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Préconstruction
Études préliminaires Toutes études en vue de l’installation des campements de travail
et des équipements du projet. Ceci implique le déplacement
de la machinerie et la prise d’échantillons.
Arpentage Localiser les composantes et baliser la zone des travaux par la pose
d’une signalisation appropriée.
Acquisition des emprises Négociation pour acquérir l’emprise (achat) ou pour obtenir un droit
de passage (entente sur la valeur foncière).
Installation de chantier La localisation du matériel servant à la construction des installations doit
faire l’objet d’une attention particulière.
Construction
Transport et circulation Déplacement de la machinerie et des employés pour la construction
des équipements dans l’emprise et à proximité.
Excavation, forage Tout ce qui touche le creusage du sol et la pose des équipements.
et dynamitage Identification des façons de faire selon le type de fondation et de sols.
Bâtiments et équipements L’endroit où seront installés les bâtiments et l’entreposage des matériaux
durant les travaux de construction.
Réaménagement des aires Réaménagement des milieux ayant subi divers impacts liés aux activités
de travaux énumérées précédemment.
Exploitation
Transport et circulation La réparation des équipements et l’entretien impliquent une circulation
à proximité des installations.
Présence physique La présence des installations ainsi que leur fonctionnement engendrent
des installations une série d’impacts: nuisance visuelle, olfactive, etc.
Gestion des déchets Transport des déchets solides, liquides ou dangereux vers des lieux
et des eaux usées d’élimination prévus à cet effet. Les eaux usées doivent être envoyées
à une usine de traitement.
Sécurité et intervention Il faut prévoir des aires sécuritaires d’entreposage pour les produits
d’urgence contaminants ou dangereux provenant de l’exploitation ainsi que la mise
en place de plans d’urgence advenant le déversement de produits
dangereux. Ces plans doivent être connus des intervenants.
158
L’évaluation des impacts environnementaux
compte tenu des moyens et des ressources limités, ne semble toutefois pas être tou-
jours observé.
De plus, une attention spéciale doit être accordée aux éléments environnemen-
taux valorisés, peu importe les raisons de cette valorisation (scientifique, législative
ou populaire) ou leur provenance (type d’acteurs), ainsi qu’aux éléments particu-
lièrement sensibles de l’environnement. Cette opération est bien sûr en rapport direct
avec les enjeux environnementaux déterminés lors de l’étude préliminaire du contexte
général.
Figure 4.8
Liste de sources d’impacts potentiels, selon les phases d’un projet
Sources d’impacts Description de l’activité
159
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
La première étape de l’identification des éléments consiste à décrire globalement
le milieu d’implantation. Après avoir délimité l’espace de référence, il s’agit d’effec-
tuer une rapide caractérisation du milieu ainsi délimité. Essentiellement, il s’agit de
souligner les éléments environnementaux valorisés ou de grande importance.Ensuite,
l’étude portera uniquement sur les éléments qui seront éventuellement touchés par
la réalisation du projet. Cette deuxième étape examinera alors de manière plus
attentive les éléments environnementaux ainsi sélectionnés. En ce qui concerne les
autres, notamment ceux valorisés, il s’agit de préciser qu’ils ne seront pas affectés par
le projet.
L’identification des divers éléments de l’environnement implique une subdivi-
sion ou, à l’inverse, un regroupement plus ou moins important des éléments sélec-
tionnés. Il existe toujours une certaine forme d’agrégation des éléments; il est inutile,
voire impossible,d’examiner chacune des espèces d’un écosystème complexe.La sélec-
tion s’intéresse autant aux éléments des milieux biophysiques qu’à ceux des milieux
humains de l’environnement, selon la portée accordée au concept d’environnement
par la législation en vigueur.
Comme pour la détermination des activités afférentes au projet, l’identification
des éléments de l’environnement peut s’effectuer à partir de l’expérience de spécia-
listes du milieu, ainsi qu’à l’aide de listes de contrôle réalisées à cet effet. Ces dernières
énumèrent souvent les divers éléments environnementaux potentiellement atteints
par la réalisation d’un type de projet ou pour un écosystème particulier. Un exemple
d’une telle liste est fourni à la figure 4.9. Dans l’exemple présenté ici, les 41 éléments
qui la composent touchent tous les domaines d’une conception large de l’environ-
nement.
Les listes disponibles, parfois à caractère très général, doivent être adaptées aux
composantes particulières du milieu concerné. Cependant, les grands groupes d’élé-
ments environnementaux demeurent presque partout semblables; seule la caracté-
risation du milieu pourra déterminer les éléments présents. Nous verrons plusieurs
de ces aide-mémoire au cours du chapitre suivant; ils constituent bien souvent l’un
des axes des matrices utilisées en ÉIE. Différentes listes des éléments peuvent être dres-
sées selon le contexte particulier d’implantation du projet à l’étude. Selon le cas, les
listes sont plus ou moins exhaustives et pertinentes pour l’objet d’étude. La célèbre
liste de Léopold, par exemple, que nous verrons au cours du prochain chapitre, est
un peu plus exhaustive; elle contient 86 éléments de l’environnement plus ou moins
amalgamés.
160
L’évaluation des impacts environnementaux
Interaction activités/éléments environnementaux
À partir de l’identification des activités du projet et des éléments environnementaux,
il ne s’agit plus maintenant que de noter les possibles interactions entre eux. Cet exer-
cice permet de souligner les seuls effets ou impacts appréhendés du projet envisagé.
Il permet aussi de montrer les liens de cause à effet entre les activités du projet et les
éléments de l’environnement. En pratique, cette opération représente une première
approximation, mais tout de même assez juste, des impacts du projet.
Cette opération de mise en évidence des interactions ne peut se faire qu’en étroite
relation avec les deux opérations précédentes; elle pourrait même se confondre avec
celle de l’identification des éléments de l’environnement. En effet, l’identification des
interactions s’effectue dans une démarche itérative avec l’identification des activités
et celle des éléments. On peut difficilement dissocier ces trois opérations distinctes
les unes des autres. Les choix effectués à partir de la définition ou de l’élaboration
des problèmes relatifs à chacune de ces trois opérations interagissent avec celles des
Figure 4.9
Liste de contrôle d’éléments de l’environnement
Paramètres physicochimiques
Paramètres microbiologiques
Ruissellement/Infiltration/Perméabilité
Régime hydrodynamique
Régime morphosédimentologique
Qualité du sol/Pédologie
Modelé du terrain/Géomorphologie
Caractéristiques d’ingénierie du sol
Physicochimique
Matières particulaires et en suspension
Température/Ensoleillement
Évapotranspiration/Évaporation/Humidité
Précipitations
Vents
Odeurs
Bruits/Vibrations
Structure/Densité/Composition
Productivité/Succession
Espèces rares ou menacées
Habitat
Ressources énergétiques et matérielles
Biodiversité
Agricole, forestier et pastorale
Zone touristique et de loisir
Site archéologique, historique ou rituel
Site à accès contrôlé
Zone urbaine/préurbaine
Migration/Nomadisme
Coutumes/Traditions
Démographie
Potabilité/Disponibilité de l’eau
Santé
Protection civile/Taux d’accidents
Emploi/Revenus
Circulation
Équipements collectifs
Coûts des services
Développement local
Caractéristique du paysage
Confort public et bien-être
Services collectifs
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
161
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
autres. Ainsi, le fait de déterminer une activité perturbatrice permet généralement
d’anticiper les éléments de l’environnement qui seront touchés.
L’identification des interactions est facilitée par l’utilisation de matrices ou de réseaux
d’interactions. Ces deux derniers outils d’analyse seront étudiés dans le prochain cha-
pitre. Toutefois, nous présentons, à la figure 4.10, une section d’une matrice des inter-
actions que nous avons employée récemment dans le cadre d’un projet d’adduction
d’eau potable au Maroc. Il s’agit d’un exemple d’interaction entre les activités et les
éléments de l’environnement, les interactions indiquées dans cet exemple étant
purement hypothétiques et ne servant qu’à illustrer le principe de fonctionnement.
L’exemple montre qu’il existe une interaction entre l’acquisition des emprises et l’hy-
drologie des cours d’eau, ainsi que les eaux souterraines qui seront affectées par trois
activités différentes reliées uniquement à l’aménagement des sites durant la phase de
construction. La présentation matricielle ne permet toutefois pas toujours de noter
toutes les interactions, notamment les interactions indirectes, secondaires et, surtout,
les actions cumulatives.
Identification des effets/impacts environnementaux
La distinction entre l’identification des effets et des impacts environnementaux et celle
des interactions est bien subtile, voire, dans certains cas, superflue. Cependant,
l’identification des effets/impacts permet bien souvent de réaliser une véritable énu-
mération des impacts significatifs et donc des interactions indispensables. La simple
analyse matricielle des interactions, par exemple, ne représente parfois qu’une pre-
mière approximation. Le relevé détaillé des effets/impacts permet par contre d’éli-
miner les interactions à incidences négligeables sur l’environnement; une première
sélection est donc effectuée. Par ailleurs, les impacts secondaires, indirects et cumu-
latifs, que nous examinerons après, ne peuvent être soulignés par cette seule mise en
évidence des interactions; il faut donc aller au-delà de cette opération.
Il n’est sans doute pas toujours nécessaire de pouvoir distinguer les effets des impacts
environnementaux. Dans certains cas, confondre les deux n’entraîne pas de consé-
quences importantes pour l’examen.Toutefois,cette distinction peut s’avérer fort utile
dans l’estimation des véritables conséquences environnementales d’un projet, bien
que son importance puisse paraître parfois négligeable, de prime abord. Ainsi, dans
le cas d’émissions atmosphériques nocives, il s’agit d’un effet; ce qui importe avant
tout, c’est de déterminer les conséquences sur les divers éléments de l’environnement,
c’est-à-dire les impacts mêmes des émissions. Dans ce cas, l’identification élémen-
taire des effets, à savoir les gaz émis, n’est pas suffisante afin de noter et par la suite
d’évaluer l’impact environnemental. L’identification des conséquences de ces effets
162
L’évaluation des impacts environnementaux
sur les éléments de l’environnement peut seule déterminer avec précision les impacts
potentiels du projet en question. Il faut ainsi parcourir les diverses chaînes causales
menant des activités aux effets et inévitablement aux impacts. Cette opération intro-
duit bien entendu les deux paramètres suivants: l’identification des impacts indirects
et celle des impacts cumulatifs.
En ce qui a trait aux impacts environnementaux, on peut en distinguer plusieurs.
Cette typologie de l’impact est déterminée par le degré d’exactitude ou de certitude
avec lequel nous pouvons les apprécier. Cela repose bien sûr sur l’état de nos connais-
sances, mais aussi sur le moment auquel s’effectue l’examen. Le schéma de la
Figure 4.10
Modèle simplifié de matrice des interactions potentielles
utilisant une cotation simple
A
Cours d’eau
Légende
Impacts négatifs
Impacts positifs
Eaux souterraines
Qualité des eaux
Régime hydrodynamique
Ruissellement/infiltration/bilan
Forme et relief
Nature des dépôts
Qualité de l’air et odeurs
Bruits/vibrations
Faune terrestre, aquatique et avienne
Flore terrestre et aquatique
Écosystème
B
C
D
E
F
G
H
I
J
K
L
Modification
de
tracés
et
de
routes
Dragage
et
travaux
maritimes
Excavation,
forage
et
creusage
Aménagement
des sites
Installation
de
chantiers
Déboisement
et
reboisement
Acquisition
des
emprises
Études
et
aménagements
préléminaires
7
6
5
4
3
2
1
MILIEU
BIOPHYSIQUE
ÉLÉMENTS ENVIRONNEMENTAUX
ACTIVITÉS
DU
PROJET
CONSTRUCTION
163
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
figure 4.11 expose les divers types d’impacts et leurs rapports à la phase d’étude ainsi
que le degré de précision ou de certitude de la connaissance de l’impact. En ordre
croissant d’exactitude, ce peut être des impacts appréhendés, des impacts potentiels,
des impacts résiduels ou des impacts réels. Au fur et à mesure que l’examen avance,
la mesure de l’impact se précise, passant de l’anticipation à la réalité.
Figure 4.11
Phases de l’examen, types d’impacts possibles
et degré de certitude des prédictions
Phase
DE CONTRÔLE
Phase
D’ÉVALUATION
Phase
D’IDENTIFICATION
Mesure
d’atténuation
Degré de certitude de l’estimation
IMPACT
APPRÉHENDÉ
IMPACT
POTENTIEL
IMPACT
RÉSIDUEL
IMPACT
RÉEL
Ce n’est toutefois qu’à la suite d’un examen de suivi postprojet, une opération
rarissime en ÉIE jusqu’à maintenant,que les impacts réels pourront être mesurés,vali-
dant ou non les évaluations antérieures.
La probabilité qu’un impact ou qu’un effet se produise tel que présenté dans l’étude
dépend fortement de la précision avec laquelle ces paramètres ont été évalués.On peut
délimiter quatre catégories pour décrire la probabilité d’une estimation: avec certi-
tude, forte probabilité, probabilité moyenne ou faible probabilité (Davies et Sadler,
1990). Bien entendu, pour un même impact la probabilité devrait être croissante dans
le temps, comme nous venons de le voir. Toutefois, l’un des plus grands défis métho-
dologiques de l’estimation avec certitude de l’impact réside dans l’impossibilité
d’établir des liens de cause à effet de manière rigoureuse dans la plupart des cas (idem).
Comme pour l’identification des interactions, celle des effets et des impacts envi-
ronnementaux peut se faire soit à l’aide de listes de contrôle des impacts environ-
nementaux appréhendés,préétablies ou non,soit avec l’emploi de matrice et de réseau,
ce qui est préférable, soit finalement à l’aide de toute autre méthode d’identification.
164
L’évaluation des impacts environnementaux
Relevé des impacts indirects et secondaires
Le relevé des impacts environnementaux signifie la prise en compte de toute la chaîne
d’interactions entre les activités du projet et les éléments du milieu.L’étude doit porter
sur l’enchaînement des incidences, de l’événement initial jusqu’à son terme ultime.
Toutes les modifications significatives d’un élément de l’environnement deviennent
dès lors objet d’étude. Il ne s’agit donc pas de limiter l’étude aux seuls impacts directs,
les plus facilement repérables, parce qu’étant initialement observables. Les impacts
indirects et secondaires doivent être pris en compte au même titre que les impacts
directs.
Il est parfois malaisé, et pas nécessairement utile, de distinguer les impacts indi-
rects des impacts secondaires. Cette distinction n’est d’ailleurs pas toujours observée.
Les impacts indirects seraient issus de l’interaction entre un premier impact et un
second élément de l’environnement. Nous avons ici affaire à une relation impact-
éléments. L’impact secondaire, quant à lui, serait plutôt le résultat de l’incidence d’un
premier élément affecté par une activité quelconque sur un second élément initia-
lement non perturbé par cette activité. Il s’agit donc là d’une interaction élément-
élément. On pourrait aussi faire intervenir des impacts tertiaires, et ainsi de suite.
Par ailleurs, les distinctions entre impacts directs et indirects sont parfois confon-
dues avec celles existant, comme nous l’avons vu précédemment, entre les effets et
les impacts environnementaux. Plus les efforts de l’examen porteront sur les impacts,
à l’encontre du seul relevé des effets, moins la nécessité d’étudier les impacts indi-
rects et secondaires se fera pressante. Parmi les méthodes employées en évaluation
environnementale,seules certaines permettent vraiment une prise en compte des impacts
indirects et secondaires; ce sont habituellement les approches dites en réseaux ou en
diagrammes, que nous verrons au chapitre suivant.
Relevé des impacts cumulatifs
Le relevé des impacts cumulatifs est une procédure plutôt exceptionnelle dans les éva-
luations couramment réalisées jusqu’ici.Toutefois,leur prise en compte dans la démarche
d’étude est une des grandes préoccupations actuelles et deviendra sans doute éven-
tuellement l’un des aspects primordiaux de tout examen d’évaluation d’impacts.
Il y a plusieurs définitions de ce que pourrait être un impact cumulatif; tous les
auteurs ne s’accordent pas et proposent des définitions souvent très distinctes.Ainsi,
l’impact cumulatif peut être le cumul de plusieurs impacts sur le même élément de
l’environnement, c’est-à-dire de la part de diverses activités d’un même projet. Il peut
165
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
s’agir alors d’un effet synergique, l’ampleur de l’impact résultant étant alors bien plus
qu’une simple addition. De tels impacts pourraient être dénommés «impacts syner-
giques», et non plus «impacts cumulatifs». Habituellement, l’impact cumulatif fait
plutôt référence à l’accumulation d’impacts similaires sur un même élément de l’en-
vironnement, mais en provenance de différents projets. Dans ce cas, l’impact initial
se trouve amplifié en conséquence du nombre de projets affectant l’élément de l’en-
vironnement.
La prise en compte de l’aspect cumulatif des impacts signifie un examen plus com-
plet que la pratique usuelle le recommandait jusqu’à tout récemment. Elle représente
ainsi une charge plus lourde pour l’ÉIE, tant pour les promoteurs que pour les éva-
luateurs d’un projet. D’une part, l’étude des autres projets, ceux déjà réalisés ainsi que
ceux à venir, oblige un mandat d’étude plus étendu et un examen plus long et par-
fois indéfini. D’autre part, la connaissance plus poussée des interactions entre les acti-
vités d’un projet ainsi qu’entre les divers impacts et éléments environnementaux engage
des moyens et des ressources souvent considérables.Dans le cas de la présence d’autres
projets, les obligations et les responsabilités des promoteurs vont en s’accentuant dans
le temps. Voilà qui a pour première conséquence de diminuer d’autant la marge de
manœuvre du dernier arrivé. Les autorités de contrôle ne déterminent pas toujours
les limites à observer, d’autant plus que certains projets outrepassent leur propre juri-
diction.
La délimitation des nombreux domaines de référence possibles dans le cas de
l’examen des impacts cumulatifs pose de sérieux problèmes. Ainsi, la zone d’étude
s’agrandit selon les exigences du nouveau contexte d’examen.Des considérations simi-
laires s’appliquent aussi en ce qui concerne la délimitation de l’horizon et des états
de référence. Ces facteurs ont bien sûr une grande incidence sur l’ampleur même des
impacts.La figure 4.12 montre la variation type des états de référence possibles lorsqu’il
y a prise en compte de deux projets.
La mise en évidence de certains impacts significatifs, autrement occultés, est l’une
des propriétés essentielles d’une analyse de l’impact cumulatif. En effet, une activité
unique ou un impact isolé pourrait n’avoir qu’un impact négligeable sur l’environ-
nement, mais l’effet synergique ou d’accumulation, dans le cas d’un même projet ou
de plusieurs, pourrait alors constituer un impact significatif et important sur un ou
certains éléments de l’environnement.
Compte tenu de ce que nous venons de dire et de la situation actuelle des pro-
cédures d’ÉIE, seule la planification environnementale ou l’élargissement de la
démarche usuelle de l’ÉIE,par un examen stratégique,régional ou sectoriel,par exemple,
166
L’évaluation des impacts environnementaux
pourrait systématiquement
tenir compte de l’aspect
cumulatif de l’impact envi-
ronnemental. En effet, cet
aspect important de l’éva-
luation d’impacts est rare-
ment pris en compte de
façon complète par les
études actuelles d’ÉIE,
notamment parce que la
pratique courante ne repré-
sente presque toujours que
l’examen d’un seul projet à
la fois. L’examen à un palier
supérieur à celui de projet,
l’évaluation stratégique,notamment,pourrait donc permettre une meilleure évaluation
des impacts cumulatifs.
Descripteurs d’impacts (indicateurs)
Les descripteurs ou indicateurs d’impacts représentent les outils de mesure des élé-
ments ou des paramètres environnementaux à partir de méthodes spécifiques. Ces
méthodes, non particulières à l’ÉIE, regroupent l’ensemble des méthodes standar-
disées des diverses disciplines scientifiques, tant en sciences physiques qu’en sciences
humaines.Ce sont,par exemple,l’évaluation (identification et quantification) des émis-
sions et de la dispersion du SO2 en ce qui concerne la qualité de l’air, des paramètres
physicochimiques de l’eau, ou la mesure des incidences sociales, psychologiques (qua-
lification) ou économiques sur une population donnée.
Les descripteurs d’impacts fournissent tout d’abord la mesure de l’état actuel des
éléments de l’environnement. Ils permettent ensuite l’estimation des agressions
résultant de la mise en place des diverses activités et composantes du projet sur les
éléments du milieu.
Les méthodes d’analyse des descripteurs font appel aux protocoles d’étude des
diverses disciplines scientifiques,mais plus particulièrement des sciences biophysiques.
Les sciences humaines étant moins explicites sur cet aspect, elles sont conséquem-
ment moins précises dans l’étude rigoureuse des impacts humains de l’ÉIE.
Figure 4.12
États de référence, impacts environnementaux
et impacts cumulatifs
État de référence sans projet
État de référence avec le projet 3
Évolution temporelle du système
Qualité
du
système
–
+
Projet 1
Projet 2
167
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
La profondeur (degré de détails) et l’étendue du champ d’étude des descripteurs
doivent être conséquentes avec l’objet d’étude, les moyens et les ressources de
l’équipe,mais elles doivent permettre néanmoins une connaissance suffisante des phé-
nomènes en cause afin d’identifier et d’évaluer correctement les impacts environne-
mentaux potentiels.
Nous traiterons de manière beaucoup plus détaillée des descripteurs d’impacts
dans le chapitre six.
Estimation des modifications résultantes
L’estimation des modifications résultantes représente en fait une étape intermédiaire
et habituellement indissociable entre l’identification et l’évaluation de l’impact.Il s’agit
ici de prédire,avec le plus de justesse possible,la nature et l’ampleur des impacts appré-
hendés.En pratique,l’estimation consiste à prédire les modifications anticipées,à l’aide
des données fournies par les descripteurs et grâce à des projections dans l’avenir immé-
diat ou futur. L’estimation repose sur notre connaissance des tendances d’évolution
des éléments de l’environnement. La dynamique des éléments en cause est généra-
lement plus significative qu’une image statique de l’état de la situation présente. Elle
requiert toutefois une compréhension plus complète de l’environnement que celle
dont disposent ordinairement les évaluateurs en début d’étude. Il s’agit bien sûr d’une
opération qui ne s’appuie bien souvent que sur des données incomplètes, partielles
ou hautement hypothétiques.
Toute prédiction des modifications anticipées engendre son propre degré d’im-
précision. L’incertitude entourant les connaissances du milieu concerné, les risques
de variations imprévisibles et l’élaboration de prospectives à partir d’états initiaux
incertains ne permettent conséquemment qu’une estimation relative des modifica-
tions résultantes. L’estimation de l’impact environnemental demeure donc souvent
un exercice précaire mais néanmoins primordial. Son appréciation véritable ne
pourra toutefois se faire, dans la plupart des cas, que quelques années après la mise
en place du projet grâce au suivi postprojet. Le suivi postprojet permettra de véri-
fier la validité des estimations effectuées en cours d’examen.
Les changements anticipés sont habituellement estimés à partir de différents scé-
narios, que ce soit de manière explicite ou tout bonnement de façon implicite. Le ou
les scénarios élaborés à cet effet représentent une relative anticipation de l’avenir. Ils
peuvent être plus ou moins pessimistes ou optimistes, selon les prémisses de leurs
auteurs. Ils sont par contre appréciés ensuite par les différents acteurs, ce qui n’im-
plique pas nécessairement un accord parfait. À partir de l’état ou préférablement des
168
L’évaluation des impacts environnementaux
tendances de la situation actuelle de l’environnement, on estime les modifications
appréhendées, sans oublier de prendre en compte les modifications probables
(tendances d’évolution) de l’environnement sans l’intervention du projet, c’est-à-dire
ce qu’on nomme souvent, à tort, les modifications «naturelles» du milieu.
Cette estimation des impacts ne peut toutefois être obtenue qu’à l’aide d’infor-
mations supplémentaires à celles issues de la simple étude des descripteurs. De nou-
veaux outils doivent alors être employés, notamment ceux relatifs à la simulation, à
la modélisation ou tout simplement à l’emploi de données en provenance d’études
similaires. En effet, les résultats des estimations sont bien souvent obtenus à partir
de l’expérience acquise lors de l’étude d’autres projets ou de situations similaires anté-
rieures.Il s’agit alors de transférer et d’adapter les anciens résultats à l’examen du nou-
veau problème. D’autre part, l’estimation peut aussi s’obtenir grâce au recours à la
modélisation et à la simulation,plus ou moins complexes,des paramètres en présence,
ou par la simple prédiction des impacts potentiels. Nous examinerons quelques-uns
de ces outils au cours du prochain chapitre, consacré à l’étude des méthodes. Dans
le cas ou l’information s’avérerait toutefois encore insuffisante, il faudra alors y sup-
pléer en estimant le plus convenablement possible l’impact environnemental et les
modifications résultantes, à partir de méthodes faisant appel à l’expertise même des
évaluateurs.Dans ce cas,on utilisera des approches faisant «appel aux experts»,comme
la technique Delphi.Nous examinerons aussi cette technique particulière de recherche
de la connaissance au cours du prochain chapitre.
Certains éléments de l’environnement et plusieurs impacts environnementaux
posent de réelles difficultés quant à l’estimation des modifications résultantes. C’est
le cas notamment des impacts sociaux.Ainsi, comment évaluer convenablement l’im-
pact d’un projet sur une population donnée lors d’un déplacement obligatoire, ou
bien dans le cas de l’intrusion d’un projet faisant appel à de la «haute technologie»
sur une population traditionnelle?
Des difficultés supplémentaires pour l’estimation des modifications environne-
mentales résultent aussi de la multiplicité des interactions et des effets de certains sys-
tèmes environnementaux.Le degré d’incertitude croît rapidement en présence de mul-
tiples impacts indirects ou secondaires,et encore plus lors de la prise en compte d’impacts
cumulatifs.En outre,la prédiction de l’impact sur un aspect complexe,comme la santé
humaine, n’est jamais une tâche facile, notamment en raison là aussi de l’implica-
tion de multiples aspects indirects, secondaires et cumulatifs, mais aussi en raison de
la présence d’éléments psychologiques et comportementaux encore plus imprévisibles.
169
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
Évaluation de l’impact environnemental
L’évaluation de l’impact environnemental désigne habituellement l’évaluation glo-
bale des diverses modifications de l’environnement engendrées par un projet.
L’évaluation globale de l’impact prend habituellement en compte de façon indistincte
les effets et les impacts environnementaux. L’évaluation vise avant tout à déterminer,
avec le plus de justesse possible, l’importance de l’impact environnemental des acti-
vités du projet à l’étude.
Cette importance ou signification globale des incidences environnementales est
obtenue à partir de la mesure d’un certain nombre de critères d’évaluation. La pré-
sentation dans le rapport final de l’approche méthodologique employée mentionne
habituellement les critères utilisés; mais même si ce n’est pas le cas, il n’en demeure
pas moins qu’implicitement, toute évaluation repose sur des critères sous-jacents.
Les critères d’évaluation sont variés, mais en règle générale, les critères retenus
sont la durée, l’étendue ou la portée et l’intensité ou l’ampleur des dommages ainsi
que la réversibilité ou non de l’impact2. L’indice global de l’évaluation (importance
globale) résulte alors de l’intégration, d’une manière quelconque, des divers critères
utilisés pour l’évaluation des impacts.Cette intégration se fait soit par la simple somme
des différents critères ou selon une formule particulière de cotation. Chaque méthode
d’évaluation possède sa propre opération de cotation de l’importance, tout comme
ses propres critères d’évaluation. La plus élémentaire cotation est bien sûr la simple
mention positive ou négative, sans plus d’explications.
Pour plus de précision et de rigueur, on devrait distinguer l’importance des effets
de celle des impacts.En effet,les critères d’évaluation diffèrent sensiblement selon qu’il
s’agit d’un effet ou d’un impact.Les aspects particuliers de chacun recommandent donc
des critères d’évaluation dissemblables. C’est ainsi que nous présentons de manière
séparée les critères d’évaluation des effets de ceux des impacts, quoique la pratique
courante en ÉIE n’en fasse généralement que peu de cas.
2. Nous verrons qu’il existe plusieurs autres critères employés, la plupart du temps, sans distinction
entre un effet ou un impact. De plus, des critères particuliers, comme la valeur intrinsèque des élé-
ments environnementaux, compliquent les modes d’agrégation des critères afin d’obtenir la valeur
globale d’un effet ou d’un impact.
170
L’évaluation des impacts environnementaux
Évaluation de l’importance des effets
L’évaluation de l’importance ou de la signification des différents effets environnementaux
repose sur une série de critères d’évaluation bien particuliers. Ces critères sont habi-
tuellement la durée de l’activité génératrice d’effet, l’étendue de la zone affectée et
l’intensité même de l’effet. Chacun des effets est ensuite évalué de façon globale en
fonction de ces différents critères, selon une méthode particulière de cotation inté-
grant la valeur de tous les critères, de la simple moyenne entre tous les critères à la
prise en compte d’une valorisation de certains d’entre eux. La prise en compte de l’en-
semble des critères d’évaluation représente alors l’importance globale de l’effet.
Les systèmes de cotation employés en ÉIE ne sont pas nécessairement systéma-
tiques et toujours très rigoureux. Bien souvent, ils ne sont présentés qu’à titre indi-
catif de la valeur globale, car leur emploi strict relève avant tout du jugement de l’éva-
luateur.
Il est important de rappeler que l’essentiel de la distinction entre les effets et les
impacts, par rapport à leur évaluation, provient du fait que les premiers sont indé-
pendants du milieu d’insertion dans lequel ils se produisent. Ils ne sont que la consé-
quence directe d’une activité – les émissions atmosphériques, par exemple.
Les critères d’évaluation de l’importance des effets environnementaux que nous
proposons ici sont:
• la durée;
• l’étendue;
• l’intensité.
Durée de l’effet
La durée de l’effet représente l’estimation du temps pendant lequel l’effet d’une acti-
vité du projet se fera sentir. Cette durée est plus ou moins longue selon qu’il s’agit
d’un effet permanent, intermittent ou occasionnel.
On subdivise généralement le critère de durée en:
• durée courte (court terme);
• durée moyenne (moyen terme);
• durée longue (long terme).
171
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
Une durée courte est le résultat d’un effet occasionnel et bref ou d’un événement
ponctuel. La durée moyenne comprend les effets temporaires ou continus sur une
période de temps inférieure à la période de l’activité elle-même, ou lors d’une phase
temporaire de réalisation du projet – la période de construction, par exemple. Enfin,
une durée longue désigne habituellement un effet permanent.
Comme on peut le constater, la délimitation du critère de durée, comme pour
la plupart des autres critères, d’ailleurs, repose en partie sur la subjectivité des éva-
luations et, conséquemment, des évaluateurs. La responsabilité de ce dernier est donc
très grande, puisque les autres acteurs du processus n’examinent que très rarement
en profondeur ces critères d’évaluation, pourtant déterminants pour l’estimation des
véritables conséquences anticipées.
Étendue
L’étendue représente l’espace affecté par un effet donné. Cette zone couverte par l’effet
représente en fait la superficie de territoire ou le volume d’espace.L’expansion de l’effet
par rapport au lieu d’origine de l’événement dépend de la nature même de l’effet; il
peut donc varier considérablement. Par exemple, le bruit et les odeurs ne se dispersent
pas autant que peuvent le faire des émissions atmosphériques et des rejets dans l’eau.
L’étendue peut aussi varier de manière significative en fonction du temps; le moment
de sa mesure est donc important.
Le critère de l’étendue peut lui aussi être subdivisé de la manière suivante:
• étendue locale (faible étendue);
• étendue régionale (moyenne importance);
• étendue générale ou globale (étendue maximale).
Comme pour les valeurs possibles du critère de durée,celles de l’étendue reposent
en partie sur des aspects subjectifs;ainsi,il n’est pas toujours facile de séparer une étendue
locale d’une étendue régionale.
Intensité
L’intensité de l’effet représente l’ampleur ou la puissance d’un effet. La détermina-
tion de l’intensité est souvent mesurée par rapport à une valeur de référence – une
situation idéale ou une norme établie, par exemple. Au-delà d’un certain seuil, l’in-
tensité peut être considérée comme inadmissible. Il s’agit aussi d’une valeur bien rela-
tive, dont le cheminement dans l’atteinte des résultats est difficilement reproductible
172
L’évaluation des impacts environnementaux
avec précision, car trop souvent échafaudée sur des jugements subjectifs sous-jacents
aux explications fournies. Cette subjectivité demeure valable même dans le cas
d’une norme environnementale reconnue, notamment parce que cette dernière
varie dans l’espace et le temps.
Le critère de l’intensité varie donc sensiblement selon les méthodes employées
et les experts consultés, ainsi que par rapport à la perception des autres acteurs impli-
qués dans le processus d’examen. En effet, l’émission d’une certaine dose de radio-
activité est habituellement considérée d’une intensité plus faible par les experts du
domaine nucléaire que par tous les autres acteurs,notamment par la population proche
d’un site nucléaire.
L’intensité est généralement représentée sous la forme d’une échelle graduée d’in-
tensité. Les valeurs possibles, sans trop d’explications quant aux limites respectives,
sont habituellement réparties selon qu’il s’agit:
• d’intensité faible;
• d’intensité moyenne;
• d’intensité forte.
Importance globale de l’effet
L’importance globale de l’effet constitue l’évaluation finale de l’effet environnemental.
Elle s’obtient à partir de la prise en compte des différents critères d’évaluation de l’effet,
de la simple somme des critères à une forme particulière plus ou moins complexe
de cotation. Occasionnellement, d’autres critères d’évaluation complètent ou rem-
placent l’estimation à partir de ceux que nous venons de présenter ici.
Évaluation de l’importance des impacts
L’évaluation de l’importance ou de la signification globale des différents impacts envi-
ronnementaux repose, elle-aussi, sur une série de critères d’évaluation. Ces critères
sont par contre légèrement différents de ceux de l’évaluation des effets. Afin de pou-
voir évaluer les impacts, il faut tenir compte de la réponse de l’environnement à l’ac-
tion des effets.La sensibilité même des éléments de l’environnement vis-à-vis des agres-
sions détermine bien souvent l’estimation des dommages qui en résulteront.
L’évaluation des impacts ne peut donc s’effectuer sans une connaissance satisfaisante
des éléments de l’environnement, contrairement à la situation des effets environne-
mentaux. En conséquence, l’évaluation des impacts ne peut être réalisée pleinement
dans le cadre d’un examen stratégique ou de celui d’un projet imprécis.
173
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
L’évaluation de l’impact est habituellement une opération plus complexe que celle
de l’évaluation d’un effet. Ainsi, il est beaucoup plus complexe d’estimer l’impact de
précipitations acides sur un ensemble d’éléments de l’environnement,comme la santé
des gens, la détérioration des bâtiments, l’acidification des cours d’eau et des sols, que
de déterminer simplement les quantités d’émissions de soufre d’une entreprise, tel
que le dicte l’évaluation de l’effet.
Les critères spécifiques retenus pour l’évaluation des impacts sont habituellement
multiples. De plus, ils sont souvent confondus avec ceux que nous venons de décrire
comme étant des critères d’évaluation des effets. Chacun des impacts est évalué de
façon globale en fonction des différents critères retenus et selon la méthode parti-
culière de cotation. La prise en compte de l’ensemble des critères d’évaluation repré-
sente alors l’importance globale d’un impact sur l’environnement.
Les critères d’évaluation des impacts que nous proposons sont:
• la réversibilité;
• la portée;
• l’ampleur.
Réversibilité/irréversibilité
La réversibilité ou au contraire l’irréversibilité d’un impact représente un aspect impor-
tant de l’évaluation de l’impact environnemental, au même titre que la durée en ce
qui concerne les effets. Ce critère d’évaluation est toutefois rarement pris en compte
de manière explicite en ÉIE, malgré son importance cruciale en plusieurs domaines,
notamment en ce qui concerne la biodiversité3. Ce critère difficile à manipuler cor-
respond à la rétroaction dans le temps d’un élément de l’environnement par rapport
à une agression quelconque.La sensibilité des éléments de l’environnement aux agres-
sions prend ici une large place dans la réversibilité ou non de l’impact.Ainsi, ce n’est
pas parce qu’un effet a une durée permanente qu’un élément de l’environnement est
irrémédiablement perdu, et à l’inverse, un effet ponctuel pourrait très bien entraîner
la disparition de l’élément.
3. Le critère de réversibilité, comme certains autres critères d’évaluation, n’est parfois qu’une des com-
posantes d’un autre critère. Le résultat de telles opérations est une confusion par rapport à la métho-
dologie employée et le manque de rigueur de la démarche. Ainsi, il n’est pas rare de constater la
surestimation d’un paramètre d’étude par la simple prise en compte multiple d’une même
influence.
174
L’évaluation des impacts environnementaux
Le caractère d’irréversibilité conféré à un impact est un critère parfois détermi-
nant dans la décision de réaliser un projet. De toute façon, il constitue presque tou-
jours un critère très important pour certains éléments fortement valorisés. En ce qui
concerne la biodiversité, et plus particulièrement dans le cas d’espèces en voie de dis-
parition, l’irréversibilité peut représenter l’élimination pure et simple d’une espèce.
Cette extinction est communément perçue comme étant un impact inadmissible et
ne peut être acceptable, dans la plupart des cas.
L’estimation de ce critère peut se subdiviser en:
• réversibilité (réversibilité totale);
• réversibilité/irréversibilité partielle ou temporaire;
• irréversibilité (irréversibilité totale).
Portée de l’impact
La portée de l’impact représente le nombre d’individus ou d’éléments spécifiques affectés
par un effet environnemental donné. Il s’agit d’un critère d’évaluation de l’impact
semblable à celui de l’étendue en ce qui concerne l’effet. Contrairement à ce dernier,
cependant,il ne repose pas exclusivement sur un espace géographique bien déterminé –
ne pensons dans ce cas qu’aux impacts socio-économiques, par exemple. Le critère
de portée vise plutôt à mesurer l’abondance relative (quantité) d’un élément de l’en-
vironnement.
Le critère d’estimation de la portée peut être subdivisé en:
• portée faible (nombre restreint);
• portée moyenne (nombre moyen);
• portée forte (nombre élevé).
La variable temporelle modifie la portée d’un impact, notamment pour des éva-
luations à long terme,comme c’est le cas avec la prise en compte des générations futures.
La modification entraînée par le temps peut soit amplifier, soit réduire la portée d’un
impact. D’autre part, le critère de la portée de l’impact, comme d’ailleurs celui de
l’étendue pour l’effet, est une appréciation quantitative, contrairement aux opérations
plutôt qualitatives de l’intensité de l’effet et de l’ampleur de l’impact.
Ampleur de l’impact
L’ampleur de l’impact constitue la puissance (grandeur) des modifications engendrées
à un élément de l’environnement. Le critère de l’ampleur de l’impact fait référence
175
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
à la relative fragilité ou sensibilité de l’élément environnemental considéré par rap-
port à l’effet perturbateur responsable. En ce sens, il existe des liens étroits entre l’am-
pleur et la réversibilité ou non de l’impact. Ce critère, parfois difficile à estimer, est
souvent lui-même subdivisé en critères plus spécifiques.
Comme pour la détermination de l’intensité de l’effet, l’évaluation de l’ampleur
de l’impact est habituellement une valeur bien relative et, en tant que telle, ne
devrait être employée qu’avec précaution. Ici aussi, la sensibilité des éléments de l’en-
vironnement exerce une grande influence sur l’évaluation qui est estimée.
Comme pour les autres critères,le critère d’estimation de l’ampleur peut être sub-
divisé en trois ordres de grandeur, à savoir:
• ampleur faible;
• ampleur moyenne;
• ampleur forte.
Importance globale de l’impact environnemental
L’importance globale de l’impact constitue le critère général de l’évaluation finale de
l’importance de l’impact environnemental.La valeur globale de l’impact s’obtient aussi
à partir de la prise en compte des différents critères d’évaluation de l’impact, de la
simple somme des critères utilisés à une forme particulière plus ou moins complexe
de cotation.
Ici aussi, d’autres critères d’évaluation de l’importance de l’impact environne-
mental complètent ou remplacent l’estimation faite à partir de ceux que nous venons
de présenter. C’est notamment le cas de la valeur intrinsèque des éléments de l’en-
vironnement,un paramètre qui influence parfois de manière déterminante l’importance
accordée à l’impact.
Impact et effet inadmissible
Un impact ou un effet environnemental est considéré comme «inadmissible» si son
importance globale ou sa signification pour certains acteurs est d’une grandeur telle
qu’il est perçu et jugé comme inacceptable d’un simple point de vue environnemental.
À la limite, il peut devenir un frein à la réalisation même du projet initial. Un impact
inadmissible peut alors être considéré comme une contrainte environnementale absolue
ou infranchissable. En ce sens, il vaut mieux l’éviter à tout prix, soit en modifiant le
projet en conséquence, soit en mettant en œuvre une mesure d’atténuation le ren-
dant acceptable. Dans le cas contraire, sa présence peut signifier l’abandon ou le refus
176
L’évaluation des impacts environnementaux
du projet. L’impact ou l’effet inadmissible est aussi nommé indicateur d’alerte ou dra-
peau rouge (red flag).
Un impact peut être considéré comme inadmissible lorsqu’il est non conforme
à une norme réglementaire,par exemple.Il peut alors s’agir d’une toute nouvelle norme
ou d’une norme qui n’est pas prise en compte initialement lors de l’étude des
contraintes administratives du contexte général. Le dépassement d’un tel seuil d’ad-
missibilité ne peut rendre conforme et admissible un projet, sauf si la mise en place
de mesures d’atténuation en réduit suffisamment le surpassement. Un impact très
important pourrait lui aussi être classé parmi les impacts inadmissibles, notamment
lorsqu’il met en péril une espèce rare ou lorsqu’un élément de l’environnement est
fortement valorisé par la population – un monument patrimonial ou religieux, par
exemple. Cette classe inclut aussi certains impacts ou effets qui pourraient être consi-
dérés comme des enjeux importants par quelques acteurs impliqués dans la démarche
ainsi que dans les cas litigieux – la revendication contestée d’un territoire, par
exemple.
Dans tous les cas, l’impact inadmissible devra apparaître clairement dans le rap-
port d’évaluation4. Lorsqu’il y a utilisation de matrices ou de réseaux, on lui attri-
buera une indication ou un signe particulier bien distinctif et facilement repérable.
Dans les autres cas, il s’agira de le désigner clairement.
Agrégation des impacts
L’agrégation représente l’opération qui consiste à regrouper les différents para-
mètres (éléments, impacts ou effets) dans le but d’obtenir ainsi une évaluation plus
globale. Il s’agit d’associer différents paramètres afin de les réunir dans un ensemble
plus général. C’est ainsi que différents impacts affectant les fougères, les rosiers et les
graminées, par exemple, peuvent être agrégés sous l’ensemble plus global d’impact
sur les plantes terrestres. À son tour, cet ensemble peut être agrégé avec d’autres, tels
que les arbustes et les arbres, afin de représenter un impact plus général sur la flore.
4. Cette question de l’impact inadmissible pose de nombreux problèmes puisqu’elle repose sur une
grande part de jugement de valeur et les divergences de vue n’apparaissent habituellement que tar-
divement dans l’examen. En effet, un impact peut paraître important aux yeux de l’évaluateur, sans
pour autant être perçu comme inadmissible. Par contre, pour des citoyens concernés par une nou-
velle norme environnementale en cours d’élaboration ou un objectif de développement durable,
par exemple, l’impact peut apparaître comme inadmissible. En conséquence, le rapport d’ÉIE peut
très bien ne pas en faire mention, alors qu’une consultation publique ultérieure le rappellera avec
insistance.
177
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
Des dix ou cent impacts spécifiques de départ, on en arrive ainsi à un nombre très
réduit, voire ici à un seul impact, l’impact sur la flore.
L’ultime stade d’agrégation en évaluation des impacts environnementaux est l’at-
teinte d’un seul impact global, il s’agit alors de l’évaluation globale du projet. C’est
ainsi qu’une unique valeur ou une seule affirmation constitue en fait la conclusion
générale de l’étude. Même s’il en est rarement fait explicitement mention, une telle
perception générale d’un projet est implicite dans les pensées de beaucoup d’acteurs.
Concrètement, il s’agit alors de déterminer un indice unique à la totalité des impacts
environnementaux du projet. En pratique, cependant, il est quasi impossible de ras-
sembler les différents impacts afin qu’ils puissent ne représenter qu’un seul impact
global. Compte tenu de la nature et de l’importance variable des différents impacts,
cela n’est d’ailleurs pas souhaitable, sauf bien sûr dans les cas de projets à incidences
environnementales négligeables ou restreints à quelques activités ou éléments envi-
ronnementaux.
L’agrégation d’impacts s’obtient habituellement par le regroupement successif d’im-
pacts similaires,comme dans notre exemple précédent sur la flore.Dans ce cas,il s’agit
d’agrégation sectorielle, c’est-à-dire de regroupement d’impacts affiliés. Par contre,
des difficultés surviennent lorsque le regroupement d’impacts ne peut plus être réa-
lisé simplement,étant donné la nature dissemblable ou divergente de ceux-ci.En effet,
il n’est pas aisé de réunir des impacts physiques ou biologiques avec des impacts sociaux
ou économiques, ni même d’incorporer sous un indice unique la valeur d’un impact
sur la forêt et un autre sur les mammifères qui l’habitent. Les limites du regroupe-
ment vers une valeur globale, c’est-à-dire vers l’agrégation globale, sont alors atteintes
et ne devraient jamais être surpassées. La désagrégation, beaucoup moins employée,
est bien entendu l’opération inverse. La figure 4.13 montre une démarche de désa-
grégation et d’agrégation successive d’éléments environnementaux, en prenant
l’exemple de la flore.
L’agrégation pose donc le problème insoluble de l’addition de différents para-
mètres afin d’en arriver à une mesure unique ou, à tout le moins, à un regroupement
plus global. Cet exercice, souvent périlleux en raison de la spécificité propre à chaque
paramètre et de l’importance respective très variable, présente plusieurs contraintes
et limites importantes.Ainsi,de quelle façon et sur quelle base théorique peut-on réunir
et attribuer une valeur unique à des impacts très différents et présentant en plus des
valeurs d’importance variables ou incompatibles? De plus, il faut aussi pouvoir tenir
compte des écarts de pondération entre les divers éléments de l’environnement.
178
L’évaluation des impacts environnementaux
Dès les premières étapes de l’évaluation, il y a toujours une certaine prédisposi-
tion à l’agrégation, même si elle n’est alors qu’implicite. Les paramètres d’étude ini-
tialement fragmentés en leur plus petit constituant mesurable ou déterminable sont
ensuite habilement regroupés afin de ne plus représenter que des regroupements plus
significatifs et plus globaux.Analyse de détails au départ, l’étude devient ensuite une
analyse sectorielle et, assez rapidement, elle devient un examen synthèse plus général.
L’agrégation n’est souvent justifiée que pour faciliter la manipulation des données ou
la présentation des résultats. Lorsque l’agrégation survient au premier stade de
l’évaluation, à savoir l’identification des éléments du milieu, par exemple, il s’agit alors
d’agrégation préliminaire. Mais la stricte agrégation ou agrégation finale n’intervient
généralement qu’aux étapes finales de l’évaluation des impacts.
Par ailleurs,toute opération d’agrégation effectuée dans l’examen du projet devrait
être explicitement exposée dans le rapport, et non plus demeurer uniquement impli-
cite. Il faut pouvoir connaître comment les regroupements et les incorporations ont
été réalisés. Les processus d’agrégation reposent souvent sur des jugements de valeurs
ou, à tout le moins, ouvrent une large porte à l’aléatoire et au subjectif. Une grande
transparence serait alors de mise afin de justifier cet exercice délicat.
Figure 4.13
Désagrégation et agrégation successives dans l’examen du milieu
Arbres
Peupliers
Bouleaux
Érables
Aulnes
Sumac
Graminées
Fleurs
Asclépiade
Canards
Perdrix
Chevreuils
Lièvres
Belettes
Arbustes
Mammifères
Oiseaux
Herbacées
Arbustes
Érablière Érablière
Flore
Faune
Herbes
Gibiers
Agrégation
sectorielle
Agrégation
fragmentaire
Désagrégation
lors de l’analyse
179
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
L’agrégation sert aussi pour la comparaison entre diverses options au projet d’étude
et en guise de rapprochement entre différents projets similaires. Dans ces cas,
d’ailleurs, il y a une importante agrégation des impacts sur la base de critères géné-
raux (agrégation globale ou quasi globale), sauf lorsqu’il y a comparaison à l’aide de
méthodes multicritères employant de nombreux critères (agrégation fragmentaire ou
quasi absente).
L’agrégation repose toujours sur une certaine forme de pondération. Mais le véri-
table exercice de pondération intervient seulement lorsque les regroupements par affi-
nités (regroupements d’impacts similaires) ne peuvent plus se poursuivre sans qu’in-
tervienne ce nouvel outil d’évaluation.
Pondération des impacts
La pondération représente l’estimation du poids relatif de chacun des paramètres de
l’évaluation, c’est-à-dire leur importance respective les uns par rapport aux autres.
La pondération concerne aussi bien les impacts et les effets que les éléments envi-
ronnementaux. La notion de pondérer désigne l’opération qui consiste à accorder une
valeur, un rang ou un degré proportionnel à l’importance respective de chaque para-
mètre. Ce classement en ordre d’importance représente en fait une technique de stan-
dardisation afin de pouvoir comparer mutuellement ces différents paramètres. Cet
exercice permet de comparer différentes options à un projet ou divers projets entre
eux. La pondération est une tentative, pas nécessairement toujours réussie, de
répondre au genre de questionnement suivant: un impact moyen sur le castor est-il
équivalent à un impact moyen sur les autochtones? On cherche à savoir si effective-
ment le déplacement d’un autochtone est perçu comme plus important que celui d’un
castor. Le paramètre variable est bien entendu ici la valeur respective d’un castor et
d’un autochtone.
Le plus souvent, il s’agit de déterminer la valeur respective des divers éléments
environnementaux et d’en déduire la signification (importance). Concrètement, la
pondération consiste à apposer un indice d’importance à chacun ou à un ensemble
de paramètres. Les différents paramètres peuvent alors être hiérarchisés ou classés les
uns par rapport aux autres. Cette opération effectuée, le choix entre diverses options
s’en trouve facilité.
La pondération permet aussi une agrégation plus complète des impacts environ-
nementaux que ne le permet la simple opération d’agrégation. En effet, l’estimation
du poids respectif de chacun des différents paramètres environnementaux permet d’éta-
blir une valeur globale à l’ensemble ou,à tout le moins,une base utile de comparaison.
180
L’évaluation des impacts environnementaux
Toute comparaison rigoureuse doit nécessairement reposer sur une agrégation et une
pondération préliminaires.
Il existe différentes méthodes ou techniques de pondération. L’indice ou coeffi-
cient d’importance servant à la pondération, comme les techniques servant à l’éta-
blir, diffère grandement d’une démarche à l’autre. Parmi les techniques courantes de
pondération, les quatre suivantes sont fréquemment employées:
• hiérarchisation: classement par catégories d’importance (1re, 2e, 3e catégorie),
chacun des paramètres d’une même catégorie (classe) étant considéré comme
équivalent en importance;
• classement par importance: rang du plus important au moins important de
chacun des paramètres (1, 2, 3, 4, etc.);
• notation: répartition sur une échelle graduée,de 0 à 10,par exemple,de chacun
des paramètres;
• distribution des poids: distribution des poids respectifs de chacun des para-
mètres à partir d’un quota (x = 10%, y = 8%, z = 6%, etc.).
Nous examinerons en détail ces quatre techniques particulières de pondération
au cours du prochain chapitre,consacré à l’examen des diverses méthodes.Mentionnons
seulement que trois types bien distincts se dégagent des démarches que nous verrons,
soit la démarche numérique de Battelle (notation et distribution des poids), la
démarche ordinale de Holmes (hiérarchisation) et les techniques de consultation Delphi
(variables, selon le cas).
Évaluation de la cotation
La cotation représente l’utilisation d’indices numériques ou de symboles afin d’in-
diquer la valeur accordée aux effets et aux impacts environnementaux. La valeur de
l’importance globale des effets et des impacts est ainsi traduite sous la forme d’une
cotation particulière, qui peut être plus ou moins complexe, selon le cas. En effet, la
valeur globale est presque toujours le résultat de plusieurs critères sous-jacents qu’il
faut conjuguer en une seule valeur moyenne. La valeur globale est presque toujours
un indice composé; parfois, cependant, chaque critère sous-jacent peut être indiqué
séparément. Selon le cas, la cotation emploiera donc un ou plusieurs symboles dis-
tinctifs ainsi qu’une démarche d’association et de regroupement des critères d’éva-
luation. En pratique, cette méthode se traduit par l’emploi normalisé d’une symbo-
lique particulière, habituellement standardisée pour tout le rapport. Cette symbolique
est utilisée pour l’examen des différents critères et sous-critères d’évaluation des effets
181
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
et des impacts environnementaux. La cotation recourt habituellement à un système
d’agrégation des critères et sous-critères d’évaluation. Il s’agit alors d’un mode d’in-
corporation (addition, multiplication) des différents critères d’évaluation afin d’ob-
tenir une valeur moyenne pour l’importance globale. La figure 4.14 montre la
grande variété de la symbolique et des signes pouvant être employés pour exposer
la cotation de l’impact.
Figure 4.14
Modèle de matrice avec symbolique de cotation variée
A
Cours d’eau
Légende
Représentation variée
de la cotation des impacts
Eaux souterraines
Qualité des eaux
Régime hydrodynamique
Ruissellement et infiltration
Forme et relief
Nature des dépôts
Qualité de l’air et odeurs
Bruits/vibrations
Faune terrestre et aquatique
Flore terrestre et aquatique
Écosystème
B
C
D
E
F
G
H
I
J
K
L
Excavation,
forage
et
creusage
Bâtiments
et
équipements
Transport
et
circulation
Installation
de
chantiers
Déboisement
et
reboisement
Acquisition
des
emprises
Études
et
aménagements
préléminaires
7
6
5
4
3
1
2
3
2
1 Dragage
et
travaux
maritimes
8
ÉLÉMENTS ENVIRONNEMENTAUX
ACTIVITÉS
DU
PROJET
*
*
*
La cotation est généralement présentée sous la forme d’une échelle plus ou moins
étendue. La cotation la plus rudimentaire est celle qui utilise la simple mention de
positive ou de négative pour la valeur des impacts. Habituellement, une échelle plus
182
L’évaluation des impacts environnementaux
ou moins étendue répartit les valeurs possibles de la cotation de zéro à dix (0 à 10),
par exemple. Une gradation très étendue de la cotation requiert généralement une
quantification importante et adéquate des différents critères d’évaluation. Une
échelle réduite de un à trois (1 à 3) est plus maniable et plus commode à employer
dans la plupart des cas. En effet, il n’est pas toujours facile, particulièrement pour cer-
tains types d’impacts, d’étaler les données sur une échelle étendue comportant plus
de trois échelons. L’échelle à triples entrées (1 à 3) permet plus facilement de disposer
simplement les valeurs obtenues de part et d’autre d’une mesure moyenne, les
valeurs extrêmes (forte et faible) étant dans ce cas plus faciles à déterminer.
Les méthodes ou modes de cotation varient sensiblement selon les études.Le mode
d’agrégation des paramètres ou critères de cotation peut être plus ou moins com-
plexe et logiquement fondé, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. Bien
souvent, il s’agit d’additionner simplement la valeur accordée aux différents critères
d’évaluation et d’en faire la simple moyenne afin d’obtenir la valeur globale. Dans
ce cas, on utilise généralement une matrice, appelée «tableau de corrélations». La
figure 4.15 présente un exemple d’une telle grille de corrélations. Dans cet exemple,
trois critères d’évaluation permettent d’obtenir une valeur globale («importance»)
de l’impact. Quelquefois, cependant, le mode d’agrégation des critères est plus com-
plexe. Ainsi, certains critères peuvent être considérés plus importants que les autres;
la simple opération arithmétique ne s’applique donc plus dans ce cas. Une manipu-
lation particulière des valeurs des différents critères est alors employée. Cette dernière
façon de faire est souvent plus satisfaisante que la simple addition des critères ou sous-
critères d’évaluation,comme c’est le cas avec les grilles de corrélations.En conséquence,
ces dernières ne devraient être employées qu’avec précaution et exclusivement à titre
indicatif de la valeur hypothétique éventuelle.
Le rapport d’ÉIE devrait donc contenir une explication détaillée de la démarche
et de la symbolique employées pour la cotation. Nous verrons au cours de l’examen
des diverses méthodes, lors du prochain chapitre, quelques exemples de méthodes
de cotation.
Éléments litigieux ou contestés
Il est fortement recommandé de mettre en évidence d’une manière quelconque les
éléments litigieux ou contestés issus de l’évaluation des impacts environnementaux
du projet. Ces cas sont le résultat d’un examen du projet qui n’a pas permis d’éva-
luer convenablement ou complètement l’élément, l’impact ou l’aspect en question,
et ce, à la satisfaction de tous. On pourrait aussi mettre en valeur dans le rapport final,
183
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
de manière moins apparente, les impacts majeurs et les principaux enjeux environ-
nementaux. On utilise des «analyses de sensibilité» ou des analyses de risques afin
de mieux cerner les conséquences possibles de tels éléments litigieux ou éventuelle-
ment contestables pour des raisons de manque de connaissances.
L’indication distinctive et facilement repérable d’éléments litigieux ou contestés
évite certaines difficultés de compréhension et de contestation. Elle affirme d’abord
la crédibilité des évaluateurs ainsi que la transparence du rapport lui-même.Elle permet
Figure 4.15
Grille de détermination de l’importance globale de l’impact à partir
de trois critères d’évaluation et selon deux méthodes de compilation
SENSIBILITÉ INTENSITÉ ÉTENDUE IMPORTANCE*
* Option A** Option B***
Nationale 9 Majeure Majeure
Forte Régionale 8 Majeure Majeure
Locale 7 Majeure Majeure
Nationale 8 Majeure Majeure
Forte Moyenne Régionale 7 Majeure Majeure
Locale 6 Moyenne Moyenne
Nationale 7 Majeure Majeure
Faible Régionale 6 Moyenne Moyenne
Locale 5 Mineure Moyenne
Nationale 8 Majeure Majeure
Forte Régionale 7 Majeure Majeure
Locale 6 Moyenne Moyenne
Nationale 7 Majeure Majeure
Moyenne Moyenne Régionale 6 Moyenne Moyenne
Locale 5 Mineure Moyenne
Nationale 6 Moyenne Moyenne
Faible Régionale 5 Mineure Moyenne
Locale 4 Mineure Mineure
Nationale 7 Majeure Majeure
Forte Régionale 6 Moyenne Moyenne
Locale 5 Mineure Moyenne
Nationale 6 Moyenne Moyenne
Faible Moyenne Régionale 5 Mineure Moyenne
Locale 4 Mineure Mineure
Nationale 5 Mineure Moyenne
Faible Régionale 4 Mineure Mineure
Locale 3 Mineure Mineure
* Si chaque critère a une valeur égale de 1 à 3 points (de mineure à majeure), l’écart possible de la valeur globale
de l’importance varie donc de 3 à 9 (addition simple).
** Option A: Majeure = 7-9 (10 possibilités), Moyenne = 5 (7) et Mineure = 3-5 (10)
*** Option B: Majeure = 8-9 (10 possibilités), Moyenne = 5-7 (13) et Mineure = 3-4 (4).
184
L’évaluation des impacts environnementaux
aussi de faciliter la recherche de consensus ou de compromis avec les éventuels oppo-
sants au projet. La transparence est de toute façon l’une des caractéristiques essen-
tielles de toute étude sérieuse d’ÉIE, tout comme le sont d’ailleurs la crédibilité des
évaluateurs et le rapport final d’évaluation.
Suivi d’exploitation
Le suivi d’exploitation, couramment nommé monitoring, vise un objectif principal:
la vérification de l’ampleur des impacts prévus (impacts potentiels/impacts réels) ou
de certains éléments environnementaux particulièrement sensibles. En outre, deux
objectifs secondaires se joignent parfois à cet objectif du suivi d’exploitation. Il s’agit
de vérifier l’efficacité à long terme des mesures d’atténuation mises en place ainsi que
d’acquérir des informations, pour l’amélioration éventuelle des méthodes de prévi-
sion des impacts et de mise en place de mesures d’atténuation adéquates pour les pro-
jets futurs.
L’exécution du travail relatif au suivi d’exploitation est généralement confiée à
des spécialistes des différents domaines impliqués ou à des membres qualifiés du per-
sonnel de l’entreprise. L’inspection périodique des différents paramètres s’effectue à
l’aide d’indicateurs choisis généralement dès l’élaboration du programme de suivi.
L’élaboration d’un programme de suivi d’exploitation et sa mise en œuvre seront étu-
diés au cours du chapitre huit (section «Inspection et suivi») de manière détaillée
et complète.
L’apport d’enseignements et d’expériences que le suivi environnemental fournit
devrait servir, d’une part, à valider l’évaluation de certains paramètres du projet, les
plus significatifs au moment du dépôt du rapport, et, d’autre part, la pertinence des
mesures d’atténuation mises en place dans le cadre du projet. Ces précieuses infor-
mations serviront ensuite à mieux prévoir les impacts et les mesures d’atténuation
lors de l’examen de futurs projets.
Suivi postprojet
Le suivi postprojet représente beaucoup plus qu’un simple suivi d’exploitation, car
il vise à effectuer une évaluation complète du projet. La vérification de l’ensemble
des aspects significatifs du projet après quelques années d’exploitation permet une
réévaluation de l’examen initial et l’amélioration des pratiques en ÉIE.
Bien entendu,le suivi postprojet n’est pas un examen d’une ampleur égale à l’examen
initial,mais se révèle tout de même aussi complet,sauf pour les aspects devenus caducs
en raison de la mise en place des composantes et des activités prévues, notamment la
185
Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux
justification et la description des composantes du projet. Toutefois, l’examen complet
est encore pertinent pour tous les aspects encore utiles tels que l’évaluation des impacts
et les mesures d’atténuation, ainsi que pour les prédictions et les modèles employés.
À la suite d’un examen postprojet, l’évaluation des impacts réels peut enfin être
réalisée. Il serait fort utile de pouvoir bénéficier de plusieurs de ces études, afin de
vérifier la pertinence des évaluations réalisées depuis les débuts de l’ÉIE. Il en est de
même en ce qui concerne l’efficacité réelle des mesures d’atténuation et la fiabilité
des estimations et des modèles.
Les enseignements d’un programme de suivi
Depuis 1978, un «réseau de surveillance écologique» observe l’évolution des milieux natu-
rels, ainsi que ceux créés en grande partie par les humains au complexe La Grande, dans
le Moyen-Nord québécois. Le vaste complexe hydroélectrique La Grande, aménagé par
l’entreprise Hydro-Québec, regroupe onze centrales d’une puissance cumulée de
15600MW et il couvre une surface de près de 15000 km2, soit environ la moitié de la
superficie de la Belgique.
Les études effectuées dans le cadre du programme de suivi englobent les répercussions
du méthylmercure ainsi que celles sur l’économie locale et les aspects sociaux des com-
munautés autochtones, en passant par les incidences sur les mammifères marins et les
grands cervidés (Chartrand et Thérien, 1992).
La pertinence des rares programmes de suivi est consolidée par les riches enseignements
que nous pouvons en obtenir. Comme l’affirmaient certains de ses témoins privilégiés:
«N’est-il pas plus pertinent, par exemple, de s’assurer que l’aménagement hydroélec-
trique d’un territoire contribuera à une meilleure protection et exploitation du caribou
plutôt que de savoir si la perte d’habitat sera de 0,5% ou de 5%?» (Hayeur et Doucet,
1992).
De telles informations,en provenance d’une des opérations essentielles d’un point
de vue scientifique,permettraient d’en tirer des enseignements inestimables pour l’avan-
cement des connaissances,comme pour le perfectionnement des pratiques d’évaluation.
L’élaboration d’un programme particulier de suivi postprojet, ainsi que sa mise en
œuvre seront examinées en détail au cours du chapitre huit (section «Inspection et
suivi»).
5
Chapitre
Méthodesetoutilsdel’évaluation
desimpactsenvironnementaux
a sélection d’une méthode particulière d’étude représente le choix du meilleur outil
d’examen disponible1. Ce choix équivaut à sélectionner la méthode ou, le plus
souvent, les méthodes devant servir à l’étude du projet. La sélection d’une méthode
particulière dépend de plusieurs facteurs dont la nature du projet à l’étude, les besoins
particuliers des évaluateurs et/ou des utilisateurs,les usages possibles de chacune d’elles
ainsi que du temps et du budget (contraintes administratives) disponibles. En pra-
tique, toutefois, la sélection repose grandement sur l’expérience acquise par les éva-
luateurs eux-mêmes des différentes méthodes d’ÉIE.
La jeunesse de cette sphère de la connaissance n’explique pas totalement les aspects
approximatifs,incomplets et confus souvent rencontrés dans les méthodes employées.
La faible importance attribuée à l’ÉIE par certains acteurs ainsi que la place réduite
occupée par celle-ci dans le processus de décision expliquent aussi les insuffisances
L
1. Selon Watzlawick (1975), cité par Simos (1990), une méthode «désigne une démarche scientifique;
c’est l’énoncé des étapes à suivre, dans un certain ordre, pour atteindre un but donné». Il s’agit donc
d’un ensemble de principes, de règles, de techniques et d’étapes permettant l’atteinte de résultats
particuliers dans le cadre d’une démarche bien spécifique. L’outil d’examen, par contre, est d’une
nature plus restreinte; il s’agit, par exemple, d’un moyen particulier de présentation des données
ou d’une activité plus spécifique, telle que l’emploi de la photographie.
188
L’évaluation des impacts environnementaux
des méthodes utilisées. Conséquemment, les méthodes d’évaluation des impacts ne
s’appuient pas toujours sur un cadre méthodologique rigoureux et complet, ni sur
des méthodes scientifiques toujours bien établies.
Historiquement, la plupart des méthodes furent élaborées à des fins bien spéci-
fiques. La discipline d’origine de ses auteurs, comme le type de projet à l’étude, ont
déterminé très souvent l’approche théorique sous-jacente et les techniques employées.
À la limite,on peut affirmer que la plupart des études emploient des méthodes ad hoc;
rarement utilisera-t-on intégralement une méthode antérieure mise au point par
d’autres. Il y a donc une infinité de méthodes diverses plus ou moins apparentées. À
l’heure actuelle, il n’existe pas une méthode d’évaluation des impacts qui soit com-
plète et universelle pour l’examen de tous les projets. Par conséquent, la plupart des
évaluateurs utilisent un certain nombre de méthodes lors de l’étude d’un projet. Bien
souvent, une méthode plus ou moins générale oriente l’ensemble de l’examen et une
ou quelques autres méthodes, plus spécifiques à certains aspects particuliers de
l’étude, la complètent.
Le choix d’une méthode particulière d’ÉIE est bien sûr déterminé par l’expérience
des évaluateurs par rapport aux diverses méthodes, mais il est aussi dépendant de la
nature particulière des activités envisagées. En ce sens, certains types de projets s’ac-
cordent mieux avec l’utilisation de certaines méthodes; c’est le cas de l’approche car-
tographique pour des projets linéaires importants, par exemple. Enfin, les ressources,
c’est-à-dire le temps et les moyens disponibles aux fins de l’étude, orientent grande-
ment elles aussi les choix effectués.
Le classement des diverses méthodes et outils de l’ÉIE varie selon les auteurs
consultés. Certains classent les méthodes selon leur forme (le «comment»), c’est-
à-dire à partir de leur fonctionnement propre – la présentation finale des résultats,
par exemple (Jain et coll., 1993; Warner et Preston, 1974). La colonne de gauche de
l’encadré 1 montre bien cette classification selon la «forme». On regroupe alors les
méthodes en matrices, en listes de contrôle, en réseaux ou en superposition carto-
graphique. Une nouvelle subdivision entre les outils simples (les plus anciens dans
l’ensemble) et ceux considérés comme plus avancés est parfois proposée (Sadar et coll.,
1994).
D’autres, par contre, répartissent les méthodes selon leur raison d’être (le «pour-
quoi»),c’est-à-dire à partir de leur objet d’étude particulier ou leur fonction première.
Les méthodes sont alors répertoriées selon qu’il s’agit de méthodes d’identification,
d’évaluation ou de pondération, par exemple. Ainsi, à partir de critères de percep-
tion de l’essence même des diverses méthodes, Munn (1975) préférait diviser les
méthodes selon les étapes de réalisation d’une étude d’impacts. Dans ce cas, cela
189
Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux
permettait des regroupements selon l’identification, la prévision, l’interprétation, la
communication et les procédés d’inspection,comme dans la colonne de droite de l’en-
cadré 1.
D’autres typologies similaires utilisent les trois grands types suivants: l’identifi-
cation des impacts, la génération de stratégies et l’évaluation des variantes (Simos,
1990). Cette classification peut recouper les deux grandes catégories que sont les
méthodes d’identification et les méthodes d’évaluation. Il faut préciser qu’il y a une
grande distinction entre, d’une part, les méthodes spécifiques à l’identification des
impacts et, d’autre part, les méthodes d’évaluation spécialement conçues pour déter-
miner l’importance ou la signification de ces impacts, et non pas restreintes simple-
ment à la reconnaissance ou à la délimitation des impacts.
La typologie fondée sur cette distinction entre l’identification et l’évaluation est
fréquemment employée. Cette approche, préconisée par Westman (1985) et reprise
par Simos (1990), est illustrée dans l’encadré 2. Une sous-division en regroupements
plus spécifiques, par exemple en listes de contrôle ou en matrices, complète la typo-
logie globale. Cette distinction entre l’identification et l’évaluation n’est pas toujours
très nette,quoiqu’elle reflète assez bien leur utilisation principale en tant qu’outil d’ana-
lyse. Cette typologie n’est toutefois pas entièrement satisfaisante, car une méthode
relève souvent aussi bien de l’une que de l’autre de ces deux catégories.
Devant les nombreuses difficultés à regrouper et à classer les différentes méthodes,
plusieurs n’adoptent aucune typologie particulière, préférant plutôt présenter les
méthodes les unes à la suite des autres; c’est notamment le cas de Nichols et Hyman
(1980). Il s’agit assurément de la présentation la plus simple, bien qu’il ne s’agisse pas
de la plus appropriée.
Encadré 1
Forme Raison d’être
Ad hoc Identification
Liste de contrôle Évaluation
Matrice Pondération
Réseau Ordonnancement
Superposition Inspection
Modélisation
190
L’évaluation des impacts environnementaux
Nous constatons qu’il n’y a donc pas non plus,à l’instar des méthodes d’évaluation,
de typologie universelle et unique des méthodes d’ÉIE. Selon les auteurs consultés,
les diverses méthodes peuvent être classées selon des regroupements particuliers et
à partir de modalités parfois bien distinctes les unes des autres. Pour notre part, la
manière la plus valable, sans être totalement dénuée de failles, consiste à classer les
diverses méthodes d’ÉIE selon cinq grands axes ou domaines d’étude. Ces grands axes
d’étude regroupent sous une même dénomination diverses méthodes similaires et
apparentées. Le principe du regroupement repose ainsi sur leur démarche d’examen,
chaque groupe de méthodes ayant par conséquent des objectifs ultimes communs.
La typologie en cinq grands axes, pratiquement ordonnés du plus général au plus spé-
cifique, est illustrée dans l’encadré 3.
Encadré 2
Identification Évaluation
Ad hoc Ad hoc
Liste de contrôle Delphi
Réseau Fiche d’impact
Superposition Matrice
Modélisation Technique numérique
Technique ordinale
Méthode économique
Méthode d’inspection
Encadré 3
Typologie des méthodes d’ÉIE
Les méthodes d’expertise
Les modèles et systèmes
La représentation spatiale et cartographique
Les méthodes comparatives unicritères
Les méthodes comparatives multicritères
191
Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux
Chacun des axes d’étude présente des avantages et des inconvénients, la plupart
des méthodes étant souvent la réponse à des besoins particuliers.En ce sens,les diverses
méthodes regroupées sous ces cinq axes ne sont pas des méthodes complètes et glo-
bales destinées à mener un examen complet; elles n’en ont pas, pour la plupart, la
prétention. Elles sont par contre complémentaires les unes aux autres et très souvent
plus d’une est employée afin de réaliser l’étude complète d’un projet. C’est ainsi que
la phase préliminaire d’examen repose très souvent sur des méthodes d’expertise, par-
ticulièrement les listes de contrôle, alors que les phases subséquentes d’examen
seront réalisées grâce à d’autres méthodes, notamment les approches de modèles et
systèmes,de représentation spatiale et cartographique.De leur côté,les méthodes com-
paratives unicritère et multicritères sont employées lors de comparaison de variantes
ou de solutions de rechange.
Pour chacun des axes d’étude,nous allons examiner de manière systématique diverses
méthodes employées depuis les débuts de l’ÉIE. Nous insisterons sur le modèle type
pour chacun des axes.Il s’agit souvent du modèle le plus familier.C’est ainsi que nous
examinerons d’abord les méthodes pionnières de chaque axe; elles représentent bien
souvent le modèle type. Nous examinerons ensuite un certain nombre de méthodes
plus récentes ou d’applications contemporaines des plus anciennes.
Quoique rarement employées de manière intégrale par d’autres évaluateurs, les
méthodes dites classiques ou pionnières (McHarg (1968 et 1969), Léopold (1971),
Sorensen (1971), Holmes (1972) et Battelle (1972)) influencèrent grandement la plu-
part des études réalisées à ce jour. En fait, ces méthodes abordaient déjà les grands
axes possibles d’examen de l’ÉIE. Depuis, peu de méthodes ont acquis une renommée
équivalente à celles des pionnières.
MÉTHODES D’EXPERTISE EN ÉIE
Les méthodes et outils regroupés sous ce titre sont ceux qui reposent avant tout sur
une opinion d’expert.La plupart du temps les méthodes d’expertise reflètent une exper-
tise antérieure. C’est le cas notamment des listes de contrôle, mais quelquefois il s’agit
plutôt d’une expertise actuelle ou en devenir,comme dans l’emploi de l’enquête Delphi,
par exemple. Cette expertise se retrouve donc sous diverses configurations. Ces
méthodes sont employées fréquemment et depuis fort longtemps en ÉIE, et on peut
prétendre sans exagérer qu’il est très rare de retrouver une étude n’ayant aucunement
fait appel à une forme ou une autre d’expertise.
192
L’évaluation des impacts environnementaux
Les diverses méthodes et outils d’expertise en ÉIE sont:
• les listes de contrôle;
• la fiche d’impact;
• l’enquête Delphi;
• les méthodes ad hoc.
En ÉIE, l’objectif principal des approches faisant appel à l’expertise est habi-
tuellement d’effectuer un examen rudimentaire ou initial du projet ainsi qu’une cer-
taine forme de contrôle ou de codification.Exceptionnellement,l’emploi de ces méthodes
vise un examen plus approfondi, comme c’est parfois le cas avec l’enquête Delphi.
L’emploi de l’expertise est autant une démarche de synthèse qu’un processus d’ana-
lyse. Par ailleurs, l’aspect évaluateur de l’importance des impacts est généralement
supplanté par la simple identification des impacts.
Habituellement, la prise en compte des aspects temporel, spatial et cumulatif, tant
des éléments que des impacts environnementaux,est plutôt rudimentaire.Cependant,
les moyens mis en œuvre sont élémentaires et relativement faciles d’accès. La
démarche est par conséquent commode, d’ordinaire rapide et généralement peu coû-
teuse. De plus, la présentation des résultats est simple et facilement compréhensible.
Par contre, les résultats sont difficilement reproductibles, sauf en ce qui concerne les
listes de contrôle, car ils reposent grandement sur des opinions et des jugements de
valeurs. Compte tenu des circonstances entourant le projet à l’étude, l’emploi de telles
méthodes peut faciliter ou au contraire entraver le processus de décision.
Liste de contrôle
La «liste de contrôle» est souvent la plus rudimentaire des méthodes. Il serait généra-
lementplusjustedanssoncasdeparlerd’outilsdel’ÉIE.Ilfautentendre«listedecontrôle»
dans le sens de «liste de référence (check list)».La plupart du temps,les listes de contrôle
ne permettent qu’une identification des différents paramètres à considérer pour
l’étude d’un projet. Elles proposent rarement une appréciation des paramètres listés
et elles ne fournissent à peu près jamais une valeur quantifiable.En règle générale,elles
sont donc essentiellement des outils indicatifs. En fait, elles sont bien souvent limitées
à des mesures qualitatives et parfois même fort subjectives, du fait de leur ambition
universelle ou généraliste. Conséquemment, elles ne représentent souvent qu’un
examen préliminaire ou initial d’une étude plus complète. La simplicité de la liste de
contrôle en fait toutefois un outil largement utilisé. Les listes constituent ainsi un élé-
ment essentiel de presque toutes les autres méthodes d’identification de relevé et d’éva-
luation des impacts environnementaux; elles en sont bien souvent une étape initiale.
193
Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux
Les listes de contrôle ont pour objectif de permettre une vue d’ensemble des impacts
environnementaux probables d’activités humaines, une première approximation de
l’impact. La liste est couramment présentée sous la forme de tableaux énumérant les
différents paramètres. Chaque liste est plus ou moins spécifique à un type de projet
ou à un milieu déterminé. Certaines ne concernent que des projets de transport rou-
tier, par exemple; d’autres, par contre, peuvent être appliquées à tout type de déve-
loppement. Il n’y a généralement pas de relevé des relations de cause à effet, chaque
série de paramètres étant présentée séparément.
On retrouve au moins cinq types de liste de contrôle, selon la nature des divers
paramètres exposés. Ces listes comprennent les paramètres suivants:
• activités et composantes de projet;
• éléments de l’environnement;
• effets et impacts environnementaux;
• indicateurs et descripteurs de l’environnement;
• mesures correctives et d’atténuation.
Le premier type de paramètre comprend les listes d’activités humaines ou de com-
posantes de projet. Celles-ci énumèrent un certain nombre d’activités ou de compo-
santes communes à tout projet,ou à un genre particulier,et qui pourraient être sources
d’impacts.Il y a bien entendu une multitude de listes énumérant les différents éléments
de l’environnement.Ces listes énumèrent les éléments environnementaux présents dans
des milieux plus ou moins particuliers, comme elles peuvent souligner ceux qui sont
considérés comme sensibles ou valorisés d’une façon ou d’une autre par les différents
acteurs (législateurs, scientifiques et population). Tout comme la plupart des autres
types de listes, elles sont plus ou moins exhaustives. En complément à ces deux pre-
miers types, on rencontre des listes d’effets ou d’impacts appréhendés, impacts cou-
ramment rattachés à des projets ou à des milieux plus ou moins précis.Viennent ensuite
des listes d’indicateurs ou de descripteurs permettant de sélectionner différents outils
de mesure des éléments, des effets et des impacts environnementaux. Enfin, le der-
nier type de listes comprend celles faisant l’énumération de mesures d’atténuation ou
de modifications à effectuer.Ces mesures et modifications peuvent être à caractère général
et universel, ou plutôt spécifique à un seul type de projet ou de milieu.
Bien entendu, il existe aussi un certain nombre de listes hybrides; il s’agit alors
de listes mixtes impliquant plusieurs des paramètres déjà mentionnés. Il y a donc des
listes de contrôle des impacts versus les mesures d’atténuation ou une liste d’éléments
194
L’évaluation des impacts environnementaux
de l’environnement comportant aussi une énumération des indicateurs de ces dif-
férents éléments.
Depuis l’avènement de l’ÉIE, un nombre imposant de listes de contrôle ont été
proposées comme référence utile dans l’examen de projet. L’une des listes parmi les
plus complètes à l’époque était celle publiée par la Commission de l’énergie atomique
des États-Unis (Atomic Energy Commission, 1973). Une autre liste pionnière, mais
néanmoins peu traditionnelle quant à son contenu, est celle de l’Université de
Géorgie (Institute of Ecology, 1971). Elle fut mise au point afin de mesurer l’impact
environnemental des plans d’aménagement routier. Elle comporte 56 éléments sen-
sibles de l’environnement que toute étude sur ce sujet devrait prendre en compte.
Innovations intéressantes,chacun des éléments de l’environnement possède son propre
indicateur mesurable ainsi qu’une pondération appropriée et spécifique. Les consé-
quences (effets et impacts) à long terme, notamment, héritaient d’un facteur multi-
plicatif de dix par rapport aux autres pour leur cote de pondération. Cette pondé-
ration était cependant établie de manière trop subjective et pouvait difficilement être
reproductible (Munn, 1977). Cela serait encore plus vrai selon les critères et les juge-
ments actuellement utilisés pour la pondération.De plus,l’approche prenait en compte
un facteur de génération d’erreur au hasard. Elle était cependant très exigeante sur
le plan des ressources et conséquemment fut, semble-t-il, fort peu employée dans son
intégralité.
La liste des activités présentée à la figure 5.1 montre par contre une liste de contrôle
simple. Elle est classique dans sa forme et pratique à utiliser en tant qu’aide-mémoire.
Elle ne propose aucune forme d’évaluation; sa seule fonction est strictement indi-
cative. La présentation graphique est nette et ordonnée, ce qui permet une visuali-
sation rapide des résultats. Elle permet d’identifier (cocher les cases appropriées) les
paramètres présents dans le projet à l’étude de façon active et simple. Une autre liste,
répertoriant cette fois les éléments de l’environnement, viendrait s’adjoindre et
compléter celle-ci.Ces deux listes peuvent servir éventuellement à construire une matrice
des interactions (activités du projet versus éléments de l’environnement),comme nous
l’avons fait au Maroc en 1994 pour l’implantation de conduites d’adduction d’eau
potable et de stations de pompage.
La liste de contrôle représentée à la figure 5.2 montre une liste un peu plus com-
plexe que la précédente; elle propose notamment une certaine forme d’évaluation
des éléments de l’environnement. En effet, elle contient une qualification de la sen-
sibilité des divers éléments du milieu.La sensibilité de chacun des éléments d’inventaire
est évaluée à l’aide d’une cotation élémentaire à trois valeurs possibles: forte,
195
Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux
moyenne ou faible. Les éléments d’inventaire à prendre en compte dans l’analyse des
corridors qui est présentée ici (le même projet de conduites d’adduction d’eau
potable) sont regroupés en six grands groupes d’éléments apparentés.
Le grand avantage de l’emploi de listes de contrôle, outre leur relative simplicité
d’utilisation et de représentation, est le rapide survol qu’elles permettent. Leur
approche structurée permet une rapide identification des paramètres devant être pris
en compte. Ces listes de contrôle expriment souvent la synthèse des nombreux tra-
vaux effectués antérieurement en ÉIE; elles représentent ainsi un ensemble cohérent
des multiples connaissances et des jugements de leurs auteurs. En ce sens, l’utilisa-
tion d’une liste reconnue ne requiert pas le relevé explicite des liens de cause à effet
d’une activité déterminée, par exemple, ces liens étant implicitement légitimés par
les auteurs de la liste. Cet outil d’analyse préliminaire met donc grandement à
contribution l’expertise même des évaluateurs, ceux de l’étude en cours autant que
ceux des études antérieures ayant permis la réalisation des listes de contrôle.
Parmi les inconvénients des listes de contrôle en tant qu’outil d’identification,
on retrouve avant tout la méconnaissance des interactions entre les activités du projet
et les éléments de l’environnement, comme entre les impacts eux-mêmes, d’ailleurs.
Sauf exception, cet outil n’est nullement approprié à la mise en évidence des inter-
actions; il n’est d’ailleurs pas destiné à cette fin. De plus, la liste de contrôle, quoique
constituant un indispensable aide-mémoire, risque par le fait même de faire oublier
Figure 5.1
Liste de contrôle des activités
Études techniques
Arpentage et signalisation
Acquisition des emprises
Déboisement et reboisement
Installation de chantiers
Signalisation
Excavation, forage et creusage
Dragage et travaux maritimes
Passage des cours d’eau
Modification de tracés
Infrastructures routières
Transport et circulation
Érection de bâtiments
Installation des équipements
Pose des conduites
Lignes électriques, téléphone, etc.
Entreposage de matériaux
Disposition des déchets
Présence des ouvrages
Réseau AEP
Réseau d’assainissement
Matériel et équipement
Systèmes de traitement E.P.
Système de traitement d’eaux usées
Transport/gestion de produits chimiques
Gestion de la production d’eau
Gestion des déchets solides, liquides (boues)
Contrôle et suivi de la qualité
Disposition et réutilisation
Sécurité et intervention d’urgence
196
L’évaluation des impacts environnementaux
des paramètres absents de celle-ci; on pourrait ainsi omettre d’en tenir compte dans
l’étude en cours. Enfin, les listes ne permettent pas la prise en compte des variations
des conditions du milieu dans le temps, ni, habituellement, de l’estimation et de l’éva-
luation véritable des impacts.
Fiche d’impact
L’emploi de «fiches d’impact» est une pratique courante en évaluation d’impacts. La
fiche d’impact est un des outils employés comme support de l’information de plu-
sieurs méthodes d’évaluation. Toutefois, son emploi fort répandu et l’étendue de son
Figure 5.2
Liste indicative des éléments d’inventaire de corridors
ÉLÉMENTS SENSIBLES À L’IMPLANTATION DE CONDUITES ET DE STATIONS DE POMPAGE
Sensibilité: forte (F), moyenne (M) et faible (f)
1. ESPACE FORESTIER
– Boisé rare (F)
– Secteur forestier d’intérêt (verger à graines, forêt
d’expérimentation, arboretum) (F)
– Forêt d’enseignement et de recherche (F)
– Pépinière (f)
– Massif boisé d’intérêt (M)
– Zone d’aménagement forestier (M)
– Grande zone de perturbations récentes (brûlis,
chablis, etc.) (f)
– Tourbière (F)
2. ESPACE FAUNIQUE
– Réserve faunique (M)
– Aire de concentration d’oiseaux migrateurs
ou aquatiques (F)
– Colonie d’oiseaux (F)
– Aire de repos et de reproduction
de la sauvagine (M)
– Réserve de poissons (F)
– Frayère (F)
– Habitat faunique d’intérêt (M)
– Aire de répartition d’espèces menacées (F)
3. ESPACE AGRICOLE
– Horticulture, culture spécialisée ou zone
de verger (F)
– Grande culture, aire de pâturage ou friche
herbacée (M)
4. ESPACE TERRESTRE PARTICULIER
– Réserve écologique (F)
– Site historique (F)
– Site archéologique (F)
– Zone humide d’importance nationale (F)
– Zone inondable (F)
– Zone à risque d’érosion (F)
– Zone de ravinement ou de glissement (F)
– Réservoir projeté (F)
– Zone d’escarpement (M)
5. ESPACE AFFECTÉ À L’EXTRACTION
– Mine (F)
– Carrière ou sablière (F)
6. ESPACE POUR LA VILLÉGIATURE,
LES LOISIRS OU LE TOURISME
– Parc national de conservation (F)
– Site touristique ou récréatif d’intérêt ou zone
de villégiature (f)
– Équipements touristiques ou récréatifs
d’importance (F):
• terrain de golf (F)
• base de plein air ou colonie de vacances, centre
de ski alpin(F)
• jardin zoologique (F)
• terrain de camping (F)
– Projet d’aménagement ou de développement
d’importance (M)
– Site exceptionnel (M)
– Lieu d’intérêt visuel (M)
– Zone d’observation stratégique (M)
– Route panoramique (M)
197
Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux
application (somme de données possibles), en tant qu’instrument d’identification et
de support à l’information, en font au même titre que la liste de contrôle un outil
bien particulier de l’ÉIE.
Nous ne présentons qu’un seul exemple de la grande variété de modèles possibles,
le principe général pouvant en être aisément suivi et développé selon les besoins par-
ticuliers de chaque projet. La somme des informations qui s’y retrouvent peut par-
fois être très importante. La figure 5.3 montre un modèle récent de fiche d’impact,
mais la plupart des fiches sont souvent plus simples. L’information concerne habi-
tuellement un certain nombre des caractéristiques de l’identification et de l’évalua-
tion de l’impact. Dans l’exemple présenté ici, nous trouvons de manière assez éla-
borée un grand nombre des sujets courants, à savoir l’identification et la description
de l’impact, l’évaluation de l’impact potentiel, l’évaluation finale de l’impact, c’est-
à-dire l’impact résiduel, ainsi que l’ajout de mesures d’atténuation et l’élaboration
de mesures de compensation.La manière d’évaluer en deux phases complètes les impacts
(impact potentiel et impact résiduel) est plutôt rare, mais elle s’avère fort utile pour
le contrôle et le suivi.
Étant donné la diversité de langage et de style des résultats obtenus en provenance
des diverses disciplines impliquées en ÉIE, la fiche d’impact s’avère un outil fort com-
mode de compilation des données.La standardisation permise grâce à ce support uni-
forme permet une codification efficace de l’information et par la suite un moyen rapide
de recherche de renseignements. Cette efficacité est importante en raison de la
nature disciplinaire de la caractérisation du milieu et de la prédiction des impacts,
ce qui engendre une très grande variabilité dans la description et la présentation des
résultats. Par l’emploi de fiches standardisées, il est plus facile de repérer ensuite l’in-
formation complète au sujet d’un impact donné. Le contrôle et l’accès aux données
en sont considérablement facilités.
La fiche d’impact offre une vue incomplète de l’évaluation de l’impact d’un projet,
elle ne peut contenir tous les paramètres et les aspects nécessaires à un examen entier.
Toutefois, elle expose adéquatement les différents impacts environnementaux et elle
représente un complément opportun, voire indispensable, des autres méthodes
d’ÉIE et tout particulièrement des approches matricielle et cartographique.
L’enquête Delphi
L’enquête Delphi n’est pas à proprement parler une approche spécifique d’évalua-
tion des impacts environnementaux; il s’agit plutôt d’une technique générale d’ac-
quisition des connaissances.L’enquête Delphi est un procédé d’obtention de consensus
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  • 1. Préconstruction Études préliminaires Toutes études en vue de l’installation des campements de travail et des équipements du projet. Ceci implique le déplacement de la machinerie et la prise d’échantillons. Arpentage Localiser les composantes et baliser la zone des travaux par la pose d’une signalisation appropriée. Acquisition des emprises Négociation pour acquérir l’emprise (achat) ou pour obtenir un droit de passage (entente sur la valeur foncière). Installation de chantier La localisation du matériel servant à la construction des installations doit faire l’objet d’une attention particulière. Construction Transport et circulation Déplacement de la machinerie et des employés pour la construction des équipements dans l’emprise et à proximité. Excavation, forage Tout ce qui touche le creusage du sol et la pose des équipements. et dynamitage Identification des façons de faire selon le type de fondation et de sols. Bâtiments et équipements L’endroit où seront installés les bâtiments et l’entreposage des matériaux durant les travaux de construction. Réaménagement des aires Réaménagement des milieux ayant subi divers impacts liés aux activités de travaux énumérées précédemment. Exploitation Transport et circulation La réparation des équipements et l’entretien impliquent une circulation à proximité des installations. Présence physique La présence des installations ainsi que leur fonctionnement engendrent des installations une série d’impacts: nuisance visuelle, olfactive, etc. Gestion des déchets Transport des déchets solides, liquides ou dangereux vers des lieux et des eaux usées d’élimination prévus à cet effet. Les eaux usées doivent être envoyées à une usine de traitement. Sécurité et intervention Il faut prévoir des aires sécuritaires d’entreposage pour les produits d’urgence contaminants ou dangereux provenant de l’exploitation ainsi que la mise en place de plans d’urgence advenant le déversement de produits dangereux. Ces plans doivent être connus des intervenants. 158 L’évaluation des impacts environnementaux compte tenu des moyens et des ressources limités, ne semble toutefois pas être tou- jours observé. De plus, une attention spéciale doit être accordée aux éléments environnemen- taux valorisés, peu importe les raisons de cette valorisation (scientifique, législative ou populaire) ou leur provenance (type d’acteurs), ainsi qu’aux éléments particu- lièrement sensibles de l’environnement. Cette opération est bien sûr en rapport direct avec les enjeux environnementaux déterminés lors de l’étude préliminaire du contexte général. Figure 4.8 Liste de sources d’impacts potentiels, selon les phases d’un projet Sources d’impacts Description de l’activité
  • 2. 159 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux La première étape de l’identification des éléments consiste à décrire globalement le milieu d’implantation. Après avoir délimité l’espace de référence, il s’agit d’effec- tuer une rapide caractérisation du milieu ainsi délimité. Essentiellement, il s’agit de souligner les éléments environnementaux valorisés ou de grande importance.Ensuite, l’étude portera uniquement sur les éléments qui seront éventuellement touchés par la réalisation du projet. Cette deuxième étape examinera alors de manière plus attentive les éléments environnementaux ainsi sélectionnés. En ce qui concerne les autres, notamment ceux valorisés, il s’agit de préciser qu’ils ne seront pas affectés par le projet. L’identification des divers éléments de l’environnement implique une subdivi- sion ou, à l’inverse, un regroupement plus ou moins important des éléments sélec- tionnés. Il existe toujours une certaine forme d’agrégation des éléments; il est inutile, voire impossible,d’examiner chacune des espèces d’un écosystème complexe.La sélec- tion s’intéresse autant aux éléments des milieux biophysiques qu’à ceux des milieux humains de l’environnement, selon la portée accordée au concept d’environnement par la législation en vigueur. Comme pour la détermination des activités afférentes au projet, l’identification des éléments de l’environnement peut s’effectuer à partir de l’expérience de spécia- listes du milieu, ainsi qu’à l’aide de listes de contrôle réalisées à cet effet. Ces dernières énumèrent souvent les divers éléments environnementaux potentiellement atteints par la réalisation d’un type de projet ou pour un écosystème particulier. Un exemple d’une telle liste est fourni à la figure 4.9. Dans l’exemple présenté ici, les 41 éléments qui la composent touchent tous les domaines d’une conception large de l’environ- nement. Les listes disponibles, parfois à caractère très général, doivent être adaptées aux composantes particulières du milieu concerné. Cependant, les grands groupes d’élé- ments environnementaux demeurent presque partout semblables; seule la caracté- risation du milieu pourra déterminer les éléments présents. Nous verrons plusieurs de ces aide-mémoire au cours du chapitre suivant; ils constituent bien souvent l’un des axes des matrices utilisées en ÉIE. Différentes listes des éléments peuvent être dres- sées selon le contexte particulier d’implantation du projet à l’étude. Selon le cas, les listes sont plus ou moins exhaustives et pertinentes pour l’objet d’étude. La célèbre liste de Léopold, par exemple, que nous verrons au cours du prochain chapitre, est un peu plus exhaustive; elle contient 86 éléments de l’environnement plus ou moins amalgamés.
  • 3. 160 L’évaluation des impacts environnementaux Interaction activités/éléments environnementaux À partir de l’identification des activités du projet et des éléments environnementaux, il ne s’agit plus maintenant que de noter les possibles interactions entre eux. Cet exer- cice permet de souligner les seuls effets ou impacts appréhendés du projet envisagé. Il permet aussi de montrer les liens de cause à effet entre les activités du projet et les éléments de l’environnement. En pratique, cette opération représente une première approximation, mais tout de même assez juste, des impacts du projet. Cette opération de mise en évidence des interactions ne peut se faire qu’en étroite relation avec les deux opérations précédentes; elle pourrait même se confondre avec celle de l’identification des éléments de l’environnement. En effet, l’identification des interactions s’effectue dans une démarche itérative avec l’identification des activités et celle des éléments. On peut difficilement dissocier ces trois opérations distinctes les unes des autres. Les choix effectués à partir de la définition ou de l’élaboration des problèmes relatifs à chacune de ces trois opérations interagissent avec celles des Figure 4.9 Liste de contrôle d’éléments de l’environnement Paramètres physicochimiques Paramètres microbiologiques Ruissellement/Infiltration/Perméabilité Régime hydrodynamique Régime morphosédimentologique Qualité du sol/Pédologie Modelé du terrain/Géomorphologie Caractéristiques d’ingénierie du sol Physicochimique Matières particulaires et en suspension Température/Ensoleillement Évapotranspiration/Évaporation/Humidité Précipitations Vents Odeurs Bruits/Vibrations Structure/Densité/Composition Productivité/Succession Espèces rares ou menacées Habitat Ressources énergétiques et matérielles Biodiversité Agricole, forestier et pastorale Zone touristique et de loisir Site archéologique, historique ou rituel Site à accès contrôlé Zone urbaine/préurbaine Migration/Nomadisme Coutumes/Traditions Démographie Potabilité/Disponibilité de l’eau Santé Protection civile/Taux d’accidents Emploi/Revenus Circulation Équipements collectifs Coûts des services Développement local Caractéristique du paysage Confort public et bien-être Services collectifs X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X
  • 4. 161 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux autres. Ainsi, le fait de déterminer une activité perturbatrice permet généralement d’anticiper les éléments de l’environnement qui seront touchés. L’identification des interactions est facilitée par l’utilisation de matrices ou de réseaux d’interactions. Ces deux derniers outils d’analyse seront étudiés dans le prochain cha- pitre. Toutefois, nous présentons, à la figure 4.10, une section d’une matrice des inter- actions que nous avons employée récemment dans le cadre d’un projet d’adduction d’eau potable au Maroc. Il s’agit d’un exemple d’interaction entre les activités et les éléments de l’environnement, les interactions indiquées dans cet exemple étant purement hypothétiques et ne servant qu’à illustrer le principe de fonctionnement. L’exemple montre qu’il existe une interaction entre l’acquisition des emprises et l’hy- drologie des cours d’eau, ainsi que les eaux souterraines qui seront affectées par trois activités différentes reliées uniquement à l’aménagement des sites durant la phase de construction. La présentation matricielle ne permet toutefois pas toujours de noter toutes les interactions, notamment les interactions indirectes, secondaires et, surtout, les actions cumulatives. Identification des effets/impacts environnementaux La distinction entre l’identification des effets et des impacts environnementaux et celle des interactions est bien subtile, voire, dans certains cas, superflue. Cependant, l’identification des effets/impacts permet bien souvent de réaliser une véritable énu- mération des impacts significatifs et donc des interactions indispensables. La simple analyse matricielle des interactions, par exemple, ne représente parfois qu’une pre- mière approximation. Le relevé détaillé des effets/impacts permet par contre d’éli- miner les interactions à incidences négligeables sur l’environnement; une première sélection est donc effectuée. Par ailleurs, les impacts secondaires, indirects et cumu- latifs, que nous examinerons après, ne peuvent être soulignés par cette seule mise en évidence des interactions; il faut donc aller au-delà de cette opération. Il n’est sans doute pas toujours nécessaire de pouvoir distinguer les effets des impacts environnementaux. Dans certains cas, confondre les deux n’entraîne pas de consé- quences importantes pour l’examen.Toutefois,cette distinction peut s’avérer fort utile dans l’estimation des véritables conséquences environnementales d’un projet, bien que son importance puisse paraître parfois négligeable, de prime abord. Ainsi, dans le cas d’émissions atmosphériques nocives, il s’agit d’un effet; ce qui importe avant tout, c’est de déterminer les conséquences sur les divers éléments de l’environnement, c’est-à-dire les impacts mêmes des émissions. Dans ce cas, l’identification élémen- taire des effets, à savoir les gaz émis, n’est pas suffisante afin de noter et par la suite d’évaluer l’impact environnemental. L’identification des conséquences de ces effets
  • 5. 162 L’évaluation des impacts environnementaux sur les éléments de l’environnement peut seule déterminer avec précision les impacts potentiels du projet en question. Il faut ainsi parcourir les diverses chaînes causales menant des activités aux effets et inévitablement aux impacts. Cette opération intro- duit bien entendu les deux paramètres suivants: l’identification des impacts indirects et celle des impacts cumulatifs. En ce qui a trait aux impacts environnementaux, on peut en distinguer plusieurs. Cette typologie de l’impact est déterminée par le degré d’exactitude ou de certitude avec lequel nous pouvons les apprécier. Cela repose bien sûr sur l’état de nos connais- sances, mais aussi sur le moment auquel s’effectue l’examen. Le schéma de la Figure 4.10 Modèle simplifié de matrice des interactions potentielles utilisant une cotation simple A Cours d’eau Légende Impacts négatifs Impacts positifs Eaux souterraines Qualité des eaux Régime hydrodynamique Ruissellement/infiltration/bilan Forme et relief Nature des dépôts Qualité de l’air et odeurs Bruits/vibrations Faune terrestre, aquatique et avienne Flore terrestre et aquatique Écosystème B C D E F G H I J K L Modification de tracés et de routes Dragage et travaux maritimes Excavation, forage et creusage Aménagement des sites Installation de chantiers Déboisement et reboisement Acquisition des emprises Études et aménagements préléminaires 7 6 5 4 3 2 1 MILIEU BIOPHYSIQUE ÉLÉMENTS ENVIRONNEMENTAUX ACTIVITÉS DU PROJET CONSTRUCTION
  • 6. 163 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux figure 4.11 expose les divers types d’impacts et leurs rapports à la phase d’étude ainsi que le degré de précision ou de certitude de la connaissance de l’impact. En ordre croissant d’exactitude, ce peut être des impacts appréhendés, des impacts potentiels, des impacts résiduels ou des impacts réels. Au fur et à mesure que l’examen avance, la mesure de l’impact se précise, passant de l’anticipation à la réalité. Figure 4.11 Phases de l’examen, types d’impacts possibles et degré de certitude des prédictions Phase DE CONTRÔLE Phase D’ÉVALUATION Phase D’IDENTIFICATION Mesure d’atténuation Degré de certitude de l’estimation IMPACT APPRÉHENDÉ IMPACT POTENTIEL IMPACT RÉSIDUEL IMPACT RÉEL Ce n’est toutefois qu’à la suite d’un examen de suivi postprojet, une opération rarissime en ÉIE jusqu’à maintenant,que les impacts réels pourront être mesurés,vali- dant ou non les évaluations antérieures. La probabilité qu’un impact ou qu’un effet se produise tel que présenté dans l’étude dépend fortement de la précision avec laquelle ces paramètres ont été évalués.On peut délimiter quatre catégories pour décrire la probabilité d’une estimation: avec certi- tude, forte probabilité, probabilité moyenne ou faible probabilité (Davies et Sadler, 1990). Bien entendu, pour un même impact la probabilité devrait être croissante dans le temps, comme nous venons de le voir. Toutefois, l’un des plus grands défis métho- dologiques de l’estimation avec certitude de l’impact réside dans l’impossibilité d’établir des liens de cause à effet de manière rigoureuse dans la plupart des cas (idem). Comme pour l’identification des interactions, celle des effets et des impacts envi- ronnementaux peut se faire soit à l’aide de listes de contrôle des impacts environ- nementaux appréhendés,préétablies ou non,soit avec l’emploi de matrice et de réseau, ce qui est préférable, soit finalement à l’aide de toute autre méthode d’identification.
  • 7. 164 L’évaluation des impacts environnementaux Relevé des impacts indirects et secondaires Le relevé des impacts environnementaux signifie la prise en compte de toute la chaîne d’interactions entre les activités du projet et les éléments du milieu.L’étude doit porter sur l’enchaînement des incidences, de l’événement initial jusqu’à son terme ultime. Toutes les modifications significatives d’un élément de l’environnement deviennent dès lors objet d’étude. Il ne s’agit donc pas de limiter l’étude aux seuls impacts directs, les plus facilement repérables, parce qu’étant initialement observables. Les impacts indirects et secondaires doivent être pris en compte au même titre que les impacts directs. Il est parfois malaisé, et pas nécessairement utile, de distinguer les impacts indi- rects des impacts secondaires. Cette distinction n’est d’ailleurs pas toujours observée. Les impacts indirects seraient issus de l’interaction entre un premier impact et un second élément de l’environnement. Nous avons ici affaire à une relation impact- éléments. L’impact secondaire, quant à lui, serait plutôt le résultat de l’incidence d’un premier élément affecté par une activité quelconque sur un second élément initia- lement non perturbé par cette activité. Il s’agit donc là d’une interaction élément- élément. On pourrait aussi faire intervenir des impacts tertiaires, et ainsi de suite. Par ailleurs, les distinctions entre impacts directs et indirects sont parfois confon- dues avec celles existant, comme nous l’avons vu précédemment, entre les effets et les impacts environnementaux. Plus les efforts de l’examen porteront sur les impacts, à l’encontre du seul relevé des effets, moins la nécessité d’étudier les impacts indi- rects et secondaires se fera pressante. Parmi les méthodes employées en évaluation environnementale,seules certaines permettent vraiment une prise en compte des impacts indirects et secondaires; ce sont habituellement les approches dites en réseaux ou en diagrammes, que nous verrons au chapitre suivant. Relevé des impacts cumulatifs Le relevé des impacts cumulatifs est une procédure plutôt exceptionnelle dans les éva- luations couramment réalisées jusqu’ici.Toutefois,leur prise en compte dans la démarche d’étude est une des grandes préoccupations actuelles et deviendra sans doute éven- tuellement l’un des aspects primordiaux de tout examen d’évaluation d’impacts. Il y a plusieurs définitions de ce que pourrait être un impact cumulatif; tous les auteurs ne s’accordent pas et proposent des définitions souvent très distinctes.Ainsi, l’impact cumulatif peut être le cumul de plusieurs impacts sur le même élément de l’environnement, c’est-à-dire de la part de diverses activités d’un même projet. Il peut
  • 8. 165 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux s’agir alors d’un effet synergique, l’ampleur de l’impact résultant étant alors bien plus qu’une simple addition. De tels impacts pourraient être dénommés «impacts syner- giques», et non plus «impacts cumulatifs». Habituellement, l’impact cumulatif fait plutôt référence à l’accumulation d’impacts similaires sur un même élément de l’en- vironnement, mais en provenance de différents projets. Dans ce cas, l’impact initial se trouve amplifié en conséquence du nombre de projets affectant l’élément de l’en- vironnement. La prise en compte de l’aspect cumulatif des impacts signifie un examen plus com- plet que la pratique usuelle le recommandait jusqu’à tout récemment. Elle représente ainsi une charge plus lourde pour l’ÉIE, tant pour les promoteurs que pour les éva- luateurs d’un projet. D’une part, l’étude des autres projets, ceux déjà réalisés ainsi que ceux à venir, oblige un mandat d’étude plus étendu et un examen plus long et par- fois indéfini. D’autre part, la connaissance plus poussée des interactions entre les acti- vités d’un projet ainsi qu’entre les divers impacts et éléments environnementaux engage des moyens et des ressources souvent considérables.Dans le cas de la présence d’autres projets, les obligations et les responsabilités des promoteurs vont en s’accentuant dans le temps. Voilà qui a pour première conséquence de diminuer d’autant la marge de manœuvre du dernier arrivé. Les autorités de contrôle ne déterminent pas toujours les limites à observer, d’autant plus que certains projets outrepassent leur propre juri- diction. La délimitation des nombreux domaines de référence possibles dans le cas de l’examen des impacts cumulatifs pose de sérieux problèmes. Ainsi, la zone d’étude s’agrandit selon les exigences du nouveau contexte d’examen.Des considérations simi- laires s’appliquent aussi en ce qui concerne la délimitation de l’horizon et des états de référence. Ces facteurs ont bien sûr une grande incidence sur l’ampleur même des impacts.La figure 4.12 montre la variation type des états de référence possibles lorsqu’il y a prise en compte de deux projets. La mise en évidence de certains impacts significatifs, autrement occultés, est l’une des propriétés essentielles d’une analyse de l’impact cumulatif. En effet, une activité unique ou un impact isolé pourrait n’avoir qu’un impact négligeable sur l’environ- nement, mais l’effet synergique ou d’accumulation, dans le cas d’un même projet ou de plusieurs, pourrait alors constituer un impact significatif et important sur un ou certains éléments de l’environnement. Compte tenu de ce que nous venons de dire et de la situation actuelle des pro- cédures d’ÉIE, seule la planification environnementale ou l’élargissement de la démarche usuelle de l’ÉIE,par un examen stratégique,régional ou sectoriel,par exemple,
  • 9. 166 L’évaluation des impacts environnementaux pourrait systématiquement tenir compte de l’aspect cumulatif de l’impact envi- ronnemental. En effet, cet aspect important de l’éva- luation d’impacts est rare- ment pris en compte de façon complète par les études actuelles d’ÉIE, notamment parce que la pratique courante ne repré- sente presque toujours que l’examen d’un seul projet à la fois. L’examen à un palier supérieur à celui de projet, l’évaluation stratégique,notamment,pourrait donc permettre une meilleure évaluation des impacts cumulatifs. Descripteurs d’impacts (indicateurs) Les descripteurs ou indicateurs d’impacts représentent les outils de mesure des élé- ments ou des paramètres environnementaux à partir de méthodes spécifiques. Ces méthodes, non particulières à l’ÉIE, regroupent l’ensemble des méthodes standar- disées des diverses disciplines scientifiques, tant en sciences physiques qu’en sciences humaines.Ce sont,par exemple,l’évaluation (identification et quantification) des émis- sions et de la dispersion du SO2 en ce qui concerne la qualité de l’air, des paramètres physicochimiques de l’eau, ou la mesure des incidences sociales, psychologiques (qua- lification) ou économiques sur une population donnée. Les descripteurs d’impacts fournissent tout d’abord la mesure de l’état actuel des éléments de l’environnement. Ils permettent ensuite l’estimation des agressions résultant de la mise en place des diverses activités et composantes du projet sur les éléments du milieu. Les méthodes d’analyse des descripteurs font appel aux protocoles d’étude des diverses disciplines scientifiques,mais plus particulièrement des sciences biophysiques. Les sciences humaines étant moins explicites sur cet aspect, elles sont conséquem- ment moins précises dans l’étude rigoureuse des impacts humains de l’ÉIE. Figure 4.12 États de référence, impacts environnementaux et impacts cumulatifs État de référence sans projet État de référence avec le projet 3 Évolution temporelle du système Qualité du système – + Projet 1 Projet 2
  • 10. 167 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux La profondeur (degré de détails) et l’étendue du champ d’étude des descripteurs doivent être conséquentes avec l’objet d’étude, les moyens et les ressources de l’équipe,mais elles doivent permettre néanmoins une connaissance suffisante des phé- nomènes en cause afin d’identifier et d’évaluer correctement les impacts environne- mentaux potentiels. Nous traiterons de manière beaucoup plus détaillée des descripteurs d’impacts dans le chapitre six. Estimation des modifications résultantes L’estimation des modifications résultantes représente en fait une étape intermédiaire et habituellement indissociable entre l’identification et l’évaluation de l’impact.Il s’agit ici de prédire,avec le plus de justesse possible,la nature et l’ampleur des impacts appré- hendés.En pratique,l’estimation consiste à prédire les modifications anticipées,à l’aide des données fournies par les descripteurs et grâce à des projections dans l’avenir immé- diat ou futur. L’estimation repose sur notre connaissance des tendances d’évolution des éléments de l’environnement. La dynamique des éléments en cause est généra- lement plus significative qu’une image statique de l’état de la situation présente. Elle requiert toutefois une compréhension plus complète de l’environnement que celle dont disposent ordinairement les évaluateurs en début d’étude. Il s’agit bien sûr d’une opération qui ne s’appuie bien souvent que sur des données incomplètes, partielles ou hautement hypothétiques. Toute prédiction des modifications anticipées engendre son propre degré d’im- précision. L’incertitude entourant les connaissances du milieu concerné, les risques de variations imprévisibles et l’élaboration de prospectives à partir d’états initiaux incertains ne permettent conséquemment qu’une estimation relative des modifica- tions résultantes. L’estimation de l’impact environnemental demeure donc souvent un exercice précaire mais néanmoins primordial. Son appréciation véritable ne pourra toutefois se faire, dans la plupart des cas, que quelques années après la mise en place du projet grâce au suivi postprojet. Le suivi postprojet permettra de véri- fier la validité des estimations effectuées en cours d’examen. Les changements anticipés sont habituellement estimés à partir de différents scé- narios, que ce soit de manière explicite ou tout bonnement de façon implicite. Le ou les scénarios élaborés à cet effet représentent une relative anticipation de l’avenir. Ils peuvent être plus ou moins pessimistes ou optimistes, selon les prémisses de leurs auteurs. Ils sont par contre appréciés ensuite par les différents acteurs, ce qui n’im- plique pas nécessairement un accord parfait. À partir de l’état ou préférablement des
  • 11. 168 L’évaluation des impacts environnementaux tendances de la situation actuelle de l’environnement, on estime les modifications appréhendées, sans oublier de prendre en compte les modifications probables (tendances d’évolution) de l’environnement sans l’intervention du projet, c’est-à-dire ce qu’on nomme souvent, à tort, les modifications «naturelles» du milieu. Cette estimation des impacts ne peut toutefois être obtenue qu’à l’aide d’infor- mations supplémentaires à celles issues de la simple étude des descripteurs. De nou- veaux outils doivent alors être employés, notamment ceux relatifs à la simulation, à la modélisation ou tout simplement à l’emploi de données en provenance d’études similaires. En effet, les résultats des estimations sont bien souvent obtenus à partir de l’expérience acquise lors de l’étude d’autres projets ou de situations similaires anté- rieures.Il s’agit alors de transférer et d’adapter les anciens résultats à l’examen du nou- veau problème. D’autre part, l’estimation peut aussi s’obtenir grâce au recours à la modélisation et à la simulation,plus ou moins complexes,des paramètres en présence, ou par la simple prédiction des impacts potentiels. Nous examinerons quelques-uns de ces outils au cours du prochain chapitre, consacré à l’étude des méthodes. Dans le cas ou l’information s’avérerait toutefois encore insuffisante, il faudra alors y sup- pléer en estimant le plus convenablement possible l’impact environnemental et les modifications résultantes, à partir de méthodes faisant appel à l’expertise même des évaluateurs.Dans ce cas,on utilisera des approches faisant «appel aux experts»,comme la technique Delphi.Nous examinerons aussi cette technique particulière de recherche de la connaissance au cours du prochain chapitre. Certains éléments de l’environnement et plusieurs impacts environnementaux posent de réelles difficultés quant à l’estimation des modifications résultantes. C’est le cas notamment des impacts sociaux.Ainsi, comment évaluer convenablement l’im- pact d’un projet sur une population donnée lors d’un déplacement obligatoire, ou bien dans le cas de l’intrusion d’un projet faisant appel à de la «haute technologie» sur une population traditionnelle? Des difficultés supplémentaires pour l’estimation des modifications environne- mentales résultent aussi de la multiplicité des interactions et des effets de certains sys- tèmes environnementaux.Le degré d’incertitude croît rapidement en présence de mul- tiples impacts indirects ou secondaires,et encore plus lors de la prise en compte d’impacts cumulatifs.En outre,la prédiction de l’impact sur un aspect complexe,comme la santé humaine, n’est jamais une tâche facile, notamment en raison là aussi de l’implica- tion de multiples aspects indirects, secondaires et cumulatifs, mais aussi en raison de la présence d’éléments psychologiques et comportementaux encore plus imprévisibles.
  • 12. 169 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux Évaluation de l’impact environnemental L’évaluation de l’impact environnemental désigne habituellement l’évaluation glo- bale des diverses modifications de l’environnement engendrées par un projet. L’évaluation globale de l’impact prend habituellement en compte de façon indistincte les effets et les impacts environnementaux. L’évaluation vise avant tout à déterminer, avec le plus de justesse possible, l’importance de l’impact environnemental des acti- vités du projet à l’étude. Cette importance ou signification globale des incidences environnementales est obtenue à partir de la mesure d’un certain nombre de critères d’évaluation. La pré- sentation dans le rapport final de l’approche méthodologique employée mentionne habituellement les critères utilisés; mais même si ce n’est pas le cas, il n’en demeure pas moins qu’implicitement, toute évaluation repose sur des critères sous-jacents. Les critères d’évaluation sont variés, mais en règle générale, les critères retenus sont la durée, l’étendue ou la portée et l’intensité ou l’ampleur des dommages ainsi que la réversibilité ou non de l’impact2. L’indice global de l’évaluation (importance globale) résulte alors de l’intégration, d’une manière quelconque, des divers critères utilisés pour l’évaluation des impacts.Cette intégration se fait soit par la simple somme des différents critères ou selon une formule particulière de cotation. Chaque méthode d’évaluation possède sa propre opération de cotation de l’importance, tout comme ses propres critères d’évaluation. La plus élémentaire cotation est bien sûr la simple mention positive ou négative, sans plus d’explications. Pour plus de précision et de rigueur, on devrait distinguer l’importance des effets de celle des impacts.En effet,les critères d’évaluation diffèrent sensiblement selon qu’il s’agit d’un effet ou d’un impact.Les aspects particuliers de chacun recommandent donc des critères d’évaluation dissemblables. C’est ainsi que nous présentons de manière séparée les critères d’évaluation des effets de ceux des impacts, quoique la pratique courante en ÉIE n’en fasse généralement que peu de cas. 2. Nous verrons qu’il existe plusieurs autres critères employés, la plupart du temps, sans distinction entre un effet ou un impact. De plus, des critères particuliers, comme la valeur intrinsèque des élé- ments environnementaux, compliquent les modes d’agrégation des critères afin d’obtenir la valeur globale d’un effet ou d’un impact.
  • 13. 170 L’évaluation des impacts environnementaux Évaluation de l’importance des effets L’évaluation de l’importance ou de la signification des différents effets environnementaux repose sur une série de critères d’évaluation bien particuliers. Ces critères sont habi- tuellement la durée de l’activité génératrice d’effet, l’étendue de la zone affectée et l’intensité même de l’effet. Chacun des effets est ensuite évalué de façon globale en fonction de ces différents critères, selon une méthode particulière de cotation inté- grant la valeur de tous les critères, de la simple moyenne entre tous les critères à la prise en compte d’une valorisation de certains d’entre eux. La prise en compte de l’en- semble des critères d’évaluation représente alors l’importance globale de l’effet. Les systèmes de cotation employés en ÉIE ne sont pas nécessairement systéma- tiques et toujours très rigoureux. Bien souvent, ils ne sont présentés qu’à titre indi- catif de la valeur globale, car leur emploi strict relève avant tout du jugement de l’éva- luateur. Il est important de rappeler que l’essentiel de la distinction entre les effets et les impacts, par rapport à leur évaluation, provient du fait que les premiers sont indé- pendants du milieu d’insertion dans lequel ils se produisent. Ils ne sont que la consé- quence directe d’une activité – les émissions atmosphériques, par exemple. Les critères d’évaluation de l’importance des effets environnementaux que nous proposons ici sont: • la durée; • l’étendue; • l’intensité. Durée de l’effet La durée de l’effet représente l’estimation du temps pendant lequel l’effet d’une acti- vité du projet se fera sentir. Cette durée est plus ou moins longue selon qu’il s’agit d’un effet permanent, intermittent ou occasionnel. On subdivise généralement le critère de durée en: • durée courte (court terme); • durée moyenne (moyen terme); • durée longue (long terme).
  • 14. 171 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux Une durée courte est le résultat d’un effet occasionnel et bref ou d’un événement ponctuel. La durée moyenne comprend les effets temporaires ou continus sur une période de temps inférieure à la période de l’activité elle-même, ou lors d’une phase temporaire de réalisation du projet – la période de construction, par exemple. Enfin, une durée longue désigne habituellement un effet permanent. Comme on peut le constater, la délimitation du critère de durée, comme pour la plupart des autres critères, d’ailleurs, repose en partie sur la subjectivité des éva- luations et, conséquemment, des évaluateurs. La responsabilité de ce dernier est donc très grande, puisque les autres acteurs du processus n’examinent que très rarement en profondeur ces critères d’évaluation, pourtant déterminants pour l’estimation des véritables conséquences anticipées. Étendue L’étendue représente l’espace affecté par un effet donné. Cette zone couverte par l’effet représente en fait la superficie de territoire ou le volume d’espace.L’expansion de l’effet par rapport au lieu d’origine de l’événement dépend de la nature même de l’effet; il peut donc varier considérablement. Par exemple, le bruit et les odeurs ne se dispersent pas autant que peuvent le faire des émissions atmosphériques et des rejets dans l’eau. L’étendue peut aussi varier de manière significative en fonction du temps; le moment de sa mesure est donc important. Le critère de l’étendue peut lui aussi être subdivisé de la manière suivante: • étendue locale (faible étendue); • étendue régionale (moyenne importance); • étendue générale ou globale (étendue maximale). Comme pour les valeurs possibles du critère de durée,celles de l’étendue reposent en partie sur des aspects subjectifs;ainsi,il n’est pas toujours facile de séparer une étendue locale d’une étendue régionale. Intensité L’intensité de l’effet représente l’ampleur ou la puissance d’un effet. La détermina- tion de l’intensité est souvent mesurée par rapport à une valeur de référence – une situation idéale ou une norme établie, par exemple. Au-delà d’un certain seuil, l’in- tensité peut être considérée comme inadmissible. Il s’agit aussi d’une valeur bien rela- tive, dont le cheminement dans l’atteinte des résultats est difficilement reproductible
  • 15. 172 L’évaluation des impacts environnementaux avec précision, car trop souvent échafaudée sur des jugements subjectifs sous-jacents aux explications fournies. Cette subjectivité demeure valable même dans le cas d’une norme environnementale reconnue, notamment parce que cette dernière varie dans l’espace et le temps. Le critère de l’intensité varie donc sensiblement selon les méthodes employées et les experts consultés, ainsi que par rapport à la perception des autres acteurs impli- qués dans le processus d’examen. En effet, l’émission d’une certaine dose de radio- activité est habituellement considérée d’une intensité plus faible par les experts du domaine nucléaire que par tous les autres acteurs,notamment par la population proche d’un site nucléaire. L’intensité est généralement représentée sous la forme d’une échelle graduée d’in- tensité. Les valeurs possibles, sans trop d’explications quant aux limites respectives, sont habituellement réparties selon qu’il s’agit: • d’intensité faible; • d’intensité moyenne; • d’intensité forte. Importance globale de l’effet L’importance globale de l’effet constitue l’évaluation finale de l’effet environnemental. Elle s’obtient à partir de la prise en compte des différents critères d’évaluation de l’effet, de la simple somme des critères à une forme particulière plus ou moins complexe de cotation. Occasionnellement, d’autres critères d’évaluation complètent ou rem- placent l’estimation à partir de ceux que nous venons de présenter ici. Évaluation de l’importance des impacts L’évaluation de l’importance ou de la signification globale des différents impacts envi- ronnementaux repose, elle-aussi, sur une série de critères d’évaluation. Ces critères sont par contre légèrement différents de ceux de l’évaluation des effets. Afin de pou- voir évaluer les impacts, il faut tenir compte de la réponse de l’environnement à l’ac- tion des effets.La sensibilité même des éléments de l’environnement vis-à-vis des agres- sions détermine bien souvent l’estimation des dommages qui en résulteront. L’évaluation des impacts ne peut donc s’effectuer sans une connaissance satisfaisante des éléments de l’environnement, contrairement à la situation des effets environne- mentaux. En conséquence, l’évaluation des impacts ne peut être réalisée pleinement dans le cadre d’un examen stratégique ou de celui d’un projet imprécis.
  • 16. 173 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux L’évaluation de l’impact est habituellement une opération plus complexe que celle de l’évaluation d’un effet. Ainsi, il est beaucoup plus complexe d’estimer l’impact de précipitations acides sur un ensemble d’éléments de l’environnement,comme la santé des gens, la détérioration des bâtiments, l’acidification des cours d’eau et des sols, que de déterminer simplement les quantités d’émissions de soufre d’une entreprise, tel que le dicte l’évaluation de l’effet. Les critères spécifiques retenus pour l’évaluation des impacts sont habituellement multiples. De plus, ils sont souvent confondus avec ceux que nous venons de décrire comme étant des critères d’évaluation des effets. Chacun des impacts est évalué de façon globale en fonction des différents critères retenus et selon la méthode parti- culière de cotation. La prise en compte de l’ensemble des critères d’évaluation repré- sente alors l’importance globale d’un impact sur l’environnement. Les critères d’évaluation des impacts que nous proposons sont: • la réversibilité; • la portée; • l’ampleur. Réversibilité/irréversibilité La réversibilité ou au contraire l’irréversibilité d’un impact représente un aspect impor- tant de l’évaluation de l’impact environnemental, au même titre que la durée en ce qui concerne les effets. Ce critère d’évaluation est toutefois rarement pris en compte de manière explicite en ÉIE, malgré son importance cruciale en plusieurs domaines, notamment en ce qui concerne la biodiversité3. Ce critère difficile à manipuler cor- respond à la rétroaction dans le temps d’un élément de l’environnement par rapport à une agression quelconque.La sensibilité des éléments de l’environnement aux agres- sions prend ici une large place dans la réversibilité ou non de l’impact.Ainsi, ce n’est pas parce qu’un effet a une durée permanente qu’un élément de l’environnement est irrémédiablement perdu, et à l’inverse, un effet ponctuel pourrait très bien entraîner la disparition de l’élément. 3. Le critère de réversibilité, comme certains autres critères d’évaluation, n’est parfois qu’une des com- posantes d’un autre critère. Le résultat de telles opérations est une confusion par rapport à la métho- dologie employée et le manque de rigueur de la démarche. Ainsi, il n’est pas rare de constater la surestimation d’un paramètre d’étude par la simple prise en compte multiple d’une même influence.
  • 17. 174 L’évaluation des impacts environnementaux Le caractère d’irréversibilité conféré à un impact est un critère parfois détermi- nant dans la décision de réaliser un projet. De toute façon, il constitue presque tou- jours un critère très important pour certains éléments fortement valorisés. En ce qui concerne la biodiversité, et plus particulièrement dans le cas d’espèces en voie de dis- parition, l’irréversibilité peut représenter l’élimination pure et simple d’une espèce. Cette extinction est communément perçue comme étant un impact inadmissible et ne peut être acceptable, dans la plupart des cas. L’estimation de ce critère peut se subdiviser en: • réversibilité (réversibilité totale); • réversibilité/irréversibilité partielle ou temporaire; • irréversibilité (irréversibilité totale). Portée de l’impact La portée de l’impact représente le nombre d’individus ou d’éléments spécifiques affectés par un effet environnemental donné. Il s’agit d’un critère d’évaluation de l’impact semblable à celui de l’étendue en ce qui concerne l’effet. Contrairement à ce dernier, cependant,il ne repose pas exclusivement sur un espace géographique bien déterminé – ne pensons dans ce cas qu’aux impacts socio-économiques, par exemple. Le critère de portée vise plutôt à mesurer l’abondance relative (quantité) d’un élément de l’en- vironnement. Le critère d’estimation de la portée peut être subdivisé en: • portée faible (nombre restreint); • portée moyenne (nombre moyen); • portée forte (nombre élevé). La variable temporelle modifie la portée d’un impact, notamment pour des éva- luations à long terme,comme c’est le cas avec la prise en compte des générations futures. La modification entraînée par le temps peut soit amplifier, soit réduire la portée d’un impact. D’autre part, le critère de la portée de l’impact, comme d’ailleurs celui de l’étendue pour l’effet, est une appréciation quantitative, contrairement aux opérations plutôt qualitatives de l’intensité de l’effet et de l’ampleur de l’impact. Ampleur de l’impact L’ampleur de l’impact constitue la puissance (grandeur) des modifications engendrées à un élément de l’environnement. Le critère de l’ampleur de l’impact fait référence
  • 18. 175 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux à la relative fragilité ou sensibilité de l’élément environnemental considéré par rap- port à l’effet perturbateur responsable. En ce sens, il existe des liens étroits entre l’am- pleur et la réversibilité ou non de l’impact. Ce critère, parfois difficile à estimer, est souvent lui-même subdivisé en critères plus spécifiques. Comme pour la détermination de l’intensité de l’effet, l’évaluation de l’ampleur de l’impact est habituellement une valeur bien relative et, en tant que telle, ne devrait être employée qu’avec précaution. Ici aussi, la sensibilité des éléments de l’en- vironnement exerce une grande influence sur l’évaluation qui est estimée. Comme pour les autres critères,le critère d’estimation de l’ampleur peut être sub- divisé en trois ordres de grandeur, à savoir: • ampleur faible; • ampleur moyenne; • ampleur forte. Importance globale de l’impact environnemental L’importance globale de l’impact constitue le critère général de l’évaluation finale de l’importance de l’impact environnemental.La valeur globale de l’impact s’obtient aussi à partir de la prise en compte des différents critères d’évaluation de l’impact, de la simple somme des critères utilisés à une forme particulière plus ou moins complexe de cotation. Ici aussi, d’autres critères d’évaluation de l’importance de l’impact environne- mental complètent ou remplacent l’estimation faite à partir de ceux que nous venons de présenter. C’est notamment le cas de la valeur intrinsèque des éléments de l’en- vironnement,un paramètre qui influence parfois de manière déterminante l’importance accordée à l’impact. Impact et effet inadmissible Un impact ou un effet environnemental est considéré comme «inadmissible» si son importance globale ou sa signification pour certains acteurs est d’une grandeur telle qu’il est perçu et jugé comme inacceptable d’un simple point de vue environnemental. À la limite, il peut devenir un frein à la réalisation même du projet initial. Un impact inadmissible peut alors être considéré comme une contrainte environnementale absolue ou infranchissable. En ce sens, il vaut mieux l’éviter à tout prix, soit en modifiant le projet en conséquence, soit en mettant en œuvre une mesure d’atténuation le ren- dant acceptable. Dans le cas contraire, sa présence peut signifier l’abandon ou le refus
  • 19. 176 L’évaluation des impacts environnementaux du projet. L’impact ou l’effet inadmissible est aussi nommé indicateur d’alerte ou dra- peau rouge (red flag). Un impact peut être considéré comme inadmissible lorsqu’il est non conforme à une norme réglementaire,par exemple.Il peut alors s’agir d’une toute nouvelle norme ou d’une norme qui n’est pas prise en compte initialement lors de l’étude des contraintes administratives du contexte général. Le dépassement d’un tel seuil d’ad- missibilité ne peut rendre conforme et admissible un projet, sauf si la mise en place de mesures d’atténuation en réduit suffisamment le surpassement. Un impact très important pourrait lui aussi être classé parmi les impacts inadmissibles, notamment lorsqu’il met en péril une espèce rare ou lorsqu’un élément de l’environnement est fortement valorisé par la population – un monument patrimonial ou religieux, par exemple. Cette classe inclut aussi certains impacts ou effets qui pourraient être consi- dérés comme des enjeux importants par quelques acteurs impliqués dans la démarche ainsi que dans les cas litigieux – la revendication contestée d’un territoire, par exemple. Dans tous les cas, l’impact inadmissible devra apparaître clairement dans le rap- port d’évaluation4. Lorsqu’il y a utilisation de matrices ou de réseaux, on lui attri- buera une indication ou un signe particulier bien distinctif et facilement repérable. Dans les autres cas, il s’agira de le désigner clairement. Agrégation des impacts L’agrégation représente l’opération qui consiste à regrouper les différents para- mètres (éléments, impacts ou effets) dans le but d’obtenir ainsi une évaluation plus globale. Il s’agit d’associer différents paramètres afin de les réunir dans un ensemble plus général. C’est ainsi que différents impacts affectant les fougères, les rosiers et les graminées, par exemple, peuvent être agrégés sous l’ensemble plus global d’impact sur les plantes terrestres. À son tour, cet ensemble peut être agrégé avec d’autres, tels que les arbustes et les arbres, afin de représenter un impact plus général sur la flore. 4. Cette question de l’impact inadmissible pose de nombreux problèmes puisqu’elle repose sur une grande part de jugement de valeur et les divergences de vue n’apparaissent habituellement que tar- divement dans l’examen. En effet, un impact peut paraître important aux yeux de l’évaluateur, sans pour autant être perçu comme inadmissible. Par contre, pour des citoyens concernés par une nou- velle norme environnementale en cours d’élaboration ou un objectif de développement durable, par exemple, l’impact peut apparaître comme inadmissible. En conséquence, le rapport d’ÉIE peut très bien ne pas en faire mention, alors qu’une consultation publique ultérieure le rappellera avec insistance.
  • 20. 177 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux Des dix ou cent impacts spécifiques de départ, on en arrive ainsi à un nombre très réduit, voire ici à un seul impact, l’impact sur la flore. L’ultime stade d’agrégation en évaluation des impacts environnementaux est l’at- teinte d’un seul impact global, il s’agit alors de l’évaluation globale du projet. C’est ainsi qu’une unique valeur ou une seule affirmation constitue en fait la conclusion générale de l’étude. Même s’il en est rarement fait explicitement mention, une telle perception générale d’un projet est implicite dans les pensées de beaucoup d’acteurs. Concrètement, il s’agit alors de déterminer un indice unique à la totalité des impacts environnementaux du projet. En pratique, cependant, il est quasi impossible de ras- sembler les différents impacts afin qu’ils puissent ne représenter qu’un seul impact global. Compte tenu de la nature et de l’importance variable des différents impacts, cela n’est d’ailleurs pas souhaitable, sauf bien sûr dans les cas de projets à incidences environnementales négligeables ou restreints à quelques activités ou éléments envi- ronnementaux. L’agrégation d’impacts s’obtient habituellement par le regroupement successif d’im- pacts similaires,comme dans notre exemple précédent sur la flore.Dans ce cas,il s’agit d’agrégation sectorielle, c’est-à-dire de regroupement d’impacts affiliés. Par contre, des difficultés surviennent lorsque le regroupement d’impacts ne peut plus être réa- lisé simplement,étant donné la nature dissemblable ou divergente de ceux-ci.En effet, il n’est pas aisé de réunir des impacts physiques ou biologiques avec des impacts sociaux ou économiques, ni même d’incorporer sous un indice unique la valeur d’un impact sur la forêt et un autre sur les mammifères qui l’habitent. Les limites du regroupe- ment vers une valeur globale, c’est-à-dire vers l’agrégation globale, sont alors atteintes et ne devraient jamais être surpassées. La désagrégation, beaucoup moins employée, est bien entendu l’opération inverse. La figure 4.13 montre une démarche de désa- grégation et d’agrégation successive d’éléments environnementaux, en prenant l’exemple de la flore. L’agrégation pose donc le problème insoluble de l’addition de différents para- mètres afin d’en arriver à une mesure unique ou, à tout le moins, à un regroupement plus global. Cet exercice, souvent périlleux en raison de la spécificité propre à chaque paramètre et de l’importance respective très variable, présente plusieurs contraintes et limites importantes.Ainsi,de quelle façon et sur quelle base théorique peut-on réunir et attribuer une valeur unique à des impacts très différents et présentant en plus des valeurs d’importance variables ou incompatibles? De plus, il faut aussi pouvoir tenir compte des écarts de pondération entre les divers éléments de l’environnement.
  • 21. 178 L’évaluation des impacts environnementaux Dès les premières étapes de l’évaluation, il y a toujours une certaine prédisposi- tion à l’agrégation, même si elle n’est alors qu’implicite. Les paramètres d’étude ini- tialement fragmentés en leur plus petit constituant mesurable ou déterminable sont ensuite habilement regroupés afin de ne plus représenter que des regroupements plus significatifs et plus globaux.Analyse de détails au départ, l’étude devient ensuite une analyse sectorielle et, assez rapidement, elle devient un examen synthèse plus général. L’agrégation n’est souvent justifiée que pour faciliter la manipulation des données ou la présentation des résultats. Lorsque l’agrégation survient au premier stade de l’évaluation, à savoir l’identification des éléments du milieu, par exemple, il s’agit alors d’agrégation préliminaire. Mais la stricte agrégation ou agrégation finale n’intervient généralement qu’aux étapes finales de l’évaluation des impacts. Par ailleurs,toute opération d’agrégation effectuée dans l’examen du projet devrait être explicitement exposée dans le rapport, et non plus demeurer uniquement impli- cite. Il faut pouvoir connaître comment les regroupements et les incorporations ont été réalisés. Les processus d’agrégation reposent souvent sur des jugements de valeurs ou, à tout le moins, ouvrent une large porte à l’aléatoire et au subjectif. Une grande transparence serait alors de mise afin de justifier cet exercice délicat. Figure 4.13 Désagrégation et agrégation successives dans l’examen du milieu Arbres Peupliers Bouleaux Érables Aulnes Sumac Graminées Fleurs Asclépiade Canards Perdrix Chevreuils Lièvres Belettes Arbustes Mammifères Oiseaux Herbacées Arbustes Érablière Érablière Flore Faune Herbes Gibiers Agrégation sectorielle Agrégation fragmentaire Désagrégation lors de l’analyse
  • 22. 179 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux L’agrégation sert aussi pour la comparaison entre diverses options au projet d’étude et en guise de rapprochement entre différents projets similaires. Dans ces cas, d’ailleurs, il y a une importante agrégation des impacts sur la base de critères géné- raux (agrégation globale ou quasi globale), sauf lorsqu’il y a comparaison à l’aide de méthodes multicritères employant de nombreux critères (agrégation fragmentaire ou quasi absente). L’agrégation repose toujours sur une certaine forme de pondération. Mais le véri- table exercice de pondération intervient seulement lorsque les regroupements par affi- nités (regroupements d’impacts similaires) ne peuvent plus se poursuivre sans qu’in- tervienne ce nouvel outil d’évaluation. Pondération des impacts La pondération représente l’estimation du poids relatif de chacun des paramètres de l’évaluation, c’est-à-dire leur importance respective les uns par rapport aux autres. La pondération concerne aussi bien les impacts et les effets que les éléments envi- ronnementaux. La notion de pondérer désigne l’opération qui consiste à accorder une valeur, un rang ou un degré proportionnel à l’importance respective de chaque para- mètre. Ce classement en ordre d’importance représente en fait une technique de stan- dardisation afin de pouvoir comparer mutuellement ces différents paramètres. Cet exercice permet de comparer différentes options à un projet ou divers projets entre eux. La pondération est une tentative, pas nécessairement toujours réussie, de répondre au genre de questionnement suivant: un impact moyen sur le castor est-il équivalent à un impact moyen sur les autochtones? On cherche à savoir si effective- ment le déplacement d’un autochtone est perçu comme plus important que celui d’un castor. Le paramètre variable est bien entendu ici la valeur respective d’un castor et d’un autochtone. Le plus souvent, il s’agit de déterminer la valeur respective des divers éléments environnementaux et d’en déduire la signification (importance). Concrètement, la pondération consiste à apposer un indice d’importance à chacun ou à un ensemble de paramètres. Les différents paramètres peuvent alors être hiérarchisés ou classés les uns par rapport aux autres. Cette opération effectuée, le choix entre diverses options s’en trouve facilité. La pondération permet aussi une agrégation plus complète des impacts environ- nementaux que ne le permet la simple opération d’agrégation. En effet, l’estimation du poids respectif de chacun des différents paramètres environnementaux permet d’éta- blir une valeur globale à l’ensemble ou,à tout le moins,une base utile de comparaison.
  • 23. 180 L’évaluation des impacts environnementaux Toute comparaison rigoureuse doit nécessairement reposer sur une agrégation et une pondération préliminaires. Il existe différentes méthodes ou techniques de pondération. L’indice ou coeffi- cient d’importance servant à la pondération, comme les techniques servant à l’éta- blir, diffère grandement d’une démarche à l’autre. Parmi les techniques courantes de pondération, les quatre suivantes sont fréquemment employées: • hiérarchisation: classement par catégories d’importance (1re, 2e, 3e catégorie), chacun des paramètres d’une même catégorie (classe) étant considéré comme équivalent en importance; • classement par importance: rang du plus important au moins important de chacun des paramètres (1, 2, 3, 4, etc.); • notation: répartition sur une échelle graduée,de 0 à 10,par exemple,de chacun des paramètres; • distribution des poids: distribution des poids respectifs de chacun des para- mètres à partir d’un quota (x = 10%, y = 8%, z = 6%, etc.). Nous examinerons en détail ces quatre techniques particulières de pondération au cours du prochain chapitre,consacré à l’examen des diverses méthodes.Mentionnons seulement que trois types bien distincts se dégagent des démarches que nous verrons, soit la démarche numérique de Battelle (notation et distribution des poids), la démarche ordinale de Holmes (hiérarchisation) et les techniques de consultation Delphi (variables, selon le cas). Évaluation de la cotation La cotation représente l’utilisation d’indices numériques ou de symboles afin d’in- diquer la valeur accordée aux effets et aux impacts environnementaux. La valeur de l’importance globale des effets et des impacts est ainsi traduite sous la forme d’une cotation particulière, qui peut être plus ou moins complexe, selon le cas. En effet, la valeur globale est presque toujours le résultat de plusieurs critères sous-jacents qu’il faut conjuguer en une seule valeur moyenne. La valeur globale est presque toujours un indice composé; parfois, cependant, chaque critère sous-jacent peut être indiqué séparément. Selon le cas, la cotation emploiera donc un ou plusieurs symboles dis- tinctifs ainsi qu’une démarche d’association et de regroupement des critères d’éva- luation. En pratique, cette méthode se traduit par l’emploi normalisé d’une symbo- lique particulière, habituellement standardisée pour tout le rapport. Cette symbolique est utilisée pour l’examen des différents critères et sous-critères d’évaluation des effets
  • 24. 181 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux et des impacts environnementaux. La cotation recourt habituellement à un système d’agrégation des critères et sous-critères d’évaluation. Il s’agit alors d’un mode d’in- corporation (addition, multiplication) des différents critères d’évaluation afin d’ob- tenir une valeur moyenne pour l’importance globale. La figure 4.14 montre la grande variété de la symbolique et des signes pouvant être employés pour exposer la cotation de l’impact. Figure 4.14 Modèle de matrice avec symbolique de cotation variée A Cours d’eau Légende Représentation variée de la cotation des impacts Eaux souterraines Qualité des eaux Régime hydrodynamique Ruissellement et infiltration Forme et relief Nature des dépôts Qualité de l’air et odeurs Bruits/vibrations Faune terrestre et aquatique Flore terrestre et aquatique Écosystème B C D E F G H I J K L Excavation, forage et creusage Bâtiments et équipements Transport et circulation Installation de chantiers Déboisement et reboisement Acquisition des emprises Études et aménagements préléminaires 7 6 5 4 3 1 2 3 2 1 Dragage et travaux maritimes 8 ÉLÉMENTS ENVIRONNEMENTAUX ACTIVITÉS DU PROJET * * * La cotation est généralement présentée sous la forme d’une échelle plus ou moins étendue. La cotation la plus rudimentaire est celle qui utilise la simple mention de positive ou de négative pour la valeur des impacts. Habituellement, une échelle plus
  • 25. 182 L’évaluation des impacts environnementaux ou moins étendue répartit les valeurs possibles de la cotation de zéro à dix (0 à 10), par exemple. Une gradation très étendue de la cotation requiert généralement une quantification importante et adéquate des différents critères d’évaluation. Une échelle réduite de un à trois (1 à 3) est plus maniable et plus commode à employer dans la plupart des cas. En effet, il n’est pas toujours facile, particulièrement pour cer- tains types d’impacts, d’étaler les données sur une échelle étendue comportant plus de trois échelons. L’échelle à triples entrées (1 à 3) permet plus facilement de disposer simplement les valeurs obtenues de part et d’autre d’une mesure moyenne, les valeurs extrêmes (forte et faible) étant dans ce cas plus faciles à déterminer. Les méthodes ou modes de cotation varient sensiblement selon les études.Le mode d’agrégation des paramètres ou critères de cotation peut être plus ou moins com- plexe et logiquement fondé, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. Bien souvent, il s’agit d’additionner simplement la valeur accordée aux différents critères d’évaluation et d’en faire la simple moyenne afin d’obtenir la valeur globale. Dans ce cas, on utilise généralement une matrice, appelée «tableau de corrélations». La figure 4.15 présente un exemple d’une telle grille de corrélations. Dans cet exemple, trois critères d’évaluation permettent d’obtenir une valeur globale («importance») de l’impact. Quelquefois, cependant, le mode d’agrégation des critères est plus com- plexe. Ainsi, certains critères peuvent être considérés plus importants que les autres; la simple opération arithmétique ne s’applique donc plus dans ce cas. Une manipu- lation particulière des valeurs des différents critères est alors employée. Cette dernière façon de faire est souvent plus satisfaisante que la simple addition des critères ou sous- critères d’évaluation,comme c’est le cas avec les grilles de corrélations.En conséquence, ces dernières ne devraient être employées qu’avec précaution et exclusivement à titre indicatif de la valeur hypothétique éventuelle. Le rapport d’ÉIE devrait donc contenir une explication détaillée de la démarche et de la symbolique employées pour la cotation. Nous verrons au cours de l’examen des diverses méthodes, lors du prochain chapitre, quelques exemples de méthodes de cotation. Éléments litigieux ou contestés Il est fortement recommandé de mettre en évidence d’une manière quelconque les éléments litigieux ou contestés issus de l’évaluation des impacts environnementaux du projet. Ces cas sont le résultat d’un examen du projet qui n’a pas permis d’éva- luer convenablement ou complètement l’élément, l’impact ou l’aspect en question, et ce, à la satisfaction de tous. On pourrait aussi mettre en valeur dans le rapport final,
  • 26. 183 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux de manière moins apparente, les impacts majeurs et les principaux enjeux environ- nementaux. On utilise des «analyses de sensibilité» ou des analyses de risques afin de mieux cerner les conséquences possibles de tels éléments litigieux ou éventuelle- ment contestables pour des raisons de manque de connaissances. L’indication distinctive et facilement repérable d’éléments litigieux ou contestés évite certaines difficultés de compréhension et de contestation. Elle affirme d’abord la crédibilité des évaluateurs ainsi que la transparence du rapport lui-même.Elle permet Figure 4.15 Grille de détermination de l’importance globale de l’impact à partir de trois critères d’évaluation et selon deux méthodes de compilation SENSIBILITÉ INTENSITÉ ÉTENDUE IMPORTANCE* * Option A** Option B*** Nationale 9 Majeure Majeure Forte Régionale 8 Majeure Majeure Locale 7 Majeure Majeure Nationale 8 Majeure Majeure Forte Moyenne Régionale 7 Majeure Majeure Locale 6 Moyenne Moyenne Nationale 7 Majeure Majeure Faible Régionale 6 Moyenne Moyenne Locale 5 Mineure Moyenne Nationale 8 Majeure Majeure Forte Régionale 7 Majeure Majeure Locale 6 Moyenne Moyenne Nationale 7 Majeure Majeure Moyenne Moyenne Régionale 6 Moyenne Moyenne Locale 5 Mineure Moyenne Nationale 6 Moyenne Moyenne Faible Régionale 5 Mineure Moyenne Locale 4 Mineure Mineure Nationale 7 Majeure Majeure Forte Régionale 6 Moyenne Moyenne Locale 5 Mineure Moyenne Nationale 6 Moyenne Moyenne Faible Moyenne Régionale 5 Mineure Moyenne Locale 4 Mineure Mineure Nationale 5 Mineure Moyenne Faible Régionale 4 Mineure Mineure Locale 3 Mineure Mineure * Si chaque critère a une valeur égale de 1 à 3 points (de mineure à majeure), l’écart possible de la valeur globale de l’importance varie donc de 3 à 9 (addition simple). ** Option A: Majeure = 7-9 (10 possibilités), Moyenne = 5 (7) et Mineure = 3-5 (10) *** Option B: Majeure = 8-9 (10 possibilités), Moyenne = 5-7 (13) et Mineure = 3-4 (4).
  • 27. 184 L’évaluation des impacts environnementaux aussi de faciliter la recherche de consensus ou de compromis avec les éventuels oppo- sants au projet. La transparence est de toute façon l’une des caractéristiques essen- tielles de toute étude sérieuse d’ÉIE, tout comme le sont d’ailleurs la crédibilité des évaluateurs et le rapport final d’évaluation. Suivi d’exploitation Le suivi d’exploitation, couramment nommé monitoring, vise un objectif principal: la vérification de l’ampleur des impacts prévus (impacts potentiels/impacts réels) ou de certains éléments environnementaux particulièrement sensibles. En outre, deux objectifs secondaires se joignent parfois à cet objectif du suivi d’exploitation. Il s’agit de vérifier l’efficacité à long terme des mesures d’atténuation mises en place ainsi que d’acquérir des informations, pour l’amélioration éventuelle des méthodes de prévi- sion des impacts et de mise en place de mesures d’atténuation adéquates pour les pro- jets futurs. L’exécution du travail relatif au suivi d’exploitation est généralement confiée à des spécialistes des différents domaines impliqués ou à des membres qualifiés du per- sonnel de l’entreprise. L’inspection périodique des différents paramètres s’effectue à l’aide d’indicateurs choisis généralement dès l’élaboration du programme de suivi. L’élaboration d’un programme de suivi d’exploitation et sa mise en œuvre seront étu- diés au cours du chapitre huit (section «Inspection et suivi») de manière détaillée et complète. L’apport d’enseignements et d’expériences que le suivi environnemental fournit devrait servir, d’une part, à valider l’évaluation de certains paramètres du projet, les plus significatifs au moment du dépôt du rapport, et, d’autre part, la pertinence des mesures d’atténuation mises en place dans le cadre du projet. Ces précieuses infor- mations serviront ensuite à mieux prévoir les impacts et les mesures d’atténuation lors de l’examen de futurs projets. Suivi postprojet Le suivi postprojet représente beaucoup plus qu’un simple suivi d’exploitation, car il vise à effectuer une évaluation complète du projet. La vérification de l’ensemble des aspects significatifs du projet après quelques années d’exploitation permet une réévaluation de l’examen initial et l’amélioration des pratiques en ÉIE. Bien entendu,le suivi postprojet n’est pas un examen d’une ampleur égale à l’examen initial,mais se révèle tout de même aussi complet,sauf pour les aspects devenus caducs en raison de la mise en place des composantes et des activités prévues, notamment la
  • 28. 185 Éléments méthodologiques d’analyse de l’évaluation des impacts environnementaux justification et la description des composantes du projet. Toutefois, l’examen complet est encore pertinent pour tous les aspects encore utiles tels que l’évaluation des impacts et les mesures d’atténuation, ainsi que pour les prédictions et les modèles employés. À la suite d’un examen postprojet, l’évaluation des impacts réels peut enfin être réalisée. Il serait fort utile de pouvoir bénéficier de plusieurs de ces études, afin de vérifier la pertinence des évaluations réalisées depuis les débuts de l’ÉIE. Il en est de même en ce qui concerne l’efficacité réelle des mesures d’atténuation et la fiabilité des estimations et des modèles. Les enseignements d’un programme de suivi Depuis 1978, un «réseau de surveillance écologique» observe l’évolution des milieux natu- rels, ainsi que ceux créés en grande partie par les humains au complexe La Grande, dans le Moyen-Nord québécois. Le vaste complexe hydroélectrique La Grande, aménagé par l’entreprise Hydro-Québec, regroupe onze centrales d’une puissance cumulée de 15600MW et il couvre une surface de près de 15000 km2, soit environ la moitié de la superficie de la Belgique. Les études effectuées dans le cadre du programme de suivi englobent les répercussions du méthylmercure ainsi que celles sur l’économie locale et les aspects sociaux des com- munautés autochtones, en passant par les incidences sur les mammifères marins et les grands cervidés (Chartrand et Thérien, 1992). La pertinence des rares programmes de suivi est consolidée par les riches enseignements que nous pouvons en obtenir. Comme l’affirmaient certains de ses témoins privilégiés: «N’est-il pas plus pertinent, par exemple, de s’assurer que l’aménagement hydroélec- trique d’un territoire contribuera à une meilleure protection et exploitation du caribou plutôt que de savoir si la perte d’habitat sera de 0,5% ou de 5%?» (Hayeur et Doucet, 1992). De telles informations,en provenance d’une des opérations essentielles d’un point de vue scientifique,permettraient d’en tirer des enseignements inestimables pour l’avan- cement des connaissances,comme pour le perfectionnement des pratiques d’évaluation. L’élaboration d’un programme particulier de suivi postprojet, ainsi que sa mise en œuvre seront examinées en détail au cours du chapitre huit (section «Inspection et suivi»).
  • 29.
  • 30. 5 Chapitre Méthodesetoutilsdel’évaluation desimpactsenvironnementaux a sélection d’une méthode particulière d’étude représente le choix du meilleur outil d’examen disponible1. Ce choix équivaut à sélectionner la méthode ou, le plus souvent, les méthodes devant servir à l’étude du projet. La sélection d’une méthode particulière dépend de plusieurs facteurs dont la nature du projet à l’étude, les besoins particuliers des évaluateurs et/ou des utilisateurs,les usages possibles de chacune d’elles ainsi que du temps et du budget (contraintes administratives) disponibles. En pra- tique, toutefois, la sélection repose grandement sur l’expérience acquise par les éva- luateurs eux-mêmes des différentes méthodes d’ÉIE. La jeunesse de cette sphère de la connaissance n’explique pas totalement les aspects approximatifs,incomplets et confus souvent rencontrés dans les méthodes employées. La faible importance attribuée à l’ÉIE par certains acteurs ainsi que la place réduite occupée par celle-ci dans le processus de décision expliquent aussi les insuffisances L 1. Selon Watzlawick (1975), cité par Simos (1990), une méthode «désigne une démarche scientifique; c’est l’énoncé des étapes à suivre, dans un certain ordre, pour atteindre un but donné». Il s’agit donc d’un ensemble de principes, de règles, de techniques et d’étapes permettant l’atteinte de résultats particuliers dans le cadre d’une démarche bien spécifique. L’outil d’examen, par contre, est d’une nature plus restreinte; il s’agit, par exemple, d’un moyen particulier de présentation des données ou d’une activité plus spécifique, telle que l’emploi de la photographie.
  • 31. 188 L’évaluation des impacts environnementaux des méthodes utilisées. Conséquemment, les méthodes d’évaluation des impacts ne s’appuient pas toujours sur un cadre méthodologique rigoureux et complet, ni sur des méthodes scientifiques toujours bien établies. Historiquement, la plupart des méthodes furent élaborées à des fins bien spéci- fiques. La discipline d’origine de ses auteurs, comme le type de projet à l’étude, ont déterminé très souvent l’approche théorique sous-jacente et les techniques employées. À la limite,on peut affirmer que la plupart des études emploient des méthodes ad hoc; rarement utilisera-t-on intégralement une méthode antérieure mise au point par d’autres. Il y a donc une infinité de méthodes diverses plus ou moins apparentées. À l’heure actuelle, il n’existe pas une méthode d’évaluation des impacts qui soit com- plète et universelle pour l’examen de tous les projets. Par conséquent, la plupart des évaluateurs utilisent un certain nombre de méthodes lors de l’étude d’un projet. Bien souvent, une méthode plus ou moins générale oriente l’ensemble de l’examen et une ou quelques autres méthodes, plus spécifiques à certains aspects particuliers de l’étude, la complètent. Le choix d’une méthode particulière d’ÉIE est bien sûr déterminé par l’expérience des évaluateurs par rapport aux diverses méthodes, mais il est aussi dépendant de la nature particulière des activités envisagées. En ce sens, certains types de projets s’ac- cordent mieux avec l’utilisation de certaines méthodes; c’est le cas de l’approche car- tographique pour des projets linéaires importants, par exemple. Enfin, les ressources, c’est-à-dire le temps et les moyens disponibles aux fins de l’étude, orientent grande- ment elles aussi les choix effectués. Le classement des diverses méthodes et outils de l’ÉIE varie selon les auteurs consultés. Certains classent les méthodes selon leur forme (le «comment»), c’est- à-dire à partir de leur fonctionnement propre – la présentation finale des résultats, par exemple (Jain et coll., 1993; Warner et Preston, 1974). La colonne de gauche de l’encadré 1 montre bien cette classification selon la «forme». On regroupe alors les méthodes en matrices, en listes de contrôle, en réseaux ou en superposition carto- graphique. Une nouvelle subdivision entre les outils simples (les plus anciens dans l’ensemble) et ceux considérés comme plus avancés est parfois proposée (Sadar et coll., 1994). D’autres, par contre, répartissent les méthodes selon leur raison d’être (le «pour- quoi»),c’est-à-dire à partir de leur objet d’étude particulier ou leur fonction première. Les méthodes sont alors répertoriées selon qu’il s’agit de méthodes d’identification, d’évaluation ou de pondération, par exemple. Ainsi, à partir de critères de percep- tion de l’essence même des diverses méthodes, Munn (1975) préférait diviser les méthodes selon les étapes de réalisation d’une étude d’impacts. Dans ce cas, cela
  • 32. 189 Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux permettait des regroupements selon l’identification, la prévision, l’interprétation, la communication et les procédés d’inspection,comme dans la colonne de droite de l’en- cadré 1. D’autres typologies similaires utilisent les trois grands types suivants: l’identifi- cation des impacts, la génération de stratégies et l’évaluation des variantes (Simos, 1990). Cette classification peut recouper les deux grandes catégories que sont les méthodes d’identification et les méthodes d’évaluation. Il faut préciser qu’il y a une grande distinction entre, d’une part, les méthodes spécifiques à l’identification des impacts et, d’autre part, les méthodes d’évaluation spécialement conçues pour déter- miner l’importance ou la signification de ces impacts, et non pas restreintes simple- ment à la reconnaissance ou à la délimitation des impacts. La typologie fondée sur cette distinction entre l’identification et l’évaluation est fréquemment employée. Cette approche, préconisée par Westman (1985) et reprise par Simos (1990), est illustrée dans l’encadré 2. Une sous-division en regroupements plus spécifiques, par exemple en listes de contrôle ou en matrices, complète la typo- logie globale. Cette distinction entre l’identification et l’évaluation n’est pas toujours très nette,quoiqu’elle reflète assez bien leur utilisation principale en tant qu’outil d’ana- lyse. Cette typologie n’est toutefois pas entièrement satisfaisante, car une méthode relève souvent aussi bien de l’une que de l’autre de ces deux catégories. Devant les nombreuses difficultés à regrouper et à classer les différentes méthodes, plusieurs n’adoptent aucune typologie particulière, préférant plutôt présenter les méthodes les unes à la suite des autres; c’est notamment le cas de Nichols et Hyman (1980). Il s’agit assurément de la présentation la plus simple, bien qu’il ne s’agisse pas de la plus appropriée. Encadré 1 Forme Raison d’être Ad hoc Identification Liste de contrôle Évaluation Matrice Pondération Réseau Ordonnancement Superposition Inspection Modélisation
  • 33. 190 L’évaluation des impacts environnementaux Nous constatons qu’il n’y a donc pas non plus,à l’instar des méthodes d’évaluation, de typologie universelle et unique des méthodes d’ÉIE. Selon les auteurs consultés, les diverses méthodes peuvent être classées selon des regroupements particuliers et à partir de modalités parfois bien distinctes les unes des autres. Pour notre part, la manière la plus valable, sans être totalement dénuée de failles, consiste à classer les diverses méthodes d’ÉIE selon cinq grands axes ou domaines d’étude. Ces grands axes d’étude regroupent sous une même dénomination diverses méthodes similaires et apparentées. Le principe du regroupement repose ainsi sur leur démarche d’examen, chaque groupe de méthodes ayant par conséquent des objectifs ultimes communs. La typologie en cinq grands axes, pratiquement ordonnés du plus général au plus spé- cifique, est illustrée dans l’encadré 3. Encadré 2 Identification Évaluation Ad hoc Ad hoc Liste de contrôle Delphi Réseau Fiche d’impact Superposition Matrice Modélisation Technique numérique Technique ordinale Méthode économique Méthode d’inspection Encadré 3 Typologie des méthodes d’ÉIE Les méthodes d’expertise Les modèles et systèmes La représentation spatiale et cartographique Les méthodes comparatives unicritères Les méthodes comparatives multicritères
  • 34. 191 Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux Chacun des axes d’étude présente des avantages et des inconvénients, la plupart des méthodes étant souvent la réponse à des besoins particuliers.En ce sens,les diverses méthodes regroupées sous ces cinq axes ne sont pas des méthodes complètes et glo- bales destinées à mener un examen complet; elles n’en ont pas, pour la plupart, la prétention. Elles sont par contre complémentaires les unes aux autres et très souvent plus d’une est employée afin de réaliser l’étude complète d’un projet. C’est ainsi que la phase préliminaire d’examen repose très souvent sur des méthodes d’expertise, par- ticulièrement les listes de contrôle, alors que les phases subséquentes d’examen seront réalisées grâce à d’autres méthodes, notamment les approches de modèles et systèmes,de représentation spatiale et cartographique.De leur côté,les méthodes com- paratives unicritère et multicritères sont employées lors de comparaison de variantes ou de solutions de rechange. Pour chacun des axes d’étude,nous allons examiner de manière systématique diverses méthodes employées depuis les débuts de l’ÉIE. Nous insisterons sur le modèle type pour chacun des axes.Il s’agit souvent du modèle le plus familier.C’est ainsi que nous examinerons d’abord les méthodes pionnières de chaque axe; elles représentent bien souvent le modèle type. Nous examinerons ensuite un certain nombre de méthodes plus récentes ou d’applications contemporaines des plus anciennes. Quoique rarement employées de manière intégrale par d’autres évaluateurs, les méthodes dites classiques ou pionnières (McHarg (1968 et 1969), Léopold (1971), Sorensen (1971), Holmes (1972) et Battelle (1972)) influencèrent grandement la plu- part des études réalisées à ce jour. En fait, ces méthodes abordaient déjà les grands axes possibles d’examen de l’ÉIE. Depuis, peu de méthodes ont acquis une renommée équivalente à celles des pionnières. MÉTHODES D’EXPERTISE EN ÉIE Les méthodes et outils regroupés sous ce titre sont ceux qui reposent avant tout sur une opinion d’expert.La plupart du temps les méthodes d’expertise reflètent une exper- tise antérieure. C’est le cas notamment des listes de contrôle, mais quelquefois il s’agit plutôt d’une expertise actuelle ou en devenir,comme dans l’emploi de l’enquête Delphi, par exemple. Cette expertise se retrouve donc sous diverses configurations. Ces méthodes sont employées fréquemment et depuis fort longtemps en ÉIE, et on peut prétendre sans exagérer qu’il est très rare de retrouver une étude n’ayant aucunement fait appel à une forme ou une autre d’expertise.
  • 35. 192 L’évaluation des impacts environnementaux Les diverses méthodes et outils d’expertise en ÉIE sont: • les listes de contrôle; • la fiche d’impact; • l’enquête Delphi; • les méthodes ad hoc. En ÉIE, l’objectif principal des approches faisant appel à l’expertise est habi- tuellement d’effectuer un examen rudimentaire ou initial du projet ainsi qu’une cer- taine forme de contrôle ou de codification.Exceptionnellement,l’emploi de ces méthodes vise un examen plus approfondi, comme c’est parfois le cas avec l’enquête Delphi. L’emploi de l’expertise est autant une démarche de synthèse qu’un processus d’ana- lyse. Par ailleurs, l’aspect évaluateur de l’importance des impacts est généralement supplanté par la simple identification des impacts. Habituellement, la prise en compte des aspects temporel, spatial et cumulatif, tant des éléments que des impacts environnementaux,est plutôt rudimentaire.Cependant, les moyens mis en œuvre sont élémentaires et relativement faciles d’accès. La démarche est par conséquent commode, d’ordinaire rapide et généralement peu coû- teuse. De plus, la présentation des résultats est simple et facilement compréhensible. Par contre, les résultats sont difficilement reproductibles, sauf en ce qui concerne les listes de contrôle, car ils reposent grandement sur des opinions et des jugements de valeurs. Compte tenu des circonstances entourant le projet à l’étude, l’emploi de telles méthodes peut faciliter ou au contraire entraver le processus de décision. Liste de contrôle La «liste de contrôle» est souvent la plus rudimentaire des méthodes. Il serait généra- lementplusjustedanssoncasdeparlerd’outilsdel’ÉIE.Ilfautentendre«listedecontrôle» dans le sens de «liste de référence (check list)».La plupart du temps,les listes de contrôle ne permettent qu’une identification des différents paramètres à considérer pour l’étude d’un projet. Elles proposent rarement une appréciation des paramètres listés et elles ne fournissent à peu près jamais une valeur quantifiable.En règle générale,elles sont donc essentiellement des outils indicatifs. En fait, elles sont bien souvent limitées à des mesures qualitatives et parfois même fort subjectives, du fait de leur ambition universelle ou généraliste. Conséquemment, elles ne représentent souvent qu’un examen préliminaire ou initial d’une étude plus complète. La simplicité de la liste de contrôle en fait toutefois un outil largement utilisé. Les listes constituent ainsi un élé- ment essentiel de presque toutes les autres méthodes d’identification de relevé et d’éva- luation des impacts environnementaux; elles en sont bien souvent une étape initiale.
  • 36. 193 Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux Les listes de contrôle ont pour objectif de permettre une vue d’ensemble des impacts environnementaux probables d’activités humaines, une première approximation de l’impact. La liste est couramment présentée sous la forme de tableaux énumérant les différents paramètres. Chaque liste est plus ou moins spécifique à un type de projet ou à un milieu déterminé. Certaines ne concernent que des projets de transport rou- tier, par exemple; d’autres, par contre, peuvent être appliquées à tout type de déve- loppement. Il n’y a généralement pas de relevé des relations de cause à effet, chaque série de paramètres étant présentée séparément. On retrouve au moins cinq types de liste de contrôle, selon la nature des divers paramètres exposés. Ces listes comprennent les paramètres suivants: • activités et composantes de projet; • éléments de l’environnement; • effets et impacts environnementaux; • indicateurs et descripteurs de l’environnement; • mesures correctives et d’atténuation. Le premier type de paramètre comprend les listes d’activités humaines ou de com- posantes de projet. Celles-ci énumèrent un certain nombre d’activités ou de compo- santes communes à tout projet,ou à un genre particulier,et qui pourraient être sources d’impacts.Il y a bien entendu une multitude de listes énumérant les différents éléments de l’environnement.Ces listes énumèrent les éléments environnementaux présents dans des milieux plus ou moins particuliers, comme elles peuvent souligner ceux qui sont considérés comme sensibles ou valorisés d’une façon ou d’une autre par les différents acteurs (législateurs, scientifiques et population). Tout comme la plupart des autres types de listes, elles sont plus ou moins exhaustives. En complément à ces deux pre- miers types, on rencontre des listes d’effets ou d’impacts appréhendés, impacts cou- ramment rattachés à des projets ou à des milieux plus ou moins précis.Viennent ensuite des listes d’indicateurs ou de descripteurs permettant de sélectionner différents outils de mesure des éléments, des effets et des impacts environnementaux. Enfin, le der- nier type de listes comprend celles faisant l’énumération de mesures d’atténuation ou de modifications à effectuer.Ces mesures et modifications peuvent être à caractère général et universel, ou plutôt spécifique à un seul type de projet ou de milieu. Bien entendu, il existe aussi un certain nombre de listes hybrides; il s’agit alors de listes mixtes impliquant plusieurs des paramètres déjà mentionnés. Il y a donc des listes de contrôle des impacts versus les mesures d’atténuation ou une liste d’éléments
  • 37. 194 L’évaluation des impacts environnementaux de l’environnement comportant aussi une énumération des indicateurs de ces dif- férents éléments. Depuis l’avènement de l’ÉIE, un nombre imposant de listes de contrôle ont été proposées comme référence utile dans l’examen de projet. L’une des listes parmi les plus complètes à l’époque était celle publiée par la Commission de l’énergie atomique des États-Unis (Atomic Energy Commission, 1973). Une autre liste pionnière, mais néanmoins peu traditionnelle quant à son contenu, est celle de l’Université de Géorgie (Institute of Ecology, 1971). Elle fut mise au point afin de mesurer l’impact environnemental des plans d’aménagement routier. Elle comporte 56 éléments sen- sibles de l’environnement que toute étude sur ce sujet devrait prendre en compte. Innovations intéressantes,chacun des éléments de l’environnement possède son propre indicateur mesurable ainsi qu’une pondération appropriée et spécifique. Les consé- quences (effets et impacts) à long terme, notamment, héritaient d’un facteur multi- plicatif de dix par rapport aux autres pour leur cote de pondération. Cette pondé- ration était cependant établie de manière trop subjective et pouvait difficilement être reproductible (Munn, 1977). Cela serait encore plus vrai selon les critères et les juge- ments actuellement utilisés pour la pondération.De plus,l’approche prenait en compte un facteur de génération d’erreur au hasard. Elle était cependant très exigeante sur le plan des ressources et conséquemment fut, semble-t-il, fort peu employée dans son intégralité. La liste des activités présentée à la figure 5.1 montre par contre une liste de contrôle simple. Elle est classique dans sa forme et pratique à utiliser en tant qu’aide-mémoire. Elle ne propose aucune forme d’évaluation; sa seule fonction est strictement indi- cative. La présentation graphique est nette et ordonnée, ce qui permet une visuali- sation rapide des résultats. Elle permet d’identifier (cocher les cases appropriées) les paramètres présents dans le projet à l’étude de façon active et simple. Une autre liste, répertoriant cette fois les éléments de l’environnement, viendrait s’adjoindre et compléter celle-ci.Ces deux listes peuvent servir éventuellement à construire une matrice des interactions (activités du projet versus éléments de l’environnement),comme nous l’avons fait au Maroc en 1994 pour l’implantation de conduites d’adduction d’eau potable et de stations de pompage. La liste de contrôle représentée à la figure 5.2 montre une liste un peu plus com- plexe que la précédente; elle propose notamment une certaine forme d’évaluation des éléments de l’environnement. En effet, elle contient une qualification de la sen- sibilité des divers éléments du milieu.La sensibilité de chacun des éléments d’inventaire est évaluée à l’aide d’une cotation élémentaire à trois valeurs possibles: forte,
  • 38. 195 Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux moyenne ou faible. Les éléments d’inventaire à prendre en compte dans l’analyse des corridors qui est présentée ici (le même projet de conduites d’adduction d’eau potable) sont regroupés en six grands groupes d’éléments apparentés. Le grand avantage de l’emploi de listes de contrôle, outre leur relative simplicité d’utilisation et de représentation, est le rapide survol qu’elles permettent. Leur approche structurée permet une rapide identification des paramètres devant être pris en compte. Ces listes de contrôle expriment souvent la synthèse des nombreux tra- vaux effectués antérieurement en ÉIE; elles représentent ainsi un ensemble cohérent des multiples connaissances et des jugements de leurs auteurs. En ce sens, l’utilisa- tion d’une liste reconnue ne requiert pas le relevé explicite des liens de cause à effet d’une activité déterminée, par exemple, ces liens étant implicitement légitimés par les auteurs de la liste. Cet outil d’analyse préliminaire met donc grandement à contribution l’expertise même des évaluateurs, ceux de l’étude en cours autant que ceux des études antérieures ayant permis la réalisation des listes de contrôle. Parmi les inconvénients des listes de contrôle en tant qu’outil d’identification, on retrouve avant tout la méconnaissance des interactions entre les activités du projet et les éléments de l’environnement, comme entre les impacts eux-mêmes, d’ailleurs. Sauf exception, cet outil n’est nullement approprié à la mise en évidence des inter- actions; il n’est d’ailleurs pas destiné à cette fin. De plus, la liste de contrôle, quoique constituant un indispensable aide-mémoire, risque par le fait même de faire oublier Figure 5.1 Liste de contrôle des activités Études techniques Arpentage et signalisation Acquisition des emprises Déboisement et reboisement Installation de chantiers Signalisation Excavation, forage et creusage Dragage et travaux maritimes Passage des cours d’eau Modification de tracés Infrastructures routières Transport et circulation Érection de bâtiments Installation des équipements Pose des conduites Lignes électriques, téléphone, etc. Entreposage de matériaux Disposition des déchets Présence des ouvrages Réseau AEP Réseau d’assainissement Matériel et équipement Systèmes de traitement E.P. Système de traitement d’eaux usées Transport/gestion de produits chimiques Gestion de la production d’eau Gestion des déchets solides, liquides (boues) Contrôle et suivi de la qualité Disposition et réutilisation Sécurité et intervention d’urgence
  • 39. 196 L’évaluation des impacts environnementaux des paramètres absents de celle-ci; on pourrait ainsi omettre d’en tenir compte dans l’étude en cours. Enfin, les listes ne permettent pas la prise en compte des variations des conditions du milieu dans le temps, ni, habituellement, de l’estimation et de l’éva- luation véritable des impacts. Fiche d’impact L’emploi de «fiches d’impact» est une pratique courante en évaluation d’impacts. La fiche d’impact est un des outils employés comme support de l’information de plu- sieurs méthodes d’évaluation. Toutefois, son emploi fort répandu et l’étendue de son Figure 5.2 Liste indicative des éléments d’inventaire de corridors ÉLÉMENTS SENSIBLES À L’IMPLANTATION DE CONDUITES ET DE STATIONS DE POMPAGE Sensibilité: forte (F), moyenne (M) et faible (f) 1. ESPACE FORESTIER – Boisé rare (F) – Secteur forestier d’intérêt (verger à graines, forêt d’expérimentation, arboretum) (F) – Forêt d’enseignement et de recherche (F) – Pépinière (f) – Massif boisé d’intérêt (M) – Zone d’aménagement forestier (M) – Grande zone de perturbations récentes (brûlis, chablis, etc.) (f) – Tourbière (F) 2. ESPACE FAUNIQUE – Réserve faunique (M) – Aire de concentration d’oiseaux migrateurs ou aquatiques (F) – Colonie d’oiseaux (F) – Aire de repos et de reproduction de la sauvagine (M) – Réserve de poissons (F) – Frayère (F) – Habitat faunique d’intérêt (M) – Aire de répartition d’espèces menacées (F) 3. ESPACE AGRICOLE – Horticulture, culture spécialisée ou zone de verger (F) – Grande culture, aire de pâturage ou friche herbacée (M) 4. ESPACE TERRESTRE PARTICULIER – Réserve écologique (F) – Site historique (F) – Site archéologique (F) – Zone humide d’importance nationale (F) – Zone inondable (F) – Zone à risque d’érosion (F) – Zone de ravinement ou de glissement (F) – Réservoir projeté (F) – Zone d’escarpement (M) 5. ESPACE AFFECTÉ À L’EXTRACTION – Mine (F) – Carrière ou sablière (F) 6. ESPACE POUR LA VILLÉGIATURE, LES LOISIRS OU LE TOURISME – Parc national de conservation (F) – Site touristique ou récréatif d’intérêt ou zone de villégiature (f) – Équipements touristiques ou récréatifs d’importance (F): • terrain de golf (F) • base de plein air ou colonie de vacances, centre de ski alpin(F) • jardin zoologique (F) • terrain de camping (F) – Projet d’aménagement ou de développement d’importance (M) – Site exceptionnel (M) – Lieu d’intérêt visuel (M) – Zone d’observation stratégique (M) – Route panoramique (M)
  • 40. 197 Méthodes et outils de l’évaluation des impacts environnementaux application (somme de données possibles), en tant qu’instrument d’identification et de support à l’information, en font au même titre que la liste de contrôle un outil bien particulier de l’ÉIE. Nous ne présentons qu’un seul exemple de la grande variété de modèles possibles, le principe général pouvant en être aisément suivi et développé selon les besoins par- ticuliers de chaque projet. La somme des informations qui s’y retrouvent peut par- fois être très importante. La figure 5.3 montre un modèle récent de fiche d’impact, mais la plupart des fiches sont souvent plus simples. L’information concerne habi- tuellement un certain nombre des caractéristiques de l’identification et de l’évalua- tion de l’impact. Dans l’exemple présenté ici, nous trouvons de manière assez éla- borée un grand nombre des sujets courants, à savoir l’identification et la description de l’impact, l’évaluation de l’impact potentiel, l’évaluation finale de l’impact, c’est- à-dire l’impact résiduel, ainsi que l’ajout de mesures d’atténuation et l’élaboration de mesures de compensation.La manière d’évaluer en deux phases complètes les impacts (impact potentiel et impact résiduel) est plutôt rare, mais elle s’avère fort utile pour le contrôle et le suivi. Étant donné la diversité de langage et de style des résultats obtenus en provenance des diverses disciplines impliquées en ÉIE, la fiche d’impact s’avère un outil fort com- mode de compilation des données.La standardisation permise grâce à ce support uni- forme permet une codification efficace de l’information et par la suite un moyen rapide de recherche de renseignements. Cette efficacité est importante en raison de la nature disciplinaire de la caractérisation du milieu et de la prédiction des impacts, ce qui engendre une très grande variabilité dans la description et la présentation des résultats. Par l’emploi de fiches standardisées, il est plus facile de repérer ensuite l’in- formation complète au sujet d’un impact donné. Le contrôle et l’accès aux données en sont considérablement facilités. La fiche d’impact offre une vue incomplète de l’évaluation de l’impact d’un projet, elle ne peut contenir tous les paramètres et les aspects nécessaires à un examen entier. Toutefois, elle expose adéquatement les différents impacts environnementaux et elle représente un complément opportun, voire indispensable, des autres méthodes d’ÉIE et tout particulièrement des approches matricielle et cartographique. L’enquête Delphi L’enquête Delphi n’est pas à proprement parler une approche spécifique d’évalua- tion des impacts environnementaux; il s’agit plutôt d’une technique générale d’ac- quisition des connaissances.L’enquête Delphi est un procédé d’obtention de consensus