SlideShare une entreprise Scribd logo
1  sur  120
MÉMOIRE DE MASTER MANAGEMENT DES
OPÉRATIONS ET QUALITÉ - SPÉCIALITÉ SÉCURITÉ
INDUSTRIELLE ENVIRONNEMENT ET
CERTIFICATION
LA RECHERCHE DE LA MOTIVATION
ET DU BIEN-ÊTRE AU SEIN D’UNE
ENTREPRISE FERROVAIRE
PRÉSENTÉ ET SOUTENU PAR GRÉGOIRE ÉPINAT
LE 6 Septembre 2013
Jury :
- BONNET Marc, Adjoint du directeur de l’IAE de Lyon, Responsable pédagogique du
programme M2 Sécurité Industrielle Environnement et Certification, Directeur Adjoint de
l’ISEOR, Directeur de mémoire
- PEREIRA Sébastien, Adjoint Directeur des Gares de la Région Bourgogne Franche Comté,
anciennement Animateur Qualité régional de l’entreprise ferroviaire.
2
3
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier toute l’équipe pédagogique de l’IAE de Lyon III et d’EUGINOV,
de même que les professionnels intervenus dans la formation Master Management des
Opérations et Qualité, pour avoir assuré la partie théorique de celle-ci. Je remercie aussi
tout particulièrement Monsieur Marc BONNET pour sa disponibilité, le temps passé à
l’examen de ce mémoire et à l’écoute de ma soutenance.
Qu’il me soit permis d’exprimer mon respect et ma profonde gratitude à
Messieurs Sébastien PEREIRA et Michel GENIN, mes tuteurs d’alternance, pour leur
accueil chaleureux, leur disponibilité, la confiance qu’ils ont su m’accorder, la patience
qu’ils ont su exercer à mon égard et les conseils précieux qu’ils m’ont prodigués tout au
long de ce stage.
Je tiens aussi à témoigner toute ma reconnaissance à l’ensemble du personnel de
l’Agence Centre Est Rhône Alpin, pour l’expérience enrichissante et pleine d’intérêts
qu’ils m’ont fait vivre durant ma formation au sein de l’entreprise. Tous sont à l’origine
de mes connaissances acquises cette année, tant dans le domaine de la Qualité, que dans
ma découverte du monde ferroviaire.
4
5
SOMMAIRE
SOMMAIRE..........................................................................................................................................................5
INTRODUCTION................................................................................................................................................7
1. UNE ENTREPRISE EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION.......................................................................9
1.1 L’INFLUENCE DE L’OUVERTURE A LA CONCURRENCE SUR L’ORGANISATION DE L’ENTREPRISE
FERROVIAIRE FRANÇAISE .....................................................................................................................................9
1.1.1 Une pression législative européenne encadrant l’ouverture à la concurrence........ 9
1.1.2 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares.............................................15
1.2 UNE NOUVELLE ORGANISATION QUI GENERE UN NOUVEAU MODELE MANAGERIAL.................22
1.2.1 Le personnel en perpétuelle adaptation..................................................................................23
1.2.2 Une motivation entachée par une perte d’identité .............................................................31
2. UNE ORGANISATION DU TRAVAIL À STABILISER......................................................................39
2.1 LES IMPACTS SOCIO-ECONOMIQUES D’UNE ORGANISATION INSTABLE AU SEIN DU SIEGE
REGIONAL.............................................................................................................................................................39
2.1.1 Le bien-être et la motivation difficilement atteignables..................................................39
2.1.2 Le manque de performance sociale synonyme de baisse des performances
économiques.........................................................................................................................................................45
2.2 LES EFFETS DE LA FRAGILITE DU SYSTEME INTERNE SUR LA SATISFACTION EXTERNE............52
2.2.1 Les risques d’une perte de motivation du personnel sur la satisfaction des clients
dans une entreprise de services...................................................................................................................52
2.2.2 La satisfaction des clients internes comme levier de satisfaction des clients
externes...................................................................................................................................................................57
3. UN PROJET POUR REDYNAMISER LE PERSONNEL.....................................................................65
3.1 DES OUTILS ET METHODES EN MAIN MAIS DONT LA MISE EN ŒUVRE DEMEURE A REVOIR.....65
3.1.1 Une enquête de motivation du personnel qui nécessite d’être mieux communiquée
auprès des agents...............................................................................................................................................65
3.1.2 Un besoin de favoriser davantage le travail collectif.........................................................71
3.2 ROLE DU MANAGER, MOTIVATION, BIEN-ETRE : QUELLE COMBINAISON ECONOMIQUEMENT
ADEQUATE?..........................................................................................................................................................77
3.2.1 Le manager en tant que garant de la motivation au travail .........................................77
3.2.2 Un travail sur la motivation et le bien-être permettant des gains économiques
pour l’entreprise.................................................................................................................................................84
CONCLUSION :..................................................................................................................................................91
BIBLIOGRAPHIE : ...........................................................................................................................................93
WEBOGRAPHIE :.............................................................................................................................................95
TABLE DES ANNEXES :..................................................................................................................................97
TABLE DES MATIERES...............................................................................................................................119
6
7
Introduction
Selon Georg Christoph LICHTENBERG1
, « rien n'est plus insondable que le
système de motivations derrière nos actions ». En effet, la motivation est une notion
abstraite et la tentation de savoir comment la susciter est grande, notamment pour un
manager, afin de comprendre comment pousser ses collaborateurs à agir de la manière
la plus efficace possible.
Selon le Larousse français, la motivation se définit comme les « raisons, intérêts
qui poussent quelqu'un dans son action ». Ainsi, il s’agirait de la somme des éléments
donnant l’envie à un individu d’accomplir telle ou telle action. Cette notion a pris de
l’importance dans le domaine du travail, puisqu’il paraît parfois difficile de réunir
suffisamment d’éléments donnant envie à une personne de travailler. L’être humain
étant généralement plus enclin aux loisirs.
Ainsi, la notion de motivation au travail implique de savoir ce qui déclenche le
comportement des individus dans une organisation. Mais, au-delà du simple concept de
motivation, les managers doivent garantir la productivité et donc la performance de
l’entreprise en impliquant leurs collaborateurs. Cela sous-entend de savoir ce qui
maintient ou stoppe un comportement lors de l’accomplissement de l’action.
La motivation et le bien-être au travail sont souvent vus comme des facteurs
indispensables de productivité et du travail bien fait. Ces dernières années, nous avons
assisté à la multiplication des théories et des conseils en la matière. Des cabinets
proposent même des formations pour apprendre à motiver les collaborateurs. Pourtant,
face à cela, nous assistons à un mal-être de certains individus dans les entreprises, ou
encore à l’accroissement des comportements déviants. Cela est assez paradoxal puisque
l’on parle toujours du manque de motivation dans les organisations, alors que nombre
d’auteurs proposent des « solutions ».
De ce fait, il est nécessaire de s’interroger sur la place de la motivation et du
bien-être dans une entreprise en constante mutation ces dernières années. En effet,
comment garder les collaborateurs au centre de l’entreprise, lorsque cette dernière doit
faire face à une situation conjoncturelle difficile suite à la crise économique présente
1
Georg Chritoph LICHTENBERG – 1742 – 1799 – philosophe, écrivain et physicien allemand
8
depuis 2009 et à un contexte nouveau et potentiellement déstabilisant de mise en
concurrence ?
De prime abord, il est tentant de penser que la motivation est la solution à tous
les maux de l’entreprise. Pourtant, pour les acteurs de l’entreprise, la motivation n’est
pas un levier managérial en soi. Cela serait prendre le problème à l’envers. En réalité, il
paraît plus cohérent de penser que la mise en place d’un ensemble d’outils et de
méthodes de pilotage permettront de garantir en premier lieu l’implication des salariés
dans le but de performances économiques de l’entreprise, et indirectement, dans un
second temps, leur motivation et leur bien-être au travail.
Ainsi, dans le cadre de ce mémoire, nous étudierons comment parvenir à la
motivation et au bien-être des collaborateurs dans l’entreprise ferroviaire dans laquelle
j’effectue mon stage. Pour rattacher ce travail à la réalité de mes missions, nous verrons
entre autre comment la démarche qualité en entreprise peut prendre l’étiquette « d’outil
de motivation ».
Avant toute chose, nous débuterons par présenter l’entreprise avec les différentes
évolutions qu’elle a subie depuis 2009, année de la création de la filiale en charge de la
gestion des gares françaises. Dans cette partie, nous pourrons découvrir l’étendue des
exigences de l’Europe en terme d’organisation des entreprises ferroviaires. Aussi, nous
démontrerons que ces changements d’organisation nécessitent un nouveau modèle
managérial qui n’est pas du goût de l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise.
Dans une seconde partie, nous tâcherons de mettre à jour les différents effets
pervers du manque de motivation et de bien-être, tant économiquement qu’au niveau de
la satisfaction des clients de l’entreprise ferroviaire.
Enfin, nous verrons que l’entreprise dispose dans ses mains, de pratiquement
tous les outils permettant de redynamiser les équipes et que l’investissement dans le
domaine de la motivation et du bien-être ne doit pas être considéré en terme de coûts
pour l’entreprise, mais de gains économiques et sociaux, donc d’avantages compétitifs.
9
1. UNE ENTREPRISE EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION
1.1 L’influence de l’ouverture à la concurrence sur l’organisation de
l’entreprise ferroviaire française
1.1.1 Une pression législative européenne encadrant l’ouverture à la
concurrence
1.1.1.1 Un cadre concurrentiel sous haute surveillance de la
commission européenne.
L’entreprise ferroviaire française dispose d’un statut d’EPIC, autrement dit,
d’Entreprise Publique à Caractère Industriel et Commercial. Le mot « publique »
représente une première entrave aux yeux de la Commission Européenne dans sa lutte
contre la non concurrence. En effet, l’étiquette « publique » représente un avantage
non négligeable pour l’entreprise ferroviaire dont le Président est nommé par le
Président de la République, notamment sur le plan des investissements de cette dernière.
Ainsi, lorsque l’entreprise souhaite lever des fonds sur les marchés financiers, sa
signature a le même crédit que celle de l’Etat. Autrement dit, les investisseurs ont une
totale confiance dans l’entreprise ferroviaire, puisqu’ils savent que l’Etat est garant de
ces investissements. D’où, pour l’entreprise, des conditions d’emprunt plus que
favorables alors qu’elle enregistre à ce jour 31,5 milliards d’euros de dette. Cependant,
dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, il devient nécessaire de réglementer
la relation entre l’entreprise ferroviaire et l’Etat, pour que toutes les entreprises
ferroviaires disposent du même niveau d’équité.
Le souhait de la Commission Européenne est de libéraliser le transport ferroviaire
français pour en donner l’accès à tous les transporteurs, publics comme privés, français
comme étrangers.2
Ce souhait est initialement appuyé sur un traité qui est au fondement
de l’Europe, à savoir le Traité de Rome. Ce dernier stipule à l’article 92 que « sont
2
Règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics
de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) n° 1191/69 et (CEE) n°
1107/70 du Conseil
10
incompatibles avec le marché commun (…) les aides accordées par l’Etat, sous quelque
forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant
certaines entreprises ou certaines productions »3
. À la simple lecture de cet article, on
comprend aisément que les entreprises publiques ne sont pas en adéquation avec les
fondements européens en terme de libéralisation du marché et donc d’ouverture à la
concurrence. Cela semble par ailleurs indiscutable, car quel gouvernement serait assez
fou pour favoriser l’entrée d’entreprises extérieures sur le territoire, venant
indirectement menacer ses propres richesses nationales ?
Concernant le secteur ferroviaire, la Directive européenne de 1997 peut être
considérée comme la base de la réforme ferroviaire. L’objectif de cette directive est de
clarifier les responsabilités entre l’opérateur ferroviaire et le gestionnaire du réseau.
Ainsi, une première entité de l’entreprise ferroviaire française a été créée pour s’occuper
exclusivement du réseau ferré français comprenant la mise en service et l’entretien des
voies ferrées, l’installation de télécommunications, et la gestion des bâtiments affectés
au fonctionnement et à l’entretien du réseau. Cependant, l’entreprise ferroviaire
historique garde, en contre partie, la gestion du trafic et des circulations sur le réseau
ainsi que le fonctionnement et l’entretien des installations techniques et de sécurité
correspondantes. L’entreprise ferroviaire paye alors, depuis cette réforme de 1997, des
péages à l’entité gestionnaire du réseau pour l’exploitation et l’entretien des
infrastructures.
Via cette réforme, on peut donc s’apercevoir que l’entreprise ferroviaire a fait un
premier pas vers la libéralisation du secteur ferroviaire, mais qu’elle ne souhaite pas
pour autant laisser une totale liberté à l’entité de gestion du réseau ferré français,
notamment en gardant sous contrôle la gestion des gares.
Cette première directive méritait alors d’être renforcée pour ne pas légitimer ce genre de
situation. Ainsi, la Directive Européenne 2001-14 est venue définir les services que tout
gestionnaire de gare doit fournir aux exploitants ferroviaires dans le cadre du droit
d’accès au réseau. Cette directive a pour objet « les principes et les procédures à suivre
pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure
ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure ». Ainsi, les Etats
3
Source du Traité de Rome du 25 mars 1957 : http://mjp.univ-perp.fr/europe/1957rome3.htm
11
membres « veillent à ce que les systèmes de tarification et de répartition des capacités
de l’infrastructure ferroviaire respectent les principes énoncés dans cette directive et
permettent ainsi au gestionnaire de l’infrastructure de commercialiser les capacités de
l’infrastructure disponibles et d’en faire une utilisation effective et optimale ».4
A travers cette directive, les dérives qui pourraient aisément voir le jour, notamment
concernant la discrimination d’une compagnie nouvelle sur le territoire français,
devraient alors se trouver limitées. Cependant, ces directives ne sont réellement
efficaces que si les Etats sont dans une démarche allant dans le sens d’une réelle volonté
d’ouverture du réseau ferré à la concurrence. En effet, la législation pèse de plus en plus
sur les pays européens (dans le cadre de l’Union Européenne), mais elle reste
néanmoins relativement souple, étant donné que depuis plus de 15 années de
discussions prônant l’ouverture à la concurrence, des pays comme la France, se trouvent
encore aux prémices de cette démarche.
1.1.1.2 Une prise en compte de la législation européenne au niveau
national
Conscient et contraint de rentrer dans la démarche de libéralisation des marchés, le
gouvernement français a mis en place deux autorités distinctes pour garantir le respect
des règles européennes, qui sont l’Autorité de la Concurrence et l’Autorité de
Régulation des Activités Ferroviaires (l’ARAF). De même, une instance
complémentaire a été mise en place pour l’occasion : les Assises du ferroviaire.
1) L’autorité de la concurrence : il s’agit d’une autorité administrative
indépendante, spécialisée dans l’analyse et la régulation du fonctionnement de la
concurrence sur les marchés, et cela pour la sauvegarde de l’ordre public
économique. Cet ordre public économique que Gérard FARJAT définit dans son
ouvrage L’ordre public économique, comme l’ensemble des règles obligatoires
dans les rapports contractuels, relatives à l’organisation économique, aux
4
Extrait de la Directive 2001-14-CE du Parlement européen et du conseil du 26 février 2001, concernant la
répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification
en matière de sécurité – Source : Journal officiel des Communautés européennes du 15 mars 2001 – L75/29 à
L75/46.
12
rapports sociaux et à l’économie interne du contrat, est alors le point central des
règles relatives à la concurrence.5
Aujourd’hui, les gouvernements ne doivent
plus chercher à protéger leurs entreprises nationales d’une éventuelle
concurrence, mais doivent bel et bien veiller à ce qu’aucun facteur
économique, politique ou social ne vienne perturber la concurrence.
Ainsi, l’autorité de la concurrence, créée en 2009 et agissant au nom de l’Etat,
est essentiellement au service du consommateur, dans l’objectif de veiller au
libre jeu de la concurrence et de surveiller le bon fonctionnement concurrentiel
des marchés aux échelons européens et international.
2) L’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires : L’ARAF a été créée le
premier décembre 2010 autour de 4 objectifs bien distincts :
Pouvoir réglementaire : éditer les règles générales applicables au secteur
ferroviaire,
Pouvoir de décisions : tarifs d’accès au Réseau Ferroviaire Français et
aux installations,
Règlement des différents : l’ARAF peut être saisie en cas de plaintes par
tout acteur du système ferroviaire,
Pouvoir disciplinaire : enquêtes et auditions, sanctions en cas de non
respect des règles et de la tarification applicable.
3) Les Assises du Ferroviaire : Ces Assises ont été lancées le 15 septembre 2011
et ont duré jusqu’à la fin du premier trimestre 2012. Elles peuvent être
assimilées à une table ronde à l’initiative de la Ministre de l’écologie, du
développement durable, des transports et du logement, et du Ministre chargé des
transports pour dresser un état des lieux du système ferroviaire français. Ainsi,
des réflexions ont été menées autour de 4 groupes de travail : le ferroviaire
français au cœur de l’Europe, la Gouvernance du système ferroviaire,
l’économie du ferroviaire et de la filière ferroviaire française. 6
Autrement dit, via ces Assises, le gouvernement montre fermement son
5
Gérard FARJAT : L’Ordre public économique – Librairie générale de droit et de jurisprudence (Évreux) - 1962
6
Nathalie Kosciusko-Morizet – « Pourquoi je convoque des assises ferroviaires » - Source : Article de presse issu de
Ville, Rail & Transports du 02 avril 2012.
13
intention de travailler sur le modèle ferroviaire français de demain autour
d’un modèle prenant en compte la concurrence et l’équité tant dans les
prestations ferroviaires que dans la gestion des ressources humaines.
Parmi les contraintes législatives de l’entreprise ferroviaire, cette dernière doit
prendre en compte l’article 2141-1 du code des transports qui précise que l’entreprise
ferroviaire nationale a pour mission « de gérer de façon transparente et non
discriminatoire, les gares de voyageurs qui lui sont confiées par l’Etat ou d’autre
personnes publiques et de percevoir à ce titre auprès des entreprises ferroviaires
toute redevance ».
Dans le prolongement de cet article du code des transports, l’article 5 de la loi 97-135
du 13 janvier 19977
a mené à la séparation entre les immeubles affectés à l’exploitation
des services de transport (appartenant à l’entreprise ferroviaire), et les biens constitutifs
de l’infrastructure ferroviaire (appartenant alors au Réseau Ferré de France).
Toutefois, ce premier morcellement de l’activité ferroviaire française n’est pas
suffisant pour marquer une réelle transparence de l’équité au niveau des
prestations que l’entreprise française doit fournir à toute entreprise concurrente.
Ainsi, à la demande du Premier Ministre qui voulait que l’activité des gares soit
séparée de celle de transporteur ferroviaire pour l’ouverture à la concurrence du
transport de voyageurs en janvier 2010, une nouvelle entité, ayant pour mission la
gestion des gares, a vu le jour le 7 avril 2009. L’objectif de cette nouvelle entité est
d’améliorer la qualité de toutes les gares, qu’elles soient rattachées au réseau européen
ou bien d’importance secondaire, mais surtout de garantir l’équité de services en gare
entre les transporteurs et pour tous les usagers. Toutefois, cette entité reste sous la
gestion de l’entreprise ferroviaire nationale qui souhaite garder une main mise sur les
gares du réseau français. Ainsi, tout train stationnant ou traversant une gare française,
qu’il soit d’exploitation française publique, privée ou étrangère, doit payer à l’entité
gestionnaire des gares un « toucher de gare », qui est une taxe que paye chaque
compagnie en fonction du type et de la destination du matériel roulant, ou encore des
aménagements et des services en gare. Ainsi, via ce fonctionnement l’entreprise
ferroviaire française vient répondre à la directive 91/440 de 1991 sur la libéralisation
7
Loi n° 97-135 du 13 janvier 1997 portant création de l’établissement public « Réseau ferré de France en vue du
renouveau du transport ferroviaire – Source : www.legifrance.gouv.fr
14
des marchés domestiques, et plus généralement sur la séparation comptable des activités
de gestion d’infrastructures et d’exploitation des services de transport.8
De plus, hormis les intérêts comptables de cette séparation entre les deux
activités, la crédibilité de l’entreprise ferroviaire française au niveau de l’ouverture à la
concurrence se trouve accrue du fait que les entreprises concurrentes ne payent pas
directement l’entreprise ferroviaire, mais l’entité gestionnaire des gares. Donc
naturellement, le sentiment de traitement inégal de l’accès aux gares françaises
pour les sociétés de transports étrangères devrait s’estomper, bien qu’elles ne soient
pas dupes sur ce sujet.
Enfin, un autre avantage de cette opération réside dans la dissociation pour le client de
l’insatisfaction concernant le service de l’entreprise ferroviaire nationale de transport de
passagers, avec l’insatisfaction issue du service en gare qui est traitée par l’entité
gestionnaire des gares. Mais encore faut-il que cette distinction soit percevable pour les
usagers, donc que ces derniers arrivent à différencier les deux entités. En effet, lorsque
l’on cherche « la SNCF et ses gares » sur le plus connu des moteurs de recherche
Internet, nous nous apercevons que le nom de l’entité gestionnaire des gares n’apparaît
sur aucun des liens proposés. Systématiquement, les gares françaises sont assimilées à
l’entreprise ferroviaire. Alors que l’entité gestionnaire des gares met en œuvre de grands
travaux de rénovation des gares, l’assimilation de ces dernières à l’entreprise ferroviaire
pour les usagers est donc un avantage pour les filiales de transports de voyageurs, qui
peuvent jouer sur la qualité des prestations en gare et sur le confort des gares rénovées
pour redorer leur image, surtout en cas de perturbations récurrentes sur le réseau ferré et
donc pérenniser la fidélité de leurs clients.
Pour venir encadrer cette nouvelle entité, le décret 2012-70 du 20 janvier 20129
,
relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau
ferroviaire, a vu le jour. Ce décret a pour objectif de définir les conditions d’accès des
entreprises ferroviaires aux gares de voyageurs et aux infrastructures de services du
réseau ferroviaire, et permet de préciser les conditions de réalisation des prestations
8
Directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires
– Journal officiel n° L 237 du 24/08/1991 – p 0025 à 0028. Modification par 301J0012 (JO L 075 15.03.2001 p1)
9
Décret n° 2012-70 du 20 janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du
réseau ferroviaire – JORF n° 0019 du 22 janvier 2012 page 1291, texte n° 21.
15
régulées en gare.
Ce décret vient alors préciser plusieurs points, tels que :
- la liste des infrastructures de services du réseau ferroviaire,
- la définition du service de base et des prestations complémentaires que les
gestionnaires d’infrastructures doivent fournir dans des conditions équitables,
- les principes relatifs à la gouvernance de la direction autonome des gares et à la
confidentialité,
- les conditions d’application des prestations dans les gares de voyageurs.
À travers l’ensemble de ces directives, décrets, articles de lois, il est aisé de
comprendre que l’entreprise ferroviaire française, qu’elle le souhaite ou non, va
devoir appliquer concrètement toute ces mesures sur son fonctionnement, sous
peine de sanctions judiciaires.
1.1.2 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares
1.1.2.1 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares
Comme nous l’avons vu précédemment, la Commission Européenne attend de
l’entreprise ferroviaire française une grande transparence dans son fonctionnement
(comprenant la gestion, la comptabilité, etc.) Ainsi, comme l’ont fait d’autres pays
européens, l’entreprise française a décidé de séparer ses activités de transport à
proprement parler, des activités d’infrastructures, avec notamment la création d’une
filiale en charge de la gestion des gares.
La Commission Européenne n’ayant pas d’exigences particulières en ce qui concerne
les modalités de séparation des activités, l’entreprise ferroviaire a décidé de garder sous
sa direction la filiale en charge de la gestion des gares. Cependant, ce choix n’est pas de
son unique ressort. En effet, les instances étatiques disposent d’un pouvoir de
décision sur les modalités de gestion et d’appartenance des gares.
16
Cette filiale est donc la cinquième branche de la société ferroviaire. Elle a vu le
jour en 2009, avec comme missions la gestion, l’exploitation et le développement des
3029 gares françaises.
La filiale et ses 13 000 agents se doivent de travailler de manière transparente, non
discriminatoire, équitable, et cela avec l’ensemble des opérateurs qui utilisent les
gares10
. Cela passe par la définition d’un cahier des charges, une réflexion sur la
coexistence, dans les gares, des entreprises ferroviaires, une offre de service et des tarifs
associés regroupant les services de base qu’un opérateur doit trouver dans une gare, et
aussi la définition des conditions de répartition des espaces en gare. Tout cela sous la
surveillance du gendarme du marché ferroviaire : l’Autorité de Régulation des Activités
Ferroviaires.
Afin de faciliter le pilotage
des équipes en gare, le territoire
français a été découpé en 7 agences
gares. Ces agences sont les relais
du siège de la filiale qui se situe à
Paris et ont pour missions de
piloter l’exploitation, de préparer
l’accueil des nouveaux entrants,
de conduire les projets d’aménagement et de développement des gares sur le
territoire. Aussi, elles sont secondées par des équipes opérationnelles au sein de 39
établissements voyageurs et unités gares.
Chaque agence est composée de trois directions, permettant à la filiale en charge de
gestion des gares de couvrir tous les champs d’activités d’une gare, depuis sa gestion
quotidienne jusqu’à ses projets d’évolution.
1) La Direction de l’offre de service et de l’exploitation, direction dans laquelle
j’effectue mon stage au sein du pôle qualité régional, et dont le rôle est de :
• définir et superviser l’offre de service,
10
Loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et
portant diverses dispositions relatives aux transports – Version consolidée au 01 Décembre 2010
17
• gérer l’espace ferroviaire, commercial et public de la gare,
• administrer les concessions et les locations en gare en lien avec la filiale de
gestion locative,
• assurer la politique d’entretien et de maintenance des bâtiments et des
installations.
2) La direction du développement, dont les missions consistent à :
• piloter et réaliser les projets du programme national de développement,
• proposer la programmation des investissements à partir du recueil de
l’analyse et de la consolidation des besoins,
• piloter les investissements, c’est à dire la production de l’ensemble des
projets du programme national et des programmes régionaux (planification,
adéquation des moyens, outils de suivi),
• apporter l’expertise et assurer l’animation métier sur toute la chaine de
compétences nécessaire à la mise en œuvre des projets (montage juridique et
financier, administration de projet, conception et réalisation).
3) La direction stratégie et finances, qui :
• anime le plan stratégique,
• assure la production des comptes et le pilotage économique de la branche et
conduit la politique financière,
• pilote la programmation pluriannuelle des investissements et mène le
processus d’instruction des dossiers,
• supervise l’ensemble des processus associés aux prestations régulées11
:
relations avec les tiers (autorités de régulation, régions, transporteurs, etc.),
élaboration du document de référence du réseau et du cadre tarifaire,
• répond aux questions d’ordre juridiques.
Ce découpage de la filiale et donc des agences gares en trois directions montre à la fois
la complexité du métier, mais aussi la nécessité de collaboration des différentes
11
Prestations régulées : ce sont les prestations qui ne rentrent pas dans le domaine des prestations de base.
Autrement dit, les parties prenantes ont le choix d’acheter ces prestations ou pas, contrairement aux prestations de
base, qui sont systématiquement réalisées en gare.
18
directions pour l’élaboration et la réalisation des projets. Toutefois, nous verrons par la
suite qu’il n’est pas aussi évident de favoriser le travail collaboratif, et que cela peut
influer d’une part sur la réalité économique du projet, avec des temps de traitements des
dossiers relativement longs, ou encore de mauvaises transmissions des informations
entrainant des difficultés à réaliser les projets. D’autre part, cet individualisme pèse sur
le moral des collaborateurs et indirectement sur leur motivation et leur bien-être
au travail.
Pour porter la politique ambitieuse d’amélioration de la qualité de service en
gare, et par conséquent accroître la satisfaction des clients, la filiale gestionnaire des
gares a rédigé, dès sa création, un projet qui se structure autour de 5 axes.
Ces 5 axes ont été déclinés en 10 promesses de services afin de mettre le client au cœur
des préoccupations de l’entité. L’objectif est donc de faire des 3029 gares du réseau, des
lieux agréables et efficaces, au service des voyageurs, des entreprises ferroviaires et des
partenaires privés comme publics.
Les 10 promesses de service ainsi proposées par la filiale en charge de la gestion des
gares du réseau français sont :
Vous trouvez facilement votre train,
Vous êtes informés sur les services en gare,
Vous changez facilement de mode de transport,
19
Vous êtes informés sur les perturbations,
Vous vous déplacez facilement dans la gare,
Votre gare est propre et éco-durable,
Vous disposez de toilettes propres,
Vous profitez de commerces facilitant votre vie,
Vous attendez dans des espaces confortables,
Vous vous sentez en sécurité dans les gares.
Ces 10 promesses sont donc l’un des moyens de réponse donné par l’entité aux
attentes d’équités imposées par les autorités européennes de régulation. Ce
fonctionnement par promesse est à l’initiative de l’entité gestionnaire des gares pour
montrer sa volonté de garantir à la fois l’équité aux transporteurs (qui vont tous
bénéficier des mêmes prestations en gare), mais aussi et surtout des services en gare de
qualité pour les usagers. Toutefois, l’atteinte de ces 10 promesses nécessite parfois de
gros investissements et de longs chantiers de rénovation des gares, d’où un plan
d’investissement de 4 à 5 milliards d’euros étendu sur les 10 prochaines années.
1.1.2.2 Un nouveau projet de service qui bouleverse l’organisation du
travail
Alors que la segmentation des gares, ainsi que les promesses de services étaient enfin
suivies par l’ensemble du personnel de la filiale gestionnaire des gares, et cela après 3 années de
lutte des managers pour faire imposer ce changement, la démarche se voit totalement remise à
plat.
En effet, dans le cadre de l’harmonisation européenne de la gestion des
infrastructures en gare, illustrée par le Décret gare du 20 Janvier 2012,12
un
nouveau projet de service est actuellement en cours d’achèvement. Ce dernier est
marqué par 5 grands changements :
• passage de 10 à 5 promesses de service13
,
12
Décret n°2012-70 du 20 Janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du
réseau ferroviaire.
13
Les 5 promesses de service Gares&Connexions : INFORMATION (les clients ont accès à l’information relative aux
trains et à la gare), DÉPLACEMENT (les déplacements des clients en gare et entre leurs modes de transport sont
fluides), PROPRETÉ & SURETÉ (l’espace de la gare est propre et sûr), CONFORT (les clients disposent d’un
20
• création d’une rubrique « service à la carte », notamment pour les
commerces et l’intermodalité en gare,
• création de 3 segments tarifaires (a, b et c)
• passage à 3 segments de service et suppression des segments marketing,
• nouvelles appellations des gares : Grandes Gares / Moyennes Gares / Gares
de Proximité ; et non plus Gares Européennes, Gares Nationales, Gares
Régionales, Gares de Proximité, Haltes.
Ce projet de service entraîne donc l’ensemble de la filiale en charge de la gestion
des gares à revoir son organisation. Effectivement, il ne suffit pas seulement d’attribuer
environnement d’attente confortable), SERVICES (les clients ont accès à des services qui mettent à profit leur temps
en gare.
21
telle ou telle gare à telle ou telle segmentation. Cette restructuration nécessite de revoir
le niveau de service proposé en gare, de traiter avec les autorités organisatrices et plus
généralement l’ensemble des parties prenantes, notamment afin d’adapter la tarification
avec les services proposés en gare. Aussi, suite à ce nouveau projet de service, c’est
toutes les mesures qualité qui vont devoir être remises à jour. Enfin, c’est le
personnel travaillant en gare, de surcroit les collaborateurs qui sont en contact
avec les compagnies ferroviaires, avec les clients, ou bien même ceux qui sont de
près ou de loin impliqués dans la démarche qualité, qu’il va falloir former à
nouveau et surtout qu’il va falloir convaincre que ces modifications sont
nécessaires, importantes et ont pour objectif de faciliter l’organisation générale de
la filiale. C’est ce point qui risque d’être le plus compliqué, notamment avec du
personnel qui est relativement hostile au changement dans cette entreprise. Mais au delà
des difficultés de management que va entrainer l’application de ce nouveau projet de
service, c’est la motivation du personnel qui risque d’être entachée de par cette
nouvelle modification de leur habitude et fonctionnement de travail.
Dans le même temps, dans l’optique de simplifier l’organisation des agences
gares, de responsabiliser les établissements gares, mais aussi de réduire les dépenses de
gestion des agences, deux des 7 agences ont fusionné en juin 2013 : l’Agence Rhône-
Alpes Auvergne (dans laquelle j’effectue mon stage) et l’Agence Bourgogne Franche
Comté.
Cette décision de fusionner les deux agences a été officiellement prise le 1er
Janvier
2013 par le siège de la filiale. Cette décision, aussi rapide qu’inattendue, a entrainé
de nombreuses revendications au sein de ces deux agences. En effet, le personnel de
l’Agence Bourgogne Franche Comté (BFC) va être rattachée au siège de l’agence
Rhône Alpes Auvergne (RAA) et cela va entrainer des remaniements de postes, des
mutations de collaborateurs de BFC, dont le siège est à Dijon, vers le siège lyonnais
de RAA. Outre, ces modifications de poste et d’organisation, c’est la rapidité et le
manque de communication qui est très mal vécu par les collaborateurs qui se
sentent assimilés à des objets que l’on déplace sans prendre en compte leurs avis,
ni même parfois leurs contraintes personnelles. Nous verrons d’ailleurs par la suite,
que cela va jouer sur la motivation de l’ensemble du personnel et sur leur productivité
au travail.
22
1.2 Une nouvelle organisation qui génère un nouveau modèle
managérial
Nous avons pu voir lors de la précédente sous-partie que deux événements viennent
ébranler le mode de fonctionnement admis et suivi par le personnel de la filiale
gestionnaire des gares :
- le premier touche tout le territoire français, avec une démarche nouvelle tant
pour la prestation de services, que pour les mesures qualité de la filiale,
- le second touche exclusivement les agences gares de Bourgogne Franche Comté
et Rhône Alpes Auvergne, avec des mutations de postes, un changement de
rattachement hiérarchique du personnel de l’agence BFC à l’agence RAA, et des
collaborateurs qui craignent pour la pérennité de leur poste et/ou de leur qualité
de vie (notamment pour ceux dont les postes seront transférés au sein du siège
lyonnais de l’Agence RAA).
Que ce soit le nouveau projet de service ou la fusion des deux agences, ces changements
entrainent des problématiques de management, avec des collaborateurs qui adhèrent de
moins en moins au mode de fonctionnement et d'organisation de la filiale, et par
conséquent, qui se trouvent affectés moralement, leur faisant perdre leur motivation.
Il serait donc intéressant d’essayer de déterminer si ce refus du changement, avec tous
les effets néfastes pour l’entreprise, mais surtout pour le bien-être des salariés dans leur
travail, est une étape obligatoire et sur laquelle la Direction, les managers ne peuvent
rien. Ou bien au contraire, le changement peut-il être accepté à partir du moment où il
est accompagné et qu’il implique, depuis ces prémisses jusqu’à ces premiers effets,
l’ensemble des collaborateurs ?
23
1.2.1 Le personnel en perpétuelle adaptation
1.2.1.1 Des collaborateurs en mal de management
Pour être mobilisateur et fédérateur, un changement ne doit pas se réduire à
une simple ambition économique.14
En effet, bien que chacun dans l’entreprise sache
que celle-ci n’est justifiée que par sa fonction économique, tout le monde n’est pas
forcement prêt à se démener pour la réalisation d’une telle ambition, de surcroît pour les
employés dont l’action, au sein de l’entreprise, semble trop déconnectée de cette
ambition. Ainsi, même s’il est nécessaire de faire figurer une ambition économique dans
le projet d’entreprise, ceci n’est pas suffisant pour faire de ce projet quelque chose de
mobilisateur. Par conséquent, d’autres ambitions doivent venir enrichir le projet,
telles que :
- une ambition sociale, humaine : par cela, nous entendons le développement de
la formation de l’ensemble du personnel, l’évolution rapide des carrières, ou
encore la mise en place d’un système de récompense toujours plus attractif ;
- une ambition technologique, permettant alors à l’entreprise d’être leader sur
son marché, d’être à la pointe de la technologie ;
- une ambition financière qui est notamment marquée par une notion de
profitabilité permettant alors de maintenir une bonne politique d’investissement,
mais aussi indirectement de pouvoir récompenser le personnel via la
participation et/ou l’intéressement ;
- une ambition de service public, marquée notamment par la participation de
l’entreprise au développement de l’emploi du pays, ou encore une maîtrise
avancée du management socio-économique.
Concernant le cas de l’entreprise ferroviaire française et plus précisément de la filiale en
charge de la gestion des gares, dont les objectifs sont d’assurer l’équité entre les
transporteurs et entre les voyageurs, mais aussi la mise en place d’un nouveau projet de
service visant à mieux servir les parties prenantes de l’entreprise lorsqu’elles sont dans
le périmètre de la gare ; de même avec la fusion des deux agences (BFC et RAA) dont
14
Georges ARCHIER et Henri Servieyx – “L’entreprise du 3ième type” – Edition du seuil (215 pages) – Avril 1984 –
page 47
24
l’une des préoccupations est de favoriser l’action sur le terrain plus que dans les
agences ; nous pouvons constater que l’ensemble de ces ambitions est relativement
respecté. En effet, avec les changements actuels affectant la filiale, le personnel
bénéficie de possibilités de reclassement, de mutation, de formations dans le but d’avoir
du personnel en phase avec la nouvelle politique, et cela à tous les niveaux de
l’entreprise.
Pour ce qui est de l’ambition technologique, étant donné que le cœur de métier de
l’EPIC et de ses filiales concerne principalement des prestations de services, la
technologie de pointe n’est pas le principal objectif de l’entreprise. Toutefois, de par ses
innovations en gare, ses services simplifiant toujours plus la vie des usagers du
ferroviaire et leur rendant le transport plus agréable, l’entreprise ferroviaire française
peut être considérée comme leader sur le marché (et cela, même en prenant en compte
l’arrivée progressive de la concurrence).
Enfin, avec ses 160 000 employés en France et un résultat net de 383 millions d’euros
en 2012 (contre 125 millions en 2011), nous ne pouvons alors contester aussi bien la
rentabilité de l’entreprise, que sa volonté d’être et de rester une entreprise française
motrice en termes d’emplois.
Le principal problème face au changement, à l’adaptation à la nouvelle politique,
réside dans le fait que la participation des salariés dans ce processus de changement
n’est pas systématique : cela dépend de l’importance des décisions. De même, le
contexte économique, avec les implications sociales sur l’emploi ou sur les conditions
de travail, ou encore l’urgence de la décision, sont des notions déterminant l’implication
des salariés dans le changement. Nous nous apercevons, au sein de l’entreprise
ferroviaire et notamment de la filiale gestionnaire des gares, que les situations
économiques difficiles, ou la gestion des urgences, ne sont pas favorables à la conduite
participative du changement. Effectivement, concernant l’entité en charge de la gestion
des gares, suite aux exigences complexes des autorités européennes, à l’arrivée de la
concurrence et tout cela avec d’importantes contraintes économiques, la participation de
l’ensemble du personnel sur les conditions de mise en place de la politique d’entreprise
se trouve minime. Ainsi, dans le cadre de l’entreprise ferroviaire, les débuts de l’entité
et les changements actuels suivent une conception peu participative, proche de la
25
théorie X avancée par Mc Gregor15
, plaçant le personnel principalement dans une
position d’exécutant et non pas d’acteur de la démarche. Toutefois, tout comme lors de
la création de la filiale en 2009, la participation du personnel au changement se trouve
inévitable pour rendre le changement moins brutal, plus acceptable et plus bénéfique.
Par conséquent, la conception du management au sein de la filiale finit toujours par
diverger vers un mode plus participatif de l’ensemble du personnel, avec une intégration
et une appropriation libre pour chaque acteur des modifications de la filiale. Nous
pouvons alors dire qu’aujourd’hui la filiale, suivant l’importance des décisions, le
contexte économique et le poids des modifications sur l’organisation globale de
l’entreprise, jongle entre la théorie X et la théorie Y de Mc Gregor.
Toutefois, l’approche participative suppose un pilotage strict, par une instance
définissant les objectifs, diffusant l’information et validant les résultats, voire
réorientant le travail en fonction des données nouvelles. Ainsi, les responsables de
chaque agence ont pour missions d’une part de diffuser l’information provenant
des instances de décisions nationales, et d’autre part de suivre et coacher les
équipes sur le terrain. Toutefois, la réalité des faits, avec des évolutions continuelles
des mesures, des objectifs, de l’organisation, est parfois différente. En effet, les
managers peuvent se sentir parfois dessaisis de leur pouvoir de management, lorsque
par exemple, la communication du national est trop lente, trop flou, avec beaucoup de
modifications, de nombreuses versions, mais aussi lorsqu’il leur faut un certain temps
pour s’approprier ce qu’ils doivent communiquer et expliquer à leurs collaborateurs.
Nous avons d’ailleurs des illustrations de ces défaillances au sein de la filiale
gestionnaire des gares, où le tableau de performance, contenant les objectifs à atteindre
durant l’année, est modifié tous les mois jusqu’en juin. Ainsi, il convient de se
demander s’il faut communiquer dès le départ auprès des collaborateurs en effectuant
une nouvelle communication à chaque version, ou bien s’il est préférable d’attendre la
version définitive ? Par conséquent, nous comprenons aisément qu’il n’est pas toujours
facile pour les managers d’effectuer leur travail comme il se doit, du fait que le pilotage
du siège national n’est pas toujours compatible avec un management de proximité,
nécessitant des règles stables.
15
Douglas Mc Grégor (1906 – 1964), docteur en psychologie de l’Université de Harvard, a élaboré une véritable
théorie de management basée sur deux conception de l’homme au travail : la théorie X et la théorie Y.
26
Le changement en entreprise ne se limite donc pas seulement à une participation des
employés, il passe aussi nécessairement par une consolidation et une remise en
cause de l’organisation. Toutefois, cette étape semble être la plus difficile à mettre en
place car les managers n’aiment pas toujours que l’on change leurs habitudes, le
fonctionnement de l’organisation, et de surcroît, beaucoup d’entre eux estiment qu’ils
ne sont pas assez récompensés par rapport à leur implication dans la nouvelle
organisation. En effet, la consolidation de l’organisation passe nécessairement par
une modification du système de gestion (structure, méthodes de travail, procédures de
travail, circuits de décision, modes d’évaluation des performances, systèmes de
rémunérations), autrement dit, des instruments de pilotage, de coordination et de
contrôle : cœur du fonctionnement des organisations. Si cette modification du système
de management n’est pas opérée, alors il y a un risque de décalage entre les actions
menées et leur évaluation par les systèmes de mesure de la performance. Par
conséquent, l’EPIC ferroviaire français, dans le cadre de sa politique et des nombreuses
adaptations de l’entreprise, doit pousser son personnel à s’inscrire pleinement dans
l’acceptation et la conformité du nouveau système de gestion, et cela, même si le
personnel semble réticent à tout changement concernant sa manière de travailler. Pour
cela, la consolidation peut être traitée et appliquée à des degrés et à un rythme différent
suivant les acteurs, la localisation géographique des gares, la réticence connue de
certaines personnes, etc. Mais aussi, les obstacles rencontrés face au changement, ne
pourront être amoindris que si la définition des informations pertinentes est élaborée de
manière participative, et que les outils sont conçus avec les acteurs les plus directement
concernés. Ainsi, le risque de désintérêt manifesté par les salariés en ce qui concerne le
nouveau système de gestion ne pourra que s’en trouver réduit.
Enfin, la construction des instruments de pilotage de consolidation de l’organisation
doit chercher à répondre aux trois questions suivantes :
• Quelles sont les informations pertinentes du point de vue de l’organisation, de
l’évaluation et du contrôle de la performance ?
• Comment et par qui ces informations peuvent-elles être saisies, formalisées et
diffusées ?
• Comment articuler ces contraintes nouvelles avec les systèmes existants ?
27
1.2.1.2 Du personnel généralement réticent au changement
Il convient à présent de s’intéresser à la manière dont les collaborateurs vivent
ces changements. Nous nous intéresserons ici principalement à la fusion entre les deux
agences de Bourgogne Franche-Comté et Rhône-Alpes Auvergne.
Il existe trois attitudes de base qui s’imposent au personnel face à un changement16
:
L’indifférence : cela est possible sous une seule condition : il faut que le
changement ne nous impacte d’aucune manière, qu’il ne remette pas en cause
nos intérêts, nos choix, nos valeurs, nos privilèges, ni nos acquis.
La fuite : nous parlons de négociation de la situation, nous refusons la situation.
Cela se traduit alors par une tentative d’y échapper. Le problème étant que le
changement est une obligation, la fuite ne peut être que temporaire.
La confrontation : cette dernière peut s’illustrer de deux manières différentes :
- Nous pouvons soit subir le changement : nous parlons alors de voix passive
du changement, nous subissons les attaques de l’extérieur. Néanmoins, subir
est une sorte d’acceptation du changement, mais de manière contrainte et
forcée.
- Soit nous pouvons choisir de gérer ce changement. Nous sommes alors dans
la voix active, où nous essayons d’agir. Ici, la démarche est volontaire et
nous devenons acteur du changement avec la possibilité de modifier les
choses.
Au sein de l’entreprise ferroviaire, il est difficile d’avoir des comportements semblables
face au changement : les collaborateurs sont tous différents, font des métiers différents,
viennent de milieu différents. Par conséquent, les trois attitudes décrites précédemment
sont perceptibles. Cependant, l’entreprise ferroviaire est considérée comme une grande
famille par les collaborateurs, notamment lorsqu’il s’agit de préserver l’emploi et les
avantages du métier. Ainsi, l’attitude de confrontation active est généralement celle qui
caractérise le mieux les employés de cette entreprise. Néanmoins, il faut nuancer cela en
16
Cours de processus de changement – Nathalie KRIEF – Enseignante au sein du centre EUGINOV en Master 1
Management des Equipes et Qualité – Chercheur au sein de l’ISEOR.
28
précisant que parmi ces collaborateurs certains sont plus passifs qu’actifs, et suivent les
« leaders de l’opposition ».
Le fait que personne ne vive le changement de la même manière, et que beaucoup
d’employés se trouvent sous la coupe des collaborateurs les plus virulents opposés au
changement, mène souvent à un sentiment de mal-être des collaborateurs, qui ne savent
finalement plus s’ils sont en opposition parce qu’ils sont intimement persuadés que ce
changement n’est bénéfique ni pour eux, ni pour l’entreprise ; ou bien, s’ils sont contre
parce qu’il faut être contre par solidarité, mais cela sans aucune conviction profonde.
Quelque soit l’état d’esprit des employés, le changement s’opère toujours en
passant par 5 grandes étapes : le refus de comprendre, la résistance, la décompression, la
résignation et l’intégration (cf : schéma ci-dessous).
Ce schéma illustre très bien la fusion entre les agences BFC et RAA. Voyons dans le
détail comment cette fusion a été interprétée par les agents.
L’annonce a eu lieu début Janvier 2013 conjointement par les directeurs de
chaque agence. Ces derniers, qui ont appris par la même occasion qu’aucun
d’entre eux ne restera à la tête de l’agence, ont présenté le projet rapidement au
personnel et avec beaucoup d’hypothèses sur le devenir concret de l’agence et
des fonctions de chaque collaborateur. Cela s’explique par deux principales
29
raisons : la première étant que l’annonce a été faite alors que le projet était à son
début et donc qu’il était difficile de le détailler. La seconde relève plus de
l’humain, avec deux directeurs d’agences qui, au moment où leurs
collaborateurs s’inquiétaient pour leur devenir, devaient faire face à cette même
problématique d’incertitude quant à leur propre devenir personnel.
Le refus de comprendre : Comme nous venons de le voir, les collaborateurs
étaient dans un sombre nuage concernant le maintien de leur poste, leur lieu
d’activité (Dijon ou Lyon), l’évolution des fonctions, etc. Aussi, le personnel ne
comprenait pas pour quelles raisons les deux agences devaient fusionner, si ce
n’est pour des raisons financières.
La résistance : La première phase du refus de comprendre a laissé rapidement
place à la résistance face à ce changement. Ainsi, les collaborateurs ont fait
savoir leur hostilité face à ce projet et leur refus d’y adhérer. Par conséquent,
leur travail était beaucoup moins efficace, moins collaboratif, fait sans envie.
Aussi, le personnel a rapidement demandé l’intervention du CHSCT pour les
appuyer et vérifier la fiabilité du projet.
La décompression : Comprenant que l’issue de la fusion serait inévitable, avec
les bouleversements que cela entraine pour le personnel, beaucoup d’entre eux
sont rentrés en phase de déprime, étaient en pleurs lorsque leurs collègues de la
région Rhône Alpes Auvergne les appelaient. Pour beaucoup, cette phase était
marquée par de la haine envers leur manager, envers la direction de la filiale, et
un certain nombre souhaitait carrément changer de filiale, de région, voire
d’entreprise.
La résignation : A quelques jours de la fusion (qui a eu lieu le 1er
juin 2013), le
personnel a en quelque sorte accepté ce changement, et cela a notamment été
constaté lors du premier séminaire regroupant les deux anciennes agences (les
28 et 29 mai 2013), où les collaborateurs ont participé aux activités, ont essayé
de se connaître mutuellement. Toutefois, peu étaient convaincus par
l’organisation proposée par la Direction, et personne ne laissait percevoir un
quelconque entrain dans cette fusion.
30
L’intégration : cette phase n’est à ce jour pas atteinte, elle demandera un bon
suivi managérial et un certain temps d’adaptation. Néanmoins, le discours
fédérateur du nouveau directeur d’agence lors du séminaire, montre un réel désir
de la Direction de faire de ces deux agences une seule grande équipe, avec la
volonté de placer l’humain au cœur du projet.
Cette partie du mémoire nous montre que la filiale gestionnaire des gares doit faire face
à de gros changements organisationnels, qui ne sont pas des mieux acceptés pour le
moment par les employés. Bien que cela ait un impact important sur la motivation de
ces derniers, et que par conséquent leur bien-être professionnel et certainement privé,
tout comme la qualité du travail qu’ils réalisent se trouvent affectés, il n’en reste pas
moins, que cette phase ne devrait être que passagère. Toutefois, l’intégration au
changement pourrait être d’autant plus vite atteinte si le management était mieux adapté
à la situation actuelle et qu’il ne restait pas passif et étanche au besoin des
collaborateurs d’être encadrés et rassurés.
31
1.2.2 Une motivation entachée par une perte d’identité
Comme nous avons pu le constater lors de la partie précédente, la situation dans
laquelle se trouvent les employés en ce moment, avec des changements structurels et
organisationnels auxquels ils n’adhérent pas encore, ne favorise pas la motivation ni le
bien être au travail. Toutefois, ces symptômes de mal-être ne datent pas du projet de
service, ni même de la fusion : ces éléments n’ont fait qu’accentuer cet état. Ainsi,
nous allons voir, dans la partie suivante, ce qui est à la base de la démotivation au sein
de la filiale en charge de la gestion des gares.
1.2.2.1 Un management pas assez proche du personnel
L’une des raisons récurrentes de démotivation en entreprise est la mauvaise
évaluation de la charge de travail par les managers, que ce soit trop de travail ou pas
assez. En effet, si le collaborateur effectue rapidement son travail et qu’il ne sait plus
quoi faire pour s’occuper, alors l’ennui vient s’installer dans le quotidien du travail.
Inversement, si le collaborateur est surchargé de travail, le stress va l’envahir, il risque
alors de mal faire son travail et dans le pire des cas d’être arrêté par son médecin pour
cause de burn-out17
. Mais quelque soit le cas, c’est la motivation au travail qui se
trouve indirectement entachée.
Du côté de la filiale en charge de la gestion des gares au niveau de l’agence gare, le
problème est généralement la charge de travail. En effet, le périmètre étant très dense
avec 360 gares au niveau de la région Rhône Alpes Auvergne, il est difficile de
pouvoir être sur tous les fronts au même moment. Cette situation ne va pas aller en
s’arrangeant avec la fusion des deux agences, car le périmètre va passer de 360 à 546
gares, et cela avec une réduction de personnel. Certes, aucun des collaborateurs de
l’agence n’a pour objectif de s’occuper de chacune des gares de manière individuelle,
17
Burn-out : épuisement professionnel qui caractérise l’état de la personne ayant atteint ses limites de rendement,
généralement à la suite d’un stress aigu et prolongé. En vocabulaire plus familier, on dit des personnes qui sont
dans cette situation qu’elles sont “au bout du rouleau”. Les premiers signes du burn-out sont généralement
l’absence de motivation personnelle, la perte de créativité et de vigilance au travail, ou encore un comportement
lunatique.
32
mais la mauvaise anticipation des dossiers à venir n’aide pas à la régulation de la charge
de travail. Toutefois, ce stress et la mauvaise gestion du temps peuvent être imputés
aux managers qui fixent des objectifs trop ambitieux et qui ne contribuent pas à
leur réalisation.
Pour répondre à cela, l’école behaviouriste18
propose de fixer des objectifs faciles à
atteindre afin d’obtenir de meilleures chances de réussite. Le problème de cette
préconisation est alors que cela risque d’entrainer une démotivation inverse des
collaborateurs qui n’auront pas besoin de se surpasser. La juste solution dépend de
nombreux facteurs tels que le contexte économique, mais aussi les efforts déjà
accomplis.
Aussi, que ce soit au cours des entretiens informels que j’ai réalisé dans le cadre
de mon mémoire, ou des observations sur le terrain, les collaborateurs évoquent
souvent le besoin de reconnaissance de la part de la hiérarchie. En effet, certains ont
l’impression que leur travail n’est pas bien pris en compte, ou du moins qu’il n’est pas
reconnu à sa juste valeur. Ainsi, ces collaborateurs constatent une charge de travail
élevée, des fonctions supplémentaires à leur poste, sans pour autant percevoir
d’augmentation de salaire ou d’avantages supplémentaires.
« Il y a un trop gros décalage entre l’agent de maitrise et le cadre au niveau du système
d’attribution de la prime : pour les cadres, c’est 7% du salaire annuel, alors que pour les
autres, c’est maximum 300€ ». 19
À la décharge des managers, il faut dire que le système de rétribution de la filiale est,
comme dans la plupart des grands groupes, relativement complexe. En effet, la
remise de prime, ou bien l’augmentation de salaire dépend principalement du niveau
d’ancienneté dans l’entreprise et du niveau de qualification, permettant alors de
déterminer le salaire et le montant des primes en se rapportant à une grille de salaire.
18
Ecole Behavouriste ou comportamentaliste : approche psychologique qui consiste à se concentrer sur le
comportement observable déterminé par l’environnement et l’histoire des interactions de l’individu avec son
milieu.
19
Extrait de l’entretien n°1 au sein de l’agence – “La recherche de la motivation et du bien-être au travail comme
outils de productivité” – Annexe n°2
33
De même, il est important de noter qu’il est rare qu’une personne en entreprise
estime son salaire juste par rapport au travail qu’elle fait : elle estimera souvent ne
pas être assez payée.
Toutefois, bien que les managers ne peuvent pas augmenter le salaire des collaborateurs
chaque fois qu’ils accomplissement une tâche supplémentaire ou n’étant pas dans la
fiche de poste initiale, il n’en reste pas moins que ce sentiment d’injustice salarial est
signe d’autres maux. Par exemple, cela peut être révélateur d’un manque de
communication et de points de rencontre entre le manager et son collaborateur, qui
fait que les activités sont mal définies et que ce dernier ne comprend pas pourquoi il
n’obtient pas une contrepartie qu’il estime juste. Cela est d’autant plus vrai que jusqu’à
l’an passé, les collaborateurs n’avaient pas de fiches de poste. Par conséquent, ils
autodéterminaient ce qui leur semblait être du travail en lien avec leur fonction et ce qui
ne l’était pas (selon eux) et donc qui méritait récompense. Aussi, cette situation peut
mettre en exergue un autre problème, très fréquent dans les grandes entreprises, qui est
celui de la comparaison aux autres, notamment au vu des avantages accordés à
certains. Il est donc important pour le manager de veiller à ce qu’une certaine équité
soit respectée, que le montant des primes, à partir du moment où il est à la connaissance
de l’ensemble du personnel, soit justifié et expliqué. Cela évitera très certainement le
sentiment d’injustice ou encore la jalousie de certains collaborateurs.
1.2.2.2 Un statut de cheminot et une structure d’entreprise inadaptés
à la concurrence
Tout comme les autres grandes entreprises nationales françaises, l’entreprise
ferroviaire va devoir se transformer pour faire face au bouleversement concurrentiel.
Cette étape n’est pas des plus simples pour la Direction de l’entreprise, car cette
dernière va devoir s’atteler à harmoniser la structure ainsi que la fonction sociale de
l’entreprise, en travaillant à l’étude d’une réforme du système ferroviaire20
français,
20
La réforme du Système Ferroviaire est portée par Frédéric Cuvillier, Ministre délégué auprès de la Ministre de
l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, sous le
Gouvernement Ayrault.
34
dont le projet de loi est en préparation et sera mis en application à l’automne 2014 ; et
de la mise en place d’un « cadre social harmonisé ».21
Cette étude part d’un constat relativement simple, autour de deux axes:
1. L’équilibre financier du système ferroviaire français n’est pas au rendez-
vous, avec une dette de 40 milliards d’euros, répartie entre l’entité en charge du
réseau ferré (pour 32 milliards) et l’entreprise ferroviaire (pour 8 milliards).
Cette dette s’accroit de 1.5 milliards d’euros chaque année, il convient donc
de trouver un moyen de stabiliser cette dette.
2. Alors que l’entreprise ferroviaire publique a bénéficié, depuis son origine,
d’avantages importants de par son système de retraite permettant un départ à la
retraite des collaborateurs avancé, un aménagement des durées de travail propre
à l’entreprise, ou encore un déroulement salarial et des avantages spécifiques, la
libéralisation du marché ferroviaire s’accompagne d’un écart de compétitivité
de 25 à 30% par rapport aux salariés des opérateurs privés ou des
compagnies ferroviaires voisines (schéma ci-dessous).
21
La notion de « cadre social harmonisé » a été défini lors des Assises du Ferroviaires de Décembre 2011, menées
par Nathalie Kosiuscko-Morizet, alors en fonction de Ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et des
Transports du Gouvernement Fillon.
35
Face à ce constat alarmant, l’entreprise doit trouver des solutions. Ainsi, Frédéric
Cuvillier a proposé que la Réforme Ferroviaire soit marquée par la constitution
d’un Gestionnaire d’Infrastructure Unifié, qui consistera à regrouper l’entité en
charge du réseau avec l’entreprise ferroviaire afin de mettre à profit l’efficacité
industrielle des deux opérateurs pour améliorer la performance économique du
système et maîtriser son endettement. Parallèlement, le Ministre appelle l’EPIC,
toutes ses filiales, ainsi que toutes les parties prenantes du système ferroviaire (y
compris l’Etat) à contribuer à ce redressement économique, en visant notamment des
économies de gestion et de structures.
Aussi, l’étude du Cadre Social Harmonisé a permis de préciser trois aspects :
- Les modalités et le contenu d’une harmonisation des normes législatives et
règlementaires en matière de durée et d’aménagement du temps de travail
entre le personnel de l’entreprise ferroviaire publique française d’une part, et les
opérateurs privés de l’autre,
- Les dispositions législatives et règlementaires nécessaires à la protection des
salariés du secteur en cas d’ouverture à la concurrence par appel d’offres,
- L’analyse des spécificités du statut du personnel de l’entreprise ferroviaire
publique française au regard des questions posées par l’ouverture à la
concurrence.
L’enjeu de ce Cadre Social Harmonisé réside donc dans la réduction des écarts de
compétitivité entre les salariés au statut de Cheminot et les contractuels, mais
surtout entre les employés de l’entreprise ferroviaire publique et les employés des
opérateurs privés : il en va de la viabilité et de la survie de l’entreprise. Pour cela, c’est
tout le squelette de l’entreprise ferroviaire française qui va devoir être mis à plat, avec la
refonte des accords d’entreprise ; de la convention collective nationale, mais aussi des
lois et des décrets. Toutefois, le gouvernement est très clair dans ses annonces : ni le
statut, ni le régime de retraite ne seront touchés par la Réforme et donc par le Cadre
Social Harmonisé : c’est la durée et l’organisation du travail qui seront revus, avec des
négociations sur le régime de travail et sur les règles que tout le monde devra
respecter.
36
La réponse donnée à ce Cadre Social Harmonisé est la construction d’un dispositif à
trois étages qui se complètent :
• Etage 1 : au niveau réglementaire, le décret socle commun qui s’appliquera à
tous, y compris à l’activité du fret dès lors qu’il sera plus favorable que le décret
fret de 2010
• Etage 2 : la convention collective de branche. La négociation de celle-ci se fera
entre l’Union des Transports Publics (UTP) qui représente les entreprises de la
Branche et les organisations syndicales représentatives de la branche ferroviaire.
Et en haut, comme arbitre, l’Etat.
• Etage 3 : les accords d’entreprise qui visent à compléter la convention collective
par des accords ou des règles spécifiques à chaque entreprise de la branche.
Sur ce schéma, nous comprenons aisément, que l’étage où les cheminots ont une
certaine influence est le niveau des conventions de branche. Ainsi, cela laisse présager
un climat quelque peut tendu entre les syndicats cheminots, qui souhaitent favoriser au
maximum les salariés et la Direction de l’entreprise (avec l’Etat) qui souhaitent faire de
l’entreprise ferroviaire une entreprise compétitive.
Ce qui est certain avec la Réforme Ferroviaire, c’est que chacun va devoir faire des
efforts afin de réduire la dette. Mais comment cela sera vécu par les employés ? Seul
l’avenir nous le dira.
37
CONCLUSION DE LA PARTIE 1
DES FAITS :
• L’entreprise doit faire face à l’ouverture du marché ferroviaire français et à
la nécessité d’harmoniser les systèmes ferroviaires européens, cela sous le
contrôle des autorités de régulation européennes.
• La dette du système ferroviaire français pèse aujourd’hui 40 milliards d’euros
et s’alourdie chaque année de 1.5 milliards d’euros. Il y a donc un besoin urgent
de réorganiser la structure de l’entreprise afin d’accroitre son efficacité, mais
aussi de réduire les coûts de fonctionnement.
• Une filiale en charge de la gestion des gares qui a été créée comme réponse à
l’ouverture à la concurrence, mais qui doit simplifier son organisation, réduire
ses dépenses et se rapprocher du terrain.
DES PROBLEMATIQUES :
Du personnel qui commence seulement à s’approprier le fonctionnement de la
filiale en charge de la gestion des gares, mais qui doit tout reprendre à zéro
suite l’arrivée d’un nouveau projet de services, ou encore à la refonte des
promesses de service. Dans ce contexte d’adaptation permanente du
personnel, ce dernier est de plus en plus réticent au changement.
Des managers qui n’arrivent pas toujours à suivre tous les changements de
la filiale et plus généralement de l’entreprise, et qui n’aident pas les
collaborateurs à adhérer au changement.
Une fusion de deux Agences Gares rapide et difficilement comprise par les
collaborateurs.
Des collaborateurs qui arrivent de moins en moins à trouver leur place dans la
société, qui se sentent maltraités par l’entreprise, ce qui favorise
l’individualisme et des tensions dans l’entreprise.
UN CONSTAT :
Le climat social de l’entreprise n’est pas au beau fixe, laissant place à une baisse
notable de la motivation et du bien-être au travail.
38
39
2. UNE ORGANISATION DU TRAVAIL À STABILISER
La première partie de ce mémoire nous a donc permis de découvrir les grands
bouleversements auxquels l’entreprise doit faire face. Parallèlement à ces
problématiques, la société ferroviaire doit faire en sorte que l’ensemble de son
personnel intègre le changement et y adhère, tout en tâchant de garder en vue que la
satisfaction des clients est la base d’une bonne performance. Cela fera l’objet de notre
seconde partie.
2.1 Les impacts socio-économiques d’une organisation instable au sein
du siège régional
2.1.1 Le bien-être et la motivation difficilement atteignables
L’Entreprise ferroviaire, que ce soit au niveau du Groupe ou des filiales, dispose
d’un atout considérable : son capital humain.
En effet, avec ses 156 000 collaborateurs en 2012, la société bénéficie d’équipes
mobilisées et compétentes, permettant de mener des expertises riches, diverses et
complémentaires. Néanmoins, comme dans toute entreprise de services comprenant un
grand nombre de collaborateurs, le plus délicat est de les faire travailler ensemble et de
manière optimale, afin de rendre l’organisation la plus performante et efficiente
possible. Pour cela, un esprit d’équipe solide, avec une juxtaposition des
compétences est nécessaire. Néanmoins, cela est sans compter sur la complexité
organisationnelle du Groupe.
2.1.1.1 Des métiers de spécialistes favorisant l’individualisme
L’entreprise ferroviaire française donne au grand public une image d’entreprise
familiale, où tous les collaborateurs sont soudés et travaillent main dans la main. Cette
image est notamment véhiculée lors des agressions des contrôleurs de train, donnant
généralement suite, dans le quart d’heure suivant les faits, à une paralysie du réseau
40
ferré, via le droit de retrait22
dont disposent les agents. La légitimité de l’ensemble des
contrôleurs à utiliser ce droit alors qu’ils ne sont pas concernés directement par
l’incident, avec tous les impacts de cette décision sur le plan économique pour
l’entreprise et surtout par rapport aux clients qui se trouvent bloqués en gare, est un
autre débat. Mais il est certain que cela illustre bien les liens forts qu’il peut y avoir
entre les cheminots. De même, l’actualité du week-end du 14 Juillet 2013, avec le
déraillement d’un train Corail en gare de Brétigny-Sur-Orge, déclenchant un élan de
compassion et d’entre-aide entre les cheminots, le montre bien aussi. Toutefois, cette
apparence n’est pas systématiquement avérée : les relations de travail entre les
cheminots sont parfois beaucoup plus compliquées et complexes que cela.
En effet, pour des raisons de transparence de l’activité et des transactions
financières au sein de l’entreprise, notamment imposée dans le cadre de l’ouverture
européenne du marché ferroviaire, cette dernière se trouve de plus en plus décomposée
en entités bien différenciées, avec des fonctions bien précises. Par conséquent, tous
les collaborateurs travaillent pour le compte de l’entreprise ferroviaire, mais surtout
pour d’autres services et filiales de l’entreprise que les leurs. Par exemple, la filiale en
charge de la gestion des gares, va contractualiser avec la filiale en charge du transport
de voyageurs à grande vitesse pour un certain niveau de prestations. Ainsi, toute
demande de prestation particulière et ponctuelle doit faire l’objet d’un avenant au
contrat. Cela pose alors le problème de la relation de travail entre les cheminots qui
ne peut plus être spontanée, car chaque instant passé à travailler pour une autre entité
de la filiale, doit être planifiée, contractualisée et facturée. Ce fonctionnement très
complexe est facteur d’individualisme et de perte de notion de groupe dans
l’entreprise, ce qui est antagoniste au travail collaboratif.
Revenons au niveau du siège régional de la filiale en charge de la gestion des
gares. Le personnel de l’Agence Gare est composé « d’experts » dans chaque métier
concernant les gares. Ainsi, nous avons du personnel Qualité, Sécurité Incendie, en
charge de la gestion des portes automatiques, ascenseurs et escalateurs, des comptables,
22
Droit de retrait : Article L 4131-1 du Code du Travail : « Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute
situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa
vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer
d’une telle situation »
41
des concepteurs de projets ou encore des gestionnaires immobiliers. Ces fonctions
d’experts consistent à la réalisation des objectifs nationaux, à la diffusion des nouvelles
mesures, à être l’intermédiaire entre le personnel en gare et le siège national. Pour le
bon exercice de cette fonction, il est nécessaire d’être proche du terrain, en terme de
présence physique, mais aussi en terme de réactivité en cas de questionnement en
provenance des gares, comme du national. Ainsi, chaque collaborateur de l’Agence
Gare doit se déplacer régulièrement dans les gares et cela de manière plus importante
depuis la fusion entre l’Agence Gare Rhône-Alpes Auvergne et l’Agence Gare
Bourgogne Franche Comté (expliquée dans la première partie du mémoire). La
conséquence directe de ces déplacements est que le personnel n’est pas souvent au
bureau et donc les liens au travail et les moments de partage se trouvent affaiblis.
Aussi, les déplacements fréquents créent un climat de suspicion, car certains
collaborateurs se permettent des réflexions, fondées ou non, sur la fréquence trop élevée
des déplacements, ce qui peut être parfois interprété comme des vacances déguisées ; ou
bien sur la déclaration de découchés que certains considèrent comme une rétribution
financière en pensant que les collaborateurs rentrent dormir à leur domicile.
« Chacun fait les horaires qu’il veut, les gens profitent du système. Cela crée un
sentiment de suspicion et des tensions entre les individus, d’autant plus lorsque les
absents ont les plus grosses primes. Il est important que le manager fasse sont travail et
sache où sont ses équipes. » 23
Le travail collectif n’est donc pas quelque chose de spontané dans l’Agence et
cela est coûteux pour l’entreprise, d’une part parce que cela peut être source de
conflits dans le service et donc à la base d’un mal-être dans l’entreprise affectant la
performance des individus. D’autre part, parce que les personnes n’ont pas pris
l’habitude de communiquer et de coopérer, ce qui mène à des dysfonctionnements
organisationnels. Ces dysfonctionnements étant alors à l’origine de retard dans la
réalisation des projets, voire de réalisation de projets en décalage avec les attentes et les
besoins des uns et des autres, et tout cela suite à une mauvaise communication.
23
Extrait de l’entretien n°2 au sein de l’agence – “La recherche de la motivation et du bien-être au travail comme
outils de productivité” – Annexe n°3
42
Le nouveau Directeur d’Agence a pris conscience de cela et souhaite axer la stratégie de
l’Agence sur ce point. En effet, lors du séminaire de l’Agence Centre Est Rhône Alpin
des 28 et 29 Juin 2013, il a exposé au personnel son constat à ce sujet : « la coopération
ne va pas toujours de soi : on doit prendre le réflexe de penser à l’autre. Il faut
toujours se demander si j’étais l’autre, qu’est-ce que je pourrais attendre de
moi »24
. Le premier moyen de lutte contre l’individualisme installé dans la vie de
l’Agence Gare est donc la capacité de chacun à porter attention aux autres.
Malheureusement, les mauvaises habitudes étant difficiles à changer, il est alors
nécessaire que ce travail de coopération soit aidé par des moments de partages organisés
dans le service, par des outils favorisant le travail collectif. Ce point sera détaillé de
manière plus précise au point 3.1.2 de ce mémoire - « Un besoin de favoriser le travail
collectif ».
2.1.1.2 Le manque de connaissance entre les collaborateurs à l’origine
de tensions internes
Lors du dernier séminaire de l’Agence Gare en Juin 2013, suite à son constat sur le
manque de coopération entre les individus, le Directeur de l’Agence en a déduit quatre
grands problèmes au sein de l’entité :
- Les collaborateurs ne se connaissent pas assez,
- Les collaborateurs ne connaissent pas les structures, ni l’organisation de
l’agence, et ce phénomène s’est amplifié suite à la fusion des deux Agences
Rhône-Alpes Auvergne et Bourgogne Franche Comté,
- Les collaborateurs connaissent mal les enjeux de l’entreprise, de la branche, de
l’Agence,
- Les collaborateurs ne se connaissent pas eux même.
Nous comprenons ainsi qu’il est nécessaire d’apporter ces connaissances aux
collaborateurs afin de stimuler à nouveau l’esprit de groupe et cela va commencer par
une remise en cause de l’organisation au sein de l’Agence.
24
Intervention plénière de Franck LAFERTE, Directeur de l’Agence Gare Centre Est Rhône Alpin, lors du séminaire
annuel de l’Agence – 28 et 29 Juin 2013 – Le Domaine du Rouret - GROSPIERRE
43
Le préalable à la connaissance de nos activités et des activités des autres
membres d’un même service, d’une même entreprise, est que les activités de chacun
soient définies et connues par tous, ou à défaut que chacun ait connaissance de
manière incontestable de ses propres missions.
Pour cela, il existe deux principaux documents :
- la fiche mission, permettant de décrire le travail à réaliser dans les grandes
lignes et représentant un support pour les managers lors des entretiens
d’embauche ;
- la fiche de poste, qui est établi par le manager, décrivant de manière précise les
missions qu’il attend de son collaborateur.
Jusque fin 2012, le personnel de l’Agence n’avait pas systématiquement de fiche de
poste définie. Ainsi, les fonctions de chacun et les attentes des managers étaient
exprimées lors de l’entretien d’embauche et lors des évaluations annuelles mesurant
l’atteinte des objectifs. Cela représente un premier souci, car le collaborateur qui n’avait
pas envie de réaliser une mission liée à son activité, soit par manque d’intérêt, soit par
manque de compétences, ne pouvait pas réellement être contraint de la faire. La seule
force contraignante dont disposait le manager était la prime sur objectifs. Aussi, ce
mode de fonctionnement pouvait être générateur des conflits que nous avons
précédemment cités, notamment sur les remarques quant aux déplacements fréquents de
certaines personnes du service. En effet, si la fiche de poste, consultable par chaque
membre du service, précisait la nécessité de se déplacer fréquemment pour certains
postes, alors les suspicions de « congés masqués » seraient moins grandes.
De même, des réunions hebdomadaires, voire mensuelles, service par service, sur les
activités de chacun durant la période à venir, en complément aux réunions mensuelles
de suivi des objectifs de chaque membre du service, permettraient à nouveau de
légitimer les déplacements et par conséquent de déculpabiliser le personnel qui va
fréquemment à la rencontre des collaborateurs en gare. Cela est très important, d’une
part pour les employés qui se déplacent régulièrement et qui peuvent être atteints par les
remarques de leurs collègues, jouant alors sur leur bien-être au travail.
D’autre part, cette manière de travailler consistant à se déplacer pour être proche des
acteurs qui sont en contact avec les clients, mais aussi pour connaître les différentes
44
problématiques en gare et s’efforcer d’y remédier, est exemplaire et nécessaire pour
fournir une bonne qualité de service aux clients. Effectivement, en étant à l’écoute et
attentif à la réalité du terrain, le personnel en gare, tout comme les clients se sentiront
d’avantage considérés, et cela impactera forcement la qualité de service et donc la
satisfaction des clients. Il convient alors d’encourager la proximité des
collaborateurs avec le personnel en gare, et non pas de laisser un climat de suspicion
et de mal-être réduire l’organisation de l’entreprise à un mode de fonctionnement
tayloriste creusant un fossé entre les têtes pensantes et le personnel réalisant les
services.
La connaissance des collègues de travail, tout comme le travail dans un climat
d’entente et de partage, se met en place dès l’intégration des collaborateurs dans le
service. Si personne ne sait qu’un nouveau salarié a rejoint l’équipe, il va être difficile
de l’intégrer et de travailler en collaboration avec lui. Suivant les individus, le contact
avec les autres personnes est plus ou moins facile. Cela dépend du caractère, de la
situation dans laquelle le salarié arrive (période de grève, restructuration, départ d’un
collègue très apprécié, etc.) Il convient alors pour le manager et les autres membres du
service de connaître sa personnalité afin de mettre en place un climat d’écoute et de
partage dans le service. Nous verrons dans la partie 3.1.2 de ce mémoire qu’il existe une
méthode appelée « Processus Communication », qui permet de définir le caractère des
personnes qui nous entourent dans l’objectif de s’adapter à leur sensibilité, à leurs
attentes de l’autre, permettant ainsi de mieux travailler ensemble.
Néanmoins, pour que les salariés aient envie individuellement de travailler ensemble,
de créer un groupe et un véritable esprit d’équipe, il faut que la dynamique
collective, représentée par les managers et la Direction, suive cette même ambition.
L’Agence Gare travaille sur cette notion d’intégration des collaborateurs à travers
des « flashs info » et la présentation du nouvel arrivé auprès des collaborateurs du
même service, soit physiquement, soit verbalement. Toutefois, pour que cette
intégration soit encore plus efficace et rapide, il faudrait que le manager vienne
présenter bureau par bureau le nouveau collaborateur, en expliquant les missions de
chacun, en montrant que leurs missions peuvent être conjointes sous certains aspects.
Grâce à cela, le manager aura permis de passer le cap de la timidité traditionnelle
lors de la prise d’une nouvelle fonction, d’établir un premier contact entre les
45
collaborateurs et surtout d’inciter l’intérêt des uns pour les autres. Par conséquent,
dès les premiers instants dans l’entreprise, les collaborateurs auront le sentiment que
l’atteinte des objectifs individuels, ainsi que la réalisation de soi, seront facilitées et
accélérées grâce au travail collectif. Sur le long terme, cela aura aussi un impact sur
les conflits, qui se trouveront réduits, car il n’y aura pas de jalousie entre les individus
du fait que chacun aura besoin de son collègue, et la connaissance du caractère des
autres permettra de fixer des limites sur ce que nous pouvons faire ou non, sur ce que
nous pouvons dire ou non aux collègues.
2.1.2 Le manque de performance sociale synonyme de baisse des
performances économiques
2.1.2.1 Des collaborateurs de moins en moins impliqués par manque
de reconnaissance
Parce qu’ils ne savent pas comment s’y prendre, par peur de tomber dans un
sentimentalisme déplacé, ou simplement parce qu’ils n’en voient pas l’intérêt, beaucoup
de managers témoignent peu leur gratitude ou leur satisfaction à des collaborateurs
qui ont pourtant progressé ou qui se sont surpassés. L’entreprise doit garder à l’esprit
que la réussite de son activité dépend pour une grande partie de la motivation de tous
les acteurs, or pour motiver, il faut informer, fixer des objectifs, définir des règles
claires et des procédures équitables. Il faut également donner les moyens pour
récompenser, évaluer et montrer de la reconnaissance.
Par conséquent, les effets d’un manque de reconnaissance sont nombreux et
apparaissent rapidement. Voyons quelques exemples qui sont observables au sein de la
filiale dans laquelle j’effectue mon alternance.
Nous pouvons constater une baisse d’enthousiasme dans les projets individuels et
communs, réduisant le nombre de personnes motrices dans l’Agence. Certes, cela peut
être expliqué par les refontes organisationnelles actuelles, suite à la fusion des deux
agences et à la volonté de simplifier les structures de l’entreprise. Néanmoins, la
frustration des individus ne peut que s’accroître lorsque l’ensemble de ces
46
changements n’est pas accompagné de valorisation de tout ce qui a été fait jusque
là. Nous évoquerons en partie 2.2.2.2 de ce mémoire la Labellisation des gares, qui est
une récompense à l’implication des collaborateurs dans la démarche qualité. En soit,
cette démarche de Labellisation peut être considérée comme un moyen de motiver
les équipes et de les récompenser pour le travail fournit en terme de satisfaction
client. Toutefois, lorsque les règles d’obtention du Label changent chaque année et que
les agents en gare font, chaque année, leur maximum pour l’obtenir en s’appuyant sur le
niveau d’exigence de l’année précédente, mais qu’ils ne sont pas au niveau des
nouvelles règles et donc n’obtiennent toujours pas le Label, les collaborateurs peuvent
perdre toute motivation. Ainsi, si nous voulons que la démarche persiste, soit suivie et
motivante pour le personnel en gare, il convient d’évaluer au moment de la
Labellisation, non pas seulement l’atteinte quantitative des objectifs nationaux, mais
bien la volonté persistante du personnel à s’investir dans sa gare pour satisfaire les
clients.
Les autres effets du manque de reconnaissance des agents sont la procrastination et la
perte d’esprit d’innovation. Effectivement, si les collaborateurs s’investissent
beaucoup dans leur gare, dans la satisfaction des clients, dans le travail collaboratif,
notamment en étant force de propositions et réactifs lorsque les collègues ont besoin
d’une information particulière, mais qu’à aucun moment ils sont remerciés pour leur
travail, ils risquent de changer rapidement de comportement. Souvent, ce sont d’ailleurs
ces personnes qui étaient initialement des piliers dans le service, qui deviennent les
bêtes noires du manager une fois qu’elles perçoivent ce manque de reconnaissance et en
souffrent. Ainsi, les dysfonctionnements managériaux vont s’enchaîner et le travail
sera fait à minima, hors délai et sans goût ni conviction.
Pour être impliqués dans leur travail, les collaborateurs ont donc besoin d’être
reconnus. À travers cette reconnaissance, les individus vont avoir le sentiment que leurs
activités ont du sens et ont un sens. Aussi, en trouvant la reconnaissance de la part de
l’organisation, l’individu se sent exister dans l’entreprise et reçoit des messages positifs
sur lui, ce qui lui permet de consolider son image, son identité et sa confiance en lui.
La reconnaissance est une façon de manager qui vise à développer une meilleure
coopération, à dégager une plus grande réactivité, en investissant sur l’existence et le
développement de chaque personne. Cependant, la reconnaissance n’est pas érigée en
47
principe formel de management, sa pratique relève de la liberté de chaque manager.
Ainsi, la confiance et la reconnaissance des managers envers leurs collaborateurs
peuvent s’exprimer à travers plusieurs méthodes :
- La prise de responsabilité,
- La délégation,
- L’invitation à déjeuner,
- L’invitation aux événements à l’extérieur de l’établissement,
- La gratification exceptionnelle.
Il est donc important de saisir les occasions qui se présentent pour exprimer sincèrement
des compliments aux collaborateurs. Toutefois, pour que ce feedback ait un impact
positif sur le collaborateur, il est nécessaire qu’il respecte quatre principaux critères.25
La reconnaissance n’est pas toujours spontanée dans les entreprises, de surcroît dans les
grands groupes publics. L’entreprise ferroviaire française n’est pas la seule à en subir
les conséquences sur son activité : quelques années auparavant, le manque de
considération des employés de l’entreprise historique française des télécommunications
avait défrayée les chroniques suite à la vague de suicides de son personnel. Alors que
25
Les 4 critères du focus Manageris 2009 – F002 – « Savez-vous comment exprimer votre satisfaction à vos
collaborateurs ? ».
48
ces derniers s’étaient, des années durant, investis dans l’entreprise, ils se sont retrouvés
mutés dans des régions loin de leur famille, avec des périmètres d’activité plus élargis,
et parfois pour des missions moins qualifiantes. Se sentant méprisés par l’entreprise, ne
trouvant plus de sens dans leur travail et atteints dans leur amour propre, la seule issue
pour certain d’entre eux a été de se donner la mort. Aujourd’hui, le climat de
l’entreprise ferroviaire ne laisse pas présager le remake d’un tel scénario. Néanmoins,
suite à la fusion des deux agences gares, il faudra veiller d’une part à ce que le
personnel tienne moralement et physiquement face à l’accroissement de la charge de
travail, mais aussi à ce que tout ce qu’il fait pour l’entreprise soit reconnu et valorisé.
Dans le cas contraire, l’opération de fusion ne pourra aboutir qu’à un échec humain,
organisationnel et économique.
2.1.2.2 Une gestion des ressources humaines complexifiée
La motivation du personnel va souvent de paire avec l’apparition de conflits dans
l’entreprise. En effet, nous nous trouvons souvent face, dans les grands groupes comme
l’entreprise ferroviaire, à l’absence de structure suffisante et l’orientation trop
braquée sur l’objectif. Mais cette démarche, bien qu’elle puisse laisser espérer une
motivation du personnel par la volonté d’atteindre les objectifs contre rétribution, en
fait oublier l’aspect humain.26
La première conséquence va en être la présence de
conflits lors de la remise des primes, ou de la réduction du niveau de prime d’une année
à l’autre. Ainsi, dans l’entretien n°1 réalisé dans le cadre de la préparation de ce
mémoire (en Annexe n°2), la personne interrogée montre l’impact négatif de ces primes
sur sa motivation, à la fois parce que le montant n’est pas très élevé et semble donc
dérisoire, mais aussi parce que suivant le statut et le niveau hiérarchique, les primes
vont du simple au double. Aussi, un mauvais climat s’était installé lors de la dernière
vague d’entretiens individuels où une personne du service a eu une prime, alors que le
manager lui même reconnaissait qu’elle ne la méritait pas - tout du moins, pas dans sa
totalité - mais qui lui a été attribuée pour ne pas qu’elle se renferme. Ces modes de
rétribution ne sont donc pas toujours positifs pour la bonne cohésion du groupe. Ainsi,
deux principaux problèmes viennent se poser :
26
« Travailler ensemble, c’est se frotter à la différence des autres » - Muriel DUBOIS – Journal du management –
Mars 2005
49
- le manager dispose-t-il des compétences, du charisme, de la confiance en lui
suffisante pour manager des équipes et imposer ses choix, notamment en terme
de rétribution ?
- le système de rétribution ne doit-il pas être encadré par un outil moins
tendancieux et donc plus égalitaire ?
Concernant le second problème, nous verrons que le management socio-économique
dispose d’un outil d’évaluation moins contestable par le personnel, car établi en
collaboration entre le salarié et le manager en début de période, et évalué en fin de
période toujours conjointement. Cet outil s’appelle le Contrat d’Activité
Périodiquement Négociable (CAPN). Nous l’étudierons de manière plus détaillée au
3.2.1.2 de ce mémoire.
Concernant le problème de compétences des managers, cela est révélateur d’une
faille au niveau de la formation de ces derniers. Dans l’entreprise ferroviaire, de
même que dans d’autres grands groupes français, des grilles d’avancement de la
carrière, avec le niveau de qualification et de position salarial sont présentées lors de
l’arrivée dans l’entreprise. Ainsi, les collaborateurs savent qu’ils progresseront dans
cette grille, avec plus ou moins de rapidité selon leur service, le lieu de travail, leur
supérieur hiérarchique ou encore leur qualité de travail. Le dernier critère concernant la
qualité de travail étant toutefois à clarifier, car généralement dans la fonction publique
dont les cheminots, les personnes efficaces et donnant entière satisfaction à leur
responsable ont tendance à rester plus longtemps à un même poste et donc à un même
niveau de qualification. Alors que les personnes donnant une moindre satisfaction à leur
supérieur hiérarchique se trouvent plus facilement « libérés » pour aller sur des postes
plus qualifiants et donc mieux rémunérés, afin de « s’en séparer » du service.
Par conséquent, nous comprenons aisément que ce n’est pas tant la faculté des
personnes à manager des équipes qui est prise en compte pour l’accès à ce type de
fonction, mais plutôt leur ancienneté, voire l’envie de leur manager de ne plus travailler
avec eux. Ces individus ne disposent donc pas systématiquement des pré requis
nécessaires pour être un bon manager (motivant, pouvant porter et diffuser la
stratégie de l’entreprise, égalitaire, ou encore à l’écoute de ses collaborateurs) et
peuvent alors se retrouver à l’origine de conflits dans l’entreprise, voire de mal-être
de certains collaborateurs qui ne se sentent pas pris en considération par leur manager.
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire
 Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire

Contenu connexe

Similaire à Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire

Réussir la mise en place des administrateurs salariés
Réussir la mise en place des administrateurs salariésRéussir la mise en place des administrateurs salariés
Réussir la mise en place des administrateurs salariésLa Fabrique de l'industrie
 
Module 4 Recrutons Notre Premier Apprenti
Module 4  Recrutons Notre Premier ApprentiModule 4  Recrutons Notre Premier Apprenti
Module 4 Recrutons Notre Premier Apprenticaniceconsulting
 
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti caniceconsulting
 
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...NouhailaErrays
 
éducation permanente RSE guillemot_vial
éducation permanente RSE guillemot_vial éducation permanente RSE guillemot_vial
éducation permanente RSE guillemot_vial Val Guillemot
 
La mise en place de la Gestion.docx
La mise en place de la Gestion.docxLa mise en place de la Gestion.docx
La mise en place de la Gestion.docxMeryemImourig
 
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?France Stratégie
 
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...contact Elabe
 
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...Gilles Côme Kouassi
 
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...France Stratégie
 
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...ThomasThiebaudet
 
entrepreneurs et création de réseaux intelligents
entrepreneurs et création de réseaux intelligents entrepreneurs et création de réseaux intelligents
entrepreneurs et création de réseaux intelligents Béatrice Duboisset
 
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...France Stratégie
 
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012Nathalie SALLES
 
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc Majorel
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc MajorelTélétravail et centre de contacts - livre Blanc Majorel
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc MajorelFrdricCANEVET
 
Projet fin d etud la gestion de recrutement
Projet fin d etud la gestion de recrutement Projet fin d etud la gestion de recrutement
Projet fin d etud la gestion de recrutement Jazouli Jaz
 
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...Céline Berthou
 

Similaire à Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire (20)

Réussir la mise en place des administrateurs salariés
Réussir la mise en place des administrateurs salariésRéussir la mise en place des administrateurs salariés
Réussir la mise en place des administrateurs salariés
 
Module 4 Recrutons Notre Premier Apprenti
Module 4  Recrutons Notre Premier ApprentiModule 4  Recrutons Notre Premier Apprenti
Module 4 Recrutons Notre Premier Apprenti
 
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti
FR - Mod 4 Embaucher Notre 1er Apprenti
 
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...
Mémoire. Thème. La gestion des rémunérations, un outil de motivation au servi...
 
éducation permanente RSE guillemot_vial
éducation permanente RSE guillemot_vial éducation permanente RSE guillemot_vial
éducation permanente RSE guillemot_vial
 
Livre blanc de l'auto-entrepreneur
Livre blanc de l'auto-entrepreneurLivre blanc de l'auto-entrepreneur
Livre blanc de l'auto-entrepreneur
 
La mise en place de la Gestion.docx
La mise en place de la Gestion.docxLa mise en place de la Gestion.docx
La mise en place de la Gestion.docx
 
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?
Quelle place pour les compétences dans l’entreprise ?
 
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...
Baromètre 2023 de l’Institut de l’Entreprise sur la relation des Français à l...
 
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...
ELABORATION D'UNE STRATEGIE DE COMMUNICATION POUR LE LANCEMENT D'UNE PLATEFOR...
 
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...
Document de travail - Les organisations du travail apprenantes : enjeux et dé...
 
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...
Comment mettre en place une gestion de projet efficace dans une équipe techni...
 
entrepreneurs et création de réseaux intelligents
entrepreneurs et création de réseaux intelligents entrepreneurs et création de réseaux intelligents
entrepreneurs et création de réseaux intelligents
 
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...
Vision prospective partagée des emplois et des compétences - La filière numér...
 
Guide GPEC
Guide GPECGuide GPEC
Guide GPEC
 
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012
Rapport du froupe d'Experts du SMIC - 2012
 
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc Majorel
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc MajorelTélétravail et centre de contacts - livre Blanc Majorel
Télétravail et centre de contacts - livre Blanc Majorel
 
Projet fin d etud la gestion de recrutement
Projet fin d etud la gestion de recrutement Projet fin d etud la gestion de recrutement
Projet fin d etud la gestion de recrutement
 
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...
La créativité - Le coaching d’équipe pour dynamiser la créativité d’une entre...
 
Entreprise libérée (synthèse documentaire)
Entreprise libérée (synthèse documentaire)Entreprise libérée (synthèse documentaire)
Entreprise libérée (synthèse documentaire)
 

Recherche de la motivation et du bien-être au sein d'une entreprise ferroviaire

  • 1. MÉMOIRE DE MASTER MANAGEMENT DES OPÉRATIONS ET QUALITÉ - SPÉCIALITÉ SÉCURITÉ INDUSTRIELLE ENVIRONNEMENT ET CERTIFICATION LA RECHERCHE DE LA MOTIVATION ET DU BIEN-ÊTRE AU SEIN D’UNE ENTREPRISE FERROVAIRE PRÉSENTÉ ET SOUTENU PAR GRÉGOIRE ÉPINAT LE 6 Septembre 2013 Jury : - BONNET Marc, Adjoint du directeur de l’IAE de Lyon, Responsable pédagogique du programme M2 Sécurité Industrielle Environnement et Certification, Directeur Adjoint de l’ISEOR, Directeur de mémoire - PEREIRA Sébastien, Adjoint Directeur des Gares de la Région Bourgogne Franche Comté, anciennement Animateur Qualité régional de l’entreprise ferroviaire.
  • 2. 2
  • 3. 3 REMERCIEMENTS Je tiens à remercier toute l’équipe pédagogique de l’IAE de Lyon III et d’EUGINOV, de même que les professionnels intervenus dans la formation Master Management des Opérations et Qualité, pour avoir assuré la partie théorique de celle-ci. Je remercie aussi tout particulièrement Monsieur Marc BONNET pour sa disponibilité, le temps passé à l’examen de ce mémoire et à l’écoute de ma soutenance. Qu’il me soit permis d’exprimer mon respect et ma profonde gratitude à Messieurs Sébastien PEREIRA et Michel GENIN, mes tuteurs d’alternance, pour leur accueil chaleureux, leur disponibilité, la confiance qu’ils ont su m’accorder, la patience qu’ils ont su exercer à mon égard et les conseils précieux qu’ils m’ont prodigués tout au long de ce stage. Je tiens aussi à témoigner toute ma reconnaissance à l’ensemble du personnel de l’Agence Centre Est Rhône Alpin, pour l’expérience enrichissante et pleine d’intérêts qu’ils m’ont fait vivre durant ma formation au sein de l’entreprise. Tous sont à l’origine de mes connaissances acquises cette année, tant dans le domaine de la Qualité, que dans ma découverte du monde ferroviaire.
  • 4. 4
  • 5. 5 SOMMAIRE SOMMAIRE..........................................................................................................................................................5 INTRODUCTION................................................................................................................................................7 1. UNE ENTREPRISE EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION.......................................................................9 1.1 L’INFLUENCE DE L’OUVERTURE A LA CONCURRENCE SUR L’ORGANISATION DE L’ENTREPRISE FERROVIAIRE FRANÇAISE .....................................................................................................................................9 1.1.1 Une pression législative européenne encadrant l’ouverture à la concurrence........ 9 1.1.2 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares.............................................15 1.2 UNE NOUVELLE ORGANISATION QUI GENERE UN NOUVEAU MODELE MANAGERIAL.................22 1.2.1 Le personnel en perpétuelle adaptation..................................................................................23 1.2.2 Une motivation entachée par une perte d’identité .............................................................31 2. UNE ORGANISATION DU TRAVAIL À STABILISER......................................................................39 2.1 LES IMPACTS SOCIO-ECONOMIQUES D’UNE ORGANISATION INSTABLE AU SEIN DU SIEGE REGIONAL.............................................................................................................................................................39 2.1.1 Le bien-être et la motivation difficilement atteignables..................................................39 2.1.2 Le manque de performance sociale synonyme de baisse des performances économiques.........................................................................................................................................................45 2.2 LES EFFETS DE LA FRAGILITE DU SYSTEME INTERNE SUR LA SATISFACTION EXTERNE............52 2.2.1 Les risques d’une perte de motivation du personnel sur la satisfaction des clients dans une entreprise de services...................................................................................................................52 2.2.2 La satisfaction des clients internes comme levier de satisfaction des clients externes...................................................................................................................................................................57 3. UN PROJET POUR REDYNAMISER LE PERSONNEL.....................................................................65 3.1 DES OUTILS ET METHODES EN MAIN MAIS DONT LA MISE EN ŒUVRE DEMEURE A REVOIR.....65 3.1.1 Une enquête de motivation du personnel qui nécessite d’être mieux communiquée auprès des agents...............................................................................................................................................65 3.1.2 Un besoin de favoriser davantage le travail collectif.........................................................71 3.2 ROLE DU MANAGER, MOTIVATION, BIEN-ETRE : QUELLE COMBINAISON ECONOMIQUEMENT ADEQUATE?..........................................................................................................................................................77 3.2.1 Le manager en tant que garant de la motivation au travail .........................................77 3.2.2 Un travail sur la motivation et le bien-être permettant des gains économiques pour l’entreprise.................................................................................................................................................84 CONCLUSION :..................................................................................................................................................91 BIBLIOGRAPHIE : ...........................................................................................................................................93 WEBOGRAPHIE :.............................................................................................................................................95 TABLE DES ANNEXES :..................................................................................................................................97 TABLE DES MATIERES...............................................................................................................................119
  • 6. 6
  • 7. 7 Introduction Selon Georg Christoph LICHTENBERG1 , « rien n'est plus insondable que le système de motivations derrière nos actions ». En effet, la motivation est une notion abstraite et la tentation de savoir comment la susciter est grande, notamment pour un manager, afin de comprendre comment pousser ses collaborateurs à agir de la manière la plus efficace possible. Selon le Larousse français, la motivation se définit comme les « raisons, intérêts qui poussent quelqu'un dans son action ». Ainsi, il s’agirait de la somme des éléments donnant l’envie à un individu d’accomplir telle ou telle action. Cette notion a pris de l’importance dans le domaine du travail, puisqu’il paraît parfois difficile de réunir suffisamment d’éléments donnant envie à une personne de travailler. L’être humain étant généralement plus enclin aux loisirs. Ainsi, la notion de motivation au travail implique de savoir ce qui déclenche le comportement des individus dans une organisation. Mais, au-delà du simple concept de motivation, les managers doivent garantir la productivité et donc la performance de l’entreprise en impliquant leurs collaborateurs. Cela sous-entend de savoir ce qui maintient ou stoppe un comportement lors de l’accomplissement de l’action. La motivation et le bien-être au travail sont souvent vus comme des facteurs indispensables de productivité et du travail bien fait. Ces dernières années, nous avons assisté à la multiplication des théories et des conseils en la matière. Des cabinets proposent même des formations pour apprendre à motiver les collaborateurs. Pourtant, face à cela, nous assistons à un mal-être de certains individus dans les entreprises, ou encore à l’accroissement des comportements déviants. Cela est assez paradoxal puisque l’on parle toujours du manque de motivation dans les organisations, alors que nombre d’auteurs proposent des « solutions ». De ce fait, il est nécessaire de s’interroger sur la place de la motivation et du bien-être dans une entreprise en constante mutation ces dernières années. En effet, comment garder les collaborateurs au centre de l’entreprise, lorsque cette dernière doit faire face à une situation conjoncturelle difficile suite à la crise économique présente 1 Georg Chritoph LICHTENBERG – 1742 – 1799 – philosophe, écrivain et physicien allemand
  • 8. 8 depuis 2009 et à un contexte nouveau et potentiellement déstabilisant de mise en concurrence ? De prime abord, il est tentant de penser que la motivation est la solution à tous les maux de l’entreprise. Pourtant, pour les acteurs de l’entreprise, la motivation n’est pas un levier managérial en soi. Cela serait prendre le problème à l’envers. En réalité, il paraît plus cohérent de penser que la mise en place d’un ensemble d’outils et de méthodes de pilotage permettront de garantir en premier lieu l’implication des salariés dans le but de performances économiques de l’entreprise, et indirectement, dans un second temps, leur motivation et leur bien-être au travail. Ainsi, dans le cadre de ce mémoire, nous étudierons comment parvenir à la motivation et au bien-être des collaborateurs dans l’entreprise ferroviaire dans laquelle j’effectue mon stage. Pour rattacher ce travail à la réalité de mes missions, nous verrons entre autre comment la démarche qualité en entreprise peut prendre l’étiquette « d’outil de motivation ». Avant toute chose, nous débuterons par présenter l’entreprise avec les différentes évolutions qu’elle a subie depuis 2009, année de la création de la filiale en charge de la gestion des gares françaises. Dans cette partie, nous pourrons découvrir l’étendue des exigences de l’Europe en terme d’organisation des entreprises ferroviaires. Aussi, nous démontrerons que ces changements d’organisation nécessitent un nouveau modèle managérial qui n’est pas du goût de l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise. Dans une seconde partie, nous tâcherons de mettre à jour les différents effets pervers du manque de motivation et de bien-être, tant économiquement qu’au niveau de la satisfaction des clients de l’entreprise ferroviaire. Enfin, nous verrons que l’entreprise dispose dans ses mains, de pratiquement tous les outils permettant de redynamiser les équipes et que l’investissement dans le domaine de la motivation et du bien-être ne doit pas être considéré en terme de coûts pour l’entreprise, mais de gains économiques et sociaux, donc d’avantages compétitifs.
  • 9. 9 1. UNE ENTREPRISE EN PERPÉTUELLE ÉVOLUTION 1.1 L’influence de l’ouverture à la concurrence sur l’organisation de l’entreprise ferroviaire française 1.1.1 Une pression législative européenne encadrant l’ouverture à la concurrence 1.1.1.1 Un cadre concurrentiel sous haute surveillance de la commission européenne. L’entreprise ferroviaire française dispose d’un statut d’EPIC, autrement dit, d’Entreprise Publique à Caractère Industriel et Commercial. Le mot « publique » représente une première entrave aux yeux de la Commission Européenne dans sa lutte contre la non concurrence. En effet, l’étiquette « publique » représente un avantage non négligeable pour l’entreprise ferroviaire dont le Président est nommé par le Président de la République, notamment sur le plan des investissements de cette dernière. Ainsi, lorsque l’entreprise souhaite lever des fonds sur les marchés financiers, sa signature a le même crédit que celle de l’Etat. Autrement dit, les investisseurs ont une totale confiance dans l’entreprise ferroviaire, puisqu’ils savent que l’Etat est garant de ces investissements. D’où, pour l’entreprise, des conditions d’emprunt plus que favorables alors qu’elle enregistre à ce jour 31,5 milliards d’euros de dette. Cependant, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, il devient nécessaire de réglementer la relation entre l’entreprise ferroviaire et l’Etat, pour que toutes les entreprises ferroviaires disposent du même niveau d’équité. Le souhait de la Commission Européenne est de libéraliser le transport ferroviaire français pour en donner l’accès à tous les transporteurs, publics comme privés, français comme étrangers.2 Ce souhait est initialement appuyé sur un traité qui est au fondement de l’Europe, à savoir le Traité de Rome. Ce dernier stipule à l’article 92 que « sont 2 Règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) n° 1191/69 et (CEE) n° 1107/70 du Conseil
  • 10. 10 incompatibles avec le marché commun (…) les aides accordées par l’Etat, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions »3 . À la simple lecture de cet article, on comprend aisément que les entreprises publiques ne sont pas en adéquation avec les fondements européens en terme de libéralisation du marché et donc d’ouverture à la concurrence. Cela semble par ailleurs indiscutable, car quel gouvernement serait assez fou pour favoriser l’entrée d’entreprises extérieures sur le territoire, venant indirectement menacer ses propres richesses nationales ? Concernant le secteur ferroviaire, la Directive européenne de 1997 peut être considérée comme la base de la réforme ferroviaire. L’objectif de cette directive est de clarifier les responsabilités entre l’opérateur ferroviaire et le gestionnaire du réseau. Ainsi, une première entité de l’entreprise ferroviaire française a été créée pour s’occuper exclusivement du réseau ferré français comprenant la mise en service et l’entretien des voies ferrées, l’installation de télécommunications, et la gestion des bâtiments affectés au fonctionnement et à l’entretien du réseau. Cependant, l’entreprise ferroviaire historique garde, en contre partie, la gestion du trafic et des circulations sur le réseau ainsi que le fonctionnement et l’entretien des installations techniques et de sécurité correspondantes. L’entreprise ferroviaire paye alors, depuis cette réforme de 1997, des péages à l’entité gestionnaire du réseau pour l’exploitation et l’entretien des infrastructures. Via cette réforme, on peut donc s’apercevoir que l’entreprise ferroviaire a fait un premier pas vers la libéralisation du secteur ferroviaire, mais qu’elle ne souhaite pas pour autant laisser une totale liberté à l’entité de gestion du réseau ferré français, notamment en gardant sous contrôle la gestion des gares. Cette première directive méritait alors d’être renforcée pour ne pas légitimer ce genre de situation. Ainsi, la Directive Européenne 2001-14 est venue définir les services que tout gestionnaire de gare doit fournir aux exploitants ferroviaires dans le cadre du droit d’accès au réseau. Cette directive a pour objet « les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure ». Ainsi, les Etats 3 Source du Traité de Rome du 25 mars 1957 : http://mjp.univ-perp.fr/europe/1957rome3.htm
  • 11. 11 membres « veillent à ce que les systèmes de tarification et de répartition des capacités de l’infrastructure ferroviaire respectent les principes énoncés dans cette directive et permettent ainsi au gestionnaire de l’infrastructure de commercialiser les capacités de l’infrastructure disponibles et d’en faire une utilisation effective et optimale ».4 A travers cette directive, les dérives qui pourraient aisément voir le jour, notamment concernant la discrimination d’une compagnie nouvelle sur le territoire français, devraient alors se trouver limitées. Cependant, ces directives ne sont réellement efficaces que si les Etats sont dans une démarche allant dans le sens d’une réelle volonté d’ouverture du réseau ferré à la concurrence. En effet, la législation pèse de plus en plus sur les pays européens (dans le cadre de l’Union Européenne), mais elle reste néanmoins relativement souple, étant donné que depuis plus de 15 années de discussions prônant l’ouverture à la concurrence, des pays comme la France, se trouvent encore aux prémices de cette démarche. 1.1.1.2 Une prise en compte de la législation européenne au niveau national Conscient et contraint de rentrer dans la démarche de libéralisation des marchés, le gouvernement français a mis en place deux autorités distinctes pour garantir le respect des règles européennes, qui sont l’Autorité de la Concurrence et l’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires (l’ARAF). De même, une instance complémentaire a été mise en place pour l’occasion : les Assises du ferroviaire. 1) L’autorité de la concurrence : il s’agit d’une autorité administrative indépendante, spécialisée dans l’analyse et la régulation du fonctionnement de la concurrence sur les marchés, et cela pour la sauvegarde de l’ordre public économique. Cet ordre public économique que Gérard FARJAT définit dans son ouvrage L’ordre public économique, comme l’ensemble des règles obligatoires dans les rapports contractuels, relatives à l’organisation économique, aux 4 Extrait de la Directive 2001-14-CE du Parlement européen et du conseil du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité – Source : Journal officiel des Communautés européennes du 15 mars 2001 – L75/29 à L75/46.
  • 12. 12 rapports sociaux et à l’économie interne du contrat, est alors le point central des règles relatives à la concurrence.5 Aujourd’hui, les gouvernements ne doivent plus chercher à protéger leurs entreprises nationales d’une éventuelle concurrence, mais doivent bel et bien veiller à ce qu’aucun facteur économique, politique ou social ne vienne perturber la concurrence. Ainsi, l’autorité de la concurrence, créée en 2009 et agissant au nom de l’Etat, est essentiellement au service du consommateur, dans l’objectif de veiller au libre jeu de la concurrence et de surveiller le bon fonctionnement concurrentiel des marchés aux échelons européens et international. 2) L’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires : L’ARAF a été créée le premier décembre 2010 autour de 4 objectifs bien distincts : Pouvoir réglementaire : éditer les règles générales applicables au secteur ferroviaire, Pouvoir de décisions : tarifs d’accès au Réseau Ferroviaire Français et aux installations, Règlement des différents : l’ARAF peut être saisie en cas de plaintes par tout acteur du système ferroviaire, Pouvoir disciplinaire : enquêtes et auditions, sanctions en cas de non respect des règles et de la tarification applicable. 3) Les Assises du Ferroviaire : Ces Assises ont été lancées le 15 septembre 2011 et ont duré jusqu’à la fin du premier trimestre 2012. Elles peuvent être assimilées à une table ronde à l’initiative de la Ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, et du Ministre chargé des transports pour dresser un état des lieux du système ferroviaire français. Ainsi, des réflexions ont été menées autour de 4 groupes de travail : le ferroviaire français au cœur de l’Europe, la Gouvernance du système ferroviaire, l’économie du ferroviaire et de la filière ferroviaire française. 6 Autrement dit, via ces Assises, le gouvernement montre fermement son 5 Gérard FARJAT : L’Ordre public économique – Librairie générale de droit et de jurisprudence (Évreux) - 1962 6 Nathalie Kosciusko-Morizet – « Pourquoi je convoque des assises ferroviaires » - Source : Article de presse issu de Ville, Rail & Transports du 02 avril 2012.
  • 13. 13 intention de travailler sur le modèle ferroviaire français de demain autour d’un modèle prenant en compte la concurrence et l’équité tant dans les prestations ferroviaires que dans la gestion des ressources humaines. Parmi les contraintes législatives de l’entreprise ferroviaire, cette dernière doit prendre en compte l’article 2141-1 du code des transports qui précise que l’entreprise ferroviaire nationale a pour mission « de gérer de façon transparente et non discriminatoire, les gares de voyageurs qui lui sont confiées par l’Etat ou d’autre personnes publiques et de percevoir à ce titre auprès des entreprises ferroviaires toute redevance ». Dans le prolongement de cet article du code des transports, l’article 5 de la loi 97-135 du 13 janvier 19977 a mené à la séparation entre les immeubles affectés à l’exploitation des services de transport (appartenant à l’entreprise ferroviaire), et les biens constitutifs de l’infrastructure ferroviaire (appartenant alors au Réseau Ferré de France). Toutefois, ce premier morcellement de l’activité ferroviaire française n’est pas suffisant pour marquer une réelle transparence de l’équité au niveau des prestations que l’entreprise française doit fournir à toute entreprise concurrente. Ainsi, à la demande du Premier Ministre qui voulait que l’activité des gares soit séparée de celle de transporteur ferroviaire pour l’ouverture à la concurrence du transport de voyageurs en janvier 2010, une nouvelle entité, ayant pour mission la gestion des gares, a vu le jour le 7 avril 2009. L’objectif de cette nouvelle entité est d’améliorer la qualité de toutes les gares, qu’elles soient rattachées au réseau européen ou bien d’importance secondaire, mais surtout de garantir l’équité de services en gare entre les transporteurs et pour tous les usagers. Toutefois, cette entité reste sous la gestion de l’entreprise ferroviaire nationale qui souhaite garder une main mise sur les gares du réseau français. Ainsi, tout train stationnant ou traversant une gare française, qu’il soit d’exploitation française publique, privée ou étrangère, doit payer à l’entité gestionnaire des gares un « toucher de gare », qui est une taxe que paye chaque compagnie en fonction du type et de la destination du matériel roulant, ou encore des aménagements et des services en gare. Ainsi, via ce fonctionnement l’entreprise ferroviaire française vient répondre à la directive 91/440 de 1991 sur la libéralisation 7 Loi n° 97-135 du 13 janvier 1997 portant création de l’établissement public « Réseau ferré de France en vue du renouveau du transport ferroviaire – Source : www.legifrance.gouv.fr
  • 14. 14 des marchés domestiques, et plus généralement sur la séparation comptable des activités de gestion d’infrastructures et d’exploitation des services de transport.8 De plus, hormis les intérêts comptables de cette séparation entre les deux activités, la crédibilité de l’entreprise ferroviaire française au niveau de l’ouverture à la concurrence se trouve accrue du fait que les entreprises concurrentes ne payent pas directement l’entreprise ferroviaire, mais l’entité gestionnaire des gares. Donc naturellement, le sentiment de traitement inégal de l’accès aux gares françaises pour les sociétés de transports étrangères devrait s’estomper, bien qu’elles ne soient pas dupes sur ce sujet. Enfin, un autre avantage de cette opération réside dans la dissociation pour le client de l’insatisfaction concernant le service de l’entreprise ferroviaire nationale de transport de passagers, avec l’insatisfaction issue du service en gare qui est traitée par l’entité gestionnaire des gares. Mais encore faut-il que cette distinction soit percevable pour les usagers, donc que ces derniers arrivent à différencier les deux entités. En effet, lorsque l’on cherche « la SNCF et ses gares » sur le plus connu des moteurs de recherche Internet, nous nous apercevons que le nom de l’entité gestionnaire des gares n’apparaît sur aucun des liens proposés. Systématiquement, les gares françaises sont assimilées à l’entreprise ferroviaire. Alors que l’entité gestionnaire des gares met en œuvre de grands travaux de rénovation des gares, l’assimilation de ces dernières à l’entreprise ferroviaire pour les usagers est donc un avantage pour les filiales de transports de voyageurs, qui peuvent jouer sur la qualité des prestations en gare et sur le confort des gares rénovées pour redorer leur image, surtout en cas de perturbations récurrentes sur le réseau ferré et donc pérenniser la fidélité de leurs clients. Pour venir encadrer cette nouvelle entité, le décret 2012-70 du 20 janvier 20129 , relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau ferroviaire, a vu le jour. Ce décret a pour objectif de définir les conditions d’accès des entreprises ferroviaires aux gares de voyageurs et aux infrastructures de services du réseau ferroviaire, et permet de préciser les conditions de réalisation des prestations 8 Directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires – Journal officiel n° L 237 du 24/08/1991 – p 0025 à 0028. Modification par 301J0012 (JO L 075 15.03.2001 p1) 9 Décret n° 2012-70 du 20 janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau ferroviaire – JORF n° 0019 du 22 janvier 2012 page 1291, texte n° 21.
  • 15. 15 régulées en gare. Ce décret vient alors préciser plusieurs points, tels que : - la liste des infrastructures de services du réseau ferroviaire, - la définition du service de base et des prestations complémentaires que les gestionnaires d’infrastructures doivent fournir dans des conditions équitables, - les principes relatifs à la gouvernance de la direction autonome des gares et à la confidentialité, - les conditions d’application des prestations dans les gares de voyageurs. À travers l’ensemble de ces directives, décrets, articles de lois, il est aisé de comprendre que l’entreprise ferroviaire française, qu’elle le souhaite ou non, va devoir appliquer concrètement toute ces mesures sur son fonctionnement, sous peine de sanctions judiciaires. 1.1.2 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares 1.1.2.1 La création d’une filiale en charge de la gestion des gares Comme nous l’avons vu précédemment, la Commission Européenne attend de l’entreprise ferroviaire française une grande transparence dans son fonctionnement (comprenant la gestion, la comptabilité, etc.) Ainsi, comme l’ont fait d’autres pays européens, l’entreprise française a décidé de séparer ses activités de transport à proprement parler, des activités d’infrastructures, avec notamment la création d’une filiale en charge de la gestion des gares. La Commission Européenne n’ayant pas d’exigences particulières en ce qui concerne les modalités de séparation des activités, l’entreprise ferroviaire a décidé de garder sous sa direction la filiale en charge de la gestion des gares. Cependant, ce choix n’est pas de son unique ressort. En effet, les instances étatiques disposent d’un pouvoir de décision sur les modalités de gestion et d’appartenance des gares.
  • 16. 16 Cette filiale est donc la cinquième branche de la société ferroviaire. Elle a vu le jour en 2009, avec comme missions la gestion, l’exploitation et le développement des 3029 gares françaises. La filiale et ses 13 000 agents se doivent de travailler de manière transparente, non discriminatoire, équitable, et cela avec l’ensemble des opérateurs qui utilisent les gares10 . Cela passe par la définition d’un cahier des charges, une réflexion sur la coexistence, dans les gares, des entreprises ferroviaires, une offre de service et des tarifs associés regroupant les services de base qu’un opérateur doit trouver dans une gare, et aussi la définition des conditions de répartition des espaces en gare. Tout cela sous la surveillance du gendarme du marché ferroviaire : l’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires. Afin de faciliter le pilotage des équipes en gare, le territoire français a été découpé en 7 agences gares. Ces agences sont les relais du siège de la filiale qui se situe à Paris et ont pour missions de piloter l’exploitation, de préparer l’accueil des nouveaux entrants, de conduire les projets d’aménagement et de développement des gares sur le territoire. Aussi, elles sont secondées par des équipes opérationnelles au sein de 39 établissements voyageurs et unités gares. Chaque agence est composée de trois directions, permettant à la filiale en charge de gestion des gares de couvrir tous les champs d’activités d’une gare, depuis sa gestion quotidienne jusqu’à ses projets d’évolution. 1) La Direction de l’offre de service et de l’exploitation, direction dans laquelle j’effectue mon stage au sein du pôle qualité régional, et dont le rôle est de : • définir et superviser l’offre de service, 10 Loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports – Version consolidée au 01 Décembre 2010
  • 17. 17 • gérer l’espace ferroviaire, commercial et public de la gare, • administrer les concessions et les locations en gare en lien avec la filiale de gestion locative, • assurer la politique d’entretien et de maintenance des bâtiments et des installations. 2) La direction du développement, dont les missions consistent à : • piloter et réaliser les projets du programme national de développement, • proposer la programmation des investissements à partir du recueil de l’analyse et de la consolidation des besoins, • piloter les investissements, c’est à dire la production de l’ensemble des projets du programme national et des programmes régionaux (planification, adéquation des moyens, outils de suivi), • apporter l’expertise et assurer l’animation métier sur toute la chaine de compétences nécessaire à la mise en œuvre des projets (montage juridique et financier, administration de projet, conception et réalisation). 3) La direction stratégie et finances, qui : • anime le plan stratégique, • assure la production des comptes et le pilotage économique de la branche et conduit la politique financière, • pilote la programmation pluriannuelle des investissements et mène le processus d’instruction des dossiers, • supervise l’ensemble des processus associés aux prestations régulées11 : relations avec les tiers (autorités de régulation, régions, transporteurs, etc.), élaboration du document de référence du réseau et du cadre tarifaire, • répond aux questions d’ordre juridiques. Ce découpage de la filiale et donc des agences gares en trois directions montre à la fois la complexité du métier, mais aussi la nécessité de collaboration des différentes 11 Prestations régulées : ce sont les prestations qui ne rentrent pas dans le domaine des prestations de base. Autrement dit, les parties prenantes ont le choix d’acheter ces prestations ou pas, contrairement aux prestations de base, qui sont systématiquement réalisées en gare.
  • 18. 18 directions pour l’élaboration et la réalisation des projets. Toutefois, nous verrons par la suite qu’il n’est pas aussi évident de favoriser le travail collaboratif, et que cela peut influer d’une part sur la réalité économique du projet, avec des temps de traitements des dossiers relativement longs, ou encore de mauvaises transmissions des informations entrainant des difficultés à réaliser les projets. D’autre part, cet individualisme pèse sur le moral des collaborateurs et indirectement sur leur motivation et leur bien-être au travail. Pour porter la politique ambitieuse d’amélioration de la qualité de service en gare, et par conséquent accroître la satisfaction des clients, la filiale gestionnaire des gares a rédigé, dès sa création, un projet qui se structure autour de 5 axes. Ces 5 axes ont été déclinés en 10 promesses de services afin de mettre le client au cœur des préoccupations de l’entité. L’objectif est donc de faire des 3029 gares du réseau, des lieux agréables et efficaces, au service des voyageurs, des entreprises ferroviaires et des partenaires privés comme publics. Les 10 promesses de service ainsi proposées par la filiale en charge de la gestion des gares du réseau français sont : Vous trouvez facilement votre train, Vous êtes informés sur les services en gare, Vous changez facilement de mode de transport,
  • 19. 19 Vous êtes informés sur les perturbations, Vous vous déplacez facilement dans la gare, Votre gare est propre et éco-durable, Vous disposez de toilettes propres, Vous profitez de commerces facilitant votre vie, Vous attendez dans des espaces confortables, Vous vous sentez en sécurité dans les gares. Ces 10 promesses sont donc l’un des moyens de réponse donné par l’entité aux attentes d’équités imposées par les autorités européennes de régulation. Ce fonctionnement par promesse est à l’initiative de l’entité gestionnaire des gares pour montrer sa volonté de garantir à la fois l’équité aux transporteurs (qui vont tous bénéficier des mêmes prestations en gare), mais aussi et surtout des services en gare de qualité pour les usagers. Toutefois, l’atteinte de ces 10 promesses nécessite parfois de gros investissements et de longs chantiers de rénovation des gares, d’où un plan d’investissement de 4 à 5 milliards d’euros étendu sur les 10 prochaines années. 1.1.2.2 Un nouveau projet de service qui bouleverse l’organisation du travail Alors que la segmentation des gares, ainsi que les promesses de services étaient enfin suivies par l’ensemble du personnel de la filiale gestionnaire des gares, et cela après 3 années de lutte des managers pour faire imposer ce changement, la démarche se voit totalement remise à plat. En effet, dans le cadre de l’harmonisation européenne de la gestion des infrastructures en gare, illustrée par le Décret gare du 20 Janvier 2012,12 un nouveau projet de service est actuellement en cours d’achèvement. Ce dernier est marqué par 5 grands changements : • passage de 10 à 5 promesses de service13 , 12 Décret n°2012-70 du 20 Janvier 2012 relatif aux gares de voyageurs et aux autres infrastructures de services du réseau ferroviaire. 13 Les 5 promesses de service Gares&Connexions : INFORMATION (les clients ont accès à l’information relative aux trains et à la gare), DÉPLACEMENT (les déplacements des clients en gare et entre leurs modes de transport sont fluides), PROPRETÉ & SURETÉ (l’espace de la gare est propre et sûr), CONFORT (les clients disposent d’un
  • 20. 20 • création d’une rubrique « service à la carte », notamment pour les commerces et l’intermodalité en gare, • création de 3 segments tarifaires (a, b et c) • passage à 3 segments de service et suppression des segments marketing, • nouvelles appellations des gares : Grandes Gares / Moyennes Gares / Gares de Proximité ; et non plus Gares Européennes, Gares Nationales, Gares Régionales, Gares de Proximité, Haltes. Ce projet de service entraîne donc l’ensemble de la filiale en charge de la gestion des gares à revoir son organisation. Effectivement, il ne suffit pas seulement d’attribuer environnement d’attente confortable), SERVICES (les clients ont accès à des services qui mettent à profit leur temps en gare.
  • 21. 21 telle ou telle gare à telle ou telle segmentation. Cette restructuration nécessite de revoir le niveau de service proposé en gare, de traiter avec les autorités organisatrices et plus généralement l’ensemble des parties prenantes, notamment afin d’adapter la tarification avec les services proposés en gare. Aussi, suite à ce nouveau projet de service, c’est toutes les mesures qualité qui vont devoir être remises à jour. Enfin, c’est le personnel travaillant en gare, de surcroit les collaborateurs qui sont en contact avec les compagnies ferroviaires, avec les clients, ou bien même ceux qui sont de près ou de loin impliqués dans la démarche qualité, qu’il va falloir former à nouveau et surtout qu’il va falloir convaincre que ces modifications sont nécessaires, importantes et ont pour objectif de faciliter l’organisation générale de la filiale. C’est ce point qui risque d’être le plus compliqué, notamment avec du personnel qui est relativement hostile au changement dans cette entreprise. Mais au delà des difficultés de management que va entrainer l’application de ce nouveau projet de service, c’est la motivation du personnel qui risque d’être entachée de par cette nouvelle modification de leur habitude et fonctionnement de travail. Dans le même temps, dans l’optique de simplifier l’organisation des agences gares, de responsabiliser les établissements gares, mais aussi de réduire les dépenses de gestion des agences, deux des 7 agences ont fusionné en juin 2013 : l’Agence Rhône- Alpes Auvergne (dans laquelle j’effectue mon stage) et l’Agence Bourgogne Franche Comté. Cette décision de fusionner les deux agences a été officiellement prise le 1er Janvier 2013 par le siège de la filiale. Cette décision, aussi rapide qu’inattendue, a entrainé de nombreuses revendications au sein de ces deux agences. En effet, le personnel de l’Agence Bourgogne Franche Comté (BFC) va être rattachée au siège de l’agence Rhône Alpes Auvergne (RAA) et cela va entrainer des remaniements de postes, des mutations de collaborateurs de BFC, dont le siège est à Dijon, vers le siège lyonnais de RAA. Outre, ces modifications de poste et d’organisation, c’est la rapidité et le manque de communication qui est très mal vécu par les collaborateurs qui se sentent assimilés à des objets que l’on déplace sans prendre en compte leurs avis, ni même parfois leurs contraintes personnelles. Nous verrons d’ailleurs par la suite, que cela va jouer sur la motivation de l’ensemble du personnel et sur leur productivité au travail.
  • 22. 22 1.2 Une nouvelle organisation qui génère un nouveau modèle managérial Nous avons pu voir lors de la précédente sous-partie que deux événements viennent ébranler le mode de fonctionnement admis et suivi par le personnel de la filiale gestionnaire des gares : - le premier touche tout le territoire français, avec une démarche nouvelle tant pour la prestation de services, que pour les mesures qualité de la filiale, - le second touche exclusivement les agences gares de Bourgogne Franche Comté et Rhône Alpes Auvergne, avec des mutations de postes, un changement de rattachement hiérarchique du personnel de l’agence BFC à l’agence RAA, et des collaborateurs qui craignent pour la pérennité de leur poste et/ou de leur qualité de vie (notamment pour ceux dont les postes seront transférés au sein du siège lyonnais de l’Agence RAA). Que ce soit le nouveau projet de service ou la fusion des deux agences, ces changements entrainent des problématiques de management, avec des collaborateurs qui adhèrent de moins en moins au mode de fonctionnement et d'organisation de la filiale, et par conséquent, qui se trouvent affectés moralement, leur faisant perdre leur motivation. Il serait donc intéressant d’essayer de déterminer si ce refus du changement, avec tous les effets néfastes pour l’entreprise, mais surtout pour le bien-être des salariés dans leur travail, est une étape obligatoire et sur laquelle la Direction, les managers ne peuvent rien. Ou bien au contraire, le changement peut-il être accepté à partir du moment où il est accompagné et qu’il implique, depuis ces prémisses jusqu’à ces premiers effets, l’ensemble des collaborateurs ?
  • 23. 23 1.2.1 Le personnel en perpétuelle adaptation 1.2.1.1 Des collaborateurs en mal de management Pour être mobilisateur et fédérateur, un changement ne doit pas se réduire à une simple ambition économique.14 En effet, bien que chacun dans l’entreprise sache que celle-ci n’est justifiée que par sa fonction économique, tout le monde n’est pas forcement prêt à se démener pour la réalisation d’une telle ambition, de surcroît pour les employés dont l’action, au sein de l’entreprise, semble trop déconnectée de cette ambition. Ainsi, même s’il est nécessaire de faire figurer une ambition économique dans le projet d’entreprise, ceci n’est pas suffisant pour faire de ce projet quelque chose de mobilisateur. Par conséquent, d’autres ambitions doivent venir enrichir le projet, telles que : - une ambition sociale, humaine : par cela, nous entendons le développement de la formation de l’ensemble du personnel, l’évolution rapide des carrières, ou encore la mise en place d’un système de récompense toujours plus attractif ; - une ambition technologique, permettant alors à l’entreprise d’être leader sur son marché, d’être à la pointe de la technologie ; - une ambition financière qui est notamment marquée par une notion de profitabilité permettant alors de maintenir une bonne politique d’investissement, mais aussi indirectement de pouvoir récompenser le personnel via la participation et/ou l’intéressement ; - une ambition de service public, marquée notamment par la participation de l’entreprise au développement de l’emploi du pays, ou encore une maîtrise avancée du management socio-économique. Concernant le cas de l’entreprise ferroviaire française et plus précisément de la filiale en charge de la gestion des gares, dont les objectifs sont d’assurer l’équité entre les transporteurs et entre les voyageurs, mais aussi la mise en place d’un nouveau projet de service visant à mieux servir les parties prenantes de l’entreprise lorsqu’elles sont dans le périmètre de la gare ; de même avec la fusion des deux agences (BFC et RAA) dont 14 Georges ARCHIER et Henri Servieyx – “L’entreprise du 3ième type” – Edition du seuil (215 pages) – Avril 1984 – page 47
  • 24. 24 l’une des préoccupations est de favoriser l’action sur le terrain plus que dans les agences ; nous pouvons constater que l’ensemble de ces ambitions est relativement respecté. En effet, avec les changements actuels affectant la filiale, le personnel bénéficie de possibilités de reclassement, de mutation, de formations dans le but d’avoir du personnel en phase avec la nouvelle politique, et cela à tous les niveaux de l’entreprise. Pour ce qui est de l’ambition technologique, étant donné que le cœur de métier de l’EPIC et de ses filiales concerne principalement des prestations de services, la technologie de pointe n’est pas le principal objectif de l’entreprise. Toutefois, de par ses innovations en gare, ses services simplifiant toujours plus la vie des usagers du ferroviaire et leur rendant le transport plus agréable, l’entreprise ferroviaire française peut être considérée comme leader sur le marché (et cela, même en prenant en compte l’arrivée progressive de la concurrence). Enfin, avec ses 160 000 employés en France et un résultat net de 383 millions d’euros en 2012 (contre 125 millions en 2011), nous ne pouvons alors contester aussi bien la rentabilité de l’entreprise, que sa volonté d’être et de rester une entreprise française motrice en termes d’emplois. Le principal problème face au changement, à l’adaptation à la nouvelle politique, réside dans le fait que la participation des salariés dans ce processus de changement n’est pas systématique : cela dépend de l’importance des décisions. De même, le contexte économique, avec les implications sociales sur l’emploi ou sur les conditions de travail, ou encore l’urgence de la décision, sont des notions déterminant l’implication des salariés dans le changement. Nous nous apercevons, au sein de l’entreprise ferroviaire et notamment de la filiale gestionnaire des gares, que les situations économiques difficiles, ou la gestion des urgences, ne sont pas favorables à la conduite participative du changement. Effectivement, concernant l’entité en charge de la gestion des gares, suite aux exigences complexes des autorités européennes, à l’arrivée de la concurrence et tout cela avec d’importantes contraintes économiques, la participation de l’ensemble du personnel sur les conditions de mise en place de la politique d’entreprise se trouve minime. Ainsi, dans le cadre de l’entreprise ferroviaire, les débuts de l’entité et les changements actuels suivent une conception peu participative, proche de la
  • 25. 25 théorie X avancée par Mc Gregor15 , plaçant le personnel principalement dans une position d’exécutant et non pas d’acteur de la démarche. Toutefois, tout comme lors de la création de la filiale en 2009, la participation du personnel au changement se trouve inévitable pour rendre le changement moins brutal, plus acceptable et plus bénéfique. Par conséquent, la conception du management au sein de la filiale finit toujours par diverger vers un mode plus participatif de l’ensemble du personnel, avec une intégration et une appropriation libre pour chaque acteur des modifications de la filiale. Nous pouvons alors dire qu’aujourd’hui la filiale, suivant l’importance des décisions, le contexte économique et le poids des modifications sur l’organisation globale de l’entreprise, jongle entre la théorie X et la théorie Y de Mc Gregor. Toutefois, l’approche participative suppose un pilotage strict, par une instance définissant les objectifs, diffusant l’information et validant les résultats, voire réorientant le travail en fonction des données nouvelles. Ainsi, les responsables de chaque agence ont pour missions d’une part de diffuser l’information provenant des instances de décisions nationales, et d’autre part de suivre et coacher les équipes sur le terrain. Toutefois, la réalité des faits, avec des évolutions continuelles des mesures, des objectifs, de l’organisation, est parfois différente. En effet, les managers peuvent se sentir parfois dessaisis de leur pouvoir de management, lorsque par exemple, la communication du national est trop lente, trop flou, avec beaucoup de modifications, de nombreuses versions, mais aussi lorsqu’il leur faut un certain temps pour s’approprier ce qu’ils doivent communiquer et expliquer à leurs collaborateurs. Nous avons d’ailleurs des illustrations de ces défaillances au sein de la filiale gestionnaire des gares, où le tableau de performance, contenant les objectifs à atteindre durant l’année, est modifié tous les mois jusqu’en juin. Ainsi, il convient de se demander s’il faut communiquer dès le départ auprès des collaborateurs en effectuant une nouvelle communication à chaque version, ou bien s’il est préférable d’attendre la version définitive ? Par conséquent, nous comprenons aisément qu’il n’est pas toujours facile pour les managers d’effectuer leur travail comme il se doit, du fait que le pilotage du siège national n’est pas toujours compatible avec un management de proximité, nécessitant des règles stables. 15 Douglas Mc Grégor (1906 – 1964), docteur en psychologie de l’Université de Harvard, a élaboré une véritable théorie de management basée sur deux conception de l’homme au travail : la théorie X et la théorie Y.
  • 26. 26 Le changement en entreprise ne se limite donc pas seulement à une participation des employés, il passe aussi nécessairement par une consolidation et une remise en cause de l’organisation. Toutefois, cette étape semble être la plus difficile à mettre en place car les managers n’aiment pas toujours que l’on change leurs habitudes, le fonctionnement de l’organisation, et de surcroît, beaucoup d’entre eux estiment qu’ils ne sont pas assez récompensés par rapport à leur implication dans la nouvelle organisation. En effet, la consolidation de l’organisation passe nécessairement par une modification du système de gestion (structure, méthodes de travail, procédures de travail, circuits de décision, modes d’évaluation des performances, systèmes de rémunérations), autrement dit, des instruments de pilotage, de coordination et de contrôle : cœur du fonctionnement des organisations. Si cette modification du système de management n’est pas opérée, alors il y a un risque de décalage entre les actions menées et leur évaluation par les systèmes de mesure de la performance. Par conséquent, l’EPIC ferroviaire français, dans le cadre de sa politique et des nombreuses adaptations de l’entreprise, doit pousser son personnel à s’inscrire pleinement dans l’acceptation et la conformité du nouveau système de gestion, et cela, même si le personnel semble réticent à tout changement concernant sa manière de travailler. Pour cela, la consolidation peut être traitée et appliquée à des degrés et à un rythme différent suivant les acteurs, la localisation géographique des gares, la réticence connue de certaines personnes, etc. Mais aussi, les obstacles rencontrés face au changement, ne pourront être amoindris que si la définition des informations pertinentes est élaborée de manière participative, et que les outils sont conçus avec les acteurs les plus directement concernés. Ainsi, le risque de désintérêt manifesté par les salariés en ce qui concerne le nouveau système de gestion ne pourra que s’en trouver réduit. Enfin, la construction des instruments de pilotage de consolidation de l’organisation doit chercher à répondre aux trois questions suivantes : • Quelles sont les informations pertinentes du point de vue de l’organisation, de l’évaluation et du contrôle de la performance ? • Comment et par qui ces informations peuvent-elles être saisies, formalisées et diffusées ? • Comment articuler ces contraintes nouvelles avec les systèmes existants ?
  • 27. 27 1.2.1.2 Du personnel généralement réticent au changement Il convient à présent de s’intéresser à la manière dont les collaborateurs vivent ces changements. Nous nous intéresserons ici principalement à la fusion entre les deux agences de Bourgogne Franche-Comté et Rhône-Alpes Auvergne. Il existe trois attitudes de base qui s’imposent au personnel face à un changement16 : L’indifférence : cela est possible sous une seule condition : il faut que le changement ne nous impacte d’aucune manière, qu’il ne remette pas en cause nos intérêts, nos choix, nos valeurs, nos privilèges, ni nos acquis. La fuite : nous parlons de négociation de la situation, nous refusons la situation. Cela se traduit alors par une tentative d’y échapper. Le problème étant que le changement est une obligation, la fuite ne peut être que temporaire. La confrontation : cette dernière peut s’illustrer de deux manières différentes : - Nous pouvons soit subir le changement : nous parlons alors de voix passive du changement, nous subissons les attaques de l’extérieur. Néanmoins, subir est une sorte d’acceptation du changement, mais de manière contrainte et forcée. - Soit nous pouvons choisir de gérer ce changement. Nous sommes alors dans la voix active, où nous essayons d’agir. Ici, la démarche est volontaire et nous devenons acteur du changement avec la possibilité de modifier les choses. Au sein de l’entreprise ferroviaire, il est difficile d’avoir des comportements semblables face au changement : les collaborateurs sont tous différents, font des métiers différents, viennent de milieu différents. Par conséquent, les trois attitudes décrites précédemment sont perceptibles. Cependant, l’entreprise ferroviaire est considérée comme une grande famille par les collaborateurs, notamment lorsqu’il s’agit de préserver l’emploi et les avantages du métier. Ainsi, l’attitude de confrontation active est généralement celle qui caractérise le mieux les employés de cette entreprise. Néanmoins, il faut nuancer cela en 16 Cours de processus de changement – Nathalie KRIEF – Enseignante au sein du centre EUGINOV en Master 1 Management des Equipes et Qualité – Chercheur au sein de l’ISEOR.
  • 28. 28 précisant que parmi ces collaborateurs certains sont plus passifs qu’actifs, et suivent les « leaders de l’opposition ». Le fait que personne ne vive le changement de la même manière, et que beaucoup d’employés se trouvent sous la coupe des collaborateurs les plus virulents opposés au changement, mène souvent à un sentiment de mal-être des collaborateurs, qui ne savent finalement plus s’ils sont en opposition parce qu’ils sont intimement persuadés que ce changement n’est bénéfique ni pour eux, ni pour l’entreprise ; ou bien, s’ils sont contre parce qu’il faut être contre par solidarité, mais cela sans aucune conviction profonde. Quelque soit l’état d’esprit des employés, le changement s’opère toujours en passant par 5 grandes étapes : le refus de comprendre, la résistance, la décompression, la résignation et l’intégration (cf : schéma ci-dessous). Ce schéma illustre très bien la fusion entre les agences BFC et RAA. Voyons dans le détail comment cette fusion a été interprétée par les agents. L’annonce a eu lieu début Janvier 2013 conjointement par les directeurs de chaque agence. Ces derniers, qui ont appris par la même occasion qu’aucun d’entre eux ne restera à la tête de l’agence, ont présenté le projet rapidement au personnel et avec beaucoup d’hypothèses sur le devenir concret de l’agence et des fonctions de chaque collaborateur. Cela s’explique par deux principales
  • 29. 29 raisons : la première étant que l’annonce a été faite alors que le projet était à son début et donc qu’il était difficile de le détailler. La seconde relève plus de l’humain, avec deux directeurs d’agences qui, au moment où leurs collaborateurs s’inquiétaient pour leur devenir, devaient faire face à cette même problématique d’incertitude quant à leur propre devenir personnel. Le refus de comprendre : Comme nous venons de le voir, les collaborateurs étaient dans un sombre nuage concernant le maintien de leur poste, leur lieu d’activité (Dijon ou Lyon), l’évolution des fonctions, etc. Aussi, le personnel ne comprenait pas pour quelles raisons les deux agences devaient fusionner, si ce n’est pour des raisons financières. La résistance : La première phase du refus de comprendre a laissé rapidement place à la résistance face à ce changement. Ainsi, les collaborateurs ont fait savoir leur hostilité face à ce projet et leur refus d’y adhérer. Par conséquent, leur travail était beaucoup moins efficace, moins collaboratif, fait sans envie. Aussi, le personnel a rapidement demandé l’intervention du CHSCT pour les appuyer et vérifier la fiabilité du projet. La décompression : Comprenant que l’issue de la fusion serait inévitable, avec les bouleversements que cela entraine pour le personnel, beaucoup d’entre eux sont rentrés en phase de déprime, étaient en pleurs lorsque leurs collègues de la région Rhône Alpes Auvergne les appelaient. Pour beaucoup, cette phase était marquée par de la haine envers leur manager, envers la direction de la filiale, et un certain nombre souhaitait carrément changer de filiale, de région, voire d’entreprise. La résignation : A quelques jours de la fusion (qui a eu lieu le 1er juin 2013), le personnel a en quelque sorte accepté ce changement, et cela a notamment été constaté lors du premier séminaire regroupant les deux anciennes agences (les 28 et 29 mai 2013), où les collaborateurs ont participé aux activités, ont essayé de se connaître mutuellement. Toutefois, peu étaient convaincus par l’organisation proposée par la Direction, et personne ne laissait percevoir un quelconque entrain dans cette fusion.
  • 30. 30 L’intégration : cette phase n’est à ce jour pas atteinte, elle demandera un bon suivi managérial et un certain temps d’adaptation. Néanmoins, le discours fédérateur du nouveau directeur d’agence lors du séminaire, montre un réel désir de la Direction de faire de ces deux agences une seule grande équipe, avec la volonté de placer l’humain au cœur du projet. Cette partie du mémoire nous montre que la filiale gestionnaire des gares doit faire face à de gros changements organisationnels, qui ne sont pas des mieux acceptés pour le moment par les employés. Bien que cela ait un impact important sur la motivation de ces derniers, et que par conséquent leur bien-être professionnel et certainement privé, tout comme la qualité du travail qu’ils réalisent se trouvent affectés, il n’en reste pas moins, que cette phase ne devrait être que passagère. Toutefois, l’intégration au changement pourrait être d’autant plus vite atteinte si le management était mieux adapté à la situation actuelle et qu’il ne restait pas passif et étanche au besoin des collaborateurs d’être encadrés et rassurés.
  • 31. 31 1.2.2 Une motivation entachée par une perte d’identité Comme nous avons pu le constater lors de la partie précédente, la situation dans laquelle se trouvent les employés en ce moment, avec des changements structurels et organisationnels auxquels ils n’adhérent pas encore, ne favorise pas la motivation ni le bien être au travail. Toutefois, ces symptômes de mal-être ne datent pas du projet de service, ni même de la fusion : ces éléments n’ont fait qu’accentuer cet état. Ainsi, nous allons voir, dans la partie suivante, ce qui est à la base de la démotivation au sein de la filiale en charge de la gestion des gares. 1.2.2.1 Un management pas assez proche du personnel L’une des raisons récurrentes de démotivation en entreprise est la mauvaise évaluation de la charge de travail par les managers, que ce soit trop de travail ou pas assez. En effet, si le collaborateur effectue rapidement son travail et qu’il ne sait plus quoi faire pour s’occuper, alors l’ennui vient s’installer dans le quotidien du travail. Inversement, si le collaborateur est surchargé de travail, le stress va l’envahir, il risque alors de mal faire son travail et dans le pire des cas d’être arrêté par son médecin pour cause de burn-out17 . Mais quelque soit le cas, c’est la motivation au travail qui se trouve indirectement entachée. Du côté de la filiale en charge de la gestion des gares au niveau de l’agence gare, le problème est généralement la charge de travail. En effet, le périmètre étant très dense avec 360 gares au niveau de la région Rhône Alpes Auvergne, il est difficile de pouvoir être sur tous les fronts au même moment. Cette situation ne va pas aller en s’arrangeant avec la fusion des deux agences, car le périmètre va passer de 360 à 546 gares, et cela avec une réduction de personnel. Certes, aucun des collaborateurs de l’agence n’a pour objectif de s’occuper de chacune des gares de manière individuelle, 17 Burn-out : épuisement professionnel qui caractérise l’état de la personne ayant atteint ses limites de rendement, généralement à la suite d’un stress aigu et prolongé. En vocabulaire plus familier, on dit des personnes qui sont dans cette situation qu’elles sont “au bout du rouleau”. Les premiers signes du burn-out sont généralement l’absence de motivation personnelle, la perte de créativité et de vigilance au travail, ou encore un comportement lunatique.
  • 32. 32 mais la mauvaise anticipation des dossiers à venir n’aide pas à la régulation de la charge de travail. Toutefois, ce stress et la mauvaise gestion du temps peuvent être imputés aux managers qui fixent des objectifs trop ambitieux et qui ne contribuent pas à leur réalisation. Pour répondre à cela, l’école behaviouriste18 propose de fixer des objectifs faciles à atteindre afin d’obtenir de meilleures chances de réussite. Le problème de cette préconisation est alors que cela risque d’entrainer une démotivation inverse des collaborateurs qui n’auront pas besoin de se surpasser. La juste solution dépend de nombreux facteurs tels que le contexte économique, mais aussi les efforts déjà accomplis. Aussi, que ce soit au cours des entretiens informels que j’ai réalisé dans le cadre de mon mémoire, ou des observations sur le terrain, les collaborateurs évoquent souvent le besoin de reconnaissance de la part de la hiérarchie. En effet, certains ont l’impression que leur travail n’est pas bien pris en compte, ou du moins qu’il n’est pas reconnu à sa juste valeur. Ainsi, ces collaborateurs constatent une charge de travail élevée, des fonctions supplémentaires à leur poste, sans pour autant percevoir d’augmentation de salaire ou d’avantages supplémentaires. « Il y a un trop gros décalage entre l’agent de maitrise et le cadre au niveau du système d’attribution de la prime : pour les cadres, c’est 7% du salaire annuel, alors que pour les autres, c’est maximum 300€ ». 19 À la décharge des managers, il faut dire que le système de rétribution de la filiale est, comme dans la plupart des grands groupes, relativement complexe. En effet, la remise de prime, ou bien l’augmentation de salaire dépend principalement du niveau d’ancienneté dans l’entreprise et du niveau de qualification, permettant alors de déterminer le salaire et le montant des primes en se rapportant à une grille de salaire. 18 Ecole Behavouriste ou comportamentaliste : approche psychologique qui consiste à se concentrer sur le comportement observable déterminé par l’environnement et l’histoire des interactions de l’individu avec son milieu. 19 Extrait de l’entretien n°1 au sein de l’agence – “La recherche de la motivation et du bien-être au travail comme outils de productivité” – Annexe n°2
  • 33. 33 De même, il est important de noter qu’il est rare qu’une personne en entreprise estime son salaire juste par rapport au travail qu’elle fait : elle estimera souvent ne pas être assez payée. Toutefois, bien que les managers ne peuvent pas augmenter le salaire des collaborateurs chaque fois qu’ils accomplissement une tâche supplémentaire ou n’étant pas dans la fiche de poste initiale, il n’en reste pas moins que ce sentiment d’injustice salarial est signe d’autres maux. Par exemple, cela peut être révélateur d’un manque de communication et de points de rencontre entre le manager et son collaborateur, qui fait que les activités sont mal définies et que ce dernier ne comprend pas pourquoi il n’obtient pas une contrepartie qu’il estime juste. Cela est d’autant plus vrai que jusqu’à l’an passé, les collaborateurs n’avaient pas de fiches de poste. Par conséquent, ils autodéterminaient ce qui leur semblait être du travail en lien avec leur fonction et ce qui ne l’était pas (selon eux) et donc qui méritait récompense. Aussi, cette situation peut mettre en exergue un autre problème, très fréquent dans les grandes entreprises, qui est celui de la comparaison aux autres, notamment au vu des avantages accordés à certains. Il est donc important pour le manager de veiller à ce qu’une certaine équité soit respectée, que le montant des primes, à partir du moment où il est à la connaissance de l’ensemble du personnel, soit justifié et expliqué. Cela évitera très certainement le sentiment d’injustice ou encore la jalousie de certains collaborateurs. 1.2.2.2 Un statut de cheminot et une structure d’entreprise inadaptés à la concurrence Tout comme les autres grandes entreprises nationales françaises, l’entreprise ferroviaire va devoir se transformer pour faire face au bouleversement concurrentiel. Cette étape n’est pas des plus simples pour la Direction de l’entreprise, car cette dernière va devoir s’atteler à harmoniser la structure ainsi que la fonction sociale de l’entreprise, en travaillant à l’étude d’une réforme du système ferroviaire20 français, 20 La réforme du Système Ferroviaire est portée par Frédéric Cuvillier, Ministre délégué auprès de la Ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, sous le Gouvernement Ayrault.
  • 34. 34 dont le projet de loi est en préparation et sera mis en application à l’automne 2014 ; et de la mise en place d’un « cadre social harmonisé ».21 Cette étude part d’un constat relativement simple, autour de deux axes: 1. L’équilibre financier du système ferroviaire français n’est pas au rendez- vous, avec une dette de 40 milliards d’euros, répartie entre l’entité en charge du réseau ferré (pour 32 milliards) et l’entreprise ferroviaire (pour 8 milliards). Cette dette s’accroit de 1.5 milliards d’euros chaque année, il convient donc de trouver un moyen de stabiliser cette dette. 2. Alors que l’entreprise ferroviaire publique a bénéficié, depuis son origine, d’avantages importants de par son système de retraite permettant un départ à la retraite des collaborateurs avancé, un aménagement des durées de travail propre à l’entreprise, ou encore un déroulement salarial et des avantages spécifiques, la libéralisation du marché ferroviaire s’accompagne d’un écart de compétitivité de 25 à 30% par rapport aux salariés des opérateurs privés ou des compagnies ferroviaires voisines (schéma ci-dessous). 21 La notion de « cadre social harmonisé » a été défini lors des Assises du Ferroviaires de Décembre 2011, menées par Nathalie Kosiuscko-Morizet, alors en fonction de Ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et des Transports du Gouvernement Fillon.
  • 35. 35 Face à ce constat alarmant, l’entreprise doit trouver des solutions. Ainsi, Frédéric Cuvillier a proposé que la Réforme Ferroviaire soit marquée par la constitution d’un Gestionnaire d’Infrastructure Unifié, qui consistera à regrouper l’entité en charge du réseau avec l’entreprise ferroviaire afin de mettre à profit l’efficacité industrielle des deux opérateurs pour améliorer la performance économique du système et maîtriser son endettement. Parallèlement, le Ministre appelle l’EPIC, toutes ses filiales, ainsi que toutes les parties prenantes du système ferroviaire (y compris l’Etat) à contribuer à ce redressement économique, en visant notamment des économies de gestion et de structures. Aussi, l’étude du Cadre Social Harmonisé a permis de préciser trois aspects : - Les modalités et le contenu d’une harmonisation des normes législatives et règlementaires en matière de durée et d’aménagement du temps de travail entre le personnel de l’entreprise ferroviaire publique française d’une part, et les opérateurs privés de l’autre, - Les dispositions législatives et règlementaires nécessaires à la protection des salariés du secteur en cas d’ouverture à la concurrence par appel d’offres, - L’analyse des spécificités du statut du personnel de l’entreprise ferroviaire publique française au regard des questions posées par l’ouverture à la concurrence. L’enjeu de ce Cadre Social Harmonisé réside donc dans la réduction des écarts de compétitivité entre les salariés au statut de Cheminot et les contractuels, mais surtout entre les employés de l’entreprise ferroviaire publique et les employés des opérateurs privés : il en va de la viabilité et de la survie de l’entreprise. Pour cela, c’est tout le squelette de l’entreprise ferroviaire française qui va devoir être mis à plat, avec la refonte des accords d’entreprise ; de la convention collective nationale, mais aussi des lois et des décrets. Toutefois, le gouvernement est très clair dans ses annonces : ni le statut, ni le régime de retraite ne seront touchés par la Réforme et donc par le Cadre Social Harmonisé : c’est la durée et l’organisation du travail qui seront revus, avec des négociations sur le régime de travail et sur les règles que tout le monde devra respecter.
  • 36. 36 La réponse donnée à ce Cadre Social Harmonisé est la construction d’un dispositif à trois étages qui se complètent : • Etage 1 : au niveau réglementaire, le décret socle commun qui s’appliquera à tous, y compris à l’activité du fret dès lors qu’il sera plus favorable que le décret fret de 2010 • Etage 2 : la convention collective de branche. La négociation de celle-ci se fera entre l’Union des Transports Publics (UTP) qui représente les entreprises de la Branche et les organisations syndicales représentatives de la branche ferroviaire. Et en haut, comme arbitre, l’Etat. • Etage 3 : les accords d’entreprise qui visent à compléter la convention collective par des accords ou des règles spécifiques à chaque entreprise de la branche. Sur ce schéma, nous comprenons aisément, que l’étage où les cheminots ont une certaine influence est le niveau des conventions de branche. Ainsi, cela laisse présager un climat quelque peut tendu entre les syndicats cheminots, qui souhaitent favoriser au maximum les salariés et la Direction de l’entreprise (avec l’Etat) qui souhaitent faire de l’entreprise ferroviaire une entreprise compétitive. Ce qui est certain avec la Réforme Ferroviaire, c’est que chacun va devoir faire des efforts afin de réduire la dette. Mais comment cela sera vécu par les employés ? Seul l’avenir nous le dira.
  • 37. 37 CONCLUSION DE LA PARTIE 1 DES FAITS : • L’entreprise doit faire face à l’ouverture du marché ferroviaire français et à la nécessité d’harmoniser les systèmes ferroviaires européens, cela sous le contrôle des autorités de régulation européennes. • La dette du système ferroviaire français pèse aujourd’hui 40 milliards d’euros et s’alourdie chaque année de 1.5 milliards d’euros. Il y a donc un besoin urgent de réorganiser la structure de l’entreprise afin d’accroitre son efficacité, mais aussi de réduire les coûts de fonctionnement. • Une filiale en charge de la gestion des gares qui a été créée comme réponse à l’ouverture à la concurrence, mais qui doit simplifier son organisation, réduire ses dépenses et se rapprocher du terrain. DES PROBLEMATIQUES : Du personnel qui commence seulement à s’approprier le fonctionnement de la filiale en charge de la gestion des gares, mais qui doit tout reprendre à zéro suite l’arrivée d’un nouveau projet de services, ou encore à la refonte des promesses de service. Dans ce contexte d’adaptation permanente du personnel, ce dernier est de plus en plus réticent au changement. Des managers qui n’arrivent pas toujours à suivre tous les changements de la filiale et plus généralement de l’entreprise, et qui n’aident pas les collaborateurs à adhérer au changement. Une fusion de deux Agences Gares rapide et difficilement comprise par les collaborateurs. Des collaborateurs qui arrivent de moins en moins à trouver leur place dans la société, qui se sentent maltraités par l’entreprise, ce qui favorise l’individualisme et des tensions dans l’entreprise. UN CONSTAT : Le climat social de l’entreprise n’est pas au beau fixe, laissant place à une baisse notable de la motivation et du bien-être au travail.
  • 38. 38
  • 39. 39 2. UNE ORGANISATION DU TRAVAIL À STABILISER La première partie de ce mémoire nous a donc permis de découvrir les grands bouleversements auxquels l’entreprise doit faire face. Parallèlement à ces problématiques, la société ferroviaire doit faire en sorte que l’ensemble de son personnel intègre le changement et y adhère, tout en tâchant de garder en vue que la satisfaction des clients est la base d’une bonne performance. Cela fera l’objet de notre seconde partie. 2.1 Les impacts socio-économiques d’une organisation instable au sein du siège régional 2.1.1 Le bien-être et la motivation difficilement atteignables L’Entreprise ferroviaire, que ce soit au niveau du Groupe ou des filiales, dispose d’un atout considérable : son capital humain. En effet, avec ses 156 000 collaborateurs en 2012, la société bénéficie d’équipes mobilisées et compétentes, permettant de mener des expertises riches, diverses et complémentaires. Néanmoins, comme dans toute entreprise de services comprenant un grand nombre de collaborateurs, le plus délicat est de les faire travailler ensemble et de manière optimale, afin de rendre l’organisation la plus performante et efficiente possible. Pour cela, un esprit d’équipe solide, avec une juxtaposition des compétences est nécessaire. Néanmoins, cela est sans compter sur la complexité organisationnelle du Groupe. 2.1.1.1 Des métiers de spécialistes favorisant l’individualisme L’entreprise ferroviaire française donne au grand public une image d’entreprise familiale, où tous les collaborateurs sont soudés et travaillent main dans la main. Cette image est notamment véhiculée lors des agressions des contrôleurs de train, donnant généralement suite, dans le quart d’heure suivant les faits, à une paralysie du réseau
  • 40. 40 ferré, via le droit de retrait22 dont disposent les agents. La légitimité de l’ensemble des contrôleurs à utiliser ce droit alors qu’ils ne sont pas concernés directement par l’incident, avec tous les impacts de cette décision sur le plan économique pour l’entreprise et surtout par rapport aux clients qui se trouvent bloqués en gare, est un autre débat. Mais il est certain que cela illustre bien les liens forts qu’il peut y avoir entre les cheminots. De même, l’actualité du week-end du 14 Juillet 2013, avec le déraillement d’un train Corail en gare de Brétigny-Sur-Orge, déclenchant un élan de compassion et d’entre-aide entre les cheminots, le montre bien aussi. Toutefois, cette apparence n’est pas systématiquement avérée : les relations de travail entre les cheminots sont parfois beaucoup plus compliquées et complexes que cela. En effet, pour des raisons de transparence de l’activité et des transactions financières au sein de l’entreprise, notamment imposée dans le cadre de l’ouverture européenne du marché ferroviaire, cette dernière se trouve de plus en plus décomposée en entités bien différenciées, avec des fonctions bien précises. Par conséquent, tous les collaborateurs travaillent pour le compte de l’entreprise ferroviaire, mais surtout pour d’autres services et filiales de l’entreprise que les leurs. Par exemple, la filiale en charge de la gestion des gares, va contractualiser avec la filiale en charge du transport de voyageurs à grande vitesse pour un certain niveau de prestations. Ainsi, toute demande de prestation particulière et ponctuelle doit faire l’objet d’un avenant au contrat. Cela pose alors le problème de la relation de travail entre les cheminots qui ne peut plus être spontanée, car chaque instant passé à travailler pour une autre entité de la filiale, doit être planifiée, contractualisée et facturée. Ce fonctionnement très complexe est facteur d’individualisme et de perte de notion de groupe dans l’entreprise, ce qui est antagoniste au travail collaboratif. Revenons au niveau du siège régional de la filiale en charge de la gestion des gares. Le personnel de l’Agence Gare est composé « d’experts » dans chaque métier concernant les gares. Ainsi, nous avons du personnel Qualité, Sécurité Incendie, en charge de la gestion des portes automatiques, ascenseurs et escalateurs, des comptables, 22 Droit de retrait : Article L 4131-1 du Code du Travail : « Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut se retirer d’une telle situation »
  • 41. 41 des concepteurs de projets ou encore des gestionnaires immobiliers. Ces fonctions d’experts consistent à la réalisation des objectifs nationaux, à la diffusion des nouvelles mesures, à être l’intermédiaire entre le personnel en gare et le siège national. Pour le bon exercice de cette fonction, il est nécessaire d’être proche du terrain, en terme de présence physique, mais aussi en terme de réactivité en cas de questionnement en provenance des gares, comme du national. Ainsi, chaque collaborateur de l’Agence Gare doit se déplacer régulièrement dans les gares et cela de manière plus importante depuis la fusion entre l’Agence Gare Rhône-Alpes Auvergne et l’Agence Gare Bourgogne Franche Comté (expliquée dans la première partie du mémoire). La conséquence directe de ces déplacements est que le personnel n’est pas souvent au bureau et donc les liens au travail et les moments de partage se trouvent affaiblis. Aussi, les déplacements fréquents créent un climat de suspicion, car certains collaborateurs se permettent des réflexions, fondées ou non, sur la fréquence trop élevée des déplacements, ce qui peut être parfois interprété comme des vacances déguisées ; ou bien sur la déclaration de découchés que certains considèrent comme une rétribution financière en pensant que les collaborateurs rentrent dormir à leur domicile. « Chacun fait les horaires qu’il veut, les gens profitent du système. Cela crée un sentiment de suspicion et des tensions entre les individus, d’autant plus lorsque les absents ont les plus grosses primes. Il est important que le manager fasse sont travail et sache où sont ses équipes. » 23 Le travail collectif n’est donc pas quelque chose de spontané dans l’Agence et cela est coûteux pour l’entreprise, d’une part parce que cela peut être source de conflits dans le service et donc à la base d’un mal-être dans l’entreprise affectant la performance des individus. D’autre part, parce que les personnes n’ont pas pris l’habitude de communiquer et de coopérer, ce qui mène à des dysfonctionnements organisationnels. Ces dysfonctionnements étant alors à l’origine de retard dans la réalisation des projets, voire de réalisation de projets en décalage avec les attentes et les besoins des uns et des autres, et tout cela suite à une mauvaise communication. 23 Extrait de l’entretien n°2 au sein de l’agence – “La recherche de la motivation et du bien-être au travail comme outils de productivité” – Annexe n°3
  • 42. 42 Le nouveau Directeur d’Agence a pris conscience de cela et souhaite axer la stratégie de l’Agence sur ce point. En effet, lors du séminaire de l’Agence Centre Est Rhône Alpin des 28 et 29 Juin 2013, il a exposé au personnel son constat à ce sujet : « la coopération ne va pas toujours de soi : on doit prendre le réflexe de penser à l’autre. Il faut toujours se demander si j’étais l’autre, qu’est-ce que je pourrais attendre de moi »24 . Le premier moyen de lutte contre l’individualisme installé dans la vie de l’Agence Gare est donc la capacité de chacun à porter attention aux autres. Malheureusement, les mauvaises habitudes étant difficiles à changer, il est alors nécessaire que ce travail de coopération soit aidé par des moments de partages organisés dans le service, par des outils favorisant le travail collectif. Ce point sera détaillé de manière plus précise au point 3.1.2 de ce mémoire - « Un besoin de favoriser le travail collectif ». 2.1.1.2 Le manque de connaissance entre les collaborateurs à l’origine de tensions internes Lors du dernier séminaire de l’Agence Gare en Juin 2013, suite à son constat sur le manque de coopération entre les individus, le Directeur de l’Agence en a déduit quatre grands problèmes au sein de l’entité : - Les collaborateurs ne se connaissent pas assez, - Les collaborateurs ne connaissent pas les structures, ni l’organisation de l’agence, et ce phénomène s’est amplifié suite à la fusion des deux Agences Rhône-Alpes Auvergne et Bourgogne Franche Comté, - Les collaborateurs connaissent mal les enjeux de l’entreprise, de la branche, de l’Agence, - Les collaborateurs ne se connaissent pas eux même. Nous comprenons ainsi qu’il est nécessaire d’apporter ces connaissances aux collaborateurs afin de stimuler à nouveau l’esprit de groupe et cela va commencer par une remise en cause de l’organisation au sein de l’Agence. 24 Intervention plénière de Franck LAFERTE, Directeur de l’Agence Gare Centre Est Rhône Alpin, lors du séminaire annuel de l’Agence – 28 et 29 Juin 2013 – Le Domaine du Rouret - GROSPIERRE
  • 43. 43 Le préalable à la connaissance de nos activités et des activités des autres membres d’un même service, d’une même entreprise, est que les activités de chacun soient définies et connues par tous, ou à défaut que chacun ait connaissance de manière incontestable de ses propres missions. Pour cela, il existe deux principaux documents : - la fiche mission, permettant de décrire le travail à réaliser dans les grandes lignes et représentant un support pour les managers lors des entretiens d’embauche ; - la fiche de poste, qui est établi par le manager, décrivant de manière précise les missions qu’il attend de son collaborateur. Jusque fin 2012, le personnel de l’Agence n’avait pas systématiquement de fiche de poste définie. Ainsi, les fonctions de chacun et les attentes des managers étaient exprimées lors de l’entretien d’embauche et lors des évaluations annuelles mesurant l’atteinte des objectifs. Cela représente un premier souci, car le collaborateur qui n’avait pas envie de réaliser une mission liée à son activité, soit par manque d’intérêt, soit par manque de compétences, ne pouvait pas réellement être contraint de la faire. La seule force contraignante dont disposait le manager était la prime sur objectifs. Aussi, ce mode de fonctionnement pouvait être générateur des conflits que nous avons précédemment cités, notamment sur les remarques quant aux déplacements fréquents de certaines personnes du service. En effet, si la fiche de poste, consultable par chaque membre du service, précisait la nécessité de se déplacer fréquemment pour certains postes, alors les suspicions de « congés masqués » seraient moins grandes. De même, des réunions hebdomadaires, voire mensuelles, service par service, sur les activités de chacun durant la période à venir, en complément aux réunions mensuelles de suivi des objectifs de chaque membre du service, permettraient à nouveau de légitimer les déplacements et par conséquent de déculpabiliser le personnel qui va fréquemment à la rencontre des collaborateurs en gare. Cela est très important, d’une part pour les employés qui se déplacent régulièrement et qui peuvent être atteints par les remarques de leurs collègues, jouant alors sur leur bien-être au travail. D’autre part, cette manière de travailler consistant à se déplacer pour être proche des acteurs qui sont en contact avec les clients, mais aussi pour connaître les différentes
  • 44. 44 problématiques en gare et s’efforcer d’y remédier, est exemplaire et nécessaire pour fournir une bonne qualité de service aux clients. Effectivement, en étant à l’écoute et attentif à la réalité du terrain, le personnel en gare, tout comme les clients se sentiront d’avantage considérés, et cela impactera forcement la qualité de service et donc la satisfaction des clients. Il convient alors d’encourager la proximité des collaborateurs avec le personnel en gare, et non pas de laisser un climat de suspicion et de mal-être réduire l’organisation de l’entreprise à un mode de fonctionnement tayloriste creusant un fossé entre les têtes pensantes et le personnel réalisant les services. La connaissance des collègues de travail, tout comme le travail dans un climat d’entente et de partage, se met en place dès l’intégration des collaborateurs dans le service. Si personne ne sait qu’un nouveau salarié a rejoint l’équipe, il va être difficile de l’intégrer et de travailler en collaboration avec lui. Suivant les individus, le contact avec les autres personnes est plus ou moins facile. Cela dépend du caractère, de la situation dans laquelle le salarié arrive (période de grève, restructuration, départ d’un collègue très apprécié, etc.) Il convient alors pour le manager et les autres membres du service de connaître sa personnalité afin de mettre en place un climat d’écoute et de partage dans le service. Nous verrons dans la partie 3.1.2 de ce mémoire qu’il existe une méthode appelée « Processus Communication », qui permet de définir le caractère des personnes qui nous entourent dans l’objectif de s’adapter à leur sensibilité, à leurs attentes de l’autre, permettant ainsi de mieux travailler ensemble. Néanmoins, pour que les salariés aient envie individuellement de travailler ensemble, de créer un groupe et un véritable esprit d’équipe, il faut que la dynamique collective, représentée par les managers et la Direction, suive cette même ambition. L’Agence Gare travaille sur cette notion d’intégration des collaborateurs à travers des « flashs info » et la présentation du nouvel arrivé auprès des collaborateurs du même service, soit physiquement, soit verbalement. Toutefois, pour que cette intégration soit encore plus efficace et rapide, il faudrait que le manager vienne présenter bureau par bureau le nouveau collaborateur, en expliquant les missions de chacun, en montrant que leurs missions peuvent être conjointes sous certains aspects. Grâce à cela, le manager aura permis de passer le cap de la timidité traditionnelle lors de la prise d’une nouvelle fonction, d’établir un premier contact entre les
  • 45. 45 collaborateurs et surtout d’inciter l’intérêt des uns pour les autres. Par conséquent, dès les premiers instants dans l’entreprise, les collaborateurs auront le sentiment que l’atteinte des objectifs individuels, ainsi que la réalisation de soi, seront facilitées et accélérées grâce au travail collectif. Sur le long terme, cela aura aussi un impact sur les conflits, qui se trouveront réduits, car il n’y aura pas de jalousie entre les individus du fait que chacun aura besoin de son collègue, et la connaissance du caractère des autres permettra de fixer des limites sur ce que nous pouvons faire ou non, sur ce que nous pouvons dire ou non aux collègues. 2.1.2 Le manque de performance sociale synonyme de baisse des performances économiques 2.1.2.1 Des collaborateurs de moins en moins impliqués par manque de reconnaissance Parce qu’ils ne savent pas comment s’y prendre, par peur de tomber dans un sentimentalisme déplacé, ou simplement parce qu’ils n’en voient pas l’intérêt, beaucoup de managers témoignent peu leur gratitude ou leur satisfaction à des collaborateurs qui ont pourtant progressé ou qui se sont surpassés. L’entreprise doit garder à l’esprit que la réussite de son activité dépend pour une grande partie de la motivation de tous les acteurs, or pour motiver, il faut informer, fixer des objectifs, définir des règles claires et des procédures équitables. Il faut également donner les moyens pour récompenser, évaluer et montrer de la reconnaissance. Par conséquent, les effets d’un manque de reconnaissance sont nombreux et apparaissent rapidement. Voyons quelques exemples qui sont observables au sein de la filiale dans laquelle j’effectue mon alternance. Nous pouvons constater une baisse d’enthousiasme dans les projets individuels et communs, réduisant le nombre de personnes motrices dans l’Agence. Certes, cela peut être expliqué par les refontes organisationnelles actuelles, suite à la fusion des deux agences et à la volonté de simplifier les structures de l’entreprise. Néanmoins, la frustration des individus ne peut que s’accroître lorsque l’ensemble de ces
  • 46. 46 changements n’est pas accompagné de valorisation de tout ce qui a été fait jusque là. Nous évoquerons en partie 2.2.2.2 de ce mémoire la Labellisation des gares, qui est une récompense à l’implication des collaborateurs dans la démarche qualité. En soit, cette démarche de Labellisation peut être considérée comme un moyen de motiver les équipes et de les récompenser pour le travail fournit en terme de satisfaction client. Toutefois, lorsque les règles d’obtention du Label changent chaque année et que les agents en gare font, chaque année, leur maximum pour l’obtenir en s’appuyant sur le niveau d’exigence de l’année précédente, mais qu’ils ne sont pas au niveau des nouvelles règles et donc n’obtiennent toujours pas le Label, les collaborateurs peuvent perdre toute motivation. Ainsi, si nous voulons que la démarche persiste, soit suivie et motivante pour le personnel en gare, il convient d’évaluer au moment de la Labellisation, non pas seulement l’atteinte quantitative des objectifs nationaux, mais bien la volonté persistante du personnel à s’investir dans sa gare pour satisfaire les clients. Les autres effets du manque de reconnaissance des agents sont la procrastination et la perte d’esprit d’innovation. Effectivement, si les collaborateurs s’investissent beaucoup dans leur gare, dans la satisfaction des clients, dans le travail collaboratif, notamment en étant force de propositions et réactifs lorsque les collègues ont besoin d’une information particulière, mais qu’à aucun moment ils sont remerciés pour leur travail, ils risquent de changer rapidement de comportement. Souvent, ce sont d’ailleurs ces personnes qui étaient initialement des piliers dans le service, qui deviennent les bêtes noires du manager une fois qu’elles perçoivent ce manque de reconnaissance et en souffrent. Ainsi, les dysfonctionnements managériaux vont s’enchaîner et le travail sera fait à minima, hors délai et sans goût ni conviction. Pour être impliqués dans leur travail, les collaborateurs ont donc besoin d’être reconnus. À travers cette reconnaissance, les individus vont avoir le sentiment que leurs activités ont du sens et ont un sens. Aussi, en trouvant la reconnaissance de la part de l’organisation, l’individu se sent exister dans l’entreprise et reçoit des messages positifs sur lui, ce qui lui permet de consolider son image, son identité et sa confiance en lui. La reconnaissance est une façon de manager qui vise à développer une meilleure coopération, à dégager une plus grande réactivité, en investissant sur l’existence et le développement de chaque personne. Cependant, la reconnaissance n’est pas érigée en
  • 47. 47 principe formel de management, sa pratique relève de la liberté de chaque manager. Ainsi, la confiance et la reconnaissance des managers envers leurs collaborateurs peuvent s’exprimer à travers plusieurs méthodes : - La prise de responsabilité, - La délégation, - L’invitation à déjeuner, - L’invitation aux événements à l’extérieur de l’établissement, - La gratification exceptionnelle. Il est donc important de saisir les occasions qui se présentent pour exprimer sincèrement des compliments aux collaborateurs. Toutefois, pour que ce feedback ait un impact positif sur le collaborateur, il est nécessaire qu’il respecte quatre principaux critères.25 La reconnaissance n’est pas toujours spontanée dans les entreprises, de surcroît dans les grands groupes publics. L’entreprise ferroviaire française n’est pas la seule à en subir les conséquences sur son activité : quelques années auparavant, le manque de considération des employés de l’entreprise historique française des télécommunications avait défrayée les chroniques suite à la vague de suicides de son personnel. Alors que 25 Les 4 critères du focus Manageris 2009 – F002 – « Savez-vous comment exprimer votre satisfaction à vos collaborateurs ? ».
  • 48. 48 ces derniers s’étaient, des années durant, investis dans l’entreprise, ils se sont retrouvés mutés dans des régions loin de leur famille, avec des périmètres d’activité plus élargis, et parfois pour des missions moins qualifiantes. Se sentant méprisés par l’entreprise, ne trouvant plus de sens dans leur travail et atteints dans leur amour propre, la seule issue pour certain d’entre eux a été de se donner la mort. Aujourd’hui, le climat de l’entreprise ferroviaire ne laisse pas présager le remake d’un tel scénario. Néanmoins, suite à la fusion des deux agences gares, il faudra veiller d’une part à ce que le personnel tienne moralement et physiquement face à l’accroissement de la charge de travail, mais aussi à ce que tout ce qu’il fait pour l’entreprise soit reconnu et valorisé. Dans le cas contraire, l’opération de fusion ne pourra aboutir qu’à un échec humain, organisationnel et économique. 2.1.2.2 Une gestion des ressources humaines complexifiée La motivation du personnel va souvent de paire avec l’apparition de conflits dans l’entreprise. En effet, nous nous trouvons souvent face, dans les grands groupes comme l’entreprise ferroviaire, à l’absence de structure suffisante et l’orientation trop braquée sur l’objectif. Mais cette démarche, bien qu’elle puisse laisser espérer une motivation du personnel par la volonté d’atteindre les objectifs contre rétribution, en fait oublier l’aspect humain.26 La première conséquence va en être la présence de conflits lors de la remise des primes, ou de la réduction du niveau de prime d’une année à l’autre. Ainsi, dans l’entretien n°1 réalisé dans le cadre de la préparation de ce mémoire (en Annexe n°2), la personne interrogée montre l’impact négatif de ces primes sur sa motivation, à la fois parce que le montant n’est pas très élevé et semble donc dérisoire, mais aussi parce que suivant le statut et le niveau hiérarchique, les primes vont du simple au double. Aussi, un mauvais climat s’était installé lors de la dernière vague d’entretiens individuels où une personne du service a eu une prime, alors que le manager lui même reconnaissait qu’elle ne la méritait pas - tout du moins, pas dans sa totalité - mais qui lui a été attribuée pour ne pas qu’elle se renferme. Ces modes de rétribution ne sont donc pas toujours positifs pour la bonne cohésion du groupe. Ainsi, deux principaux problèmes viennent se poser : 26 « Travailler ensemble, c’est se frotter à la différence des autres » - Muriel DUBOIS – Journal du management – Mars 2005
  • 49. 49 - le manager dispose-t-il des compétences, du charisme, de la confiance en lui suffisante pour manager des équipes et imposer ses choix, notamment en terme de rétribution ? - le système de rétribution ne doit-il pas être encadré par un outil moins tendancieux et donc plus égalitaire ? Concernant le second problème, nous verrons que le management socio-économique dispose d’un outil d’évaluation moins contestable par le personnel, car établi en collaboration entre le salarié et le manager en début de période, et évalué en fin de période toujours conjointement. Cet outil s’appelle le Contrat d’Activité Périodiquement Négociable (CAPN). Nous l’étudierons de manière plus détaillée au 3.2.1.2 de ce mémoire. Concernant le problème de compétences des managers, cela est révélateur d’une faille au niveau de la formation de ces derniers. Dans l’entreprise ferroviaire, de même que dans d’autres grands groupes français, des grilles d’avancement de la carrière, avec le niveau de qualification et de position salarial sont présentées lors de l’arrivée dans l’entreprise. Ainsi, les collaborateurs savent qu’ils progresseront dans cette grille, avec plus ou moins de rapidité selon leur service, le lieu de travail, leur supérieur hiérarchique ou encore leur qualité de travail. Le dernier critère concernant la qualité de travail étant toutefois à clarifier, car généralement dans la fonction publique dont les cheminots, les personnes efficaces et donnant entière satisfaction à leur responsable ont tendance à rester plus longtemps à un même poste et donc à un même niveau de qualification. Alors que les personnes donnant une moindre satisfaction à leur supérieur hiérarchique se trouvent plus facilement « libérés » pour aller sur des postes plus qualifiants et donc mieux rémunérés, afin de « s’en séparer » du service. Par conséquent, nous comprenons aisément que ce n’est pas tant la faculté des personnes à manager des équipes qui est prise en compte pour l’accès à ce type de fonction, mais plutôt leur ancienneté, voire l’envie de leur manager de ne plus travailler avec eux. Ces individus ne disposent donc pas systématiquement des pré requis nécessaires pour être un bon manager (motivant, pouvant porter et diffuser la stratégie de l’entreprise, égalitaire, ou encore à l’écoute de ses collaborateurs) et peuvent alors se retrouver à l’origine de conflits dans l’entreprise, voire de mal-être de certains collaborateurs qui ne se sentent pas pris en considération par leur manager.