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Rémunération des dirigeants et risque de fraude d'entreprise
Author(s): Pierre Fleckinger, Thierry Lafay and Constance Monnier
Source: Revue économique, Vol. 64, No. 3, DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS DE L'ANALYSE
ÉCONOMIQUE: LXI e congrès annuel de l'Association française de science économique, 2012
(Mai 2013), pp. 457-467
Published by: Sciences Po University Press
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/23484900
Accessed: 01-04-2017 22:39 UTC
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économique
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Rémunération des dirigeants
et risque de fraude d'entreprise
Pierre Fleckinger*
Thierry Lafay**
Constance Monnier***
Nous étudions ia relation d'agence entre actionnaires et dirigeant d'une entre
prise lorsqu'une action illégale est possible. Nous caractérisons en particulier la
rémunération optimale proposée par la firme et son implication sur les décisions
prises par le dirigeant. Ceci nous amène à évaluer si l'emploi de stock-options
demeure ou non optimal dans ce contexte. Nous analysons en outre l'impact de
ces schémas de rémunérations en termes de politique publique de lutte contre
la fraude d'entreprise et nous montrons que le levier de la détection n'est pas
interchangeable avec celui des amendes. Enfin, nous mettons en évidence que les
acteurs ont des préférences divergentes quant à la politique publique de détection
de ces pratiques illicites.
We study the stockholder-manager relationship in a firm when an illicit strategy
can be followed. We derive the optimal compensation offered by the firm and
examine how it affects the ceo's action. We then discuss the optimaiity of stock
options or free-stocks. Moreover, we analyze the link between the public policy and
the ceo's compensation ; we prove that the fine level cannot be a substitute for
a low level of detection. Finally, we point out that each protagonist has divergent
preferences over the public policy regarding corporate fraud.
CEO'S COMPENSATION UNDER THE THREAT OF ILLICIT BEHAVIOR.
Classification JEL : J33, K21, K42, M12, M52
* Paris School of Economics, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ces. Correspondan
Centre d'Économie de la Sorbonne, 106-112 boulevard de l'Hôpital, 75647 Paris cedex 13. C
riel : pierre.fleckinger@univ-parisl.fr.
** Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Prism-Sorbonne. Correspondance : 17 rue de
Sorbonne, 75231 Paris cedex 05. Courriel : tlafay@univ-parisl.fr
*** Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Prism-Sorbonne, et escp Europe. Correspondanc
Prism-Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, 75231 Paris cedex 05. Courriel : constance.monnie
univ-parisl.fr.
Les auteurs remercient les participants de l'afse 2012.
457
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Revue économique
INTRODUCTION
Depuis la fin des années 1970, les modes de rémunération des dirigeants ont
connu des sophistications croissantes ayant pour objet de fonder les rétributions
des managers sur la performance (rémunérations variables, actions gratuites,
stock-options, bonus, etc.). Jensen et Meckling [1976] ont jeté les bases de la
théorie de l'agence en montrant comment ces dispositifs visent à aligner les
intérêts des décideurs sur ceux des actionnaires. Toutefois, ces schémas de rému
nération peuvent conduire les dirigeants à adopter des pratiques illicites telles
que la collusion ou les fraudes fiscales, comptables ou environnementales, dans
la mesure où ces dernières permettent d'accroître la valeur de l'entreprise. Ainsi,
de nombreuses entreprises ayant mis en place ces rémunérations « au résultat »
ont connu des condamnations pour fraude. En 1993, le dirigeant de Nissan au
Royaume-Uni, Michael Hunt, dont le schéma de rémunération était complexe, a
été condamné après avoir conduit son entreprise à la plus grande fraude fiscale
démasquée dans ce pays. L'affaire Enron, au début des années 2000, a impliqué
des hauts dirigeants pour fraude comptable. Au même moment, Enron distribuait
à ses dirigeants des options pour 47 millions d'actions. En 2007, la Commission
a condamné Saint-Gobain à une amende de plus de 800 millions d'euros pour
avoir formé un cartel. Sur la durée du cartel, cette entreprise a consenti à ses
mandataires sociaux plus de 420 000 options.
Nous nous interrogeons ici sur la rémunération optimale des dirigeants
lorsqu'ils peuvent commettre des actions illicites et sur le rôle des autorités
publiques qui cherchent à dissuader ces pratiques. Dans une contribution célèbre,
Becker [1968] donne un critère économique simple pour déterminer la sanction
dissuasive optimale. Il souligne que la politique de lutte contre le crime s'appuie
sur deux leviers : la probabilité de détection du crime et le niveau de la sanction.
Il conclut qu'il convient de fixer un niveau d'amende tel que la sanction espérée
en cas d'infraction soit supérieure au bénéfice tiré de cette infraction. Ce raison
nement s'applique a priori à tout agent économique, y compris à l'entreprise.
Par exemple, Landes [1983] applique la théorie de Becker aux violations du droit
antitrust. Cette approche a connu de nombreux développements centrés sur les
questions du niveau optimal de la sanction, du degré nécessaire d'intervention
publique et du traitement de la relation principal-agent qui conduit à s'interroger
sur la responsabilité individuelle de l'agent (Polinsky et Shavell [2000]). En
effet, on ne peut se contenter d'envisager l'entreprise comme un agent unique,
puisque toute décision d'enfreindre la loi est initiée par un individu à l'intérieur
de l'entreprise qui a lui-même ses propres motivations.
Plusieurs articles sur la rémunération optimale traitent ainsi du problème
spécifique des fraudes d'entreprise, avec des modèles où le dirigeant peut effec
tuer un effort de manipulation pour accroître la valeur de l'entreprise perçue par
le marché (Peng et Rôel [2008], Robinson et Santore [2010]). Les incitations à la
collusion fournies (implicitement) par certains schémas de rémunération ont été
analysées par Spagnolo [2000], qui montre qu'en alignant les objectifs de l'agent
sur les profits de long terme de l'entreprise, les stock-options atténuent les gains de
déviation et renforcent la collusion. Cohen [1996] et Garoupa [2000] soulignent
les avantages d'une politique de lutte contre la fraude centrée sur l'entreprise et
non sur l'agent. Cette vision suppose que les actionnaires seront alors incités à
dissuader les infractions dans l'entreprise en mettant en œuvre un mécanisme de
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Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier
monitoring interne et en infligeant des sanctions à leurs agents. Aubert [2009]
étudie un modèle dans lequel, outre le choix entre concurrence, collusion et
déviation, l'agent peut exercer un effort qui améliore le profit. Elle conclut que
la responsabilité individuelle est préférable. Arien et Kraakman [1997], Arien
[1999] montrent aussi qu'une responsabilité limitée à l'entreprise ne permet pas
toujours de dissuader la fraude. Un régime de responsabilité conditionnelle à la
mise en place d'un programme interne de conformité à la réglementation serait
alors plus efficace1. Cette solution a le mérite de réduire le coût de détection pour
les autorités, mais elle comporte pour l'entreprise des coûts (Alexander et Cohen
[1999]) qui ont été étudiés en termes de coûts de surveillance et non en termes
de rémunération, comme nous le faisons dans cet article.
Nous intégrons dans notre modèle le double problème d'agence : entre le
régulateur et l'entreprise d'une part, et entre les actionnaires de l'entreprise et ses
dirigeants d'autre part. Nous montrons que l'intensité de la détection influence la
relation d'agence interne à l'entreprise, alors que l'amende espérée n'intervient
que dans la relation d'agence entre la politique publique et l'entreprise. Nous
montrons que le partage de rente entre actionnaires et dirigeants est affecté par
l'intensité du risque de détection et que le risque d'action illégale limite l'effi
cacité des schémas incitatifs. En particulier, même lorsque aucune fraude n'est
entreprise, un faible risque de détection peut être dans l'intérêt des dirigeants.
Nous discutons aussi de l'impact des clauses suspensives dans les contrats de
rémunération. Enfin, alors que de nombreuses explications pour l'appropriation
excessive de rentes par les dirigeants ont été mises en lumière (voir notamment
Bebchuk et Fried [2003]), nous montrons ici que la rémunération peut apparaître
anormalement élevée du fait de ces aspects dissuasifs internes. La logique inci
tative implique en effet que plus un dirigeant risque de se livrer à des fraudes,
plus il peut extraire de rentes.
Dans la première partie, nous exposons les hypothèses de notre modèle et
obtenons la rémunération optimale de l'agent en fonction de la politique de
détection/sanction mise en place par l'État. Dans la seconde partie, nous analy
sons le lien entre cette politique publique et la rémunération des dirigeants.
LE MODELE
Nous supposons qu'un dirigeant (l'agent) prend les décisions importantes
d'une entreprise de façon discrétionnaire, parce que ses choix stratégiques ne
sont pas observables, ou parce que les actionnaires (le principal) n'ont pas
l'expertise pour les évaluer directement. L'une des décisions possibles conduit
à un comportement illicite, par exemple l'organisation de collusion, un abus
de position dominante, ou encore une fraude comptable. Pour simplifier, nous
supposons que le dirigeant n'a que deux autres options : l'une qui accroît sensi
blement la probabilité de profits hauts de l'entreprise et l'autre qui correspond à
un effort nul. Le dirigeant doit donc choisir une action entre l'action illégale (i),
1. Certains États prévoient, par exemple, une exonération d'amende si la fraude a été détectée
grâce à l'existence d'un programme de conformité à la réglementation environnementale ou antitrust.
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Revue économique
l'effort élevé (e) ou l'effort nul (0). Parmi ces actions, seule l'action e implique
un coût personnel c.
L'État peut détecter l'action illégale avec une probabilité q, et, en cas de détec
tion, imposer à l'entreprise une amende F. Nous prendrons ces deux variables
comme données lorsque les actionnaires de l'entreprise décident de la politique
de rémunération du dirigeant. De plus, la détection peut avoir lieu soit avec
probabilité À avant le paiement du salaire au dirigeant soit avec probabilité 1 - À
après ce paiement. Si aucune action illégale n'a été découverte au moment du
paiement, l'entreprise ne peut, de ce fait, distinguer une conduite légale d'une
conduite illégale qui ne serait pas détectée à temps.
Les profits de l'entreprise dépendent de l'action exécutée par le dirigeant et
de la politique de détection/sanction de l'État. Nous supposons que le profit de
l'entreprise ne peut prendre que deux valeurs : H ou L avec H > L. L'action illé
gale génère toujours un profit H pour la firme2 (avant la prise en compte d'une
éventuelle amende). L'effort nul entraîne un profit H avec une probabilité p0 et
un profit L avec une probabilité 1 - p0. L'effort élevé conduit à un profit H avec
une probabilité pe et à un profit L avec une probabilité 1 - pe. Enfin, la firme
comme le dirigeant sont supposés neutres au risque.
Étant donné le risque de détection, nous pouvons représenter le jeu par l'arbre
suivant :
L'Agent choisit
1 - q
Le principal peut observer trois signaux : soit un profit faible, soit un profit
haut sans détection de fraude, soit un profit haut avec une détection d'action
illicite, auquel cas il est donc amputé d'une amende. Le contrat optimal que la
firme met en place peut donc spécifier un transfert dépendant de ces signaux,
et on notera dans le même ordre que précédemment le vecteur de transfert sous
la forme [í(l), í(H | O), i(H 11)] où 0 représente l'absence de détection et 1
la détection d'action illicite. Nous supposons que l'agent est protégé par une
contrainte de responsabilité limitée (LL), qui peut s'expliquer par des arguments
juridiques ou par les capacités de paiement limité du dirigeant3. De plus, l'agent
2. Nous supposons, pour clarifier l'exposition, que l'action illégale conduit toujours à un profit
maximal, mais ce n'est pas essentiel pour nos résultats, qui sont qualitativement identiques si la
probabilité d'obtenir le résultat H est suffisamment élevée en cas d'action illégale.
3. Deux cadres canoniques sont traditionnellement utilisés pour modéliser l'aléa moral : l'un
dans lequel le cœur du problème contractuel est le partage de risque, l'autre dans lequel les contrac
tants sont neutres au risque, mais la responsabilité limitée de l'agent crée des frictions contractuelles.
Nous adoptons ce deuxième modèle parce qu'il permet de discuter de partage de rente, tandis que
dans le premier type de modèle la rente de l'agent est toujours nulle.
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s.c.
Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monni
est soumis à une contrainte de participation ex ante, mais, comme ell
matiquement satisfaite sous la contrainte de responsabilité limitée, no
l'ignorer. Finalement, le principal doit aussi satisfaire deux contraint
tion, liées au fait que trois actions sont possibles. L'objectif du princip
à minimiser le transfert espéré offert à l'agent. Ainsi, afin d'inciter l'ag
un effort élevé, le programme de la firme est le suivant :
r. w¥" , ,JV'(h|o) + (1 -pe) t(L)
[í(l),í(h|o),í(h|i)]^ [0,0,0] (LL)
pe • i(H 10) + (1 -pe) • î(l) - c >Po ■ /(H 10) + (1 -p
Pe ' '(H I O) + (1 - pe) ■ i(L) — c > (l - hq) • í(H | O) + Ju?
Nous supposons que, sans incitation, l'agent entreprend l'ef
s'il pourrait dans ce cas choisir l'action illégale au même coût
cipal incitera à l'effort nul en offrant une rémunération nulle
i.e. [f(L), í(H I O), í(H 11 )] = [0,0,0]. Afin d'inciter à l'action
paradoxe puisque, théoriquement, il suffirait d'offrir une rém
signal le plus indicatif d'une action illégale : un profit haut av
de fraude. Ainsi, il suffirait de poser í(H 11 ) = e > 0 et de la
transferts nuls. Cependant, l'agent aurait alors intérêt à ce q
soit détectée par l'État, ce qui ne serait alors pas dans l'intér
Il semble donc réaliste d'inclure une contrainte du ty
Sous cette hypothèse, l'action illicite est implémentée en fix
D(l), '(H 10), í(H 11 )] = [O, e, e] avec e ~ 0. Les transferts éta
petits, on peut donc considérer que l'action illégale comme l'ef
être obtenus à un coût quasi nul. Seul le contrat qui cherche à
haut est non trivial.
PROPOSITION 1. Le contrat optimal afin d'inciter à l'effort
-Si 9>^a:f(L) = 0;/(H|0) = -^-;i(H|l) = 0
. Sinoa,,(L) = ; ,(„ | 0) = fifi
î(h|i) = 0.
Preuve. Tout d'abord, nous pouvons remarquer que í(H 11 ) n'apparaît
que dans le membre droit de la seconde contrainte d'incitation du programme
précédent ; ceci implique que nous étendons le domaine réalisable en fixant
í(H 11 ) minimal et donc égal à zéro. La première contrainte d'incitation s'écrit
alors : f(H |o) - î(l) > ^ C_^ . Ce résultat classique définit le surplus de
transfert nécessaire pour inciter l'agent à l'effort haut à la place de l'effort nul.
La seconde contrainte s'écrit : (pe + Xq — 1 ) ■ /(H | o) + (1 — pe) ■ f(L) > c. Il
s'agit donc de résoudre un programme linéaire dépendant des variables î(l) et
i(H|o).
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Lorsque Xq^ 1 — p0 il est facile de montrer que la première contrainte
implique la seconde contrainte, car pe + Xq - 1 > pe - p0. La solution est donc
c
de fixer î(l) = 0, d'où tÍH 11 ) =
w y 1 ' Pe~Po
Supposons Xq < 1 - pe. Comme c > 0, la seconde
î(l) > 0 et les deux contraintes sont saturées. Le syst
alors :
1 -Po'Xg c 1 ~Po
[/(L),/(H|0)] = Xq Pe~Po Xq pe-p0
Supposons 1 —pe < Xq < 1 ~p0. La solution précédente reste r
il existe un unique autre sommet réalisable dans le polyèdre convex
/(l) = 0 et la seconde contrainte saturée, soit /(H 10) = — + ^
alors de comparer le transfert espéré à ces deux sommets pour mo
premier coûte moins cher au principal. On obtient donc la même s
tout Xq ^ 1 — p0. ■
Il est assez intuitif que le salaire dépende ainsi de Xq, la probabil
tion de fraude ex ante au paiement. En effet, puisque í(H 11) = 0, le
ramené à un problème classique à deux efforts lorsque la probabilité
est suffisamment élevée : l'action illicite est de fait coûteuse pour l
espérance de paiement pour cette action décroît avec Xq. Au contra
faible, rémunérer t( 10) va inciter l'agent à l'action illégale pui
détecte que rarement la fraude. Il faut donc rémunérer l'agent, mê
profit est faible, puisque cela indique de façon univoque que ce n'es
illicite qui a été entreprise4. Puisque la différence de transfert d
rester suffisamment élevée pour proscrire l'effort nul, le transfert
plus élevé lorsque le profit est H. Le point central illustré par la pr
ainsi que la possibilité de choisir une voie illégale pour atteindre des
rend les incitations à l'effort plus coûteuses pour le principal.
Nous supposerons dorénavant que c < (H - L) pe ~p0f / pe
existent À et q tels que l'effort haut soit préféré à l'effort nul. Le pr
pal peut alors être calculé en fonction de l'action entreprise. Nous
q* la probabilité de détection telle que les profits de l'action nulle e
soient égaux ; q la probabilité telle que les profits de l'action i
l'effort soient égaux et enfin q la probabilité qui égalise les profits
illégale et nulle.
PROPOSITION 2. Si q e q ; q* le principal mettra en place le sa
tant à l'action nulle5 et son profit est : IIp = L + p0 ■ (H — L).
Si q < Min[q* ; q ; q ou si q G q* ; q le principal mettra en pla
incitant à l'action illégale et H p = H — — s.
4. Ce résultat reste valide du moment que l'action illégale génère - hors amende
haut suffisamment souvent (voir la discussion dans la note 6).
5. Si l'intervalle n'est pas défini, l'action nulle n'est jamais entreprise.
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Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier
Si q > Max[q* ; q] le principal mettra en place le salaire incitant à l'effort e
« np = L + (H - L) - ^ , - {'(;^} c.
Preuve. Les profits espérés du principal correspondent au profit espéré de
la firme diminué du coût salarial de l'agent. Des calculs simples (épargnés au
lecteur) donnent les valeurs suivantes :
,= (! ~Po) c - _ (l — Po)(H — L)
q M/,e_A>)2(H~L) + (1 -Pe)^C' q F
enfin en posant a = (l — pe) H-L- C
-Po
nous obtenons :
q = -pAfax
/ 2_l. a<$ 1 'POa + . / a2 + 4
A Pe~Po
;a +
'Po
On peut alors démontrer que soit q ^q <¡q* soit q* < q < q, ce qui permet d'en
déduire l'action optimale implémentée par le principal en fonction de q. ■
Dans la figure 1, nous supposons q* < q < q < —< 1.
Ainsi, si q < q la firme incite à l'action illégale, sinon l'effort haut est entre
pris. La pente de la droite définissant l'action illégale dépend typiquement du
montant de l'amende. Si cette dernière croise l'axe des abscisses avant q= 1,
comme c'est le cas sur notre figure, cela signifie que l'entreprise n'a pas de
responsabilité limitée (elle peut faire un profit négatif suite à l'amende). Ceci
Figure 1. Profit du principal et rente de l'agent en fonction de l'action entreprise
Profit de I'entreprise
Action illegale
L + (H - L)p0
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Revue économique
n'est en rien limitatif puisque si H/F est supérieur à 1, les trois cas présentés dans
la proposition 2 restent possibles si les profits H et L sont suffisamment élevés.
La rente espérée de l'agent est toujours nulle pour toute action autre que l'effort
haut et elle est représentée par la hauteur dans la zone noire ; le profit espéré du
principal est représenté par la hauteur dans la zone grise. On remarque que si
H/F est plus faible et que la droite définissant l'action illégale coupe la droite
représentant l'effort nul avant q*, alors en fonction de q les trois actions peuvent
être entreprises. Dans ce cas, on remarque notamment que, lorsque q < q*, il
n'est plus dans l'intérêt du principal d'inciter l'agent à l'effort haut.
DISCUSSION
L'usage des stock-options et des actions gratuites
Le schéma incitatif optimal de la proposition 1 peut être relié à la forme des
contrats observés en réalité. Dans les deux cas identifiés, il peut correspondre à
des stock-options. Cependant, le contrat optimal étant tel que /(H 11 ) = 0, ceci
implique que l'entreprise doit pouvoir retirer les options en cas de détection de
fraude6. Lorsque t(L) = 0 et /(H |o) > 0, il s'agit de distribuer des options
avec un prix d'exercice élevé, qui ne paieront que si le résultat haut est atteint.
En revanche, t(L) > 0 correspond à des stock-options avec un prix d'exercice
faible, qui rapportent toujours une rente au dirigeant même en cas de mauvais
résultat de l'entreprise. C'est en particulier ces dernières qui sont critiquées,
puisque le dirigeant « gagne à tous les coups ». Une manière alternative d'induire
l'effort haut dans de telles circonstances consiste à donner des actions gratuites
au dirigeant. Cependant, on peut remarquer que l'usage de stock-options ou d'ac
tions gratuites introduit un nouveau levier dans le paiement. En effet, lorsque
À est différent de 1, le salaire versé par la firme via le contrat optimal ne peut
prendre en compte la possibilité de détection ex post au paiement. En utilisant
des stock-options ou des actions gratuites, l'exercice de ces options ou la revente
des actions fait implicitement intervenir un troisième acteur : un investisseur
potentiel. Si cet investisseur est suffisamment informé, il peut anticiper l'action
d'équilibre du dirigeant, et le risque de détection ex post sera alors reflété dans
le prix de l'action. Dans ce cas, la question d'une détection avant ou après le
paiement ne se pose plus. Ce contrôle externe du marché financier a pour effet
d'augmenter le À de notre modèle.
À qui profite l'impunité ?
Si les sanctions qui pèsent sur l'entreprise sont suffisamment dissuasives mais
que la probabilité de détection est insuffisante, les actionnaires devront davan
tage rémunérer leurs dirigeants afin qu'ils ne commettent pas d'action illicite.
6. Ce type de condition restitutive existe, par exemple, dans le Dodd-FrankAct de 2010 et peut
s'appliquer pour le cas de fraude comptable.
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Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468
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Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier
Aubert, Rey et Kovacic [2006] ont mis en évidence les coûts sociaux associés à
la lutte contre les cartels (découlant notamment des programmes récompensant
les délateurs des cartels). Plus généralement, ils se rapportent aux coûts privés
liés au contrôle du comportement des employés par les entreprises (voir Alexan
der et Cohen [1999]). Nous montrons qu'outre ces coûts, la possibilité de frauder
implique un coût salarial. En effet, au-delà d'un niveau minimal de probabilité
de détection, la rente cédée par l'actionnaire au dirigeant pour éviter qu'il ne
choisisse l'action illicite augmente à mesure que la probabilité se réduit.
Certaines des fraudes réalisées nuisibles à l'entreprise proviennent probable
ment d'une mauvaise prise en compte de ce risque de comportement illicite dans
le schéma de rémunération. En revanche, dans le cas où les amendes ne sont
pas dissuasives7, les actionnaires ont intérêt à ce que leurs agents enfreignent la
réglementation. Certains dirigeants pourraient agir dans l'intérêt de la firme en
fraudant, et ils seraient de ce fait récompensés (même en cas de détection) par les
actionnaires. Ce cas de figure semble s'être déjà présenté dans la réalité. Ainsi,
Stephan [2011] souligne que l'un des dirigeants de British Airways impliqué
dans l'organisation d'un cartel a été promu alors qu'il était poursuivi pénale
ment pour son implication dans cette collusion. Il met aussi en évidence que
de nombreux managers condamnés à des peines de prison aux États-Unis, pour
avoir participé à des cartels, retrouvent avec facilité un emploi de grande qualité.
Les instruments de la politique publique
Dans la littérature dérivée de Becker-Landes, la probabilité de détection et
l'amende moyenne sont deux leviers substituables de la politique publique à
partir du moment où l'amende est suffisamment élevée. Ainsi, la détection des
fraudes et leur répression étant coûteuses, il conviendrait de privilégier une
hausse des amendes au détriment d'un renforcement de la détection. Toutefois,
Polinsky et Shavell [1979] montrent que si les agents sont averses au risque,
fixer une faible probabilité de détection assortie d'une forte amende moyenne
n'est pas la solution optimale. Il existe de nombreuses limites à la théorie de la
sanction optimale. D'abord, une politique qui consisterait à imposer de lourdes
amendes associées à une faible probabilité de détection s'opposerait au principe
de proportionnalité des peines, principe général de droit communautaire. De
plus, la théorie de l'amende optimale se trouve limitée par la capacité contribu
tive des entreprises qui ne seraient pas en mesure de s'acquitter de cette amende
élevée. Selon Garoupa [2001], si les agents ont des ressources modestes, l'effet
dissuasif des amendes est faible et les pouvoirs publics investiront peu dans
la détection. Enfin, ce sont les estimations subjectives de l'espérance de gain
qui importent et non leur niveau effectif : Wils [2008] considère qu'infliger de
lourdes amendes, assorties d'une faible probabilité de détection, se heurte à un
effet de mémoire (en cas de probabilité faible, les individus vont oublier que ces
pratiques sont interdites).
Les conclusions de notre modèle plaident aussi pour une probabilité de détec
tion élevée puisque les deux leviers de politique publique ne sont pas simplement
7. Par exemple, Combe et Monnier [2011] mettent en évidence que les amendes infligées en
Europe à l'encontre des cartels ne sont pas dissuasives.
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Revue économique
substituables dans notre cadre. Remarquons cependant que le coût de prévention
de la fraude est supporté principalement par l'autorité publique si la détection est
élevée, et par les actionnaires via un coût salarial plus important sinon. De plus,
dès que l'amende est suffisamment élevée, l'actionnaire a intérêt à collaborer
avec les autorités publiques afin de renforcer la détection des fraudes. Cela peut
le conduire à développer des mécanismes de surveillance interne, tels que les
programmes de conformité. Notre modèle se fonde sur un régime de respon
sabilité limité à l'entreprise, ou d'un transfert de responsabilité ex post sur le
dirigeant (pas de paiement en cas de fraude). La possibilité de poursuivre au
pénal les dirigeants coupables de fraude permettrait aussi de réaligner l'intérêt
du dirigeant sur celui des pouvoirs publics sans entraver le mécanisme incitatif
interne à l'entreprise.
CONCLUSION
Nous avons illustré, dans un modèle canonique d'agence, comment la poli
tique de lutte contre la fraude d'entreprise structurait la relation d'incitation
entre les actionnaires et les dirigeants d'une entreprise. En effet, nous montrons
que l'imperfection de détection de la fraude plus que le niveau des amendes
permet aux dirigeants d'extraire des rentes importantes. Cela se manifeste en
particulier par des stock-options à prix d'exercice faible. De façon générale,
deux conditions sont nécessaires pour que l'usage de stock-options ne soit pas
problématique : premièrement, des clauses suspensives sont essentielles pour
garantir l'efficience de la relation contractuelle ; deuxièmement, la politique
publique doit intégrer les effets complexes que nous avons soulignés dans la
double relation d'agence.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Rémunération des dirigeants et risque de fraude d'entreprise

  • 1. Rémunération des dirigeants et risque de fraude d'entreprise Author(s): Pierre Fleckinger, Thierry Lafay and Constance Monnier Source: Revue économique, Vol. 64, No. 3, DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS DE L'ANALYSE ÉCONOMIQUE: LXI e congrès annuel de l'Association française de science économique, 2012 (Mai 2013), pp. 457-467 Published by: Sciences Po University Press Stable URL: http://www.jstor.org/stable/23484900 Accessed: 01-04-2017 22:39 UTC JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at http://about.jstor.org/terms Sciences Po University Press is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue économique This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 2. Rémunération des dirigeants et risque de fraude d'entreprise Pierre Fleckinger* Thierry Lafay** Constance Monnier*** Nous étudions ia relation d'agence entre actionnaires et dirigeant d'une entre prise lorsqu'une action illégale est possible. Nous caractérisons en particulier la rémunération optimale proposée par la firme et son implication sur les décisions prises par le dirigeant. Ceci nous amène à évaluer si l'emploi de stock-options demeure ou non optimal dans ce contexte. Nous analysons en outre l'impact de ces schémas de rémunérations en termes de politique publique de lutte contre la fraude d'entreprise et nous montrons que le levier de la détection n'est pas interchangeable avec celui des amendes. Enfin, nous mettons en évidence que les acteurs ont des préférences divergentes quant à la politique publique de détection de ces pratiques illicites. We study the stockholder-manager relationship in a firm when an illicit strategy can be followed. We derive the optimal compensation offered by the firm and examine how it affects the ceo's action. We then discuss the optimaiity of stock options or free-stocks. Moreover, we analyze the link between the public policy and the ceo's compensation ; we prove that the fine level cannot be a substitute for a low level of detection. Finally, we point out that each protagonist has divergent preferences over the public policy regarding corporate fraud. CEO'S COMPENSATION UNDER THE THREAT OF ILLICIT BEHAVIOR. Classification JEL : J33, K21, K42, M12, M52 * Paris School of Economics, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ces. Correspondan Centre d'Économie de la Sorbonne, 106-112 boulevard de l'Hôpital, 75647 Paris cedex 13. C riel : pierre.fleckinger@univ-parisl.fr. ** Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Prism-Sorbonne. Correspondance : 17 rue de Sorbonne, 75231 Paris cedex 05. Courriel : tlafay@univ-parisl.fr *** Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Prism-Sorbonne, et escp Europe. Correspondanc Prism-Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, 75231 Paris cedex 05. Courriel : constance.monnie univ-parisl.fr. Les auteurs remercient les participants de l'afse 2012. 457 Revue économique - vol. 64, n° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 3. Revue économique INTRODUCTION Depuis la fin des années 1970, les modes de rémunération des dirigeants ont connu des sophistications croissantes ayant pour objet de fonder les rétributions des managers sur la performance (rémunérations variables, actions gratuites, stock-options, bonus, etc.). Jensen et Meckling [1976] ont jeté les bases de la théorie de l'agence en montrant comment ces dispositifs visent à aligner les intérêts des décideurs sur ceux des actionnaires. Toutefois, ces schémas de rému nération peuvent conduire les dirigeants à adopter des pratiques illicites telles que la collusion ou les fraudes fiscales, comptables ou environnementales, dans la mesure où ces dernières permettent d'accroître la valeur de l'entreprise. Ainsi, de nombreuses entreprises ayant mis en place ces rémunérations « au résultat » ont connu des condamnations pour fraude. En 1993, le dirigeant de Nissan au Royaume-Uni, Michael Hunt, dont le schéma de rémunération était complexe, a été condamné après avoir conduit son entreprise à la plus grande fraude fiscale démasquée dans ce pays. L'affaire Enron, au début des années 2000, a impliqué des hauts dirigeants pour fraude comptable. Au même moment, Enron distribuait à ses dirigeants des options pour 47 millions d'actions. En 2007, la Commission a condamné Saint-Gobain à une amende de plus de 800 millions d'euros pour avoir formé un cartel. Sur la durée du cartel, cette entreprise a consenti à ses mandataires sociaux plus de 420 000 options. Nous nous interrogeons ici sur la rémunération optimale des dirigeants lorsqu'ils peuvent commettre des actions illicites et sur le rôle des autorités publiques qui cherchent à dissuader ces pratiques. Dans une contribution célèbre, Becker [1968] donne un critère économique simple pour déterminer la sanction dissuasive optimale. Il souligne que la politique de lutte contre le crime s'appuie sur deux leviers : la probabilité de détection du crime et le niveau de la sanction. Il conclut qu'il convient de fixer un niveau d'amende tel que la sanction espérée en cas d'infraction soit supérieure au bénéfice tiré de cette infraction. Ce raison nement s'applique a priori à tout agent économique, y compris à l'entreprise. Par exemple, Landes [1983] applique la théorie de Becker aux violations du droit antitrust. Cette approche a connu de nombreux développements centrés sur les questions du niveau optimal de la sanction, du degré nécessaire d'intervention publique et du traitement de la relation principal-agent qui conduit à s'interroger sur la responsabilité individuelle de l'agent (Polinsky et Shavell [2000]). En effet, on ne peut se contenter d'envisager l'entreprise comme un agent unique, puisque toute décision d'enfreindre la loi est initiée par un individu à l'intérieur de l'entreprise qui a lui-même ses propres motivations. Plusieurs articles sur la rémunération optimale traitent ainsi du problème spécifique des fraudes d'entreprise, avec des modèles où le dirigeant peut effec tuer un effort de manipulation pour accroître la valeur de l'entreprise perçue par le marché (Peng et Rôel [2008], Robinson et Santore [2010]). Les incitations à la collusion fournies (implicitement) par certains schémas de rémunération ont été analysées par Spagnolo [2000], qui montre qu'en alignant les objectifs de l'agent sur les profits de long terme de l'entreprise, les stock-options atténuent les gains de déviation et renforcent la collusion. Cohen [1996] et Garoupa [2000] soulignent les avantages d'une politique de lutte contre la fraude centrée sur l'entreprise et non sur l'agent. Cette vision suppose que les actionnaires seront alors incités à dissuader les infractions dans l'entreprise en mettant en œuvre un mécanisme de 458 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 4. Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier monitoring interne et en infligeant des sanctions à leurs agents. Aubert [2009] étudie un modèle dans lequel, outre le choix entre concurrence, collusion et déviation, l'agent peut exercer un effort qui améliore le profit. Elle conclut que la responsabilité individuelle est préférable. Arien et Kraakman [1997], Arien [1999] montrent aussi qu'une responsabilité limitée à l'entreprise ne permet pas toujours de dissuader la fraude. Un régime de responsabilité conditionnelle à la mise en place d'un programme interne de conformité à la réglementation serait alors plus efficace1. Cette solution a le mérite de réduire le coût de détection pour les autorités, mais elle comporte pour l'entreprise des coûts (Alexander et Cohen [1999]) qui ont été étudiés en termes de coûts de surveillance et non en termes de rémunération, comme nous le faisons dans cet article. Nous intégrons dans notre modèle le double problème d'agence : entre le régulateur et l'entreprise d'une part, et entre les actionnaires de l'entreprise et ses dirigeants d'autre part. Nous montrons que l'intensité de la détection influence la relation d'agence interne à l'entreprise, alors que l'amende espérée n'intervient que dans la relation d'agence entre la politique publique et l'entreprise. Nous montrons que le partage de rente entre actionnaires et dirigeants est affecté par l'intensité du risque de détection et que le risque d'action illégale limite l'effi cacité des schémas incitatifs. En particulier, même lorsque aucune fraude n'est entreprise, un faible risque de détection peut être dans l'intérêt des dirigeants. Nous discutons aussi de l'impact des clauses suspensives dans les contrats de rémunération. Enfin, alors que de nombreuses explications pour l'appropriation excessive de rentes par les dirigeants ont été mises en lumière (voir notamment Bebchuk et Fried [2003]), nous montrons ici que la rémunération peut apparaître anormalement élevée du fait de ces aspects dissuasifs internes. La logique inci tative implique en effet que plus un dirigeant risque de se livrer à des fraudes, plus il peut extraire de rentes. Dans la première partie, nous exposons les hypothèses de notre modèle et obtenons la rémunération optimale de l'agent en fonction de la politique de détection/sanction mise en place par l'État. Dans la seconde partie, nous analy sons le lien entre cette politique publique et la rémunération des dirigeants. LE MODELE Nous supposons qu'un dirigeant (l'agent) prend les décisions importantes d'une entreprise de façon discrétionnaire, parce que ses choix stratégiques ne sont pas observables, ou parce que les actionnaires (le principal) n'ont pas l'expertise pour les évaluer directement. L'une des décisions possibles conduit à un comportement illicite, par exemple l'organisation de collusion, un abus de position dominante, ou encore une fraude comptable. Pour simplifier, nous supposons que le dirigeant n'a que deux autres options : l'une qui accroît sensi blement la probabilité de profits hauts de l'entreprise et l'autre qui correspond à un effort nul. Le dirigeant doit donc choisir une action entre l'action illégale (i), 1. Certains États prévoient, par exemple, une exonération d'amende si la fraude a été détectée grâce à l'existence d'un programme de conformité à la réglementation environnementale ou antitrust. 459 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 5. Revue économique l'effort élevé (e) ou l'effort nul (0). Parmi ces actions, seule l'action e implique un coût personnel c. L'État peut détecter l'action illégale avec une probabilité q, et, en cas de détec tion, imposer à l'entreprise une amende F. Nous prendrons ces deux variables comme données lorsque les actionnaires de l'entreprise décident de la politique de rémunération du dirigeant. De plus, la détection peut avoir lieu soit avec probabilité À avant le paiement du salaire au dirigeant soit avec probabilité 1 - À après ce paiement. Si aucune action illégale n'a été découverte au moment du paiement, l'entreprise ne peut, de ce fait, distinguer une conduite légale d'une conduite illégale qui ne serait pas détectée à temps. Les profits de l'entreprise dépendent de l'action exécutée par le dirigeant et de la politique de détection/sanction de l'État. Nous supposons que le profit de l'entreprise ne peut prendre que deux valeurs : H ou L avec H > L. L'action illé gale génère toujours un profit H pour la firme2 (avant la prise en compte d'une éventuelle amende). L'effort nul entraîne un profit H avec une probabilité p0 et un profit L avec une probabilité 1 - p0. L'effort élevé conduit à un profit H avec une probabilité pe et à un profit L avec une probabilité 1 - pe. Enfin, la firme comme le dirigeant sont supposés neutres au risque. Étant donné le risque de détection, nous pouvons représenter le jeu par l'arbre suivant : L'Agent choisit 1 - q Le principal peut observer trois signaux : soit un profit faible, soit un profit haut sans détection de fraude, soit un profit haut avec une détection d'action illicite, auquel cas il est donc amputé d'une amende. Le contrat optimal que la firme met en place peut donc spécifier un transfert dépendant de ces signaux, et on notera dans le même ordre que précédemment le vecteur de transfert sous la forme [í(l), í(H | O), i(H 11)] où 0 représente l'absence de détection et 1 la détection d'action illicite. Nous supposons que l'agent est protégé par une contrainte de responsabilité limitée (LL), qui peut s'expliquer par des arguments juridiques ou par les capacités de paiement limité du dirigeant3. De plus, l'agent 2. Nous supposons, pour clarifier l'exposition, que l'action illégale conduit toujours à un profit maximal, mais ce n'est pas essentiel pour nos résultats, qui sont qualitativement identiques si la probabilité d'obtenir le résultat H est suffisamment élevée en cas d'action illégale. 3. Deux cadres canoniques sont traditionnellement utilisés pour modéliser l'aléa moral : l'un dans lequel le cœur du problème contractuel est le partage de risque, l'autre dans lequel les contrac tants sont neutres au risque, mais la responsabilité limitée de l'agent crée des frictions contractuelles. Nous adoptons ce deuxième modèle parce qu'il permet de discuter de partage de rente, tandis que dans le premier type de modèle la rente de l'agent est toujours nulle. 460 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 6. s.c. Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monni est soumis à une contrainte de participation ex ante, mais, comme ell matiquement satisfaite sous la contrainte de responsabilité limitée, no l'ignorer. Finalement, le principal doit aussi satisfaire deux contraint tion, liées au fait que trois actions sont possibles. L'objectif du princip à minimiser le transfert espéré offert à l'agent. Ainsi, afin d'inciter l'ag un effort élevé, le programme de la firme est le suivant : r. w¥" , ,JV'(h|o) + (1 -pe) t(L) [í(l),í(h|o),í(h|i)]^ [0,0,0] (LL) pe • i(H 10) + (1 -pe) • î(l) - c >Po ■ /(H 10) + (1 -p Pe ' '(H I O) + (1 - pe) ■ i(L) — c > (l - hq) • í(H | O) + Ju? Nous supposons que, sans incitation, l'agent entreprend l'ef s'il pourrait dans ce cas choisir l'action illégale au même coût cipal incitera à l'effort nul en offrant une rémunération nulle i.e. [f(L), í(H I O), í(H 11 )] = [0,0,0]. Afin d'inciter à l'action paradoxe puisque, théoriquement, il suffirait d'offrir une rém signal le plus indicatif d'une action illégale : un profit haut av de fraude. Ainsi, il suffirait de poser í(H 11 ) = e > 0 et de la transferts nuls. Cependant, l'agent aurait alors intérêt à ce q soit détectée par l'État, ce qui ne serait alors pas dans l'intér Il semble donc réaliste d'inclure une contrainte du ty Sous cette hypothèse, l'action illicite est implémentée en fix D(l), '(H 10), í(H 11 )] = [O, e, e] avec e ~ 0. Les transferts éta petits, on peut donc considérer que l'action illégale comme l'ef être obtenus à un coût quasi nul. Seul le contrat qui cherche à haut est non trivial. PROPOSITION 1. Le contrat optimal afin d'inciter à l'effort -Si 9>^a:f(L) = 0;/(H|0) = -^-;i(H|l) = 0 . Sinoa,,(L) = ; ,(„ | 0) = fifi î(h|i) = 0. Preuve. Tout d'abord, nous pouvons remarquer que í(H 11 ) n'apparaît que dans le membre droit de la seconde contrainte d'incitation du programme précédent ; ceci implique que nous étendons le domaine réalisable en fixant í(H 11 ) minimal et donc égal à zéro. La première contrainte d'incitation s'écrit alors : f(H |o) - î(l) > ^ C_^ . Ce résultat classique définit le surplus de transfert nécessaire pour inciter l'agent à l'effort haut à la place de l'effort nul. La seconde contrainte s'écrit : (pe + Xq — 1 ) ■ /(H | o) + (1 — pe) ■ f(L) > c. Il s'agit donc de résoudre un programme linéaire dépendant des variables î(l) et i(H|o). 461 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 7. Revue économique Lorsque Xq^ 1 — p0 il est facile de montrer que la première contrainte implique la seconde contrainte, car pe + Xq - 1 > pe - p0. La solution est donc c de fixer î(l) = 0, d'où tÍH 11 ) = w y 1 ' Pe~Po Supposons Xq < 1 - pe. Comme c > 0, la seconde î(l) > 0 et les deux contraintes sont saturées. Le syst alors : 1 -Po'Xg c 1 ~Po [/(L),/(H|0)] = Xq Pe~Po Xq pe-p0 Supposons 1 —pe < Xq < 1 ~p0. La solution précédente reste r il existe un unique autre sommet réalisable dans le polyèdre convex /(l) = 0 et la seconde contrainte saturée, soit /(H 10) = — + ^ alors de comparer le transfert espéré à ces deux sommets pour mo premier coûte moins cher au principal. On obtient donc la même s tout Xq ^ 1 — p0. ■ Il est assez intuitif que le salaire dépende ainsi de Xq, la probabil tion de fraude ex ante au paiement. En effet, puisque í(H 11) = 0, le ramené à un problème classique à deux efforts lorsque la probabilité est suffisamment élevée : l'action illicite est de fait coûteuse pour l espérance de paiement pour cette action décroît avec Xq. Au contra faible, rémunérer t( 10) va inciter l'agent à l'action illégale pui détecte que rarement la fraude. Il faut donc rémunérer l'agent, mê profit est faible, puisque cela indique de façon univoque que ce n'es illicite qui a été entreprise4. Puisque la différence de transfert d rester suffisamment élevée pour proscrire l'effort nul, le transfert plus élevé lorsque le profit est H. Le point central illustré par la pr ainsi que la possibilité de choisir une voie illégale pour atteindre des rend les incitations à l'effort plus coûteuses pour le principal. Nous supposerons dorénavant que c < (H - L) pe ~p0f / pe existent À et q tels que l'effort haut soit préféré à l'effort nul. Le pr pal peut alors être calculé en fonction de l'action entreprise. Nous q* la probabilité de détection telle que les profits de l'action nulle e soient égaux ; q la probabilité telle que les profits de l'action i l'effort soient égaux et enfin q la probabilité qui égalise les profits illégale et nulle. PROPOSITION 2. Si q e q ; q* le principal mettra en place le sa tant à l'action nulle5 et son profit est : IIp = L + p0 ■ (H — L). Si q < Min[q* ; q ; q ou si q G q* ; q le principal mettra en pla incitant à l'action illégale et H p = H — — s. 4. Ce résultat reste valide du moment que l'action illégale génère - hors amende haut suffisamment souvent (voir la discussion dans la note 6). 5. Si l'intervalle n'est pas défini, l'action nulle n'est jamais entreprise. 462 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 8. Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier Si q > Max[q* ; q] le principal mettra en place le salaire incitant à l'effort e « np = L + (H - L) - ^ , - {'(;^} c. Preuve. Les profits espérés du principal correspondent au profit espéré de la firme diminué du coût salarial de l'agent. Des calculs simples (épargnés au lecteur) donnent les valeurs suivantes : ,= (! ~Po) c - _ (l — Po)(H — L) q M/,e_A>)2(H~L) + (1 -Pe)^C' q F enfin en posant a = (l — pe) H-L- C -Po nous obtenons : q = -pAfax / 2_l. a<$ 1 'POa + . / a2 + 4 A Pe~Po ;a + 'Po On peut alors démontrer que soit q ^q <¡q* soit q* < q < q, ce qui permet d'en déduire l'action optimale implémentée par le principal en fonction de q. ■ Dans la figure 1, nous supposons q* < q < q < —< 1. Ainsi, si q < q la firme incite à l'action illégale, sinon l'effort haut est entre pris. La pente de la droite définissant l'action illégale dépend typiquement du montant de l'amende. Si cette dernière croise l'axe des abscisses avant q= 1, comme c'est le cas sur notre figure, cela signifie que l'entreprise n'a pas de responsabilité limitée (elle peut faire un profit négatif suite à l'amende). Ceci Figure 1. Profit du principal et rente de l'agent en fonction de l'action entreprise Profit de I'entreprise Action illegale L + (H - L)p0 463 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 9. Revue économique n'est en rien limitatif puisque si H/F est supérieur à 1, les trois cas présentés dans la proposition 2 restent possibles si les profits H et L sont suffisamment élevés. La rente espérée de l'agent est toujours nulle pour toute action autre que l'effort haut et elle est représentée par la hauteur dans la zone noire ; le profit espéré du principal est représenté par la hauteur dans la zone grise. On remarque que si H/F est plus faible et que la droite définissant l'action illégale coupe la droite représentant l'effort nul avant q*, alors en fonction de q les trois actions peuvent être entreprises. Dans ce cas, on remarque notamment que, lorsque q < q*, il n'est plus dans l'intérêt du principal d'inciter l'agent à l'effort haut. DISCUSSION L'usage des stock-options et des actions gratuites Le schéma incitatif optimal de la proposition 1 peut être relié à la forme des contrats observés en réalité. Dans les deux cas identifiés, il peut correspondre à des stock-options. Cependant, le contrat optimal étant tel que /(H 11 ) = 0, ceci implique que l'entreprise doit pouvoir retirer les options en cas de détection de fraude6. Lorsque t(L) = 0 et /(H |o) > 0, il s'agit de distribuer des options avec un prix d'exercice élevé, qui ne paieront que si le résultat haut est atteint. En revanche, t(L) > 0 correspond à des stock-options avec un prix d'exercice faible, qui rapportent toujours une rente au dirigeant même en cas de mauvais résultat de l'entreprise. C'est en particulier ces dernières qui sont critiquées, puisque le dirigeant « gagne à tous les coups ». Une manière alternative d'induire l'effort haut dans de telles circonstances consiste à donner des actions gratuites au dirigeant. Cependant, on peut remarquer que l'usage de stock-options ou d'ac tions gratuites introduit un nouveau levier dans le paiement. En effet, lorsque À est différent de 1, le salaire versé par la firme via le contrat optimal ne peut prendre en compte la possibilité de détection ex post au paiement. En utilisant des stock-options ou des actions gratuites, l'exercice de ces options ou la revente des actions fait implicitement intervenir un troisième acteur : un investisseur potentiel. Si cet investisseur est suffisamment informé, il peut anticiper l'action d'équilibre du dirigeant, et le risque de détection ex post sera alors reflété dans le prix de l'action. Dans ce cas, la question d'une détection avant ou après le paiement ne se pose plus. Ce contrôle externe du marché financier a pour effet d'augmenter le À de notre modèle. À qui profite l'impunité ? Si les sanctions qui pèsent sur l'entreprise sont suffisamment dissuasives mais que la probabilité de détection est insuffisante, les actionnaires devront davan tage rémunérer leurs dirigeants afin qu'ils ne commettent pas d'action illicite. 6. Ce type de condition restitutive existe, par exemple, dans le Dodd-FrankAct de 2010 et peut s'appliquer pour le cas de fraude comptable. 464 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 10. Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier Aubert, Rey et Kovacic [2006] ont mis en évidence les coûts sociaux associés à la lutte contre les cartels (découlant notamment des programmes récompensant les délateurs des cartels). Plus généralement, ils se rapportent aux coûts privés liés au contrôle du comportement des employés par les entreprises (voir Alexan der et Cohen [1999]). Nous montrons qu'outre ces coûts, la possibilité de frauder implique un coût salarial. En effet, au-delà d'un niveau minimal de probabilité de détection, la rente cédée par l'actionnaire au dirigeant pour éviter qu'il ne choisisse l'action illicite augmente à mesure que la probabilité se réduit. Certaines des fraudes réalisées nuisibles à l'entreprise proviennent probable ment d'une mauvaise prise en compte de ce risque de comportement illicite dans le schéma de rémunération. En revanche, dans le cas où les amendes ne sont pas dissuasives7, les actionnaires ont intérêt à ce que leurs agents enfreignent la réglementation. Certains dirigeants pourraient agir dans l'intérêt de la firme en fraudant, et ils seraient de ce fait récompensés (même en cas de détection) par les actionnaires. Ce cas de figure semble s'être déjà présenté dans la réalité. Ainsi, Stephan [2011] souligne que l'un des dirigeants de British Airways impliqué dans l'organisation d'un cartel a été promu alors qu'il était poursuivi pénale ment pour son implication dans cette collusion. Il met aussi en évidence que de nombreux managers condamnés à des peines de prison aux États-Unis, pour avoir participé à des cartels, retrouvent avec facilité un emploi de grande qualité. Les instruments de la politique publique Dans la littérature dérivée de Becker-Landes, la probabilité de détection et l'amende moyenne sont deux leviers substituables de la politique publique à partir du moment où l'amende est suffisamment élevée. Ainsi, la détection des fraudes et leur répression étant coûteuses, il conviendrait de privilégier une hausse des amendes au détriment d'un renforcement de la détection. Toutefois, Polinsky et Shavell [1979] montrent que si les agents sont averses au risque, fixer une faible probabilité de détection assortie d'une forte amende moyenne n'est pas la solution optimale. Il existe de nombreuses limites à la théorie de la sanction optimale. D'abord, une politique qui consisterait à imposer de lourdes amendes associées à une faible probabilité de détection s'opposerait au principe de proportionnalité des peines, principe général de droit communautaire. De plus, la théorie de l'amende optimale se trouve limitée par la capacité contribu tive des entreprises qui ne seraient pas en mesure de s'acquitter de cette amende élevée. Selon Garoupa [2001], si les agents ont des ressources modestes, l'effet dissuasif des amendes est faible et les pouvoirs publics investiront peu dans la détection. Enfin, ce sont les estimations subjectives de l'espérance de gain qui importent et non leur niveau effectif : Wils [2008] considère qu'infliger de lourdes amendes, assorties d'une faible probabilité de détection, se heurte à un effet de mémoire (en cas de probabilité faible, les individus vont oublier que ces pratiques sont interdites). Les conclusions de notre modèle plaident aussi pour une probabilité de détec tion élevée puisque les deux leviers de politique publique ne sont pas simplement 7. Par exemple, Combe et Monnier [2011] mettent en évidence que les amendes infligées en Europe à l'encontre des cartels ne sont pas dissuasives. 465 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 11. Revue économique substituables dans notre cadre. Remarquons cependant que le coût de prévention de la fraude est supporté principalement par l'autorité publique si la détection est élevée, et par les actionnaires via un coût salarial plus important sinon. De plus, dès que l'amende est suffisamment élevée, l'actionnaire a intérêt à collaborer avec les autorités publiques afin de renforcer la détection des fraudes. Cela peut le conduire à développer des mécanismes de surveillance interne, tels que les programmes de conformité. Notre modèle se fonde sur un régime de respon sabilité limité à l'entreprise, ou d'un transfert de responsabilité ex post sur le dirigeant (pas de paiement en cas de fraude). La possibilité de poursuivre au pénal les dirigeants coupables de fraude permettrait aussi de réaligner l'intérêt du dirigeant sur celui des pouvoirs publics sans entraver le mécanisme incitatif interne à l'entreprise. CONCLUSION Nous avons illustré, dans un modèle canonique d'agence, comment la poli tique de lutte contre la fraude d'entreprise structurait la relation d'incitation entre les actionnaires et les dirigeants d'une entreprise. En effet, nous montrons que l'imperfection de détection de la fraude plus que le niveau des amendes permet aux dirigeants d'extraire des rentes importantes. Cela se manifeste en particulier par des stock-options à prix d'exercice faible. De façon générale, deux conditions sont nécessaires pour que l'usage de stock-options ne soit pas problématique : premièrement, des clauses suspensives sont essentielles pour garantir l'efficience de la relation contractuelle ; deuxièmement, la politique publique doit intégrer les effets complexes que nous avons soulignés dans la double relation d'agence. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Alexander C.R. et Cohen M.A. [1999], « Why do corporations become criminals? Ownership, hidden actions, and crime as an agency cost », Journal of Corporate Finance, 5, p. 1-34. Arlen J. et kraakman R. [1997], « Controlling Corporate Misconduct: An Analysis of Corporate Liability Regimes », New York University Law Review, 72, p. 687-779. Arlen J., [1999], « Corporate crime and its control », dans Newman P. (dir.), New Palgrave Dictionary of Economics and the Law, London, Macmillan Reference Limited, p. 492-496. Aubert C., Rey P. et kovacic W. [2006], « The Impact of Leniency Programs On Cartels », International Journal of Industrial Organization, 24 (6), 1241-1266. Albert C. [2009], « Managerial Effort Incentives and Market Collusion », tse Working Paper, n° 09-127, Toulouse School of Economics. bebchuk L.A. et FRIED J.M. [2003], « Executive Compensation as an Agency Problem », Journal of Economic Perspectives, 17 (3), p. 71-92. Becker G. [1968], « Crime and Punishment: an economic approach », Journal of Political Economy, 76 (2), p. 169-217. Cohen M.A. [1996], « Theories of punishment and empirical trends in corporate criminal sanctions », Managerial and Decision Economics, 17, p. 399-411. 466 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms
  • 12. Pierre Fleckinger, Thierry Lafay, Constance Monnier Combe E. et Monnier C. [2011], « Fines against hard core cartels in Europe: The myth of over enforcement », Antitrust Bulletin, 56, p. 235-275. Garoupa N. [2000], « Corporate Criminal Law and Organization Incentives: A Manage rial Perspective », Managerial and Decision Economics, 21 (6), p. 243-252. Garoupa N. [2001], « Optimal magnitude and probability of fines », European Econo mic Review, 45 (9), p. 1765-1771. Jensen M.C. et Meckling W.H. [1976], « Theory of the firm: Managerial Behaviour, Agency Costs and Ownership Structure », Journal of Financial Economics, 3 (4), p. 305-360. LANDES W.M. [1983], « Optimal sanctions for antitrust violations », The University of Chicago Law Review, 50 (2), p. 652-678. PENG L. et ROel A. [2008], « Manipulation and equity based compensation », American Economic Review, 98 (2), p. 285-290. POLINSKY A.M. et Shavell S. [1979], « The Optimal Tradeoff between the Probability and Magnitude of Fines », The American Economic Review, 69 (5), p. 880-891. Polinsky A.M. et Shavell S. [2000], « The economic theory of public enforcement of the law », Journal of Economic Literature, 38, p. 45-76. Robinson H.D. et Santore R. [2010], « Managerial Incentives, Fraud, and Monito ring », Available at SSRN : http ://ssrn.com/abstract=770924. spagnolo G. [2000], « Stock-related compensation and product-market competition », Rand Journal of Economics, 31 (1), p. 22-42. Stephan A. [2011 ], « Disqualification Orders for Directors Involved in Cartels », Journal of European Competition Law and Practice, 2 (6), p. 529-536. WiLS W. [2008], « Efficiency and Justice in European Antitrust Enforcement », Oxford et Portland (Oregon), Hart Publishing. 467 Revue économique - vol. 64, N° 3, mai 2013, p. 457-468 This content downloaded from 196.200.165.13 on Sat, 01 Apr 2017 22:39:29 UTC All use subject to http://about.jstor.org/terms