sébaste l'an suivant. En 1071, à Mantzikiert, au nord du lac de Van, ils infligent
une retentissante défaite aux troupes de Byzance, font prisonnier l'empereur Romain
Diogène, s'ouvrent la route de Constantinople, installent leur capitale à Brousse et un
sultanat { Konya, en plein cœur du pays.
Ce fut, de nouveau, le temps des chasses aux esclaves, sur mer et sur terre. Les poètes
de cour, à la solde des émirs ottomans d'Anatolie, chantaient les exploits des pirates de
Smyrne et d' Alania qui enlevaient les femmes et les enfants de « ces chiens de mé-
[7]
créants ». De 1327 à 1348, Umur Pacha, l'un des cinq fils de l'émir d'Aydin 21, lui-même
émir de Smyrne et pirate à tous vents, sema la terreur dans tout l'Orient méditerranéen,
dans les îles de Chio et de Samos, et jusque sur les côtes du Péloponnèse. Non pour con-
quérir des terres, non même pour établir des guerriers et des marchands en quelques
comptoirs, mais pour ramener, chaque saison, de merveilleux butins et des centaines de
captifs.
Ses hommes « capturèrent beaux garçons et belles filles sans nombre au cours de
cette chasse et les emmenèrent. Ils mirent le feu à tous les villages ... Au retour, riches et
pauvres furent remplis de joie par ses présents. Tout le pays d'Aydin fut comblé de ri-
chesses et de biens et la gaieté régna partout. Filles et garçons, agneaux, moutons, oies,
canards rôtis et le vin étaient débarqués en abondance. A son frère, il donna en cadeau
nombre de vierges aux visages de lune, chacune sans pareille entre mille; il lui donna
aussi de beaux garçons francs pour qu'il dénoue les tresses de leurs cheveux. A ces ca-
deaux, il ajouta de l'or, de l'argent et des coupes innombrables ».
Ce n'étaient pas simples brigandages, expéditions de forbans, de hors-la-loi, mais une
guerre encouragée par les chefs religieux, aventures bien codifiées, menées selon la Loi
et les règles de l'islam, en tous points une guerre sainte : la cinquième part du butin, «
part de Dieu », allait aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs.
Les armées ottomanes franchissent les Détroits vers 1350, s'établissent à Andrinople,
défont les Serbes à Kossovo (1389) puis les princes et les chevaliers de la croisade de
Sigismond de Hongrie à Nicopolis (1396). Pendant plus d'un siècle, elles allèrent de plus
en plus loin à la chasse au butin et aux esclaves. En 1432, Bertrandon de La Broquière,
conseiller du duc de Bourgogne et chargé de mission en Orient, par ailleurs tout à fait
capable de s'entendre avec les Turcs au cours de son voyage en Anatolie, croise sur sa
route, dans les Balkans, plus d'une troupe misérable de captifs menés par des guerriers
au retour d'une razzia chez les chrétiens et prend alors conscience de la manière dont
les Turcs traitent leurs prisonniers, tous voués à l'esclavage:
« Je vis quinze hommes qui étaient attachés ensemble par de grosses chaînes par le
cou et bien dix femmes, qui avaient été pris peu auparavant dans une course que les
Turcs avaient faite dans le royaume de Bosnie et qu'ils conduisaient pour les vendre à
Andrinople. Ces malheureux demandaient l'aumône aux portes de la ville; c'était une
grande pitié que de voir les maux dont ils souffraient. »
Ils prenaient les enfants pour les convertir de force et les initier très jeunes au métier
des armes, les soumettre à un dur entraînement pour en faire ces janissaires, corps
d'élite de leur armée.
Partout où passaient leurs troupes ou leurs galères de combat ce n'étaient que rafles
de prisonniers, butin de guerre. Et pas seulement en pays des « chiens de mécréants » :
en 1517, entrant dans Le Caire, vainqueurs de l'empire mamelouk d'Egypte et de Syrie,
empire musulman bien sûr, ils enlevèrent nombre de jeunes garçons imberbes et des
esclaves noirs.
A la même époque et jusqu'à leur retentissante défaite de Lépante (7 octobre 1571),
où plus d'une centaine de leurs galères de combat furent envoyées par le fond ou prises
d'assaut, les Turcs ne cessèrent de lancer chaque année vers l'Occident, Espagne et Italie
surtout, de fortes escadres chargées de nombreuses pièces d'artillerie. Les sultans
criaient leur détermination de prendre Rome et d'anéantir les Etats chrétiens, ceux du
roi d'Espagne en premier.
[8]
Ils échouèrent et cet acharnement à poursuivre leurs attaques si loin de leurs bases
du Bosphore et d'Asie n'eut pour eux d'autres profits que de ramener régulièrement des
troupes d 'hommes et de femmes, de jeunes gens surtout, pris lors des sièges de villes
pourtant puissamment fortifiées ou razziés au long des côtes. De telle sorte que cette
guerre des sultans ottomans de Constantinople, de Sélim 1er et de Soliman le Magni-
fique, s'est le plus souvent ramenée à de misérables et cruelles rafles d'hommes. Dans un
des gros bourgs de la Riviera génoise, en 1531, un homme sur cinq se trouvait alors es-
clave chez les Turcs.
Dans Alger, où l'on ne comptait pas moins de six ou sept bagnes pour les chrétiens
prisonniers, plusieurs centaines de captifs, peut-être un millier, étaient entassés dans
des conditions épouvantables, dans le plus grand bagne, situé en plein cœur du tissu
urbain, sur le souk principal qui courait d'une porte à l'autre. C'était un vaste édifice de
soixante-dix pieds de long et quarante de large, ordonné autour d'une cour et d'une ci-
terne.
Au temps d'Hassan Pacha, dans les années 1540, deux mille hommes logeaient dans
un bagne plus petit et, un peu plus tard, encore quatre cents dans celui dit « de la Bâ-
tarde ». A Tunis, demeurée longtemps indépendante sous un roi maure, la conquête de la
ville par les Turcs, en 1574, fit que l'on bâtit en toute hâte huit ou neuf bagnes qui suffi-
rent à peine à y entasser les prises de guerre; les hommes s'y pressaient jusqu'à dix ou
quinze dans des chambres minuscules, voûtées et sombres.
Toute conquête s'accompagnait inévitablement, sur des territoires de plus en plus
étendus, d'une chasse aux esclaves, bien souvent but principal de l'expédition. « Les
Turcs, voisins des chrétiens, envahissent souvent les terres de ces derniers, non telle-
ment par haine de la croix et de la foi, non pour s'emparer de l'or et de l'argent, mais
pour faire la chasse aux hommes et les emmener en servitude. Lorsqu'ils envahissent à
l'improviste des fermes, ils emportent non seulement les adultes mais encore les bébés
non encore sevrés qu'ils trouvent abandonnés par leurs parents en fuite; ils les empor-
tent dans des sacs, et les nourrissent avec grand soin. »
Aux raids des Ottomans en Occident et en Afrique, répondaient, à la même époque,
ceux des sultans musulmans du Deccan qui, pour la cour et les armées comme pour le
service domestique, lançaient en Inde razzia sur razzia contre les Infidèles. Pendant son
séjour à Delhi, Ibn Battuta assiste au retour d'une chasse: « Il était arrivé des captives
indiennes non musulmanes. Le vizir m'en avait donné dix. J'en donnai une à celui qui me
les avait amenées mais il ne l'accepta pas; mes compagnons en prirent trois jeunes et,
quant aux autres, je ne sais ce qu'elles sont devenues. »
Il lui fit aussi présent de plusieurs villages, dont les revenus s'élevaient à cinq mille
dinars par an. Ces expéditions n'étaient pas des aventures menées seulement par
quelques hommes mais bel et bien de vastes opérations qui mobilisaient de grands
moyens que seuls les chefs de guerre, les sultans et les vizirs pouvaient réunir: les non-
musulmans se retranchaient dans d'épaisses forêts de bambous « qui les protégeaient
comme un rempart et d'où l'on ne pouvait les déloger qu'avec des troupes puissantes et
des hommes qui peuvent entrer dans ces forêts et couper ces bambous avec des outils
particuliers ».
Ibidem, pp. 21-24
6
[9]
Les raids des musulmans: l'Egypte, le Maghreb et les oasis
« Les janissaires et autres soldats turcs, en garnison au pays d'Egypte, s'associent en
certain temps de l'année plusieurs ensemble et, prenant des guides et provisions de
vivres, s'en vont au désert de Libye, à la chasse de ces nègres. On leur baille au Caire,
lorsqu'ils sont mis en vente, une pièce de toile qui leur couvre les parties honteuses. »
Au sud de la Nubie et à l'ouest de l'Ethiopie, le trafic des esclaves du Darfur, absolu-
ment crucial pour l'économie des sultans musulmans, résultait soit des ventes par les
trafiquants installés sur place, Arabes pour la plupart, qui ne pratiquaient que d'assez
pauvres razzias sur les villages des environs, soit des raids directement placés sous l'
autorité du sultan du Caire.
Ces chasses aux hommes se pliaient à des règles parfaitement définies, impliquant des
accords constants entre le pouvoir, les notables et les marchands. Celui qui prenait la
tête d'une razzia, d'un ghazwa, devait d'abord solliciter la salatiya, autorisation du sul-
tan. Celui-ci définissait très exactement le territoire de chasse et prenait, en quelque
sorte, les chasseurs et les négociants sous sa protection. Il prêtait une escorte armée et
interdisait à d'autres d'aller courir aux Noirs dans les mêmes pays.
Le chef de raid avait tous pouvoirs, disposait de la même autorité que le sultan dans
ses villes et ses Etats et, effectivement, on le disait bien sultan al-ghazwa, « sultan »
maître du raid. Il réunissait ses fidèles, plus ou moins nombreux selon sa renommée, en
fait selon le succès de ses entreprises les années précédentes, et négociait avec des
groupes de marchands qui fournissaient les vivres nécessaires à de longs jours de route
contre l'engagement de recevoir, en échange, un certain nombre de captifs.
Chaque année le sultan autorisait plusieurs dizaines de razzias, jusqu'à soixante par-
fois; les hommes partaient avant les pluies, de juin à août, et suivaient toujours, sans s'en
éloigner, une route fixée à l'avance, tant pour l'aller que pour le retour. Les contrats
souscrits par les négociants stipulaient que ceux qui accompagnaient le raid très loin
dans le Sud et se chargeaient de convoyer les captifs jusque sur les marchés des villes en
recevraient deux fois plus que ceux qui attendaient simplement le retour de la razzia
dans le Nord.
Ces raids ne tournaient pas forcément aux affrontements guerriers. On traitait avec
des rabatteurs ou avec des chefs de tribus eux-mêmes chasseurs d'hommes dans le voi-
sinage. Les Noirs surpris n'étaient certainement pas en mesure de résister les armes à la
main et l'on savait qu'une bonne expédition pouvait ramener de cinq à six cents es-
claves. Le plus souvent les chasseurs opéraient, en toute quiétude, dans la région même
du Darfur, plus particulièrement au sud et au sud-ouest. D'autres se risquaient beaucoup
plus loin et l'on parle d 'hommes qui demeurèrent six mois en route avant de renoncer,
ayant atteint un fleuve qu'ils n'osèrent franchir.
Ibidem, pp. 65-66
7
Portugais, Américains et Juifs
Parler de la traite des chrétiens et taire les musulmanes, ou les réduire à trop peu,
était déjà travestir la vérité. Fallait-il, de plus, pour cette traite atlantique, ne citer que
les armateurs de France ou accessoirement d'Angleterre et ne rien dire des autres, no-
[10]
tamment des Portugais qui furent, et de très loin, les plus actifs sur place, solidement
implantés, agents d'un commerce pionnier et maintenu en pleine activité bien plus long-
temps ?
Arrivés les premiers sur les côtes d'Afrique et sur les rives des fleuves, ils furent bien
les seuls, avec les Américains, à s'établir à demeure dans les postes de traite à l'intérieur
du continent, là où les Noirs étaient livrés sur le marché bien plus nombreux qu'ailleurs.
Ces hommes n'étaient pas seulement capitaines de navires jetant l'ancre pour de
courtes escales, le temps d'embarquer les esclaves que d'autres Noirs leur vendaient,
mais des résidents, chefs d'entreprises florissantes, négriers au sol, propriétaires de fac-
toreries, d'entrepôts et même de troupes de rabatteurs.
------ Peut-on imaginer que les Américains se soient contentés de recevoir des navires
d'Europe chargés de Noirs captifs? Ils furent, au contraire, parmi les plus actifs des
armateurs et capitaines négriers. Leurs bâtiments de Maryland, de Georgie et de
Caroline allaient régulièrement en Afrique, plus particulièrement sur la côte de Guinée
qu'ils appelaient tout ordinairement la «Côte des esclaves».
Ils avaient conclu des accords avec les rois de ce littoral et avec ceux du Togo qui en-
voyaient leurs guerriers razzier à l'intérieur du continent et livraient leurs prisonniers à
Anecho (actuellement à la frontière du Togo et du Dahomey), à Porto Novo et à Ouidah,
sites portuaires fortifiés.
Au temps le plus fort de la traite, au début du XVIIIe siècle, l'on comptait plus de cent
vingt vaisseaux négriers, pour le plus grand nombre propriété de négociants et arma-
teurs juifs de Charleston en Caroline du Sud et de Newport dans la baie de Chesapeake
en Virginie (Moses Levy, Isaac Levy, Abraham AlI,
Aaron Lopez, San Levey), ou de Portugais, juifs aus-
si, établis en Amérique (David Gomez, Felix de Sou-
za), qui, eux, avaient des parents au Brésil.
A Charleston, une vingtaine d'établissements,
nullement clandestins, distillaient un mauvais al-
cool, principal produit proposé en Afrique pour la
traite des Noirs esclaves.
Certains négriers américains, et non des
moindres, se sont, à la manière des Portugais et par-
fois de concert avec, eux, solidement établis en
Afrique, sur la côte et même à l'intérieur, gérant
alors en toute franche propriété d'importants postes
de traite, entrepôts et embarcadères pour les loin-
tains voyages. Ce que n'ont fait ni les Anglais ni les
Français.
Ibidem, pp. 255, 258
http://www.denistouret.net/textes/Heers_Jacqu
es.html
[11]
L'esclavage musulman
A l’heure où les tentatives de culpabilisation de l’Occident se font déli-
rantes, Louis Chagnon ouvre le dossier de l’esclavage musulman.
L’histoire de l’esclavage est { l’actualité, utilisée comme outil pour soutenir des re-
vendications communautaristes, elle est falsifiée pour introduire la seule critique de
l’Occident. Ne pouvant pas reprendre toute l’histoire de l’esclavage, je rappellerai rapi-
dement quelques données élémentaires.
L’esclavage se perd dans la nuit des temps et les noirs n’en ont pas été les seules vic-
times, comme les Occidentaux n’ont pas été les seuls esclavagistes. Le mot «esclave»
vient du mot «Slave», les Slaves païens ont en effet fourni les contingents les plus nom-
breux d’esclaves pendant le haut Moyen-âge, vendus par les Vénitiens aux arabo-
musulmans. Si esclavage et colonisation se sont rejoints aux XVIIe et XVIIIe dans le
commerce triangulaire pratiqué par des commerçants, et non par des colons, l’esclavage
n’est pas inhérent { la colonisation occidentale, il existait des millénaires avant et exista
après. Bien au contraire, la colonisation entraîna la disparition de l’esclavage dans les
colonies. Avant même la colonisation de l’Afrique, les Européens avaient agi pour faire
supprimer l’esclavage en Tunisie: «Après les trois mois de règne de son frère Othman, le
fils de Mohammed bey, Mahmoud bey (1914-1824), se vit contraint par les puissances
européennes { supprimer l’esclavage, malgré la perturbation économique que devait
entraîner cette brusque mesure (1819).» . Lorsque les Français sont arrivés en Afrique
du Nord et en Afrique noire au XIXe siècle, ils ont trouvé des esclaves. L’esclavage était
pratiqué par les Arabes et les noirs depuis des siècles. Les ethnies noires se réduisaient
en esclavage entre elles et ce sont des chefs noirs qui par des razzias alimentaient les
négriers occidentaux aux XVIIe et XVIIIe siècles, ce qu’on oublie trop souvent de rappe-
ler. On estime que fin XVIIIe et au début du XIXe en Afrique noire, un quart des hommes
avaient un statut d'esclave ou de travailleur forcé. C'étaient des prisonniers de guerre ou
des prisonniers pour dettes. La guerre et les dettes étaient les sources traditionnelles où
s’approvisionnaient les marchands d’esclaves. Mais, si les Occidentaux supprimèrent
l’esclavage, ils laissèrent le travail forcé.
Les Arabes réduisirent en esclavage pendant des siècles, non seulement des noirs,
mais aussi des chrétiens par des razzias sur les côtes occidentales et la piraterie barba-
resque: «Plus que des marchandises pillées, les Barbaresques tiraient profit des captifs.
Le Chrétien cessait d’être un infidèle qu’on arrachait { son pays pour devenir un objet de
négoce, dont on essayait de se débarrasser le plus vite et le plus cher possible.» . L’église
catholique les racheta pendant des siècles. C’est cette piraterie qui fut un le motif essen-
tiel de la colonisation de l’Algérie.
Pour illustrer ces propos, je vous propose de lire un texte écrit par le général E. Dau-
mas et A. de Chancel, publié en 1856 . Rappelons qu’{ cette époque, la France n’est pré-
sente en Afrique que sur le littoral algérien et qu’{ cette date elle avait aboli l’esclavage
depuis huit ans, en 1848. Le Sahara n’est pas encore bien exploré et il n’existait { cette
date aucune colonie française en Afrique noire. Le général Daumas dont le but était de
recueillir des informations sur les peuples du sud saharien, s’était introduit dans une
caravane qui partait de Metlily, en Algérie, pour se diriger vers un royaume musulman
du sud saharien, du nom d’Haoussa, ayant pour chef le sultan Bellou le Victorieux et
[12]
pour capitale Kachena , leurs habitants appelés { l’époque Foullanes étaient arabes. Ces
caravanes trans-sahariennes furent les pourvoyeuses d’esclaves pour le bassin méditer-
ranéen et les Arabes du nord pendant des siècles. Les Foullanes avaient soumis tous les
royaumes noirs échelonnés sur les fleuves Niger et Sénégal. Aujourd’hui, ce royaume se
situerait sur la frontière entre le Niger et le Nigeria. Dans un passage de son livre, il rela-
tait les informations sur les conditions et les préceptes réglementant l’esclavage chez les
musulmans. C’est ce passage que j’offre { votre lecture. Il se place dans l’esprit des gens
qu’il accompagne et qu’il rencontre, il utilise le pronom «nous» pour représenter en fait
les algériens de la caravane ou les habitants de la région. Je n’ai pas actualisé
l’orthographe et l’ai laissée telle que le général Daumas l’utilisa:
«Au centre de la place était posé par terre un énorme tambour qu’un vigoureux Nègre
battait { tour de bras avec un bâton tamponné. (…) C’est le tambour du sultan; jamais il
n’est battu que pour convoquer l’armée. (…)
« Voici la volonté du serki :
« Au nom du sultan Bellou le Victorieux, que la bénédiction de Dieu soit sur lui, vous
tous, gens du Moutanin, êtes appelés à vous trouver ici demain au jour levant, en armes
et montés, avec des provisions suffisantes pour aller, les uns dans le Zenfa , les autres
dans le Zendeur , à la chasse des Koholanes idolâtres, ennemis du glorieux sultan notre
maître. –Que Dieu les maudisse !»
«Tout ce qu’ordonne le sultan est bon, répondirent les soldats; qu’il soit fait selon la
volonté de notre seigneur et maître!»
Le lendemain, en effet, les Mekhazenia , exacts au rendez-vous, se partagèrent en
deux goums , dont l’un prit { l’Est et l’autre au sud-ouest, avec mission de tomber sur les
points sans défense, d’en enlever les habitants, et de saisir tous les paysans occupés { la
culture de leurs champs; en même temps, des ordres étaient donnés pour traquer à
l’intérieur les Koholanes idolâtres. (…)
En attendant le retour des goums qu’Omar avait envoyés { la chasse aux nègres, nous
nous rendions tous les jours au marché des esclaves, Barka, où nous achetâmes aux prix
suivants:
Un nègre avec sa barbe ……………………………………….10 ou 15,000 Oudâas
On ne les estime point comme marchandise, parce qu’on a peu de chance pour les
empêcher de s’échapper.
Une négresse faite, même prix
pour les mêmes raisons …………..………………………….10 ou 15,000
Un Nègre adolescent………………..……………………………30,000
Une jeune Négresse, le prix varie selon qu’elle est plus ou moins belle…….50 à 60,000
Un négrillon…………………………………………….…………...45,000
Une négrillonne………………………………..…………………..35 { 40,000
Le vendeur donne { l’acheteur les plus grandes facilités pour examiner les esclaves, et
l’on a trois jours pour constater les cas rédhibitoires. On peut rendre avant ce temps ex-
piré:
[13]
Celui qui se coupe avec ses chevilles en marchant;
Celui dont le cordon ombilical est trop exubérant;
Celui qui a les yeux ou les dents en mauvais état;
Celui qui se salit comme un enfant en dormant;
La négresse qui a le même défaut ou qui ronfle;
Celle ou celui qui a les cheveux courts ou entortillés (la plique).
Il en est d’ailleurs que nous n’achetons jamais, ceux, par exemple qui sont attaqués
d’une maladie singulière que l’on appelle seghemmou.
– (…).
On n’achète pas non plus ceux qui, étant âgés, ne sont pas circoncis;
Ni ceux qui viennent d’un pays situé au sud de Noufi: ils n’ont jamais mangé de sel, et
ils résistent difficilement au changement obligé de régime;
Ni ceux d’une espèce particulière qui viennent du sud de Kanou: ils sont anthropo-
phages. On les reconnaît { leurs dents qu’ils aiguisent et qui sont pointues comme celles
des chiens. Nous craindrions pour nos enfants.- ils mangent d’ailleurs, sans répugnance
les animaux morts de mort naturelle (djifa, charognes). –On dit qu’ils nous traitent de
païens, parce que nous ne voulons que les animaux saignés par la loi ; car disent-ils, vous
mangez ce que vous tuez, et vous refusez de manger ce que Dieu a tué.
Nous n’achetons pas non plus ceux appelés Kabine el Aakoul. Ils passent pour avoir la
puissance d’absorber la santé d’un homme en le regardant, et de le faire mourir de con-
somption. On les reconnaît à leurs cheveux tressés en deux longues nattes de chaque
côté de la tête.
L’achat des Foullanes, des Négresses enceintes et des Nègres juifs est sévèrement
prohibé par ordre du sultan. L’achat des Foullanes, parce qu’ils se vantent d’être blancs;
des Négresses enceintes, parce que l’enfant qui naîtra d’elles sera propriété du sultan,
s’il est idolâtre, et libre s’il est musulman; des Nègres juifs, parce que tous sont bijou-
tiers, tailleurs, artisans utiles ou courtiers indispensables pour les transactions commer-
ciales; car sous la peau noire ou sous la peau blanche dans le Soudan , dans le Sahara,
dans les villes du littoral, partout les juifs ont les mêmes instincts et le double génie des
langues et du commerce.
Pour éviter la fraude, une caravane ne sort point à Haoussa sans que les esclaves
qu’elle emmène aient été attentivement examinés; et il en est de même encore { Taous-
sa, à Damergou et à Aguedeuz, chez les Touareug, où Bellou a des oukils chargés des
mêmes soins. Le marchand qui contreviendrait { ces ordres s’exposerait { voir toutes
ses marchandises confisquées.
En un mot, les esclaves proviennent des ghazias [razzias] faites sur les Etats nègres
voisins avec lesquels Haoussa est en guerre, et dans les montagnes du pays, où se sont
retirés les Koholanes qui n’ont pas voulu reconnaître la religion musulmane; des enlè-
vements de ceux qui, observant la religion nouvelle, paraissent regretter l’ancienne, et
sont hostiles au pouvoir ou commettent quelques fautes.
(…)
[14]
De l’esclavage chez les musulmans.
La loi permet la vente des esclaves, parce qu’en général ils sont infidèles.
«Dieu a dit: «Faites la guerre à ceux qui ne croient point en Dieu ni au jour du juge-
ment.» Le Koran, chap. IX, verset 29.
«Dites aux prisonniers qui sont entre vos mains; «Si Dieu voit la droiture dans vos
cœurs, il vous pardonnera, car il est clément et miséricordieux.» Le Koran, chap.VIII, ver-
set 70,
Les docteurs ont toutefois diversement interprété cette parole du Koran. Les uns veu-
lent que le maître d’un infidèle ne l’oblige point { embrasser l’islamisme et le laisse agir
selon sa propre impulsion.
D’autres au contraire ont dit: Il importe qu’un maître enseigne à son esclave les prin-
cipes de la religion et les devoirs dictés par Dieu aux hommes; il doit l’obliger au jeûne et
à la prière, et tendre par tous les moyens à le rendre incapable de nuire aux musulmans,
dût-il, pour atteindre ce but, employer la rigueur.
D’autres enfin, entre ces deux opinions, en ont mis une troisième:
«Tant qu’un esclave infidèle est jeune, disent-ils, son maître est tenu de chercher à le
convertir; plus tard, il peut le laisser libre de faire à son propre gré.»
Il résulte de ces avis divers qu’un musulman doit agir avec son esclave selon que sa
conscience a parlé; mais il est meilleur qu’il essaye d’en faire un serviteur de Dieu.
Sur quoi tous les docteurs sont d’accord, c’est que l’esclave musulman, mâle ou fe-
melle, soit traité avec ménagement et même avec bonté.
«Vêtissez vos esclaves de votre habillement et nourrissez-les de vos aliments,» a dit le
Prophète.
Et nous lisons dans les hadites [hadiths] (conversations de Sidna-Mohammed), que
l’on doit fournir consciencieusement { l’entretien et { la nourriture de l’esclave, de
même qu’il ne faut pas lui imposer une tâche au-dessus de ses forces.
Sidi Khelil a écrit:
«Si vous ne pouvez pas entretenir vos esclaves, vendez-les.»
Le chef du pays est chargé de veiller à cette règle, et de faire procéder à la vente des
esclaves si leur maître ne pourvoit pas { leurs besoins de première nécessité ou s’il les
fait travailler plus qu’il ne le devrait.
Malek, interrogé sur cette question, savoir: si l’on peut forcer un esclave { moudre
pendant la nuit a répondu: «S’il travaille le jour, qu’il se repose pendant la nuit, { moins
que l’occupation prescrite soit de peu d’importance et d’absolue nécessité.»
Ainsi un serviteur ne peut travailler la nuit entière auprès de son maître; on admet
seulement qu’il lui donne des vêtements nécessaires pour le couvrir, de l’eau pour boire,
qu’il lui rende enfin de ces services qui, se réitérant peu souvent, permettent le repos; et
s’il est reconnu qu’un esclave ait souffert de la faim ou de l’excès de travail, il est vendu
même malgré son maître.
Abou Messaoul a laissé ces paroles :
«J’ai frappé mon esclave et j’ai entendu une voix crier aussitôt: « Dieu est plus puis-
sant vis-à-vis de toi que tu ne l’es vis-à-vis de ton serviteur! «Je me suis retourné, j’ai re-
[15]
connu le Prophète et je me suis écrié: «Mon esclave est dès à présent affranchi pour
l’amour de Dieu.»
Et Mohammed m’a répondu: «Si tu n’avais pas agi ainsi, le feu t’aurait dévoré.»
Selon Ibn Omar, un homme vint un jour auprès du Prophète en lui disant: «Combien
de fois n’ai-je pas pardonné à mon esclave!». Mais Mohammed ne lui répondit point. Et
deux fois encore cet homme répéta la même plainte sans obtenir un mot de blâme ou de
conseil. [ la quatrième fois enfin, l’envoyé de Dieu s’écria: «Pardonne { ton esclave
soixante-dix fois par jour, si tu veux mériter la bonté divine.»
En souvenir de ces enseignements, les docteurs musulmans se sont appliqués à régir
par des lois équitables tout ce qui concerne les esclaves et à leur assurer une constante
protection.
La méchanceté, l’avarice, la débauche et la pauvreté même de leurs maîtres ne peu-
vent rien contre eux.
Les formes de vente et d’achat sont définies.
Un bien-être au moins suffisant leur est assuré.
Leurs mariages et leurs divorces sont réglementés.
Les modes d’affranchissement nombreux, les promesses d’affranchissement sacrées,
et l’affranchi, se fond dans la population franche sans que son origine soit jamais pour lui
un sujet d’humiliation.
La négresse, que son maître a fait mère, prend le titre d’oum el-ouled (la mère de
l’enfant) et jouit de tous les égards dus aux femmes légitimes. Son fils n’est point bâtard,
mais l’égal de ses demi-frères; il hérite comme eux, comme eux appartient à la tente:
aussi ne voit-on pas de mulâtres esclaves.
On raconte qu’un jour un musulman ayant dit devant Abou Bekr et Abdallah Ibn
Omar: «Je compare { des mulets les enfants d’une négresse et d’un homme de race: leur
mère est une jument et leur père un âne; n’ayez point confiance en eux.
-Nous sommes certains, car nous l’avons vu, lui répondirent ses auditeurs, que ces
gens-là sont au combat aussi courageux sur leurs chevaux que les enfants de race pure.
Ne dites donc jamais: un tel est un fils d’une Négresse, et celui-l{ d’une femme de race; le
champ de bataille, voilà ce qui doit les faire juger.»
Enfin, chez tous les hommes craignant Dieu, les esclaves font à certains égards partie
de la famille; et l’on en voit souvent qui refusent d’être affranchis, comme le fit celui de
notre seigneur Mohammed.
C’était un jeune Nègre qui avait été donné à Khedija, la femme du Prophète, et dont
elle avait fait présent { son mari. Il se nommait Zeïd Ibn Haret. Son père, l’argent { la
main, vint un jour pour le racheter. «Si ton fils veut te suivre, j’y consens, dit Mohammed,
emmène-le.» Mais l’enfant, consulté, répondit: «Mon père, l’esclavage avec le Prophète
vaut mieux que la liberté avec vous.». Cette réponse émut l’envoyé de Dieu, qui, ne vou-
lant pas rester en générosité au-dessous d’un esclave, l’affranchit et le maria.
Votre religion, à vous chrétiens, vous défend d’avoir des esclaves, je l’ai entendu dire {
Alger, et, en effet, je ne vous en vois pas. [ Kachena, on m’avait assuré cependant que les
rois nègres du sud du Niger et des bords de la grande mer, { l’Ouest, vous en vendaient
de pleins vaisseaux. On ajoutait, il est vrai, que le commerce avait à peu près cessé de-
[16]
puis quelques années, et que le sort des Nègres enlevés dans les guerres en était devenu
beaucoup plus rigoureux. Lorsqu’ils pouvaient vendre leurs prisonniers, les rois les en-
graissaient, en prenaient soin et les faisaient peu travailler; { présent, n’en sachant que
faire, ils les égorgent par milliers pour ne pas les nourrir, ou les parquent près de leurs
cases, enchaînés, sans vêtements, sans un grain de maïs, en attendant leur jour. S’ils les
font travailler, c’est { coups de bâton, car les malheureux sont trop faibles, ne vivant que
de racines, d’herbes ou de feuilles d’arbres, pour faire un bon service. Il en sera sans
doute ainsi jusqu’{ ce que tout le pays se soit fait musulman. Que Dieu allonge assez mon
existence pour que j’en sois témoin!
Il vous répugne d’avoir des esclaves? Mais que nos serviteurs soient notre propriété
et que les vôtres soient libres, entre eux le nom seul est changé. Qu’un domestique chré-
tien ait le droit de changer de maître si bon lui semble, il n’en sera pas moins pour toute
sa vie domestique, et par conséquent, esclave, moins le nom. Quand nos Nègres sont
vieux, nous les affranchissons; ils sont encore de nous, de notre tente; quand l’âge a pris
vos serviteurs, qu’en faites-vous? Je n’en vois pas un seul { barbe blanche.
Chez vous, la femme du mariage a mépris pour la femme servante à qui son maître a
donné un enfant. Pour vivre, il faut qu’elle ne dise jamais non. Chez nous, elle est oum el-
ouled; elle a son logement; son fils est honoré; tous les deux sont de la famille.
«Vous êtes trop orgueilleux, et vous n’êtes pas assez dignes.»
Pour tous les vrais musulmans, Bou Houira a posé cette sentence:
«Ne dites jamais: mon esclave, car nous sommes tous les esclaves de Dieu, dites: mon
serviteur ou ma servante.» (fin de citation).
Cette longue citation éclaire les principes qui régissent et justifient l’esclavage chez
les musulmans. Ceux-ci sont toujours actuels puisqu’ils proviennent du Coran et des Ha-
diths, c’est-à-dire que l’esclavage résulte de la volonté de Dieu: «Que ceux qui ont été
favorisés ne reversent pas ce qui leur a été accordé à leurs esclaves, au point que ceux-ci
deviennent leurs égaux. –Nieront-ils les bienfaits de Dieu?» sourate XVI, verset 71 ; «Ne
forcez pas vos femmes esclaves à se prostituer pour vous procurer les biens de la vie de
ce monde, alors qu’elles voudraient rester honnêtes. Mais si quelqu’un les y contrai-
gnait… Quand elles ont été contraintes, Dieu est celui qui pardonne, il est miséricor-
dieux.» sourate XXIV, verset 33.
L’islam est donc une idéologie politico-religieuse esclavagiste. D’ailleurs les relations
sexuelles entre le maître et ses femmes esclaves sont les seules relations sexuelles hors
mariage acceptées par le Coran: «[ l’exception des hommes chastes qui n’ont de rap-
ports qu’avec leurs épouses et avec leurs captives de guerre; -ils ne sont donc pas blâ-
mables, tandis que ceux qui en convoitent d’autres sont transgresseurs», sourate LXX,
verset 29-31.
Grâce aux pressions internationales, les pays arabo-musulmans à connaître encore
l’esclavage durent l’abandonner, ainsi l’Arabie Saoudite, très en avance sur les droits de
l’homme, comme chacun sait, abolit l’esclavage en 1962! Qui pense { le lui reprocher?
Puisqu’il est demandé { la France de se repentir, il serait normal que ce soit réci-
proque et élargi à tous les acteurs esclavagistes. Je propose donc que la France demande
{ l’Algérie de se repentir pour tous les Chrétiens que ses barbaresques ont réduits en
esclavage. Que Fahd Bin Abdulaziz Al Saoud, roi d’Arabie Saoudite se repente officielle-
ment parce que son royaume n’a aboli l’esclavage qu’en 1962.
[17]
Mais il y a pire et le silence sur cette situation est assourdissant! Aujourd'hui, 12.3
millions de personnes sont victimes du travail forcé dans les pays en voie de dévelop-
pement. C'est l'estimation faite par le Bureau International du Travail (B.I.T.) dans un
rapport publié au mois de mai 2005. Il y a encore pire: après la décolonisation,
l’esclavage revint dans certains pays africains. La République Islamique de Mauritanie
s’illustre dans cette catégorie. Sous les pressions internationales, ce pays a aboli
l’esclavage en….1981! Mais les décrets d’application ne furent jamais promulgués! Au-
jourd’hui, l’esclavage existe donc toujours dans ce pays! Quel intellectuel ou homme po-
litique français ose demander des comptes { M. Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, prési-
dent de la République Islamique de Mauritanie? Personne! Est-ce que Madame Taubira
demande { ce qu’il soit traduit devant une cours de justice internationale pour «crime
contre l’humanité»? Pas du tout! Sa loi en ne condamnant que le seul esclavage pratiqué
par les Occidentaux alors qu’il n’existe plus depuis plus de 150 ans, légitime implicite-
ment l’esclavage arabo-musulman qui existe toujours en Afrique, la loi Taubira de 2001
est, par conséquent, une loi anti-humanitariste et parfaitement scandaleuse.
Tout ceci démontre que les campagnes de falsifications historiques sur l’esclavage,
lancées par certains communautaristes n’ont pas pour objectif la lutte contre
l’esclavagisme, mais d’asseoir leurs revendications communautaires, brisant un peu plus
la citoyenneté française. L’objectif reste en définitive toujours le même: salir la civilisa-
tion occidentale pour mieux la soumettre.
Louis Chagnon pour Libertyvox.
Notes:
1 Charles-André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, de la conquête arabe { 1830,
Paris, Payot, 1978, t. II p. 301.
2 Charles-André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, de la conquête arabe { 1830,
Paris, Payot, 1978, t. II p. 279.
3 Le général E. Daumas et A. de Chancel, Le grand désert du Sahara au pays des
Nègres, Paris, Michel Lévy, libraires-éditeurs, 1856.
4 Aujourd’hui orthographiée Katsina.
5 De Kachena.
6 Mohammed Omar, calife responsable de la région vis-vis du sultan.
7 Aujourd’hui, la région située entre Gusau et Kano au Nigeria.
8 Aujourd’hui, la région de Zinder au Niger.
9 Membres des tribus Makhzen traditionnellement chargés de la police et de prélever
les impôts.
10 Un goum est une troupe de cavaliers.
11 Ethnie noire animiste.
12 Il faut prendre cette expression comme une simple figure de style afin d’introduire
le tarif des différents types d’esclaves.
13 Coquillages du Niger servant de monnaie.
14 Maladie tropicale.
[18]
15 La viande hallal.
16 A cette époque on appelait Soudan tout le sud du Sahara.
17 Hadith.
18 Les citations du Coran sont tirées de la traduction de Denise Masson publiée dans
la Pléiade.
http://www.libertyvox.com/article.php?id=149
[19]
Esclaves en terre d'islam
Frédéric Valloire, le 21-03-2008
Ils furent deux fois plus nombreux que les esclaves des traites atlantiques. Ils
venaient surtout d’Europe et d’Afrique. L’émancipation de l’esclavage aura pris un
siècle et demi. Elle n’est pas achevée.
Etonnant retour des choses : l’esclavage, la traite négrière ne concernaient jusqu’alors
que l’Occident et ses repentances. On avait négligé, sciemment ou pas, l’esclavage en
terre d’Islam. C’est aujourd’hui un phénomène de librairie. Non pour disculper les activi-
tés européennes, mais pour explorer un champ historique sous-estimé. Il y a quinze ans,
le grand islamologue Bernard Lewis notait « qu’en terre d’islam, l’esclavage reste un sujet
à la fois obscur et hypersensible ».Des pionniers l’avaient défriché : Jacques Heers, dans
les Négriers en terres d’islam,Olivier Pétré- Grenouilleau avec Traites négrières,qui envi-
sageait pour la première fois le phénomène dans sa globalité, Robert C.Davies, avec Es-
claves chrétiens,Maîtres musulmans, qui étudiait le trafic d’esclaves blancs en Méditerra-
née : 1,25 millions d’Européens de l’Ouest asservis du Maroc à la Libye de 1530 à 1780 !
La nouveauté vient désormais des auteurs et de l’articulation entre religion et esclavage.
Les auteurs ? Ils sont marocains comme Mohamed Ennaji, professeur { l’université
Mohamed-V de Rabat, d’origine sénégalaise comme Tidiane N’Diaye,anthropologue et
cadre { l’Insee, ou né { Skikda comme Malek Chebel anthropologue franco-algérien.
L’articulation entre religion et esclavage ? C’est ce qu’examinent Guillaume Hervieux et
Malek Chebel. Cette articulation constitue un fait nouveau. Avant le christianisme et
l’islam, la séparation entre le maître et l’esclave se fonde sur un critère juridique : le
premier est libre, le second (quelle que soit son origine) est privé de liberté, d’identité,
de famille, de cité et appartient à un individu ou à une collectivité.Personne ne songe à
supprimer l’esclavage, y compris les esclaves révoltés tel le fameux Spartacus.Mais que
se passe-t-il si celui qui est réduit en esclavage est de la même religion que son maître ?
La Bible ne le condamne pas ; le judaïsme antique ne l’abolit pas { l’exception de cer-
taines sectes, celle des thérapeutes, celle des esséniens, considérées comme des com-
munautés exotiques, en marge de la société normale. Cependant, la Bible formule une
distinction théorique entre l’esclave hébreu, qui ne peut être vendu { un peuple étran-
ger,qui ne peut demeurer plus de six années esclave (sauf s’il le demande et dans ce cas
on lui perce l’oreille) et que l’on ne peut ni séparer des siens ni brutaliser, et l’esclave
non juif, provenant des peuples qui entourent Israël, esclave à vie, soumis à la loi mo-
saïque (il ne peut être tué ou estropié) et qui bénéficie du repos du septième jour.
Deux originalités dans le monde antique : l’esclave fugitif n’est pas livré { son maître,
mais habite chez celui qui le recueille ; l’argent public, même destiné { la construction
d’une synagogue, peut être utilisé pour racheter des captifs juifs. Des rachats qui
s’intensifient aux Xe et XIe siècles { la suite de la piraterie mauresque en Méditerranée
orientale. Au point de devenir un devoir religieux majeur au XIIe siècle. C’est que, paral-
lèlement { l’esclavage qui existe { cette époque dans les pays européens chrétiens, mal-
gré le Nouveau Testament où Paul abolit implicitement la séparation entre hommes
libres et esclaves, une nouvelle forme d’esclavage { grande échelle est apparue, celle que
pratiquent les pays convertis par les cavaliers de l’islam.
L’univers dans lequel le texte coranique est élaboré entre le VIIe et le Xe siècle est un
monde où l’esclavage paraît un état normal,héritier direct des civilisations antiques :
[20]
Mahomet luimême a des esclaves.Que le Coran pérennise cet usage traditionnel ne peut
surprendre. Comme cela existait dans la tradition stoïcienne, puis chrétienne, il associe
métaphoriquement l’esclavage { la situation de l’homme vis-à-vis de son Créateur ou à
sa dépendance physique et morale aux plaisirs. Mais le Coran définit également dans 29
versets un statut juridique et social de l’esclave. Comme il s’inscrit dans l’ordre du
monde tel que l’a voulu Dieu, cette distinction entre les êtres humains ne peut être ni
condamnée, ni critiquée.
Un musulman libre ne peut être réduit en esclavage, aurait édicté le deuxième calife,
Omar, sous son califat (634-644). Cela encourage très vite les musulmans à
s’approvisionner en esclaves : la traite des esclaves noirs connaît son premier grand dé-
veloppement avec la conquête arabe de la Méditerranée. Dès le VIIe siècle, on signale
une révolte des Zanjs, des esclaves noirs capturés sur les côtes de l’Afrique de l’Est qui
travaillent dans de vastes domaines du sud de l’Irak. Au XVIe siècle, les corsaires barba-
resques enlèvent plus de chrétiens en un seul raid sur les côtes de Sicile, des Baléares ou
de Valence qu’il n’y avait d’Africains déportés chaque année dans la traite transatlan-
tique, relative- ment peu importante il est vrai. Et jusqu’au XIXe siècle, l’esclavage reste
l’une des bases essentielles du pouvoir de l’Empire ottoman : les esclaves du sultan for-
ment l’armature de l’administration et de l’armée.
Si un esclave se trouve être musulman, il l’est soit parce qu’il s’est converti { l’islam,
soit parce qu’il est né esclave. Avantage : l’esclave musulman est supérieur { l’esclave
non musulman. Il peut en effet être associé à la prière collective et même la diriger, se
marier à des musulmans de condition libre ou servile. De plus, il est interdit de le vendre
à des non-musulmans. Dans tous les cas, le Coran recommande au maître de bien le trai-
ter et de pourvoir à son entretien.
L’esclave ne possède aucun bien, sauf un pécule et son maître exerce une tutelle sur
toutes ses activités. Sur le plan pénal, l’esclave est traité comme un individu de rang in-
férieur dont le témoignage n’a aucune valeur face { celui d’un homme libre. Et un mu-
sulman ne peut être condamné { mort s’il a tué un esclave. Autrement dit, le prix du sang
n’est pas le même. Enfin, un enfant issu d’une esclave, concubine légale d’un musulman,
naît libre. En théorie, ces dispositions sont relativement favorables { l’esclave, surtout si
ce dernier est musulman. Mais jamais le Coran n’émet une condamnation de l’esclavage.
Au contraire, des hadiths, le fikh (le droit musulman) et la charia (la loi de dieu) complè-
tent et affinent ces dispositions.
Les conditions de vie de l’esclave sont des plus contrastées. Selon sa couleur, sa beau-
té, son âge, sa condition sociale, ses capacités, sa religion, l’époque, le pays et le lieu où il
sert, son sort varie du tout au tout. Récupéré aux marges de l’Empire, il est vendu aux
enchères. C’est entre les mains et sous le fouet des chasseurs et des marchands
d’esclaves que ces pauvres gens souffraient le plus. Les femmes (les Circassiennes sont
très appréciées pour leur beauté) et les enfants servent comme domestiques ou concu-
bines dans les cours de Cordoue, de Constantinople ou de Bagdad. Les hommes devien-
nent soldats, artisans, galériens, fonctionnaires, chambellans ou sont parqués dans des
bagnes abominables si leurs ravisseurs pensent qu’ils en obtiendront une rançon. Seule
civilisation à avoir systématiquement prélevé des enfants pour en faire des mercenaires,
les janissaires, l’Empire turc confie des armées et des provinces { des esclaves militaires,
les mamelouks, qui restent néanmoins une exception.
La traite islamique aura duré treize siècles
[21]
Entre le VIIe siècle et les années 1920, plus de 21 millions de personnes auraient été
victimes de la traite d’esclaves en pays d’islam. Les Turcs prélevèrent environ 4 millions
d’esclaves en Europe, tandis que la seule Afrique noire se vit ponctionnée de près de 17
millions d’habitants, soit beaucoup plus que l’ensemble des traites atlantiques (11 mil-
lions). Si la traite commença au VIIe siècle dans sa partie orientale, elle connut son apo-
gée au XIXe siècle, avec pour l’Afrique noire continentale des estimations comprises
entre 4,5 et 6,2 millions de personnes. Cette importance prise par l’Afrique noire résulte
en partie de la conquête par la Russie de la Crimée et du Caucase, qui ferme au monde
musulman de vastes régions où depuis des siècles il se procurait des captifs.
S’ajoutent { cela l’amélioration des moyens de transport, la désertification du Sahara
qui poussent les nomades à intervenir dans les affaires des paysans noirs, la demande
des Indes et l’essor du coton en Égypte. Ce qui est remarquable, malgré les différences
régionales, c’est la régularité des prélèvements. En outre, alors qu’au Brésil, aux États-
Unis ou dans les Antilles, vivent des descendants d’esclaves, dans les pays musulmans,
ces descendants sont rares, en particulier pour ceux dont les ancêtres avaient la peau
noire, remarque Tidiane N’Diaye. Castrés, eunuques, ils ne pouvaient procréer.Un géno-
cide, donc.
Mais, et c’est ce que montre Mohamed Ennaji, l’esclavage n’est pas que l’héritier d’un
monde antérieur. Il imprègne toute la mentalité de l’État musulman, la conception d’un
pouvoir présenté comme une image de la relation entre le maître et l’esclave. « L’histoire
du monde arabe, écrit-il, est prisonnière du discours religieux et de ses représentations. »
Est-ce la raison fondamentale qui expliquerait la lenteur de l’émancipation ? Amorcée en
1846 avec la Tunisie, elle s’achève en 1981 lorsque la Mauritanie promulgue l’abolition
officielle de l’esclavage : un siècle et demi plus tard ! Et Malek Chebel affirme que trois
millions d’esclaves vivraient encore en terre islamique…
À lire
L'Esclavage en terre d'islam, de Malek Chebel,
Fayard, 506 pages, 24 Euros.
http://www.valeursactuelles.com/public/valeurs-
actuelles/html/fr/articles.php?article_id=2127
[22]
L’esclavage en terre d’Islam :
un musulman libéral secoue le tabou
Louis-Bernard Robitaille
jeudi 22 novembre 2007.
C’était en 2004 : l’universitaire Olivier Pétré-
Grenouilleau, dans un gros livre savant, expliquait
que l’esclavage n’avait pas été une exclusivité oc-
cidentale.
Et qu’on retrouvait des « traites négrières »
comparables ou même plus importantes dans
l’histoire de l’Afrique ou du monde arabe.
Quelques jours après la sortie du livre, le dis-
cret universitaire avait reçu des menaces de mort -
prises au sérieux par la police - et préféré ne plus
paraître en public.
C’est donc sur un terrain miné que l’essayiste franco-algérien Malek Chebel
s’aventure ces jours-ci avec un ouvrage sur « l’esclavage en terre d’Islam ».
« Un dossier délicat, admet-il avec un fatalisme tranquille lorsque je le rencontre dans
le quartier de la Bastille. C’est pourquoi j’attends un peu avant de donner des confé-
rences à Paris. Mais à la différence de Pétré-Grenouilleau ou d’autres, c’est de l’intérieur
que je critique les dérives de l’islam, les extrémismes et les sectarismes. »
Auteur prolifique depuis 25 ans, Malek Chebel se veut à la fois un musulman irrépro-
chable, fin connaisseur du Coran, et un libéral sans concession, partisan de la laïcité et
hostile au porte du voile. Un adversaire résolu de « l’Islam politique » et de ses préten-
tions à « régenter la société ».
Avec cette nuance : « Contrairement { d’autres, j’ai le souci d’être audible et donc
d’éviter les provocations inutiles : je prends donc soin de n’insulter personne. » Dans
l’affaire des caricatures de Mahomet, il a surtout essayé de « calmer le jeu ».
Mais cette fois, c’est le sujet lui-même qui est tabou. Et Malek Chebel, après avoir
pendant trois ans fouillé dans les textes et enquêté dans une quinzaine de pays, dresse
un constat sévère.
L’esclavage dans le monde musulman, trois fois plus étalé dans le temps qu’en Occi-
dent, a aussi touché deux fois plus d’individus, même si les formes de la servitude étaient
parfois plus « humaines ».
« Cet esclavage a touché plus de 20 millions de personnes sur 10 siècles, explique
Chebel. Il a duré officiellement jusque dans les premières décennies du XXe siècle, une
soixantaine d’années après son abolition en Occident. Jamais aucun responsable reli-
gieux musulman ne s’est prononcé pour son abolition.
« Un esclavage discret et { peine atténué se perpétue aujourd’hui, en Arabie Saoudite,
par exemple. Au Niger ou au Mali, vous pouvez acheter - à lunité - un enfant de 10 ans
dont vous ferez ce que vous voudrez.
[23]
Alors que les autorités religieuses en Occident ont fini par basculer dans le camp des
abolitionnistes au XIXe siècle et aujourd’hui encore battent leur coulpe pour les crimes
passés, je n’entends aucun prédicateur d’Al-Jazira condamner ces pratiques. »
Au hasard de ses déambulations et recherches, l’auteur découvre des choses éton-
nantes : une loi sur l’affranchissement des esclaves en Mauritanie datant de 2003 ! Des
zones de non-droit absolu en Arabie Saoudite et dans certains pays du Golfe. Trois codes
de l’esclavage en pays musulmans datant du XIXe siècle. Mais aussi, dans l’histoire de la
Turquie et de l’Égypte, d’étonnantes pratiques permettant { des esclaves affranchis
d’occuper de hautes fonctions dans l’État (en Turquie), ou de former une nouvelle caste
privilégiée, tels les Mamelouks en Égypte).
« Ce qui me révolte au-del{ de tout, dit Malek Chebel, c’est que, plus ou moins explici-
tement, on invoque l’islam pour justifier l’asservissement, l’inégalité foncière entre hu-
mains, les rapports de maître { serviteur. Ce que j’appelle la politique du baisemain.
Or, sur les seuls 25 versets du Coran qui évoquent le sujet, presque tous penchent du
côté de l’affranchissement. Strictement rien dans les textes ne justifie le système escla-
vagiste. Mais c’est ainsi : sous diverses formes, une coterie religieuse vénale, aux ordres
des dictatures, conserve une emprise totale sur l’islam et son interprétation. Il y a 30 ou
40 ans encore, l’Islam des Lumières auquel je me réfère était en plein progrès, en Égypte
notamment, et la démocratie était en vue.
Aujourd’hui, on est en pleine régression : si l’on faisait aujourd’hui des élections libres
dans le monde arabo-musulman, les islamistes l’emporteraient presque partout. Cela dit,
je ne crois pas que ce soit irréversible : l’Égypte pourrait redevenir une terre des Lu-
mières. Et il y a des frissonnements démocratiques au Maghreb ou ailleurs. »
Pour certains esprits critiques, Malek Chebel, auteur médiatique et parfois un peu
trop habile, est moins contestataire qu’il ne le prétend. Reste que le seul fait de soulever
une question aussi taboue et de dénoncer la collusion entre le haut clergé musulman et
les régimes dictatoriaux demande un certain courage.
La France est aujourd’hui de loin le premier pays islamique d’Europe, avec cinq mil-
lions de musulmans. Avec des organisations intégristes extrêmement puissantes et
structurées.
« Si jamais on lançait une fatwa contre moi, je m’empresserais d’aller { la télé et de
leur dire : vous m’avez condamné { mort, mais vous n’êtes que des voyous, des criminels
passibles du tribunal de La Haye. Vous n’êtes pas des musulmans mais des assassins,
vous pouvez m’envoyer 10 commandos de tueurs si vous voulez, mais je ne me cacherai
pas ! »
Et Malek Chebel ajoute : « Ces gens ont peut-être des tueurs à leur service, mais moi je
crois qu’en utilisant les armes de la communication, on peut les faire reculer. »
L’esclavage en terre d’Islam, 498 pages, Ed. Fayard
Malek Chebel a écrit une vingtaine d’ouvrages, dont Le Dictionnaire amoureux de
l’Islam et Manifeste pour un Islam des Lumières en 2004.
[24]
ISLAM ET ESCLAVAGE
mercredi 7 mai 2008 à 08:00 ::
L'affranchissement est recommandé au croyant dont il favorise l'accès au Paradis. Le pro-
phète Mohammed n'avait-il pas donné l'exemple en la matière ?
«Le Coran n'étant pas contraignant, l'abolition relève de la seule initiative personnelle du
maître. Cette ambiguïté est constitutive de l'approche coranique : encourager ceux qui font le
bien, mais ne pas alourdir la peine de ceux qui ne font rien», écrit Malek Chebel. «Plusieurs
versets entérinent au demeurant l'infériorité de l'esclave par rapport à son maître».
JEUNE Afrique DU 18 AU 24 NOVEMBRE 2007 N°2445
DOMINIQUE MATAILLET
TABOU, Au terme d'une longue enquête qui l'a mené de Nouakchott Brunei, Malek CHE-
BEL dresse un constat accablant : l'esclavage a été et reste un fait musulman
Le mot le plus courant, en arabe, pour désigner l'esclave est 'abd, duquel dérivent des
termes comme 'ubudiyya (« esclavage »).D'autres vocables sont encore utilisés, tels que raqîq
(« mis en servitude »), jâriya (« esclave femme »), ghulîm (« esclave homme »).Et ce n'est pas
tout. Au Proche-Orient, zandj (probablement de Zanzibar) et aswad désignent l'esclave noir,
alors que mamlûk (littéralement « possédé ») s'applique à une catégorie particulière, la caste
militaire servile.
Ce n'est donc pas le vocabulaire qui manque en terre d'Islam pour parler de l'esclavage.
Cette richesse sémantique tranche toutefois avec le mutisme qui entoure le phénomène. Un
mutisme d'autant plus choquant, aux yeux de Malek CHEBEL, que l'esclavage a pris des di-
mensions considérables tout au long de l'histoire de cette région du monde et qu'il reste à bien
des égards très présent dans le quotidien de centaines de millions de gens.
C'est pour briser ce silence assourdissant que l'anthropologue algérien, bien connu des lec-
teurs de Jeune Afrique pour ses nombreux ouvrages autour de l'islam, s'est livré à une longue
enquête. Fruit d'innombrables lectures, son pavé de 500 pages est aussi et surtout le compte
rendu d'un voyage de plusieurs mois qui l'a conduit des rives de l'Atlantique au fin fond du
Sud-Est asiatique en passant par les pays du Golfe, l'Asie mineure, l'Afrique saharienne.
Le constat final est accablant : « À Brunei, au Yémen, dans les pays du Sahel, chez les
Touaregs, en Libye, dans le Sahel tunisien, en Égypte, en Arabie, en Mésopotamie, au Soudan
ou à Djibouti, il n'est pas un lieu gagné par l'islam où ne se soit jamais pratiqué le commerce
d'esclaves
Encore convient-il d'établir des distinctions entre pays et de relever les caractéristiques
propres des différentes contrées concernées. La Libye et l'Algérie, par exemple, débouchés
naturel des routes commerciales transsahariennes, ont surtout servi de voies de transit. Des
pays tels q l'Égypte ou l'Arabie saoudite actuelles étaient, eux, de gros consommateurs, osera-
t-on dire. Idem pour la Turquie. Les Européens ont fantasmé sur les odalisques des harems
d'Istanbul, sujet de prédilection pour les peintres orientalistes, et se sont extasiés sur les ex-
[25]
ploits militaires des janissaires de l'Empire ottoman. Faut il rappeler que les premières comme
les seconds étaient des captifs?
En Afrique, on le sait, c'est à la lisière du monde
noir que l‘esclavage prit les plus grandes proportions.
Au Maroc où la composante négroïde de la population
saute aux yeux du voyageur les traces sont manifestes.
Que sont les musiciens gnaouas sinon les descendants
des Noirs importés » de la zone soudanienne au temps
où le Maroc était une grande puissance régionale? Et
puis, il y a le cas de la Mauritanie, où, malgré les dé-
mentis, l'esclavage reste une réalité manifeste. La
preuve en est que le Parlement a voté à plusieurs re-
prises des textes l'interdisant. Malek Chebel rappelle
un indice qui ne trompe pas: de nombreuses associa-
tions d'affranchis tentent de se constituer en force poli-
tique. « En attendant, commente l'auteur, chaque foyer
de Beidane ("Blancs") entretient des harratine noirs,
fils d'anciens esclaves auxquels il donne le nom de
"serviteurs", un peu comme on faisait naguère à la
Barbade, où l'on gratifiait pudiquement du nom d'apprentis" les esclaves fraîchement libérés
de leurs chaînes. »
Ainsi donc, une bonne part de la main-d'oeuvre servile utilisée dans le monde arabe venait
d'Afrique subsaharienne - en Tunisie, le même mot, abîd, désigne indistinctement l'esclave et
le Noir... - et tout particulièrement du Sahel, de l'Éthiopie ainsi que de la côte orientale du
continent. Mais les Balkans et les steppes de l'Asie centrale furent également d'importants
bassins pourvoyeurs.
Combien furent-ils? Dans le cas de la traite occidentale, les éléments de chiffrage existent:
les négriers tenaient des journaux de bord dans lesquels était reporté le détail de leur com-
merce honteux. Rien de tel avec la traite orientale. Confrontant les diverses sources, Malek
Chebel estime à plus de 20 millions le « volume total de l'esclavage en terres arabes et mu-
sulmanes ». Ce nombre englobe aussi bien les captifs de guerre slaves, les concubines et les
domestiques circassiennes, que les domestiques noirs achetés à des négriers ou razziés dans
les villages du Sahel, les marins chrétiens capturés par les corsaires barbaresques en Méditer-
ranée. Les négriers arabes auraient donc fait « mieux » que leurs homologues européens. Les
uns ont, il est vrai, sévi pendant quatorze siècles, contre moins de quatre pour les autres.
Faut-il chercher dans le Coran la cause du mal? Le Livre, certes, accepte que la condition
de sujétion des esclaves par rapport aux maîtres soit maintenue en l'état. Car l'islam est né
dans une région du monde où l'esclavage était quasiment un mode de production. Mais il tente
d'en limiter les abus;'tout comme il apporte un progrès incontestable à la situation des femmes
(notamment en limitant à quatre le nombre des épouses autorisé).
Par ailleurs, l'affranchissement est recommandé au croyant dont il favorise l'accès au Para-
dis. Le prophète Mohammed n'avait-il pas donné l'exemple en la matière?
Vivement encouragé en théorie, l'affranchissement n'a, hélas, guère été suivi en pratique.
De siècle en siècle, l'esclavage est devenu un fait musulman, s'inscrivant profondément dans
les habitudes. Pourtant, c'est un sujet dont on ne parle pas. En dehors de l'Égyptien Mohamed
Abdou, du Syrien Rachid Ridha, de l'Iranien Mirza Ah Mohamed, fondateur, au XIXe siècle,
du bâbisme, qui a fermement condamné cette pratique, la plupart des réformateurs sont restés
étonnamment discrets sur la question.
[26]
Et que dire des islamologues ! Louis MASSIGNON, Vincent MONTEIL ou Jacques
BERQUE disposaient des informations qui leur auraient permis, en plein XXe siècle, de tirer
la sonnette d'alarme. Peut-être ont-ils préféré, écrit Malek CHEBEL, « la hauteur mystique
des grands penseurs, des philosophes et des théosophes de l'islam aux réalités scabreuses des
marchands de chair humaine ». Ils savaient, mais leur empathie pour l'islam les inclinait à
trouver à cette religion et aux hommes qui s'en réclament des excuses qui ne sont en rien justi-
fiées.
Quand bien même la réalité de l'esclavage arabe est reconnue, c'est souvent pour en atté-
nuer la rudesse : il n'aurait pas abouti à la dépersonnalisation de l'esclave, comme cela a été le
cas avec le commerce triangulaire Afrique-Amérique-Europe, affirme-t-on. Comme s'il pou-
vait y avoir une graduation dans l'infamie...
Mais le pire est peut-être dans l'impact que l'esclavage a eu sur les mœurs politiques du
monde arabe. Dans un livre tout récent*, l'universitaire marocain Mohammed ENNAJI ex-
plique en quoi il a fondé le rapport au pouvoir et donc l'absolutisme qui est encore souvent la
règle dans cette partie du monde.
Une fois le livre de Malek CHEBEL - dont, curieusement, les médias ont peu parlé - fer-
mé, on ne voit plus la civilisation islamique de la même façon. Comme l'auteur lui-même, qui,
pour, cette étude a dû « parcourir au moins 120000 kilomètres » pour en arriver à cette terrible
conclusion: « L'islam dit l'inverse de ce que les musulmans pratiquent, et c'est une énigme en
soi. La duplicité humaine qui consiste à transformer un message d'émancipation en goulag
humain fait partie intégrante de ce paradoxe. » ∎
 Le Sujet et le Mamelouk. Esclavage, pouvoir et religion dans le monde
arabe, éd. Mille et une nuits, 368 pages, 16 euros.
Malek Chebel : « j'ai voulu briser le silence» Propos recueillis par Dominique MATAIL-
LET
JEUNE AFRIQUE : Pourquoi ce livre, et pourquoi maintenant?
MALEK CHEBEL : C'est une question qui me tenait à cœur depuis longtemps. Pour
écrire mes livres, je constitue des dossiers richement documentés. La prise de conscience,
tardive, hélas, du phénomène de l'esclavage dans le monde islamique m'a laissé penser que
l'opinion était assez bien préparée. Compte tenu de la surface que j'ai acquise dans le domaine
des études sur l'islam, je me suis dit: c'est un discours qui peut passer maintenant.
Est-ce que ce discours passe effectivement? Il semble qu'il crée beaucoup de gêne.
[27]
S'il dérange, c'est que je touche quelque chose de fondamental et de vrai. C'est qu'il y a en-
core des esclaves. Tant mieux donc si mon livre gêne, car j'ai voulu briser l'opacité qui en-
toure cette question de l'esclavage.
Avez-vous eu vent de réactions hostiles?
Il y a eu un mouvement dans les chancelleries arabes, qui a été vite éteint. Ils ont compris
que, médiatiquement parlant, cela aurait été très mauvais pour eux d'enclencher une offensive.
Les médias vous suivent-ils ?
Je constate une gêne, une retenue de leur part, ici, en France. Les journalistes sont circons-
pects. Ils ne savent pas comment prendre l'information.
Au Maghreb, mis à part un papier, en août, donc avant la sortie du livre, dans Le Quotidien
d'Oran, c'est motus et bouche cousue. Même au Maroc, d'habitude plus ouvert, aucun écho
dans les médias non plus. En clair, il y a un blocage maghrébin.
Dans quels pays l'esclavage a-t-il gardé le plus de réalité ?
L'esclavage est encore sensible en Mauritanie. Mais l'État fait des efforts assez importants
pour se débarrasser de cet héritage scandaleux. Le phénomène des petites bonnes au Maroc
est aussi à prendre en considération. Un secrétariat d'État a d'ailleurs été créé pour recenser les
jeunes filles et leur donner un statut. Il y a évidemment tout un esclavage invisible dans les
monarchies et les sultanats du Golfe. À quoi s'ajoute, dans les mêmes pays, un nouvel escla-
vage économique. Dans l'Afrique moyenne, au Mali, au Tchad et ailleurs, subsistent de mul-
tiples formes d'esclavage, liées cette fois à la pauvreté. On ,m,',a parlé de vente d'enfants ici
ou là. Il faut mentionner également les intouchables en Inde.
Vous décrivez la société touarègue comme l'une des pires sociétés esclavagistes...
Les rapports esclavagistes ont été à peu près maintenus. Il y a, bien sûr, eu une atténuation
avec l'apparition des États-nations dans les ` cinq pays africains où vivent les Touaregs.
'L'existence d'une police nationale, d'une justice relativement distincte des ethnies et des oli-
garchies est un progrès incontestable. Mais, sous cape, les aristocrates touaregs sont toujours
des aristocrates et les esclaves, les harratine, sont toujours leurs serviteurs.
Pourquoi les mentalités évoluent-elles si lentement?
Parce que tout le monde, à commencer par les élites religieuses, se tait. Quand on pose la
question, on dit qu'il y a bien d'autres problèmes tels que la pauvreté, les maladies. Moi, je
dis: sur le plan moral, ce n'est pas acceptable en 2007 qu'il y ait encore des esclaves.
[28]
Comment expliquer ce silence dans le monde arabo-musulman?
Pour beaucoup de gens, l'esclavage, ça n'existe pas. Même quand tu dis à un esclavagiste:
« Tu as des esclaves. » Il te répond: « Mais non, ce sont mes enfants adoptifs. Je les aime
comme mes fils. »
On dit aussi que l'esclavage dans le monde arabe n'a rien à voir avec l'esclavage occiden-
tal...
C'est vrai que la traite négrière occidentale était strictement économique, puisqu'elle con-
sistait à transporter des Africains dans les plantations en Amérique, alors que l'esclavage
oriental était plus diversifié. Les captifs étaient utilisés dans l'agriculture, mais aussi comme
soldats ou pour servir dans les palais.
Si la traite occidentale a duré moins de quatre siècles, la traite orientale s'est étalée sur qua-
torze siècles, puisque j'en situe les débuts avec la naissance de l'islam. Le fait que le phéno-
mène soit dilué dans le temps et qu'il n'y ait pas eu de bateau négrier donne le sentiment que
c'est différent. Le volume total de l'esclavage dans le monde arabo-islamique atteint pourtant,
selon les estimations les plus sérieuses, les 20 millions, soit plus que le nombre d'Africains
déportés dans les Amériques. Alors, pour moi, aujourd'hui, c'est pareil.
http://blog.francetv.fr/Faawru/index.php/2008/05/07/71997-islam-et-esclavage
[29]
Esclaves noirs en Méditerranée
Jean-Michel Deveau
Plan
I - Qui sont ces esclaves ?
II - Zones de capture et itinéraires de traite
III - Fluctuations du système et incertitude des nombres
Conclusion
1 Dans le cadre d’une rencontre consacrée { l’étude de l’esclavage en Méditerranée, il
était difficile de laisser sous silence une des pages les plus méconnues, mais peut aussi
l’une des plus importantes qui a affecté les relations entre les rives de cette mer et
l’Afrique sahélienne. On reste sur les retranchements d’un tabou pour une histoire qui
débute avec la conquête arabe et ne s’achève officiellement que dans un tardif
XIXe siècle.
2 Il n’est pas question dans ce bref article d’innover sur la base de nouvelles re-
cherches en archives, mais simplement de dresser un bilan historiographique.
L’impulsion donnée depuis une dizaine d’année par l’UNESCO aux recherches sur
l’esclavage s’est heurtée { une fin de non recevoir pour ce qui concernait ce sujet. Aussi
n’en trouve-t-on que des bribes éparses dans une somme de publications dont cette
communication tente de reprendre l’essentiel.
3 La présence d’esclaves noirs est attestée dès la plus haute antiquité sur les rives de
la Méditerranée, et lorsque s’achève l’époque moderne ils sont encore légions sur
l’ensemble des rivages du monde musulman. Or cette constante de l’histoire méditerra-
néenne n’a laissé que des traces aussi ténues qu’éparses dans les sources, d’où la diffi-
culté de cerner avec précision son ampleur et les mécanismes de son fonctionnement.
4 Paradoxalement les sources médiévales sont beaucoup plus abondantes, surtout
grâce aux chroniques des empires du Mali, édifiés sur le bassin du Niger à partir de la
pénétration musulmane au sud du Sahara. Le Tarikh el-Fettach et le Tarikh el-Soudan,
en particulier, renseignent abondamment sur les captures, sur les ventes et sur la traite
transsaharienne à partir de Djenné ou de Tombouctou1. Cependant l’historiographie
semble encore balbutier dans une enfance très ignorante de l’arabe et du turc, car,
semble-t-il, de nombreux manuscrits dorment encore dans les archives des pays qui ont
relevé de la mouvance de l’ancien empire turc.
5 Il semble également qu’un certain tabou relatif { ce sujet n’encourage pas particu-
lièrement les recherches. Cependant quelques auteurs commencent { s’y aventurer
certes avec prudence, mais aussi avec une liberté d’esprit qui ne peut qu’encourager les
nouvelles générations d’historiens2. En revanche si les sources occidentales ont été
beaucoup plus sollicitées, les chercheurs ont plutôt centré leur problématique générale
de l’esclavage dans le monde méditerranéen, ne travaillant que par incidence sur la spé-
cificité sub-saharienne.
6 Pendant longtemps on a évacué le problème en considérant qu’{ partir du
XVIe siècle, la traite atlantique avait tari le flux médiéval transsaharien. Cette thèse, pré-
sentée comme un axiome, arrangeait l’école historique de tendance tiers-mondiste qui la
répétait { longueur d’ouvrages sans se poser plus de problème sur cette vision des
[30]
choses érigée en dogme. Il est donc intéressant de s’interroger sur la réalité de la pré-
sence de ces Noirs qui s’inscrit en continu sur les rivages méditerranéens depuis la fin
du XVe siècle, alors que les caravelles d’Henri le navigateur débarquèrent leurs pre-
mières victimes sur les marchés du Portugal, jusqu’au XIXe siècle marqué par l’abolition
de la traite en 1815.
7 Là encore, sans preuve scientifique, on a longtemps admis que cette abolition avait
réactivé les courants caravaniers de la traite transsaharienne. Mais c’est entrer dans une
nouvelle problématique qui dépasse les limites chronologiques de cette étude centrée
sur la période moderne.
I - Qui sont ces esclaves ?
8 L’image d’Epinal traditionnelle a popularisé l’esclave domestique jusqu’{ faire de
l’odalisque un archétype de la peinture orientaliste des XVIIIe et XIXe siècles. Elle donne
au tableau la tache sombre qui rehausse le chatoiement lumineux où se prélassent des
Blanches aux lignes opulentes. Deux siècles plus tôt c’étaient des hommes qui jouaient ce
rôle. Les traits franchement négroïdes du visage surmontaient la livrée princière de leur
maître qu’ils servaient { table ou aidaient dans une scène diplomatique ou militaire.
9 Ces visions un peu réductrices par la seule représentation domestique n’en figu-
raient pas moins une réalité largement répandue. En Méditerranée musulmane, l’esclave
est d’abord un domestique, sans que l’on puisse actuellement avancer aucune statistique
sur son importance relative. Domesticité semble-t-il nombreuse dans les familles riches
puisqu’il est de coutume d’offrir une esclave noire en cadeau de noces { Fès au XVe siècle.
10 Selon Haëdo deux siècles plus tard, à Alger :
« les principales dames qui sortent, mènent avec elles autant de négresses (elles en
ont plusieurs qui valent de 25 à 30 écus chacune) que de blanches chrétiennes dont elles
ont aussi beaucoup(…). Il y en a qui ont une escorte de quatre, de six et même de dix es-
claves3 ».
11 Selon la tradition, toutes ces esclaves auraient été traitées avec la plus grande bon-
té, étant parfois même considérées comme membres de la famille, sortes de parents
pauvres accablés par le destin. Dans les villes, on leur enseignait l’arabe, et en général on
essayait de convertir les Noires { l’Islam. Conversions superficielles, impossibles { cata-
loguer dans le cadre d’une acculturation réussie.
12 A la première occasion le vernis islamique craquait, laissant place à un retour aux
coutumes sub-sahariennes, comme on pouvait le constater, par exemple { l’occasion des
mariages. En effet, avec le consentement de leur maître ces femmes pouvaient épouser
un esclave.
13 Plus au sud, dans le désert presque toutes les tribus nomades ont à leur service de
nombreuses femmes noires, toujours aussi bien traitées, dit-on. Certaines, après une
période de bons et loyaux services, retrouvaient la liberté au sein de la tribu avec les
mêmes droits que les autres membres.
14 Ce discours, repris dans la seule analyse herméneutique des textes sacrés, deman-
derait une étude de cas vécus, encore impossible à faire faute de sources en langue
arabe, si toutefois elles existent, car, pour l’instant, aucune n’a encore été mise { jour. En
revanche, les études de cas relatées par Claude Meillassous pour l’époque contempo-
[31]
raine, sur la base d’enquêtes orales laissent entrevoir une réalité beaucoup plus sordide
dans le monde des Touareg. Alors peut-on extrapoler dans le temps et dans l’espace ?4
15 Beaucoup de Noires furent enfermées comme concubines dans les maisonnées.
Elles avaient auprès des Arabes une réputation de beauté et de performances physiques
qui les faisaient rechercher quel qu’en fût le prix. Leur nombre reste tout aussi mysté-
rieux que le secret des harems, mais on peut l’estimer suffisamment important puis-
qu’elles ont réussi { métisser une bonne partie de la population sur un espace qui joint
la zone des oasis à la latitude de Warghla aux centres de redistribution comme Sidjil-
massa ou Fés.
16 Au chapitre de la domesticité, les eunuques noirs ont troublé l’imaginaire occiden-
tal, mais l’approche statistique reste aussi impressionniste que la précédente. Les Noirs
n’ont pas été les seuls mais ils semblent de loin les plus nombreux. En revanche, la réali-
té sociologique a pris un relief, certes poétique, mais probablement très voisine du vécu
avec la traduction des Mille et une Nuits par Galland { l’aube du XVIIIe siècle5.
17 Sans égard pour la misère de ces malheureux, on distinguait ceux qui avaient subi
l’ablation des seuls testicules et ceux dont on avait coupé la totalité des organes sexuels.
L’opération était pratiquée après la traversée du Sahara, très souvent en Egypte où les
moines coptes s’en étaient fait une spécialité. Seuls ceux de la deuxième catégorie
étaient commis à la garde des harems, car les autres conservaient une capacité
d’érection, qui selon la rumeur publique, les rendait encore plus désirables. La fidélité
des uns et des autres valait toutes les gardes prétoriennes. Sachant que le reste de la
société les rejetait sans appel, ils ne trouvaient de compensation affective que dans la
reconnaissance de leur maître. Un véritable transfert au sens freudien s’opérait qui n’a
pas encore été étudié par les psychanalystes.
18 Quoi qu’il en soit, l’eunuque était symbole de richesse puisqu’il valait plus du
double de l’esclave ordinaire. A partir du IXe siècle leur nombre se multiplie dans les pa-
lais princiers. Le calife Al-Muqtadir (908-932) en aurait possédé 11000 dont 7000 Noirs,
rapport numérique qui se passe de commentaire sur l’écrasante majorité des Africains.
La cour ottomane allait les chercher en Egypte. Certains ont rempli de très hautes fonc-
tions, et, à partir de 1582, les Noirs supplantent définitivement les eunuques blancs dans
la fonction publique. En Arabie, on en trouvait beaucoup employés sur les lieux saints où
certains ont réalisé d’énormes fortunes.
19 Pour être complet il faudrait ajouter ceux qui assuraient un simple service domes-
tique, ou ceux qui avaient des fonctions dans l’économie, ou dans l’armée comme nous
allons le voir.
20 Les gardes noires apparaissent dès le début de la conquête islamique en Tunisie et
en Egypte.
21 Dans ce dernier pays, elle comptera jusqu’{ 40 000 hommes { la fin du IXe siècle et
autant au début du XII°, et finira par jouer un rôle si important qu’on l’estimera dange-
reuse. A plusieurs reprises le pouvoir encouragea la foule à les massacrer. En 1169, lors
d’une dernière tentative de soulèvement, 5O OOO Noirs furent mis hors de combat, mais
l’alerte avait été si chaude que la garde fut définitivement supprimée, ce qui n’empêcha
pas de continuer à enrôler des Africains dans les autres corps de troupe.
22 Au Maroc, ce corps d’élite dura beaucoup plus longtemps. Mulay Isma’il (1672-
1727) organisa même non plus un corps de garde, mais une véritable armée noire. A
partir de 1672, les expéditions se multiplient vers le sud pour razzier les Noirs ou en
[32]
acheter sur les grands marchés du Soudan, à Djenné ou à Tombouctou. Très vite cette
armée devient si nombreuse que le sultan bâtit une ville pour la loger. Les soldats sont
encouragés à se marier et leurs enfants deviennent à leur tour soldats-esclaves. A 16 ans
ils achèvent leur formation et épousent une jeune négresse afin que leurs enfants les
remplacent un jour. Le système fonctionna si bien qu’un siècle plus tard ce corps était
devenu la première force de l’Etat et décidait du maintien ou de la chute du souverain et
de ses collaborateurs. Sadi Muammad, menacé d’une nouvelle révolte dissout définiti-
vement le corps et en dispersa les hommes sur l’ensemble du royaume.
23 Le système productif méditerranéen ne semble pas avoir retenu une foule
d’esclaves comme cela fut le cas dans la Caraïbe ou aux Etats-Unis par exemple. Seul
l’orient mésopotamien semble avoir utilisé le travail servile sur une échelle comparable
{ celle de l’Amérique. Les itinéraires de cette traite passaient par le Sahara et par les
berges méditerranéennes autant que par celles de la mer Rouge.
24 Les travaux d’Alexandre Popovic sur les grandes révoltes des VIIe et IXe siècles en
révèlent l’ampleur, mais rien de comparable n’a encore été entrepris pour l’époque mo-
derne en Méditerranée. On connaît cependant l’importance des plantations de canne {
sucre du Maroc dont l’essentiel de la main-d’œuvre provenait du sud du Sahara. L{ en-
core de sérieuses révoltes dans les années 1576-1598 ont dû ébranler le système, mais
on en ignore à peu près tout, aussi bien des conditions que du déroulement.
25 Hors de ce cas, semble-t-il marginal du Maroc, le travail des esclaves noirs relève
beaucoup plus du saupoudrage artisanal que de la concentration industrielle. Ce qui
n’exclut pas un total important d’hommes ou de femmes mis au service d’un superflu. Il
vaudrait donc mieux parler d’une société d’esclavage que d’une société esclavagiste.
II - Zones de capture et itinéraires de traite
26 Depuis que les musulmans ont investi la traite transsaharienne, deux grandes
zones d’approvisionnement divisent la région du Sahel.
27 - A l’est, sur une bande qui englobe l’actuel Soudan et les marges de l’Erythrée et
de l’Ethiopie, la tradition des razzias remontaient à une époque très ancienne. Les Pha-
raons souvent en guerre contre ces turbulents voisins leur imposaient déjà des tributs
en esclaves. Le traité de 651 av. JC les obligeait { en livrer 360 par an et précisait qu’ils
devaient tous être de magnifiques spécimens humains, en excellente forme, ni impu-
bères, ni trop vieux. A l’extrême est, la corne de l’Afrique alimentait un fort courant en
direction de l’Arabie et du Golfe Persique, comme nous l’avons vus pour une période
ultérieure au moment des révoltes de Basra.
28 - La seconde zone { l’ouest s’étend sur la vallée du Niger et pousse des extensions
en direction de la Sénégambie et du golfe de Guinée. Sur cette immense région à échelle
continentale, une continuité opiniâtre de rafles travers l’histoire du VIIe siècle jusqu’{ un
tardif XIXe dont on n’est pas certain qu’il ne se prolonge pas en plein XX°!
29 Restons sur la ligne de partage ethnique entre nomades et sédentaires, entre agri-
culteurs et éleveurs, entre Blancs et Noirs et l’ensemble des conflits et des stratégies
s’éclaire dans de savants équilibres où il s’agit d’exploiter l’autre jusqu’au point de rup-
ture qui risquerait de le faire disparaître. Franchir cette limite c’est tarir la source de
richesse, aussi, alternent guerres et longues périodes de collaborations favorables à tous
les métissages physiques et culturels. Les Tarikh en relatent les débuts, mais la plupart
[33]
échappent au scriptural et ne peut être relaté que dans une tradition orale en voie de
disparition.
30 Quoi qu’il en soit, demeure l’insoluble problème statistique, clef de l’évolution dé-
mographique de toute la région, et partant des possibilités de ponction. L’archéologie
devrait fournir de solides bases { partir de l’extension de la désertification due très sou-
vent aux variations climatiques facilement repérables, mais lorsque ce n’est pas le cas, il
s’agit de l’exode de populations qui n’en peuvent mais devant la tragédie des rafles. La
limite extrême est atteinte lorsque l’insécurité ne laisse plus la possibilité d’une produc-
tion agricole.
31 C’est ce que révèle le très beau travail conduit au Sénégal le long de la vallée du
fleuve par les chercheurs de l’IFAN. Mais tout reste { faire pour la vallée et le delta inté-
rieur du Niger. Il faut croire que les prédateurs ont ratissé avec l’efficacité maximale
puisque certains sont allés jusqu’au nord de l’actuel Ghana ou le long d’une ligne qui sert
aujourd’hui de frontière avec la Côte d’Ivoire. L{, subsiste la route dite des mosquées, le
long de laquelle les Musulmans venus du nord, convertissaient en même temps qu’ils
rassemblaient leurs caravanes d’esclaves destinées { Djénnée et { Tombouctou. Que l’on
réalise bien la distance de près de mille kilomètres avant d’atteindre cette dernière qui
n’était que le prélude { la traversée du Sahara.
32 La halte s’imposait plus ou moins longue sur ces marchés nigériens, point de rup-
ture des caravanes. Les esclaves y étaient vendus { d’autres marchands routiers du dé-
sert. Il fallait constituer de nouveaux convois, ce qui pouvait prendre plusieurs mois.
33 Ces énormes marchés avaient gonflé la population des cités devenues également
des centres majeurs de la culture musulmane. Autour des mosquées, de puissantes uni-
versités débattaient de la légitimité de l’esclavage. Hamed Baba enseignait à Tombouc-
tou que la servitude de l’incroyant ne posait aucun problème de conscience. Tout
l’argumentaire reposait sur les cas limites du captif de guerre converti au moment de sa
défaite et autres hypothèses formalistes où la science coranique s’épuisait en débats
aussi vains que ceux des scolastiques formalistes de nos universités médiévales. De tout
cela subsiste le sentiment d’une mauvaise conscience comparable { celle que connaîtra
l’Europe au XVIIIe siècle. L’Islam au reste n’apportant pas plus de solution humaniste que
la Chrétienté.
34 Retenons de tout cela que le trafic négrier pour susciter de tels débats n’avait rien
d’anecdotique, mais condamnait chaque année des milliers de victimes { franchir le dé-
sert.
35 La traversée suivait trois itinéraires principaux :
 1 - celui de l’ouest joignait le Niger et la Tripolitaine en passant par Tahert, Zawi-
la, le Fezzan et le Kanen. De Tripoli une partie des esclaves repartait à Alexandrie
et au Caire d’où ils étaient redistribués dans l’orient arabe et { l’est de la Méditer-
ranée. El Bekri en 1068 décrit ce flux traversant des marchés très actifs du Caire,
{ l’ombre de la grande mosquée où les esclaves s’échangeaient contre des étoffes
rouges, tandis qu’autour s’éployaient jardins irrigués et palmeraies surgies en
plein désert.
 2 - par Warghla Tadmekket on rejoignait Tunis ou Bougie. Axe qui semble avoir
été moins fréquenté que le précédent dont le succès était dû { l’importance de
Tripoli comme plaque tournante.
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(Bibliothèque identitaire) l'esclavage et les arabo musulmans (clan9 islam traite négriers arabes mahomet esclaves racisme anti-blanc, coran hadith)

  • 1. [1] Esclavage et Traite des Esclaves chez les Arabo-Musulmans Compilation d’articles divers
  • 2. [2] Les Négriers en Terre d’Islam Jacques Heers. Professeur honoraire d'histoire à l'Université Paris IV-Sorbonne. Auteur de nombreux ouvrages, dont, notamment, Christophe Colomb, Hachette, Paris, 1981 ; Marco Polo, Fayard, Paris, 1983 ; Machiavel, Fayard, Paris, 1985 ; Gilles de Rais, Perrin, Paris, 1994 ; Jacques Coeur, Perrin, Paris, 1997 ; Les Barbaresques, Perrin, Paris, 2001 ; Les négriers en terre d'Islam, Perrin, Paris, 2001. 1 Les blancs, captifs et esclaves La guerre pourvoyeuse de captifs (VIIe-Xe siècle) Les conquêtes musulmanes, du VIIe au VIIIe siècle, si brutales et d'une telle ampleur que le monde méditerranéen n'avait jamais rien connu de tel, provoquèrent un nombre considérable de captures et, aussitôt, un très important trafic d'hommes et de femmes, conduits en troupes sur les marchés des grandes cités. L'esclavage devint alors un phénomène de masse affectant tous les rouages sociaux, hors de proportion avec ce qu'il avait été dans l'Empire byzantin. Dans les tout premiers temps de l'islam, les es- claves étaient, comme dans l'Antiquité romaine ou du temps de Byzance, essentiellement des Blancs, raflés lors des expéditions ou exposés sur les marchés par des trafiquants qui allaient les acheter en de lointains pays, très loin même des terres d'Islam. Les négriers en terres d'Islam, p. 11 2 En Orient : captifs grecs et perses La flotte du calife de Bagdad assiège Constantinople en 673. Elle trouve les murailles de la ville renforcées par d'impressionnants fortins et les redoutables vaisseaux grecs siphonophores, capables de lancer le terrible feu grégeois, prêts au combat. Cette résis- tance byzantine ruine l'enthousiasme des assaillants qui se replient et ne tentent plus de fortes attaques avant plusieurs décennies. En 716, ils mènent leurs troupes à travers l'Anatolie, passent les Détroits et pénètrent jusqu'en Thrace tandis qu'une flotte de mille vaisseaux cerne de nouveau Constantinople. Mais, attaqués par les Bulgares au nord,
  • 3. [3] décimés sur mer par le feu grégeois, les musulmans abandonnent, cette fois encore, le siège après un an de durs combats. Ces premiers élans brisés, la guerre ne fut plus dès lors que raids de cavalerie, raids sauvages, inopinés, non pour conquérir ou établir des colonies militaires, centres de garnisons pour d'autres offensives, mais simplement pour le butin et la chasse aux esclaves. Chez les chrétiens, les populations se réfugiaient dans des camps fortifiés, à Dorylée, à Smyrne, à Milet. Sur ce front mouvant et incertain, har- diment défendu par les colonies des acrites, soldats et paysans, les chefs guerriers se retranchaient, sentinelles hasardées, dans leurs palais ceints de hautes murailles. Les poèmes épiques, souvent d'origine populaire, modèles peut-être de nos chansons de geste, content les hauts faits d'armes des héros, capitaines des châteaux dressés sur les rives de l'Euphrate, mais disent aussi, en d'autres accents, les angoisses et les peines des petites gens, paysans, villageois, surpris au travail, incapables de fuir assez tôt, emmenés captifs pour servir en des terres lointaines d'Arabie ou d'Irak. Ibidem, pp. 15-16 3 Les premiers grands marchés d'esclaves (IXe-Xe siècle) Esclaves saxons, marchands juifs et chrétiens Pendant longtemps, les géographes, les voyageurs et les marchands musulmans te- naient pour «Slaves» tous les hommes qui vivaient hors de leurs Etats, de l'Espagne aux steppes de la Russie et de l'Asie centrale et, plus loin encore, sur les terres inconnues, contrées réputées rebelles de Gog et Magog. Les conquérants musulmans n'ont tenté que très rarement des raids aussi loin de leurs bases et les esclaves slaves ne pouvaient être qu'objets de traite. Ceux de Bohême étaient régulièrement conduits à Prague, centre de castration pour les hommes, puis à Ratisbonne. Ceux des pays plus au nord, avec les Saxons faits prisonniers lors des cam- pagnes de Charlemagne des années 780, furent expédiés vers les gros bourgs fortifiés de la route germanique pour finir sur le marché de Verdun. De là, on les menait à Lyon, autre grand carrefour pour ce négoce des captifs, puis à Arles et Narbonne et, enfin, vers les ports d'Espagne, du Maghreb ou, directement, de l'Orient. Ce n'était ni affaires de peu ni d'un court moment: au xe siècle encore, Liutprand, évêque de Crémone (920-972), ne cessait de dénoncer et de condamner les profits énormes, proprement scandaleux, que réalisaient les marchands de Verdun. A la même époque, les recensements des Slaves amenés sur le marché musulman de Cordoue don- nent un chiffre de plus de dix mille en l'espace de cinquante années, de 912 à 961. Ils ont très vite formé, comme les Turcs en Orient, peuple non encore islamisé, une part impor- tante des troupes et du corps des officiers au service du calife. Au temps de la décadence de ce califat de Cordoue et de l'éparpillement des pouvoirs, dans les années 1000, plusieurs d'entre eux, notamment dans le Levant ibérique, prirent la tête d'un petit royaume, alors complètement indépendant. Les marchands des pays d'islam, eux non plus, ne se risquaient pas volontiers hors du monde méditerranéen et répugnaient à se rendre en Gaule où ils ne rencontraient que des populations hostiles. On ne les y voyait pas fréquenter les marchés d'esclaves alors que les Juifs étaient, eux, communément montrés comme les maîtres de ce malheureux commerce.
  • 4. [4] Certains n'étaient que de petites gens, colporteurs errants, vendeurs de bibelots et de pacotille qui ne prenaient à leur suite qu'un ou deux captifs. D'autres, au contraire, bien en place auprès des palais des rois francs, maîtres d'entreprises implantées dans tout le pays, convoyaient vers les ports de la Méditerranée de nombreuses troupes de prison- niers, embarquées vers l'Orient. « Ils rapportent d'Occident des eunuques, des esclaves des deux sexes, du brocart, des peaux de castor, des pelisses de martre et des autres fourrures et des armes.» Nos auteurs, musulmans et chrétiens, insistent particulièrement sur le rôle des Juifs qui, dans l'Espagne musulmane, formaient souvent la majorité de la population dans les grandes villes, notamment à Grenade, appelée communément, au VIIIe siècle, la « ville des Juifs». Négociants en produits de luxe, métaux, bijoux et soieries, plus rarement prêteurs sur gages, ils se groupaient en petites sociétés de parents et d'amis, les uns établis dans une des cités proches de la frontière castillane, les autres dans les ports d'Ibérie et d'Afrique du Nord, et prenaient à leur compte certainement une bonne part des transactions entre les deux mondes. On assurait aussi que, les musulmans s'y refusant, ces trafiquants israélites veillaient à la bonne tenue des centres de castration. Cependant, des marchands gaulois et chrétiens, de Verdun surtout, allaient eux aussi régulièrement commercer à Saragosse et dans les autres cités musulmanes d'Espagne pour y présenter et y vendre des captifs. L'abbé Jean de Gorze, chargé de mission par l'empereur germanique Otton 1er auprès du calife de Cordoue, se fit accompagner par un de ces négociants chrétiens de Verdun qui connaissait bien l'Espagne. Les Mozarabes, chrétiens demeurés en Espagne sous la domination musulmane, ne demeuraient pas inactifs; ils passaient les Pyrénées, fréquentaient les marchés, à Verdun bien sûr et jusque dans les cités des rives du Rhin. Pour l'Italie, les mêmes auteurs parlent beaucoup moins des Juifs mais plus souvent des marchands chrétiens, hommes de vilaines mains, pillards et complices, meneurs de raids au-delà des Alpes ou sur l'autre rive de l' Adriatique, tous trafiquants d'esclaves, capables de faire prisonniers et de ramener hommes et femmes sans regarder à leurs origines ou à leur religion. Les hommes d'affaires vénitiens, ceux-ci mieux organisés et plus honorablement con- nus, armant des navires à leurs noms, y prenaient part. Soumise alors à Byzance, Venise bravait les empereurs de Constantinople qui avaient formellement condamné cette traite et menacé les coupables de dures sanctions. Pour mettre un terme à ces sinistres négoces ou, du moins, en limiter les profits, Léon V l'Arménien, empereur (813820), interdit à tous ses sujets, plus particulièrement aux Vénitiens, de commercer dans les ports d'Egypte et de Syrie. L'on vit pourtant d'auda- cieux trafiquants traquer des esclaves dans les Abruzzes et le Latium pour les revendre dans le Maghreb. Ibidem, pp. 16-18 4
  • 5. [5] Les Russes et les Bulgares de la Volga Le Livre sur la clairvoyance en matière commerciale, attribué à l'écrivain al-Djahiz (d. 669), faisait déjà mention d'esclaves des deux sexes importés du pays des Khazares sur les rives de la Volga, près de son embouchure. Cependant, les trafics marchands avec les villes de Russie ne prirent un bel essor que plus tard, au temps où la dynastie des Sassanides puis celle des Bouyides, toutes deux originaires de Perse, régnèrent à Bagdad. Le célèbre lettré athTha' alibi imagine une conversation entre deux courtisans du roi bouyide Adud al-Dawla (977-983) et les fait parler de jeunes esclaves turcs, de concu- bines de Boukhara et de servantes de Samarkand. Sur les lointains marchés de Kiev et de Bulghar, la capitale des Bulgares, les mar- chands musulmans étaient presque tous originaires ou de la Transoxiane ou du Kharas- san, au nord-est de l'Iran. Les trafiquants de la ville de Mechhed venaient, chaque saison, au retour de leurs ex- péditions dans le Nord et les pays des steppes, vendre à Bagdad diverses sortes de four- rures, les moutons et les bœufs, le miel, la cire et les cuirs, les cuirasses et, surtout, les esclaves. Pour se procurer ces hommes et ces femmes, de plus en plus nombreux et d'origines de plus en plus lointaines, les musulmans de Perse traitaient avec les Bulgares ou avec les Russes, intermédiaires obligés, convoyeurs de captifs. L'année 921, le calife abbasside de Bagdad, Muqtadir, envoya une ambassade au roi des Bulgares de la Volga. Le secrétaire de l'expédition, Ahmed ibn Fodlan, tenait, au jour le jour, registre des marches de la caravane et des étapes, jusque très loin dans des pays jusqu'alors inconnus; il s'attarde longuement { décrire les mœurs et les usages poli- tiques de ces peuples, si différents de ceux de son monde. « La coutume est que le roi des Khazares ait vingtcinq femmes dont chacune est la fille d'un des rois des pays voisins. Il les prend de gré ou de force. Il a aussi des esclaves con- cubines pour sa couche au nombre de soixante qui sont toutes d'une extrême beauté. Toutes ces femmes, libres ou esclaves, sont dans un château isolé dans lequel chacune a un pavillon à coupole recouvert de bois de teck. Chacune d'elles a un eunuque qui la soustrait aux regards. » Et encore : « Quand un grand personnage meurt, les gens de sa famille disent à ses filles esclaves et à ses garçons esclaves: " Qui d'entre vous mourra avec lui? " » Pour eux, c'est un honneur que de se sacrifier. Ibn Fodlan voit aussi, à leur campement au bord du fleuve, des Russes, « les plus mal- propres des créatures de Dieu », qui ancrent leurs bateaux sur les berges et construisent de grandes maisons de bois. Dans chacune de ces maisons, sont réunies de dix à vingt personnes. « Avec eux sont de belles jeunes filles esclaves destinées aux marchands. Chacun d'entre eux, sous les yeux de son compagnon, a des rapports sexuels avec une esclave. Parfois tout un groupe d'entre eux s'unissent de cette manière, les uns en face des autres. Si un marchand entre à ce moment, pour acheter à l'un d'eux une jeune fille et le trouve en train de cohabiter avec elle, l'homme ne se détache pas d'elle avant d'avoir satisfait son besoin. » Ce fut, au long des temps, un négoce tout ordinaire, quasi routinier, soumis aux cou- tumes, aux règles et aux taxes. «Quand les Russes ou les gens d'autres races arrivent
  • 6. [6] dans le pays des Bulgares avec des esclaves, le roi a le droit de choisir pour lui un esclave sur dix. » Les Russes s'aventuraient très loin et, des régions les plus éloignées du « pays des Slaves », ramenaient des captifs, hommes et femmes des deux sexes, et des fourrures précieuses, peaux de castor et de renard noir. Deux cents ans après Ibn Fodlan, Abu Hamid de Grenade, lors d'un long et pénible voyage en Europe de l'Est, trouve les Russes partout sur son chemin. Ils lui parlent des Wisu, peuple de la région du lac Ladoga où les hommes chassent le castor, et des Arw du pays des grands fleuves qui, eux, chassent 1 'hermine et le petit-gris. Au-delà des Wisu, près de la mer Arctique, «la mer des ténèbres », vit un peuple de nomades, les Yura, qui, contre des épées, livrent aux Russes des peaux de zibeline et des esclaves. Ces deux négoces, peaux de bêtes et bétail humain, allaient partout de pair. Là aussi, les Juifs assuraient certainement une part importante des échanges, en par- ticulier à l'est, pour les produits de la lointaine Asie ou des steppes et déserts des hauts plateaux. L'historien et géographe Ibn Khurdadhbeth consacre un long passage de sa description du monde à ces Juifs Radhanites et décrit, noms de nombreux fleuves, de villes et de peuples à l'appui, quatre de leurs grands itinéraires : l'un arrivant de l'ouest, par mer, vers Antioche, un autre le long de la côte méridionale de la Perse, un autre en- core par la mer Rouge et la mer d'Oman jusqu'en Inde, et le dernier, le plus important, vers l'Europe centrale et les pays du Nord. Ibidem, pp. 18-21 5 La ruée des Ottomans (XIIe-XVIe siècle) En pays d'islam, principalement en Orient, les esclaves ne fondaient pas de familles et n'avaient pas ou peu d'enfants. Le nombre relativement important d'eunuques, l'inter- diction faite, bien souvent, aux femmes de se marier, les mortalités terriblement élevées du fait des conditions de travail sur les grands domaines et dans les mines, des guerres entre souverains, peuples et factions, des maladies et des épidémies, firent que les maîtres voyaient leur cheptel humain sans cesse s'affaiblir et devaient le renouveler. Cependant, dès le IXe siècle, les conquêtes se sont essoufflées et les peuples déjà soumis et convertis n'étaient plus territoires de chasse. Pendant plusieurs siècles, les musulmans ont cessé de lancer leurs troupes loin de leurs Etats et la traite fournit alors, de très loin sans doute, le plus grand nombre de captifs. Les grandes offensives n'ont repris que quelque trois cents ans après celles des pre- miers conquérants lorsque les Turcs ottomans venus d'Asie centrale, convertis à l'islam, lancèrent de nouvelles attaques contre les chrétiens en Anatolie : sur Erzeroum dès 1048, sur Sébaste l'an suivant. En 1071, à Mantzikiert, au nord du lac de Van, ils infligent une retentissante défaite aux troupes de Byzance, font prisonnier l'empereur Romain Diogène, s'ouvrent la route de Constantinople, installent leur capitale à Brousse et un sultanat { Konya, en plein cœur du pays. Ce fut, de nouveau, le temps des chasses aux esclaves, sur mer et sur terre. Les poètes de cour, à la solde des émirs ottomans d'Anatolie, chantaient les exploits des pirates de Smyrne et d' Alania qui enlevaient les femmes et les enfants de « ces chiens de mé-
  • 7. [7] créants ». De 1327 à 1348, Umur Pacha, l'un des cinq fils de l'émir d'Aydin 21, lui-même émir de Smyrne et pirate à tous vents, sema la terreur dans tout l'Orient méditerranéen, dans les îles de Chio et de Samos, et jusque sur les côtes du Péloponnèse. Non pour con- quérir des terres, non même pour établir des guerriers et des marchands en quelques comptoirs, mais pour ramener, chaque saison, de merveilleux butins et des centaines de captifs. Ses hommes « capturèrent beaux garçons et belles filles sans nombre au cours de cette chasse et les emmenèrent. Ils mirent le feu à tous les villages ... Au retour, riches et pauvres furent remplis de joie par ses présents. Tout le pays d'Aydin fut comblé de ri- chesses et de biens et la gaieté régna partout. Filles et garçons, agneaux, moutons, oies, canards rôtis et le vin étaient débarqués en abondance. A son frère, il donna en cadeau nombre de vierges aux visages de lune, chacune sans pareille entre mille; il lui donna aussi de beaux garçons francs pour qu'il dénoue les tresses de leurs cheveux. A ces ca- deaux, il ajouta de l'or, de l'argent et des coupes innombrables ». Ce n'étaient pas simples brigandages, expéditions de forbans, de hors-la-loi, mais une guerre encouragée par les chefs religieux, aventures bien codifiées, menées selon la Loi et les règles de l'islam, en tous points une guerre sainte : la cinquième part du butin, « part de Dieu », allait aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs. Les armées ottomanes franchissent les Détroits vers 1350, s'établissent à Andrinople, défont les Serbes à Kossovo (1389) puis les princes et les chevaliers de la croisade de Sigismond de Hongrie à Nicopolis (1396). Pendant plus d'un siècle, elles allèrent de plus en plus loin à la chasse au butin et aux esclaves. En 1432, Bertrandon de La Broquière, conseiller du duc de Bourgogne et chargé de mission en Orient, par ailleurs tout à fait capable de s'entendre avec les Turcs au cours de son voyage en Anatolie, croise sur sa route, dans les Balkans, plus d'une troupe misérable de captifs menés par des guerriers au retour d'une razzia chez les chrétiens et prend alors conscience de la manière dont les Turcs traitent leurs prisonniers, tous voués à l'esclavage: « Je vis quinze hommes qui étaient attachés ensemble par de grosses chaînes par le cou et bien dix femmes, qui avaient été pris peu auparavant dans une course que les Turcs avaient faite dans le royaume de Bosnie et qu'ils conduisaient pour les vendre à Andrinople. Ces malheureux demandaient l'aumône aux portes de la ville; c'était une grande pitié que de voir les maux dont ils souffraient. » Ils prenaient les enfants pour les convertir de force et les initier très jeunes au métier des armes, les soumettre à un dur entraînement pour en faire ces janissaires, corps d'élite de leur armée. Partout où passaient leurs troupes ou leurs galères de combat ce n'étaient que rafles de prisonniers, butin de guerre. Et pas seulement en pays des « chiens de mécréants » : en 1517, entrant dans Le Caire, vainqueurs de l'empire mamelouk d'Egypte et de Syrie, empire musulman bien sûr, ils enlevèrent nombre de jeunes garçons imberbes et des esclaves noirs. A la même époque et jusqu'à leur retentissante défaite de Lépante (7 octobre 1571), où plus d'une centaine de leurs galères de combat furent envoyées par le fond ou prises d'assaut, les Turcs ne cessèrent de lancer chaque année vers l'Occident, Espagne et Italie surtout, de fortes escadres chargées de nombreuses pièces d'artillerie. Les sultans criaient leur détermination de prendre Rome et d'anéantir les Etats chrétiens, ceux du roi d'Espagne en premier.
  • 8. [8] Ils échouèrent et cet acharnement à poursuivre leurs attaques si loin de leurs bases du Bosphore et d'Asie n'eut pour eux d'autres profits que de ramener régulièrement des troupes d 'hommes et de femmes, de jeunes gens surtout, pris lors des sièges de villes pourtant puissamment fortifiées ou razziés au long des côtes. De telle sorte que cette guerre des sultans ottomans de Constantinople, de Sélim 1er et de Soliman le Magni- fique, s'est le plus souvent ramenée à de misérables et cruelles rafles d'hommes. Dans un des gros bourgs de la Riviera génoise, en 1531, un homme sur cinq se trouvait alors es- clave chez les Turcs. Dans Alger, où l'on ne comptait pas moins de six ou sept bagnes pour les chrétiens prisonniers, plusieurs centaines de captifs, peut-être un millier, étaient entassés dans des conditions épouvantables, dans le plus grand bagne, situé en plein cœur du tissu urbain, sur le souk principal qui courait d'une porte à l'autre. C'était un vaste édifice de soixante-dix pieds de long et quarante de large, ordonné autour d'une cour et d'une ci- terne. Au temps d'Hassan Pacha, dans les années 1540, deux mille hommes logeaient dans un bagne plus petit et, un peu plus tard, encore quatre cents dans celui dit « de la Bâ- tarde ». A Tunis, demeurée longtemps indépendante sous un roi maure, la conquête de la ville par les Turcs, en 1574, fit que l'on bâtit en toute hâte huit ou neuf bagnes qui suffi- rent à peine à y entasser les prises de guerre; les hommes s'y pressaient jusqu'à dix ou quinze dans des chambres minuscules, voûtées et sombres. Toute conquête s'accompagnait inévitablement, sur des territoires de plus en plus étendus, d'une chasse aux esclaves, bien souvent but principal de l'expédition. « Les Turcs, voisins des chrétiens, envahissent souvent les terres de ces derniers, non telle- ment par haine de la croix et de la foi, non pour s'emparer de l'or et de l'argent, mais pour faire la chasse aux hommes et les emmener en servitude. Lorsqu'ils envahissent à l'improviste des fermes, ils emportent non seulement les adultes mais encore les bébés non encore sevrés qu'ils trouvent abandonnés par leurs parents en fuite; ils les empor- tent dans des sacs, et les nourrissent avec grand soin. » Aux raids des Ottomans en Occident et en Afrique, répondaient, à la même époque, ceux des sultans musulmans du Deccan qui, pour la cour et les armées comme pour le service domestique, lançaient en Inde razzia sur razzia contre les Infidèles. Pendant son séjour à Delhi, Ibn Battuta assiste au retour d'une chasse: « Il était arrivé des captives indiennes non musulmanes. Le vizir m'en avait donné dix. J'en donnai une à celui qui me les avait amenées mais il ne l'accepta pas; mes compagnons en prirent trois jeunes et, quant aux autres, je ne sais ce qu'elles sont devenues. » Il lui fit aussi présent de plusieurs villages, dont les revenus s'élevaient à cinq mille dinars par an. Ces expéditions n'étaient pas des aventures menées seulement par quelques hommes mais bel et bien de vastes opérations qui mobilisaient de grands moyens que seuls les chefs de guerre, les sultans et les vizirs pouvaient réunir: les non- musulmans se retranchaient dans d'épaisses forêts de bambous « qui les protégeaient comme un rempart et d'où l'on ne pouvait les déloger qu'avec des troupes puissantes et des hommes qui peuvent entrer dans ces forêts et couper ces bambous avec des outils particuliers ». Ibidem, pp. 21-24 6
  • 9. [9] Les raids des musulmans: l'Egypte, le Maghreb et les oasis « Les janissaires et autres soldats turcs, en garnison au pays d'Egypte, s'associent en certain temps de l'année plusieurs ensemble et, prenant des guides et provisions de vivres, s'en vont au désert de Libye, à la chasse de ces nègres. On leur baille au Caire, lorsqu'ils sont mis en vente, une pièce de toile qui leur couvre les parties honteuses. » Au sud de la Nubie et à l'ouest de l'Ethiopie, le trafic des esclaves du Darfur, absolu- ment crucial pour l'économie des sultans musulmans, résultait soit des ventes par les trafiquants installés sur place, Arabes pour la plupart, qui ne pratiquaient que d'assez pauvres razzias sur les villages des environs, soit des raids directement placés sous l' autorité du sultan du Caire. Ces chasses aux hommes se pliaient à des règles parfaitement définies, impliquant des accords constants entre le pouvoir, les notables et les marchands. Celui qui prenait la tête d'une razzia, d'un ghazwa, devait d'abord solliciter la salatiya, autorisation du sul- tan. Celui-ci définissait très exactement le territoire de chasse et prenait, en quelque sorte, les chasseurs et les négociants sous sa protection. Il prêtait une escorte armée et interdisait à d'autres d'aller courir aux Noirs dans les mêmes pays. Le chef de raid avait tous pouvoirs, disposait de la même autorité que le sultan dans ses villes et ses Etats et, effectivement, on le disait bien sultan al-ghazwa, « sultan » maître du raid. Il réunissait ses fidèles, plus ou moins nombreux selon sa renommée, en fait selon le succès de ses entreprises les années précédentes, et négociait avec des groupes de marchands qui fournissaient les vivres nécessaires à de longs jours de route contre l'engagement de recevoir, en échange, un certain nombre de captifs. Chaque année le sultan autorisait plusieurs dizaines de razzias, jusqu'à soixante par- fois; les hommes partaient avant les pluies, de juin à août, et suivaient toujours, sans s'en éloigner, une route fixée à l'avance, tant pour l'aller que pour le retour. Les contrats souscrits par les négociants stipulaient que ceux qui accompagnaient le raid très loin dans le Sud et se chargeaient de convoyer les captifs jusque sur les marchés des villes en recevraient deux fois plus que ceux qui attendaient simplement le retour de la razzia dans le Nord. Ces raids ne tournaient pas forcément aux affrontements guerriers. On traitait avec des rabatteurs ou avec des chefs de tribus eux-mêmes chasseurs d'hommes dans le voi- sinage. Les Noirs surpris n'étaient certainement pas en mesure de résister les armes à la main et l'on savait qu'une bonne expédition pouvait ramener de cinq à six cents es- claves. Le plus souvent les chasseurs opéraient, en toute quiétude, dans la région même du Darfur, plus particulièrement au sud et au sud-ouest. D'autres se risquaient beaucoup plus loin et l'on parle d 'hommes qui demeurèrent six mois en route avant de renoncer, ayant atteint un fleuve qu'ils n'osèrent franchir. Ibidem, pp. 65-66 7 Portugais, Américains et Juifs Parler de la traite des chrétiens et taire les musulmanes, ou les réduire à trop peu, était déjà travestir la vérité. Fallait-il, de plus, pour cette traite atlantique, ne citer que les armateurs de France ou accessoirement d'Angleterre et ne rien dire des autres, no-
  • 10. [10] tamment des Portugais qui furent, et de très loin, les plus actifs sur place, solidement implantés, agents d'un commerce pionnier et maintenu en pleine activité bien plus long- temps ? Arrivés les premiers sur les côtes d'Afrique et sur les rives des fleuves, ils furent bien les seuls, avec les Américains, à s'établir à demeure dans les postes de traite à l'intérieur du continent, là où les Noirs étaient livrés sur le marché bien plus nombreux qu'ailleurs. Ces hommes n'étaient pas seulement capitaines de navires jetant l'ancre pour de courtes escales, le temps d'embarquer les esclaves que d'autres Noirs leur vendaient, mais des résidents, chefs d'entreprises florissantes, négriers au sol, propriétaires de fac- toreries, d'entrepôts et même de troupes de rabatteurs. ------ Peut-on imaginer que les Américains se soient contentés de recevoir des navires d'Europe chargés de Noirs captifs? Ils furent, au contraire, parmi les plus actifs des armateurs et capitaines négriers. Leurs bâtiments de Maryland, de Georgie et de Caroline allaient régulièrement en Afrique, plus particulièrement sur la côte de Guinée qu'ils appelaient tout ordinairement la «Côte des esclaves». Ils avaient conclu des accords avec les rois de ce littoral et avec ceux du Togo qui en- voyaient leurs guerriers razzier à l'intérieur du continent et livraient leurs prisonniers à Anecho (actuellement à la frontière du Togo et du Dahomey), à Porto Novo et à Ouidah, sites portuaires fortifiés. Au temps le plus fort de la traite, au début du XVIIIe siècle, l'on comptait plus de cent vingt vaisseaux négriers, pour le plus grand nombre propriété de négociants et arma- teurs juifs de Charleston en Caroline du Sud et de Newport dans la baie de Chesapeake en Virginie (Moses Levy, Isaac Levy, Abraham AlI, Aaron Lopez, San Levey), ou de Portugais, juifs aus- si, établis en Amérique (David Gomez, Felix de Sou- za), qui, eux, avaient des parents au Brésil. A Charleston, une vingtaine d'établissements, nullement clandestins, distillaient un mauvais al- cool, principal produit proposé en Afrique pour la traite des Noirs esclaves. Certains négriers américains, et non des moindres, se sont, à la manière des Portugais et par- fois de concert avec, eux, solidement établis en Afrique, sur la côte et même à l'intérieur, gérant alors en toute franche propriété d'importants postes de traite, entrepôts et embarcadères pour les loin- tains voyages. Ce que n'ont fait ni les Anglais ni les Français. Ibidem, pp. 255, 258 http://www.denistouret.net/textes/Heers_Jacqu es.html
  • 11. [11] L'esclavage musulman A l’heure où les tentatives de culpabilisation de l’Occident se font déli- rantes, Louis Chagnon ouvre le dossier de l’esclavage musulman. L’histoire de l’esclavage est { l’actualité, utilisée comme outil pour soutenir des re- vendications communautaristes, elle est falsifiée pour introduire la seule critique de l’Occident. Ne pouvant pas reprendre toute l’histoire de l’esclavage, je rappellerai rapi- dement quelques données élémentaires. L’esclavage se perd dans la nuit des temps et les noirs n’en ont pas été les seules vic- times, comme les Occidentaux n’ont pas été les seuls esclavagistes. Le mot «esclave» vient du mot «Slave», les Slaves païens ont en effet fourni les contingents les plus nom- breux d’esclaves pendant le haut Moyen-âge, vendus par les Vénitiens aux arabo- musulmans. Si esclavage et colonisation se sont rejoints aux XVIIe et XVIIIe dans le commerce triangulaire pratiqué par des commerçants, et non par des colons, l’esclavage n’est pas inhérent { la colonisation occidentale, il existait des millénaires avant et exista après. Bien au contraire, la colonisation entraîna la disparition de l’esclavage dans les colonies. Avant même la colonisation de l’Afrique, les Européens avaient agi pour faire supprimer l’esclavage en Tunisie: «Après les trois mois de règne de son frère Othman, le fils de Mohammed bey, Mahmoud bey (1914-1824), se vit contraint par les puissances européennes { supprimer l’esclavage, malgré la perturbation économique que devait entraîner cette brusque mesure (1819).» . Lorsque les Français sont arrivés en Afrique du Nord et en Afrique noire au XIXe siècle, ils ont trouvé des esclaves. L’esclavage était pratiqué par les Arabes et les noirs depuis des siècles. Les ethnies noires se réduisaient en esclavage entre elles et ce sont des chefs noirs qui par des razzias alimentaient les négriers occidentaux aux XVIIe et XVIIIe siècles, ce qu’on oublie trop souvent de rappe- ler. On estime que fin XVIIIe et au début du XIXe en Afrique noire, un quart des hommes avaient un statut d'esclave ou de travailleur forcé. C'étaient des prisonniers de guerre ou des prisonniers pour dettes. La guerre et les dettes étaient les sources traditionnelles où s’approvisionnaient les marchands d’esclaves. Mais, si les Occidentaux supprimèrent l’esclavage, ils laissèrent le travail forcé. Les Arabes réduisirent en esclavage pendant des siècles, non seulement des noirs, mais aussi des chrétiens par des razzias sur les côtes occidentales et la piraterie barba- resque: «Plus que des marchandises pillées, les Barbaresques tiraient profit des captifs. Le Chrétien cessait d’être un infidèle qu’on arrachait { son pays pour devenir un objet de négoce, dont on essayait de se débarrasser le plus vite et le plus cher possible.» . L’église catholique les racheta pendant des siècles. C’est cette piraterie qui fut un le motif essen- tiel de la colonisation de l’Algérie. Pour illustrer ces propos, je vous propose de lire un texte écrit par le général E. Dau- mas et A. de Chancel, publié en 1856 . Rappelons qu’{ cette époque, la France n’est pré- sente en Afrique que sur le littoral algérien et qu’{ cette date elle avait aboli l’esclavage depuis huit ans, en 1848. Le Sahara n’est pas encore bien exploré et il n’existait { cette date aucune colonie française en Afrique noire. Le général Daumas dont le but était de recueillir des informations sur les peuples du sud saharien, s’était introduit dans une caravane qui partait de Metlily, en Algérie, pour se diriger vers un royaume musulman du sud saharien, du nom d’Haoussa, ayant pour chef le sultan Bellou le Victorieux et
  • 12. [12] pour capitale Kachena , leurs habitants appelés { l’époque Foullanes étaient arabes. Ces caravanes trans-sahariennes furent les pourvoyeuses d’esclaves pour le bassin méditer- ranéen et les Arabes du nord pendant des siècles. Les Foullanes avaient soumis tous les royaumes noirs échelonnés sur les fleuves Niger et Sénégal. Aujourd’hui, ce royaume se situerait sur la frontière entre le Niger et le Nigeria. Dans un passage de son livre, il rela- tait les informations sur les conditions et les préceptes réglementant l’esclavage chez les musulmans. C’est ce passage que j’offre { votre lecture. Il se place dans l’esprit des gens qu’il accompagne et qu’il rencontre, il utilise le pronom «nous» pour représenter en fait les algériens de la caravane ou les habitants de la région. Je n’ai pas actualisé l’orthographe et l’ai laissée telle que le général Daumas l’utilisa: «Au centre de la place était posé par terre un énorme tambour qu’un vigoureux Nègre battait { tour de bras avec un bâton tamponné. (…) C’est le tambour du sultan; jamais il n’est battu que pour convoquer l’armée. (…) « Voici la volonté du serki : « Au nom du sultan Bellou le Victorieux, que la bénédiction de Dieu soit sur lui, vous tous, gens du Moutanin, êtes appelés à vous trouver ici demain au jour levant, en armes et montés, avec des provisions suffisantes pour aller, les uns dans le Zenfa , les autres dans le Zendeur , à la chasse des Koholanes idolâtres, ennemis du glorieux sultan notre maître. –Que Dieu les maudisse !» «Tout ce qu’ordonne le sultan est bon, répondirent les soldats; qu’il soit fait selon la volonté de notre seigneur et maître!» Le lendemain, en effet, les Mekhazenia , exacts au rendez-vous, se partagèrent en deux goums , dont l’un prit { l’Est et l’autre au sud-ouest, avec mission de tomber sur les points sans défense, d’en enlever les habitants, et de saisir tous les paysans occupés { la culture de leurs champs; en même temps, des ordres étaient donnés pour traquer à l’intérieur les Koholanes idolâtres. (…) En attendant le retour des goums qu’Omar avait envoyés { la chasse aux nègres, nous nous rendions tous les jours au marché des esclaves, Barka, où nous achetâmes aux prix suivants: Un nègre avec sa barbe ……………………………………….10 ou 15,000 Oudâas On ne les estime point comme marchandise, parce qu’on a peu de chance pour les empêcher de s’échapper. Une négresse faite, même prix pour les mêmes raisons …………..………………………….10 ou 15,000 Un Nègre adolescent………………..……………………………30,000 Une jeune Négresse, le prix varie selon qu’elle est plus ou moins belle…….50 à 60,000 Un négrillon…………………………………………….…………...45,000 Une négrillonne………………………………..…………………..35 { 40,000 Le vendeur donne { l’acheteur les plus grandes facilités pour examiner les esclaves, et l’on a trois jours pour constater les cas rédhibitoires. On peut rendre avant ce temps ex- piré:
  • 13. [13] Celui qui se coupe avec ses chevilles en marchant; Celui dont le cordon ombilical est trop exubérant; Celui qui a les yeux ou les dents en mauvais état; Celui qui se salit comme un enfant en dormant; La négresse qui a le même défaut ou qui ronfle; Celle ou celui qui a les cheveux courts ou entortillés (la plique). Il en est d’ailleurs que nous n’achetons jamais, ceux, par exemple qui sont attaqués d’une maladie singulière que l’on appelle seghemmou. – (…). On n’achète pas non plus ceux qui, étant âgés, ne sont pas circoncis; Ni ceux qui viennent d’un pays situé au sud de Noufi: ils n’ont jamais mangé de sel, et ils résistent difficilement au changement obligé de régime; Ni ceux d’une espèce particulière qui viennent du sud de Kanou: ils sont anthropo- phages. On les reconnaît { leurs dents qu’ils aiguisent et qui sont pointues comme celles des chiens. Nous craindrions pour nos enfants.- ils mangent d’ailleurs, sans répugnance les animaux morts de mort naturelle (djifa, charognes). –On dit qu’ils nous traitent de païens, parce que nous ne voulons que les animaux saignés par la loi ; car disent-ils, vous mangez ce que vous tuez, et vous refusez de manger ce que Dieu a tué. Nous n’achetons pas non plus ceux appelés Kabine el Aakoul. Ils passent pour avoir la puissance d’absorber la santé d’un homme en le regardant, et de le faire mourir de con- somption. On les reconnaît à leurs cheveux tressés en deux longues nattes de chaque côté de la tête. L’achat des Foullanes, des Négresses enceintes et des Nègres juifs est sévèrement prohibé par ordre du sultan. L’achat des Foullanes, parce qu’ils se vantent d’être blancs; des Négresses enceintes, parce que l’enfant qui naîtra d’elles sera propriété du sultan, s’il est idolâtre, et libre s’il est musulman; des Nègres juifs, parce que tous sont bijou- tiers, tailleurs, artisans utiles ou courtiers indispensables pour les transactions commer- ciales; car sous la peau noire ou sous la peau blanche dans le Soudan , dans le Sahara, dans les villes du littoral, partout les juifs ont les mêmes instincts et le double génie des langues et du commerce. Pour éviter la fraude, une caravane ne sort point à Haoussa sans que les esclaves qu’elle emmène aient été attentivement examinés; et il en est de même encore { Taous- sa, à Damergou et à Aguedeuz, chez les Touareug, où Bellou a des oukils chargés des mêmes soins. Le marchand qui contreviendrait { ces ordres s’exposerait { voir toutes ses marchandises confisquées. En un mot, les esclaves proviennent des ghazias [razzias] faites sur les Etats nègres voisins avec lesquels Haoussa est en guerre, et dans les montagnes du pays, où se sont retirés les Koholanes qui n’ont pas voulu reconnaître la religion musulmane; des enlè- vements de ceux qui, observant la religion nouvelle, paraissent regretter l’ancienne, et sont hostiles au pouvoir ou commettent quelques fautes. (…)
  • 14. [14] De l’esclavage chez les musulmans. La loi permet la vente des esclaves, parce qu’en général ils sont infidèles. «Dieu a dit: «Faites la guerre à ceux qui ne croient point en Dieu ni au jour du juge- ment.» Le Koran, chap. IX, verset 29. «Dites aux prisonniers qui sont entre vos mains; «Si Dieu voit la droiture dans vos cœurs, il vous pardonnera, car il est clément et miséricordieux.» Le Koran, chap.VIII, ver- set 70, Les docteurs ont toutefois diversement interprété cette parole du Koran. Les uns veu- lent que le maître d’un infidèle ne l’oblige point { embrasser l’islamisme et le laisse agir selon sa propre impulsion. D’autres au contraire ont dit: Il importe qu’un maître enseigne à son esclave les prin- cipes de la religion et les devoirs dictés par Dieu aux hommes; il doit l’obliger au jeûne et à la prière, et tendre par tous les moyens à le rendre incapable de nuire aux musulmans, dût-il, pour atteindre ce but, employer la rigueur. D’autres enfin, entre ces deux opinions, en ont mis une troisième: «Tant qu’un esclave infidèle est jeune, disent-ils, son maître est tenu de chercher à le convertir; plus tard, il peut le laisser libre de faire à son propre gré.» Il résulte de ces avis divers qu’un musulman doit agir avec son esclave selon que sa conscience a parlé; mais il est meilleur qu’il essaye d’en faire un serviteur de Dieu. Sur quoi tous les docteurs sont d’accord, c’est que l’esclave musulman, mâle ou fe- melle, soit traité avec ménagement et même avec bonté. «Vêtissez vos esclaves de votre habillement et nourrissez-les de vos aliments,» a dit le Prophète. Et nous lisons dans les hadites [hadiths] (conversations de Sidna-Mohammed), que l’on doit fournir consciencieusement { l’entretien et { la nourriture de l’esclave, de même qu’il ne faut pas lui imposer une tâche au-dessus de ses forces. Sidi Khelil a écrit: «Si vous ne pouvez pas entretenir vos esclaves, vendez-les.» Le chef du pays est chargé de veiller à cette règle, et de faire procéder à la vente des esclaves si leur maître ne pourvoit pas { leurs besoins de première nécessité ou s’il les fait travailler plus qu’il ne le devrait. Malek, interrogé sur cette question, savoir: si l’on peut forcer un esclave { moudre pendant la nuit a répondu: «S’il travaille le jour, qu’il se repose pendant la nuit, { moins que l’occupation prescrite soit de peu d’importance et d’absolue nécessité.» Ainsi un serviteur ne peut travailler la nuit entière auprès de son maître; on admet seulement qu’il lui donne des vêtements nécessaires pour le couvrir, de l’eau pour boire, qu’il lui rende enfin de ces services qui, se réitérant peu souvent, permettent le repos; et s’il est reconnu qu’un esclave ait souffert de la faim ou de l’excès de travail, il est vendu même malgré son maître. Abou Messaoul a laissé ces paroles : «J’ai frappé mon esclave et j’ai entendu une voix crier aussitôt: « Dieu est plus puis- sant vis-à-vis de toi que tu ne l’es vis-à-vis de ton serviteur! «Je me suis retourné, j’ai re-
  • 15. [15] connu le Prophète et je me suis écrié: «Mon esclave est dès à présent affranchi pour l’amour de Dieu.» Et Mohammed m’a répondu: «Si tu n’avais pas agi ainsi, le feu t’aurait dévoré.» Selon Ibn Omar, un homme vint un jour auprès du Prophète en lui disant: «Combien de fois n’ai-je pas pardonné à mon esclave!». Mais Mohammed ne lui répondit point. Et deux fois encore cet homme répéta la même plainte sans obtenir un mot de blâme ou de conseil. [ la quatrième fois enfin, l’envoyé de Dieu s’écria: «Pardonne { ton esclave soixante-dix fois par jour, si tu veux mériter la bonté divine.» En souvenir de ces enseignements, les docteurs musulmans se sont appliqués à régir par des lois équitables tout ce qui concerne les esclaves et à leur assurer une constante protection. La méchanceté, l’avarice, la débauche et la pauvreté même de leurs maîtres ne peu- vent rien contre eux. Les formes de vente et d’achat sont définies. Un bien-être au moins suffisant leur est assuré. Leurs mariages et leurs divorces sont réglementés. Les modes d’affranchissement nombreux, les promesses d’affranchissement sacrées, et l’affranchi, se fond dans la population franche sans que son origine soit jamais pour lui un sujet d’humiliation. La négresse, que son maître a fait mère, prend le titre d’oum el-ouled (la mère de l’enfant) et jouit de tous les égards dus aux femmes légitimes. Son fils n’est point bâtard, mais l’égal de ses demi-frères; il hérite comme eux, comme eux appartient à la tente: aussi ne voit-on pas de mulâtres esclaves. On raconte qu’un jour un musulman ayant dit devant Abou Bekr et Abdallah Ibn Omar: «Je compare { des mulets les enfants d’une négresse et d’un homme de race: leur mère est une jument et leur père un âne; n’ayez point confiance en eux. -Nous sommes certains, car nous l’avons vu, lui répondirent ses auditeurs, que ces gens-là sont au combat aussi courageux sur leurs chevaux que les enfants de race pure. Ne dites donc jamais: un tel est un fils d’une Négresse, et celui-l{ d’une femme de race; le champ de bataille, voilà ce qui doit les faire juger.» Enfin, chez tous les hommes craignant Dieu, les esclaves font à certains égards partie de la famille; et l’on en voit souvent qui refusent d’être affranchis, comme le fit celui de notre seigneur Mohammed. C’était un jeune Nègre qui avait été donné à Khedija, la femme du Prophète, et dont elle avait fait présent { son mari. Il se nommait Zeïd Ibn Haret. Son père, l’argent { la main, vint un jour pour le racheter. «Si ton fils veut te suivre, j’y consens, dit Mohammed, emmène-le.» Mais l’enfant, consulté, répondit: «Mon père, l’esclavage avec le Prophète vaut mieux que la liberté avec vous.». Cette réponse émut l’envoyé de Dieu, qui, ne vou- lant pas rester en générosité au-dessous d’un esclave, l’affranchit et le maria. Votre religion, à vous chrétiens, vous défend d’avoir des esclaves, je l’ai entendu dire { Alger, et, en effet, je ne vous en vois pas. [ Kachena, on m’avait assuré cependant que les rois nègres du sud du Niger et des bords de la grande mer, { l’Ouest, vous en vendaient de pleins vaisseaux. On ajoutait, il est vrai, que le commerce avait à peu près cessé de-
  • 16. [16] puis quelques années, et que le sort des Nègres enlevés dans les guerres en était devenu beaucoup plus rigoureux. Lorsqu’ils pouvaient vendre leurs prisonniers, les rois les en- graissaient, en prenaient soin et les faisaient peu travailler; { présent, n’en sachant que faire, ils les égorgent par milliers pour ne pas les nourrir, ou les parquent près de leurs cases, enchaînés, sans vêtements, sans un grain de maïs, en attendant leur jour. S’ils les font travailler, c’est { coups de bâton, car les malheureux sont trop faibles, ne vivant que de racines, d’herbes ou de feuilles d’arbres, pour faire un bon service. Il en sera sans doute ainsi jusqu’{ ce que tout le pays se soit fait musulman. Que Dieu allonge assez mon existence pour que j’en sois témoin! Il vous répugne d’avoir des esclaves? Mais que nos serviteurs soient notre propriété et que les vôtres soient libres, entre eux le nom seul est changé. Qu’un domestique chré- tien ait le droit de changer de maître si bon lui semble, il n’en sera pas moins pour toute sa vie domestique, et par conséquent, esclave, moins le nom. Quand nos Nègres sont vieux, nous les affranchissons; ils sont encore de nous, de notre tente; quand l’âge a pris vos serviteurs, qu’en faites-vous? Je n’en vois pas un seul { barbe blanche. Chez vous, la femme du mariage a mépris pour la femme servante à qui son maître a donné un enfant. Pour vivre, il faut qu’elle ne dise jamais non. Chez nous, elle est oum el- ouled; elle a son logement; son fils est honoré; tous les deux sont de la famille. «Vous êtes trop orgueilleux, et vous n’êtes pas assez dignes.» Pour tous les vrais musulmans, Bou Houira a posé cette sentence: «Ne dites jamais: mon esclave, car nous sommes tous les esclaves de Dieu, dites: mon serviteur ou ma servante.» (fin de citation). Cette longue citation éclaire les principes qui régissent et justifient l’esclavage chez les musulmans. Ceux-ci sont toujours actuels puisqu’ils proviennent du Coran et des Ha- diths, c’est-à-dire que l’esclavage résulte de la volonté de Dieu: «Que ceux qui ont été favorisés ne reversent pas ce qui leur a été accordé à leurs esclaves, au point que ceux-ci deviennent leurs égaux. –Nieront-ils les bienfaits de Dieu?» sourate XVI, verset 71 ; «Ne forcez pas vos femmes esclaves à se prostituer pour vous procurer les biens de la vie de ce monde, alors qu’elles voudraient rester honnêtes. Mais si quelqu’un les y contrai- gnait… Quand elles ont été contraintes, Dieu est celui qui pardonne, il est miséricor- dieux.» sourate XXIV, verset 33. L’islam est donc une idéologie politico-religieuse esclavagiste. D’ailleurs les relations sexuelles entre le maître et ses femmes esclaves sont les seules relations sexuelles hors mariage acceptées par le Coran: «[ l’exception des hommes chastes qui n’ont de rap- ports qu’avec leurs épouses et avec leurs captives de guerre; -ils ne sont donc pas blâ- mables, tandis que ceux qui en convoitent d’autres sont transgresseurs», sourate LXX, verset 29-31. Grâce aux pressions internationales, les pays arabo-musulmans à connaître encore l’esclavage durent l’abandonner, ainsi l’Arabie Saoudite, très en avance sur les droits de l’homme, comme chacun sait, abolit l’esclavage en 1962! Qui pense { le lui reprocher? Puisqu’il est demandé { la France de se repentir, il serait normal que ce soit réci- proque et élargi à tous les acteurs esclavagistes. Je propose donc que la France demande { l’Algérie de se repentir pour tous les Chrétiens que ses barbaresques ont réduits en esclavage. Que Fahd Bin Abdulaziz Al Saoud, roi d’Arabie Saoudite se repente officielle- ment parce que son royaume n’a aboli l’esclavage qu’en 1962.
  • 17. [17] Mais il y a pire et le silence sur cette situation est assourdissant! Aujourd'hui, 12.3 millions de personnes sont victimes du travail forcé dans les pays en voie de dévelop- pement. C'est l'estimation faite par le Bureau International du Travail (B.I.T.) dans un rapport publié au mois de mai 2005. Il y a encore pire: après la décolonisation, l’esclavage revint dans certains pays africains. La République Islamique de Mauritanie s’illustre dans cette catégorie. Sous les pressions internationales, ce pays a aboli l’esclavage en….1981! Mais les décrets d’application ne furent jamais promulgués! Au- jourd’hui, l’esclavage existe donc toujours dans ce pays! Quel intellectuel ou homme po- litique français ose demander des comptes { M. Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, prési- dent de la République Islamique de Mauritanie? Personne! Est-ce que Madame Taubira demande { ce qu’il soit traduit devant une cours de justice internationale pour «crime contre l’humanité»? Pas du tout! Sa loi en ne condamnant que le seul esclavage pratiqué par les Occidentaux alors qu’il n’existe plus depuis plus de 150 ans, légitime implicite- ment l’esclavage arabo-musulman qui existe toujours en Afrique, la loi Taubira de 2001 est, par conséquent, une loi anti-humanitariste et parfaitement scandaleuse. Tout ceci démontre que les campagnes de falsifications historiques sur l’esclavage, lancées par certains communautaristes n’ont pas pour objectif la lutte contre l’esclavagisme, mais d’asseoir leurs revendications communautaires, brisant un peu plus la citoyenneté française. L’objectif reste en définitive toujours le même: salir la civilisa- tion occidentale pour mieux la soumettre. Louis Chagnon pour Libertyvox. Notes: 1 Charles-André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, de la conquête arabe { 1830, Paris, Payot, 1978, t. II p. 301. 2 Charles-André Julien, Histoire de l’Afrique du Nord, de la conquête arabe { 1830, Paris, Payot, 1978, t. II p. 279. 3 Le général E. Daumas et A. de Chancel, Le grand désert du Sahara au pays des Nègres, Paris, Michel Lévy, libraires-éditeurs, 1856. 4 Aujourd’hui orthographiée Katsina. 5 De Kachena. 6 Mohammed Omar, calife responsable de la région vis-vis du sultan. 7 Aujourd’hui, la région située entre Gusau et Kano au Nigeria. 8 Aujourd’hui, la région de Zinder au Niger. 9 Membres des tribus Makhzen traditionnellement chargés de la police et de prélever les impôts. 10 Un goum est une troupe de cavaliers. 11 Ethnie noire animiste. 12 Il faut prendre cette expression comme une simple figure de style afin d’introduire le tarif des différents types d’esclaves. 13 Coquillages du Niger servant de monnaie. 14 Maladie tropicale.
  • 18. [18] 15 La viande hallal. 16 A cette époque on appelait Soudan tout le sud du Sahara. 17 Hadith. 18 Les citations du Coran sont tirées de la traduction de Denise Masson publiée dans la Pléiade. http://www.libertyvox.com/article.php?id=149
  • 19. [19] Esclaves en terre d'islam Frédéric Valloire, le 21-03-2008 Ils furent deux fois plus nombreux que les esclaves des traites atlantiques. Ils venaient surtout d’Europe et d’Afrique. L’émancipation de l’esclavage aura pris un siècle et demi. Elle n’est pas achevée. Etonnant retour des choses : l’esclavage, la traite négrière ne concernaient jusqu’alors que l’Occident et ses repentances. On avait négligé, sciemment ou pas, l’esclavage en terre d’Islam. C’est aujourd’hui un phénomène de librairie. Non pour disculper les activi- tés européennes, mais pour explorer un champ historique sous-estimé. Il y a quinze ans, le grand islamologue Bernard Lewis notait « qu’en terre d’islam, l’esclavage reste un sujet à la fois obscur et hypersensible ».Des pionniers l’avaient défriché : Jacques Heers, dans les Négriers en terres d’islam,Olivier Pétré- Grenouilleau avec Traites négrières,qui envi- sageait pour la première fois le phénomène dans sa globalité, Robert C.Davies, avec Es- claves chrétiens,Maîtres musulmans, qui étudiait le trafic d’esclaves blancs en Méditerra- née : 1,25 millions d’Européens de l’Ouest asservis du Maroc à la Libye de 1530 à 1780 ! La nouveauté vient désormais des auteurs et de l’articulation entre religion et esclavage. Les auteurs ? Ils sont marocains comme Mohamed Ennaji, professeur { l’université Mohamed-V de Rabat, d’origine sénégalaise comme Tidiane N’Diaye,anthropologue et cadre { l’Insee, ou né { Skikda comme Malek Chebel anthropologue franco-algérien. L’articulation entre religion et esclavage ? C’est ce qu’examinent Guillaume Hervieux et Malek Chebel. Cette articulation constitue un fait nouveau. Avant le christianisme et l’islam, la séparation entre le maître et l’esclave se fonde sur un critère juridique : le premier est libre, le second (quelle que soit son origine) est privé de liberté, d’identité, de famille, de cité et appartient à un individu ou à une collectivité.Personne ne songe à supprimer l’esclavage, y compris les esclaves révoltés tel le fameux Spartacus.Mais que se passe-t-il si celui qui est réduit en esclavage est de la même religion que son maître ? La Bible ne le condamne pas ; le judaïsme antique ne l’abolit pas { l’exception de cer- taines sectes, celle des thérapeutes, celle des esséniens, considérées comme des com- munautés exotiques, en marge de la société normale. Cependant, la Bible formule une distinction théorique entre l’esclave hébreu, qui ne peut être vendu { un peuple étran- ger,qui ne peut demeurer plus de six années esclave (sauf s’il le demande et dans ce cas on lui perce l’oreille) et que l’on ne peut ni séparer des siens ni brutaliser, et l’esclave non juif, provenant des peuples qui entourent Israël, esclave à vie, soumis à la loi mo- saïque (il ne peut être tué ou estropié) et qui bénéficie du repos du septième jour. Deux originalités dans le monde antique : l’esclave fugitif n’est pas livré { son maître, mais habite chez celui qui le recueille ; l’argent public, même destiné { la construction d’une synagogue, peut être utilisé pour racheter des captifs juifs. Des rachats qui s’intensifient aux Xe et XIe siècles { la suite de la piraterie mauresque en Méditerranée orientale. Au point de devenir un devoir religieux majeur au XIIe siècle. C’est que, paral- lèlement { l’esclavage qui existe { cette époque dans les pays européens chrétiens, mal- gré le Nouveau Testament où Paul abolit implicitement la séparation entre hommes libres et esclaves, une nouvelle forme d’esclavage { grande échelle est apparue, celle que pratiquent les pays convertis par les cavaliers de l’islam. L’univers dans lequel le texte coranique est élaboré entre le VIIe et le Xe siècle est un monde où l’esclavage paraît un état normal,héritier direct des civilisations antiques :
  • 20. [20] Mahomet luimême a des esclaves.Que le Coran pérennise cet usage traditionnel ne peut surprendre. Comme cela existait dans la tradition stoïcienne, puis chrétienne, il associe métaphoriquement l’esclavage { la situation de l’homme vis-à-vis de son Créateur ou à sa dépendance physique et morale aux plaisirs. Mais le Coran définit également dans 29 versets un statut juridique et social de l’esclave. Comme il s’inscrit dans l’ordre du monde tel que l’a voulu Dieu, cette distinction entre les êtres humains ne peut être ni condamnée, ni critiquée. Un musulman libre ne peut être réduit en esclavage, aurait édicté le deuxième calife, Omar, sous son califat (634-644). Cela encourage très vite les musulmans à s’approvisionner en esclaves : la traite des esclaves noirs connaît son premier grand dé- veloppement avec la conquête arabe de la Méditerranée. Dès le VIIe siècle, on signale une révolte des Zanjs, des esclaves noirs capturés sur les côtes de l’Afrique de l’Est qui travaillent dans de vastes domaines du sud de l’Irak. Au XVIe siècle, les corsaires barba- resques enlèvent plus de chrétiens en un seul raid sur les côtes de Sicile, des Baléares ou de Valence qu’il n’y avait d’Africains déportés chaque année dans la traite transatlan- tique, relative- ment peu importante il est vrai. Et jusqu’au XIXe siècle, l’esclavage reste l’une des bases essentielles du pouvoir de l’Empire ottoman : les esclaves du sultan for- ment l’armature de l’administration et de l’armée. Si un esclave se trouve être musulman, il l’est soit parce qu’il s’est converti { l’islam, soit parce qu’il est né esclave. Avantage : l’esclave musulman est supérieur { l’esclave non musulman. Il peut en effet être associé à la prière collective et même la diriger, se marier à des musulmans de condition libre ou servile. De plus, il est interdit de le vendre à des non-musulmans. Dans tous les cas, le Coran recommande au maître de bien le trai- ter et de pourvoir à son entretien. L’esclave ne possède aucun bien, sauf un pécule et son maître exerce une tutelle sur toutes ses activités. Sur le plan pénal, l’esclave est traité comme un individu de rang in- férieur dont le témoignage n’a aucune valeur face { celui d’un homme libre. Et un mu- sulman ne peut être condamné { mort s’il a tué un esclave. Autrement dit, le prix du sang n’est pas le même. Enfin, un enfant issu d’une esclave, concubine légale d’un musulman, naît libre. En théorie, ces dispositions sont relativement favorables { l’esclave, surtout si ce dernier est musulman. Mais jamais le Coran n’émet une condamnation de l’esclavage. Au contraire, des hadiths, le fikh (le droit musulman) et la charia (la loi de dieu) complè- tent et affinent ces dispositions. Les conditions de vie de l’esclave sont des plus contrastées. Selon sa couleur, sa beau- té, son âge, sa condition sociale, ses capacités, sa religion, l’époque, le pays et le lieu où il sert, son sort varie du tout au tout. Récupéré aux marges de l’Empire, il est vendu aux enchères. C’est entre les mains et sous le fouet des chasseurs et des marchands d’esclaves que ces pauvres gens souffraient le plus. Les femmes (les Circassiennes sont très appréciées pour leur beauté) et les enfants servent comme domestiques ou concu- bines dans les cours de Cordoue, de Constantinople ou de Bagdad. Les hommes devien- nent soldats, artisans, galériens, fonctionnaires, chambellans ou sont parqués dans des bagnes abominables si leurs ravisseurs pensent qu’ils en obtiendront une rançon. Seule civilisation à avoir systématiquement prélevé des enfants pour en faire des mercenaires, les janissaires, l’Empire turc confie des armées et des provinces { des esclaves militaires, les mamelouks, qui restent néanmoins une exception. La traite islamique aura duré treize siècles
  • 21. [21] Entre le VIIe siècle et les années 1920, plus de 21 millions de personnes auraient été victimes de la traite d’esclaves en pays d’islam. Les Turcs prélevèrent environ 4 millions d’esclaves en Europe, tandis que la seule Afrique noire se vit ponctionnée de près de 17 millions d’habitants, soit beaucoup plus que l’ensemble des traites atlantiques (11 mil- lions). Si la traite commença au VIIe siècle dans sa partie orientale, elle connut son apo- gée au XIXe siècle, avec pour l’Afrique noire continentale des estimations comprises entre 4,5 et 6,2 millions de personnes. Cette importance prise par l’Afrique noire résulte en partie de la conquête par la Russie de la Crimée et du Caucase, qui ferme au monde musulman de vastes régions où depuis des siècles il se procurait des captifs. S’ajoutent { cela l’amélioration des moyens de transport, la désertification du Sahara qui poussent les nomades à intervenir dans les affaires des paysans noirs, la demande des Indes et l’essor du coton en Égypte. Ce qui est remarquable, malgré les différences régionales, c’est la régularité des prélèvements. En outre, alors qu’au Brésil, aux États- Unis ou dans les Antilles, vivent des descendants d’esclaves, dans les pays musulmans, ces descendants sont rares, en particulier pour ceux dont les ancêtres avaient la peau noire, remarque Tidiane N’Diaye. Castrés, eunuques, ils ne pouvaient procréer.Un géno- cide, donc. Mais, et c’est ce que montre Mohamed Ennaji, l’esclavage n’est pas que l’héritier d’un monde antérieur. Il imprègne toute la mentalité de l’État musulman, la conception d’un pouvoir présenté comme une image de la relation entre le maître et l’esclave. « L’histoire du monde arabe, écrit-il, est prisonnière du discours religieux et de ses représentations. » Est-ce la raison fondamentale qui expliquerait la lenteur de l’émancipation ? Amorcée en 1846 avec la Tunisie, elle s’achève en 1981 lorsque la Mauritanie promulgue l’abolition officielle de l’esclavage : un siècle et demi plus tard ! Et Malek Chebel affirme que trois millions d’esclaves vivraient encore en terre islamique… À lire L'Esclavage en terre d'islam, de Malek Chebel, Fayard, 506 pages, 24 Euros. http://www.valeursactuelles.com/public/valeurs- actuelles/html/fr/articles.php?article_id=2127
  • 22. [22] L’esclavage en terre d’Islam : un musulman libéral secoue le tabou Louis-Bernard Robitaille jeudi 22 novembre 2007. C’était en 2004 : l’universitaire Olivier Pétré- Grenouilleau, dans un gros livre savant, expliquait que l’esclavage n’avait pas été une exclusivité oc- cidentale. Et qu’on retrouvait des « traites négrières » comparables ou même plus importantes dans l’histoire de l’Afrique ou du monde arabe. Quelques jours après la sortie du livre, le dis- cret universitaire avait reçu des menaces de mort - prises au sérieux par la police - et préféré ne plus paraître en public. C’est donc sur un terrain miné que l’essayiste franco-algérien Malek Chebel s’aventure ces jours-ci avec un ouvrage sur « l’esclavage en terre d’Islam ». « Un dossier délicat, admet-il avec un fatalisme tranquille lorsque je le rencontre dans le quartier de la Bastille. C’est pourquoi j’attends un peu avant de donner des confé- rences à Paris. Mais à la différence de Pétré-Grenouilleau ou d’autres, c’est de l’intérieur que je critique les dérives de l’islam, les extrémismes et les sectarismes. » Auteur prolifique depuis 25 ans, Malek Chebel se veut à la fois un musulman irrépro- chable, fin connaisseur du Coran, et un libéral sans concession, partisan de la laïcité et hostile au porte du voile. Un adversaire résolu de « l’Islam politique » et de ses préten- tions à « régenter la société ». Avec cette nuance : « Contrairement { d’autres, j’ai le souci d’être audible et donc d’éviter les provocations inutiles : je prends donc soin de n’insulter personne. » Dans l’affaire des caricatures de Mahomet, il a surtout essayé de « calmer le jeu ». Mais cette fois, c’est le sujet lui-même qui est tabou. Et Malek Chebel, après avoir pendant trois ans fouillé dans les textes et enquêté dans une quinzaine de pays, dresse un constat sévère. L’esclavage dans le monde musulman, trois fois plus étalé dans le temps qu’en Occi- dent, a aussi touché deux fois plus d’individus, même si les formes de la servitude étaient parfois plus « humaines ». « Cet esclavage a touché plus de 20 millions de personnes sur 10 siècles, explique Chebel. Il a duré officiellement jusque dans les premières décennies du XXe siècle, une soixantaine d’années après son abolition en Occident. Jamais aucun responsable reli- gieux musulman ne s’est prononcé pour son abolition. « Un esclavage discret et { peine atténué se perpétue aujourd’hui, en Arabie Saoudite, par exemple. Au Niger ou au Mali, vous pouvez acheter - à lunité - un enfant de 10 ans dont vous ferez ce que vous voudrez.
  • 23. [23] Alors que les autorités religieuses en Occident ont fini par basculer dans le camp des abolitionnistes au XIXe siècle et aujourd’hui encore battent leur coulpe pour les crimes passés, je n’entends aucun prédicateur d’Al-Jazira condamner ces pratiques. » Au hasard de ses déambulations et recherches, l’auteur découvre des choses éton- nantes : une loi sur l’affranchissement des esclaves en Mauritanie datant de 2003 ! Des zones de non-droit absolu en Arabie Saoudite et dans certains pays du Golfe. Trois codes de l’esclavage en pays musulmans datant du XIXe siècle. Mais aussi, dans l’histoire de la Turquie et de l’Égypte, d’étonnantes pratiques permettant { des esclaves affranchis d’occuper de hautes fonctions dans l’État (en Turquie), ou de former une nouvelle caste privilégiée, tels les Mamelouks en Égypte). « Ce qui me révolte au-del{ de tout, dit Malek Chebel, c’est que, plus ou moins explici- tement, on invoque l’islam pour justifier l’asservissement, l’inégalité foncière entre hu- mains, les rapports de maître { serviteur. Ce que j’appelle la politique du baisemain. Or, sur les seuls 25 versets du Coran qui évoquent le sujet, presque tous penchent du côté de l’affranchissement. Strictement rien dans les textes ne justifie le système escla- vagiste. Mais c’est ainsi : sous diverses formes, une coterie religieuse vénale, aux ordres des dictatures, conserve une emprise totale sur l’islam et son interprétation. Il y a 30 ou 40 ans encore, l’Islam des Lumières auquel je me réfère était en plein progrès, en Égypte notamment, et la démocratie était en vue. Aujourd’hui, on est en pleine régression : si l’on faisait aujourd’hui des élections libres dans le monde arabo-musulman, les islamistes l’emporteraient presque partout. Cela dit, je ne crois pas que ce soit irréversible : l’Égypte pourrait redevenir une terre des Lu- mières. Et il y a des frissonnements démocratiques au Maghreb ou ailleurs. » Pour certains esprits critiques, Malek Chebel, auteur médiatique et parfois un peu trop habile, est moins contestataire qu’il ne le prétend. Reste que le seul fait de soulever une question aussi taboue et de dénoncer la collusion entre le haut clergé musulman et les régimes dictatoriaux demande un certain courage. La France est aujourd’hui de loin le premier pays islamique d’Europe, avec cinq mil- lions de musulmans. Avec des organisations intégristes extrêmement puissantes et structurées. « Si jamais on lançait une fatwa contre moi, je m’empresserais d’aller { la télé et de leur dire : vous m’avez condamné { mort, mais vous n’êtes que des voyous, des criminels passibles du tribunal de La Haye. Vous n’êtes pas des musulmans mais des assassins, vous pouvez m’envoyer 10 commandos de tueurs si vous voulez, mais je ne me cacherai pas ! » Et Malek Chebel ajoute : « Ces gens ont peut-être des tueurs à leur service, mais moi je crois qu’en utilisant les armes de la communication, on peut les faire reculer. » L’esclavage en terre d’Islam, 498 pages, Ed. Fayard Malek Chebel a écrit une vingtaine d’ouvrages, dont Le Dictionnaire amoureux de l’Islam et Manifeste pour un Islam des Lumières en 2004.
  • 24. [24] ISLAM ET ESCLAVAGE mercredi 7 mai 2008 à 08:00 :: L'affranchissement est recommandé au croyant dont il favorise l'accès au Paradis. Le pro- phète Mohammed n'avait-il pas donné l'exemple en la matière ? «Le Coran n'étant pas contraignant, l'abolition relève de la seule initiative personnelle du maître. Cette ambiguïté est constitutive de l'approche coranique : encourager ceux qui font le bien, mais ne pas alourdir la peine de ceux qui ne font rien», écrit Malek Chebel. «Plusieurs versets entérinent au demeurant l'infériorité de l'esclave par rapport à son maître». JEUNE Afrique DU 18 AU 24 NOVEMBRE 2007 N°2445 DOMINIQUE MATAILLET TABOU, Au terme d'une longue enquête qui l'a mené de Nouakchott Brunei, Malek CHE- BEL dresse un constat accablant : l'esclavage a été et reste un fait musulman Le mot le plus courant, en arabe, pour désigner l'esclave est 'abd, duquel dérivent des termes comme 'ubudiyya (« esclavage »).D'autres vocables sont encore utilisés, tels que raqîq (« mis en servitude »), jâriya (« esclave femme »), ghulîm (« esclave homme »).Et ce n'est pas tout. Au Proche-Orient, zandj (probablement de Zanzibar) et aswad désignent l'esclave noir, alors que mamlûk (littéralement « possédé ») s'applique à une catégorie particulière, la caste militaire servile. Ce n'est donc pas le vocabulaire qui manque en terre d'Islam pour parler de l'esclavage. Cette richesse sémantique tranche toutefois avec le mutisme qui entoure le phénomène. Un mutisme d'autant plus choquant, aux yeux de Malek CHEBEL, que l'esclavage a pris des di- mensions considérables tout au long de l'histoire de cette région du monde et qu'il reste à bien des égards très présent dans le quotidien de centaines de millions de gens. C'est pour briser ce silence assourdissant que l'anthropologue algérien, bien connu des lec- teurs de Jeune Afrique pour ses nombreux ouvrages autour de l'islam, s'est livré à une longue enquête. Fruit d'innombrables lectures, son pavé de 500 pages est aussi et surtout le compte rendu d'un voyage de plusieurs mois qui l'a conduit des rives de l'Atlantique au fin fond du Sud-Est asiatique en passant par les pays du Golfe, l'Asie mineure, l'Afrique saharienne. Le constat final est accablant : « À Brunei, au Yémen, dans les pays du Sahel, chez les Touaregs, en Libye, dans le Sahel tunisien, en Égypte, en Arabie, en Mésopotamie, au Soudan ou à Djibouti, il n'est pas un lieu gagné par l'islam où ne se soit jamais pratiqué le commerce d'esclaves Encore convient-il d'établir des distinctions entre pays et de relever les caractéristiques propres des différentes contrées concernées. La Libye et l'Algérie, par exemple, débouchés naturel des routes commerciales transsahariennes, ont surtout servi de voies de transit. Des pays tels q l'Égypte ou l'Arabie saoudite actuelles étaient, eux, de gros consommateurs, osera- t-on dire. Idem pour la Turquie. Les Européens ont fantasmé sur les odalisques des harems d'Istanbul, sujet de prédilection pour les peintres orientalistes, et se sont extasiés sur les ex-
  • 25. [25] ploits militaires des janissaires de l'Empire ottoman. Faut il rappeler que les premières comme les seconds étaient des captifs? En Afrique, on le sait, c'est à la lisière du monde noir que l‘esclavage prit les plus grandes proportions. Au Maroc où la composante négroïde de la population saute aux yeux du voyageur les traces sont manifestes. Que sont les musiciens gnaouas sinon les descendants des Noirs importés » de la zone soudanienne au temps où le Maroc était une grande puissance régionale? Et puis, il y a le cas de la Mauritanie, où, malgré les dé- mentis, l'esclavage reste une réalité manifeste. La preuve en est que le Parlement a voté à plusieurs re- prises des textes l'interdisant. Malek Chebel rappelle un indice qui ne trompe pas: de nombreuses associa- tions d'affranchis tentent de se constituer en force poli- tique. « En attendant, commente l'auteur, chaque foyer de Beidane ("Blancs") entretient des harratine noirs, fils d'anciens esclaves auxquels il donne le nom de "serviteurs", un peu comme on faisait naguère à la Barbade, où l'on gratifiait pudiquement du nom d'apprentis" les esclaves fraîchement libérés de leurs chaînes. » Ainsi donc, une bonne part de la main-d'oeuvre servile utilisée dans le monde arabe venait d'Afrique subsaharienne - en Tunisie, le même mot, abîd, désigne indistinctement l'esclave et le Noir... - et tout particulièrement du Sahel, de l'Éthiopie ainsi que de la côte orientale du continent. Mais les Balkans et les steppes de l'Asie centrale furent également d'importants bassins pourvoyeurs. Combien furent-ils? Dans le cas de la traite occidentale, les éléments de chiffrage existent: les négriers tenaient des journaux de bord dans lesquels était reporté le détail de leur com- merce honteux. Rien de tel avec la traite orientale. Confrontant les diverses sources, Malek Chebel estime à plus de 20 millions le « volume total de l'esclavage en terres arabes et mu- sulmanes ». Ce nombre englobe aussi bien les captifs de guerre slaves, les concubines et les domestiques circassiennes, que les domestiques noirs achetés à des négriers ou razziés dans les villages du Sahel, les marins chrétiens capturés par les corsaires barbaresques en Méditer- ranée. Les négriers arabes auraient donc fait « mieux » que leurs homologues européens. Les uns ont, il est vrai, sévi pendant quatorze siècles, contre moins de quatre pour les autres. Faut-il chercher dans le Coran la cause du mal? Le Livre, certes, accepte que la condition de sujétion des esclaves par rapport aux maîtres soit maintenue en l'état. Car l'islam est né dans une région du monde où l'esclavage était quasiment un mode de production. Mais il tente d'en limiter les abus;'tout comme il apporte un progrès incontestable à la situation des femmes (notamment en limitant à quatre le nombre des épouses autorisé). Par ailleurs, l'affranchissement est recommandé au croyant dont il favorise l'accès au Para- dis. Le prophète Mohammed n'avait-il pas donné l'exemple en la matière? Vivement encouragé en théorie, l'affranchissement n'a, hélas, guère été suivi en pratique. De siècle en siècle, l'esclavage est devenu un fait musulman, s'inscrivant profondément dans les habitudes. Pourtant, c'est un sujet dont on ne parle pas. En dehors de l'Égyptien Mohamed Abdou, du Syrien Rachid Ridha, de l'Iranien Mirza Ah Mohamed, fondateur, au XIXe siècle, du bâbisme, qui a fermement condamné cette pratique, la plupart des réformateurs sont restés étonnamment discrets sur la question.
  • 26. [26] Et que dire des islamologues ! Louis MASSIGNON, Vincent MONTEIL ou Jacques BERQUE disposaient des informations qui leur auraient permis, en plein XXe siècle, de tirer la sonnette d'alarme. Peut-être ont-ils préféré, écrit Malek CHEBEL, « la hauteur mystique des grands penseurs, des philosophes et des théosophes de l'islam aux réalités scabreuses des marchands de chair humaine ». Ils savaient, mais leur empathie pour l'islam les inclinait à trouver à cette religion et aux hommes qui s'en réclament des excuses qui ne sont en rien justi- fiées. Quand bien même la réalité de l'esclavage arabe est reconnue, c'est souvent pour en atté- nuer la rudesse : il n'aurait pas abouti à la dépersonnalisation de l'esclave, comme cela a été le cas avec le commerce triangulaire Afrique-Amérique-Europe, affirme-t-on. Comme s'il pou- vait y avoir une graduation dans l'infamie... Mais le pire est peut-être dans l'impact que l'esclavage a eu sur les mœurs politiques du monde arabe. Dans un livre tout récent*, l'universitaire marocain Mohammed ENNAJI ex- plique en quoi il a fondé le rapport au pouvoir et donc l'absolutisme qui est encore souvent la règle dans cette partie du monde. Une fois le livre de Malek CHEBEL - dont, curieusement, les médias ont peu parlé - fer- mé, on ne voit plus la civilisation islamique de la même façon. Comme l'auteur lui-même, qui, pour, cette étude a dû « parcourir au moins 120000 kilomètres » pour en arriver à cette terrible conclusion: « L'islam dit l'inverse de ce que les musulmans pratiquent, et c'est une énigme en soi. La duplicité humaine qui consiste à transformer un message d'émancipation en goulag humain fait partie intégrante de ce paradoxe. » ∎  Le Sujet et le Mamelouk. Esclavage, pouvoir et religion dans le monde arabe, éd. Mille et une nuits, 368 pages, 16 euros. Malek Chebel : « j'ai voulu briser le silence» Propos recueillis par Dominique MATAIL- LET JEUNE AFRIQUE : Pourquoi ce livre, et pourquoi maintenant? MALEK CHEBEL : C'est une question qui me tenait à cœur depuis longtemps. Pour écrire mes livres, je constitue des dossiers richement documentés. La prise de conscience, tardive, hélas, du phénomène de l'esclavage dans le monde islamique m'a laissé penser que l'opinion était assez bien préparée. Compte tenu de la surface que j'ai acquise dans le domaine des études sur l'islam, je me suis dit: c'est un discours qui peut passer maintenant. Est-ce que ce discours passe effectivement? Il semble qu'il crée beaucoup de gêne.
  • 27. [27] S'il dérange, c'est que je touche quelque chose de fondamental et de vrai. C'est qu'il y a en- core des esclaves. Tant mieux donc si mon livre gêne, car j'ai voulu briser l'opacité qui en- toure cette question de l'esclavage. Avez-vous eu vent de réactions hostiles? Il y a eu un mouvement dans les chancelleries arabes, qui a été vite éteint. Ils ont compris que, médiatiquement parlant, cela aurait été très mauvais pour eux d'enclencher une offensive. Les médias vous suivent-ils ? Je constate une gêne, une retenue de leur part, ici, en France. Les journalistes sont circons- pects. Ils ne savent pas comment prendre l'information. Au Maghreb, mis à part un papier, en août, donc avant la sortie du livre, dans Le Quotidien d'Oran, c'est motus et bouche cousue. Même au Maroc, d'habitude plus ouvert, aucun écho dans les médias non plus. En clair, il y a un blocage maghrébin. Dans quels pays l'esclavage a-t-il gardé le plus de réalité ? L'esclavage est encore sensible en Mauritanie. Mais l'État fait des efforts assez importants pour se débarrasser de cet héritage scandaleux. Le phénomène des petites bonnes au Maroc est aussi à prendre en considération. Un secrétariat d'État a d'ailleurs été créé pour recenser les jeunes filles et leur donner un statut. Il y a évidemment tout un esclavage invisible dans les monarchies et les sultanats du Golfe. À quoi s'ajoute, dans les mêmes pays, un nouvel escla- vage économique. Dans l'Afrique moyenne, au Mali, au Tchad et ailleurs, subsistent de mul- tiples formes d'esclavage, liées cette fois à la pauvreté. On ,m,',a parlé de vente d'enfants ici ou là. Il faut mentionner également les intouchables en Inde. Vous décrivez la société touarègue comme l'une des pires sociétés esclavagistes... Les rapports esclavagistes ont été à peu près maintenus. Il y a, bien sûr, eu une atténuation avec l'apparition des États-nations dans les ` cinq pays africains où vivent les Touaregs. 'L'existence d'une police nationale, d'une justice relativement distincte des ethnies et des oli- garchies est un progrès incontestable. Mais, sous cape, les aristocrates touaregs sont toujours des aristocrates et les esclaves, les harratine, sont toujours leurs serviteurs. Pourquoi les mentalités évoluent-elles si lentement? Parce que tout le monde, à commencer par les élites religieuses, se tait. Quand on pose la question, on dit qu'il y a bien d'autres problèmes tels que la pauvreté, les maladies. Moi, je dis: sur le plan moral, ce n'est pas acceptable en 2007 qu'il y ait encore des esclaves.
  • 28. [28] Comment expliquer ce silence dans le monde arabo-musulman? Pour beaucoup de gens, l'esclavage, ça n'existe pas. Même quand tu dis à un esclavagiste: « Tu as des esclaves. » Il te répond: « Mais non, ce sont mes enfants adoptifs. Je les aime comme mes fils. » On dit aussi que l'esclavage dans le monde arabe n'a rien à voir avec l'esclavage occiden- tal... C'est vrai que la traite négrière occidentale était strictement économique, puisqu'elle con- sistait à transporter des Africains dans les plantations en Amérique, alors que l'esclavage oriental était plus diversifié. Les captifs étaient utilisés dans l'agriculture, mais aussi comme soldats ou pour servir dans les palais. Si la traite occidentale a duré moins de quatre siècles, la traite orientale s'est étalée sur qua- torze siècles, puisque j'en situe les débuts avec la naissance de l'islam. Le fait que le phéno- mène soit dilué dans le temps et qu'il n'y ait pas eu de bateau négrier donne le sentiment que c'est différent. Le volume total de l'esclavage dans le monde arabo-islamique atteint pourtant, selon les estimations les plus sérieuses, les 20 millions, soit plus que le nombre d'Africains déportés dans les Amériques. Alors, pour moi, aujourd'hui, c'est pareil. http://blog.francetv.fr/Faawru/index.php/2008/05/07/71997-islam-et-esclavage
  • 29. [29] Esclaves noirs en Méditerranée Jean-Michel Deveau Plan I - Qui sont ces esclaves ? II - Zones de capture et itinéraires de traite III - Fluctuations du système et incertitude des nombres Conclusion 1 Dans le cadre d’une rencontre consacrée { l’étude de l’esclavage en Méditerranée, il était difficile de laisser sous silence une des pages les plus méconnues, mais peut aussi l’une des plus importantes qui a affecté les relations entre les rives de cette mer et l’Afrique sahélienne. On reste sur les retranchements d’un tabou pour une histoire qui débute avec la conquête arabe et ne s’achève officiellement que dans un tardif XIXe siècle. 2 Il n’est pas question dans ce bref article d’innover sur la base de nouvelles re- cherches en archives, mais simplement de dresser un bilan historiographique. L’impulsion donnée depuis une dizaine d’année par l’UNESCO aux recherches sur l’esclavage s’est heurtée { une fin de non recevoir pour ce qui concernait ce sujet. Aussi n’en trouve-t-on que des bribes éparses dans une somme de publications dont cette communication tente de reprendre l’essentiel. 3 La présence d’esclaves noirs est attestée dès la plus haute antiquité sur les rives de la Méditerranée, et lorsque s’achève l’époque moderne ils sont encore légions sur l’ensemble des rivages du monde musulman. Or cette constante de l’histoire méditerra- néenne n’a laissé que des traces aussi ténues qu’éparses dans les sources, d’où la diffi- culté de cerner avec précision son ampleur et les mécanismes de son fonctionnement. 4 Paradoxalement les sources médiévales sont beaucoup plus abondantes, surtout grâce aux chroniques des empires du Mali, édifiés sur le bassin du Niger à partir de la pénétration musulmane au sud du Sahara. Le Tarikh el-Fettach et le Tarikh el-Soudan, en particulier, renseignent abondamment sur les captures, sur les ventes et sur la traite transsaharienne à partir de Djenné ou de Tombouctou1. Cependant l’historiographie semble encore balbutier dans une enfance très ignorante de l’arabe et du turc, car, semble-t-il, de nombreux manuscrits dorment encore dans les archives des pays qui ont relevé de la mouvance de l’ancien empire turc. 5 Il semble également qu’un certain tabou relatif { ce sujet n’encourage pas particu- lièrement les recherches. Cependant quelques auteurs commencent { s’y aventurer certes avec prudence, mais aussi avec une liberté d’esprit qui ne peut qu’encourager les nouvelles générations d’historiens2. En revanche si les sources occidentales ont été beaucoup plus sollicitées, les chercheurs ont plutôt centré leur problématique générale de l’esclavage dans le monde méditerranéen, ne travaillant que par incidence sur la spé- cificité sub-saharienne. 6 Pendant longtemps on a évacué le problème en considérant qu’{ partir du XVIe siècle, la traite atlantique avait tari le flux médiéval transsaharien. Cette thèse, pré- sentée comme un axiome, arrangeait l’école historique de tendance tiers-mondiste qui la répétait { longueur d’ouvrages sans se poser plus de problème sur cette vision des
  • 30. [30] choses érigée en dogme. Il est donc intéressant de s’interroger sur la réalité de la pré- sence de ces Noirs qui s’inscrit en continu sur les rivages méditerranéens depuis la fin du XVe siècle, alors que les caravelles d’Henri le navigateur débarquèrent leurs pre- mières victimes sur les marchés du Portugal, jusqu’au XIXe siècle marqué par l’abolition de la traite en 1815. 7 Là encore, sans preuve scientifique, on a longtemps admis que cette abolition avait réactivé les courants caravaniers de la traite transsaharienne. Mais c’est entrer dans une nouvelle problématique qui dépasse les limites chronologiques de cette étude centrée sur la période moderne. I - Qui sont ces esclaves ? 8 L’image d’Epinal traditionnelle a popularisé l’esclave domestique jusqu’{ faire de l’odalisque un archétype de la peinture orientaliste des XVIIIe et XIXe siècles. Elle donne au tableau la tache sombre qui rehausse le chatoiement lumineux où se prélassent des Blanches aux lignes opulentes. Deux siècles plus tôt c’étaient des hommes qui jouaient ce rôle. Les traits franchement négroïdes du visage surmontaient la livrée princière de leur maître qu’ils servaient { table ou aidaient dans une scène diplomatique ou militaire. 9 Ces visions un peu réductrices par la seule représentation domestique n’en figu- raient pas moins une réalité largement répandue. En Méditerranée musulmane, l’esclave est d’abord un domestique, sans que l’on puisse actuellement avancer aucune statistique sur son importance relative. Domesticité semble-t-il nombreuse dans les familles riches puisqu’il est de coutume d’offrir une esclave noire en cadeau de noces { Fès au XVe siècle. 10 Selon Haëdo deux siècles plus tard, à Alger : « les principales dames qui sortent, mènent avec elles autant de négresses (elles en ont plusieurs qui valent de 25 à 30 écus chacune) que de blanches chrétiennes dont elles ont aussi beaucoup(…). Il y en a qui ont une escorte de quatre, de six et même de dix es- claves3 ». 11 Selon la tradition, toutes ces esclaves auraient été traitées avec la plus grande bon- té, étant parfois même considérées comme membres de la famille, sortes de parents pauvres accablés par le destin. Dans les villes, on leur enseignait l’arabe, et en général on essayait de convertir les Noires { l’Islam. Conversions superficielles, impossibles { cata- loguer dans le cadre d’une acculturation réussie. 12 A la première occasion le vernis islamique craquait, laissant place à un retour aux coutumes sub-sahariennes, comme on pouvait le constater, par exemple { l’occasion des mariages. En effet, avec le consentement de leur maître ces femmes pouvaient épouser un esclave. 13 Plus au sud, dans le désert presque toutes les tribus nomades ont à leur service de nombreuses femmes noires, toujours aussi bien traitées, dit-on. Certaines, après une période de bons et loyaux services, retrouvaient la liberté au sein de la tribu avec les mêmes droits que les autres membres. 14 Ce discours, repris dans la seule analyse herméneutique des textes sacrés, deman- derait une étude de cas vécus, encore impossible à faire faute de sources en langue arabe, si toutefois elles existent, car, pour l’instant, aucune n’a encore été mise { jour. En revanche, les études de cas relatées par Claude Meillassous pour l’époque contempo-
  • 31. [31] raine, sur la base d’enquêtes orales laissent entrevoir une réalité beaucoup plus sordide dans le monde des Touareg. Alors peut-on extrapoler dans le temps et dans l’espace ?4 15 Beaucoup de Noires furent enfermées comme concubines dans les maisonnées. Elles avaient auprès des Arabes une réputation de beauté et de performances physiques qui les faisaient rechercher quel qu’en fût le prix. Leur nombre reste tout aussi mysté- rieux que le secret des harems, mais on peut l’estimer suffisamment important puis- qu’elles ont réussi { métisser une bonne partie de la population sur un espace qui joint la zone des oasis à la latitude de Warghla aux centres de redistribution comme Sidjil- massa ou Fés. 16 Au chapitre de la domesticité, les eunuques noirs ont troublé l’imaginaire occiden- tal, mais l’approche statistique reste aussi impressionniste que la précédente. Les Noirs n’ont pas été les seuls mais ils semblent de loin les plus nombreux. En revanche, la réali- té sociologique a pris un relief, certes poétique, mais probablement très voisine du vécu avec la traduction des Mille et une Nuits par Galland { l’aube du XVIIIe siècle5. 17 Sans égard pour la misère de ces malheureux, on distinguait ceux qui avaient subi l’ablation des seuls testicules et ceux dont on avait coupé la totalité des organes sexuels. L’opération était pratiquée après la traversée du Sahara, très souvent en Egypte où les moines coptes s’en étaient fait une spécialité. Seuls ceux de la deuxième catégorie étaient commis à la garde des harems, car les autres conservaient une capacité d’érection, qui selon la rumeur publique, les rendait encore plus désirables. La fidélité des uns et des autres valait toutes les gardes prétoriennes. Sachant que le reste de la société les rejetait sans appel, ils ne trouvaient de compensation affective que dans la reconnaissance de leur maître. Un véritable transfert au sens freudien s’opérait qui n’a pas encore été étudié par les psychanalystes. 18 Quoi qu’il en soit, l’eunuque était symbole de richesse puisqu’il valait plus du double de l’esclave ordinaire. A partir du IXe siècle leur nombre se multiplie dans les pa- lais princiers. Le calife Al-Muqtadir (908-932) en aurait possédé 11000 dont 7000 Noirs, rapport numérique qui se passe de commentaire sur l’écrasante majorité des Africains. La cour ottomane allait les chercher en Egypte. Certains ont rempli de très hautes fonc- tions, et, à partir de 1582, les Noirs supplantent définitivement les eunuques blancs dans la fonction publique. En Arabie, on en trouvait beaucoup employés sur les lieux saints où certains ont réalisé d’énormes fortunes. 19 Pour être complet il faudrait ajouter ceux qui assuraient un simple service domes- tique, ou ceux qui avaient des fonctions dans l’économie, ou dans l’armée comme nous allons le voir. 20 Les gardes noires apparaissent dès le début de la conquête islamique en Tunisie et en Egypte. 21 Dans ce dernier pays, elle comptera jusqu’{ 40 000 hommes { la fin du IXe siècle et autant au début du XII°, et finira par jouer un rôle si important qu’on l’estimera dange- reuse. A plusieurs reprises le pouvoir encouragea la foule à les massacrer. En 1169, lors d’une dernière tentative de soulèvement, 5O OOO Noirs furent mis hors de combat, mais l’alerte avait été si chaude que la garde fut définitivement supprimée, ce qui n’empêcha pas de continuer à enrôler des Africains dans les autres corps de troupe. 22 Au Maroc, ce corps d’élite dura beaucoup plus longtemps. Mulay Isma’il (1672- 1727) organisa même non plus un corps de garde, mais une véritable armée noire. A partir de 1672, les expéditions se multiplient vers le sud pour razzier les Noirs ou en
  • 32. [32] acheter sur les grands marchés du Soudan, à Djenné ou à Tombouctou. Très vite cette armée devient si nombreuse que le sultan bâtit une ville pour la loger. Les soldats sont encouragés à se marier et leurs enfants deviennent à leur tour soldats-esclaves. A 16 ans ils achèvent leur formation et épousent une jeune négresse afin que leurs enfants les remplacent un jour. Le système fonctionna si bien qu’un siècle plus tard ce corps était devenu la première force de l’Etat et décidait du maintien ou de la chute du souverain et de ses collaborateurs. Sadi Muammad, menacé d’une nouvelle révolte dissout définiti- vement le corps et en dispersa les hommes sur l’ensemble du royaume. 23 Le système productif méditerranéen ne semble pas avoir retenu une foule d’esclaves comme cela fut le cas dans la Caraïbe ou aux Etats-Unis par exemple. Seul l’orient mésopotamien semble avoir utilisé le travail servile sur une échelle comparable { celle de l’Amérique. Les itinéraires de cette traite passaient par le Sahara et par les berges méditerranéennes autant que par celles de la mer Rouge. 24 Les travaux d’Alexandre Popovic sur les grandes révoltes des VIIe et IXe siècles en révèlent l’ampleur, mais rien de comparable n’a encore été entrepris pour l’époque mo- derne en Méditerranée. On connaît cependant l’importance des plantations de canne { sucre du Maroc dont l’essentiel de la main-d’œuvre provenait du sud du Sahara. L{ en- core de sérieuses révoltes dans les années 1576-1598 ont dû ébranler le système, mais on en ignore à peu près tout, aussi bien des conditions que du déroulement. 25 Hors de ce cas, semble-t-il marginal du Maroc, le travail des esclaves noirs relève beaucoup plus du saupoudrage artisanal que de la concentration industrielle. Ce qui n’exclut pas un total important d’hommes ou de femmes mis au service d’un superflu. Il vaudrait donc mieux parler d’une société d’esclavage que d’une société esclavagiste. II - Zones de capture et itinéraires de traite 26 Depuis que les musulmans ont investi la traite transsaharienne, deux grandes zones d’approvisionnement divisent la région du Sahel. 27 - A l’est, sur une bande qui englobe l’actuel Soudan et les marges de l’Erythrée et de l’Ethiopie, la tradition des razzias remontaient à une époque très ancienne. Les Pha- raons souvent en guerre contre ces turbulents voisins leur imposaient déjà des tributs en esclaves. Le traité de 651 av. JC les obligeait { en livrer 360 par an et précisait qu’ils devaient tous être de magnifiques spécimens humains, en excellente forme, ni impu- bères, ni trop vieux. A l’extrême est, la corne de l’Afrique alimentait un fort courant en direction de l’Arabie et du Golfe Persique, comme nous l’avons vus pour une période ultérieure au moment des révoltes de Basra. 28 - La seconde zone { l’ouest s’étend sur la vallée du Niger et pousse des extensions en direction de la Sénégambie et du golfe de Guinée. Sur cette immense région à échelle continentale, une continuité opiniâtre de rafles travers l’histoire du VIIe siècle jusqu’{ un tardif XIXe dont on n’est pas certain qu’il ne se prolonge pas en plein XX°! 29 Restons sur la ligne de partage ethnique entre nomades et sédentaires, entre agri- culteurs et éleveurs, entre Blancs et Noirs et l’ensemble des conflits et des stratégies s’éclaire dans de savants équilibres où il s’agit d’exploiter l’autre jusqu’au point de rup- ture qui risquerait de le faire disparaître. Franchir cette limite c’est tarir la source de richesse, aussi, alternent guerres et longues périodes de collaborations favorables à tous les métissages physiques et culturels. Les Tarikh en relatent les débuts, mais la plupart
  • 33. [33] échappent au scriptural et ne peut être relaté que dans une tradition orale en voie de disparition. 30 Quoi qu’il en soit, demeure l’insoluble problème statistique, clef de l’évolution dé- mographique de toute la région, et partant des possibilités de ponction. L’archéologie devrait fournir de solides bases { partir de l’extension de la désertification due très sou- vent aux variations climatiques facilement repérables, mais lorsque ce n’est pas le cas, il s’agit de l’exode de populations qui n’en peuvent mais devant la tragédie des rafles. La limite extrême est atteinte lorsque l’insécurité ne laisse plus la possibilité d’une produc- tion agricole. 31 C’est ce que révèle le très beau travail conduit au Sénégal le long de la vallée du fleuve par les chercheurs de l’IFAN. Mais tout reste { faire pour la vallée et le delta inté- rieur du Niger. Il faut croire que les prédateurs ont ratissé avec l’efficacité maximale puisque certains sont allés jusqu’au nord de l’actuel Ghana ou le long d’une ligne qui sert aujourd’hui de frontière avec la Côte d’Ivoire. L{, subsiste la route dite des mosquées, le long de laquelle les Musulmans venus du nord, convertissaient en même temps qu’ils rassemblaient leurs caravanes d’esclaves destinées { Djénnée et { Tombouctou. Que l’on réalise bien la distance de près de mille kilomètres avant d’atteindre cette dernière qui n’était que le prélude { la traversée du Sahara. 32 La halte s’imposait plus ou moins longue sur ces marchés nigériens, point de rup- ture des caravanes. Les esclaves y étaient vendus { d’autres marchands routiers du dé- sert. Il fallait constituer de nouveaux convois, ce qui pouvait prendre plusieurs mois. 33 Ces énormes marchés avaient gonflé la population des cités devenues également des centres majeurs de la culture musulmane. Autour des mosquées, de puissantes uni- versités débattaient de la légitimité de l’esclavage. Hamed Baba enseignait à Tombouc- tou que la servitude de l’incroyant ne posait aucun problème de conscience. Tout l’argumentaire reposait sur les cas limites du captif de guerre converti au moment de sa défaite et autres hypothèses formalistes où la science coranique s’épuisait en débats aussi vains que ceux des scolastiques formalistes de nos universités médiévales. De tout cela subsiste le sentiment d’une mauvaise conscience comparable { celle que connaîtra l’Europe au XVIIIe siècle. L’Islam au reste n’apportant pas plus de solution humaniste que la Chrétienté. 34 Retenons de tout cela que le trafic négrier pour susciter de tels débats n’avait rien d’anecdotique, mais condamnait chaque année des milliers de victimes { franchir le dé- sert. 35 La traversée suivait trois itinéraires principaux :  1 - celui de l’ouest joignait le Niger et la Tripolitaine en passant par Tahert, Zawi- la, le Fezzan et le Kanen. De Tripoli une partie des esclaves repartait à Alexandrie et au Caire d’où ils étaient redistribués dans l’orient arabe et { l’est de la Méditer- ranée. El Bekri en 1068 décrit ce flux traversant des marchés très actifs du Caire, { l’ombre de la grande mosquée où les esclaves s’échangeaient contre des étoffes rouges, tandis qu’autour s’éployaient jardins irrigués et palmeraies surgies en plein désert.  2 - par Warghla Tadmekket on rejoignait Tunis ou Bougie. Axe qui semble avoir été moins fréquenté que le précédent dont le succès était dû { l’importance de Tripoli comme plaque tournante.